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06/02/2007 | FRANCE | N°05/21874

France | France, Cour d'appel d'aix-en-provence, Ct0023, 06 février 2007, 05/21874


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE10 Chambre

ARRÊT AU FOND DU 06 FEVRIER 2007

No 2007/
Rôle No 05/21874
Jeanne-Marie X...
C/
Roger Michel Y...AXA FRANCE IARDCAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE

Grosse délivrée le :à :

réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 13 Octobre 2005 enregistré au répertoire général sous le no 03/01237.
APPELANTE
Madame Jeanne-Marie X...(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 06/5229 du 12/06/2006 accordée par le bu

reau d'aide juridictionnelle de AIX EN PROVENCE)née le 26 Juin 1941 à GRAVELINES (59820)

...
représentée par la S...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE10 Chambre

ARRÊT AU FOND DU 06 FEVRIER 2007

No 2007/
Rôle No 05/21874
Jeanne-Marie X...
C/
Roger Michel Y...AXA FRANCE IARDCAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE

Grosse délivrée le :à :

réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 13 Octobre 2005 enregistré au répertoire général sous le no 03/01237.
APPELANTE
Madame Jeanne-Marie X...(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 06/5229 du 12/06/2006 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX EN PROVENCE)née le 26 Juin 1941 à GRAVELINES (59820)

...
représentée par la SCP MAYNARD - SIMONI, avoués à la Cour, assistée de la SCP CARLINI et ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE substituée par Me Sébastien WUST, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES
Monsieur Roger Michel Y...né le 25 Août 1939 à NICE (06000),

...
représenté par la SCP BLANC AMSELLEM-MIMRAN CHERFILS, avoués à la Cour,assisté de Me Jacques GOBERT, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Marie-Marcelle HAZEMANN-JOUVE, avocat au barreau de MARSEILLE

AXA FRANCE IARD Entreprise régie par le Code des Assurances, prise en la personne de son Président Directeur Général en exercice, domicilié en cette qualité au siège social sis, 26 Rue Drouot - 75009 PARISreprésentée par la SCP BLANC AMSELLEM-MIMRAN CHERFILS, avoués à la Cour,assistée de Me Jacques GOBERT, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Marie-Marcelle HAZEMANN-JOUVE, avocat au barreau de MARSEILLE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au siège, 8 rue Jules Moulet - 13281 MARSEILLE CEDEX 6représentée par la SCP SIDER, avoués à la Cour, ayant Me Jacques DEPIEDS, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 12 Décembre 2006 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Joëlle SAUVAGE, PrésidenteMadame Bernadette KERHARO-CHALUMEAU, ConseillerMonsieur Benjamin RAJBAUT, Conseiller

qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES.Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Février 2007.

ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Février 2007,
Signé par Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
E X P O S É D U L I T I G E
Mme Jeanne-Marie X... a été opérée, le 13 mars 1997 à la clinique CLAIRVAL par le Dr. Roger Michel Y..., d'une arthrose de la hanche droite avec mise en place d'une prothèse totale de hanche ; par la suite est apparue une paralysie partielle du pied droit.
Par jugement contradictoire du 13 octobre 2005, le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE a débouté Mme Jeanne-Marie X... et la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE des Bouches-du-Rhône de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre de M. Roger Michel Y... et de son assureur, la S.A. AXA FRANCE IARD, et a condamné Mme Jeanne-Marie X... à payer à M. Roger Michel Y... et à la S.A. AXA FRANCE IARD la somme de 800 € en application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.
Mme Jeanne-Marie X... a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 17 novembre 2005.
Vu les conclusions de Mme Jeanne-Marie X... en date du 3 mars 2006.
Vu les conclusions de M. Roger Michel Y... et de la S.A. AXA FRANCE IARD en date du 18 avril 2006.
Vu les conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE des Bouches-du-Rhône en date du 10 mai 2006.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 16 novembre 2006.
M O T I F S D E L ' A R R Ê T
Attendu qu'une expertise a été diligentée par le Pr. Claude D..., expert commis par ordonnance de référé du 4 mai 1998 et qui a déposé son rapport le 10 juin 1999.
Attendu qu'il en ressort que le 13 mars 1997 Mme Jeanne-Marie X... a subi la mise en place d'une prothèse totale de hanche droite par le Dr. Roger Michel Y..., que cette intervention était justifiée par la présence d'une coxarthrose.
Attendu que le jour même un diagnostic de paralysie du nerf sciatique poplité externe était constaté par le chirurgien et confirmé par un neurologue dès le 14 mars, que ce même jour une reprise chirurgicale était effectuée par le Dr. Roger Michel Y....
Attendu que Mme Jeanne-Marie X... a donc présenté, dans les suites immédiates de la mise en place d'une prothèse totale de hanche droite pour coxarthrose, une paralysie du nerf sciatique qui a d'abord intéressé les deux composantes du nerf sciatique poplité interne et sciatique poplité externe avant de s'améliorer et de disparaître complètement au niveau du sciatique poplité externe.
Attendu que le déficit se traduit par un défaut de relèvement actif du pied nécessitant le port d'une attelle qui améliore bien la fonction, la boiterie étant pratiquement inapparente, tout au moins sur quelques mètres.
Attendu qu'une gêne fonctionnelle persiste cependant pour monter et descendre les escaliers, pour conduire une voiture et pour la marche prolongée.
Attendu que l'expert note cependant qu'au cours des dix-huit mois venant de s'écouler depuis la mise en place de la prothèse, une amélioration sensible tant clinique qu'électromyographique s'est dessinée, l'expert estimant que cette amélioration devrait encore s'étaler sur quelques mois puisque le délai de deux ans est une date en général limite pour la récupération.
Attendu que l'expert conclut que la complication relevée fait partie des 2 à 3 % de complications per-opératoires présentes dans toutes les statistiques de chirurgie de la hanche, qu'elle est en rapport direct et certain avec la mise en place de la prothèse, probablement par étirement lors de la mise en place des écarteurs, et qu'il s'agit, selon l'ensemble de la littérature médicale, d'une des complications inhérentes à la chirurgie de la hanche, qu'il est difficile de ramener à un pourcentage nul.
Attendu que l'expert estime donc qu'il n'y a pas eu de faute opératoire de la part du Dr. Roger Michel Y... qui a essayé de minimiser au maximum les conséquences de cette complication en réopérant sa patiente le lendemain à la recherche d'un hématome ou d'une compression par un éventuel corps étranger, ce qui n'était pas le cas.
Attendu que par ordonnance du Juge de la Mise en État du 3 juin 2003, un complément d'expertise a été confié au Pr. Fernand DE E... qui a déposé son rapport le 24 mars 2004.
Attendu que ce deuxième rapport d'expertise, qui évalue essentiellement les préjudices corporels de Mme Jeanne-Marie X..., confirme que même sans faute, après abord de la hanche et donc dissection du nerf sciatique, peut apparaître pour de multiples raisons (œdémateuses, vasculaires, traumatiques ou autres) une paralysie du nerf sciatique et qu'en l'espèce celle-ci a partiellement régressé.
Attendu, par ailleurs, que cet expert relève qu'il n'y a pas malfaçon au niveau de l'implantation de la prothèse, l'inégalité de hauteur des membres inférieurs pouvant être due à diverses causes car il existait déjà avant l'intervention une asymétrie au niveau du bassin.
Attendu que ces expertises ont été menées dans le respect du contradictoire, des pré-rapports ayant notamment été rédigés, que ces rapports, particulièrement complets et documentés, ne sont pas sérieusement critiqués, qu'ils seront donc entérinés par la Cour pour la recherche de la responsabilité du Dr. Roger Michel Y....
Attendu en premier lieu que Mme Jeanne-Marie X... soutient que le Dr. Roger Michel Y... serait tenu à une obligation de sécurité de résultat dès lors que le dommage est lié à l'utilisation d'un matériel (en l'espèce les écarteurs).
Mais attendu que cette obligation de sécurité de résultat ne s'applique qu'aux dommages causés par une chose utilisée ou fournie lors de l'exécution du contrat médical ; qu'en l'espèce la paralysie du nerf sciatique n'a pas été causée par les écarteurs en eux-mêmes mais résulte de l'acte médical d'étirement de ce nerf lors de la mise en place des écarteurs, qu'au demeurant Mme Jeanne-Marie X... elle-même écrit dans ses conclusions que la cause de son dommage est "la manipulation des écarteurs" (page 3, 11ème paragraphe).
Attendu que s'agissant d'un dommage consécutif à un acte médical, le médecin n'est tenu qu'à une obligation de moyens nécessitant la preuve d'une faute et d'un préjudice en relation de causalité avec celle-ci.
Attendu que les deux expertises judiciaires indiquent que cette complication est inhérente à la chirurgie de la hanche et qu'elle peut apparaître même sans faute, que le Pr. Claude D... n'a retenu aucune faute opératoire du Dr. Roger Michel Y... et que le Pr. Fernand DE E... n'a retenu aucune malfaçon au niveau de l'implantation de la prothèse.
Attendu que la paralysie du nerf sciatique subie par Mme Jeanne-Marie X... est donc la conséquence d'un aléa thérapeutique dont la réparation n'entre pas dans le champ des obligations dont un médecin est contractuellement tenu à l'égard de son patient en l'absence de toute faute de celui-ci.
Attendu que Mme Jeanne-Marie X... reproche également au Dr. Roger Michel Y... de ne pas l'avoir informée des risques de l'intervention et, en particulier, de celui d'une paralysie du nerf sciatique alors qu'il s'agit d'une complication connue et non exceptionnelle.
Attendu en effet que le Dr. Roger Michel Y... ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, de ce qu'il aurait informé Mme Jeanne-Marie X... des risques inhérents à l'intervention consistant à la mise en place d'une prothèse totale de hanche, que les attestations produites, émanant de ses secrétaires, Mlles Céline F... et Laurence G..., sont en effet rédigées en des termes généraux et ne confirment pas que, dans le cas particulier de Mme Jeanne-Marie X..., une telle information lui ait été donnée.
Attendu que Mme Jeanne-Marie X... soutient que la coxarthrose pourrait "parfois" faire l'objet d'un traitement médical et qu'il n'est pas démontré que l'absence d'intervention aurait eu des conséquences encore plus invalidantes ; qu'elle affirme subir de ce fait une perte de chance d'avoir pu refuser cet acte médical.
Attendu, en premier lieu, qu'il convient de rappeler qu'avant cette opération Mme Jeanne-Marie X... présentait une arthrose de hanche invalidante avec une symptomatologie douloureuse qui s'était aggravée au cours des trois dernières années (gonalgies, douleurs nocturnes et mécaniques, importante amputation des amplitudes, perte totale de l'interligne coxo-fémorale), qu'en outre elle ne justifie pas de ce qu'il aurait pu exister, comme elle l'allègue, une alternative au traitement chirurgical de cette coxarthrose.
Attendu, en second lieu, que le Pr. Claude D..., qui a examiné Mme Jeanne-Marie X... dix-huit mois après son opération, relevait déjà une amélioration sensible de l'état de santé de cette dernière, tant clinique qu'électromyographique, depuis la mise en place de la prothèse ; que le Pr. Fernand DE E..., qui a examiné Mme Jeanne-Marie X... près de sept années après l'opération, indique que l'examen de la hanche est satisfaisant et qu'elle est dans un meilleur état de santé qu'avant l'implantation de cette prothèse, sa hanche étant actuellement indolore et non arthrosique.
Attendu qu'il apparaît donc que l'opération pratiquée par le Dr. Roger Michel Y... n'a pas causé à Mme Jeanne-Marie X... une atteinte plus grave que celle qui serait résulté d'une absence de soins, que cette opération n'a donc pas entraîné de réelle atteinte à son intégrité corporelle et lui a été au contraire bénéfique, malgré la survenue de la paralysie du nerf sciatique, puisque son état de santé actuel est meilleur qu'avant l'intervention.
Attendu que Mme Jeanne-Marie X... ne justifie donc pas d'un préjudice corporel, même moral, pouvant résulter d'un défaut de consentement éclairé à l'acte médical pratiqué.
Attendu en conséquence que le jugement déféré, qui a débouté Mme Jeanne-Marie X... et son organisme social, la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE des Bouches-du-Rhône, de l'ensemble de leurs demandes, sera confirmé en toutes ses dispositions.
Attendu qu'il est équitable, compte tenu au surplus de la situation économique de la partie condamnée, d'allouer à M. Roger Michel Y... et à la S.A. AXA FRANCE IARD la somme globale de 1.000 € au titre des frais par eux exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens.
P A R C E S M O T I F S
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement.
Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré.
Y ajoutant :
Condamne Mme Jeanne-Marie X... à payer à M. Roger Michel Y... et à la S.A. AXA FRANCE IARD la somme globale de MILLE EUROS (1.000 €) au titre des frais exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens.
Condamne Mme Jeanne-Marie X... aux dépens de la procédure d'appel, lesquels seront recouvrés conformément à la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle, et autorise la S.C.P. BLANC, AMSELLEM-MIMRAM, CHERFILS, Avoués associés et la S.C.P. SIDER, Avoués associés, à recouvrer directement ceux des dépens dont elles auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.
Rédacteur : M. RAJBAUT
Madame JAUFFRES Madame SAUVAGEGREFFIÈRE PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'aix-en-provence
Formation : Ct0023
Numéro d'arrêt : 05/21874
Date de la décision : 06/02/2007

Analyses

PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Médecin - Responsabilité contractuelle - Matériels utilisés pour un acte médical d'investigation ou de soins - Obligation de sécurité de résultat - Limites - // JDF

L'obligation de sécurité de résultat vis-à-vis du médecin ne s'applique qu'aux dommages causés par une chose utilisée ou fournie lors de l'exécution du contrat médical. Ainsi, une paralysie du nerf sciatique causée non par les écarteurs eux-mêmes mais par l'acte médical d'étirement de ce nerf lors de la mise en place des écarteurs, est un dommage consécutif à un acte médical. Le médecin n'est alors tenu qu'à une obligation de moyens nécessitant la preuve d'une faute et d'un préjudice en relation de causalité avec celle-ci.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Marseille, 13 octobre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.aix-en-provence;arret;2007-02-06;05.21874 ?
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