La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/10/2024 | SUISSE | N°9C_528/2023

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral, IIIe Cour de droit public  , Arrêt du 9 octobre 2024  , 9C 528/2023


 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_528/2023  
 
 
Arrêt du 9 octobre 2024  
 
IIIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Parrino, Président, Stadelmann et Moser-Szeless. 
Greffier : M. Bleicker. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Margareth d'Avila Bendayan, avocate, 
recourante, 
 
contre  
 
HOTELA Caisse de compensation AVS, rue de la Gare 18, 1820 Montreux,

 
intimée. 
 
Objet 
Allocations pour perte de gain en cas de service et de maternité (COVID-19), 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du Valais du 10 ...

 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_528/2023  
 
 
Arrêt du 9 octobre 2024  
 
IIIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Parrino, Président, Stadelmann et Moser-Szeless. 
Greffier : M. Bleicker. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Margareth d'Avila Bendayan, avocate, 
recourante, 
 
contre  
 
HOTELA Caisse de compensation AVS, rue de la Gare 18, 1820 Montreux, 
intimée. 
 
Objet 
Allocations pour perte de gain en cas de service et de maternité (COVID-19), 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du Valais du 10 août 2023 (S1 21 277). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________, née en décembre 1955, exploite à titre indépendant l'entreprise individuelle "Hôtel B.________". Elle est affiliée à HOTELA Caisse de compensation AVS (ci-après: la caisse de compensation). Depuis le 1 er janvier 2020, elle bénéficie d'une rente ordinaire de l'assurance-vieillesse.  
À la suite des mesures officielles prises pour endiguer la propagation de la pandémie de coronavirus (COVID-19) en mars 2020, A.________ a dû fermer temporairement son hôtel. À sa demande, elle a perçu une allocation pour perte de gain en cas de coronavirus destinée aux personnes exerçant une activité indépendante du 17 mars 2020 au 16 septembre 2020 (décompte de prestations des 15 mai, 18 mai, 10 juillet, 31 juillet, 31 août et 30 septembre 2020). Les 1 er et 3 mars 2021, la caisse de compensation a rectifié les décomptes de prestations, au motif qu'elle avait omis de déduire la franchise de revenu pour les retraités actifs. Par décision du 11 mai 2021, confirmée sur opposition le 30 novembre 2021, elle a réclamé à A.________ la restitution de la somme de 7'250 fr. 80 pour la période du 17 mars 2020 au 16 septembre 2020.  
 
B.  
Statuant le 10 août 2023, la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal de Valais a rejeté le recours formé par l'assurée contre la décision sur opposition du 30 novembre 2021. 
 
C.  
A.________ forme un recours en matière de droit public contre ce jugement dont elle demande la réforme dans le sens des considérants. À titre subsidiaire, elle conclut au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours en matière de droit public peut être formé notamment pour violation du droit fédéral ( art. 95 let. a LTF ), que le Tribunal fédéral applique d'office ( art. 106 al. 1 LTF ), n'étant limité ni par les arguments de la partie recourante, ni par la motivation de l'autorité précédente. Le Tribunal fédéral fonde son raisonnement sur les faits retenus par la juridiction de première instance ( art. 105 al. 1 LTF ) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte (c'est-à-dire arbitraire au sens de l' art. 9 Cst. ; ATF 148 V 366 consid. 3.3 et les références) ou en violation du droit au sens de l' art. 95 LTF ( art. 105 al. 2 LTF ). 
 
2.  
 
2.1. Le litige porte sur la restitution par la recourante de la somme de 7'250 fr. 80. Compte tenu des conclusions et motifs du recours, il s'agit singulièrement de savoir si la caisse de compensation intimée était en droit de reconsidérer les décomptes de prestations portant sur la période du 17 mars 2020 au 16 septembre 2020 au motif qu'elle avait omis de déduire la franchise de revenu pour les retraités actifs (d'un montant de 16'800 fr.; art. 6 quater al. 1 RAVS [RS 831.101]).  
 
2.2. À cet égard, l'arrêt entrepris expose de manière complète les dispositions applicables, en particulier les art. 2 al. 3bis et 5 al. 1 et 2 de l'ancienne ordonnance du 20 mars 2020 sur les mesures à prendre en cas de perte de gain liée au coronavirus (COVID-19; ordonnance sur la perte de gain COVID-19; RO 2020 871, 1257, 2223, 2729), ainsi que l'art. 11 al. 1 de la loi du 25 septembre 1952 sur les allocations pour perte de gain (LAPG; RS 834.1), dans leur version en vigueur lorsque les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 148 V 162 consid. 3.2.1; 147 V 278 consid. 2.1). Il suffit d'y renvoyer.  
 
3.  
 
3.1. Selon la jurisprudence, les décomptes de prestations adressées sous la forme simplifiée de l' art. 51 al. 1 LPGA (RS 830.1) peuvent produire les mêmes effets qu'une décision entrée en force. En particulier, l'administration ne peut demander la répétition des prestations allouées selon la procédure simplifiée après un laps de temps correspondant au délai de recours qu'aux conditions de la reconsidération ou de la révision procédurale (ATF 129 V 110 consid. 1.2). À l'échéance de ce délai, le décompte de prestations non contesté produit pour l'administration les mêmes effets qu'une décision entrée en force (s'agissant de la situation de la personne assurée, voir ATF 134 V 145 consid. 5.2), étant précisé que l'entrée en force s'étend également au montant du gain assuré figurant sur le décompte (cf. arrêt 8C_82/2020 du 12 mars 2021 consid. 5.3 et la référence).  
 
3.2. Le principe et les conditions de la reconsidération d'une décision entrée en force sont prévus à l' art. 53 al. 2 LPGA , aux termes duquel l'assureur peut revenir sur les décisions ou les décisions sur opposition formellement passées en force lorsqu'elles sont manifestement erronées et que leur rectification revêt une importance notable. Dès lors, la reconsidération est soumise à deux conditions: l'importance notable de la rectification et l'existence d'une erreur manifeste. L'erreur manifeste signifie qu'il n'existe aucun doute raisonnable sur l'irrégularité initiale de la décision, cette conclusion étant la seule envisageable (ATF 148 V 195 consid. 5.3; 138 V 324 consid. 3.3). Le vice peut résulter de l'application des mauvaises bases légales, de la non-application ou de la mauvaise application des normes déterminantes (ATF 147 V 167 consid. 4.2; 144 I 103 consid. 2.2; 140 V 77 consid. 3.1). Pour juger s'il est admissible de reconsidérer une décision pour le motif qu'elle est manifestement erronée ( art. 53 al. 2 LPGA ), il faut se fonder sur les faits et la situation juridique existant au moment où cette décision a été rendue, compte tenu de la pratique en vigueur à l'époque (ATF 141 V 405 consid. 5.2 et la référence).  
 
4.  
 
4.1. La juridiction cantonale a retenu que la caisse de compensation était fondée à demander à la recourante la restitution des indemnités versées en trop. En se fondant sur l' art. 11 al. 1 LAPG , elle a constaté que le revenu moyen servant de base de calcul à l'allocation pour perte de gain COVID-19 était le revenu déterminant pour le calcul des cotisations dues conformément à la LAVS. Or, à partir de l'âge de la retraite (64 ans pour les femmes), un assuré ne paie des cotisations que sur le revenu excédant la "franchise rentiers" de 16'800 fr (art. 6 quater al. 1 RAVS). Dans la mesure où la caisse de compensation avait omis de prendre en compte cette "franchise rentiers", l'erreur était manifeste. La rectification de cette erreur revêtait en outre une importance notable. Les conditions d'une reconsidération selon l' art. 53 al. 2 LPGA étaient par conséquent remplies. La demande de restitution avait enfin été déposée dans le délai de péremption de l' art. 25 al. 2 LPGA .  
 
4.2. Invoquant une violation de l' art. 11 al. 1 LAPG et des art. 5 ss de l'ordonnance sur la perte de gain COVID-19, la recourante soutient que la juridiction cantonale a admis à tort l'intégration de la franchise pour rentiers dans le calcul de son revenu déterminant. La caisse de compensation s'était en effet fondée sur les données fiscales de l'année 2017 pour définir le revenu déterminant. Elle ne pouvait par conséquent se référer au régime des cotisations de l'année 2020 pour obtenir le revenu complet déterminant.  
 
5.  
 
5.1. Dans le cadre des mesures destinées à lutter contre le coronavirus, l'indemnité journalière est égale à 80 % du revenu moyen de l'activité lucrative obtenu avant le début du droit à l'allocation (art. 5 al. 1 de l'ordonnance sur la perte de gain COVID-19). Pour déterminer le montant du revenu, la caisse de compensation doit partir du revenu communiqué par les autorités fiscales, tel qu'il ressort de la clôture du dernier exercice comptable. Selon les directives de l'OFAS sur les cotisations des travailleurs indépendants et des personnes sans activité lucrative dans l'AVS, AI et APG (DIN) du 1er janvier 2008, dans leur version en vigueur du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2020, elle doit considérer le revenu communiqué par l'autorité fiscale comme un revenu net après déduction des cotisations (n° 1170.2 DIN). Elle ne peut déroger à cette règle que lorsqu'il ressort clairement, expressément et sans réserve des indications données par les autorités fiscales qu'aucune déduction n'a été ou ne sera opérée. Dans ce cas, aucun rajout en pour-cent ne doit être effectué (n° 1170.3 DIN).  
Ensuite, pour fixer le revenu déterminant, les caisses de compensation rajoutent les cotisations AVS/AI/APG au revenu communiqué et apuré de l'intérêt sur le capital propre investi dans l'entreprise selon les n° 1172 ss ( art. 9 al. 4 LAVS ) et de l'éventuelle franchise pour rentiers selon le n° 3006.2 de la Circulaire de l'OFAS concernant les cotisations dues à l'AVS, AI et APG par les personnes exerçant une activité lucrative qui ont atteint l'âge ouvrant le droit à une rente de vieillesse (CAR; n° 1170 DIN). 
 
5.2. En l'espèce, la recourante a sollicité le versement de prestations du 17 mars 2020 au 16 septembre 2020. La caisse de compensation devait dès lors prendre en compte la situation de fait prévalant durant cette période. Le revenu moyen de l'activité lucrative de la recourante a certes été déterminé sur la base des données fiscales d'un exercice comptable antérieur (en l'espèce celui de l'année 2017). En se fondant sur les données fiscales disponibles (de 2017), la caisse de compensation a toutefois fixé le revenu censé avoir été perçu par la recourante immédiatement avant l'interruption de son activité lucrative indépendante en mars 2020. Pour évaluer le revenu déterminant, la caisse de compensation aurait donc dû constater que la recourante avait déjà atteint l'âge de retraite de référence fixé à l'ancien art. 21 al. 1 LAVS (64 ans révolus pour les femmes). Dès lors, elle aurait dû déduire du montant communiqué par les autorités fiscales la franchise pour rentiers (16'600 fr; art. 4 al. 2 let. b LAVS et 6quater RAVS; arrêt 9C_37/2021 du 23 juin 2021 consid. 4.2), puis ajouter les cotisations AVS/AI/APG (n os 1170 DIN et 3006.2 CAR). Le raisonnement de l'autorité précédente, confirmant que la caisse était en droit de corriger le revenu déterminant 2020 en conséquence, ne prête pas le flanc à la critique. Partant, le grief, mal fondé, doit être rejeté.  
 
6.  
C'est finalement en vain que la recourante soutient que les conditions de la reconsidération (au sens de l' art. 53 al. 2 LPGA ) n'étaient pas réunies, parce que la caisse aurait appliqué correctement les art. 5 de l'ordonnance sur la perte de gain COVID-19 et 11 al. 1 LAPG. Au moment des décomptes de prestations, il n'existait en effet aucun doute sur le fait que la franchise pour rentiers aurait dû être déduite. Dès lors, le vice est manifeste, car il résulte d'une non-application d'une disposition univoque ( art. 6quater RAVS , en lien avec les nos 1170 DIN et 3006.2 CAR). La recourante ne présente par ailleurs aucun argument concret pour étayer son affirmation selon laquelle la caisse de compensation aurait changé de pratique en 2021. Elle ne prétend en particulier pas que la caisse de compensation lui aurait garanti en 2020 qu'elle ne procéderait pas à la déduction de la franchise pour rentiers (à ce sujet, cf. ATF 138 V 258 consid. 6). 
 
7.  
Mal fondé, le recours est rejeté. 
Succombant, la recourante supporte les frais judiciaires ( art. 66 al. 1 LTF ). Il n'est pas alloué de dépens ( art. 68 al. 1 et 3 LTF ). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du Valais, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 9 octobre 2024 
 
Au nom de la IIIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Parrino 
 
Le Greffier : Bleicker 


Synthèse
Formation : Iiie cour de droit public  
Numéro d'arrêt : 9C_528/2023
Date de la décision : 09/10/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2024
Fonds documentaire ?: www.bger.ch
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2024-10-09;9c.528.2023 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award