La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/07/2025 | LUXEMBOURG | N°48361

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 14 juillet 2025, 48361


Tribunal administratif N° 48361 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:48361 1re chambre Inscrit le 11 janvier 2023 Audience publique du 14 juillet 2025 Recours formé par Monsieur (A1) et consorts, …, contre une décision du ministre de la Culture en matière de sites et monuments

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 48361 du rôle et déposée le 11 janvier 2023 au greffe du tribunal administratif par la société à responsabilité limitée RODESCH AVOCATS À LA COUR SARL, inscrite sur la liste V du tableau de l’Ordre des avocats au barreau d

e Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-1470 Luxembourg, 7-11, route...

Tribunal administratif N° 48361 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:48361 1re chambre Inscrit le 11 janvier 2023 Audience publique du 14 juillet 2025 Recours formé par Monsieur (A1) et consorts, …, contre une décision du ministre de la Culture en matière de sites et monuments

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 48361 du rôle et déposée le 11 janvier 2023 au greffe du tribunal administratif par la société à responsabilité limitée RODESCH AVOCATS À LA COUR SARL, inscrite sur la liste V du tableau de l’Ordre des avocats au barreau de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-1470 Luxembourg, 7-11, route d’Esch, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B265322, , représentée aux fins de la présente procédure par Maître Albert RODESCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A1), demeurant à L-…, ainsi que de Madame (A2) et de Monsieur (A3), demeurant tous les deux à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre de la Culture du 17 octobre 2022 classant comme patrimoine culturel national l’immeuble sis à L-…, inscrit au cadastre de la commune de Clervaux, section … Hupperdange, sous le numéro (P1) ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement, déposé au greffe du tribunal administratif en date du 6 avril 2023 ;

Vu le mémoire en réplique de la société à responsabilité limitée RODESCH AVOCATS À LA COUR SARL déposé au greffe du tribunal administratif le 8 mai 2023 pour compte de ses mandants, préqualifiés ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement, déposé au greffe du tribunal administratif le 8 juin 2023 ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment l’arrêté déféré ;

Le juge rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Virginie VERDANET, en remplacement de Maître Albert RODESCH, et Monsieur le délégué du gouvernement Tom HANSEN en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 18 décembre 2024.

___________________________________________________________________________

En date du 11 décembre 2020, le ministre de la Culture, ci-après désigné par « le ministre », informa Monsieur (A1), Madame (A2) et Monsieur (A3), ci-après désignés par « les consorts (A) », qu’il avait été saisi d’une demande de protection nationale concernant leur immeuble sis à L-…, inscrit au cadastre de la commune de Clervaux, section … Hupperdange, 1sous le numéro (P1), ci-après désigné par « l’immeuble », et sollicita leur accord afin de procéder à une visite des lieux.

En date du 9 juillet 2021, le ministre informa les consorts (A) qu’il proposerait de classer l’immeuble comme monument national.

L’intérêt historique, architectural et esthétique justifiant la proposition de classement comme monument national fut motivé par le ministre en citant l’avis de la Commission des sites et monuments nationaux, ci-après désignée par « la COSIMO », du 16 juin 2021.

Par courrier de leur litismandataire du 5 août 2021, les consorts (A) formulèrent des observations par rapport à l’intention de classement du ministre.

Par courrier du 29 septembre 2021, le ministre prit position quant aux observations formulées par les consorts (A).

Par arrêté du même jour, le ministre proposa au classement comme monument national « en raison de son intérêt historique, architectural et esthétique » l’immeuble en question.

Dans sa séance publique du 8 novembre 2021, le conseil communal de Clervaux émit un avis défavorable à l’égard de l’intention du ministre de proposer le classement comme monument national de l’immeuble.

Par courrier de leur litismandataire du 29 décembre 2021, les consorts (A) introduisirent un recours gracieux à l’encontre de l’arrêté de proposition de classement comme monument national de l’immeuble.

Par courrier de leur litismandataire du 28 mars 2022, les consorts (A) formulèrent une demande d’indemnisation à l’encontre du ministre pour leur préjudice subi en raison « de la mesure de classement ».

Par courrier du 20 avril 2022, le ministre informa les consorts (A) de l’entrée en vigueur de la loi du 25 février 2022 relative au patrimoine culturel, ci-après désignée par « la loi du 25 février 2022 », et des changements ayant été opérés par ladite loi quant aux procédures de protection des immeubles. Il formula dans ce contexte son intention de classement de l’immeuble comme patrimoine culturel en vertu des articles 130, 131 et 132 de la loi du 25 février 2022, étant donné que la procédure de classement n’aurait pas pu être achevée sous l’égide de l’ancienne loi modifiée 18 juillet 1983 concernant la conservation et la protection des sites et monuments nationaux, ci-après désignée par « la loi du 18 juillet 1983 ». Ledit acte cite l’avis favorable de la Commission pour le patrimoine culturel, ci-après désignée par « la COPAC », rendu à la même date, quasiment identique à celui rendu par la COSIMO en date du 16 juin 2021, et libellé comme suit :

« (…) La ferme (GEN) sise … à … se compose d'une maison d'habitation, prolongée vers la gauche, dans le même alignement et sous une même toiture, par des annexes agricoles abritant granges et étables (TYP). D'autres annexes, plus récentes sont encore adossées plus à gauche et à l'arrière. Les bâtiments sont implantés près du croisement du … et ….

La carte de Ferraris (1771-1778) semble indiquer à cet endroit un potager d'une maison voisine. Les immeubles inscrits sur le premier plan cadastral de 1824 présentent le même plan 2masse des bâtisses principales que ceux en place de nos jours. Les bases de l'immeubles remontent donc à la fin du XVIII / début XIXe siècle. Dans un document concernant les dommages de guerre la date de construction est indiquée comme étant 1860, mais il se peut qu’il s’agit d’une phase de transformation. D’autres travaux ont été effectués en 1890 et 1910.

Divers éléments historiques à l’extérieur et à l'intérieur correspondent à ces datations (EVO).

La façade principale, qui a été reconstruite suite aux dommages de guerre, présente trois travées d'ouvertures, disposées de manière régulière. Les baies sont rectangulaires et sans encadrements mais avec une simple tablette d'appui. Au rez-de-chaussée les ouvertures sont plus larges, presque carrées. Toutes ces éléments sont typiques de l'époque de la reconstruction de l'après-guerre (1940-1950). La division de ces châssis en bois en trois parties est également un élément caractéristique de cette période (AUT / PDR /TLP/EVO). Sous la fenêtre de droite se trouve la descente de cave. L'entrée a été déplacée d’une travée et elle a été implantée légèrement en arrière, sans doute à la même époque que le reste de la reconfiguration de la façade principale.

Le pignon droit présente trois baies de taille plutôt réduite, disposées de manière irrégulière. Ces ouvertures ont des encadrements historisants en pierre naturelle avec des arcs segmentaires et des chanfreins, datant sans doute des transformations de 1890 ou 1910 (AUT/PDR). La façade postérieure présente seulement deux ouvertures, identiques à celles du pignon droit (AUT/PDR). La maison est surmontée d'une toiture à deux pans avec une croupe.

Tandis que le pan arrière et la croupe sont couverts avec des ardoises, le pan donnant sur la rue est couvert par des tôles imitant les tuiles.

À l'intérieur, la maison a conservé sa structure bâtie (divisions horizontales et verticales en pierres régionales et en bois, fumoir « Haascht », charpente, cave voûtée) et divers éléments historiques tels que le carrelage en damier dans la cuisine, des revêtements de sol en bois dans le salon et dans les pièces à l'étage, des portes avec chambranles en bois, une armoire encastrée « Takeschaf » dont les portes ne sont malheureusement plus en place (AUT/PDR/TLP/EVO).

L'accès à la cave voûtée qui se trouve sous le salon se fait également à l'intérieur de la maison.

En effet, un grand escalier en pierre prend son départ dans une pièce située derrière la cuisine, donnant également accès aux annexes.

Les annexes présentent en façade principale des ouvertures correspondantes au diverses fonctions, tels que l'accès et éclairage des étables et l'accès à la grange. Comme la maison d'habitation les baies ne présentent pas d'encadrements en pierre naturelle. Les fenêtres ont des châssis et des divisons assez fins en métal ce qui est, comme pour la maison, typique de l'architecture de la moitié du XXe siècle (PDR/EVO). Les hangars plus récents, composés de charpentes et de tôles prolongent davantage les anciens immeubles et les encerclent sur une partie à l'arrière. Ces constructions ne présentent pas de valeur architecturale.

La ferme est un élément de l'histoire locale et un témoin du développement de l'architecture traditionnelle (rurale). En effet, à l'intérieur la maison garde en grande partie son authenticité de ses principales phases de construction, tandis qu'à l'extérieur elle témoigne, également de manière authentique, de la reconstruction suite aux dommages causés par la Secondes Guerre mondiale, qui étaient particulièrement sévères à l’Oesling et à l’est du pays.

Cette phase fait désormais partie de l’histoire de l’agriculture et de l’histoire sociale. Ainsi, l'ensemble présente au point de vue historique, architectural et esthétique un intérêt public à être conservé.

3Critères remplis: authenticité (AUT), genre (GEN), typologie (TYP), période de réalisation (PDR), typicité du lieu ou du paysage (TLP), évolution et développement des objets et sites (EVO). (…) ».

Par courrier du 3 mai 2022, les demandeurs firent part de leurs observations quant au classement envisagé.

Par courrier du 7 juin 2022, le ministre informa les consorts (A) une nouvelle fois de son intention de classer l’immeuble comme patrimoine culturel sur base de la loi du 25 février 2022.

Dans sa séance publique du 20 juillet 2022, le conseil communal de Clervaux confirma son avis défavorable à l’égard de l’intention du ministre de classer l’immeuble comme patrimoine culturel national.

En date du 17 octobre 2022, le ministre prit l’arrêté de classement comme patrimoine culturel national, qui est libellé comme suit :

« (…) Vu la loi du 25 février 2022 relative au patrimoine culturel ;

Considéré l'intérêt public de protection et de conservation de l'immeuble sis … à …, notamment aux points de vue historique et architectural ;

Vu l'avis de la Commission pour le patrimoine culturel du 20 avril 2022 ;

Vu les observations du 3 mai 2022 de Maître Albert Rodesch, défendant les intérêts de Madame (A2), Monsieur (A3) et Monsieur (A1), propriétaires ;

Vu l'intention de classement du 7 juin 2022 ;

Vu l'avis du Conseil communal de la Commune de Clervaux du 20 juillet 2022 ;

Arrête:

Art. 1er. Est classé comme patrimoine culturel national, l'immeuble sis …, inscrit au cadastre de la Commune de Clervaux, section … de Hupperdange, sous le numéro (P1), appartenant à Madame (A2), Monsieur (A3) et Monsieur (A1).

Art. 2. Les effets juridiques liés au statut de classement comme patrimoine culturel national sont ceux énumérés aux articles 30 à 40 de la loi du 25 février 2022 relative au patrimoine culturel et ce jusqu'à l'entrée en vigueur du règlement grand-ducal de classement comme patrimoine culturel national des immeubles figurant sur l'inventaire du patrimoine architectural pour la commune sur le territoire de laquelle les biens immeubles se situent. Ce règlement grand-ducal annulera et remplacera le cas échéant la mesure de classement en vertu de l'article 132 de la loi du 25 février 2022 relative au patrimoine culturel.

Art. 3. Le propriétaire est tenu d'informer le locataire, l'occupant et les usufruitiers de l'arrêté de classement.

4Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 11 janvier 2023, les consorts (A) ont fait introduire un recours tendant, aux termes de son dispositif, à l'annulation de l'intention de classement de l’immeuble comme patrimoine culturel national du 7 juin 2022.

I.

Quant à la compétence du tribunal et de la recevabilité du recours Dans la mesure où l’article 107 de la loi du 25 février 2022 prévoit qu’un recours en annulation peut être introduit à l’encontre des décisions prises en vertu de ladite loi, le tribunal est compétent pour connaître du recours en annulation introduit en l’espèce.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement se rapporte à prudence de justice quant à la recevabilité du recours en relevant que le dispositif de la requête introductive d’instance introduite par les consorts (A) viserait la seule décision du 7 juin 2022 par laquelle le ministre les a informés de son intention de classer l’immeuble comme patrimoine culturel national, alors que le corps de la requête viserait tantôt cette dernière décision tantôt l’arrêté du 17 octobre 2022.

Dans leur mémoire en réplique, les consorts (A) précisent que la décision attaquée serait la décision du 17 octobre 2022, à savoir l’arrêté de classement comme patrimoine culturel national.

Ils donnent à considérer dans ce contexte qu’ils auraient introduit dans un premier temps un recours en annulation, inscrit sous le numéro 47909 du rôle, à l’encontre de la décision du 7 juin 2022 les informant de l’intention du ministre de classer leur immeuble comme patrimoine culturel national.

Ils se seraient désistés dudit recours en raison de la prise de l’arrêté ministériel du 17 octobre 2022.

Les consorts (A) en déduisent qu’il serait évident quelle décision ils avaient l’intention de contester et que leur recours serait dès lors recevable.

Le tribunal est amené à constater à l’instar du délégué du gouvernement qu’il existe une incohérence quant à l’objet du recours. Si suivant la première page de la requête introductive d’instance, le recours est dirigé contre l’arrêté du 17 octobre 2022 portant classement comme patrimoine culturel national de l’immeuble, il ressort du dispositif de cette requête que le recours tend à l’annulation de l’acte du 7 juin 2022 par lequel le ministre informe les consorts (A) de son intention de procéder au classement litigieux.

Il est exact qu’en principe le tribunal est exclusivement saisi des demandes figurant au dispositif de la requête introductive d’instance1 et que les termes juridiques employés par un professionnel de la postulation sont à appliquer à la lettre, ce plus précisément concernant la nature du recours introduit, ainsi que son objet, tel que cerné à travers la requête introductive d’instance et précisé, le cas échéant, à travers le dispositif du mémoire en réplique2. Néanmoins, en présence d’une contrariété entre le corps et le dispositif de la requête quant à l’objet du recours, s’il se dégage par ailleurs sans méprise possible du corps de la requête sous-tendant directement le dispositif quelle est en réalité la décision que le demandeur au recours entend attaquer, et s’il en ressort que la décision mentionnée dans le dispositif ne peut être que le résultat d’une simple erreur matérielle, le tribunal peut valablement considérer que le recours 1 Trib. adm., 17 décembre 2001, n° 12830 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 398 et les autres références y citées.

2 Trib. adm., 13 juin 2005, n° 19368 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 399 et les autres références y citées.

5est dirigé contre la décision qui se dégage de la motivation du recours, sans mettre en cause la recevabilité du recours, si par ailleurs les droits de la défense sont garantis3.

En l’espèce, il ressort sans aucun doute de la motivation de la requête, que les demandeurs ont entendu diriger le présent recours contre l’arrêté de classement comme patrimoine culturel national, de sorte qu’il y a lieu d’admettre que le fait d’avoir fait référence dans le dispositif de la requête introductive d’instance à la décision du 7 juin 2022 est le résultat d’une erreur matérielle.

D’ailleurs, le délégué du gouvernement, dans son mémoire en réponse, a valablement pu cerner l’objet du recours et prendre utilement position, de sorte que le tribunal constate qu’aucune lésion des droits de la défense ne peut être retenue.

Dans ces conditions, le recours sera analysé comme ayant été dirigé contre l’arrêté ministériel du 17 octobre 2022.

A défaut d’autres moyens d’irrecevabilité, le tribunal, n’entrevoyant, par ailleurs, pas de moyens à soulever d’office, conclut que le recours en annulation est à déclarer recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

II.

Quant au fond Arguments des parties A l’appui de leur recours, les demandeurs reprennent en substance les faits et rétroactes tels que relevés ci-avant tout en précisant que leur immeuble consisterait en une maison d’habitation, prolongée sur sa gauche par des annexes agricoles comprenant notamment des granges et étables, constructions qui auraient déjà figuré au cadastre établi entre 1811 et 1832.

Ils insistent sur le fait qu’aux termes des documents figurant au dossier administratif ainsi que des constatations faites lors de la visite des lieux du 10 novembre 2021, que les immeubles en question auraient subi deux transformations au cours du 19e siècle, une transformation majeure en 1910, ainsi qu’une transformation importante en 1951, dans le cadre de la reconstruction d’après-guerre, comprenant notamment une élévation de la façade avant.

Les demandeurs soulignent ensuite l’état de délabrement avancé du bâtiment, qui le rendrait impropre à l’habitation.

Ils expliquent dans ce contexte avoir hérité de l’immeuble en question à la suite du décès de leur cousin, Monsieur (A4), survenu le 21 mai 2020 et qu’ils seraient ensuite entrés en négociations avec la société de construction (AA) concernant un éventuel achat de la propriété, dans le but d’y ériger une résidence comprenant six appartements. Un accord aurait été conclu en date du 13 août 2020 entre les demandeurs et la société de construction, portant sur la cession de l’immeuble en contrepartie de deux appartements d’une chambre chacun dans la future résidence.

3 Trib. adm., 17 décembre 2008, n° 24406 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 398 et les autres références y citées.

6La société de construction aurait ensuite procédé aux études architecturales nécessaires et les stades d’avant-projet auraient été successivement approuvés par les services communaux entre octobre 2020 et avril 2021.

En droit, les demandeurs invoquent tout d’abord une violation de l’article 23 de la loi du 25 février 2022, dans la mesure où leur bien ne satisferait pas aux conditions légales de classement telles que prévues par ladite disposition législative et que le principe du classement de l’immeuble n’aurait pas fait l’unanimité au sein de la COSIMO, dans la mesure où sur les 13 personnes participant au vote, 4 personnes auraient voté contre un classement et 2 se seraient abstenues. Selon les demandeurs, ce constat ne saurait être énervé par le fait que la COPAC se serait prononcée en faveur d’un classement comme patrimoine culturel national avec une grande majorité en date du 20 avril 2022.

Ils insistent sur le fait que seule la maison d’habitation serait visée par le classement litigieux, qui ne viserait pas les hangars et l’annexe à l’arrière du bâtiment.

A cet égard, ils font valoir que la maison d’habitation ne présenterait pas les critères d’authenticité requis, ayant connu de nombreuses modifications et transformations, de sorte à ne pas pouvoir être considérée comme représentative ou significative au sens des critères énoncés par la loi.

Ils soulignent que d'autres biens similaires, présentant des caractéristiques équivalentes, n’auraient pas fait l’objet d’un classement, ce qui démontrerait un défaut d’objectivité et d’uniformité dans l’application des critères.

Ils soutiennent ensuite qu’en raison des multiples modifications et transformations, leur bien ne présenterait aucun intérêt historique architectural et esthétique, constat qui serait encore corroboré par la situation géographique au sein de la localité de Hupperdange, étant donné que l’immeuble serait entouré d’immeubles récents.

Quant à l’intérieur de l’immeuble, les demandeurs soutiennent qu’il aurait été rénové dans les années 1950 et que les éléments classés témoignant d’un intérêt historique se trouveraient isolés et sans « charme » après une restauration complète de l’immeuble qui s’imposerait.

Les demandeurs avancent ensuite un moyen ayant trait à une violation du principe de proportionnalité.

Ils estiment que la mesure de classement constituerait une atteinte disproportionnée à leur droit de propriété et à la liberté de disposer de leur bien.

Ils exposent, en premier lieu, que le bâtiment se trouverait dans un état avancé de délabrement, comme en attesteraient les photographies produites et le constat établi lors de la visite des lieux du 10 novembre 2021, et qu’il ne saurait être habité sans de lourds travaux de rénovation.

En deuxième lieu, ils soutiennent que les exigences de conservation de la volumétrie et de l’aménagement intérieur empêcheraient toute adaptation du bâtiment aux standards contemporains d’habitabilité, notamment en ce qui concerne les hauteurs sous plafond inférieures aux normes légales.

7 Ils ajoutent que, malgré les possibilités d’extension évoquées par le ministère de la Culture, les contraintes de gabarit imposées rendraient ces aménagements techniquement complexes, coûteux, et inadaptés.

En troisième lieu, ils soulignent l’impossibilité d’atteindre les performances énergétiques requises sans enfreindre les exigences de conservation imposées.

En dernier lieu, les demandeurs mettent en évidence le caractère coûteux, lourd et peu subventionné des travaux de restauration, lesquels devraient être réalisés selon des méthodes artisanales traditionnelles, engendrant une charge financière excessive et non compensée.

Les demandeurs concluent finalement à l’annulation de la décision déférée pour violation du principe d’égalité devant la loi.

Ils invoquent dans ce contexte une rupture d’égalité de traitement, dès lors que d’autres maisons situées dans le même périmètre géographique, présentant des caractéristiques architecturales analogues, n’auraient pas été classées.

Ils estiment qu’il n’existerait aucun élément objectif justifiant une différence de traitement entre leur bien et ces autres immeubles, ce qui traduirait une application inégalitaire des règles de classement.

Dans leur mémoire en réplique, les demandeurs font valoir qu'il ressortirait des éléments du dossier que l'immeuble en question aurait subi une modification conséquente en 1910, ce qui découlerait, par ailleurs, du procès-verbal de la visite des lieux du 10 novembre 2021 approuvé par les agents de l'Institut national pour la protection architecturale, ci-après désigné par « INPA », ce qui confirmerait son caractère contradictoire.

De plus, d'autres travaux auraient été effectués en 1890 et 1910.

Les demandeurs précisent que le classement rendrait l'immeuble impropre à toute habitation dans la mesure où il interdirait un certain nombre de travaux nécessaires à cette fin.

En d'autres termes, sans le classement litigieux, ils pourraient soit démolir l'immeuble, soit le rendre conforme à la réglementation en vigueur moyennant des travaux de rénovation et de transformation. Or, en interdisant ces travaux, le classement administratif leur imposerait une charge disproportionnée et porterait atteinte à leur droit de propriété de manière disproportionnée.

Les consorts (A) avancent ensuite que la décision déférée constituerait une ingérence disproportionnée à leur droit de propriété équivalant à une expropriation.

Ils se réfèrent à un arrêt de la Cour constitutionnelle du 4 octobre 2013 selon lequel une servitude immobilière légale équivaudrait à une expropriation si le changement des attributs de la propriété effectuée était « à tel point substantiel qu'il prive celle-ci d'un des aspects essentiels ».

Ils soutiennent que le classement litigieux aurait procédé à un tel changement substantiel de leur droit de propriété, dans la mesure où, suite au classement, l'immeuble ne pourrait plus 8être « (i) démoli (abusus), (ii) loué à des tiers (fructus) et (iii) habité par les requérants eux-

mêmes (usus) ».

En admettant qu'une servitude puisse procéder à une ingérence de certains aspects de la propriété privée, les demandeurs font valoir qu’en l’espèce l'ingérence serait trop vaste et équivaudrait à une expropriation.

Ils en concluent que la décision litigieuse constituerait une atteinte au droit de propriété au regard de l'article 16 de la Constitution, en vigueur jusqu’au 1er juillet 2023.

Le délégué du gouvernement conclut quant à lui au rejet du recours.

Il donne tout d’abord à considérer que les demandeurs ne contestent pas les faits établis par le ministre, notamment que les bases de l'immeuble dateraient de la fin du XVIIIème/début XIXème siècle et qu'il aurait subi des transformations au XIXème siècle et qu’il témoignerait de la période de reconstruction d’après la Seconde Guerre mondiale.

Il conteste que les modifications de 1910 auraient été conséquentes.

Le délégué du gouvernement rappelle que les experts de la COPAC auraient conclu que l'immeuble serait représentatif selon les critères de genre et typologie, période de réalisation, typicité du lieu et du paysage, et évolution et développement des objets et sites. Il s'agirait d'une ferme longère composée d'une maison d'habitation et d'annexes agricoles, reconnaissables par leurs agencements et ouvertures caractéristiques. L'intérieur serait typique du XIXème siècle, tandis que l'extérieur présenterait des éléments du tournant XIXème / XXème siècle et du milieu du XXème siècle. Le style de reconstruction serait typique des régions touchées par l'Offensive des Ardennes, et les matériaux locaux comme le grès et le schiste auraient été utilisés. Les transformations seraient visibles dans les différences de style entre la façade principale et les façades latérale et postérieure, ainsi que les éléments historiques de l'intérieur.

S’agissant de la référence faite par les demandeurs à d'autres immeubles de la localité de Hupperdange présentant la même configuration de façade de l'époque de la reconstruction, le délégué du gouvernement fait valoir qu’il serait de jurisprudence qu’il ne se dégagerait ni du catalogue de critères mis en place par le Service des sites et monuments nationaux, ci-après désigné par « le SSMN », ni des dispositions légales applicables, que seuls les objets exceptionnels ou remarquables pourraient être sujets à classement. Le classement reposerait en l’espèce sur des critères légaux et objectivement retraçables.

Cette conclusion ne serait pas ébranlée par l'affirmation adverse relative à la situation géographique au sein de la localité, selon laquelle l'immeuble serait entouré par des immeubles récents.

Même en supposant qu'il ne serait pas possible de conformer l'immeuble aux dispositions légales et réglementaires en vigueur, cela ne constituerait, selon le délégué du gouvernement, pas un facteur à prendre en considération dans le cadre du contrôle de la proportionnalité de la décision. Cette circonstance alléguée ne serait pas une conséquence du classement comme patrimoine culturel, mais résulterait de la configuration de l'immeuble.

Quant à l’état de délabrement général de l'immeuble avancé par les demandeurs, le délégué du gouvernement fait valoir que le terme « délabré » signifierait communément « en 9mauvais état, en ruine ». En admettant que l'immeuble serait certes en mauvais état et nécessiterait une restauration conséquente pour être habitable, il soutient cependant qu’il ne serait pas en ruine.

Il insiste sur le fait que l'état de conservation d'un immeuble ne serait pas décisif pour déterminer s'il mérite une protection comme patrimoine culturel national. Il explique qu’un expert devrait effectuer une analyse approfondie pour évaluer les dommages et élaborer des mesures appropriées pour la restauration.

Le délégué du gouvernement rétorque à l’argument des demandeurs selon lequel la volumétrie et l’agencement intérieur actuels de l’immeuble s’opposeraient à l’habitabilité de l’immeuble, qu'un administré pourrait, sous certaines conditions, se prévaloir d'un droit acquis en matière de permis de construire. Ainsi, en matière de transformation d'un immeuble existant, dont ni les dimensions extérieures ni la destination ne seraient projetées pour être changées, le propriétaire de l'immeuble disposerait d'un droit acquis de maintenir les dimensions de son bien, à condition que la réglementation communale d'urbanisme ou les règles applicables au moment de la construction aient été respectées.

Les changements réglementaires concernant l'habitabilité des pièces ou la performance énergétique après la construction de l'immeuble ne devraient donc pas s'opposer à la réalisation de travaux de rénovation.

Le délégué du gouvernement fait encore valoir que les demandeurs n’établiraient pas qu’ils entendraient donner en location leur immeuble.

En ce qui concerne la performance énergétique, le délégué du gouvernement fait valoir que l'article 13 du règlement grand-ducal modifié du 9 juin 2021 concernant la performance énergétique des bâtiments, ci-après désigné par « le règlement grand-ducal du 9 juin 2021 », permettrait au bourgmestre d'accorder des dérogations aux exigences minimales pour les bâtiments protégés. Il donne à considérer que divers éléments pourraient être améliorés énergétiquement de manière ponctuelle et efficace tout en respectant la substance bâtie historique, en faisant appel à des spécialistes. Le ministère de la Culture aurait, par ailleurs, publié une brochure identifiant différentes pratiques et mesures pour la conservation ou la rénovation du patrimoine culturel dans le cadre du développement durable.

Quant à l'aménagement intérieur à conserver, le délégué du gouvernement fait valoir que selon l'article 30 de la loi du 25 février 2022, le ministre pourrait autoriser des travaux de réparation, de restauration ou de modification sur des immeubles classés comme patrimoine culturel national si un projet concret lui est soumis, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce. Il rappelle encore que selon l'article 34 de la loi du 25 février 2022, des travaux de restauration et de mise en valeur d'immeubles protégés pourraient bénéficier de subventions étatiques couvrant jusqu'à 50% des frais encourus, voire plus.

Le délégué du gouvernement rappelle qu’une protection nationale n'empêcherait pas l'adaptation de l'immeuble aux standards de vie modernes, tout en sauvegardant des éléments historiques tels que la division des pièces, la « Haascht », le « Takeschaf », la cave voûtée, l'escalier et l'accès aux étables.

Il conclut au rejet du moyen tiré d'une violation du principe de proportionnalité.

10Quant au moyen tiré d'une violation du principe d'égalité, le délégué du gouvernement fait valoir qu’il n’y aurait pas de différence de traitement entre l’immeuble des demandeurs et les immeubles dont ils font référence. Le fait qu'un immeuble ne figure pas sur la liste des immeubles classés comme patrimoine culturel national à un moment précis n'exclurait pas l'existence d'un intérêt public de protection et de conservation, ni une inscription potentielle à l'inventaire du patrimoine architectural de la commune concernée. L'inventorisation du patrimoine architectural du Grand-Duché de Luxembourg serait un travail en cours, et rien ne s'opposerait à un classement des immeubles cités s'ils remplissent les critères de l'article 23 de la loi du 25 février 2022.

Le délégué du gouvernement précise encore que les immeubles cités par les requérants auraient fait l'objet de travaux de repérage au niveau communal par l'INPA dans le cadre de l'étude préparatoire et de la contribution à l'avis de la commission d'aménagement du ministère de l'Intérieur relatif à la conformité du projet de plan d’aménagement général avec les dispositions de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après désignée par « la loi du 19 juillet 2004 ».

Dans son mémoire ne duplique, le délégué du gouvernement maintient, en substance, ses développements antérieurs.

Analyse du tribunal Le tribunal relève de prime abord que la légalité d’une décision administrative s’apprécie dans le cadre d’un recours en annulation en considération de la situation de droit et de fait au jour où elle a été prise, puisque le juge, lorsqu’il contrôle les décisions de l’administration, doit se placer au même moment et il ne peut tenir compte des circonstances de droit ou de fait postérieures à l’acte attaqué, puisque dans le contentieux de l’annulation, il ne peut substituer son appréciation à celle de l’administration. La légalité d’un acte administratif se trouve donc en principe cristallisée au moment où cet acte est pris et le juge se place exactement dans les mêmes conditions où se trouvait l’administration ; c’est la logique du procès fait à un acte4.

Il convient ensuite de rappeler que saisi d’un recours en annulation, le tribunal vérifie si les motifs sont de nature à justifier légalement la décision attaquée et contrôle si celle-ci n’est pas entachée de nullité pour incompétence, excès ou détournement de pouvoir, ou pour violation de la loi ou des formes destinées à protéger des intérêts privés.

Dans le cadre d’un recours en annulation, le juge administratif est appelé à vérifier, d’un côté, si, au niveau de la décision administrative querellée, les éléments de droit pertinents ont été appliqués et, d’un autre côté, si la matérialité des faits sur lesquels l’autorité de décision s’est basée est établie. Au niveau de l’application du droit aux éléments de fait, le juge de l’annulation vérifie encore s’il n’en est résulté aucune erreur d’appréciation se résolvant en dépassement de la marge d’appréciation de l’auteur de la décision querellée, dans les hypothèses où l’auteur de la décision dispose d’une telle marge d’appréciation, étant relevé que le contrôle de légalité à exercer par le juge de l’annulation n’est pas incompatible avec le pouvoir d’appréciation de l’auteur de la décision qui dispose d’une marge d’appréciation. Ce n’est que si cette marge a été dépassée que la décision prise encourt l’annulation pour erreur 4 Trib. adm., 16 juin 2016, n° 36542 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Recours en annulation, n° 20 et les autres références y citées.

11d’appréciation. Ce dépassement peut notamment consister dans une disproportion dans l’application de la règle de droit aux éléments de fait. Le contrôle de légalité du juge de l’annulation s’analyse alors en contrôle de proportionnalité5.

Il y a encore lieu de rappeler que le tribunal n’est pas tenu par l’ordre des moyens, tel que présenté par le demandeur, mais détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et l’effet utile s’en dégageant.

Force est tout d’abord au tribunal de constater que les consorts (A) ne tirent ni une conclusion en droit par rapport à leurs développements ayant trait à une régularisation par la COPAC des procédures de classement entamées en vertu de la loi du 18 juillet 1983 et ayant déjà fait l’objet d’un avis de la part de la COSIMO ainsi qu’au fait que la COPAC aurait suivi les avis pris par la COSIMO sous l’ancienne procédure, ni n’invoquent-ils une disposition légale qui aurait pu être violée de ce fait, de sorte qu’il y a lieu d’en conclure qu’il s’agit d’un moyen simplement suggéré encourant le rejet, étant donné qu’il n’appartient pas au tribunal de suppléer à la carence des demandeurs en recherchant lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions.

Il échet ensuite de rappeler qu’aux termes de l’article 23 de la loi du 25 février 2022 :

« (…) (2) Pour pouvoir être inventorié comme bien immeuble susceptible de faire l’objet d’un classement comme patrimoine culturel national, un bien immeuble doit être authentique pour avoir connu peu de modifications et avoir gardé des éléments de son époque.

Outre ce critère d’authenticité, un bien immeuble doit être représentatif et significatif au vu d’au moins un des critères suivants :

1° Histoire de l’architecture, de l’art ou de l’ingénierie : biens représentant de façon exemplaire une certaine époque, un certain courant ou en illustrent l’apogée ;

2° Genre : biens à fonction et destination initiales reconnaissables ;

3° Typologie : biens se caractérisant par leur composition et constitution spécifiques ;

4° Rareté : biens ayant été réalisés en nombre restreint ou qui sont devenus peu nombreux au fil du temps ;

5° Période de réalisation : biens ayant repris et transposé le style artistique ou l’esprit de l’époque de leur réalisation ;

6° Histoire industrielle, artisanale, économique ou scientifique : biens témoignant du développement technique de leur époque de réalisation ou qui sont représentatifs du développement d’un lieu ou d’une région ;

7° Lieu de mémoire : biens rappelant une personnalité ou un évènement important pour l’histoire du pays ;

8° Histoire politique et institutionnelle, nationale ou européenne : biens témoignant de l’organisation et de l’exercice du pouvoir et des institutions politiques tant au niveau national qu’international ;

9° Histoire militaire : biens rappelant des actions de défense, des faits de guerre ou représentant l’évolution des techniques militaires ;

10° Histoire sociale ou des cultes : biens illustrant la vie, le travail ou la vie spirituelle et religieuse ainsi que les traditions et les coutumes de différentes époques ;

5 Cour adm., 9 décembre 2010, n° 27018C du rôle, Pas. adm. 2024, V° Recours en annulation, n° 60 et les autres références y citées.

1211° Œuvre architecturale, artistique ou technique : biens ayant été conçus par un ou plusieurs créateurs reconnus pour la qualité de leur œuvre ;

12° Typicité du lieu ou du paysage : biens typiques pour une partie du territoire national, en fonction des spécificités géographique et géologique des lieux ;

13° Histoire locale, de l’habitat ou de l’urbanisation : biens témoignant des caractéristiques spécifiques d’un lieu ou d’une région et qui sont significatifs du point de vue de la composition urbaine ou rurale ;

14° Évolution et développement des objets et sites : biens ayant connu des transformations au cours du temps et qui témoignent de l’évolution du bâti en affichant des unités stratigraphiques, caractéristiques pour différentes époques.

Les critères énumérés aux points de l’alinéa 2 peuvent s’appliquer de manière cumulative et le poids de chaque critère peut varier selon l’objet inventorié. ».

Il se dégage de cette disposition légale, que pour mériter d’être protégé, l’immeuble concerné doit être authentique, d’une part, tout en étant représentatif et significatif au regard d’au moins d’un des 14 autres critères plus spécialement énoncés, d’autre part.

Le mérite d’un immeuble se mesure donc par rapport à un intérêt public avéré que doit présenter sa conservation. Cet intérêt doit encore être particulièrement vérifié, spécialement dès lors qu’une décision de classement est généralement susceptible d’affecter sensiblement la situation des propriétaires.

En ce qui concerne le bien-fondé du classement de l’immeuble, il convient de souligner que le critère principal et fondamental est celui de l'authenticité de l'immeuble classé. A cela doit s'ajouter une certaine représentativité et un caractère significatif de l'immeuble par rapport à au moins un des 14 autres critères énumérés dans les différents points de l'alinéa 2 de l'article 23 de la loi du 25 février 2022.

En l’espèce, il échet de constater que les membres de la COPAC motivent dans leur avis du 20 avril 2022 l’intérêt public de protection et de conservation de l’immeuble par (i) sa composition, (ii) son ancienneté et ses différentes phases de transformation confirmées par divers éléments historiques tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’immeuble, (iii) la composition de la façade principale typique de l’époque de la reconstruction de l’après-guerre, (iv) la composition du pignon droit et de la façade postérieure présentant des ouvertures à encadrements historisants en pierre naturelle, (v) la conservation de la structure bâtie et de divers éléments historiques à l’intérieur de la maison d’habitation, (vi) la façade des annexes dont les caractéristiques témoignent également de la reconstruction, et (vii) le fait que la ferme est un élément de l’histoire locale et sociale, ainsi qu’un témoin du développement de l’architecture traditionnelle rurale.

Quant à la matérialité des faits sur lesquels l’autorité de décision s’est ainsi basée pour justifier l’intérêt historique à classer l’immeuble, le tribunal se doit de constater que les demandeurs se contentent de mettre en avant de manière sommaire l’absence d’intérêt historique, architectural et esthétique sans toutefois concrètement remettre en cause les considérations d’ordre historique leur opposées pour justifier la conservation de l’immeuble.

En effet, les demandeurs se bornent à relever à cet égard (i) que d’autres immeubles dans le village de Hupperdange n’auraient pas fait l’objet d’un classement, (ii) que l’immeuble aurait subi de multiples transformations, (iii) qu’il serait entouré de maisons récentes et (iv) que les 13éléments de l’intérieur de l’immeuble, qui ont été particulièrement relevés par le ministre, seraient, depuis une rénovation dans les années 1950, dépourvus de leur « charme ».

Or, il se dégage des explications étatiques non énervées par les demandeurs que l’immeuble en question ne présente pas seulement un caractère rural pour être composé en tant que ferme longère (Streckhof), mais qu’il a également transposé l’esprit de l’époque de sa réalisation, à savoir à travers, s’agissant de l’intérieur de l’immeuble, le carrelage, les planchers et portes en bois et les solives du XIXe siècle, et, s’agissant de l’extérieur de l’immeuble, les ouvertures caractéristiques pour le tournant du XIXe au XXe siècle. Les développements de la partie gouvernementale quant au fait que l’immeuble constitue un bien typique témoignant de la reconstruction à la suite de l’Offensive des Ardennes de 1944-1945 et qu’il a été construit avec des matériaux issus de la région, ne sont pas non plus contredits par les demandeurs.

Ce constat n’est pas ébranlé par l’argument des demandeurs selon lequel l’immeuble aurait fait l’objet de plusieurs transformations et rénovations, étant donné qu’il n’est pas exigé qu’un immeuble doive, dans son entièreté, se retrouver au moment de son classement, dans son état d’origine. En effet, les immeubles vivent et subissent tout normalement des transformations. C’est compte tenu des différentes étapes de leur construction et de leur transformation qu’il échet de considérer les immeubles tels qu’ils se présentent au moment de la décision ministérielle décidant de leur classement6, étant encore précisé qu’en l’espèce, c’est justement cette reconstruction partielle à la suite de l’Offensive des Ardennes qui fait de l’immeuble un témoin de l’histoire locale.

Ce constat n’est pas non plus infirmé par l’affirmation sommaire que d’autres immeubles de la localité de Hupperdange n’auraient pas fait l’objet d’un classement, respectivement que l’immeuble serait entouré de maisons plus récentes, étant donné que la loi du 25 février 2022 ne prévoit comme critère de classement ni que l’immeuble doit être entouré par des immeubles à valeur équivalente, ni que tous les immeubles construits à une même époque doivent faire l’objet d’un classement comme patrimoine culturel national, étant cependant précisé à cet égard que le moyen avancé par les demandeurs ayant trait à une violation du principe d’égalité sera analysé ci-après.

Le tribunal relève ensuite qu’aucun des éléments d’ordre esthétique sur lesquels se sont fondés tant le ministre que le délégué du gouvernement en cours de procédure contentieuse pour rattacher l’immeuble aux caractéristiques de l’évolution du bâti en affichant des caractéristiques pour différentes époques, en l’occurrence notamment le fait que la façade principale se distingue du style des façades latérale et postérieure à travers leurs ouvertures et les encadrements de celles-ci, de même que des éléments historiques de l’intérieur de l’immeuble, n’a été ni énervé ni même discuté par les demandeurs.

Les demandeurs ne contestent, par ailleurs, pas non plus qu’à l’intérieur, l’immeuble présente encore diverses structures bâties historiques de même que certains éléments décoratifs de l’époque qui méritent d’être conservés.

Au vu de ce qui précède, le tribunal est amené à conclure qu’en sa qualité de témoin de l’architecture rurale traditionnelle du XIXe siècle, respectivement de la période de reconstruction de l’après-guerre, l’immeuble litigieux remplit le critère d’authenticité et est 6 Cour adm., 24 décembre 2020, n° 44927C du rôle, Pas. adm. 2024, V° Sites et monuments, n° 43 et l’autre référence y citée.

14représentatif et significatif au regard du critère de l’histoire sociale et locale. Il s’ensuit que le moyen ayant trait à une violation de l’article 23 de la loi du 25 février 2022 encourt le rejet.

Il échet ensuite de relever que les demandeurs, s’ils n’ont que sommairement contesté que leur immeuble remplit plusieurs des critères cités à l’article 23 de la loi du 25 février 2022, ils ont cependant insisté sur une violation du principe de proportionnalité en relevant (i) l’état de délabrement général de l’immeuble, (ii) la volumétrie et l’agencement intérieur, (iii) la performance énergétique et (iv) le fait que l’aménagement intérieur devrait être conservé.

La proportionnalité implique qu’une mesure adoptée par les pouvoirs publics ne résulte jamais en une aggravation excessive de la situation de l’intéressé ni ne lui devienne intolérable.

Autrement dit, le moyen et la fin ne doivent pas être disproportionnés l’un par rapport à l’autre.

Il s’agit donc de comparer l’objectif et le moyen et de pondérer leurs importances respectives.

L’évaluation comparative inhérente à l’application du paramètre de proportionnalité au sens strict est nécessairement influencée en dernière analyse par le caractère incisif de la mesure projetée : plus il faut intervenir de façon sensible dans la sphère juridique du particulier, plus l’intérêt général que la collectivité veut promouvoir par cette mesure doit être pertinent7.

Concrètement, le principe de proportionnalité se décompose en trois tests :

l’adéquation, la nécessité et la proportionnalité stricto sensu. Ainsi, une mesure est considérée comme adéquate lorsqu’elle est appropriée à l’objectif poursuivi ; ensuite, elle est nécessaire lorsqu’elle ne peut pas être remplacée par une mesure alternative qui serait moins contraignante et d’efficacité égale ; enfin, le troisième test – la proportionnalité au sens strict – suppose la réalisation d’un test de la balance des intérêts8.

En l’espèce, il échet de constater que la décision déférée poursuit un but de protection d’un immeuble témoin de l’histoire locale et rurale du village de Hupperdange pour les générations futures et est dans cette mesure appropriée à l’objectif poursuivi. Elle est, par ailleurs nécessaire, dans la mesure où, à défaut de décision de classement, les propriétaires de l’immeuble auraient, le cas échéant, procédé à sa démolition, tel qu’ils l’avancent, par ailleurs, eux-mêmes, en vue de la construction d’un immeuble résidentiel.

S’agissant ensuite de la proportionnalité stricto sensu de la décision déférée, il échet de constater que les demandeurs avancent deux ordres d’arguments : le premier ayant trait à l’état actuel de l’immeuble et le deuxième aux difficultés auxquelles ils seraient exposés en cas de rénovation dudit immeuble.

S’il est certes vrai que l’immeuble ne se trouve actuellement pas dans un état habitable, du fait notamment de ne pas avoir été habité pendant un certain temps, et qu’il se trouve en besoin de rénovation tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, il n’en reste pas moins qu’il ne se trouve pas dans un « état délabré », tel qu’avancé par les demandeurs, voire en ruine.

7 GALETTA, D.-U., « Chapitre 1 – Principe de proportionnalité » in Auby, J.-B. et Dutheil de la Rochère, J.

(dir.), Traité de droit administratif européen, 3e édition, Bruxelles, Bruylant, 2022, p. 437-463.

8 LAMPRINI, X., « Section I. - Le principe de proportionnalité » in Les principes généraux du droit de l'Union européenne et la jurisprudence administrative française, 1e édition, Bruxelles, Bruylant, 2017, p. 347-362 et SIMON Denis, « Le contrôle de proportionnalité exercé par la Cour de justice des Communautés européennes », LP A, 5 mars 2009, p. 17.

15Ainsi, concernant l’extérieur de l’immeuble, il échet de retenir, d’un côté, que le classement comme patrimoine culturel national est moins incisif dans la sphère privée du propriétaire de l’immeuble, et, d’un autre côté, que l’intérêt général de protection est aisément vérifiable pour être visible par le public et, plus particulièrement, par sa composition et par ses caractéristiques de ferme dont les bases remontent de manière non contestée à la fin du XVIIIe / début XIXe siècle. Ainsi, tel que retenu ci-avant, l’immeuble représente une période spécifique de l’histoire locale et illustre des techniques de construction, des matériaux et des modes de vie d’une époque révolue et joue ainsi un rôle important dans l’identité et la mémoire collective symbolisant des traditions agricoles et des modes de vie ancestraux. Ainsi, si certes le classement comme patrimoine culturel national engendre des restrictions pour les demandeurs, il n’en reste pas moins que leur impact est limité et qu’elles se trouvent jusqu’à 50% des frais encourus compensées par des subventions accordées aux travaux contribuant à la conservation ou à la restauration de l’aspect original de l’immeuble.

Il en est cependant autrement de l’intérieur de l’immeuble. Dans le cadre de la mise en balance des intérêts respectifs, c’est-à-dire de la comparaison des avantages de la préservation du patrimoine culturel national avec les inconvénients pour les propriétaires, à savoir plus particulièrement l’impact financier des travaux de restauration et les contraintes d’aménagement à l’intérieur de l’immeuble consistant notamment en (i) une volumétrie limitée, (ii) des plafonds trop bas créant des volumes ne permettant pas un séjour prolongé de personnes, de sorte à ne pas pouvoir être aménagés en pièces de vie, ainsi que (iii) les difficultés avancées par les demandeurs d’adapter l’immeuble aux besoins d’aujourd’hui, le tribunal constate que les inconvénients occasionnés aux demandeurs sont excessifs par rapport aux bénéfices pour l’intérêt général et ce malgré les subventions dont les demandeurs pourraient, le cas échéant, bénéficier.

Si le délégué du gouvernement conteste le fait que le classement comme patrimoine culturel national conduirait à une diminution de la qualité de vie des habitants futurs en avançant que le règlement sur les bâtisses, les voies publiques et les sites de de la commune de Clervaux, ci-après désigné par « le Rb », prévoit en son article 699 la possibilité pour le bourgmestre d’accorder des dérogations notamment à l’article 32 du Rb, qui prévoit que les pièces destinées au séjour prolongé de personnes doivent avoir une hauteur libre sous plafond d’au moins 2,50 mètres, il n'en reste pas moins que, d’un côté, il s’agit d’une simple faculté laissée au bourgmestre et, d’un autre côté, il ressort du rapport dressé à l’occasion de la visite des lieux entre l’architecte des demandeurs et le SSMN en date du 10 novembre 202110 que tout au plus un dégagement des poutres de plafond serait possible afin de n’augmenter qu’optiquement la hauteur sous plafond. Il convient, par ailleurs, de relever dans ce contexte que bien que les agents du SSMN suggèrent que le rez-de-chaussée pourrait être utilisé comme buanderie ou bureau, le fait de ne pas pouvoir a priori utiliser toute la surface du rez-de-

9 Article 69 du Rb « Une dérogation aux prescriptions du présent Titre peut être accordée par le Bourgmestre pour les travaux de transformation et de rénovation, o soit si la configuration du site ou des constructions existantes rend matériellement impossible une stricte conformité à ces prescriptions ;

o soit pour conserver, protéger ou mettre en valeur le patrimoine bâti (…) ».

10 « Frau (B) unterstreicht, dass die Raumhöhe im Erdgeschoss des Wohnhauses nicht verändert, in diesem Fall nicht erhöht werden darf. Eine Untersuchung der Deckenbalken durch den Statiker sei allerdings notwendig, um deren genauen Zustand zu bestimmen. Eine Freilegung der Deckenbalken (Entfernen der historischen Putzschicht und „Wickel“-Füllung) um die Raumhöhe zumindest optisch zu erhöhen sei ggf. denkbar. Im EG könnten Nebennutzungen wie Waschküche und evtl. ein Büro vorgesehen werden »Compte-rendu de la visite des lieux, p.

2.

16chaussée pour des pièces destinées au séjour prolongé de personnes a un impact significatif sur les possibilités d’aménagement de l’immeuble, même après une éventuelle rénovation.

Le constat du caractère disproportionné de la décision déférée ne se trouve pas non plus contredit par l’affirmation du délégué du gouvernement selon laquelle les demandeurs ne pourraient se prévaloir de coûts élevés d’une éventuelle restauration de leur immeuble, dans la mesure où ils resteraient en défaut de soumettre un projet concret de remise en état dudit immeuble. En effet, le délégué du gouvernement se réfère dans ce contexte au compte-rendu de la visite des lieux du 10 novembre 2021 dont il ressort que les agents du SSMN avaient informé les consorts (A) d’alternatives et des subventions potentielles. Il avait été préconisé (i) soit de procéder à la vente de l’immeuble dans son état de l’époque, (ii) soit de faire établir un projet de restauration autorisable et de procéder ensuite à la vente de l’immeuble, (iii) soit de faire dresser un relevé historique ainsi qu’une expertise statique, (iv) soit de procéder à la restauration du bâti existant subventionnée jusqu’à 50% des frais encourus. Or, même s’il est de jurisprudence qu’aucune disposition légale n’impose au ministre d’avoir égard aux éventuelles contraintes auxquelles doivent faire face les propriétaires des immeubles concernés par le classement11, il n’en reste pas moins que dans le cadre de la mise en balance des intérêts respectifs des parties, les frais restant à la charge des demandeurs, ainsi que la moins-value qu’ils sont susceptibles de subir, sont disproportionnés par rapport à l’objectif visé par un classement comme patrimoine culturel national, étant précisé à cet égard qu’un classement comme patrimoine culturel national de l’intérieur d’un immeuble affecte de manière significative la sphère juridique des demandeurs.

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, la décision ministérielle déférée du 17 octobre 2022 encourt l’annulation partielle pour violation du principe de proportionnalité dans l’unique mesure où le ministre a procédé au classement comme patrimoine culturel national de l’intérieur de l’immeuble sis à L-…, inscrit au cadastre de la commune de Clervaux, section … Hupperdange, sous le numéro (P1).

En ce qui concerne la demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 3.000 euros, telle que formulée par les demandeurs sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, celui-ci dispose que « Lorsqu’il paraît inéquitable de laisser à la charge d’une partie les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, le juge peut condamner l’autre partie à lui payer le montant qu’il détermine ».

Les juridictions administratives, d’une manière générale, n’accordent d’indemnité de procédure à un administré qu’en présence d’une attitude fautive ou négligente de l’administration, laquelle, au-delà du simple fait d’avoir émis une décision ne satisfaisant pas l’administré, a contraint l’administré à engager une procédure contentieuse12.

Dans la mesure où les demandeurs ne démontrent pas que le ministre aurait eu une attitude fautive ou négligente à leur encontre, leur demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 3.000 est à rejeter.

11 Trib. adm., 17 avril 2013, n° 29956 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Sites et monuments, n° 37 et les autres références y citées.

12 Trib. adm., 2 décembre 2013, n° 28182 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 1320 et les autres références y citées.

17Eu égard à l’issue du litige, il convient de faire masse des dépens et de les imposer pour moitié à l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg et pour l’autre moitié aux demandeurs.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare partiellement justifié ;

partant annule la décision du ministre de la Culture du 17 octobre 2022 dans la seule mesure où le ministre a procédé au classement comme patrimoine culturel national de l’intérieur de l’immeuble sis à L-…, inscrit au cadastre de la commune de Clervaux, section … Hupperdange, sous le numéro (P1) ;

pour le surplus, déclare le recours en annulation non fondé, partant en déboute ;

rejette la demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 3.000 euros telle que formulée par les demandeurs ;

fait masse des frais et dépens de l’instance et les impute pour moitié à chacune des parties.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 14 juillet 2025 par :

Daniel WEBER, vice-président, Michèle STOFFEL, vice-président, Annemarie THEIS, premier juge, en présence du greffier Luana POIANI.

s. Luana POIANI s. Daniel WEBER Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 14 juillet 2025 Le greffier du tribunal administratif 18


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 48361
Date de la décision : 14/07/2025

Origine de la décision
Date de l'import : 18/08/2025
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2025-07-14;48361 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award