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08/07/2011 | FRANCE | N°10/11037

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11e chambre a, 08 juillet 2011, 10/11037


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

11e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 08 JUILLET 2011



N°2011/331













Rôle N° 10/11037







SCI GRASSE LA PAOUTE





C/



SARL LE LUTIN BLEU





































Grosse délivrée

le :

à :



SCP TOUBOUL

SCP ERMENEUX





Décision déf

érée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 09 Septembre 2008 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 07/869.





APPELANTE



SCI GRASSE LA PAOUTE

agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié ès qualité CHEZ [Adresse 2], demeurant [Adresse 4]

représentée par la SCP...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

11e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 08 JUILLET 2011

N°2011/331

Rôle N° 10/11037

SCI GRASSE LA PAOUTE

C/

SARL LE LUTIN BLEU

Grosse délivrée

le :

à :

SCP TOUBOUL

SCP ERMENEUX

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 09 Septembre 2008 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 07/869.

APPELANTE

SCI GRASSE LA PAOUTE

agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié ès qualité CHEZ [Adresse 2], demeurant [Adresse 4]

représentée par la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL, avoués à la Cour,

Ayant pour avocat Me Paul GUETTA, du barreau de NICE

INTIMEE

SARL LE LUTIN BLEU à l'enseigne JOUET CLUB

prise en la personne de son représentant légale en exercice domicilié ès qualités audit siège, demeurant [Adresse 1]

représentée par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avoués à la Cour,

Assistée de la SELARL VERSTRAETE ET ASSOCIES, avocats au barreau de GRASSE substituée par Me Nikita SICHOV, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

11ème A - 2011/331

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 25 Mai 2011 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Daniel ISOUARD, Président, et Madame Cécile THIBAULT, Conseiller,

Madame Cécile THIBAULT, Conseiller, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Daniel ISOUARD, Président

Madame Cécile THIBAULT, Conseiller

Monsieur Michel JUNILLON, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Maurice N'GUYEN.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Juillet 2011..

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Juillet 2011.

Signé par Madame Cécile THIBAULT, Conseiller en remplacement du Président empêché et Madame Mireille LESFRITH, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

11ème A - 2011/331

FAITS ET PROCÉDURE

La SCI Grasse la Paoute est propriétaire d'un local commercial et entrepôt situés à [Adresse 5]. Elle a fait paraître une annonce dans la presse concernant la location de ces locaux à laquelle La Sarl le Lutin Bleu exerçant sous l'enseigne 'Jouet Club' a répondu en octobre 2004.

Un document sous seing privé a été signé entre les parties, non daté, intitulé 'promesse de bail' comportant 4 conditions suspensives, dont l'obtention d'un prêt bancaire d'un montant maximum de 300 000€.

Au mois de février 2006 La Sarl le Lutin Bleu a proposé d'abandonner le bail.

Par ordonnance en date du 28 juillet 2006 le juge des référés du tribunal de grande instance de Grasse saisi par la société bailleresse a dit que la condition suspensive d'obtention du prêt n'avait pas été réalisée et qu'en conséquence la promesse de bail du 21 février 2005 était devenue caduque.

Exposant que La Sarl le Lutin Bleu n'avait pas rempli ses obligations contractuelles, la SCI Grasse la Paoute l'a fait assigner par acte en date du 30 janvier 2007 devant le tribunal de grande instance de Grasse pour obtenir sa condamnation au paiement de

- 114 500€ à titre de contre valeur des loyers contractuels entre le 21 février 2005 et le 28 juillet 2006, dont il y aura lieu de déduire les 15 000€ d'indemnité d'immobilisation,

- 165 290,07 € au titre des travaux effectués dans les lieux pour satisfaire aux demandes du locataire

- 5 000€ à titre de dommages intérêts

- 6 000€ par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Par jugement en date du 9 septembre 2008 le tribunal de grande instance de Grasse

- a constaté la caducité de la promesse de bail du 21 février 2005 du fait de la non-réalisation de la condition suspensive d'obtention de prêt,

- a constaté que l'attribution de l'indemnité d'immobilisation de 15 000€ avait rempli La SCI Grasse la Paoute de ses droits au titre de la promesse de bail,

- a débouté La SCI Grasse la Paoute de l'intégralité de ses demandes indemnitaires,

-a débouté La Sarl le Lutin Bleu de sa demande en dommages intérêts pour procédure abusive

Par déclaration d'appel enrôlée le 6 octobre 2008 La SCI Grasse la Paoute a interjeté appel de ce jugement.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 mai 2011.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SCI Grasse la Paoute - appelante - par conclusions signifiées le 21 avril 2011, demande à la Cour d'infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Grasse qui est très critiquable car le premier juge

- modifie l'accord des parties

- dispense La Sarl le Lutin Bleu du respect de bonne foi de ses obligations

- ne tire aucune conséquence du fait que les demandes de prêts n'étaient ni conformes aux engagements contractuels ni réalisés dans les délais voulus

- considère à tort que les travaux n'ont pas été engagés à la demande de la Sarl le Lutin Bleu alors qu'elle a mis fin au bail précédent, fait libérer les locaux, accompli de très lourds travaux (sur mesure) pour satisfaire aux désirs du futur locataire

11ème A - 2011/331

La Sarl le Lutin Bleu n'a pas respecté ses engagements de mauvaise foi en s'écartant des termes des accords initiaux (cf fax du 28 juillet 2005 ) ; le montant et les modalités de demande du financement sollicité ne correspondaient pas aux prévisions contractuelles et aucune information n'a été fournie sur le fait qu'elle n'avait pas obtenu le prêt nécessaire à son opération

L'indemnité d'immobilisation de 15 000€ versée entre les mains du notaire séquestre ne constitue pas la limitation définitive des dommages intérêts qui peuvent bénéficier à la SCI Grasse la Paoute en cas de défaillance du bénéficiaire de la promesse si celui-ci ne donne pas suite malgré réalisation des conditions suspensives ; la somme de 15 000€ ne couvre pas le préjudice du bailleur : il s'agit du 'prix de l'exclusivité' et la SCI Grasse la Paoute est fondée à demander la contre valeur des loyers contractuels sur la base de 102 000€ HT par an en raison de l'immobilisation des lieux.

A titre subsidiaire si la condition suspensive d'obtention du prêt est réputée acquise du fait de la mauvaise foi du preneur, le contrat s'est valablement formé avec effet rétroactif le jour de la signature de la promesse, en application des dispositions de l'article 1178 du code civil et la Sarl le Lutin Bleu sera condamnée à payer la contre valeur des loyers contractuels soit 80750 euros, moins l'indemnité d'immobilisation pour 15 000€ et le coût des travaux effectués pour le locataire soit 165 290,07€ ;

A titre infiniment subsidiaire la Cour pourra dire que l'indemnité d'immobilisation pour

15000 euros est une clause pénale manifestement dérisoire qui sera révisée et fixée à

246040,07 €.

La Sarl le Lutin Bleu - intimée - par conclusions signifiées le 6 mai 2011, demande la confirmation du jugement du 9 septembre 2008

La demande de prêt a été faite dans les délais et la SCI Grasse la Paoute a laissé à son co contractant le temps nécessaire à l'évaluation de son projet.

Les travaux ont été effectués dans le seul intérêt du bailleur qui a pris ces travaux à sa charge car ils étaient un préalable à la mise en location quel que soit le locataire et permettaient d'augmenter la surface de location et donc les revenus locatifs ; ces travaux étaient plutôt une gêne pour le locataire.

Si la Cour estimait que la condition suspensive relative au prêt aurait été satisfaite, les autres conditions suspensives ne l'étaient pas, et il est spécieux de soutenir que le bail devrait recevoir application de façon rétroactive.

Le premier juge a justement relevé que la Sarl le Lutin Bleu démontrait sa bonne foi dans la recherche d'obtention de prêt, le retard dans le dépôt ne lui est pas imputable (difficultés dans l'obtention du permis de construire, attente des autorisations administratives ).

La somme de 15 000€ est une indemnité d'immobilisation fixée contractuellement et non une clause pénale.

La SCI Grasse la Paoute ne fournit aucune preuve attestant de l'existence d'un quelconque préjudice en rapport avec une éventuelle faute de la Sarl le Lutin Bleu, elle a perçu un loyer de la société INTERIORA entre février et septembre 2005. Elle ne peut pas demander de dommages intérêts pour mauvaise foi dans l'exécution du contrat car la Sarl le Lutin Bleu a toujours eu l'intention de prendre à bail le local proposé, a effectué toutes les diligences requises (demande d'autorisation de la Commission départementale d'équipement commercial des alpes maritimes CDEC, urbanisme de la ville de [Localité 3], accession des personnes handicapées ), a engagé des frais importants pour plus de 29 000€.

A titre reconventionnel la Sarl le Lutin Bleu demande la condamnation de la SCI Grasse la Paoute au paiement de 1€ à titre de dommages intérêts et de 4 500€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

11ème A - 2011/331

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la procédure

Aucune cause grave ne justifie la révocation de l'ordonnance de clôture rendue le 18 mai 2011, et les pièces et conclusions signifiées postérieurement à cette date sont irrecevables de plein droit: avant l'ordonnance de clôture du 18 mai 2011 les parties ont pu échanger leurs arguments et leurs pièces de façon contradictoire, d'autant qu'un arrêt de retrait du rôle a été rendu le 20 mai 2010 et que, après réenrôlement, les parties ont pu se mettre en état avant la date de l'audience fixée au 25 mai 2011, date d'audience dont elles ont été informées dès le 13 décembre 2010.

Sur les relations contractuelles entre les parties

Après avoir engagé des pourparlers durant la fin de l'année 2004 et le début de l'année 2005, les parties ont signé un document intitulé 'Promesse de bail commercial', non daté mais dont la date peut être fixée de façon certaine au 21 février 2005, date figurant sur le chèque de 15000 € qui a été établi par la Sarl LE LUTIN BLEU au profit de Maître [W], notaire à Cagnes sur mer, à titre de séquestre, somme versée le jour de la signature à titre d'indemnité d'immobilisation, ainsi que sur un courrier adressé par la SCI Grasse La Paoute à M. [M] autorisant la Sarl LE LUTIN BLEU à déposer une demande d'autorisation d'exploitation auprès de la CDEC des Alpes Maritimes.

Les parties ne contestent pas cette date.

Le contrat du 21 février 2005 stipule que 'la présente promesse est faite sous les conditions suspensives suivantes :

- dépôt de la demande de CDEC dans les 2 mois de la signature avec copie au promettant

- obtention d'un prêt bancaire d'un montant maximum de 300 000€ (3,6% taux variable sur 6 ans auprès de tout organisme bancaire au choix du bénéficiaire pour le financement partiel des travaux, réponse affirmative ou négative dans les deux mois des présentes,

- obtention par le bénéficiaire auprès des services concernés des accords de faisabilité relatifs à la sécurité et des services municipaux les autorisations administratives pour la réalisation des travaux de bâtiment en conformité aux normes,

Dans le cas où les trois clauses ci dessus ne seraient pas respectées, l'indemnité d'immobilisation sera acquise au promettant,

- obtention de l'autorisation de commercialisation accordée par la CDEC dans les cinq mois de la signature des présentes soit le 15 octobre 2005, date limite de signature du bail, faute de l'avoir obtenue le présent contrat sera nul et l'indemnité d'immobilisation sera remboursée. '

Si la première condition suspensive a été réalisée, le dépôt de la demande auprès de la CDEC ayant été fait le 15 avril 2005, la condition suspensive relative à l'obtention d'un prêt bancaire ne s'est pas réalisée malgré les démarches effectuées parla Sarl LE LUTIN BLEU : en effet par courrier en date du 22 février 2006 la Caisse d'Epargne Côté d'Azur informait le représentant de cette société qu'après étude approfondie du dossier de financement des travaux d'aménagement d'un fonds de commerce [Adresse 6] pour un montant de 360 000€ et 160 000€ de facilité de caisse, elle ne pouvait donner une suite favorable à la demande ; et par courrier en date du 2 mars 2006 la Banque Populaire Côte d'Azur indiquait ne pouvoir réserver une suite favorable à la demande de financement de travaux concernant les locaux commerciaux situés [Adresse 6] à hauteur de 300 000€.

La SCI Grasse La Paoute qui ne s'est jamais renseignée sur l'instruction du dossier de prêt, qui n'a adressé à son contractant aucune demande ou mise en demeure passé le délai de 2 mois fixé par le contrat, n'est pas fondée à reprocher à la Sarl LE LUTIN BLEU de ne pas avoir respecté ses obligations sur ce point (tardiveté dans le dépôt des demandes non démontrée ), ayant de fait accordé des délais complémentaires.

Du fait de la non-réalisation de cette condition, la promesse de bail commercial ne s'est pas réalisée et est devenue caduque.

Aucun élément du dossier n'établit que la Sarl LE LUTIN BLEU a empêché l'accomplissement des conditions mises à sa charge, alors que des demandes de prêt ont bien été déposées, que la demande de CDEC pour la commercialisation a également été déposée, et l'appelante n'est pas fondée à demander l'application des dispositions de l'article 1178 du code civil qui sanctionne le comportement fautif du débiteur, obligé sous ces conditions.

La décision frappée d'appel sera confirmée sur ce point.

11ème A - 2011/331

Sur les effets de la caducité de la promesse de bail commercial

La condition suspensive relative à l'obtention du prêt bancaire ne s'étant pas réalisée, l'indemnité d'immobilisation de 15 000€ versée le 21 février 2005 entre les mains d'un séquestre est acquise au promettant.

Sur les demandes de paiement formées par La SCI Grasse La Paoute

Sur la demande de paiement de loyers

Le contrat signé entre les parties était une promesse unilatérale de bail commercial, il ne comporte aucune clause relative au paiement d'un loyer ou d'une indemnité d'occupation par le bénéficiaire de la promesse ; cette promesse étant devenue caduque, il n'y a jamais eu de bail et en conséquence la SCI Grasse La Paoute n'est pas fondée à demander paiement de loyer dans le cadre de l'exécution d'un contrat qui n'a pas existé. Elle sera déboutée de sa demande sur ce point.

Sur la demande au titre des travaux

Il n'est pas contesté que la SCI Grasse La Paoute a entrepris des travaux importants dans les locaux qui étaient proposés à la location, travaux qui ont amélioré les lieux sensiblement ; certains de ces travaux étaient prévus dès l'origine car le projet de bail commercial annexé à la promesse de bail du 21 février 2005 mentionne au titre 'dispositions particulières' que 'un mur séparant l'entrepôt actuel sera édifié, à la charge du bailleur, pour délimiter la partie louée, et sur la part entrepôt qui est en grande hauteur, il sera créé une mezzanine avec une hauteur de 3,10m sous poutre...'

Dans le cadre de la poursuite des relations entre les parties en application de ce document, la SCI Grasse La Paoute écrit le 22 août 2005 à son adversaire :

- ne pas vouloir engager d'importants travaux de mezzanine en attendant votre décision définitive

- rappeler un rendez-vous du 27 juillet 2005 avec les services de l'urbanisme de [Localité 3] en présence des architectes des deux parties, avec rappel de ce que les règlements en vigueur autorisaient l'édification de la mezzanine, et de ce qu'une demande de permis de construire avait été déposée.

Le 9 décembre 2005 La SCI Grasse La Paoute écrivait encore à la Sarl LE LUTIN BLEU (pièce n°10 du dossier de l'appelante ), après avoir rappelé qu'un magasin avait été fermé, que le personnel avait été licencié, et que les travaux importants de mezzanine à l'arrière du bâtiment étaient engagés et seraient terminés fin décembre : 'nous aimerions connaître votre position, à savoir si vous comptez concrétiser cette affaire ou abandonner ce projet ; veuillez nous le faire savoir d'urgence afin d'arrêter dans la mesure du possible, les travaux qui correspondent à votre promesse de bail ; dans ce cas nous trouverons une solution amiable pour mettre fin à la promesse de bail signée entre nous'.

Les mêmes interrogations sont reprises dans le courrier du 22 décembre 2005 dans lequel la SCI Grasse La Paoute écrit à la Sarl LE LUTIN BLEU '.. Maintenant vous devez vous décider rapidement car nous avons arrêté le chantier en ce qui concerne le mur de séparation qui correspond à votre contrat, car si vous ne donnez pas suite, ce mur ne sera pas nécessaire ; nous ne comprenons pas votre attitude car (1) vous n'êtes pas sûr de prendre le local...'.

En conséquence les travaux de transformation des locaux ont été entrepris alors que les conditions suspensives figurant dans la promesse de bail n'étaient pas réalisées, et que les modalités de financement de l'opération n'étaient pas certaines, que la SCI Grasse La Paoute n'avait aucune certitude sur la signature du bail commercial.

Cette société s'est donc engagée dans les travaux avec un peu de légèreté, estimant que ces travaux d'amélioration du local commercial apportaient une plus value objective qui serait utilisable quel que soit le nouveau locataire.

Elle sera déboutée de sa demande de paiement de la somme de 165 290,07€ à titre de dommages intérêts, somme correspondant selon elle aux travaux effectués dans les lieux pour satisfaire aux demandes du locataire, travaux dont elle conserve le bénéfice.

11ème A - 2011/331

Sur la demande de dommages intérêts pour comportement fautif

La SCI Grasse La Paoute soutient que les 15 000€ fixés dans la promesse de bail à titre d'indemnité d'immobilisation ne sont pas de nature à couvrir son préjudice. Cette indemnité contractuelle est, comme l'a indiqué le premier juge, le prix de l'exclusivité consentie au bénéficiaire de la promesse, mais le promettant conserve la faculté de demander des dommages intérêts en rapportant la preuve d'un comportement fautif de son cocontractant.

Il résulte des différents courriers échangés entre les parties durant l'année 2005 et jusqu'au mois de février 2006 que la Sarl LE LUTIN BLEU a entretenu le flou sur ses intentions de réaliser ou non le bail commercial : dans ses différents courriers elle ne fait état que des travaux à réaliser, de leur avancement ou de leurs modifications, sans jamais mentionner ses démarches pour le financement de son projet ; elle entretient une fausse croyance dans l'exécution des conditions suspensives, elle ne répond pas directement aux interrogations de la SCI Grasse La Paoute sur la poursuite de son projet en décembre 2005. Dans son courrier en date du 12 février 2006 la Sarl LE LUTIN BLEU confirme ' prendre la location de la surface commerciale du bas de 720m², plus une surface de réserve en haut,... signature du bail définitif le 13 mars 2006 dont les termes seront conformes au protocole d'accord signé'. Or quelques jours plus tard le 22 février 2006 et le 2 mars 2006 elle était informée du refus du financement demandé pour son projet, refus dont elle ne faisait pas part immédiatement à la SCI Grasse La Paoute

La Sarl LE LUTIN BLEU a manqué de loyauté dans les négociations avec son contractant, a entretenu jusqu'au mois de février 2006 l'espoir d'une conclusion rapide, a fait réaliser des travaux pour concrétiser le projet de bail, et le bailleur a engagé des démarches, des frais, poursuivi des négociations avec les services de la mairie de [Localité 3], avec un architecte en respectant les demandes faites par la Sarl LE LUTIN BLEU, alors que cette société ne lui donnait aucune information sur l'avancement de la réalisation des conditions suspensives.

Ce comportement de la Sarl Le lutin Bleu est fautif et justifie le versement de dommages intérêts qui seront évalués à la somme de 25 000€.

La décision frappée d'appel sera réformée et la Sarl LE LUTIN BLEU condamnée au paiement de cette somme ; cette société sera déboutée de sa demande de dommages intérêts pour procédure abusive.

Sur les demandes annexes

Il n'est pas inéquitable que chaque partie conserve la charge des frais irrépétibles engagés pour la présente procédure.

Chacune des parties succombant partiellement dans ses prétentions supportera la charge des dépens qu'elle a engagés devant la Cour.

PAR CES MOTIFS

REJETTE la demande de révocation de l'ordonnance de clôture rendue le 18 mai 2011,

et constate l'irrecevabilité de plein droit des pièces et conclusions signifiées postérieurement au 18 mai 2011,

CONFIRME le jugement du tribunal de grande instance de Grasse en date du 9 septembre 2008 en ce qu'il a constaté la caducité de la promesse de bail commercial signée entre les parties le 21 février 2005 du fait de la non-réalisation d'une condition suspensive,

REFORME pour le surplus et statuant à nouveau

CONDAMNE La Sarl LE LUTIN BLEU en la personne de son représentant légal à payer à La SCI Grasse La Paoute la somme de vingt cinq mille euros - 25 000€ - à titre de dommages intérêts,

DEBOUTE La SCI Grasse La Paoute du surplus de ses demandes

DIT n'y avoir lieu au versement d'indemnités en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

11ème A - 2011/331

DIT que chaque partie conservera la charge des dépens qu'elle a engagés devant la Cour qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le GreffierP/ le Président, empêché

Mme Cécile THIBAULT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 11e chambre a
Numéro d'arrêt : 10/11037
Date de la décision : 08/07/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence A1, arrêt n°10/11037 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-07-08;10.11037 ?
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