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20/02/2007 | FRANCE | N°06/02744

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Ct0073, 20 février 2007, 06/02744


ARRET
No

STE GEDIS

Me X...

STE MB ASSOCIES

C /

STE GIFI DIFFUSION

MM / JA

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ECONOMIQUE

ARRET DU 20 FEVRIER 2007

RG : 06 / 02744

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU TRIBUNAL DE COMMERCE D'AMIENS EN DATE DU 16 juin 2006

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTS

STE GEDIS SAS
au capital de 2. 000. 000 €
inscrite au RCS PARIS no B 451 231 278
7 Cité Paradis
75010 PARIS
" prise en la personne de son représentant légal domicilié pour ce audit siège ". <

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Mandataire judiciaire
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75008 PARIS
" pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la STE GEDIS nommé en cette qualité suivant ju...

ARRET
No

STE GEDIS

Me X...

STE MB ASSOCIES

C /

STE GIFI DIFFUSION

MM / JA

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ECONOMIQUE

ARRET DU 20 FEVRIER 2007

RG : 06 / 02744

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU TRIBUNAL DE COMMERCE D'AMIENS EN DATE DU 16 juin 2006

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTS

STE GEDIS SAS
au capital de 2. 000. 000 €
inscrite au RCS PARIS no B 451 231 278
7 Cité Paradis
75010 PARIS
" prise en la personne de son représentant légal domicilié pour ce audit siège ".

Maître Gérard X...
Mandataire judiciaire
...
75008 PARIS
" pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la STE GEDIS nommé en cette qualité suivant jugement du Tribunal de Commerce de PARIS en date du 28 mars 2006, qui a ouvert une période d'observation expirant le 28 juillet 2006 ".

STE MB ASSOCIES SELARL
au capital de 7. 500 €
inscrite au RCS PARIS no D 451 953 392
58 Bd de Sébastopol
75003 PARIS
" représentée par Me Y... ès qualités de mandataire judiciaire désigné par jugement du Tribunal de Commerce de PARIS en date du 28 mars 2006 ".

Comparants concluants par la SCP LEMAL ET GUYOT, avoué à la Cour et plaidant par Me BOULANGER, avocat au barreau de PARIS.

ET :

INTIMEE

STE GIFI DIFFUSION SAS
au capital de 108. 909. 389 €
Zone Industrielle de la Barbière
47300 VILLENEUVE SUR LOT
" prise en la personne de son représentant légal domicilié pour ce audit siège ".

Comparante concluante par la SCP MILLON ET PLATEAU, avoué à la Cour et plaidant par Me DEJEAN, avocat au barreau de BORDEAUX.

DEBATS :

A l'audience publique du 23 janvier 2007 devant M. Brieuc de MORDANT de MASSIAC, Président, entendu en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du Nouveau code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 20 février 2007.

GREFFIER : Mme DEBEVE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

M. le Président en a rendu compte à la Cour composée de :

M. Brieuc de MORDANT de MASSIAC, Président,
M. BOUGON et Mme BELLADINA, Conseillers,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE PUBLIQUEMENT :

Le 20 FEVRIER 2007 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Nouveau code de procédure civile ; M. Brieuc de MORDANT de MASSIAC, Président a signé la minute avec Mme DEBEVE, Greffier.

PROCEDURE DEVANT LA COUR

Par acte en date du 5 juillet 2006, la société GEDIS a interjeté appel de l'ordonnance de référé du président du tribunal de commerce d'Amiens en date du 16 juin 2006 qui s'est déclaré territorialement incompétent pour statuer sur se demande de provision formée contre la société GIFI diffusion.

La société GEDIS a conclu (conclusions des 31 juillet 2006,4 août 2006,22 novembre 2006).

La Société GIFI DIFFUSION, intimée, a conclu (conclusions des 15 novembre 2006,17 janvier 2007).
Par ordonnance en date du 31 août 2006, prise en application de l'article 910 alinéa 2 du Nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été fixée au 28 novembre 2006 pour plaidoirie.
A cette date, à la demande de la société GIFI DIFFUSION, l'affaire a été renvoyée contradictoirement au 23 janvier 2007.

Le jour dit, la cause et les parties ont été appelées en audience publique et les débats et plaidoiries tenus dans les conditions prévues aux articles 786 et 910 NCPC, les avocats ne s'y opposant pas.

Après avoir entendu les avoués et avocats des parties en leurs demandes fins et conclusions, le magistrat chargé du rapport a mis l'affaire en délibéré et indiqué aux parties que l'arrêt serait rendu et mis à disposition au greffe le 20 février 2007.

Après rapport de l'affaire par le magistrat chargé du rapport et après en avoir délibéré conformément à la loi, la cour a rendu la présente décision à la date indiquée.

DECISION

Faits, procédures, demandes en appel

Le 28 juillet 2004, la société GIFI, société de distribution d'articles de bazar, sise à Villeneuve sur Lot (47), a passé avec la société GENERALE DISTRIBUTION, entrepositaire, sise à Paris et possédant un entrepôt à MOREUIL (80), un contrat, dit « de dépôt et de coopération logistique », aux termes duquel la société GENERALE DISTRIBUTION se chargeait de recevoir des containers d'articles importés, d'en stocker et d'en reconditionner le contenu en colis, d'expédier ces colis sur tous les magasins de GIFI du nord de la France et de tenir la comptabilité-matière des produits entrant et sortant.

Le contrat était prévu pour une durée de deux ans.

En contre partie, sur le fondement de prévisions d'exploitation arrêtées par la société GIFI et annexées au contrat (nombre de containers à recevoir, nombre de colis à conditionner, nombre de palettes de stockage, surface d'entrepôt immobilisée, nombre de personnes nécessaires), la société GIFI s'est engagée à verser une rémunération forfaitaire globale, comprenant une part fixe de 28. 808 euros / semaine pour la location de l'entrepôt et une part mobile de 1,28 euro par colis entrant pour les prestations comptables (0,08 euro) et le reconditionnement des produits (1,20 euro).

Dans les temps qui ont suivi, le contrat a été repris, de part et d'autre, par la société GIFI DIFFUSION et par la société GEDIS.

Au bout de quelques mois d'activité, les prévisions d'exploitation arrêtées par la société GIFI se sont avérées totalement fausses de telle sorte qu'en raison du bouleversement total de l'équilibre du contrat qui en est résulté, la rémunération forfaitaire versée à GEDIS s'est révélée totalement inadaptée, cette dernière s'avérant travailler à perte.

En effet, le nombre de produits entrants était nettement moindre que promis et les articles nettement plus volumineux qu'il n'avait été indiqué, de telle sorte qu'il en était résulté, pour l'entrepositaire, une manutention et une surface de stockage démesurément accrues, mais non rémunérées, dès lors que la rémunération de la prestation de GEDIS n'était calculée que sur le nombre de colis entrés (deux fois moindre que prévu) et non sur le travail généré (deux fois plus important que prévu).

Le conflit a été résolu par la signature, le 31 mai 2005, entre GIFI DIFFUSION et GEDIS, d'une transaction, aux termes de laquelle GEDIS renonçait à toute action contentieuse contre l'engagement de GIFI DIFFUSION de verser une somme de 478. 400 euros venant compenser les pertes de GEDIS en 2004, de payer un complément de facturation pour les prestations fournies par GEDIS en 2005 et de respecter une nouvelle tarification pour la période s'étendant du 1er juin 2005 au 28 juillet 2006.

Comme la précédente, cette nouvelle tarification était une rémunération forfaitaire globale, calculée sur le fondement de prévisions d'exploitation revues à la baisse par la société GIFI DIFFUSION mais non expressément annexées au contrat, incluant la location de l'entrepôt (28. 808 euros par semaine), les prestations comptables (10. 736 euros par semaine) et le reconditionnement des produits (facturé 1,40 euro par colis entrant au lieu de 1,20 euro).

Toutefois, peu de temps après la signature de la transaction, les choses ont repris comme par le passé.

De ce fait, par acte en date du 15 mars 2006, la société GEDIS a assigné la société GIFI DIFFUSION devant le tribunal de commerce d'AMIENS en vue d'obtenir la résolution de la transaction du 31 mai 2005 aux termes de laquelle elle avait renoncé à toute action contentieuse, et la condamnation de cette société, pour violation des obligations de fourniture prévues au contrat du 28 juillet 2004, à l'indemniser de son préjudice (qu'elle évaluait à plus de huit millions d'euros).

La société GIFI DIFFUSION étant devenue avec le temps le plus gros client de la société GEDIS, les détériorations des relations entre les deux sociétés et la perte de chiffre d'affaire qui en est résulté pour l'entrepositaire ont conduit la société GEDIS à déposer son bilan et a solliciter le bénéfice d'un redressement judiciaire.

Toutefois, la société GIDI DIFFUSION ayant quasiment cessé de fournir GEDIS, cette dernière a, par acte du 31 mai 2006, assigné son co-contractant devant le tribunal de commerce d'AMIENS, statuant en référé, en vue d'obtenir la condamnation de cette société, sous astreinte, à lui fournir le volume d'affaire contractuellement prévu et à lui payer, également, une provision de 256. 657 euros à valoir sur le préjudice résultant de la cessation d'approvisionnement entre mars et avril 2006.

En défense, la société GIFI DIFFUSION a demandé à la cour, à titre principal, de se déclarer territorialement incompétent au profit du tribunal de commerce de Villeneuve-sur-Lot et, à titre subsidiaire, de dire n'y avoir lieu à provision en raison de l'existence d'une contestation sérieuse tenant à l'interprétation de la convention du 31 mai 2005.

La société GIFI DIFFUSION a soutenu que la transaction du 31 mai 2005 ne prévoyait aucune attribution de compétence au profit de la juridiction d'Amiens, et que, dans ces conditions, son assignation devant le tribunal d'Amiens et non devant le tribunal de Villeneuve sur Lot n'était pas justifiée au regard des règles habituelles de compétence. Sur le fond, elle a fait valoir que la demande de provision reposait sur des prévisions d'exploitation mentionnées sur un document qui n'avait aucune valeur contractuel et que dans ces conditions cette demande était sérieusement contestable.

Par ordonnance en date du 16 juin 2006, le président du tribunal de commerce d'Amiens s'est déclaré territorialement incompétent au motif qu'en application des règles générales de compétence, comme en application de l'article 8 alinéa 3 de la transaction (selon lequel les parties font élection de domicile en leur siège social respectif pour tout litige relatif à l'interprétation ou à l'exécution du contrat et de la transaction), la société GIFI DIFFUSION aurait dû être attraite devant le tribunal de commerce de Villeneuve-sur-Lot.

La société GEDIS, prise en la personne de son administrateur et de son représentant des créanciers, a interjeté appel.

Elle sollicite l'infirmation de l'ordonnance et l'allocation d'une provision à valoir sur son préjudice.

En ce qui concerne la compétence, elle fait observer que l'article 8 alinéa 3 du protocole transactionnel stipule une clause d'élection de domicile et non une clause d'attribution de juridiction et que, le lieu d'exécution du contrat étant dans la Somme, le tribunal de commerce d'Amiens est territorialement compétent par application de l'article 46 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile.

En ce qui concerne le caractère non contestable de son obligation, elle fait valoir qu'avant comme après la transaction, la société GIFI DIFFUSION était contractuellement tenue de lui fournir de la marchandise et qu'en s'abstenant de le faire, elle a manifestement violé son obligation contractuelle. En ce qui concerne le montant de l'allocation provisionnelle, qui seul peut faire réellement débat, elle fait valoir que la provision est calculée sur les chiffres ayant servi de son fondement au calcul de la nouvelle tarification, mais qu'elle peut très bien être calculée sur les chiffres contractuellement arrêtés dans le contrat de base.

La société GIFI DIFFUSION demande la confirmation de l'ordonnance entreprise.

Elle soutient que la juridiction commerciale d'Amiens est territorialement incompétente, dès lors que le juge naturel de la société GIFI DIFFUSION est le juge de son siège social, dès lors que le protocole transactionnel du 31 mai 2005 n'a stipulé aucune clause attributive de compétence dérogatoire au droit commun et dès lors qu'il ne saurait être fait exception, dans ces conditions, à la compétence normale du juge du domicile du demandeur (conclusions 17 janvier 2002, page 12 et 13).

Sur le fond, elle fait valoir que la demande de provision repose sur des prévisions d'exploitation mentionnées sur un document qui n'avait aucune valeur contractuelle dès lors qu'il n'a pas été signé et annexé au protocole transactionnel et que, dans ces conditions, cette demande de provision était sérieusement contestable. Elle soutient encore que la société GEDIS est irrecevable à demander une provision en exécution du protocole transactionnel dès lors que, dans son assignation au fond, dans la procédure parallèle, elle a demandé l'annulation de ce protocole.

En cet état,

Sur la recevabilité de l'appel

La société GEDIS ayant formé son recours dans les délais et forme prévus par la loi et la recevabilité de l'acte n'étant pas contestée, la cour recevra l'intéressée en son appel.

Sur le bien fondé de l'appel

La société GEDIS est appelante de l'ordonnance de référé par laquelle le président du tribunal de commerce d'Amiens qui a décliné sa compétence au profit du président du tribunal de commerce de Villeneuve-sur-Lot et qui, par voie de conséquence, a refusé de statuer sur sa demande de provision.

-Sur la compétence

Il résulte des dispositions de l'article 46 alinéa 2 du nouveau Code de procédure civile qu'en matière contractuelle, le demandeur peut saisir, à son choix, non seulement la juridiction du lieu où demeure le défendeur mais encore la juridiction du lieu de la livraison effective de la chose ou du lieu de l'exécution de la prestation de service.

En l'espèce, il appert que le tribunal de commerce d'Amiens est la juridiction du lieu d'exécution de la prestation de service convenue entre les parties le 28 juillet 2004.

En effet, la société GIFI, sise à Villeneuve-sur-Lot (47), aux droits et obligations de laquelle vient aujourd'hui la société GIFI DIFFUSION, également sise à Villeneuve sur Lot (47), a passé, le 28 juillet 2004, avec la société GENERALE DISTRIBUTION, sise à Paris (75), aux droits et obligations de laquelle vient aujourd'hui la société GEDIS, également sise à Paris (75), un contrat aux termes duquel la société GENERALE DISTRIBUTION se chargeait de recevoir dans son entrepôt de MOREUIL (80) des containers d'articles importés, de stocker et de reconditionner en ce lieu le contenu des dits containers, d'expédier la marchandise à partir de ce lieu vers les magasins GIFI du nord de la France et de tenir en ce lieu la comptabilité-matière des produits entrant et sortant.

MOREUIL (80) est donc bien le lieu d'exécution de la prestation de service et ce lieu se situe bien dans l'arrondissement judiciaire du tribunal de commerce d'Amiens.

C'est donc à bon droit que la société GEDIS a porté devant le tribunal de commerce d'Amiens sa demande tendant à la condamnation, sous astreinte, de la société GIFI DIFFUSION à respecter son obligation contractuelle de livraison et tendant également au paiement d'une provision à valoir sur son préjudice résultant de sa perte de production.

La cour observe au surplus et de manière surabondante que le contrat du 28 juillet 2004 stipulait expressément en son article 19 la compétence exclusive du tribunal de commerce d'Amiens pour connaître de tous différends suscités par le contrat et ses suites et que l'article 8 du protocole transactionnel du 31 mai 2005, qui s'est borné à préciser le lieu de domiciliation des parties, n'a en rien modifié cette clause attributive de compétence.

Si la saisine de la juridiction commerciale d'Amiens n'était pas déjà justifiée par l'application de l'article 46 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile, un telle stipulation justifierait, si besoin était, la compétence du tribunal de commerce d'Amiens.

La cour infirmera donc l'ordonnance entreprise qui a décliné, à tort, la compétence du tribunal d'Amiens.

-Sur le caractère contestable ou non de l'obligation

Ayant été entre-temps mise en liquidation judiciaire, la société GEDIS ne demande plus qu'il soit fait injonction à la société GIFI DIFFUSION de poursuivre ses livraisons. Elle se borne désormais à réclamer le paiement d'une provision à valoir sur la réparation du défaut de livraison pour les mois de mars et avril 2006, en faisant observer que l'obligation de livraison d'un certain volume de marchandise n'est pas sérieusement contestable dans son principe et que seul le chiffrage du montant de la provision peut faire débat dès lors que le calcul de cette dernière peut être fait soit à partir des prévisions hautes du contrat initial soit à partir des prévisions basses du protocole transactionnel, les premières étant explicitement contractuelles et les secondes implicitement mais nécessairement contractuelles.

De son côté, la société GIFI DIFFUSION soutient que l'obligation dont se prévaut la société GEDIS est sérieusement contestable dès lors que la société GEDIS est irrecevable à demander une provision en exécution d'un protocole transactionnel dont elle demande parallèlement, dans une procédure au fond, l'annulation et, dès lors également, que la demande de provision repose sur des prévisions d'exploitation mentionnées sur un document qui n'a aucune valeur contractuelle.

En cet état, la cour observe que la procédure au fond, invoquée par la société GIFI DIFFUSION, est sans incidence sur la présente procédure.

En effet, la procédure « au fond » tend, dans un premier temps, à l'annulation du protocole du 31 mai 2005 (aux termes duquel la société GEDIS a renoncé à toute action contentieuse à raison des manquements perpétrés entre le 28 juillet 2004 et le 31 mai 2005) et, dans un second temps, après annulation du dit protocole, à la sanction des manquements antérieurs et postérieurs à la date du 31 mai 2005 et ce jusqu'à la date de l'assignation du 15 mars 2006.

La présente procédure « de référé » tend, en revanche, à la sanction de l'obligation de livraison de marchandises que la société GIFI DIFFUSION a contractée envers la société GEDIS, en vertu du contrat de dépôt et de coopération logistique passé le 28 juillet 2006, et qui n'a pas été remise en cause par la transaction du 31 mai 2005.

Il y a lieu de relever en effet que la société GIFI s'est engagée, pour deux ans, à livrer à la société GEDIS un certain nombre de containers d'articles importés, et que la société GEDIS s'est engagée, pour sa part, à re-conditionner le contenu de ces containers en petits colis, à entreposer dans ses locaux ces colis, puis à les ré-expédier au fur et à mesure, au gré de la demande, vers les magasins GIFI du nord de la France et de tenir la comptabilité-matière des produits entrant et sortant.

Contrairement à ce qui est soutenu par la société GIFI DIFFUSION (qui invoque une novation à ce sujet), la transaction passée entre les parties le 31 mai 2005 a été sans influence sur les obligations fondamentales des parties et notamment l'obligation de livraison à charge de GIFI DIFFUSION.

En effet, sans remettre en cause l'obligation de livraison à charge de GIFI et l'obligation de transformation à charge de GEDIS, cette transaction s'est bornée à revoir à la baisse le volume de marchandises à livrer par GIFI DIFFUSION (le nombre des colis à livrer, par jour, a été ramené de 16. 168 à 9. 305) et à revoir à la hausse la rémunération à verser à GEDIS pour prix de son travail de transformation (le tarif a été porté de 1,28 à 1,40 euro par colis entré).

L'existence de l'obligation de livraison à charge de GIFI DIFFUSION n'est donc pas sérieusement contestable.

Or, ce qui est reproché à la société GIFI DIFFUSION, c'est d'avoir pratiquement cessé toute livraison à la société GEDIS, après réception de l'assignation en justice du 15 mars 2006, conduisant cette société à ne plus pouvoir assurer le paiement de ses charges fixes (personnel, loyers etc …).

La demande de provision formée par la société GEDIS est donc totalement justifiée.

En ce qui concerne le chiffrage de la provision, la société GIFI DIFFUSION fait valoir que, contrairement à ce qui avait été fait à l'origine, en 28 juillet 2004, les prévisions de livraison établies par la société GIFI en mai 2005 (pour servir de fondement au calcul du nouveau tarif) n'ont été ni signées par les parties ni annexées au protocole transactionnel et n'ont donc pas de valeur contractuelle et que, dans ces conditions, c'est à tort selon elle que la société GEDIS se fonde sur de telles prévisions pour calculer sa demande de provision.

La cour rappelle que la demande de provision de la société GEDIS ne repose pas sur « un document dépourvu de toute valeur contractuel », mais sur l'obligation de livraison qui a été consacrée par le contrat du 28 juillet 2004 et confortée par le protocole du 31 mai 2005 par lequel les parties ont mis fin à leur différend et choisi de poursuivre l'exécution du contrat, et que c'est le « chiffrage » de la demande qui repose, de manière alternative, sur les prévisions hautes annexées au contrat initial du 28 juillet 2004 et sur les prévisions basses qui ont servi à la négociation et à l'adoption du protocole mais qui n'ont pas été annexées à ce dernier.

La cour observe ensuite que l'argumentation de la société GIFI DIFFUSION est vaine et dessert le but qu'elle veut atteindre.

En effet, à s'en tenir à la lettre du protocole du 31 mai 2005, seules les questions de la renonciation à toute poursuite, du versement d'une indemnité compensatrice et de l'adoption d'une nouvelle tarification ont été expressément actées. Bien que la question ait été abordée, le protocole n'a pas expressément modifié l'obligation de la société GIFI d'avoir à livrer à la société GEDIS 16. 168 colis par jour.A s'en tenir, donc, à la lettre du texte, l'obligation d'avoir à fournir 16. 168 colis par jour subsiste.

Aussi, ne pas tenir compte des prévisions d'exploitation à la baisse, dont les parties se sont servies pour calculer la hausse de la rémunération destinée, par compensation, à maintenir l'équilibre économique du contrat, conduirait à pénaliser la société GIFI DIFFUSION, puisque cela reviendrait à calculer la perte de chiffre d'affaires subi par la société GEDIS, pendant les mois de mars et avril 2006, sur 16. 168 colis / jour (prévisions 2004) et non pas sur 9. 305 / jour (chiffre ayant servi aux négociations en 2005).

La cour ramènera donc à de plus justes proportions la provision à accorder à la société GEDIS et lui allouera une somme de 250. 000 euros.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La partie perdante devant, aux termes de l'article 696 NCPC, être condamnée aux dépens, la cour condamnera la société GIFI DIFFUSION, qui succombe, à supporter les dépens de première instance et d'appel.

La partie perdante devant, en outre, aux termes de l'article 700 du même code, être condamnée à payer à l'autre partie, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, une somme arbitrée par le juge, tenant compte de l'équité et de la situation économique de la partie condamnée, la cour condamnera la société GIFI DIFFUSION à payer à la société GEDIS une somme de 7. 500 euros, tous frais de première instance et d'appel confondus.

PAR CES MOTIFS,

La COUR, statuant publiquement et contradictoirement,

Reçoit la société GEDIS en son appel ;

Le déclarant bien fondé,

Infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Dit que la juridiction commerciale d'AMIENS est territorialement compétente, par application de l'article 46 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile, pour connaître des demandes de la société GEDIS ;

Constate que l'existence de l'obligation de livraison dont se prévaut la société GEDIS, à l'égard de la société GIFI DIFFUSION, n'est pas sérieusement contestable ;

Condamne en conséquence la société GIFI DIFFUSION à verser à la société GEDIS une provision de 250. 000 euros à valoir sur la réparation de l'entier préjudice subi par cette dernière ;

Condamne la société GIFI DIFFUSION aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SCP LEMAL GUYOT, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile ;

Condamne la société GIFI DIFFUSION à payer à la société GEDIS la somme de 7. 500 euros, tous frais de première instance et d'appel confondus, au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes contraires au présent dispositif.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Ct0073
Numéro d'arrêt : 06/02744
Date de la décision : 20/02/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce d'Amiens, 16 mai 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.amiens;arret;2007-02-20;06.02744 ?
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