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29/01/2002 | FRANCE | N°98/02849

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre commerciale, 29 janvier 2002, 98/02849


COUR D'APPEL D'AMIENS CHAMBRE COMMERCIALE ARRET DU 29 JANVIER 2002 RG : 98/02849

JUGEMENT DU TRIBUNAL DE COMMERCE DE CHAUNY EN DATE DU 10 juin 1998 PARTIES EN CAUSE : APPELANTES SA ELECTRO RADIO FROID - E.R.F. - rue des Verreries ZA de Mégécoste 43250 SAINTE FLORINE "agissant poursuites et diligences de son Président Directeur Général domicilié pour ce audit siège" SARL TRIDENT ZA de Mégécoste, rue des Verreries 43250 SAINTE FLORINE "agissant poursuites et diligences de son gérant domicilié pour ce audit siège" Comparantes concluantes par la SCP LE ROY, avoué à la Cour et

plaidant par Me DAUPHIN, avocat au barreau de HAUTE-LOIRE.

ET : ...

COUR D'APPEL D'AMIENS CHAMBRE COMMERCIALE ARRET DU 29 JANVIER 2002 RG : 98/02849

JUGEMENT DU TRIBUNAL DE COMMERCE DE CHAUNY EN DATE DU 10 juin 1998 PARTIES EN CAUSE : APPELANTES SA ELECTRO RADIO FROID - E.R.F. - rue des Verreries ZA de Mégécoste 43250 SAINTE FLORINE "agissant poursuites et diligences de son Président Directeur Général domicilié pour ce audit siège" SARL TRIDENT ZA de Mégécoste, rue des Verreries 43250 SAINTE FLORINE "agissant poursuites et diligences de son gérant domicilié pour ce audit siège" Comparantes concluantes par la SCP LE ROY, avoué à la Cour et plaidant par Me DAUPHIN, avocat au barreau de HAUTE-LOIRE.

ET : INTIMES SARL TRANSCAVE Espace Economique L'UNIVERS rue Jean Monnet 02300 CHAUNY "prise en la personne de son gérant domicilié pour ce audit siège" Comparante concluante par la SCP SELOSSE BOUVET etamp; ANDRE, avoués à la Cour et plaidant par Me MONIN, associé de Me BIZOLLON, avocat au barreau de LYON. SOCIETE INDUSTRIELLE TRANSTHERM TECHNOLOGIES -SITT- ZI rue Pasteur 02300 BLERANCOURT "prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés pour ce audit siège" Assignée selon les dispositions de l'article 659 du Nouveau Code de Procédure Civile suivant exploit de la SCP CHANTRY-LEBRUN, huissiers de justice à CHAUNY, en date du 3 mars 1999 à la requête de la SA ERF et de la SARL TRIDENT. Non comparante. Maître GARNIER Mandataire judiciaire 55 rue Aristide Briand Résidence du Palais 77100 MEAUX "pris en sa qualité de représentant des créanciers au redressement judiciaire de la SITT". Assigné à domicile, suivant exploit de Me LAIRE, Huissier de justice à MEAUX, en date du 1er mars 1999 à la requête de la SA ERF et de la SARL TRIDENT. Maître GARNIER Mandataire judiciaire 55 rue Aristide Briand Résidence du Palais 77100 MEAUX "pris en sa qualité de liquidateur de la SITT Zone Industrielle , rue Pasteur 02300 BLERANCOURT fonction à laquelle il a été nommé par

jugement rendu par le Tribunal de Commerce de MEAUX le 8 juin 1998" Assigné en intervention, à domicile, suivant exploit de Me LAIRE, huissier de justice à MEAUX, en date du 28 juillet 1999 à la requête de la SA ERF et de la SARL TRIDENT. Non comparant. DEBATS : A l'audience publique du 18 Décembre 2001 ont été entendus les avoués et les avocats en leurs conclusions et plaidoiries respectives COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE M. CHAPUIS DE MONTAUNET, Président de Chambre, M. X... et Mme ROHART-MESSAGER, Conseillers, qui a renvoyé l'affaire à l'audience publique du 29 Janvier 2002 pour prononcer l'arrêt et en a délibéré conformément à la loi. GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme Y... Z... :

A l'audience publique du 29 Janvier 2002, l'arrêt a été rendu par M. CHAPUIS DE MONTAUNET, Président de chambre qui a signé la minute avec Mme Y..., Greffier. DECISION

Vu le jugement du 10 juin 1998 par lequel le Tribunal de Commerce de CHAUNY a notamment : - dit et jugé que les sociétés SITT, TRIDENT et BARDOT ont commis de concert des manoeuvres déloyales et parasitaires au préjudice de la Société TRANSCAVE, constitutives de concurrence déloyale, - fait interdiction sous astreinte aux mêmes sociétés de détenir, vendre, importer, exporter et fabriquer les caves à vins litigieuses, - condamné in solidum, en réparation du préjudice subi, les sociétés TRIDENT et BARDOT à payer à la société TRANSCAVE la somme de 150.000,00 francs de dommages et intérêts, - fixé la créance indemnitaire de la Société TRANSCAVE au passif de la Société SITT à la somme de 1.000.000,00 francs à titre de dommages et intérêts pour actes de concurrence déloyale et 50.000,00 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - condamné la Société SITT à cesser, sous astreinte, son activité de fabrication, vente, diffusion de caves à vins en utilisant la dénomination

TRANSTHERM TECHNOLOGIES et ce jusqu'au 25 juillet 1998. [*

Vu l'appel interjeté par les Sociétés TRIDENT et BARDOT et leurs conclusions, enregistrées le 9 avril 2001, et tendant à : - les déclarer recevables et bien fondées en leur appel, - en conséquence, réformer le jugement, - débouter la Société TRANSCAVE de l'ensemble de ses demandes, - dire et juger qu'elle s'est rendue coupable d'un abus de position dominante, - en conséquence, la condamner à leur payer une somme de 1.000.000 francs à titre de légitimes dommages et intérêts, - ordonner la publication de l'arrêt à intervenir par extrait dans cinq journaux à leur choix, à concurrence de 40.000 francs par insertion, - condamner la Société TRANSCAVE à leur payer la somme de 50.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction pour ceux d'appel au profit de la SCP LE ROY ; A titre subsidiaire : - ordonner une expertise avec mission d'usage en pareille matière ; A titre infiniment subsidiaire : - constater que la Société TRANSCAVE ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un préjudice dont l'origine se trouverait dans leurs agissements ; - en conséquence, la débouter de ses demandes en indemnisation de préjudice. *]

Vu, enregistrées le 5 décembre 2000, les conclusions présentées par la Sté TRANSCAVE et tendant à : - dire et juger irrecevable et en tout cas mal fondé l'appel des Sociétés TRIDENT et BARDOT, - en conséquence, les débouter de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ; Confirmant le jugement : - dire et juger que les Sociétés INDUSTRIELLE TRANSTHERM TECHNOLOGIE (SITT), TRIDENT, ELECTRO-RADIO-FROID - ERF J. BARDOT ont commis de concert des manoeuvres déloyales et parasitaires à son préjudice, - leur faire

interdiction, sous astreinte de 15.000 francs par infraction constatée, de détenir, vendre, importer, exporter, fabriquer des caves à vins du type de celles vendues sous les marques CLIMACAVE, VIBORG et IDEAL CAV, et plus généralement toutes caves reprenant le savoir-faire de la Société TRANSTHERM ; Réformant le jugement : - fixer son préjudice à la somme de 3.000.000 francs, - fixer sa créance indemnitaire au passif de la Société SITT à la somme de 3.000.000 francs, - condamner in solidum, en réparation du préjudice subi, les Sociétés TRIDENT et ELECTRO-RADIO-FROID-ERF J. BARDOT à lui payer une indemnité de 3.000.000 francs de dommages et intérêts, - ordonner la publication du "jugement" à intervenir par extrait dans 5 journaux à son choix et aux frais, in solidum entre elles, des sociétés TRIDENT et ELECTRO-RADIO-FROID ERF J. BARDOT à concurrence de 40.000 francs HT par insertion ; Y ajoutant : - les condamner in solidum à leur payer une indemnité de 100.000 francs pour procédure abusive au titre de leur demande reconventionnelle, manifestement irrecevable et infondée, pour un prétendu abus de position dominante et une somme de 150.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'en tous les dépens de première instance et d'appel avec pour ces derniers, distraction au profit de la SCP SELOSSE BOUVET, avoué, pour ceux d'entre eux dont elle aurait fait l'avance sans en avoir reçu provision. * * * SUR CE Attendu qu'il résulte de l'instruction que, par jugement du 27 avril 1994, le Tribunal de Commerce de CHAUNY a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'endroit de la Sté TRANSTHERM TECHNOLOGIE dont le siège était sis à BLERANCOURT et qui exerçait une activité industrielle dans le domaine des équipements frigorifiques et aérauliques se répartissant en deux départements distincts constitués

par la fabrication d'éléments frigorifiques pour les rames de restaurant de TGV ainsi que par la fabrication et la commercialisation de caves à vins sous le nom commercial "CAVES TRANSTHERM" ;

Qu'à la suite de nouveaux jugement des 20 avril et 5 juillet 1995, l'activité ferroviaire a été cédée au profit de la Sté SITT et l'activité "caves à vins" au profit de la Sté TRANSCAVE constituée à cet effet par le groupe FOCO par acte du 31 mai 1995 ;

Que cependant, ayant constaté la perte de ses deux plus importants clients distributeurs, l'apparition sur le marché de modèles concurrents ainsi que l'association à cette entreprise de la Société BARDOT et de la Sté SITT, laquelle bien qu'ayant racheté la branche ferroviaire, se lançait dans une activité "caves à vins", la Sté TRANSCAVE, par acte du 5 mai 1997, assignait devant le Tribunal de Commerce de CHAUNY lesdites sociétés SITT et BARDOT de même que la Sté TRIDENT sur le terrain de la concurrence déloyale et parasitaire ;

Qu'en cours de procédure la Sté SITT a fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire en date du 8 juin 1998 ;

Que c'est dans ces conditions qu'est intervenu le jugement déféré retenant la responsabilité de la Sté SITT aux motifs que celle-ci avait reproduit le savoir faire original de la Sté TRANSTHERM TECHNOLOGIES transféré à la Sté TRANSCAVE, démarché systématiquement les clients de cette dernière et utilisé les noms de TRANSTHERM en violation de la clause de non concurrence insérée à l'acte de cession ;

Que par ailleurs, le Tribunal a condamné les Sociétés appelantes au titre d'actes de concurrence déloyale du fait que celles-ci connaissaient le contexte particulier dans lequel la Sté SITT intervenait et ne pouvaient ignorer qu'elles engageaient leur responsabilité en diffusant des produits qui étaient la réplique servile de ceux de la Sté TRANSCAVE ; [*

Attendu qu'en cause d'appel la Sté TRANSCAVE, reprenant son argumentation développée en première instance, soutient que "les Sociétés SITT, BARDOT et TRIDENT ont commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire en imitant ou en diffusant des armoires à vins imitant ses produits sur trois points : copie servile du procédé hygrométrique, imitation des autres éléments esthétiques ou fonctionnels, reprise de la gamme spécifique de ses caves" et se fonde, pour ce faire, en particulier sur les rapports d'expertise effectués par MM. A..., B... et DALSACE ; *]

Attendu, toutefois, que s'il est constant que le caractère intrinsèquement protégeable du savoir-faire n'est, en aucune façon, une condition de l'action en concurrence déloyale et parasitaire, laquelle vise à sanctionner quiconque, à but lucratif et de façon injustifiée, s'inspire sensiblement sans nécessité technique d'un produit concurrent, fruit d'un travail intellectuel et d'un investissement spécifique, et évite ainsi, en se plaçant dans le sillage commercial d'un tiers le coût du développement d'un produit nouveau, il convient, tout d'abord, de relever qu'en l'espèce aucun des actes des cessions intervenues entre les sociétés intéressées et, notamment, celui afférent à la cession à la Sté TRANSCAVE de la branche d'activité "cave à vins" ne définit la nature ni la

consistance du savoir-faire technique et industriel dont il est présentement excipé ;

Que, par ailleurs, si l'appelante reproche aux sociétés BARDOT et TRIDENT d'avoir vendu des caves à vins fabriquées par la Sté SITT et vendues indifféremment sous les marques "VIBORG" et "CLIMACAVE" dont "le système de maintien de l'humidité... est purement et simplement copié sur les caves à vins TRANSTHERM" et si M. A... rappelle, dans son rapport, la spécificité du procédé hygrométrique mis au point par l'ancienne Sté TRANSTHERM TECHNOLOGIES, appelé "pompage thermodynamique" dans des plaquettes antérieures aux cessions sus rappelées et consistant à réinjecter à l'intérieur de l'armoire, par une cheminée située dans l'épaisseur du dos de l'appareil, une partie de l'air humide qui s'évapore du bac de récupération des condensats lorsque le compresseur rentre en fonctionnement pour maintenir la température de l'armoire constante à basse température, M. C..., dans le rapport qu'il a également effectué et qui, tels ceux susmentionnés réalisés par MM. A..., B... et DALSACE, a été régulièrement versé aux débats et soumis, de ce fait, aux critiques des parties, rétorque qu'"il n'est pas original de prévoir, comme dans un réfrigérateur usuel, que le tuyau de sortie du compresseur qui conduit au serpentin où circule le gaz cryogénique échauffé, comporte une partie qui traverse le bac de récupération des eaux de condensation provenant de l'intérieur de l'armoire frigorigique pour en faciliter l'évaporation" ;

Que M. C... ajoute que "l'unique particularité de la disposition mise en oeuvre dans les caves à vins considérées est, non pas de réaliser cette évaporation de l'eau, disposition banale et évidente dans une armoire frigorifique mais seulement de prévoir, dans

l'épaisseur de la paroi arrière de l'armoire de la cave un conduit susceptible de mettre en communication l'intérieur de celle-ci et la zone qui surmonte le compresseur et le bac de récupération" ;

Qu'en tout état de cause, à supposer même acquise l'originalité initiale du procédé litigieux, celui-ci est néanmoins dépourvu de toute sophistication technique particulière et ne dispose pas davantage d'une quelconque protection juridique par le biais d'un droit privatif ;

Qu'au demeurant, la Sté TRANSCAVE à l'origine dudit procédé, ne démontre en rien la réalité et l'effectivité des efforts intellectuels ou financiers ; que, par ailleurs, la technique mise en oeuvre est devenue immédiatement accessible à tous à la suite de la commercialisation des dites caves à vins ;

Que, par suite, la reprise d'un savoir-faire à la divulgation obligée et à la portée ainsi de tout homme de l'art ne saurait utilement fonder une action en concurrence déloyale et parasitaire sauf à méconnaître directement le principe de la liberté du commerce et de l'industrie et, par la même, celui de la licéité du dommage concurrentiel, en l'absence de faute démontrée ; * * *

Attendu, en deuxième lieu, que se prévala nt du rapport expertal réalisé par M. B..., la Sté TRANSCAVE relève dans ses écritures "de nombreuses autres similitudes techniques et esthétiques non nécessaires entre les modèles de marque TRANSTHERM et ceux fabriqués par la Sté SITT, commercialisés sous les marques CLIMACAVE et VIBORG par les Sociétés BARDOT et TRIDENT" ;

Que l'intimée énumère les similitudes constatées, traduisant, selon elle, une reprise du savoir-faire lui appartenant que ce soit : le profilé en forme de F qui sert de butée aux bouteilles, le compartiment support du compresseur, les traverses du châssis servant de base à l'armoire, les clayettes à empreinte évidée pour le rangement des bouteilles, le système d'évaporation des condensats, l'évaporateur ou encore l'habillage des portes ;

Que la Sté TRANSCAVE relève aussi "des ressemblances troublantes au niveau des compartiments du compresseur... ou des pieds-verin identiques sur les différents modèles" ;

Que, cependant, M. C... a souligné, pour sa part, les "différences immédiates" existantes entre les caves à vins dont s'agit "notamment en hauteur, dans la conception de leurs portes avant qui est le premier élément visuel perçu par l'acheteur, dans la réalisation du bandeau horizontal supérieur qui comporte les boutons et voyants de commande... ou dans l'aménagement différent des clayettes et de leurs glissières" ;

Que, surtout, il n'est pas contesté que toutes les caves à vins en cause comportent, de façon apparente, une marque identifiant leur origine et distinguant chaque modèle des autres de sorte que le client potentiel ne peut manquer d'y trouver un élément distinctif décisif, lequel, combiné avec les différences de forme et de structure d'ensemble, rend toute confusion impossible ;

Qu'enfin, et au-delà même du tableau présenté par les appelantes dans leurs écritures afin de constater les différences existant entre lesdites caves à vins, les ressemblances dont la Sté TRANSCAVE excipe

résultent plus de nécessités fonctionnelles ainsi que de la destination commune et obligée des produits en cause que d'une prétendue volonté d'imitation servile, génératrice de confusion et non démontrée par les pièces et documents produits ; [*

Attendu, en troisième lieu, que les caves à vins considérées ne pouvant, ainsi qu'il a été ci-dessus démontré, être regardées comme constitutives de copies serviles ou quasi-serviles de celles commercialisées par la Sté TRANSCAVE, cette dernière ne saurait reprocher aux appelantes d'avoir proposé à la clientèle une gamme de caves à vins dont l'articulation serait identique à la sienne propre ;

Qu'au surplus l'intimée ne rapporte pas la preuve, dont la charge lui incombe, du caractère propre et original de la gamme présentée par ses soins et qu'elle prétend, sans pour autant corroborer de façon objective ses dires, avoir été "inhabituelle à l'époque" ; *]

Attendu en conséquence que, si l'action en concurrence déloyale a précisément pour objet d'assurer la protection de celui qui ne peut se prévaloir d'un droit privatif, la Sté TRANSCAVE ne justifie d'aucun fait de parasitisme imputable aux sociétés appelantes ni d'aucun détournement de clientèle ou autres manoeuvres de leur part, étant observé que le libre choix de leur fournisseur par les intéressées ne sauvait, en lui-même, être constitutif d'une faute ;

Que, dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une quelconque nouvelle mesure expertale, il convient d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit que les Sociétés TRIDENT et BARDOT avaient

commis des manoeuvres déloyales et parasitaires au préjudice de la Sté TRANSCAVE, fait interdiction sous astreinte à celles-ci de détenir, vendre, importer, exporter, fabriquer des caves à vins du type de celles actuellement vendues sous les marques "CLIMACAVE", "VIBORG" et "IDEAL CAV" et plus généralement toutes caves reprenant le savoir-faire de la Sté TRANSTHERM et condamné les intéressés au paiement de dommages et intérêts ; [*

Attendu, en quatrième lieu, que si les Sociétés TRIDENT et BARDOT sollicitent reconventionnellement la condamnation de la Sté TRANSCAVE à leur payer une somme de 1.000.000 francs à titre de "légitimes dommages-intérêts" au titre de l'abus de position dominante dont elle se serait rendu coupable, il sera rappelé qu'aux termes de l'article 564 du Nouveau Code de Procédure Civile "les parties ne peuvent soumettre à la Cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait" ;

Que, par suite, cette demande formée pour la première fois en cause d'appel ne peut qu'être déclarée irrecevable ;

Que, pour sa part, l'intimée ne saurait se prévaloir de l'irrecevabilité de cette demande et du caractère abusif de la procédure ainsi poursuivie pour solliciter à son tour l'octroi de dommages et intérêts alors qu'elle ne justifie pas de l'effectivité du préjudice dont elle sollicite réparation à ce titre ; *]

Attendu, enfin, qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce d'ordonner la publication du présent arrêt par extrait dans

la presse ainsi que les appelantes le sollicitent ;

Que leur demande présentée à cette fin sera donc rejetée ; * * * Sur l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

Attendu que la Sté TRANSCAVE, condamnée aux dépens de l'instance exposés par les appelantes et à ceux d'appel, versera aux dites sociétés BARDOT et TRIDENT la somme de 2.500 euros ; PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement par arrêt réputé contradictoire à l'égard de Me GARNIER, es qualité de liquidateur de la Sté SITT,

Reçoit les appels principal et incident jugés réguliers en la forme, Au fond, et statuant dans la limite de ceux-ci, infirme le jugement en ce qu'il a dit que les Sociétés TRIDENT et BARDOT avaient commis des manoeuvres déloyales et parasitaires au préjudice de la Sté TRANSCAVE et prononcé des condamnations pécuniaires à leur encontre ainsi que des interdictions de faire sous astreinte,

Et statuant à nouveau sur ces chefs,

Déboute la Sté TRANSCAVE de l'ensemble de ses prétentions dirigées contre les Sociétés TRIDENT et BARDOT,

Y ajoutant,

Déboute les parties du surplus de leurs conclusions respectives,

Condamne la Sté TRANSCAVE aux dépens de l'instance exposés par les Sté TRIDENT et BARDOT avec, pour ceux d'appel, droit de recouvrement direct au profit de la SCP LE ROY, avoué,

La condamne enfin à verser aux appelantes la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER,

LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 98/02849
Date de la décision : 29/01/2002
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

CONCURRENCE DELOYALE OU ILLICITE - Faute - Parasitisme - Copie servile de la production d'un concurrent

S'il est constant que le caractère intrinsèquement protégeable du savoir faire n'est, en aucune façon, une condition de l'action en concurrence déloyale et parasitaire, laquelle vise à sanctionner quiconque, à but lucratif et de façon injustifiée, s'inspire sensiblement sans nécessité technique d'un produit concurrent, fruit d'un travail intellectuel et d'un investissement spécifique, et évite ainsi, en se plaçant dans le sillage commercial d'un tiers le coût du développement d'un produit nouveau, il convient, tout d'abord, de relever qu'en l'espèce aucun des actes de cession intervenus entre les sociétés intéressées et, notamment, celui afférent à la cession de la société de la branche d'activité "cave à vins" ne définit la nature ni la consistance du savoir faire technique et industriel dont il est présentement excipé. La reprise d'un savoir faire à la divulgation obligée et à la portée ainsi de tout homme de l'art ne saurait utilement fonder une action en concurrence déloyale et parasitaire sauf à méconnaître directement le principe de la liberté du commerce et de l'industrie et, par là même, celui de la licéité du dommage concurrentiel, en l'absence de toute faute démontrée. Si l'action en concurrence déloyale a précisément pour objet d'assurer la protection de celui qui ne peut se prévaloir d'un droit privatif, la société ne justifie d'aucun fait de parasitisme imputable aux sociétés appelantes ni d'aucun détournement de clientèle ou autres manoeuvres de leur part, étant observé que le libre choix de leur fournisseur par les intéressés ne saurait, en lui même, être constitutif d'une faute


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.amiens;arret;2002-01-29;98.02849 ?
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