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01/09/2016 | FRANCE | N°15/11604

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 6e chambre c, 01 septembre 2016, 15/11604


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

6e Chambre C



ARRÊT AU FOND

DU 01 SEPTEMBRE 2016



N° 2016/724









Rôle N° 15/11604







[N], [S], [F] [X] épouse [M]





C/



[C] [H] [I] [M]

































Grosse délivrée

le :

à :



Me Stephen FERNANDEZ



Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD J

USTON





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Juge aux affaires familiales de NICE en date du 21 Avril 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 12/03573.





APPELANTE



Madame [N], [S], [F] [X] épouse [M]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2016/112 du 09/03/2016 accordée pa...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

6e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 01 SEPTEMBRE 2016

N° 2016/724

Rôle N° 15/11604

[N], [S], [F] [X] épouse [M]

C/

[C] [H] [I] [M]

Grosse délivrée

le :

à :

Me Stephen FERNANDEZ

Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge aux affaires familiales de NICE en date du 21 Avril 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 12/03573.

APPELANTE

Madame [N], [S], [F] [X] épouse [M]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2016/112 du 09/03/2016 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

née le [Date naissance 2] 1957 à [Localité 6]

de nationalité Française, demeurant Chez [M] [K] [Adresse 5]

représentée par Me Stephen FERNANDEZ, avocat au barreau de NICE

INTIME

Monsieur [C] [H] [I] [M]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 6]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 6]

représenté par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

assisté de Me Valérie SADOUSTY, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 10 Mai 2016 en Chambre du Conseil. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Chantal MUSSO, président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Chantal MUSSO, Présidente

Mme Michèle CUTAJAR, Conseiller

Mme Edith PERRIN, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Mandy ROGGIO.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 01 septembre 2016.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 01 septembre 2016.

Signé par Madame Chantal MUSSO, Présidente et Madame Mandy ROGGIO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Madame [N] [X] et Monsieur [C] [M] ont contracté mariage le [Date mariage 1] 1982 devant l'officier d'état civil de [Localité 7] après avoir conclu un contrat de mariage devant Maître [U], notaire à [Localité 1], le 22 mai 1982.

De cette union sont issus trois enfants, tous désormais majeurs :

- [K], né le [Date naissance 5] 1987

- [J], née le [Date naissance 4] 1990

- [A], né le [Date naissance 3] 1996.

A la suite de la requête en divorce déposée le 16 juillet 2012 par Madame [X], le juge aux affaires familiales d'AIX-EN-PROVENCE, par ordonnance de non-conciliation en date du 9 octobre 2012, a constaté l'acceptation par les époux du principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l'origine de celle-ci et a notamment déterminé la résidence séparée des époux.

Par acte du 22 juillet 2013, Madame [X] a assigné son mari en divorce sur le fondement des articles 233 et 234 du code civil.

Par jugement rendu le 21 avril 2015, le juge aux affaires familiales d'AIX-EN-PROVENCE a notamment :

- prononcé le divorce de Madame et Monsieur sur le fondement des articles 233 et 234 du code civil, en ordonnant les mesures usuelles relatives à la publicité de cette décision;

- ordonné le report des effets du divorce à la date du 1er décembre 2006;

- ordonné la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux;

- fixé la prestation compensatoire dont Monsieur est redevable envers Madame à la somme en capital de 90 000 euros;

- attribué à Madame en paiement de ladite somme les droits en plein propriété que possède Monssieur dans le bien indivis sis [Adresse 5];

- condamné Monsieur à payer à Madame le solde du capital soit la somme de 27.800 euros;

- débouté Madame de ses prétentions au titre de l'entretien et l'éducation des enfants [J] et [A];

- rejeté toutes demandes plus amples ou contraires;

- fait masse des dépens partagés par moitié entre les époux et recouvrés selon les règles applicables en cas d'aide juridictionnelle.

[N] [X] a formé appel total de cette décision, par déclaration au greffe de la cour d'appel de céans en date du 26 juin 2015.

[C] [M] a constitué avocat le 15 juillet 2015.

Par dernières conclusions notifiées le 17 septembre 2015, Madame [N] [X] demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris et statuant de nouveau;

- ordonner la liquidation du bien immobilier à savoir l'appartement sis [Adresse 1];

- condamner Monsieur à verser une prestation compensatoire à hauteur de 438 000 euros;

- condamner Monsieur à participer pour moitié aux frais scolaires et extrascolaires concernant les enfants [A] et [J] qui poursuivent leurs études;

- débouter Monsieur de toutes ses demandes, fins et conclusions;

- condamner Monsieur à la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

- condamner Monsieur aux entiers dépens lesquels seront recouvrés par Maître Stephen Fernandez.

- confirmer le jugement entrepris pour ses autres dispositions.

Au soutien de ses prétentions, Madame fait d'abord état de la disparité qu' a fait naitre la rupture du mariage, laquelle résulte notamment du fait qu'elle a dû renoncer à sa carrière professionnelle afin de suivre Monsieur muté à l'étranger, et de la succession d'emplois temporaires qui a suivi jusqu'en 2012, date à laquelle elle a été licenciée. Elle souligne qu'elle n'a plus de couverture médicale, alors qu'elle soutient seule son fils notamment pour ses dépenses de santé. Elle précise enfin la situation de Monsieur, lequel s'est remarié en avril 2007, assumant selon sa déclaration fiscale, la prise en charge totale de l'enfant de sa nouvelle épouse et taisant par ailleurs les revenus de sa nouvelle compagne. Elle fait également état d'une minoration par Monsieur des revenus tirés des loyers qu'il perçoit pour l'appartement situé au [Adresse 1], et met en exergue les imprécisions de la partie adverse,quant aux biens dont elle a hérité, s'agissant de leur destination actuelle. Enfin, elle fait état de la perception par Monsieur de 683 564 à titre d'indemnisation pour expropriation par l'Etat chilien en 2006 de sa société. Elle répond par ailleurs aux arguments avancés par Monsieur en soulignant que celui-ci ne rapporte aucune preuve de ses dires. S'agissant du paiement des frais scolaires et extrascolaires de [A] et [J], Madame souligne qu'elle assume la quasitotalité des charges scolaires et de santé de [A], que sa situation personnelle financière ne lui permettent plus de maintenir. Concernant [J], Madame précise qu'elle a assumé en grande partie des frais de voyage au Chili pour sa fille, outre les frais de séjour et médicaux.

Par dernières conclusions notifiées le 1er décembre 2015, Monsieur [C] [M] demande à la cour de :

- réformer le jugement enrepris en ce qu'il a fixé la prestation compensatoire à la somme en capital de 90 000 euros, attribué à Madame en paiement de ladite somme les droits en pleine propriété possédés par Monsieur pour le bien indivis désigné, et condamné Monsieur à payer à Madame le solde du capital soit la somme de 27.800 euros;

et statuant à nouveau :

- dire et juger que Monsieur versera à Madame à titre de prestation compensatoire la somme de 30 000 euros en capital payable sur 5 années;

- condamner Madame au paiement d'une somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

- condamner Madame aux entiers dépens distraits au profit de la SCP Badie Simon-Thibaud & Juston sous son affirmation de droit;

- confirmer le jugement entrepris pour ses autres dispositions.

Au soutien de ses prétentions, Monsieur souligne qu'il vit seul depuis mai 2014, date à laquelle il s'est séparé de sa compagne. La somme perçue en dédommagement de la procédure d'expropriation a été employée à résorber la dette qui avait été accumulée par ladite société, supérieure à 685 000 euros. S'agissant de ses revenus, Monsieur précise que les seuls revenus sont ceux perçus de par son travail et les revenus locatifs du [Adresse 1], tel que cela ressort des déclarations effectuées tant en France qu'au Chili. Il précise enfin que Madame a toujours eu l'opportunité de travailler à l'éranger, mais qu'elle ne l'a pas toujours souhaité, et, davantage, que les pays visités et les cours qu'elle y a suivis, lui ont apporté une maitrise des langues qui lui a notamment permis de travailler par la suite. S'agissant des enfants, Monsieur souligne que Madame ne justifie pas de ce qu'en 2014, [J] poursuit toujours des études, ni de quelle façon elle assume, à titre principal, la charge de son enfant majeur. Il souligne qu'en réalité [J] vit désormais au Luxembourg et travaille pour la Frist Street Bank avec un salaire mensuel brut de 3500 euros. Concernant [A], Monsieur soutient qu'il s'acquitte, outre de la part contributive fixée par le juge chilien, de la sécurité sociale privée, et souligne qu'il n'explique pas les montants dont Madame fait état, au sujet des dépenses de santé de leur enfant mineur.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 26 avril 2016.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'appel

La recevabilité de l'appel n'est pas contestée. Aucun élément n'est fourni à la Cour lui permettant de relever d'office la fin de non-recevoir tirée de l'inobservation du délai de recours. L'appel sera déclaré recevable.

Au fond

Il sera en préliminaire constaté que dans ses écritures, l'appelante a circonscrit le débat à la contribution à l'entretien et l'éducation des enfants [J] et [A], et au quantum de la prestation compensatoire, et que l'intimé n'a formé appel incident que sur le quantum de la prestation compensatoire et le fractionnement du paiement. La Cour entrera donc en voie de confirmation des autres mesures du jugement que les parties n'ont pas jugé utile de soumettre à son appréciation.

Sur la contribution à l'entretien et l'éducation des enfants

Il sera relevé que [J] et [A] sont désormais majeurs.

[N] [X] demande qu'[C] [M] participe à la moitié des frais scolaires et extra-scolaires concernant [A].

[C] [M] a été condamné par un juge chilien, à payer à [N] [X] pour le cadet de la fratrie la somme de 350 000 CLP, soit 481€. L'appelante soutient que l'enfant poursuit des études, mais ne le démontre en rien, car les frais de scolarité dont elle fait état (pièce 34) sont issus de documents très généraux édités par le lycée [Établissement 1] de [Localité 8] du Chili, datent de 2014, et aucune facture n'est établie au nom de [A]. Les pièces versées aux débats ne permettent même pas de comprendre où vit actuellement cet enfant, car [N] [X] est domiciliée à [Localité 6] depuis 2015 dans un studio où demeurent également son fils aîné, sa compagne et leurs deux enfants, en l'absence de tout élément probant sur leur prise en charge effective.

En ce qui concerne [J], actuellement âgée de 26 ans, [N] [X] ne produit là encore aucun document établissant que sa fille est à sa charge et [C] [M] soutient que cette enfant vit désormais au Luxembourg et travaille à la Frist Street Bank pour un salaire mensuel brut de 3500€.

C'est à juste titre que le premier juge a débouté [N] [X] de ses prétentions au titre de la contribution à l'entretien et l'éducation des enfants.

Sur la prestation compensatoire

Il résulte des articles 270 et suivants du Code Civil que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives. La prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible. Pour ce faire, le juge prend en considération un certain nombre d'éléments non limitativement énumérés par l'alinéa 2 de l'article 271 du Code Civil, à savoir notamment :

- la durée du mariage

- l'âge et l'état de santé des époux

- leur qualification et leur situation professionnelle

- les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne

- le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial

- leurs droits existants et prévisibles

- leur situation respective en matière de pensions de retraite en ayant estimé autant qu'il est possible, la diminution des droits à retraite qui aura pu être causée, pour l'époux créancier de la prestation compensatoire, par les circonstances visées au sixième alinéa.

La situation des époux se présente comme suit, étant ici précisé que certaines pièces versées aux débats sont en langue espagnole, ou n'ont été que partiellement traduites, ce qui rend difficile leur exploitation. Par ailleurs, les sommes figurant en pesos chiliens (CLP) ont été convertis en euros au cours du jour de la rédaction du présent arrêt.

[C] [M] est âgé de 62 ans et [N] [X] de 58 ans.

[N] [X] a connu en 2012 des problèmes de dépression nerveuse, et était encore suivie sur le plan psychiatrique par un médecin psychiatre pour adulte au Chili en mai 2015.

Le mariage a été célébré le [Date mariage 1] 1982 et le couple s'est séparé le 1er décembre 2006. La vie commune postérieure au mariage a donc duré plus de 24 ans.

Le couple a eu trois enfants, tous désormais majeurs. Comme il a été vu plus haut, [C] [M] a été condamné par une juridiction chilienne à verser pour cet enfant, qui aura 20 ans au mois d'octobre prochain, une contribution de 481€. Il a accusé à une certaine époque un retard dans le paiement de cette pension alimentaire (en août 2013, l'avocate chilienne de [N] [X] avait chiffré le retard à 1 476 728 CLP, soit 2034€) mais verse aux débats des ordres de virements mensuels réguliers de la somme de 370 000 CLP (510€) et soutient avoir intégralement réglé l'arriéré de pension.

[N] [X] est détentrice de deux diplômes : une licence de psychopédagogie et une licence en administration d'entreprises et institutions publiques.

Sur son contrat de mariage, elle se présente comme comptable et son relevé de carrière montre qu'effectivement en 1982 elle travaillait, puisqu'elle a validé 4 trimestres. Elle a ensuite été employée régulièrement jusqu'en 1989, dans diverses sociétés. Le couple est parti en 1989 pour répondre aux contraintes professionnelles du mari, cadre dans l'entreprise Michelin, en Thaïlande (où est née leur fille [J]), puis en Italie (de 1992 à 1994) et enfin au Chili à compter de 1998. [C] [M] soutient que lors des séjours à l'étranger, [N] [X] avait l'opportunité de travailler mais ne l'a pas toujours souhaité. Toutefois, outre le fait que cette assertion n'est en rien étayée, les années 1990 à 1998 correspondent à une époque où les trois enfants du couple étaient en bas âge, et en l'absence d'éléments contraires, il sera retenu que l'inactivité professionnelle de [N] [X] correspondait à une organisation familiale voulue par les deux époux.

En 1998, le couple s'est installé au Chili, et le mari a créé une société EUROALTEC où l'épouse a été embauchée jusqu'en février 2007 en qualité de directrice administrative et financière (pièce 9 de l'intimé ' CV établi au Chili par [N] [X]) pour un salaire de base de 1 050 000 CLP (1447€). [C] [M] soutient que lors de son licenciement, elle a reçu la somme de 8 752 320 CLP (12 065€) sans l'établir alors que cette affirmation est formellement réfutée par l'appelante.

A compter de 2007, [N] [X] a effectué diverses mission ponctuelles pour l'ambassade de France, a travaillé pour les sociétés TEXTURAS INDUSTRIALES SA (7 mois) et MARUBENI LP HOLDINGS (3 années et 8 mois).

Son dernier emploi au Chili a été un poste de secrétaire administrative pour une société Enrique Escobar Espinoza qui lui a rapporté en septembre 2014, la somme de 146 273 CLP (soit 201.50€)

Elle est rentrée en France au printemps 2015 et a sollicité aussitôt le bénéfice du revenu de solidarité active qu'elle a obtenu : 275.51€ d'abord puis 461.26€ à compter du mois d'octobre 2015. Elle est inscrite à Pôle Emploi et a pour projet de s'installer en qualité d'agent commercial dans l'immobilier.

Elle indique demeurer au [Adresse 5], avec son fils aîné et sa famille. Elle justifie des frais de la vie courante. Elle bénéficie de la CMU.

Relativement à ses droits à retraite, elle bénéficie pour l'heure d'une retraite en France, et une autre au Chili. Son relevé de carrière en France fait apparaître à la date du 19 septembre 2012, 44 trimestres validés dont 30 depuis son mariage. Elle totalisait 1477.63 points ARRCO, 426 points AGIRC et 6 points IRCANTEC. Si elle part à la retraite en 2020, son taux s'élèvera à 37.5% soit un revenu mensuel brut de 179.25€.

Au Chili, elle a totalisé 105 mois de cotisation. Provida, la Caisse de retraite chilienne, chiffre sa retraite brute mensuelle à la somme de 82 376 CLP soit 113.30€.

[C] [M] détient un diplôme d'ingénieur commercial délivré par l'Institut Commercial de [Localité 5], et un Master in Business Administration (MBA) de l'université [Établissement 2] aux USA.

Il a travaillé comme cadre pour la société Michelin en France et à l'étranger de 1981 à 1998.

Au Chili, il a créé une société EUROALTEC dont l'activité était la vente de pneumatiques, dans lequel il possédait 89 999 actions tandis que [N] [X] n'en détenait qu'une. Cette société a fait l'objet d'une expropriation qui semble n'avoir été que partielle (pièce 19 de l'appelante), et qui a donné lieu au versement d'une indemnité de 449 787 600 CLP soit au total la somme de 619 350€.

Le 20 juillet 2007, la société EUROALTEC SA, représentée par [C] [M] a créé avec une dame [P] [Q], présentée dans l'acte comme l' épouse de ce dernier (sic), une société APC LTDA dont l'objet était la vente, réparation, formation et conseil en matière de pneumatiques. La société EUROALTEC SA a fait un apport de 2 500 000 CLP (soit 3443€) dans cette nouvelle société dont le capital social s'élevait à 3 000 000 CLP (soit 4131€).

Dans son CV, il se présente à partir du mois d'octobre 2007 comme directeur général d'une société SICAN SPA, sise à [Localité 2] dont l'activité se place dans le service des pneumatiques. Au 21 mars 2014, la société SICAN SPA avait une dette de 20 617 722 CLP (soit 28 396€) envers le Trésor Public

Dans sa déclaration sur l'honneur du 14 janvier 2015, il déclare détenir 100% d'actions d'une société El Mundo del Neumatico.

Dans ses écritures, il indique ne travailler que dans une société, sans indiquer laquelle ; dans sa déclaration sur l'honneur il affirme que la société EUROALTEC SA et la société El Mundo del Neumatico ne sont pas actives. Il est taisant sur la société APC LTDA.

Par ailleurs, il mentionne dans sa déclaration sur l'honneur une dette d'EUROALTEC de 55 000 000 CLP (75 730€).

Ses revenus déclarés en France pour l'année 2013 se sont décomposés en salaires : 8285€ et revenus fonciers : 3090€.

Il a vécu jusqu'au 8 mai 2014 avec [P] [Q]. Ses conditions de vie à [Localité 2] ne sont pas connues (contrat de bail non traduit et dont il manque une page). Il fait état de diverses mises en demeure du fisc français pour des impôts et taxes non payées ( IRPP 2012 , taxe d'habitation 2014) et un avis à tiers détenteur pour un montant de 393€.

Sur le plan de la retraite, [C] [M] totalise 79 trimestres au régime général, et un trimestre dans la marine. Il a cumulé au 21 février 2014 4758.76 points ARRCO et 32 739 points AGIRC. Il évalue sa retraite mensuelle à la somme de 2082€.

Sur le plan patrimonial, le couple est détenteur de deux biens indivis :

- un bien sis [Adresse 5], studio d'une superficie de 30 m2 acquis le 18 novembre 1991, évalué en novembre 2012 à la somme de 124 401€

- un appartement de 2 pièces d'une superficie de 42m2 sis [Adresse 1], acquis le 5 mars 1984, évalué en 2012 à la somme de 96 356€.

Ces deux biens ont été financés grâce à des emprunts qui sont entièrement acquittés à ce jour.

Les époux possédaient deux autres biens, vendus pour le premier le 30 mai 1994 alors que le couple vivait en Italie, pour la somme de 825 000F et pour le second en juillet 2000 alors qu'ils résidaient en Thaïlande pour la somme de 270 000F. [N] [X] soutient que les capitaux résultant de ces ventes ont été investis dans la création de la société EUROALTEC (non démontré), ainsi d'ailleurs que de l'argent provenant de plusieurs comptes dont certains ouverts aux noms des enfants, viré de France au Chili en 2003.

Le bien de l'avenue Lascaris est loué, et les fruits de cette location sont perçus depuis plusieurs années par le mari.

Suite au décès de son père en 2009, [N] [X] est nu-propriétaire avec sa s'ur d'une parcelle de terre et d'un immeuble sis à [Localité 9], leur mère ayant opté pour la totalité en usufruit des biens meubles et immeubles de la succession.

[C] [M] a détenu quant à lui :

- une parcelle de 9600m2 au lieu dénommé [Localité 4] dans la Commune de [Localité 3] vendue en 2013 pour la somme de 4500 UD soit 117 576 810 CHL (soit 161 852€)

- un appartement sis [Adresse 3] vendu le 2 juin 2015 pour la somme de 295 000€

- un bien sis [Adresse 2], vendu en 2012 pour un prix ignoré.

Le service de la publicité foncière attestait le 8 décembre 2014 d'un autre bien sis [Adresse 4] (valeur ignorée)

Tous ces éléments ont été fournis par l'appelante.

Par ailleurs, une évaluation est produite aux débats par [N] [X] des locaux de la société EUROALTEC SA sise [Adresse 7] pour un montant de 355 219 790 CLP, soit 486 147€.

L'étude de ces divers éléments montre que la rupture du lien conjugal crée une évidente disparité :

- en termes de revenus, [N] [X] ne perçoit pour l'heure que le revenu de solidarité active tandis qu'[C] [M] est complètement opaque dans la présentation de sa situation financière. En effet, si l'on en croit sa déclaration des revenus pour l'année 2013, sa rémunération mensuelle s'établit à peine à 501 423 CLP (soit 685€), alors que sa société SICAN SPA offrait à la même époque des postes de vulcanisateur pour un salaire de base de 400 000 CLP (soit 546€), et qu'un tel salaire ne correspond en rien à ses diplômes. De plus, dans sa déclaration sur l'honneur, il indique qu'EUROALTEC SA n'a aucune activité, alors que lorsque l'évaluateur immobilier s'est présenté à l'adresse de la société en novembre 2014, il a constaté l'existence d'une société de fabrication de sacs poubelles, dont [C] [M] a refusé l'entrée.

- en terme de patrimoine, puisque [C] [M] est propriétaire de plusieurs biens propres, tandis que [N] [X] n'est que nu-propritaire.

La disparité est de plus aggravée par :

- la différence dans les droits à pension prévisibles, qui seront nettement moindre pour [N] [X] non pas seulement parce que ses revenus étaient inférieurs à ceux de son époux, mais parce qu'elle a arrêté son activité pour favoriser la carrière de son mari et s'occuper des enfants

- la longueur significative de la vie commune.

Cependant, dans le calcul de la disparité il faut retenir également des correctifs tels que la date de la séparation du couple et le fait que les époux vivent séparés depuis près de 10 ans, les créances que [N] [X] entend faire valoir lors de la liquidation du régime matrimonial, puisque les fruits de biens indivis auraient été investis à ses dires dans la société dont le mari était majoritairement porteur de parts, ainsi que les comptes de gestion qu'elle va demander au mari du fait de la perception par lui seul des locations de l'appartement de la [Adresse 1].

Au vu de l'ensemble de ces considérations, il apparaît que le premier juge a quelque peu sous-évalué le montant de la prestation compensatoire allouée à l'épouse. Il convient de réformer la décision et fixer la prestation compensatoire à la somme de 150 000€, payable :

- Par abandon en pleine propriété de la part indivise du bien sis [Adresse 5] cadastré selon acte notarié de Maître [E] [T], notaire à [Localité 6], en date du 18 novembre 1991, cadastré section [Cadastre 1] pour deux ares, trente-deux centiares, composé d'un appartement situé au 3ème étage comprenant un séjour, une cuisine indépendante, une salle d'eau avec WC , dont la valeur a été fixée à 124 400€ soit revenant à [C] [M] la somme de 62 200€. Cet abandon en pleine propriété apparaît judicieux dans la mesure où l'intimé accepte dans sa proposition de règlement des intérêts pécuniaires, que ledit bien soit attribué à son épouse, et que par ailleurs, il est impossible en l'absence d'éléments communiqués par le mari, ce qu'il est advenu des fruits des différentes ventes opérées par lui.

- Par le versement d'un capital de 87 800€ payable en un seul versement

Les dépens

Conformément à l'article 1125 du Code de Procédure Civile, ils seront partagés par moitié.

L'équité ne commande pas d'allouer à [N] [X], titulaire de l' aide juridictionnelle totale, une indemnité au titre des frais irrépétibles, non plus qu'à [C] [M]

Par ces motifs

La cour, statuant en audience publique, contradictoirement, après débats en chambre du conseil

Reçoit l'appel

Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions, excepté le quantum de la prestation compensatoire

Et statuant à nouveau de ce seul chef,

Condamne [C] [M] à payer à [N] [X] une prestation compensatoire de 150 000€ dont il s'acquittera :

- Par abandon en pleine propriété de la part indivise du bien sis [Adresse 5] cadastré, selon acte notarié de Maître [E] [T], notaire à [Localité 6], en date du 18 novembre 1991, section [Cadastre 1] pour deux ares, trente-deux centiares, composé d'un appartement situé au 3ème étage comprenant un séjour, une cuisine indépendante, une salle d'eau avec WC , dont la valeur a été fixée à 124 400€, soit revenant à [C] [M] la somme de 62 200€

- Par le versement d'un capital de 87 800€ payable en un seul versement

Déboute [C] [M] et [N] [X] de leurs demandes respectives au titre des frais irrépétibles

Dit que les dépens seront partagés par moitié entre les époux.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 6e chambre c
Numéro d'arrêt : 15/11604
Date de la décision : 01/09/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 6C, arrêt n°15/11604 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-09-01;15.11604 ?
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