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25/03/2008 | FRANCE | N°07/350

France | France, Cour d'appel de Caen, Ct0038, 25 mars 2008, 07/350


ORIGINE : DECISION du Tribunal de Grande Instance d'ARGENTAN en date du 23 Novembre 2006- RG no 04 / 01213

PREMIERE CHAMBRE- SECTION CIVILE ARRET DU 25 MARS 2008

APPELANT :
Monsieur Claude X......

représenté par la SCP GRANDSARD DELCOURT, avoués assisté de Me BLAIS, avocat au barreau D'ARGENTAN

INTIMES :
Madame Jeannine X... épouse Y......

représentée par la SCP PARROT LECHEVALLIER ROUSSEAU, avoués assistée de Me RETAILLE, avocat au barreau D'ALENCON

Maître Z...- D..., prise en sa qualité de liquidateur à la liquidation judici

aire de M. Claude X...... 61300 L AIGLE

représentée par la SCP MOSQUET MIALON D'OLIVEIRA LECONTE, a...

ORIGINE : DECISION du Tribunal de Grande Instance d'ARGENTAN en date du 23 Novembre 2006- RG no 04 / 01213

PREMIERE CHAMBRE- SECTION CIVILE ARRET DU 25 MARS 2008

APPELANT :
Monsieur Claude X......

représenté par la SCP GRANDSARD DELCOURT, avoués assisté de Me BLAIS, avocat au barreau D'ARGENTAN

INTIMES :
Madame Jeannine X... épouse Y......

représentée par la SCP PARROT LECHEVALLIER ROUSSEAU, avoués assistée de Me RETAILLE, avocat au barreau D'ALENCON

Maître Z...- D..., prise en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de M. Claude X...... 61300 L AIGLE

représentée par la SCP MOSQUET MIALON D'OLIVEIRA LECONTE, avoués assistée de la SCP HUAUME- LEPELLETIER- ARIN, avocats au barreau D'ARGENTAN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

M. BOYER, Président de Chambre, rédacteur, Mme CHERBONNEL, Conseiller, Madame ODY, Conseiller,

DEBATS : A l'audience publique du 29 Janvier 2008
GREFFIER : Madame GALAND
ARRET prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 25 Mars 2008 et signé par M. BOYER, Président de Chambre, et Madame GALAND, Greffier

Le 23 novembre 2006, le tribunal de grande instance d'Argentan a statué ainsi :

" Ordonne l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Renée B..., veuve X..., décédée le 10 avril 2001 à Argentan ; Désigne pour y procéder Maître C..., notaire à Argentan, et pour en surveiller les opérations Monsieur Tessereau, Président du Tribunal de Grande Instance d'Argentan ; Dit qu'en cas d'empêchement du notaire ou du magistrat commis, il sera procédé à leur remplacement par ordonnance rendue d'office ou sur requête ; Dit que la renonciation de Madame Y... à la succession de son père ne saurait avoir d'incidence sur ses droits dans la succession de sa mère ; Dit que Madame Y... devra rapporter à la succession la moitié de la valeur de l'immeuble situé..., pour le cas où cet immeuble appartenait à la communauté X... / B... ; Ordonne une expertise... Dit n'y avoir lieu à faire application des sanctions du recel successoral à Madame Y... " ;

Le tribunal relatait :
" Joseph X... et son épouse, née Renée B..., sont décédés respectivement les 21 août 1984 et 10 avril 2001, laissant pour leur succéder leurs deux enfants :- Monsieur Claude X..., aujourd'hui en liquidation judiciaire ;- Madame Jeannine X... veuve Y.... Madame Y... avait renoncé à la succession de son père le 30 septembre 1985. Monsieur et Madame X... avaient fait donation à leur fille Jeannine d'un immeuble à Ecouché. Par actes d'huissier des 23 et 25 novembre 2004, Madame Y... a fait assigner son frère Claude X... ainsi que le liquidateur de ce dernier, Maître Z...- D..., aux fins de partage de la succession de Renée B... veuve X... par l'intermédiaire de Maître E..., notaire à Paris. Elle considère qu'elle a droit aux 3 / 4 de l'immeuble d'Ecouché et sollicite la désignation d'un expert pour en fixer le prix. Elle réclame 5000 euros par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Monsieur X... ne s'oppose pas à l'ouverture des opérations de partage mais demande que ce soit Maître F..., notaire à Chambois, qui en soit chargé. II considère lui aussi avoir droit aux 3 / 4 de l'immeuble d'Ecouché, dans la mesure où sa soeur a renoncé à la succession paternelle. Il ne s'oppose pas à l'expertise. Monsieur X... estime que Madame Y..., en faisant faussement usage du nom de sa mère et de son adresse, a bénéficié de fonds de la succession pour réaliser des placements. Il demande à ce qu'elle subisse les peines du recel successoral. "

Le tribunal a retenu :
sur la donation de l'immeuble d'Ecouché
" faute de production de l'acte de donation et de l'état liquidatif de la succession de Joseph X..., il n'est pas possible en l'état de déterminer les droits de chacune des parties sur cet immeuble.

On se bornera à rappeler que l'article 864 du code civil dispose que la donation faite en avancement d'hoirie à un héritier réservataire qui renonce à la succession est traitée comme une donation préciputaire. La part éventuelle de la donation excédant la quotité disponible de la succession de Joseph X... pourrait donc être réduite. Le Tribunal n'étant saisi que du partage de la succession de Renée B..., il appartiendra en tout état de cause à Madame Y... de rapporter à la succession de celle- ci la moitié de la valeur de l'immeuble, sous réserve que cet immeuble ait effectivement été un bien appartenant à la communauté X... / B.... "

sur le recel successoral :
" Il semble que divers contrats d'assurance- vie CNP et AXA aient été souscrits au nom de " Madame Jeannine X... " ou " Mademoiselle X... " et qu'à cette occasion, des fonds appartenant à Renée X... aient été utilisés. Il semble toutefois que ces contrats ont bien été signés par Renée X.... Il est de surcroît produit un courrier manuscrit de cette dernière qui déclare à sa fille avoir " fait des placements en ton nom ". Il n'est donc pas certain que ce soit Madame Y... qui ait effectué ces placements afin de détourner des biens de la succession. Elle ne saurait donc subir les peines du recel. "

Monsieur Claude X... conclut à la réfomation du jugement en ses dispositions relatives à l'immeuble d'ECOUCHE et au recel successoral, " Statuant à nouveau, Débouter Madame Jeannine X... veuve Y... de ses prétentions relatives à l'immeuble d'ECOUCHE, Dire qu'il sera fait application à Madame Jeannine X... veuve Y... des dispositions de l'article 792 du Code civil et qu'elle ne pourra donc prétendre à aucune part dans les objets divertis ou recélés, "

Il relate et estime : " Il en résulte que l'immeuble litigieux était un bien commun et que la donation entre vifs effectuée par Monsieur et Madame Joseph X... au profit de leur fille, Madame Y..., est une donation en avancement d'hoirie rapportable. Il sera rappelé qu'en septembre 1985, Madame Renée B... a renoncé à la succession de son mari ainsi qu'à la communauté ayant existé entre elle et ce dernier comme le lui permettaient alors les dispositions des articles 1453 et suivants du Code civil. Cette renonciation lui retire tout droit à l'actif commun. Par conséquent, l'immeuble sis à ECOUCHE étant un bien commun, il ne fait pas partie de l'actif de la succession de Madame Renée B... veuve X.... En outre, compte tenu de la renonciation par Madame Y... à la succession de son père, et sous réserve des dispositions de l'acte de donation qu'elle devra communiquer, les droits de Madame Y... dans l'immeuble objet de la donation ne pourront tout au plus s'élever qu'à 1 / 3 de la valeur de l'immeuble. "... En l'espèce, il ressort des pièces versées au débat que Madame Jeannine X... veuve Y... a réalisé de nombreuses opérations financières en se faisant appeler Mademoiselle Jeannine X... et en se faisant domicilier à une adresse qui n'a jamais été la sienne, à savoir chez sa mère « Madame X... Marthe,... ».

Ces placements étaient en réalité des placements destinés à frauder les droits de Monsieur Claude X..., notamment par des placements UAP ou AXA.

Madame Renée X... n'ayant d'autre fortune à l'époque que celle issue de l'activité professionnelle de feu son mari, il apparaît évident que les sommes qui ont servi à souscrire soit des bons anonymes, soit des contrats cryptiques auprès d'AXA ou de UAP ont été versées par Madame Renée B... à partir de biens relevant de la communauté B...- X.... "
Mme Jeannine X... conclut à la confirmation du jugement mais à sa réformation en ce qu'il a dit que la concluante devait rapporter à la succession la moitié de la valeur de l'immeuble situé... pour le cas où cet immeuble appartiendrait à la communauté X...- B....
Elle invite la cour à " Dire et juger qu'en application de l'article 843 du Code Civil la part de l'immeuble donné par Monsieur Joseph X... de cujus à la concluante n'a pas à être rapportée dans sa succession à laquelle il a été renoncé par la concluante. "
Me Z...- D... s'en rapporte à justice et sollicite une indemnité en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ordonnance du 9 janvier 2008, le juge de la mise en état en a ordonné la clôture. Il a dit son rapport avant les plaidoiries.

SUR QUOI

1) sur l'immeuble donné
Attendu que par acte du 11 octobre 1979, M. et Mme X... ont donné cet immeuble à leur fille Jeannine X... épouse A... ;
Que l'acte précise que l'immeuble est un bien de communauté " pour avoir été acquis par M. X... seul, au cours et pour le compte de la communauté " ;
Qu'il prévoit : " la présente donation sera rapportable par moitié à la succession des donateurs " ;
Attendu que si Mme Renée X... née B... a renoncé à la communauté, cette renonciation n'a d'effet qu'au décès de M. Joseph G... X... ;
Que la donation n'a pas été affectée par cette renonciation ;
Que Mme Jeannine X... peut donc prétendre aux droits résultant de cette donation, tant du chef de son père que du chef de sa mère ;
Attendu cependant qu'eu égard à la renonciation à la succession de son père, et à la renonciation de sa mère à sa part de communauté, ses droits ne sont pas déterminés de la même manière ;
Que, dans la succession de son père, eu égard à sa renonciation, ses droits sont celles du donataire par préciput hors part qui n'échappe à la réduction que si elle n'excède pas la réserve successorale au jour du décès ;
Que la juridiction n'est pas informée des valeurs nécessaires à cette détermination ce qui ne permet donc pas de déterminer les droits de Mme Jeannine X... ;
Attendu que, à l'égard de sa mère, la validité de la donation, résultant de l'absence d'effet rétroactif de la renonciation antérieurement au décès du mari, oblige à prendre en compte cette donation ;
Que la prise en compte de cette donation a des effets sur la succession de la mère ; que la donation précisant que la donation sera rapportable par moitié dans la succession des donateurs, il faut appliquer la clause du contrat ;
Qu'il faudra donc rapporter la moitié de la donation à la succession de la mère, selon les règles ordinaires du rapport successoral ;
Que le dossier ne permet pas de déterminer plus précisément à ce moment de la procédure les droits et obligations des parties résultant de cette donation ;

2) sur le recel successoral reproché par M. Claude X...

Attendu que M. Claude X... développe en réalité deux argumentations différentes dont une seulement a trait au recel successoral ;
Qu'en effet, il reproche à Mme Jeanine X... veuve Y... d'avoir réalisé diverses opérations financières en se faisant appeler Mademoiselle Jeannine X... et en se faisant domicilier chez sa mère Madame Marthe X... ce qui doit s'analyser au regard des règles du recel successoral ;
Qu'il ajoute " Madame Renée X... n'ayant d'autre fortune à l'époque que celle issue de l'activité professionnelle de feu son mari, il apparaît évident que les sommes qui ont servi à souscrire soit des bons anonymes, soit des contrats cryptiques auprès d'AXA ou de UAP ont été versées par Madame Renée B... à partir de biens relevant de la communauté B...- X.... Cela ressort d'ailleurs du document intitulé « demande d'adhésion AXA CONSEIL no 566887 G » qui mentionne un versement supplémentaire de 20. 000 francs sur le compte 91933311 M dont Madame Y... était titulaire, ce à l'initiative de Madame Renée B... (pièce no 5). Or, Madame Renée B... n'avait aucun droit sur ces sommes puisqu'elle avait renoncé à la succession de Monsieur René X... et à la communauté " ;

Attendu que cet énoncé concerne en réalité sa mère à qui il reproche de ne pas avoir respecté la renonciation à la communauté et à la succession de son mari ; mais qu'il n'en tire pas les conséquences juridiques qui seraient la perte de la renonciation, aux effets différents ;
Que, au surplus, M. Joseph G... X... est décédé le 21 août 1984 ;

Que M. Claude X... fait état d'une pièce no 5, mais que les pièces qu'il verse au dossier ne sont pas numérotées ; qu'il fait donc défaut à la preuve qui lui incombe ;

Que, au surplus, la demande d'adhésion no 566887 AXA Conseil versée au dossier mentionnant un versement supplémentaire de 20. 000 francs date du 9 juillet 1999 ;
Que le lien avec la communauté dissoute et la succession ouverte le 21 août 1984 reste à établir ;
Que d'autres documents AXA ou UAP versés au dossier datent de 1998 à 2000 et ne sont pas l'objet d'explications plus précises ; qu'ils ne prouvent pas ce que M. Claude X... leur attribue ;
Que ce reproche est sans conséquence ;
Attendu que, sur le recel, le tribunal relève que les documents semblent avoir été signés par la défunte ;
Que la situation est assez complexe ; que l'on trouve en effet un courrier de la Poste service financier portant l'adresse suivante : " MME X... RENEE. ... : Mme X...- Y... Jeannine... " ;
Que divers documents portent " Mme X... Jeannine, chez Mme X... Marthe " ;
Que le second prénom de la défunte était Marthe ;
Que les premiers juges ont justement relevé : " Il est de surcroît produit un courrier manuscrit de cette dernière (la défunte) qui déclare à sa fille avoir " fait des placements en ton nom " ; que le texte complet est " ma chère Jeannine, Claude te dira pourquoi j'ai fait des placements à ton nom. Tu partageras par moitié avec Claude "
Que, Mme Jeannine X... fait valoir que ces contrats ont été souscrits au bénéfice de M. Claude X... qui en avait connaissance ;
Que les deux documents versés au dossier et présentés comme souscrits par Mme Jannine X... mentionnent comme bénéficiaire " sa mère, Mme X... Marthe, à défaut ses ayant droit " ;
Attendu que M. Claude X... ajoute : " La Cour doit savoir que Monsieur Claude X... n'était absolument pas au courant des placements faits par sa mère au nom de jeune fille de sa s œ ur. Il a découvert tout à fait par hasard l'existence de certains contrats lors de l'hospitalisation de sa mère en relevant son courrier ainsi qu'elle le lui avait demandé. Lorsque Madame Jeannine X... veuve Y... s'est rendu compte que son frère avait découvert l'existence de certains placements, elle a fait réexpédier le courrier de sa mère chez elle à BOULOGNE le 25 mars 2001 (pièces no 12 et13). Après le décès de sa mère, le 10 avril 2001, Monsieur Claude X... a encore découvert l'existence de placements occultes lesquels devront être pris en compte dans le cadre des opérations de règlement successoral (pièce no 8). "

Que selon la liste des conclusions les pièces sont les suivantes : " 8. Décompte succession Mme X...- B... au 23 / 05 / 02 12. Enveloppe de réexpédition chez l \ 1me X...- Y... d'un courrier adressé à Mme X... Renée le 20 mars 2001 13. Enveloppe de réexpédition chez Mme X...- Y... d'un courrier de LA POSTE adressé à Mme X... Renée le 19 avril 2001 " ;

Que les pièces 12 et 13 sont celles déjà mentionnées ci- avant et portant les deux adresses ;
Que la pièce 8, sans signature, dactylographiée, est la première page d'un décompte ainsi intitulé : " Succession de Madame X...- B... Renée décédée le 10 avril 2001 Décompte effectué au 23 / 05 / 2002 compte tenu des renseignements connus à cette date. "
Mais attendu que le recel successoral suppose que, après l'ouverture de la succession, un des co- héritiers ait caché un élément d'actif dont il avait connaissance ; que les éléments dont il est fait état n'établissent pas que, postérieurement à l'ouverture de la succession de Mme X...- B..., sa fille ait dissimulé quelque chose dont elle ait eu connaissance ;
Attendu en conséquence que M. Claude X... n'établit pas le recel qu'il invoque ;

PAR CES MOTIFS

statuant contradictoirement
Confirme le jugement rendu le 12 novembre 2006 par le tribunal de grande instance d'Argentan sous les réserves suivantes :
Dit que les droits de Mme Jeannine X... doivent être appréciés pour la moitié provenant de son père comme une donation par préciput et pour la moitié provenant de sa mère, comme une donation rapportable,
Condamne M. Claude X... à payer à Mme la somme de 1. 000 euros d'indemnité en application de l'article 700 du Code de procédure civile
Le condamne aux dépens de l'instance d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT

C. GALAND J. BOYER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : Ct0038
Numéro d'arrêt : 07/350
Date de la décision : 25/03/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance d'Argentan, 05 juillet 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.caen;arret;2008-03-25;07.350 ?
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