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29/09/2014 | FRANCE | N°12/23614

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 3e chambre b, 29 septembre 2014, 12/23614


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

3e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 29 SEPTEMBRE 2014



N° 2014/403













Rôle N° 12/23614







[Z] [X]





C/



S.A. GRT GAZ

S.A. GRDF

SARL LARAZER

SA GAN ASSURANCES









Grosse délivrée

le :

à :

Me S. BAGNIS

SCP BOISSONNET

SELARL GOBAILLE

Me J-R DRUJON D'ASTROS















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 08 Novembre 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 10/04625.





APPELANT



Monsieur [Z] [X],

demeurant [Adresse 5]

représenté et plaidant par Me Stéphanie BAGNIS, avocate au barreau D'AIX-EN-PR...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

3e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 29 SEPTEMBRE 2014

N° 2014/403

Rôle N° 12/23614

[Z] [X]

C/

S.A. GRT GAZ

S.A. GRDF

SARL LARAZER

SA GAN ASSURANCES

Grosse délivrée

le :

à :

Me S. BAGNIS

SCP BOISSONNET

SELARL GOBAILLE

Me J-R DRUJON D'ASTROS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 08 Novembre 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 10/04625.

APPELANT

Monsieur [Z] [X],

demeurant [Adresse 5]

représenté et plaidant par Me Stéphanie BAGNIS, avocate au barreau D'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Amaury GAUTHIER, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEES

S.A. GRT GAZ

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié au siège social sis

[Adresse 4]

représentée par la SCP BOISSONNET ROUSSEAU, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Julien SCAPEL de la SCP SCAPEL & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

S.A. GRDF

prise en la eprsonne de son représentant légal en exercice domicilié au siège social sis

[Adresse 1]

représentée par la SCP BOISSONNET ROUSSEAU, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Julien SCAPEL de la SCP SCAPEL & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

SARL LARAZER

Immatriculée au RCS d'Avignon sous le n°479 960 734

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 3]

représentée par la SELARL GOBAILLE & SARAGA-BROSSAT, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Jean Claude AKOUN, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

SA GAN ASSURANCES

Immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 542 063 797

agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège sis

[Adresse 2]

représentée et plaidant par Me Jean-rémy DRUJON D'ASTROS de la SCP DRUJON D'ASTROS/BALDO & ASSOCIES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Véronique DEMICHELIS de la SCP

DRUJON D'ASTROS/BALDO & ASSOCIES, avocate au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 03 Septembre 2014 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Patricia TOURNIER, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Jean-François BANCAL, Président

Madame Patricia TOURNIER, Conseillère (rédactrice)

Madame Marie- José DURAND, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Septembre 2014

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Septembre 2014,

Signé par Monsieur Jean-François BANCAL, Président et Mme Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé du litige :

Le 26 février 2009, alors que la société Larazer effectuait un forage pour le compte de Monsieur [X] sur une parcelle de terrain appartenant à celui-ci, située à [Adresse 5], la canalisation de transport de gaz naturel DN 150 a été endommagée et percée.

Par actes d'huissier en date du 23 juin 2010, la société GRT Gaz, chargée du transport du gaz et propriétaire de la canalisation, et la société GRDF, chargée de la distribution du gaz, ont fait assigner devant le tribunal de grande instance d'Aix en Provence la société Larazer, Monsieur [X], ainsi que la société GAN Iard en qualité d'assureur de la société Larazer sur le fondement des articles 1382 et 1384 alinéa 1 du code civil, L 124-3 du code des assurances, à l'effet de voir déclarer la société Larazer et Monsieur [X] responsables des préjudices subis du fait du percement de la canalisation enfouie et de les voir condamnés in solidum avec la société GAN au paiement de diverses sommes en réparation de leurs préjudices respectifs.

Par décision en date du 8 novembre 2012, le tribunal de grande instance a :

- condamné solidairement Monsieur [X] et la société Larazer à payer :

° à la société GRT Gaz la somme de 30'963,18 €, majorée des intérêts à échoir à compter de la signification du jugement,

° à la société GRDF la somme de 10'527,27 €, majorée des intérêts à échoir à compter de la signification du jugement,

° aux sociétés GRT Gaz et GRDF la somme globale de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté le surplus des demandes principales,

- rejeté les demandes reconventionnelles de la société GAN Assurances,

- condamné in solidum Monsieur [X] et la société Larazer aux dépens, avec application de l'article 699 du code de procédure civile pour leur recouvrement,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Monsieur [X] a interjeté appel à l'encontre de cette décision par déclaration reçue au greffe le 17 décembre 2012.

Par ses dernières conclusions notifiées le 15 mars 2013, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens et des prétentions, Monsieur [X] demande à la cour au visa des articles 1134 et 1135, 1382 et 1384 du code civil, du décret du 14 octobre 1997, de l'arrêté ministériel du 16 novembre 1994 :

- de recevoir son appel et de le déclarer bien fondé,

- d'infirmer la décision déférée en toutes ses dispositions,

- à titre principal,

° de dire que la société Larazer en sa qualité de maître d''uvre dans le cadre du contrat d'entreprise conclu avec le concluant se devait de rechercher les informations relatives à la présence d'éventuelles canalisations de gaz sur le lieu d'exécution des travaux,

° de dire que la société Larazer a manqué à ses obligations d'information et de conseil à l'égard du concluant en ne l'informant pas de ce qu'il avait l'obligation avant tous travaux de se rapprocher de la mairie et des exploitants d'ouvrage,

° de dire que le concluant n'a commis aucun manquement au titre des dispositions du décret du 14 octobre '2009",

° de débouter en conséquence les sociétés GRT Gaz, GRDF et la société Larazer de l'ensemble de leurs prétentions à l'encontre du concluant,

- à titre subsidiaire,

° de dire que les manquements de la société Larazer à ses obligations contractuelles issues du décret du 14 octobre 1991, constituent la cause exclusive des dommages subis par les sociétés GRT Gaz et GRDF,

° de dire que les manquements de la société Larazer à ses obligations contractuelles issues du décret du 14 octobre 1991 caractérisent le fait d'un tiers exonérant le concluant de toute responsabilité à l'égard des sociétés GRT Gaz et GRDF sur le fondement des articles 1382 et suivants du code civil,

° de dire que les sociétés GRT Gaz et GRDF ont manqué à leur obligation de fournir un plan actualisé des lieux de situation de leurs ouvrages auprès de la mairie de [Localité 4] au sens du décret du 14 octobre 1991,

° de débouter en conséquence les sociétés GRT Gaz et GRDF, ainsi que la société Larazer de l'ensemble de leurs prétentions émises à l'encontre du concluant,

- à titre très subsidiaire,

° de dire qu'il n'existe pas de lien de causalité entre le fait pour le concluant de ne pas s'être renseigné lui-même auprès de la mairie de [Localité 4], préalablement à l'exécution des travaux litigieux et les dommages subis par les sociétés GRT Gaz et GRDF,

° de débouter en conséquence les sociétés GRT Gaz et GRDF, ainsi que la société Larazer de l'ensemble de leurs prétentions émises à l'encontre du concluant,

- à titre infiniment subsidiaire,

° de dire que le préjudice des sociétés GRT Gaz et GRDF en lien de causalité avec la prétendue carence de Monsieur [X] ne peut être qu'une perte de chance qui ne saurait être égale à 100 %,

° de dire qu'il convient d'exclure des sommes réclamées, celles correspondant aux salaires des employés habituels des sociétés GRT Gaz et GRDF,

- en tout état de cause, de condamner les sociétés GRT Gaz et GRDF, et la société Larazer aux entiers dépens, avec application de l'article 699 du code de procédure civile pour leur recouvrement, ainsi qu'à payer au concluant la somme de 2500 € chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les sociétés GRT Gaz et GRDF, par leurs dernières conclusions notifiées le 17 décembre 2013, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens et des prétentions, demandent à la cour :

- de confirmer la décision déférée,

- en conséquence,

° de dire que la société Larazer et Monsieur [X] sont responsables des préjudices subis par les concluantes,

° de dire bien fondée l'action directe formée par les concluantes à l'encontre de la société GAN en sa qualité d'assureur de l'entreprise Larazer,

° de condamner Monsieur [X] in solidum avec l'entreprise Larazer et son assureur, la société GAN au paiement :

d'une part, de la somme de 30'963,18 € TTC à la société GRT Gaz en réparation de son préjudice, majorée des intérêts au taux légal à compter « de la présente assignation » avec capitalisation des intérêts sur le fondement de l'article 1154 du Code civil,

d'autre part, de la somme de 10'521,27 € TTC à la société GRDF en réparation de son préjudice, majorée des intérêts au taux légal à compter « de la présente assignation » avec capitalisation des intérêts sur le fondement de l'article 1154 du Code civil,

- de condamner la société Larazer et Monsieur [X] à payer in solidum la somme de 2500 €, à chacune des concluantes au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile pour leur recouvrement.

Par ses dernières conclusions notifiées le 3 janvier 2014, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens et des prétentions, la société Larazer a formé appel incident et demande à la cour au visa de l'article 3 du décret du 14 octobre 1991 et des articles 1134 et 1382 du code civil :

- de réformer la décision déférée,

- de dire que les sociétés GRT Gaz et GRDF n'ont pas respecté les obligations légales mises à leur charge au regard des dispositions du décret du 14 octobre 1991 et en conséquence de les débouter de leurs demandes dirigées contre la concluante,

- si la cour devait juger que ces sociétés ont respecté leurs obligations légales,

°de dire que seules les demandes formulées au titre du quantum concernant les factures externes et la perte d'énergie pourront être valablement retenues,

° de dire que la responsabilité pleine et entière de Monsieur [X] doit être retenue en fonction des fautes incontestables qu'il a commises,

et si la cour devait juger que cette responsabilité ne doit pas être retenue dans son intégralité, de dire qu'elle devra l'être à concurrence de deux tiers,

° de dire que la société GAN devra garantir le sinistre et de la condamner à relever la concluante de toutes condamnations pouvant être prononcées à son encontre,

- en tout état de cause, de condamner les sociétés GRT Gaz et GRDF d'une part, la société GAN et Monsieur [X] d'autre part, à payer la somme de 2500 € « chacune » sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,

- de condamner Monsieur [X], les sociétés GRT Gaz et GRDF, ainsi que la société GAN au paiement de la somme de 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais de postulation en appel non compris dans les dépens, outre les entiers dépens, avec application de l'article 699 du code de procédure civile pour le recouvrement de ceux d'appel.

Par ses dernières conclusions notifiées le 29 avril 2013 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens et des prétentions, la société GAN Assurances demande à la cour au visa de l'article 1134 du Code civil :

- de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a jugé que la garantie de la concluante n'était pas acquise à la société Larazer pour le sinistre en cause,

- de dire que la police d'assurance souscrite auprès de la concluante se limite aux clauses contenues au devis signé le 29 janvier 2009, formalisé par la police d'assurance adressée à la société Larazer,

- de dire que ce contrat ne couvre pas l'activité de forage, ni l'activité exercée sur un chantier privé,

- plus largement, de dire que la société Larazer ne peut prétendre à la garantie de la concluante pour le sinistre dont s'agit, non couvert par la police d'assurance en cause,

- de débouter les sociétés GRT Gaz et GRDF de leurs demandes à l'encontre de la concluante,

- de condamner tout succombant aux dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile pour leur recouvrement, ainsi qu'à payer à la concluante une somme de 2000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure est en date du 24 juin 2014 après révocation de la précédente ordonnance de clôture rendue le 7 janvier 2014 par décision en date du 8 janvier 2014.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

En application de l'article 3 du décret du 14 octobre 1991, qui s'applique aux travaux réalisés notamment au voisinage d'ouvrages souterrains de transport ou de distribution de gaz, les exploitants des dits ouvrages doivent communiquer aux mairies et tenir à jour sous leur seule responsabilité, les adresses auxquelles doivent être envoyées les demandes de renseignements et les déclarations d'intention de travaux ensuite définies ;

un plan établi et mis à jour par chaque exploitant concerné est déposé en mairie et tenu à la disposition du public ;

ce plan définit à l'intérieur du territoire communal, les zones dans lesquelles s'appliquent les dispositions des articles 4 alinéa 2 et 7 alinéa 1er.

L'article 4 du décret mentionne notamment que toute personne physique ou morale de droit privé ou de droit public qui envisage la réalisation sur le territoire d'une commune, de travaux énumérés aux annexes I à VII du décret, doit au stade de l'élaboration du projet, se renseigner auprès de la mairie de la commune sur l'existence et les zones d'implantation éventuelles des dits ouvrages ;

la demande de renseignement doit être adressée à chacun des exploitants d'ouvrages qui ont communiqué leur adresse à la mairie, dès lors que les travaux envisagés se situent dans une zone définie par le plan établi à cet effet par l'exploitant concerné et déposé par lui en mairie; elle doit être faite par le maître d'ouvrage ou le maître d'oeuvre lorsqu'il en existe un ;

les exploitants sont tenus de répondre dans le délai d'un mois à compter de la date de réception de la demande.

Aux termes de l'article 7 du décret, les entreprises chargées de l'exécution de travaux entrant dans le champ d'application des annexes I à VII du décret doivent adresser une déclaration d'intention de commencement des travaux à chaque exploitant d'ouvrage concerné par les travaux, déclaration qui doit être reçue par les exploitants d'ouvrage dix jours au moins, jours fériés non compris, avant la date de début des travaux.

L'article 10 du décret précise enfin que les exploitants communiquent sous leur responsabilité et avec le maximum de précisions possible, tous les renseignements en leur possession sur l'emplacement de leurs ouvrages existant dans la zone où se situent les travaux projetés, et y joignent les recommandations techniques écrites applicables à l'exécution des travaux à proximité des dits ouvrages ; que si les travaux rendent nécessaires le repérage préalable et en commun, de l'emplacement sur le sol des ouvrages, les exploitants en avisent l'exécutant des travaux afin de coordonner les dispositions à prendre, les travaux ne pouvant être entrepris qu'après communication des indications et recommandations fournies par les exploitants, à charge pour ces derniers d'avoir répondu à l'exécutant neuf jours au plus tard, jours fériés non compris, après la date de réception de la déclaration ;

qu'en l'absence de réponse dans ce délai, les travaux peuvent être entrepris trois jours, jours fériés non compris, après l'envoi par l'exécutant des travaux d'une lettre de rappel confirmant l'intention d'entreprendre les travaux.

L'annexe I vise notamment les travaux de forage exécutés à moins de quinze mètres d'ouvrages de transports d'hydrocarbures liquides ou liquéfiés, de transport de gaz combustibles ou de produits chimiques.

En l'espèce, il résulte du procès-verbal de constat en date du 26 février 2009, réalisé à la requête de la société GRT Gaz, que diverses déclarations ont été faites à l'huissier :

le foreur de la société Larazer a précisé que le matin, alors qu'il était en cours de forage, il a été alerté par une forte odeur de gaz, a vu les vapeurs sortir de terre et a alors tout arrêté ;

le cadre technique de la société GRT Gaz a indiqué que dès que les services ont été prévenus de l'incident, la conduite de gaz perforée a été mise en sécurité, ce qui a provoqué des coupures partielles pour les clients de [Localité 1], [Localité 3], et [Localité 4], ainsi que pour deux clients industriels, à savoir les Chaux de Provence et la raffinerie Total de [Localité 2], et que le volume de gaz perdu dans l'atmosphère peut être évalué provisoirement à 10 000 m3 ;

le gérant de la société Larazer a dit ne pas avoir fait de déclaration avant les travaux car ignorant que le sous-sol de la propriété recélait une conduite de gaz enfouie, le propriétaire ne lui ayant donné aucune indication à ce sujet ;

l'huissier a par ailleurs noté la présence d'une tarière de forage immobilisée en place, son foret enfoui dans le sol ;

il a constaté que la voie ferrée longe la propriété [X] et qu'en bordure de celle-ci, non loin du chantier en cours, se trouvent trois bornes jaunes de signalisation de la conduite de gaz enfouie.

Il est par ailleurs constant que Monsieur [X] n'a procédé à aucune demande de renseignement et que la société Larazer n'a adressé aucune déclaration d'intention de commencer les travaux.

Enfin, l'acte notarié d'acquisition par Monsieur [X], de la parcelle de terrain sur laquelle a eu lieu le forage litigieux, établi le 5 septembre 1994, mentionne au titre des servitudes d'urbanisme particulières, l'existence notamment d'une servitude I3, l'immeuble étant situé dans une zone de servitudes relatives aux canalisations de transport de gaz.

Il se déduit de ces éléments que la responsabilité de la société Larazer est engagée à l'égard des sociétés GRT Gaz et GRDF sur le fondement des articles 1384 alinéas 1 et 5 du code civil, responsabilité sans faute, dès lors que le foret utilisé par son préposé a causé le dommage survenu sur la canalisation de gaz passant dans le terrain appartenant à Monsieur [X].

La société Larazer ne peut utilement arguer d'une faute de l'exploitant pour échapper à cette responsabilité ;

en effet, conformément à l'article 3 du décret susvisé, l'exploitant avait communiqué son adresse, dont il n'est pas établi qu'elle n'aurait pas été exacte, GDF disposant d'agences locales et n'ayant pas à indiquer le siège social parisien ;

le fait que le plan déposé en mairie ait été en date du 17 avril 1997 ne saurait être constitutif d'une faute de la part de l'exploitant, dans la mesure où cela n'implique pas en soi qu'il n'était pas à jour, la société Larazer ne démontrant pas que les indications y étant portées n'auraient plus été d'actualité et l'obligation de mise à jour ne se concevant que dans l'hypothèse où une modification est intervenue postérieurement au dépôt du plan ;

par ailleurs, si ce plan était peu lisible et ne permettait pas de déterminer les zones éventuellement concernées par une demande de renseignement et une déclaration de travaux préalables, indépendamment de la détermination ultérieure de l'emplacement précis des conduites, cette absence de lisibilité n'est pas de nature à exonérer la société Larazer de sa responsabilité, dans la mesure où celle-ci ne pouvait ignorer la présence de conduites de gaz dans la zone où elle devait intervenir, du fait de la présence de bornes sur le terrain, présence qui devait nécessairement la conduire à formaliser une déclaration préalable de travaux, ce qui aurait alors conduit l'exploitant à préciser l'emplacement de la conduite conformément à l'article 10 du décret susvisé.

Les sociétés GRT Gaz et GRDF sont par ailleurs fondées à rechercher la responsabilité de Monsieur [X] sur le fondement de l'article 1382 du code civil ;

en effet, celui-ci a commis une faute en ne procédant pas à la demande de renseignement préalable qui lui incombait à titre personnel en tant que maître de l'ouvrage, conformément à l'article 4 du décret susvisé dont il lui appartenait de prendre connaissance sans pouvoir arguer d'un manquement de la société Larazer à son devoir de conseil sur ce point et sans qu'il puisse sérieusement soutenir que l'obligation de renseignement aurait reposé sur la société Larazer, au motif que celle-ci aurait eu la qualité de maître d'oeuvre :

une telle qualité, qui implique une mission de conception, de coordination et de contrôle de la bonne exécution des travaux, n'est nullement établie et ne peut se déduire de la simple acceptation par Monsieur [X] du devis établi par celle-ci visant exclusivement la réalisation d'un forage et la pose de tuyauteries, raccordement et soudure ; la société Larazer justifie à l'inverse, par la production de l'attestation de Monsieur [C], qui effectuait le forage, que l'emplacement de celui-ci a été défini par un sourcier désigné par Monsieur [X] ;

Monsieur [X] a également commis une faute en n'avisant pas la société Larazer de la présence de conduites de gaz sur son terrain, dont la présence lui était nécessairement connue du fait des mentions figurant dans son acte d'acquisition, ainsi que du fait de la présence de bornes signalant cette présence à proximité du chantier prévu ;

la carence de la société Larazer, qui ne s'est pas préoccupée de l'emplacement exact des conduites de gaz, alors que leur présence était signalée par des bornes non loin du chantier, et n'a pas procédé à une déclaration préalable de commencement de travaux, ne peut avoir pour effet d'exonérer Monsieur [X] des conséquences de ses propres fautes dans ses rapports avec les sociétés GRT Gaz et GRDF ; le fait que la société Larazer ait exercé une activité de forage ne figurant pas dans son objet social déclaré est par ailleurs sans lien de causalité avec les dommages ;

aucune faute exonératoire ne peut être retenue à l'encontre des sociétés GRT Gaz et GRDF pour les motifs sus-indiqués ;

les fautes de Monsieur [X] sont en lien de cause à effet direct et certain avec l'entier dommage subi par les sociétés GRT Gaz et GRDF, dès lors qu'elles ont eu pour effet de ne pas permettre à l'exploitant de définir l'emplacement précis de la conduite de gaz préalablement à l'engagement des travaux.

Le tribunal a donc exactement retenu que tant la responsabilité de la société Larazer que celle de Monsieur [X] étaient engagées à l'égard des sociétés GRT Gaz et GRDF, mais il s'agit d'une responsabilité in solidum et non pas solidaire, s'agissant de la condamnation sur un fondement quasi-délictuel des responsables d'un même dommage et la solidarité n'étant pas prévue par la loi dans cette hypothèse.

Il a de même débouté à juste titre tant les sociétés GRT Gaz et GRDF que la société Larazer de leurs demandes à l'encontre de la société GAN Assurances :

en effet, il résulte des déclarations de Monsieur [S], gérant de la société Larazer, notées par l'agent d'assurance lors de son entretien préalable à la souscription du contrat d'assurance (pièces 1 et 1ter de la société GAN Assurances), qu'il a indiqué que la société exerçait comme activité principale la soudure et tuyauteries (pipeline) au sein des ateliers de la société SPAC, et ne réalisait pas de travaux publics ni de terrassements ;

aucun élément ne permet de retenir que Monsieur [S] aurait également fait état d'une activité parallèle de forage chez des particuliers, le courrier qu'il a adressé le 10 mars 2009 à l'agent d'assurance une fois le sinistre survenu, ne pouvant constituer une telle preuve, et le Kbis de sa société ne mentionnant pas une telle activité, de sorte que la société Larazer ne peut arguer d'un manquement de l'agent d'assurance à son devoir de conseil et d'information ;

par ailleurs, le projet de contrat responsabilité civile entreprise, adressé à la société Larazer le 29 janvier 2009 auquel celle-ci a donné son bon pour accord à cette date, mentionne au titre des activités exercées 'travaux de soudure et tuyauterie sur pipelines', avec travail exclusif en sous-traitance pour la société SPAC, et la société Larazer a réglé une cotisation correspondant aux garanties souscrites, comme en justifie le courriel de l'agent d'assurance mentionnant le montant de cette cotisation en même temps qu'il adressait le projet de contrat;

il s'ensuit que la société GAN Assurances est fondée à opposer son absence de garantie pour le sinistre, l'activité à l'origine du sinistre n'ayant pas été déclarée lors de la réalisation de l'accord des volontés et ne faisant pas partie du champ de la garantie, et la société Larazer ne l'ayant pas avisée avant la survenance du sinistre de sa volonté d'apporter des modifications au dit champ contractuel lors de la réception du contrat.

La société GRT Gaz justifie qu'elle a dû engager divers frais pour la remise en état de la conduite endommagée :

facture Joubeaux pour 3348 € HT,

facture RDT 13 pour perte d'exploitation du transport ferroviaire pour 4416,12 € HT,

facture Institut de soudure pour 1635 € HT ;

la société Larazer et Monsieur [X] ne contestent pas par ailleurs que puisse être ajouté à ces factures, celle afférente au procès-verbal de constat d'huissier dressé le 26 février 2009 pour un montant de 920 € HT ;

ils font valoir à juste titre que ne peut en revanche être pris en compte le coût de la main d'oeuvre et des frais annexes pour les salariés intervenus sur le site, dans la mesure où la société GRT Gaz ne démontre pas avoir exposé un coût supplémentaire par rapport à celui qu'elle aurait dû assumer en toute hypothèse en l'absence de sinistre, s'agissant de salariés non recrutés spécialement pour faire face à celui-ci et amenés à faire des interventions sur différents sites, les pièces produites ne permettant pas par ailleurs d'isoler le coût d'heures supplémentaires éventuelles en lien avec le sinistre.

La société Larazer et Monsieur [X] doivent en conséquence être condamnés in solidum à lui payer la somme de 12 339,91 € TTC, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation par application de l'article 1153-1 alinéa 2 du code civil, en réparation de son préjudice en lien avec le sinistre.

La société GRDF ne peut pour les mêmes motifs prétendre à l'indemnisation du coût normal de ses salariés ;

seules peuvent être prises en compte les heures supplémentaires identifiées comme telles sur la facture produite, soit un coût de 3439,98 €, ainsi que le coût du gaz non acheminé pour un montant de 869,23 €.

La société Larazer et Monsieur [X] doivent en conséquence être condamnés in solidum à lui payer la somme de 4309,21 € TTC, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation par application de l'article 1153-1 alinéa 2 du code civil, en réparation de son préjudice en lien avec le sinistre.

La décision déférée sera en conséquence infirmée concernant le montant des sommes allouées aux sociétés GRT Gaz et GRDF.

Il doit par ailleurs être fait droit à la demande de celles-ci de capitalisation des intérêts, dans les conditions d'application de l'article 1154 du code civil.

Dans leurs rapports entre eux, les fautes respectives de Monsieur [X] et de la société Larazer caractérisées ci-dessus, justifient qu'ils supportent chacun la moitié de la charge de la condamnation, ce que les motifs de la décision déférée indiquaient implicitement mais qui n'a pas été mentionné dans le dispositif.

Les dépens doivent être laissés à la charge de Monsieur [X] et de la société Larazer, qui succombent en l'essentiel de leurs prétentions ;

ils seront déboutés en conséquence de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

l'équité ne justifie pas l'application de l'article 700 du code de procédure civile au profit des sociétés GRT Gaz et GRDF, ni de la société GAN Assurances.

PAR CES MOTIFS :

La cour d'appel, statuant publiquement, contradictoirement,

Confirme la décision du tribunal de grande instance d'Aix en Provence en date du 8 novembre 2012, excepté en ce qui concerne le montant des sommes allouées aux sociétés GRT Gaz et GRDF, le point de départ des intérêts, l'application de l'article 1154 du code civil et la solidarité prononcée.

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Condamne in solidum Monsieur [X] et la société Larazer à payer :

- à la société GRT Gaz, la somme de 12 339,91 € TTC, avec intérêts au taux légal à compter du 23 juin 2010 et capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du code civil,

- à la société GRDF, la somme de 4309,21 € TTC, avec intérêts au taux légal à compter du 23 juin 2010 et capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du code civil.

Déboute les sociétés GRT Gaz et GRDF du surplus de leurs demandes.

Y ajoutant,

Dit que dans leurs rapports entre eux, Monsieur [X] et la société Larazer supporteront la charge de la condamnation à hauteur de moitié chacun.

Condamne in solidum Monsieur [X] et la société Larazer aux dépens de la présente instance qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit d'aucune des parties.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 3e chambre b
Numéro d'arrêt : 12/23614
Date de la décision : 29/09/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 3B, arrêt n°12/23614 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-09-29;12.23614 ?
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