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15/03/2007 | FRANCE | N°06/00661

France | France, Cour d'appel de Douai, Ct0094, 15 mars 2007, 06/00661


COUR D'APPEL DE DOUAI

TROISIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 15/03/2007

*

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No RG : 06/00661

Jugement (No 2004/4515)

rendu le 08 Décembre 2005

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE

REF : LB/VD

APPELANTE

MUTUELLE L'ENTRAIDE MALADIE

Ayant son siège social

11 Parvis Saint Maurice

59000 LILLE

représentée par la SELARL ERIC LAFORCE, avoué à la Cour

assistée de Me Ludovic DENYS, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE

CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRA

NCE

Ayant son siège social

10 Avenue Foch - BP 369

59020 LILLE CEDEX

représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour

assistée de Me BRUNET de la S...

COUR D'APPEL DE DOUAI

TROISIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 15/03/2007

*

* *

No RG : 06/00661

Jugement (No 2004/4515)

rendu le 08 Décembre 2005

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE

REF : LB/VD

APPELANTE

MUTUELLE L'ENTRAIDE MALADIE

Ayant son siège social

11 Parvis Saint Maurice

59000 LILLE

représentée par la SELARL ERIC LAFORCE, avoué à la Cour

assistée de Me Ludovic DENYS, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE

CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE

Ayant son siège social

10 Avenue Foch - BP 369

59020 LILLE CEDEX

représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour

assistée de Me BRUNET de la SCP BRUNET CAMPAGNE GOBBERS, avocats au barreau de BÉTHUNE

DÉBATS à l'audience publique du 25 Janvier 2007, tenue par Monsieur VERGNE et Madame BERTHIER magistrats chargés d'instruire l'affaire qui ont entendu seuls les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 NCPC).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame AMBROZIEWICZ

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Monsieur VERGNE, Président de chambre

Madame BERTHIER, Conseillère

Monsieur KLAAS, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 15 Mars 2007 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Monsieur VERGNE, Président et Madame AMBROZIEWICZ, Greffière, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 14 décembre 2006

Sur le rapport de Madame BERTHIER, Conseillère.

Suivant arrêté préfectoral du 2 octobre 2000, la fusion de la MUTUELLE du personnel de l'URSSAF et de la MUTUELLE L'ENTRAIDE MALADIE a été approuvée et l'actif et le passif de la MUTUELLE du personnel de L'URSSAF ont été transférés à la MUTUELLE L'ENTRAIDE MALADIE.

Rapidement, la MUTUELLE L'ENTRAIDE MALADIE va néanmoins s'apercevoir d'une absence importante de disponibilités de l'actif par rapport aux chiffres annoncés et le président de la MUTUELLE du personnel de l'URSSAF, Monsieur André B..., va reconnaître avoir alimenté son compte personnel avec les fonds de la MUTUELLE du personnel de l'URSSAF et ce, depuis plusieurs années.

Par jugement devenu définitif du Tribunal Correctionnel de LILLE rendu le 17 janvier 2002, Monsieur B... a été condamné à une peine de 18 mois d'emprisonnement dont douze assortis du sursis et à indemniser la MUTUELLE L'ENTRAIDE MALADIE à hauteur de 196.682,31 €, à titre de dommages et intérêts.

L'instruction pénale a mis en évidence que les détournements de fonds dont s'était rendu coupable Monsieur B... avaient été effectués par l'intermédiaire de deux comptes ouverts auprès de la Caisse Régionale de CRÉDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE, l'un au nom de la MUTUELLE du personnel de l'URSSAF et l'autre au nom de Monsieur B..., sur lequel ce dernier encaissait des chèques tirés sur le compte de la MUTUELLE du personnel de l'URSSAF.

Soutenant que la Caisse Régionale de CRÉDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE avait commis un certain nombre de fautes ayant concouru au préjudice de la MUTUELLE L'ENTRAIDE MALADIE, celle-ci a recherché sa responsabilité devant le Tribunal de Grande Instance de LILLE.

Sur assignation délivrée le 16 octobre 2003, ce Tribunal, par jugement du 8 décembre 2005, a débouté la MUTUELLE L'ENTRAIDE MALADIE de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée à verser à la Caisse Régionale de CRÉDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La MUTUELLE L'ENTRAIDE MALADIE a interjeté appel de ce jugement par déclaration déposée le 2 février 2006.

Par conclusions signifiées le 16 novembre 2006, elle demande à la Cour de réformer le jugement, de condamner la Caisse Régionale de CRÉDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE à lui verser la somme de 196.682,31 € à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, de dire que les règlements opérés par Monsieur B... en exécution du jugement du Tribunal Correctionnel viendront en déduction des condamnations prononcées à l'encontre de la Caisse Régionale de CRÉDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE, de condamner la Caisse Régionale de CRÉDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE à lui payer la somme de

450 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Elle soutient que le banquier a manqué à son obligation de surveillance dans le fonctionnement des comptes dès lors qu'il aurait dû s'apercevoir, en étant normalement diligent, des nombreux et importants transferts de fonds du compte de la MUTUELLE du personnel de l'URSSAF vers celui de Monsieur B... alors même qu'en application des statuts de la mutuelle et du code de la mutualité dont la Caisse Régionale de CRÉDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE devait avoir connaissance s'agissant de dispositions d'ordre public, le président exerce ses fonctions à titre gratuit et ne peut engager de dépenses, seul le trésorier disposant d'un tel pouvoir. Elle précise même que le banquier a fourni à Monsieur B..., par sa négligence, les outils lui permettant d'opérer les détournements de fonds.

Elle prétend que le Tribunal ne pouvait retenir que la MUTUELLE du personnel de l'URSSAF avait concouru à son propre préjudice alors que le Tribunal lui a reconnu la qualité de victime de Monsieur B....

Par conclusions signifiées le 11 octobre 2006, la Caisse Régionale de CRÉDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE demande à la Cour de confirmer le jugement, de débouter la MUTUELLE L'ENTRAIDE MALADIE de l'ensemble de ses demandes et de la condamner à lui verser la somme de 4.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Elle prétend que les statuts de la MUTUELLE du personnel de l'URSSAF qu'elle avait reçus à l'ouverture du compte de celle-ci ne privaient pas le président du pouvoir d'émettre des chèques et que surtout, l'extrait du procès-verbal de la séance du conseil d'administration du 22 janvier 1990 donnait pouvoir à quatre personnes dont Monsieur B... de faire toutes les opérations relatives au fonctionnement du compte et notamment la signature de chèques. Elle soutient qu'elle n'avait donc pas à s'étonner que des chèques aient pu être remis sur le compte personnel de Monsieur B..., compte tenu de son devoir de non ingérence. Elle fait valoir qu'en revanche la mutuelle a fait preuve d'une totale incurie dans le fonctionnement de sa vie sociale puisqu'aucun contrôle de la comptabilité n'a jamais été effectué alors même qu'un organe spécial existait à cet effet en son sein .

SUR CE :

Attendu qu'il est constant que de courant 1994 à courant 2000, Monsieur B... s'est rendu coupable de détournements de fonds, au préjudice de la MUTUELLE du personnel de l'URSSAF dont il était le président, en établissant régulièrement des chèques tirés sur le compte de la mutuelle à l'agence de CRÉDIT AGRICOLE de LOMME qu'il encaissait sur compte personnel à l'agence de CRÉDIT AGRICOLE de SAINT-ANDRÉ ;

Attendu qu'aux termes des statuts de la MUTUELLE du personnel de l'URSSAF dans la version produite par la Caisse Régionale de CRÉDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE qui ne conteste plus en appel en avoir eu connaissance lors de l'ouverture du compte, il ressort que le président "engage les dépenses et signe tous les actes et délibérations" (article 25) cependant que le trésorier "effectue les opérations financières et tient la comptabilité. Il est chargé du paiement des dépenses engagées par le Président et fait encaisser les sommes dues à la Mutuelle (...)" (article 27) ;

Que toutefois, la banque s'est vue remettre une copie conforme, datée du 3 avril 1990, d'un extrait du procès-verbal de la séance du Conseil d'Administration de la MUTUELLE du personnel de l'URSSAF en date du 22 janvier 1990 aux termes duquel il était donné pouvoir à Monsieur B... ainsi qu'à trois autres membres, Premier Vice Président, Trésorier et Trésorier adjoint, de :

"- faire toutes opérations concernant le fonctionnement du compte ouvert à la Caisse Régionale de CRÉDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE, agence de Lomme

- et notamment de :

- déposer toutes sommes (...) et les retirer soit en totalité, soit en partie

- faire tous emplois de fonds et opérer toutes ventes de titres et de valeur et d'en toucher le prix

- signer tous chèques, billets, reçus (...)

- endosser et acquitter tous chèques, billets (...)

- approuver tous règlements et arrêtés de compte",

étant précisé que " les pouvoirs conférés par la présente délibération seront valables jusqu'à révocation expresse notifiée à la Caisse Régionale de CRÉDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE" ;

Que cet extrait était signé par Monsieur B... et un administrateur, Monsieur C... ;

Attendu que la MUTUELLE du personnel de l'URSSAF fait état de ce que ce document était un faux ;

Que toutefois, il apparaît, à l'examen dudit document qui est produit aux débats que celui-ci présentait toutes les apparences de la régularité et que le fait que ce document ait été rempli sur un formulaire fourni par la banque, pratique qui n'apparaît pas en elle-même irrégulière, ne saurait permettre de considérer que le CRÉDIT AGRICOLE a délibérément ou par négligence, fourni à Monsieur B... un outil lui permettant d'opérer ses détournements ;

Attendu que, partant, la banque n'avait pas à avoir son attention particulièrement attirée par les transferts de fonds opérés entre les comptes de la Mutuelle et de son président qui avaient toute l'apparence de la régularité au regard de l'extrait de décision de l'assemblée générale et qu'il ne lui appartenait pas de procéder à la vérification de la conformité de l'extrait de procès-verbal avec le procès-verbal de l'assemblée dès lors que le document présenté n'avait donc aucune apparence douteuse ni d'aller spécialement vérifier la conformité de cet extrait aux dispositions statutaires ou légales applicables ;

Attendu par ailleurs, comme l'a souligné le Tribunal, il ne pouvait être exclu que les sommes transférées correspondent à des remboursements de frais de déplacements ou de séjour exposés dans l'intérêts de la société, tel que prévu à l'article 14 des statuts ;

Qu'en outre, il ne lui appartenait pas de contrôler la nature des dépenses faites par ses clients ou encore de s'enquérir du lieu d'exercice de l'activité du président afin de vérifier si les (prétendus) remboursements de frais mensuels correspondaient à la réalité de ses fonctions ;

Attendu qu'aucune faute ne peut donc être retenue à l'encontre de la Caisse Régionale de CRÉDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE ;

Attendu qu'en revanche, comme l'a exactement dit le Tribunal, la mutuelle a manqué de la vigilance la plus élémentaire alors même qu'elle disposait en son sein d'une commission de contrôle destinée à vérifier la régularité des opérations comptables ; qu'il ressort du rapport, daté du 6 octobre 2000, adressé à la directrice de l'URSSAF et aux membres du Conseil d'administration, et établi par les vice-présidents et le secrétaire de la MUTUELLE L'ENTRAIDE MALADIE en vue des opérations de fusion que "dès les premières investigations" les membres la commission ont constaté que "la majorité des pièces n'est accompagnée d'aucun justificatif nécessaire à la véracité des écritures comptables" (...) les explications évasives du président B... laissent à penser que les versements par chèques bancaires ont été effectués à tort" (...)" ;

Qu'en conclusion du rapport, il était rappelé que "en 1990, il a fallu nommer un nouveau président, Monsieur B... a accepté ces fonctions. En conservant la tenue de la comptabilité, se trouvait réuni sur une même tête l'ensemble des fonctions d'ordonnateur et de payeur. Il faut dire que nous accordions une confiance absolue en notre président" ;

Qu'ainsi, la MUTUELLE du personnel de L'URSSAF a, comme l'a souligné le Tribunal, contribué à son propre préjudice, comme cela ressort des propres observations de ses membres aux termes du rapport précité ; que ces éléments ne faisaient pour autant pas obstacle à la décision pénale concernant Monsieur B... ;

Attendu qu'au vu de ces éléments, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions ;

Attendu que l'indemnité au titre des frais irrépétibles d'appel de la Caisse Régionale de CRÉDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE sera fixée à la somme de 1.000 € ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant en audience publique et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Condamne la MUTUELLE L'ENTRAIDE MALADIE aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP MASUREL THERY LAURENT, avoués,

La condamne à payer à la Caisse Régionale de CRÉDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE la somme de 1.000 Euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

La Greffière, Le Président,

S. AMBROZIEWICZ V. VERGNE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Ct0094
Numéro d'arrêt : 06/00661
Date de la décision : 15/03/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Lille, 08 décembre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2007-03-15;06.00661 ?
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