DEMANDEUR AU REFERE : Monsieur Alain X......75015 PARIS 15 comparant, assisté de Me Jacques MIALON, avocat au barreau de CAEN
DEFENDEUR AU REFERE : Monsieur Jérôme A...... 14400 BAYEUX comparant, assisté de Me Romain GUICHARD, avocat au barreau de PARIS INTERVENANTS :
SARL AURE DU COMMUN, prise en la personne de son gérant 6 rue Saint-Jean 14400 BAYEUX représentée par Me Romain GUICHARD, avocat au barreau de PARIS
SARL AERO CARPIQUET, prise en la personne de son gérant Le Haut de Marcelet 14740 SAINT-MANVIEU-NORREY non comparante
COMPOSITION LORS DES DEBATS : PRESIDENT Monsieur ODY, Président de Chambre, désigné par ordonnance du 23 décembre 2013 pour suppléer le Premier Président,
GREFFIER Madame ANDRE Greffier DEBATS
L'affaire a été appelée à l'audience du 20 Mai 2014 au cours de laquelle elle a été débattue.
ORDONNANCE prononcée publiquement, le 03 Juin 2014, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, et signée par Monsieur ODY, Président de Chambre, et par Madame ANDRE, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. * * *
Le 8 avril 2014, Alain X...a présenté une requête au juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Caen pour être autorisé à faire pratiquer une saisie revendication d'un aéronef DE HAVILLAND, type DH 100 Mk VI Vampire, numéro de série 708. À l'appui de sa requête, l'intéressé a indiqué qu'il avait acquis, depuis le 15 juin 2011, de Jacques B..., ledit appareil. Par ordonnance du 9 avril 2014, le juge de l'exécution a autorisé la saisie revendication sollicitée. Celle-ci a été exécutée le 11 avril 2014, entre les mains de la SARL Aero Carpiquet, dans les locaux de laquelle se trouvait l'avion. Se prétendant seul propriétaire de cet avion, Jérome A...a obtenu l'autorisation d'assigner, d'heure à heure, devant le juge de l'exécution, Alain X..., pour obtenir la mainlevée de la saisie revendication. Par décision du 23 avril 2014, le juge de l'exécution a ordonné la mainlevée de la saisie revendication, autorisée par ordonnance du 7 avril 2014 et opérée le 11 avril 2014. Cette décision a été frappée d'appel, le 30 avril 2014, par Alain X...qui, par acte du 30 avril 2014, a fait assigner Jérome A...pour obtenir le sursis à exécution de la décision du 23 avril 2014, dans l'attente de la décision de la cour d'appel sur son appel au fond. À l'appui de sa demande, le demandeur a, pour l'essentiel, soutenu qu'il avait acquis l'avion litigieux dés le 15 juin 2011 et que seules des difficultés avec le vendeur (Jacques B...) sur les modalités pratiques de remise en état de l'appareil, expliquaient le délai pour en prendre possession. Jérome A...s'est opposé à ces prétentions en affirmant qu'il était le seul acquéreur, dans des conditions régulières, de l'avion et que son adversaire ne pouvait justifier d'aucun élément permettant de le considérer même comme simple propriétaire apparent. L'actuelle procédure a été dénoncée, le 2 mai 2014, à la SARL Aero Carpiquet qui n'est pas intervenue à l'instance. Par contre, la SARL Aure du Commun est intervenue volontairement pour réclamer indemnisation de son préjudice (découlant de l'absence de l'avion dans sa surface de vente) estimé à plus de 32 000 ¿. SUR CE
A titre préliminaire, il convient de souligner le caractère particulier de la demande qui, finalement, aboutirait à privilégier une décision non contradictoire du juge de l'exécution (celle autorisant la saisie revendication) à une décision rendue après débat contradictoire, dans la même cause (celle ordonnant la mainlevée de la saisie revendication).
Il résulte des dispositions de l'article R. 121-22 du code des procédures civiles d'exécution, qu'en cas d'appel, un sursis à l'exécution des décisions prises par le juge de l'exécution peut être demandé au premier président de la cour d'appel. Ce sursis à exécution n'est accordé que s'il existe des moyens sérieux d'annulation ou de réformation de la décision déférée à la cour. La question est donc celle de savoir si la décision rendue par le juge de l'exécution, en date du 23 avril 2014, frappée d'appel, présente des insuffisances telles que son annulation ou sa réformation est probable. Le demandeur évoque, essentiellement, deux arguments. Il soutient, tout d'abord, que le juge n'a pas respecté le principe du contradictoire et, ensuite, qu'il a mal apprécié les pièces produites par les parties d'où il résultait clairement qu'il était le premier acquéreur de l'avion litigieux. L'argument tiré du non-respect du principe du contradictoire repose sur le seul fait que le juge de l'exécution a refusé le renvoi de l'examen de l'affaire au motif que le défendeur (Alain X...) ne pouvait qu'être en possession des pièces utiles puisque c'est lui qui avait, initialement, saisi le juge de l'exécution et puisqu'il avait préparé une assignation au fond pour faire trancher son droit de propriété. Il apparaît par ailleurs, de la simple lecture de la décision critiquée, que le défendeur était représenté par un avocat, que le débat s'est focalisé, comme devant nous, sur les règles particulières de vente des aéronefs et que la quasi totalité des pièces actuellement acquises aux débats ont été produites. Dés lors le contradictoire a, à l'évidence, été respecté et il n'y a pas eu de violation des règles du procès civil, permettant de penser que la décision puisse être annulée pour ce motif. Sur la question de la propriété apparente d'Alain X..., il apparaît que la décision rendue par le juge de l'exécution, justement après un débat contradictoire, ne présente pas d'insuffisance manifeste. En effet, il résulte des dispositions de l'article L6121-2 du code des transports, que la cession de propriété d'un aéronef doit être constatée par écrit et ne produit d'effet à l'égard des tiers que par son inscription au registre français d'immatriculation. Cette inscription au registre français d'immatriculation vaut titre de propriété et doit être effectuée dans un délai de trois mois à compter de la vente. Appliquées à l'espèce, ces règles dérogatoires du droit commun permettent de constater :- que, alors qu'il évoque une vente remontant au 15 juin 2011 (soit presque trois ans) Alain X...n'a pas produit, et ne produit toujours pas, un contrat de vente écrit (le seul document qu'il produit est un n'écrit, effectivement intitulé cession d'un aéronef, mais seulement signé de lui, en sa qualité prétendue d'acquéreur, et donc sans force probante).- que, à l'inverse, Jérome A...produit un acte de vente écrit, daté du 6 mars 2014 et signé de lui mais aussi du vendeur (Jacques B...) portant sur l'appareil litigieux clairement identifié.- que l'actuel demandeur ne justifie pas, au bout de presque trois années, d'une inscription de sa prétendue acquisition au registre français d'immatriculation alors que Jérome A...a fait enregistrer sa qualité de propriétaire dés le 7 mai 2014.- que la liste des précédents propriétaires, sur ce document officiel, ne fait nullement apparaître le nom d'Alain X.... A partir de ces données, le juge de l'exécution ne pouvait que constater qu'il y avait une partie qui présentait toutes les apparences d'un propriétaire régulier et que l'autre partie, qui se contentait d'affirmations pour combattre des documents soit contradictoires, soit officiels, ne pouvait bénéficier de la protection accordée
au propriétaire même simplement apparent et devait donc être déboutée, par le biais d'une mainlevée, de sa demande de saisie-revendication. Il s'agit là d'une décision parfaitement cohérente dont la réformation, certes toujours possible, n'est, en tout cas, pas d'une particulière évidence ou certitude. Le demandeur ne peut donc qu'être débouté de sa demande de sursis à exécution. Contrairement à ce que sollicite, à titre subsidiaire Alain X...nous ne pouvons ordonner « l'annulation de la mutation de l'aéronef opérée frauduleusement le 7 mai 2014 ». En effet, même si notre saisine avait maintenu les effets attachés à la saisie revendication, celle-ci, si elle aboutissait à rendre indisponible l'appareil, n'interdisait nullement l'accomplissement des formalités administratives destinées à parfaire une mutation intervenue antérieurement. L'actuel litige s'inscrit dans la suite de la décision du juge de l'exécution en date du 23 avril 2014, décision à laquelle la SARL Aure du Commun n'était nullement partie. La seule question à nous posée était celle d'un éventuel sursis à exécution de cette décision. Par suite, l'intervention volontaire de la SARL Aure du Commun, pour solliciter réparation d'un préjudice commercial découlant de la non mise à disposition, à des fins publicitaires, de l'avion, n'est pas recevable et ce d'autant plus que, d'une part, au fond, la question de la propriété de l'avion litigieux (qui conditionne l'obtention de dommages intérêts par suite d'un retard de mise à disposition de l'acquéreur) est toujours pendante devant la juridiction compétente et que, d'autre part, c'est bien la saisie revendication et non la demande de sursis à exécution (traitée dans le délai d'environ un mois) qui est à l'origine de l'éventuel préjudice, or cette société n'est pas intervenue devant le juge de l'exécution pour contester la saisie revendication. Ceci étant, le recours aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile est justifié dans son principe au profit du défendeur, à hauteur de 1300 ¿.
PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, par ordonnance mise à la disposition des parties au greffe de la cour d'appel de Caen ;- Déboutons Alain X...de toutes ses demandes ;- Disons irrecevable l'intervention volontaire de la SARL Aure du Commun ;- Condamnons Alain X...à payer à Jérome A..., sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile une somme de 1300 ¿ ;- Condamnons Alain X...aux entiers dépens. Prononcée le trois juin deux mille quatorze et signée par le président et le greffier.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
D. ANDRE H. ODY