PL/ SL
COUR D'APPEL de CHAMBÉRY
chambre civile-première section
Arrêt du Jeudi 15 Janvier 2015
RG : 13/ 01517
Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Grande Instance de THONON LES BAINS en date du 16 Mai 2013, RG 10/ 01632
Appelants
M. Pascal X...
né le 16 Juin 1978 à TOURNAI (BELGIQUE), demeurant...-74100 ANNEMASSE
Mme Cécile Y... épouse X...
née le 19 Janvier 1977 à BOURG EN BRESSE (01000), demeurant...-74100 ANNEMASSE
représentés par Me Michel FILLARD, avocat postulant au barreau de CHAMBERY, et Me Pascal BRAUD, avocat plaidant au barreau de THONON-LES-BAINS
Intimés
Me Roger C... ès-qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de Monsieur Salvatore Z..., demeurant...-74100 ANNEMASSE
représenté par la SCP PROUTEAU SIMOND AMBIAUX, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS
SCP JEAN-FRANCOIS D... ET MARIE-LAURE A...- D..., anciennement dénommée SCP J... et K..., dont le siège social est situé...-74890 BONS EN CHABLAIS
représentée par la SCP BOLLONJEON ARNAUD BOLLONJEON, avocats postulants au barreau de CHAMBERY, et la SCP KUHN, avocats plaidants au barreau de PARIS
SA CIC LYONNAISE DE BANQUE, légalement représentée, dont le siège social est situé 8 rue de la République-69001 LYON
représentée par la SCP CABINET DENARIE BUTTIN BERN et ASSOCIES, avocats postulants au barreau de CHAMBERY et la SELARL RIMONDI et ARMINJON, avocats plaidants au barreau de THONON-LES-BAINS
SELARL MJ SYNERGIE représentée par Mes JC H... et FC I..., ès-qualités de mandataires judiciaires et liquidateurs à la liquidation judiciaire de la SARL ODYSSEE, dont le siège social est situé 22 Rue du Cordier-01000 BOURG-EN-BRESSE
représentée par Me Cécile REMONDIN, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et la SELARL BERNASCONI-ROZET-MONNET-SUETY-FOREST, avocats plaidants au barreau de l'AIN
Compagnie d'assurances MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF), dont le siège social est situé 9 rue de l'Amiral Hamelin-75783 PARIS cedex 16
représentée par Me Marie-Luce BALME, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et Me Laurent PRUDON, avocat plaidant au barreau de LYON
SARL ODYSSEE, dont le siège social est situé 13 B chemin du Levant-01210 FERNEY VOLTAIRE
sans avocat constitué
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COMPOSITION DE LA COUR :
Lors de l'audience publique des débats, tenue le 30 septembre 2014 avec l'assistance de Mme Sylvie LAVAL, Greffier,
Et lors du délibéré, par :
- Mme Françoise CUNY, Président,
- Monsieur Pascal LECLERCQ, Conseiller, qui a procédé au rapport
-Madame Viviane CAULLIREAU-FOREL, Conseiller,
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Par acte authentique reçu par Me J..., notaire associé, le 28 décembre 2005, les époux X... ont fait l'acquisition en l'état futur d'achèvement d'un appartement avec cave et garage pour le prix de 196 000 euros dans un ensemble immobilier en rénovation vendu par la Sarl Odyssée, destiné à être soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis, situé à Saint-Cergues (Haute-Savoie).
La société Jean-François D... et Marie-Laure A...- D... vient maintenant aux droits et obligations de Me J....
La vente était assortie d'une garantie intrinsèque d'achèvement.
La date de livraison était fixée au 30 juin 2006.
Pour financer leur acquisition, les époux X... ont souscrit le 28 décembre 2005 un emprunt auprès de la société CIC Lyonnaise de banque, dit « tout habitât en devises », d'un montant de 271 097, 34 CHF.
Le maître de l'ouvrage, la Sarl Odyssée a confié la maîtrise d'oeuvre de l'opération à M. Z..., architecte, assuré par la Maf, le lot gros oeuvre à la société Interbat.
Les acquéreurs exposent qu'ils ont payé des acomptes au delà du stade d'avancement des travaux, et à hauteur d'environ 90 % de leur coût total, soit 176 400 euros, que les travaux ont été arrêtés dès le début de l'année 2007.
Le maître de l'ouvrage a fait appel à un autre maître d'¿ uvre, la société Vision d'archi qui a repris les travaux et a dû les interrompre à nouveau en octobre 2008, dès lors que le maître de l'ouvrage n'était plus en état de payer les factures des entrepreneurs.
Les travaux sont restés en l'état plus de sept ans après la date théorique de livraison.
Par ordonnances des 27 février et 25 septembre 2007, le juge des référés du tribunal de grande instance de Bonneville a ordonné une expertise confiée à M. B....
Le 5 juin 2009, M. Z... a été mis en redressement judiciaire.
Les époux X... ont déclaré leur créance à M. C..., mandataire judiciaire ;
Par ordonnance du 16 mars 2010, le juge commissaire a admis la créance des époux X....
Par jugement du 9 avril 2010, M. Z... a été mis en liquidation judiciaire.
Par arrêt du 22 mars 2011, la cour d'appel de céans a prononcé la nullité de l'ordonnance du juge commissaire et a sursis à statuer sur la déclaration de créance.
Par jugement du 16 mars 2012, le tribunal de commerce de Bourg en Bresse a ouvert le redressement judiciaire de la société Odyssée et désigné la Selarl MJ Synergie comme mandataire judiciaire ;
Les époux X... ont déclaré leur créance au passif de cette société le 3 juillet 2012.
Les époux X... ont saisi le tribunal de grande instance de Thonon les bains.
Par jugement du 16 mai 2013, cette juridiction a :
- prononcé la résolution de la vente en l'état futur d'achèvement,
- fixé la créance de l'acquéreur au passif du redressement judiciaire de la Sarl Odyssée à la somme de 256 900 euros à titre chirographaire,
- débouté les époux X... de leur demande contre la société Jean-François D... et Marie-Laure A...- D...,
- débouté les époux X... de leur demande de fixation de créance au passif de la liquidation judiciaire de M. Z...,
- débouté les époux X... de leur demande contre la Maf,
- prononcé la résolution du contrat de prêt immobilier, condamné, en conséquence, les époux X... à restituer à la banque le capital emprunté, soit la contre valeur en euros de la somme de 271 097, 34 CHF outre intérêts au taux légal capitalisés à compter du 29 mars 2011,
- condamné la banque à restituer aux époux X... le montant des échéances de remboursement de prêt payées par eux, outre intérêts au taux légal capitalisés à compter de l'assignation,
- ordonné la compensation des créances respectives,
- fixé la créance du CIC Lyonnaise de banque au passif de la procédure collective de la société Odyssée à la somme de 10 000 euros à titre chirographaire,
- débouté le CIC Lyonnaise de banque de ses demandes contre la société Jean-François D... et Marie-Laure A...- D... et contre la Maf,
- débouté la société CIC Lyonnaise de banque de ses demandes contre la société Odyssée, la société de notaires et la Maf,
- débouté M. Alain J... de sa demande reconventionnelle de dommages-intérêts,
- condamné la Sarl Odyssée à payer aux époux X... la somme de 3. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens,
- rejeté le surplus des demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Odyssée aux dépens comprenant ceux de référé et d'expertise,
- ordonné la publication du jugement à la conservation des hypothèques d'Annecy.
Le jugement était assorti de l'exécution provisoire.
Les époux X... en ont interjeté appel.
Vu les conclusions responsives et récapitulatives des époux X... du 24 janvier 2014 qui tendent à voir :
- confirmer les dispositions du jugement qui ont prononcé la résolution de la vente en état futur d'achèvement, et prononcé la résolution du contrat de prêt,
- réformer le jugement pour le surplus et, statuant à nouveau,
- condamner la société CIC Lyonnaise de banque à leur payer en restitution le montant représentatif de toutes les échéances de prêt payées par l'emprunteur entre les mains de la banque au titre du prêt dont s'agit, lesdits montants devant être augmentés des intérêts au taux légal depuis chacun des versements,
- dire et juger n'y avoir lieu à compensation entre leur créance et celle de la banque,
- condamner in solidum la Maf et la société de notaires Jean-François D... et Marie-Laure A...- D... à leur payer, sauf à parfaire
1- la somme de 198 000 euros au titre de la restitution du prix et de ses accessoires, augmentés des intérêts légaux depuis chacun des versements,
2- la somme de 194 235, 50 euros à titre de dommages et intérêts, se décomposant ainsi :
* perte de jouissance : 91 935, 50
* perte des impenses mobilières : 25 000
* perte sur renchérissement du foncier : 57 300
* préjudice moral : 20 000
- fixer à la somme de 392 235, 50 euros le montant de leur créance au passif de la liquidation judiciaire de la Sarl Odyssée,
- fixer à la somme de 392 235, 50 euros le montant de leur créance au passif de la liquidation judiciaire de M. Salvatore Z..., et subsidiairement constater que ladite créance a déjà été fixée,
- condamner in solidum la Maf et la société de notaires Jean-François D... et Marie-Laure A...- D... à leur payer les droits et coûts de publication de l'arrêt de résolution de vente d'immeuble à rendre par la Cour d'Appel, dans le délai de 15 jours à compter de la présentation du compte de l'administration fiscale et de la conservation des hypothèques,
Subsidiairement, prononcer la livraison judiciaire, et ordonner une réfaction sur le prix de la vente à hauteur de 70 %, soit la restitution aux époux X... de la somme de 138 600 euros, outre le paiement des dommages et intérêts liés à la perte du droit de jouissance, à la perte des impenses mobilières et au préjudice moral, et condamner en conséquence in solidum la Maf et la société de notaires Jean-François D... et Marie-Laure A...- D... à leur payer sauf à parfaire la somme de 275 535, 50 euros et fixer au passif de la liquidation judiciaire de la Sarl Odyssée et de M. Z... ses créances au même montant,
- dire et juger y avoir lieu à application de l'article 1154 du Code civil du chef des condamnations au pro t de la concluante à l'encontre de toutes parties condamnées,
En toute hypothèse, rejeter toutes demandes, fins et prétentions contraires de la Selarl MJ Synergie ès qualités, de M. C..., ès qualités, de la Maf, de la société CIC Lyonnaise de banque et de la société Jean-François D... et Marie-Laure A...- D...,
- condamner les même in solidum à leur payer la somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi que les entiers dépens, comprenant ceux des ordonnances de référé des 27 février et 25 septembre 2007, le coût des opérations d'expertise de M. B..., les dépens de première instance et ceux de la présente instance, avec distraction pour ces derniers au profit de l'avocat de la concluante en application de l'article 699 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions de la société CIC Lyonnaise de banque du 4 décembre 2013 qui tendent :
- à voir déclarer caduc l'appel des époux X... au visa de l'article 908 du code de procédure civile,
À titre principal, à voir débouter les appelants de leur demande visant à la résolution du contrat de vente en l'état futur d'achèvement et du contrat de prêt,
A titre subsidiaire, à voir débouter les époux X... de leur demande en résolution du contrat de prêt,
Plus subsidiairement, confirmer le jugement déféré, sauf pour voir condamner la société Odyssée in solidum avec l'office notarial et la Maf à lui payer la somme de 87 664, 51 CHF ou sa contre-valeur au jour du paiement et les intérêts au taux légal à compter du 29 mars 2011 outre capitalisation,
- les condamner ou qui mieux le devra à payer une indemnité de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions Selarl MJ Synergie du 13 décembre 2013 qui tendent à :
- lui voir donner acte de ce qu'elle s'en rapporte à justice sur les demandes principales,
- déclarer irrecevable la demande subsidiaire de livraison judiciaire comme nouvelle en appel au sens des dispositions des articles 564 et 565 du code de procédure civile,
Au subsidiaire, débouter les époux X... de leur demande de fixation au passif de la procédure collective,
- condamner la partie succombante au paiement de la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens, avec pour ceux d'appel application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Vu les « conclusions en réplique no 1 » de M. C... du 2 décembre 2013 qui tendent :
- à la confirmation du jugement déféré,
- subsidiairement, à voir déclarer irrecevables les demandes des époux X...,
- plus subsidiairement, à la voir débouter de ses demandes,
- très subsidiairement, à voir condamner la Maf à garantir M. Z... des condamnations pouvant être prononcées contre lui,
- condamner les époux X... à payer une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens ;
Vu les conclusions no1 de la Maf du 2 décembre 2013 qui tendent :
Au principal,
- à voir confirmer les dispositions du jugement qui ont rejeté les demandes contre la Maf,
A tout le moins,
- réduire les indemnités dont la Maf pourrait être débitrice aussi bien en considération du préjudice réel que des plafonds de garantie, à savoir 500 000 euros par sinistre et de 1 500 000 euros par année (2010), et franchise,
- condamner in solidum les époux X... et tous concluants à payer à la Maf une indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions d'intimé no2 rectificatives du 17 février 2014 de la société Jean-François D... et Marie-Laure A...- D... qui tendent à voir :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré, sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire,
A titre principal, déclarer l'action irrecevable pour défaut de publicité de son acte introductif d'instance,
A titre subsidiaire,
- débouter les époux X... de leurs demandes,
- débouter la société CIC Lyonnaise de banque de son appel en garantie et de sa demande de dommages et intérêts,
- condamner les époux X... à payer à la SCP concluante une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, une indemnité de 5 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens de première instance et d'appel dont distraction en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Vu les réquisitions du ministère public qui s'en rapporte à justice par mention au dossier du 25 septembre 2014 ;
sur ce
1- sur la fin de non recevoir tirée de l'article 30-5 du décret du 4 janvier 1955
Attendu que les époux X... justifient avoir publié leur assignation à la conservation des hypothèques d'Annecy le 14 mars 2012, qu'il en résulte que la fin de non recevoir doit être écartée ;
2- sur l'exception de caducité de l'appel
Attendu que selon la société CIC lyonnaise de banque, les époux X... ont interjeté appel le 4 juillet 2013 mais n'ont notifié leurs conclusions que le 10 octobre suivant, soit au delà du délai de trois mois qui leur était imparti ;
Mais attendu qu'en application de l'article 914 du code de procédure civile la société CIC lyonnaise de banque est irrecevable à soulever ce moyen devant la cour, après dessaisissement du conseiller de la mise en état, alors en outre que les époux X... ont conclu le 3 octobre suivant leur déclaration d'appel, et ont fait signifier leurs conclusions aux parties n'ayant pas constitué avocat les 10 et 14 octobre, soit dans le mois suivant l'expiration du délai de trois mois précité, de sorte que l'exception était vouée à l'échec ;
3- sur les demandes contre la Selarl MJ Synergie (Odyssée)
Attendu que la société Odyssée n'est pas en mesure de remplir ses obligations de sorte que les premiers juges ont décidé à juste titre de prononcer la résolution de la vente et de fixer la créance des époux X... au passif de la procédure collective ;
Attendu que les époux X... ont payé partiellement le prix, c'est à dire à hauteur de 176 400 euros ;
Attendu que la demande en paiement des accessoires du prix est présentée de façon « forfaitaire », que toutefois, les frais accessoires sont justifiés dans les termes suivants au vu de la fiche de compte du notaire ;
- frais de constitution du syndicat : 369 + 67
- frais de publication de la vente : 1 238 + 75 + 1
- émoluments et honoraires : 3 515, 94
Total : 5 265, 94
Total de restitution du prix : 181 665, 94
Attendu que les époux X... prétendent obtenir l'indemnisation d'un préjudice de jouissance ;
Attendu que les époux X... produisent un bail d'habitation, qu'ils justifient ainsi avoir payé les loyers d'un même montant que la somme qu'ils réclament en indemnisation de leur préjudice de jouissance, qu'il convient en conséquence de faire droit à la demande ;
Attendu que les époux X... font encore valoir qu'ils ont engagé en pure perte diverses impenses mobilières qui doivent leur être remboursées à hauteur de 25 000 euros ;
Attendu que cette demande doit être rejetée à défaut de tout justificatif ;
Attendu que la demande en paiement d'une somme pour perte sur renchérissement du foncier se fonde sur des hypothèses purement spéculatives et sera donc également rejetée ;
Attendu qu'il y a lieu d'accorder aux époux X... une indemnisation de 10 000 euros pour leur préjudice moral, de sorte que leur créance sera fixée comme suit au passif de la procédure collective :
- restitution du prix : 181 665, 94
- préjudice moral : 10 000
- préjudice de jouissance : 91 935, 50
Total : 283 601, 44 euros,
outre les frais de publication du présent arrêt ;
3- sur les demandes contre le notaire
Attendu que l'un des griefs énoncés par les époux X... suffit à caractériser la faute du notaire qui doit entraîner son entière responsabilité ;
Attendu en effet qu'ils lui reprochent ne pas avoir veillé au respect des conditions de la garantie intrinsèque d'achèvement prévue à l'article R261-18 du code de la construction et de l'habitation ;
Attendu qu'il résulte des termes de l'acte que le notaire a établi un acte de vente sous le régime de l'article R261-18 b) du code de la construction et de l'habitation selon lequel, la garantie d'achèvement peut résulter de la circonstance que les fondations sont achevées et le financement de l'immeuble ou des immeubles compris dans un même programme assuré à concurrence de 75 p. 100 du prix de vente prévu ;
Attendu que selon l'article R261-11 du code de la construction et de l'habitation, la constatation de l'achèvement des fondations est certifiée par un homme de l'art, qu'elle est faite pour chaque immeuble tel que défini à l'article R. 261-10, c'est-à-dire pour chaque bâtiment dans lequel se trouve compris le local vendu ou la partie de ce bâtiment techniquement distincte et réalisable indépendamment des autres parties ;
Attendu que le notaire a méconnu ces dispositions combinées ;
Attendu en effet que l'acte de vente des époux X... mentionne en page 12 :
« Le vendeur déclare expressément que le bâtiment dont dépendent les biens objets de la présente vente est achevé et couvert et le gros ¿ uvre achevé ainsi qu'il résulte d'une attestation de l'architecte en date du 21 décembre 2005 » ;
Attendu que cette formule ne mentionne pas explicitement l'achèvement des fondations pourtant exigé par l'article R261-18 du code de la construction et de l'habitation ;
Attendu que les époux X... avaient acheté un garage, que le notaire ne pouvait ignorer que celui-ci se trouvait dans un bâtiment distinct, dont les fondations ne sont pas construites, ainsi qu'il résulte de l'expertise About ;
Attendu que l'acte énumère en page 11 les documents déposés au rang des minutes du notaire, que l'attestation de l'architecte en question n'y figure pas, que le notaire ne produit pas ce document alors pourtant qu'il lui appartient d'apporter la preuve de l'efficacité de son acte ;
Attendu notamment que selon l'opinion de M. F... au jurisclasseur,
« Cette constatation de l'achèvement des fondations donnera lieu utilement à un dépôt au rang des minutes du notaire rédacteur des actes de vente. » ;
Attendu que M. Z... a consulté un expert, M. G... qui lui a établi une attestation selon laquelle l'attestation délivrée le 21 décembre 2005 (¿) ne peut en aucun cas correspondre à des travaux neufs, lesquels étaient prévus principalement pour la création, outre un bac de rétention, de garages alors que ces ouvrages ne sont toujours pas construits actuellement ;
Attendu qu'il résulte donc de plus fort de l'opinion de cet expert que l'attestation du 21 décembre 2005 ne mentionnait pas l'achèvement des fondations ;
Attendu que le notaire a attesté à tort que les conditions de la garantie intrinsèque d'achèvement étaient remplies, qu'il a ainsi engagé sa responsabilité ;
Attendu que la restitution du prix à la suite d'une résolution d'une vente ne constitue pas un préjudice indemnisable, que le notaire rédacteur de l'acte peut, en cas d'insolvabilité du vendeur, être tenu de garantir la restitution du prix, qu'il doit en outre être condamné à indemniser le préjudice de jouissance et le préjudice moral des époux X... ;
Attendu que le notaire ne peut évidemment pas prétendre au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
4- sur les demandes contre M. C... (Z...)
Attendu que les pièces produites par les parties ne mettent pas en évidence de motifs de retenir sa responsabilité en sa qualité d'architecte de l'opération ;
Attendu que la loi n'impose pas à l'architecte d'une opération de vente en l'état futur d'achèvement l'obligation de contrôler les appels de fonds en fonction de l'avancement du chantier, que sauf dispositions contractuelles contraires, les appels de fonds sont émis par le promoteur sous sa seule responsabilité, qu'en l'espèce, aucun élément de la cause ne permet de dire qu'il en allait autrement ;
Attendu notamment que l'acte de vente prévoit que les fonds doivent être versés directement sur le compte promoteur et que si des fonds sont remis au notaire, celui-ci a mandat pour les verser au compte promoteur, de sorte que ni l'architecte ni le notaire n'ont de rôle à jouer dans la gestion des acomptes ;
Attendu dès lors que la responsabilité de M. Z... ne pourrait être engagée qu'à raison des termes de l'attestation du 21 décembre 2005 ;
Attendu qu'il convient de citer de manière complète l'attestation précédemment évoquée de M. G... :
« L'attestation délivrée ce jour-là par le bureau d'architecture Z... correspond à la nature des bâtiments existants et non à des travaux entrepris depuis l'ouverture du chantier le 15 novembre 2005. Cette attestation ne peut en aucun cas correspondre à des travaux neufs lesquels étaient prévus principalement pour la création, outre un bac de rétention, de garage ; au demeurant, ces ouvrages ne sont toujours pas construits actuellement » ;
Attendu que l'expertise de M. B... ne peut apporter aucun élément utile dans la mesure où cet expert ne semble pas avoir eu en main l'attestation du 21 décembre 2005, qu'au surplus, l'évaluation qu'il donne de l'état d'avancement des travaux, chiffrée en pourcentages, ne fait pas référence aux étapes prévues par le contrat de vente ;
Attendu en conséquence que la fausseté de l'attestation n'est pas établie, qu'il convient de confirmer les dispositions du jugement qui ont rejeté les demandes contre M. C... ès qualités ;
5- sur les rapports entre les époux X... et la banque
Attendu que la résolution de la vente entraîne l'anéantissement du contrat de prêt ;
Attendu que les premiers juges ont fait une application exacte des règles de droit applicables en décidant que d'une part, les époux X... devaient rembourser à la banque le capital emprunté pour financer leur acquisition, et que d'autre part, la banque devait leur restituer les échéances payées depuis l'origine, qu'il y avait lieu à compensation entre ces deux créances ;
Attendu que les premiers juges ont fixé le point de départ des intérêts de retard par une application exacte des dispositions de l'article 1153 du Code civil ;
Attendu qu'il est vrai que l'obligation de restituer inhérente à un contrat de prêt annulé demeurant tant que les parties n'ont pas été remises en l'état antérieur à la conclusion de leur convention annulée, l'hypothèque en considération de laquelle ce prêt a été consenti subsiste jusqu'à l'extinction de cette obligation ;
Attendu toutefois que la compensation est un mode de paiement de sorte que la banque est en droit de l'invoquer même si elle dispose d'une hypothèque ;
6- sur les demandes de la société CIC Lyonnaise de banque
Attendu que les dispositions de l'article L312-12 du code de la consommation sont d'ordre public de sorte que les époux X... ne peuvent y avoir renoncé ;
Attendu que les demandes de la banque sont dirigées contre M. C..., la Selarl MJ Synergie, le notaire, et la Maf ;
Attendu que la nullité de la vente d'un immeuble ayant pour conséquence la nullité du prêt, une banque peut réclamer sur le fondement de l'article 1382 du code civil réparation du préjudice résultant de la perte des intérêts conventionnels auxquels elle avait droit ;
Attendu qu'il convient de débouter la société CIC Lyonnaise de banque de ses demandes contre M. C... puisque la responsabilité de M. Z... ne doit pas être retenue ;
Attendu qu'il convient de faire droit à la demande contre le notaire ;
Attendu que la créance de la société CIC Lyonnaise de banque se fonde sur la responsabilité délictuelle, qu'ainsi, le point de départ des intérêts légaux doit être fixé à la date du présent arrêt ;
Attendu que la société CIC Lyonnaise de banque ne justifie pas et ne prétend même pas avoir déclaré sa créance au passif de la procédure collective de la société Odyssée, qu'en application des dispositions combinées des articles L622-28 et L641-3 du code de commerce, l'instance est suspendue, qu'il convient de surseoir à statuer sur la demande visant à voir fixer la créance au passif de la procédure collective, ordonner la radiation de l'instance qui pourra être réinscrite lorsque la société CIC Lyonnaise de banque aura produit sa déclaration de créance ;
Par ces motifs
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Déclare irrecevable l'exception de caducité de l'appel en application de l'article 914 du code de procédure civile
Déclare recevable l'action en résolution de la vente,
Confirme les dispositions du jugement qui ont :
- prononcé la résolution de la vente en l'état futur d'achèvement,
- débouté les époux X... de leur demande de fixation de créance au passif de la liquidation judiciaire de M. Z...,
- débouté les époux X... de leur demande contre la Maf,
- prononcé la résolution du contrat de prêt immobilier,
- condamné la société CIC Lyonnaise de banque à restituer aux époux X... les échéances payées par eux et les intérêts au taux légal depuis le 18 juin 2010 (date de l'assignation) pour les échéances payées avant cette date, et de la date de chaque échéance pour celles payées après cette date, avec capitalisation dans les termes de l'article 1154 du Code civil,
- ordonné la compensation des créances réciproques de la société CIC Lyonnaise de banque et des époux X...,
- débouté la société CIC Lyonnaise de banque de ses demandes contre la Maf,
- débouté la société Jean-François D... et Marie-Laure A...- D... de sa demande reconventionnelle de dommages-intérêts,
- ordonné la publication du jugement à la conservation des hypothèques d'Annecy,
Réforme pour le surplus, et statuant à nouveau,
Condamne les époux X... à restituer à la banque le capital emprunté, soit l'équivalent en euros du capital de 271 097, 34 CHF outre intérêts au taux légal capitalisés à compter outre intérêts au taux légal à compter du 29 mars 2011, date de notification des conclusions portant demande reconventionnelle,
Condamne la société de notaires Jean-François D... et Marie-Laure A...- D... à payer à la société CIC Lyonnaise de banque la somme de 87 664, 51 CHF ou sa contre-valeur en euros au jour du paiement,
Sursoit à statuer sur la demande de la société CIC Lyonnaise de banque visant à voir fixer sa créance au passif de la procédure collective de la société Odyssée, ordonne la radiation de l'instance qui pourra être réinscrite lorsque cette société aura produit sa déclaration de créance,
Fixe la créance des époux X... au passif du redressement judiciaire de la Sarl Odyssée à la somme de 283 601, 44 euros à titre chirographaire outre les frais de publication du présent arrêt,
Condamne encore la société de notaires Jean-François D... et Marie-Laure A...- D... à garantir les époux X... de la restitution du prix de 181. 665, 94 euros en cas d'insolvabilité de la société Odyssée et à leur payer les sommes suivantes, in solidum avec la société Odyssée :
-10 000 euros en indemnisation de leur préjudice moral,
-91 935, 50 euros en indemnisation de leur préjudice de jouissance,
- le coût de publication du présent arrêt, dans le délai de 15 jours à compter de la présentation du compte de l'administration fiscale et de la conservation des hypothèques ;
Condamne in solidum la société Odyssée et la société de notaires Jean-François D... et Marie-Laure A...- D... à payer aux époux X... une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette le surplus des demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne in solidum la société Odyssée et la société Jean-François D... et Marie-Laure A...- D... aux dépens de référé, d'expertise de première instance et d'appel avec application pour ces derniers de l'article 699 du code de procédure civile.
Ainsi prononcé publiquement le 15 Janvier 2015 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Pascal LECLERCQ, en remplacement de Françoise CUNY, Président, régulièrement empêché, et Sylvie LAVAL, Greffier.
Le Greffier, Le Président,