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17/03/2011 | FRANCE | N°10/02806

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale - section b, 17 mars 2011, 10/02806


COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CHAMBRE SOCIALE - SECTION B
--------------------------
ARRÊT DU : 17 MARS 2011
(Rédacteur : Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller,)
PRUD'HOMMES
No de rôle : 10/02806

La société JAS HENNESSY AND CO
c/
Madame Marie Pierre X...

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :
LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :
La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).
Certifié par le Greffier en Chef,
Grosse délivrée le :
à :D

écision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 mars 2010 (R.G. noF 09/172) par le Conseil de Prud'hommes - Formation pa...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CHAMBRE SOCIALE - SECTION B
--------------------------
ARRÊT DU : 17 MARS 2011
(Rédacteur : Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller,)
PRUD'HOMMES
No de rôle : 10/02806

La société JAS HENNESSY AND CO
c/
Madame Marie Pierre X...

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :
LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :
La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).
Certifié par le Greffier en Chef,
Grosse délivrée le :
à :Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 mars 2010 (R.G. noF 09/172) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANGOULÊME, Section Industrie, suivant déclaration d'appel du 27 avril 2010,

APPELANTE :
La société JAS HENNESSY AND CO agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,Rue de la Richonne - 16100 COGNAC
représentée par Maître Jean NERET, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE :
Madame Marie Pierre X...née le 20 Janvier 1962 à COGNAC (16100)de nationalité françaiseProfession : Assistante de communication, demeurant ...
représentée par Maître Jean-Philippe POUSSET, avocat au barreau de CHARENTE

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 03 février 2011 en audience publique, devant Madame Myriam LALOUBERE Vice-Présidente placée chargé d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Paul ROUX, Président,Monsieur Eric VEYSSIERE, Conseiller,Madame Myriam LALOUBERE , Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Chantal TAMISIER,

ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Mme Marie-Pierre X... a été engagée en 1984 par la société THOMAS HINE et compagnie et y a exercé les fonctions de responsable accueil et relations publiques jusqu'en 1995 date à laquelle elle a travaillé pour le compte de la société HENNESSY, aves reprise d'ancienneté, d'abord en qualité d'assistante du DRH (1995 à 1999) puis d'assistante marketing (1999-2000) puis à compter de novembre 2000 en qualité de chargée de communication et expositions.
Par lettre en date du 17 novembre 2008, Mme X... a sollicité le bénéfice d'un congé pour création d'entreprise du 12 janvier 2009 au 11 janvier 2010, congé qui lui a été accordé par lettre du 1er décembre 2008.
Par lettre en date du 13 janvier 2009, Mme X... a été convoquée à un entretien préalable à un licenciement qui s'est déroulé le 22 janvier 2009
Le 16 février 2009, Mme Marie-Pierre X... a été licenciée pour faute grave pour avoir été l'auteur d'un commentaire déposé sur le blog de la Charente Libre sous le pseudonyme "Barbarella" mettant en cause, dans le cadre d'un conflit du travail, Mme François Y..., déléguée syndicale et secrétaire du CE, commentaire qui par ailleurs a été repris dans un tract dirigé à l'encontre de la même personne et diffusé au sein de l'entreprise.
Le 21 avril 2009, Mme Marie-Pierre X... a saisi le Conseil des Prud'hommes d'ANGOULEME pour contester le bien fondé de son licenciement, après avoir déclaré illicite les moyens de preuve fournis par la société JAS HENNESSY and Co et pour obtenir les indemnités de rupture e des dommages et intérêts, outre une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Par décision en date du 26 mars 2010, le Conseil des Prud'hommes d'ANGOULEME a considéré les preuves fournies par l'employeur licites mais a jugé le licenciement de Mme Marie-Pierre X... abusif condamnant la société JAS HENNESSY and CO à payer à celle-ci les sommes suivantes :
- 6741,64€ d'indemnité de préavis outre les congés payés afférents,- 12.472€ d'indemnité de licenciement,- 20.224,90€ de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,- 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 30 avril 2010, la société JAS HENNESSY and Co a interjeté appel de cette décision
Par conclusions déposées le 14 janvier 2011, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, la société JAS HENNESSY and Co conclut à la confirmation de la décision en ce qu'il a jugé que le constat d'huissier et le rapport d'expertise produit par elle étaient des moyens de preuve licité et la réformation du jugement entrepris pour le surplus.
Elle demande dés lors à Mme X... la restitution de la somme de 41.429,76€ versée le 21 avril 2010 au titre de l'exécution provisoire et sollicite sa condamnation à lui payer la somme de 3000€ de au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre la somme d'1€ au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile.
Par conclusions déposées le 27 janvier 2011développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, Mme Marie-Pierre X... demande la confirmation du jugement entrepris sauf à déclarer comme preuves illicites le constat d'huissier et le rapport d'expertise ayant utilisé un moyen de contrôle selon elle illégal et à porter à la somme de 80.900€ les dommages et intérêts pour licenciement abusif.Elle sollicite enfin la condamnation de la société JAS HENNESSY and Co à lui payer la somme de 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civil

MOTIVATION
* Sur le licenciement.
La lettre de licenciement pour faute grave fixent les limites du litige reproche à Mme X... d'avoir été l'auteur d'un commentaire déposé sur le blog de la Charente Libre sous le pseudonyme "Barbarella mettant en cause, dans le cadre d'un conflit du travail, Mme François Y..., déléguée syndicale et secrétaire du CE, commentaire qui par ailleurs a été repris dans un tract dirigé à l'encontre de la même personne et diffusé au sein de l'entreprise.
Aux termes de l'article L 1235-1 du code du travail, il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des griefs invoqués et de former sa conviction au vu des éléments fournis pas les parties, le doute profitant au salarié.
Toutefois, la charge de la preuve de la gravité de la faute privative des indemnités de préavis et de licenciement incombe à l'employeur et tel est le cas d'espèceSelon une jurisprudence constante, la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.
En l'espèce pour justifier de la faute grave qu'elle reproche à sa salariée, la société JAS HENNESSY and Co verse aux débats un constat d'huissier et un rapport d'expertise, pièces retenues par les premiers juges comme des preuves licites contrairement à ce que soutenait Mme X...
Il ressort en effet du rapport d'huissier et du rapport d'expertise versés aux débats que le message incriminé a été déposé sur le blog de la Charente Libre depuis le poste informatique de Mme Marie-Pierre X... (utilisation de l'adresse IP et du mot de passe attribué à Mme X...).
Il résulte de plus de la lecture attentive de ces deux documents que l'employeur pouvait à l'époque des faits incriminés accéder à tout moment au serveur proxy qui gère, pour l'entreprise, les connections internet vers l'extérieur du siteDepuis son ordinateur portable, M. Z... (l'expert)... nous a positionné dans un répertoire où étaient mémorisés tous les fichiers de log quotidiens qui avaient été conservés.
Certes, les fichiers de données de connexions, les logs, sont créés automatiquementpar tous les systèmes informatiques et ils sont inexploitables sans les informations recueillies auprès de l'hébergeur; cependant, ces fichiers peuvent se supprimer en continu ou se stocker, ce qui a été le cas d'espèce, et dans cet hypothèse, le propriétaire de l'outil informatique se grade la possibilité de contrôler l'activité électronique de chaque poste et donc de surveiller l'activité de l'utilisateur dudit poste
Or, la Cour rappelle qu'en application de l'article L1121-8 du code du travail, aucune information ne peut être collectée par un dispositif qui n'a pas été portée à la connaissance du salarié.
De plus l'alinéa 3 de l'article L2323-32 du code du travail prévoit que le comité d'entreprise est informé et consulté, préalablement à la décision de mise en oeuvre dans l'entreprise sur les moyens ou techniques permettant un contrôle de l'activité du salariée.
En l'espèce, la société JAS HENNESSY and Co ne justifie pas avoir porté à laconnaissance de ses salariés le dispositif précité, pas plus qu'elle ne justifie en avoir informé et consulté le comité d'entreprise
En conclusion, la Cour estime contrairement aux premiers juges que le moyen de contrôle de l'activité électronique de chaque poste et donc de l'activité de l'utilisateur du poste par la société JAS HENNESSY and Co est illégal et que le constat d'huissier et le rapport d'expertise, qui ont utilisé ce dispositif constituent un moyen de preuve illicite ne pouvant servir de base à une quelconque sanction.
Faute d'autres éléments probants, le licenciement de Mme Marie-Pierre X... est sans cause réelle et sérieuse.
La Cour tient cependant à ajouter que, comme l'ont justement décidé les premiers juges, la société JAS HENNESSY and Co ne rapporte de toute façon pas la preuve de ce que Mme X... est bien personnellement l'auteur des commentaires incriminés, les fonctions de la salariée l'amenant à s'absenter très souvent de son bureau, à toute heure de la journée, le bureau restant ouvert ou sa clé accessible, l'identifiant informatique et les mots de passe du poste informatique étant inscrits dans un répertoire posé sur le meuble bureau et étant également accessibles à tous.
La Cour confirmera donc les condamnations financières mises à al charge de la société JAS HENNESSY and Co sauf en ce qui concerne le montant des dommages et intérêts alloués à la salariée qui seront portés à la somme de 55.000€ sur la base d'un salaire brut de 33000€, et ce compte tenu de l'ancienneté très importante de Mme X... dans la société (25 ans) et du préjudice subi par elle.

* Sur les autres demandes
L'équité et les circonstances de la cause commandent de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Mme X... pour la somme de 1500€
La société JAS HENNESSY and Co sera condamnée aux entiers dépens de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFSLA COUR,
REFORME PARTIELLEMENT le jugement déféré en ce qu'il a déclaré les moyens de preuve utilisés par la société JAS HENNESSY nd Co comme licites et en ce qu'il a condamné la société JAS HENNESSY and Co à verser à Mme Marie-Pierre X... la somme de 20.224,90€ de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
et statuant de nouveau,
CONDAMNE la société JAS HENNESSY and Co à verser à Mme Marie-Pierre X... la somme de 55.000€ de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
CONFIRME le jugement pour le surplus de ses dispositions
y ajoutant
CONDAMNE la société JAS HENNESSY and Co à verser à Mme Marie-Pierre X... la somme 1500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile
CONDAMNE la société JAS HENNESSY and Co aux dépens de la procédure d'appel.
Signé par Monsieur Jean-Paul ROUX, Président, et par Chantal TAMISIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
C. TAMISIER Jean-Paul ROUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale - section b
Numéro d'arrêt : 10/02806
Date de la décision : 17/03/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2011-03-17;10.02806 ?
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