Tribunal administratif N°48589 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:48589 4e chambre Inscrit le 24 février 2023 Audience publique du 24 juin 2025 Recours formé par Monsieur (A), …, contre une décision de la directrice du Lycée technique …, en matière de traitement
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 48589 du rôle et déposée le 24 février 2023 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A), demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision de la directrice du Lycée technique … du 28 novembre 2022 décidant de faire application de l’article 12, paragraphe 3, alinéa 1er de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, suivant lequel « le fonctionnaire qui s’absente sans autorisation ni excuse valable perd de plein droit la partie de son traitement à raison d’un trentième par journée d’absence entière ou entamée, sans préjudice de l’application éventuelle de sanctions disciplinaires » ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Christine KOVELTER, en remplacement de l’huissier de justice Carlos CALVO, demeurant à Luxembourg, du 3 mars 2023, portant signification de ladite requête à l’établissement public Lycée Technique …, établi et ayant son siège social à L-…, représenté par ses organes statutaires actuellement en fonctions ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 22 mai 2023 ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 14 juin 2023 par Maître Jean-Marie BAULER pour le compte de son mandant ;
Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 3 juillet 2023 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Nathalie DE SOUSA LOPES, en remplacement de Maître Jean-Marie BAULER, et Madame le délégué du gouvernement Aida DRAGULOVCANIN en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 28 janvier 2025.
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Par un arrêté du ministre de l’Education nationale et de la Formation professionnelle du 12 novembre 2010, Monsieur (A) fut admis au stage de d’artisan au Lycée technique …, ci-après dénommée « le … », à partir du 15 novembre 2010.
Suite à la demande y relative introduite par Monsieur (A) en date du 28 février 2011, une réduction de stage d’une durée de douze mois lui fut accordée par un arrêté ministériel du 7 octobre 2011.
Après avoir été nommé, par arrêté du ministre de l’Education nationale et de la Formation professionnelle du 21 novembre 2011, artisan au …, Monsieur (A) prêta le lendemain le serment prévu à l’article 3 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, ci-après dénommé « le statut général ».
Par un arrêté du ministre de l’Education nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse du 22 octobre 2014, Monsieur (A) fut nommé premier artisan au ….
Suite à la demande y relative introduite par Monsieur (A), le ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative accorda, par décision du 3 mai 2018, un changement d’affectation à Monsieur (A) auprès du … avec effet au 15 septembre 2018, changement d’affectation qui fut alors décidé par l’arrêté du ministre de l’Education nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse du 9 juillet 2018 suivant lequel « Monsieur (A) (…) fonctionnaire D1 (sous-
groupe à attributions particulières) au Lycée technique …, est transféré en la même qualité au …, à partir du 15 septembre 2018 ».
Suite à la demande y relative introduite par Monsieur (A), le ministre de la Fonction publique accorda, par décision du 29 mai 2020, un changement d’affectation à Monsieur (A) du … vers le … avec effet au 1er juin 2020, changement d’affectation décidé par un arrêté du ministre de l’Education nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse du 12 juin 2020 suivant lequel « Monsieur (A) (…) fonctionnaire du groupe de traitement D1 (sous-groupe à attributions particulières) à tâche complète, auprès du …, est transféré en la même qualité au Lycée technique …, à partir du 1er juin 2020 ».
Le 7 décembre 2021, Monsieur (A) soumit sa demande de congés pour l’année 2022 par le biais d’un formulaire, suivant lequel il posa 21 jours de congé, dont un jour de congé pour le mois d’octobre 2022.
Les 2, 3 et 4 novembre 2022, Monsieur (A) ne se présenta pas au travail, de sorte qu’il fut absent de son service, ce dernier se trouvant en vacances avec sa famille.
Le 7 novembre 2022, lors de la reprise de son travail, Monsieur (A) formula une demande rétroactive de congé pour les 2, 3 et 4 novembre 2022 et la fit parvenir au gestionnaire des ressources humaines du … par un courriel du même jour, libellé comme suit :
« Gudden Moien, Ech hunn den Moien an mengem Dossier gekuckt, an iergendwéi ass den Wuerm dran.
Ech hunn bei dem ganzen Hin an Hier bei den Congé vergiess an der “Fiche demande annule de congé 2022“ den 02.11.22-04.11.22 als Congé ze markéieren. Beim Retour vun der Demande an Classieren an mäin Dossier ass et mir och net opgefall. (Sorry mäin Feeler) Vue dat ech déi ganz Woch an mengem Online-Kalenner als Congé agedroen hat, war ech no der laanger Zäit, fest dovunner ausgaangen dat ech déi ganz Woch Congé hunn.
Well dat jo net den Fall war reechen ech dir also Réckwierkend eng Demande de Congé vir den 02.11.22-04.11.22 no. (…). ».
En date du 11 novembre 2022, la demande de congé pour les 2, 3 et 4 novembre 2022, introduite par Monsieur (A) le 7 novembre 2022, fut refusée au motif d’une « introduction rétroactive ».
Par courrier du même jour, la directrice du … informa Monsieur (A) de son « Intention de qualifier [son] absence du 2 au 4 novembre 2022 (3 jours) comme absences non justifiées », dans les termes suivants :
« (…) Je viens de constater les faits suivants qui sont contraires à vos devoirs d'agent de l'Etat.
En date du 2 novembre 2022, du 3 novembre 2022 et du 4 novembre 2022, vous avez été absent de votre poste de travail et ceci sans autorisation valable.
Or, suivant l'article 12, paragraphe 1 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat « le fonctionnaire ne peut s'absenter de son service sans autorisation. » Dans le courriel du 7 novembre 2022 que vous avez adressé à M. …, Gestionnaire en Ressources humaines, vous confirmez avoir oublié de demander le congé annuel de récréation pour les trois jours en question. De plus, je tiens à vous informer que votre demande de congé annuel de recréation pour les trois jours en question (remise en date du 7 novembre 2022) est refusée étant donné qu'elle a été introduite rétroactivement.
Je vous informe dès lors que j'ai l'intention de qualifier les trois jours du 2 au 4 novembre 2022 comme absences non justifiées.
Finalement, je vous informe qu'en vertu de l'article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l'Etat et des communes, vous disposez d'un délai de huit jours à partir de ce jour pour présenter vos observations ou pour demander d'être entendu en personne par un agent de l'Etat au sujet de la décision envisagée. (…) ».
Par un courrier du 15 novembre 2022, Monsieur (A) présenta ses observations afférentes.
Par une décision du 28 novembre 2022, la directrice du … informa Monsieur (A) de la perte de son traitement pour absence non justifiée pour les 2, 3 et 4 novembre 2022, aux motifs suivants :
« (…) Dans mon courrier du 11 novembre 2022, je vous ai fait part de mon intention de qualifier votre absence du 2 novembre 2022, du 3 novembre 2022 et du 4 novembre 2022 comme absence non justifiée.
Suite à ma lettre, vous n'avez pas sollicité de réunion. Vous m'avez envoyé une lettre recommandée en date du 15 novembre 2022, dans laquelle vous ne contestez pas votre absence du 2 au 4 novembre 2022 inclus, jours pour lesquels, selon vous, vous avez oublié de demander une autorisation au préalable.
Dans ce contexte, je tiens à vous préciser que la procédure pour prendre congé vous a été communiquée dans la note de service du 24 novembre 2021 et qu'il n'est pas prévu de faire 3 une demande de congé de manière rétroactive. De plus, j'attire votre attention sur le fait que M.
…, Gestionnaire en Ressources humaines du …, vous a contacté par courriel le 2 novembre 2022, premier jour de votre absence, et par téléphone le 3 novembre 2022, deuxième jour de votre absence, pour vous demander pourquoi vous n'étiez pas présent à votre poste de travail sans pour autant signaler votre absence pour cause de maladie.
Suivant l'article 12, paragraphe 3 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat « le fonctionnaire qui s'absente sans autorisation ni excuse valable perd de plein droit la partie de son traitement à raison d'un trentième par journée d'absence entière ou entamée, sans préjudice de l'application éventuelle de sanctions disciplinaires. » Je vous informe dès lors de ma décision d'appliquer l'article 12, paragraphe 3 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat et de réduire votre traitement pour les trois jours d'absences non excusées à raison d'1/30 par jour d'absence.
Le présent courrier sera adressé en copie pour exécution au Centre de gestion du personnel et de l'organisation de l'Etat pour recouvrer ce montant indûment payé.
Enfin, et à toutes fins utiles, je vous prie de noter que vous disposez d'un recours contre la présente décision à exercer par ministère d'avocat à la Cour dans un délai de trois mois devant le Tribunal administratif. (…) ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 24 février 2023, Monsieur (A) a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision précitée de la directrice du … du 28 novembre 2022.
Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement soulève l’incompétence du tribunal administratif de statuer sur le recours principal en réformation, à défaut de base légale expresse en matière du traitement des absences de travail non justifiées.
Le délégué du gouvernement soulève encore l’irrecevabilité du recours en annulation introduit à titre subsidiaire, au motif que Monsieur (A), en qualité de fonctionnaire, introduisant un recours contre une décision rendue dans un contexte professionnel, respectivement disciplinaire par son supérieur hiérarchique, aurait dû suivre, préalablement à l’introduction d’un recours contentieux devant le tribunal administratif, la procédure prévue par l’article 33 du statut général, faute de quoi aucune décision ministérielle mettant fin à la procédure non contentieuse n’existerait, laquelle serait cependant la seule décision susceptible de recours, contrairement à la décision directoriale déférée du 28 novembre 2022. Il considère dès lors qu’à défaut pour Monsieur (A) d’avoir exercé le droit de réclamation prévu à l’article 33 du statut général, par le biais d’un recours hiérarchique, qui serait, selon lui, obligatoire, les voies de recours précontentieuses n’auraient pas été épuisées. Il estime que sa position serait corroborée par la doctrine précisant que « [d]ans des cas assez rares, le système luxembourgeois prévoi[rait] également la possibilité d’un recours hiérarchique qui d[evrait] être obligatoirement introduit avant le dépôt d’un recours contentieux », ce qui serait le cas en l’espèce, alors que l’article 33 du statut général constituerait un tel recours hiérarchique obligatoire. Le contraire signifierait que chaque fonctionnaire pourrait entamer, sans autre formalité, sous l’impulsion des émotions, de manière spontanée, automatique, irréfléchie et prématurée, sans faire connaître son opinion à son supérieur hiérarchique, ni au ministre de son ressort et surtout, sans possibilité de négociation quelconque avec l’une ou l’autre des personnes précitées, des procédures contentieuses devant les juridictions administratives, chaque fois qu’il estimerait qu’un acte de son supérieur oud’autres agents publiques le lèserait dans ses droits statutaires ou le blesserait dans sa dignité, ce qui risquerait d’aggraver encore plus l’ambiance de travail au sein des nombreux services administratifs de l’Etat, de porter atteinte à la dignité des fonctions des agents étatiques, de compromettre l’intérêt du service public et d’encombrer davantage les juridictions administratives.
Le délégué du gouvernement soutient, encore, que la décision du 11 novembre 2022 par laquelle la directrice aurait refusé son congé n’aurait pas été attaquée par Monsieur (A).
Dans le cadre de son mémoire en réplique, Monsieur (A) se rapporte à prudence de justice quant à la compétence du tribunal pour statuer sur le recours en réformation introduit à titre principal.
En ce qui concerne la recevabilité du recours en annulation introduit à titre subsidiaire, Monsieur (A) conclut au rejet du moyen invoqué par le délégué du gouvernement, alors que l’article 33 du statut général reconnaîtrait un droit de réclamation au fonctionnaire et non pas une obligation de réclamation, de même qu’il lui reconnaîtrait un droit de recours devant le Gouvernement en conseil et non pas une obligation de procéder par voie dudit recours. Le même constat s’imposerait quant à l’introduction d’un recours gracieux devant l’administration concernée, laquelle constituerait une simple faculté et non pas une obligation de l’administré.
Monsieur (A) en conclut qu’il aurait eu le droit de saisir directement le tribunal administratif d’une décision lui causant grief.
Monsieur (A) fait encore répliquer que ce serait à tort que le délégué du gouvernement arguerait que la décision litigieuse ne constituerait pas un acte final dans la procédure non contentieuse, alors même que la décision litigieuse indiquerait expressément les voies de recours.
En ce qui concerne le reproche selon lequel la décision du 11 novembre 2022 lui refusant sa demande de congés n’aurait pas été attaquée, Monsieur (A) donne à considérer que la seule décision qui lui causerait en l’espèce grief serait la décision déférée du 28 novembre 2022 par laquelle son absence avait été qualifiée comme absence non justifiée et son traitement mensuel réduit à raison de 1/30ème par jour d’absence.
Dans son mémoire en duplique, le délégué du gouvernement souligne qu’il ne serait pas contesté que l’article 33 du statut général conférerait un droit au fonctionnaire et non pas une obligation d’introduire une réclamation, tout comme, de manière générale, le dépôt d’un recours contentieux ne constituerait point une obligation, mais un droit ou une possibilité offerte à tout administré. Néanmoins, il considère que dans l’hypothèse où un fonctionnaire contesterait l’ordre ou la décision émanant d’un supérieur hiérarchique, la contestation de cette décision au moyen d’une réclamation basée sur l’article 33 du statut général serait une étape préalable respectivement une condition sine qua non que le fonctionnaire serait tenu de remplir, avant tout autre progrès en cause et notamment, avant le dépôt d’un recours contentieux devant les juridictions administratives. Il estime qu’admettre le contraire reviendrait à vider de substance ou de contenu cette disposition légale, ainsi que toutes celles inhérentes à la Fonction publique.
A titre subsidiaire, le délégué du gouvernement insiste encore sur le fait que la décision émanant du supérieur hiérarchique de Monsieur (A), inscrite dans un contexte professionnel, sous forme d’un ordre hiérarchique, où l’intérêt de service, pour autant que celui-ci serait justifié, primerait, en cas de conflit, sur les intérêts individuels des agents étatiques, ne constituerait pas une décision ministérielle ou décision finale, respectivement, un acte constituant une étape finale dans la procédure administrative non contentieuse.
Il fait encore observer que l’indication erronée des voies de recours dans la décision déférée du 28 novembre 2022, ne saurait conférer audit courrier le caractère d’acte constituant une étape finale dans la procédure administrative non contentieuse, de sorte qu’il ne s’agirait pas d’un acte administratif susceptible de recours, alors qu’il serait de jurisprudence constante qu’échapperaient au recours contentieux les actes préparatoires, tout en précisant que la simple indication erronée des voies de recours dans un courrier d’une autorité administrative ne saurait créer un droit et conférer un quelconque caractère décisionnel à l’acte en question.
Le délégué du gouvernement soutient finalement qu’il ne serait pas contesté que Monsieur (A) aurait donné ses observations par courrier du 15 novembre 2022, en concédant s’être absenté de manière non justifiée, du fait d’avoir oublié de solliciter des congés pour la période litigieuse, circonstance qui ne saurait être reprochée à la directrice du …, voire à la partie étatique.
En ce qui concerne la compétence du tribunal en la présente matière, force est de relever qu’aucune disposition légale ne prévoit de recours au fond contre un acte qualifiant une absence d’un fonctionnaire comme absence non autorisée, étant relevé que le litige sous examen ne tombe pas sous le champ d’application de l’article 26 du statut général qui vise exclusivement les décisions ayant trait à la fixation des traitements, ce qui ne constitue pas l’objet de la décision sous examen, alors qu’elle ne concerne pas le calcul proprement dit du traitement de Monsieur (A), mais la question de savoir si ce dernier est éventuellement susceptible de perdre son droit au traitement correspondant à la période de son absence à qualifier, le cas échéant, de non autorisée, au sens de l’article 12, paragraphe (3) du statut général.
Ainsi, le tribunal doit d’ores et déjà se déclarer incompétent pour statuer sur le recours principal en réformation dirigé contre la décision de la directrice du … du 28 novembre 2022.
Il s’ensuit que seul un recours en annulation a pu être introduit, en l’espèce, contre la décision litigieuse, en application de l’article 2 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, dénommée ci-après « la loi du 7 novembre 1996 ».
En ce qui concerne la recevabilité du recours subsidiaire en annulation, force est de relever qu’il a été jugé que le passage par la procédure de l’article 33 du statut général n’est pas imposé avant toute saisine d’une juridiction1, alors que les possibilités précontentieuses offertes par cet article constituent une faculté et non pas une obligation.
En effet, aux termes de l’article 33 du statut général :
« 1.Tout fonctionnaire a le droit de réclamer individuellement contre tout acte de ses supérieurs ou d’autres agents publics qui lèsent ses droits statutaires ou qui le blessent dans sa dignité.
Ce droit existe également si une demande écrite du fonctionnaire, introduite par la voie hiérarchique, est restée sans suite dans le délai d’un mois.
1 Trib. adm., 7 juillet 2004, n° 16335 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Fonction publique, n° 61 et l’autre référence y citée.2.La réclamation est adressée par écrit au supérieur hiérarchique. Si elle met en cause le supérieur direct du fonctionnaire, elle est adressée au chef d’administration. Si ce dernier est visé, la réclamation est envoyée au ministre du ressort.
3.Sous peine de forclusion, la réclamation doit être introduite dans un délai d’un mois à partir de la date de l’acte qu’elle concerne ou de l’expiration du délai visé à l’alinéa 2 du paragraphe 1er.
4.Le destinataire de la réclamation instruit l’affaire et transmet sa réponse motivée au réclamant. Le cas échéant, il prend ou provoque les mesures qui s’imposent pour remédier à la situation incriminée.
5.Si la réponse ne parvient pas au réclamant dans le mois de la réclamation ou si elle ne lui donne pas satisfaction, il peut saisir directement le ministre du ressort. Au cas où la réclamation a été adressée à celui-ci, le réclamant peut s’adresser au Gouvernement en conseil.
Au cas où la réclamation a été adressée aux autorités visées par le paragraphe 2, le réclamant peut s’adresser dans un délai d’un mois à partir de la réception de la réponse de leur part respectivement à partir de l’expiration du mois de la réclamation en cas de silence gardé par elles, au Gouvernement en conseil qui sera tenu de statuer sur la réclamation en question endéans le mois de la date de notification de la demande. ».
Etant donné qu’aucun écrit versé au dossier ne s’analyse en une réclamation individuelle de Monsieur (A) dirigée contre l’acte directorial déféré sur base de l’article 33 du statut général et que ce dernier ne s’est donc point placé dans le cadre des possibilités précontentieuses offertes par ladite disposition légale, la question même d’un omissio medio, telle que soulevée par le délégué du gouvernement, ne se pose pas en l’espèce, le demandeur ne s’étant point engagé dans cette voie précontentieuse2.
Il s’ensuit que le moyen d’irrecevabilité y relatif est partant à rejeter en tous ces volets y compris quant à la qualité d’acte final de la décision du 28 novembre 2022.
Le recours subsidiaire en annulation est dès lors à déclarer recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi.
A l’appui de son recours, le demandeur expose, tout d’abord, les faits et rétroactes retracés ci-avant, tout en insistant sur le fait qu’il n’aurait pas remarqué son oubli de noter les 2, 3 et 4 novembre 2022 comme jours de congé lors du retour de sa demande de congé, alors que dans son calendrier en ligne lesdits jours auraient été indiqués comme tel. Le 3 novembre 2022, le gestionnaire des ressources humaines lui aurait téléphoné pour lui demander s’il serait malade, alors qu’il ne se serait pas présenté au travail. Or, il se serait trouvé à ce moment à 1.200 km du Luxembourg avec sa famille, ayant été convaincu se trouver légalement en congé. Lors de son retour au travail le 7 novembre 2022, il aurait alors découvert qu’aucune demande de congé n’avait été introduite pour la période litigieuse, raison pour laquelle il aurait adressé un courriel au gestionnaire des ressources humaines, le même jour, afin de l’informer de son oubli et d’introduire une demande rétroactive de congé, laquelle aurait néanmoins été refusée en date du 11 novembre 2022, au motif qu’une introduction rétroactive d’une demande de congé ne serait pas admise. Toujours le 11 novembre 2022, le demandeur explique avoir été convoqué au bureau 2 Trib. adm., 7 juillet 2003, n° 15672 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Fonction publique, n° 828 et l’autre référence y citée.
de la directrice du …, en présence du directeur adjoint, où il aurait été informé que s’il avait introduit sa demande de congé avant le congé effectif, ce dernier lui aurait été accordé, ainsi que du fait que la directrice avait l’intention de réduire sa rémunération des trois jours d’absences non justifiés. Le demandeur indique, par ailleurs, que suite à la décision déférée du 28 novembre 2022, sa rémunération du mois de décembre aurait fait l’objet d’un recalcul relatif au mois de novembre et aurait été diminuée d’un montant de 370,14 euros.
En droit, le demandeur conclut tout d’abord à l’annulation de la décision déférée pour violation de l’article 4 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, ci-après désigné par le « règlement grand-ducal du 8 juin 1979 », en faisant valoir que lors de son entrevue du 11 novembre 2022, il se serait trouvé face à la directrice du …, laquelle aurait été assistée du directeur adjoint, le demandeur estimant que ces derniers devraient dès lors de facto et de jure être considérés comme un jury, lequel devrait par conséquent être requalifié comme constituant un « organisme consultatif collégial » au sens de l’article 4 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979.
Or, cet « organisme consultatif collégial » aurait, suivant le demandeur, dû émettre un avis motivé indiquant, d’une part, « la composition de l’organisme, les noms des membres ayant assisté à la délibération et le nombre de voix exprimées en faveur de l’avis exprimé » et énonçant, d’autre part, les éléments de fait et de droit sur lesquels il se baserait, de même que cet avis aurait dû être annexé à la décision litigieuse, ce qui n’aurait toutefois pas été le cas en l’espèce.
En se référant encore aux travaux préparatoires de l’article 4 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, le demandeur conclut qu’il serait indéniable qu’il se serait trouvé face à un véritable organisme collégial, voire consultatif et que partant un rapport écrit et motivé aurait dû lui être communiqué.
Il en irait également de ses droits de la défense précontentieux et plus particulièrement des formes destinées à protéger les intérêts privés, alors qu’il estime ne pas avoir été à même de savoir quel serait le « contenu de l’avis/rapport qui a[urait] été fait, a priori oralement, par ces 2 personnes du … ».
Dans son mémoire en réplique, le demandeur conteste l’argumentation de la partie gouvernementale selon laquelle « aucun jury », ni « organisme collégial consultatif » n’aurait été instauré suite à la lettre d’intention du 11 novembre 2022, la directrice ayant tout simplement appliqué l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, alors qu’au contraire ledit organisme collégial consultatif aurait été instauré avant l’envoi de la lettre d’intention du 11 novembre 2022, et que la directrice du … se serait fait assister, lors de ladite entrevue, par le directeur adjoint. En effet, ce ne serait que pendant ladite entrevue que la directrice lui aurait remis, en mains propres, sa lettre d’intention. Il estime qu’en prévoyant la présence du directeur adjoint, la directrice aurait eu l’intention d’instaurer un jury dans le but d’avoir un deuxième avis, de sorte que ce serait à juste titre que la partie étatique aurait affirmé qu’il n’aurait fait usage de son droit reconnu à l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 qu’après avoir reçu la lettre d’intention.
Le demandeur fait encore valoir que ce serait à tort que la partie gouvernementale aurait argué que la décision déférée ne se baserait pas sur l’entrevue du 11 novembre 2022, mais sur les faits précédents, ainsi que sur sa prise de position du 15 novembre 2022, alors que la décision déférée ferait expressément référence à la lettre d’intention du 11 novembre 2022, de sorte à se baser tant sur ladite lettre d’intention du 11 novembre 2022, que sur l’entrevue du même jour, ainsi que sur sa prise de position du 15 novembre 2022.
Il soutient, par ailleurs, que ce serait encore à tort que la partie étatique aurait affirmé qu’aucun rapport écrit et motivé n’aurait dû lui être communiqué, même à supposer que l’entrevue serait à considérer comme une réunion d’un organisme collégial, alors qu’en se référant à des jugements du tribunal administratif en la matière, il considère que le défaut pour un jury d’avoir émis un avis motivé, lèserait ses droits à la défense, alors même que lors de l’entrevue du 11 novembre 2022, la directrice aurait reconnu qu’il n’aurait pas été de mauvaise foi et qu’il aurait simplement commis une erreur, étant encore précisé que la directrice l’aurait uniquement informé de son intention de qualifier ses absences comme absences injustifiées et non de son intention de réduire son traitement.
Le délégué du gouvernement conclut au rejet de ce moyen.
Aux termes de l’article 4 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 « Les avis des organismes consultatifs pris préalablement à une décision doivent être motivés et énoncer les éléments de fait et de droit sur lesquels ils se basent.
Lorsqu’il s’agit d’un organisme collégial, l’avis doit indiquer la composition de l’organisme, les noms des membres ayant assisté à la délibération et le nombre de voix exprimées en faveur de l’avis exprimé. Les avis séparés éventuels doivent être annexés, sans qu’ils puissent indiquer les noms de leurs auteurs. » L’article 4, précité, du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 a trait aux « avis des organismes consultatifs pris préalablement à une décision » et vise les cas prévus par la loi dans lesquels une décision administrative ne peut intervenir qu’après avis donné par un organisme indépendant, l’instruction par un organe impartial constituant une garantie pour l’administré contre l’arbitraire du pouvoir.
Force est de constater que l’article 4 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 n’est pas applicable, en l’espèce, alors que l’entretien dont se prévaut le demandeur n’intervient point dans le contexte d’un avis sollicité, respectivement qui aurait dû être sollicité d’un organisme consultatif préalablement à la prise d’une décision au sens de l’article 4 du règlement grand-
ducal du 8 juin 1979.
En effet, l’entrevue du 11 novembre 2022 est à considérer comme une réunion informelle ayant eu lieu sur l’initiative de la directrice, et le seul fait que cette dernière ait été assistée de son directeur adjoint à ladite entrevue ne saurait énerver cette conclusion.
L’article 4 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 n’étant pas applicable en l’espèce, le moyen afférent est à rejeter pour manquer de fondement.
Le demandeur conclut ensuite à l’annulation de la décision déférée pour violation du principe général de sécurité juridique, respectivement du principe général de confiance légitime, en invoquant la définition du principe de confiance légitime, ainsi qu’en se référant à la jurisprudence applicable en la matière, pour argumenter qu’en l’espèce, lors de l’entrevue du 11 novembre 2022, la directrice du … l’aurait rassuré sur le fait qu’il aurait manifestement été de bonne foi, lorsqu’il aurait oublié de faire la demande de congés pour les 2, 3 et 4 novembre 2022, tout en lui confirmant que s’il aurait fait la demande avant, le congé afférent lui aurait été accordé.
Si la directrice du … l’aurait informé de son intention de déduire les trois jours d’absence de sa rémunération, sa lettre d’intention du 11 novembre 2022 indiquerait uniquement « l'intention de qualifier les trois jours du 2 au 4 novembre 2022 comme absences non justifiées », en se basant sur l’article 12, paragraphe 1 du statut général. Le demandeur en conclut qu’il serait évident qu’au moment de la prise de décision, la position de la directrice du … aurait changé, alors que la décision se baserait sur l’article 12, paragraphe 3 du statut général, tout en indiquant que son traitement serait réduit « pour les trois jours d'absences non excusées à raison d'1/30 par jour d'absence », de sorte qu’il serait incontestable que la décision déférée du 28 novembre 2022 violerait les principes généraux du droit applicable en la matière.
Le délégué du gouvernement conclut au rejet du moyen du demandeur pour manquer de fondement.
En ce qui concerne tout d’abord le principe de confiance légitime, le tribunal précise que ce principe, qui s’apparente au principe de la sécurité juridique, également invoqué par le demandeur, s’oppose à ce que l’administration opère brusquement des revirements de comportement revenant sur les promesses faites aux administrés, autrement dit, le principe de confiance légitime implique que l’administré est en droit d’exiger de l’autorité administrative qu’elle ne se départisse pas brusquement d’une attitude qu’elle a suivie dans le passé3.
Un administré ne peut prétendre au respect d’un droit acquis que si, au-delà de ses expectatives, justifiées ou non, l’autorité administrative a créé à son profit une situation administrative acquise et a réellement reconnu ou créé un droit subjectif dans son chef. Ce n’est qu’à cette condition que peut naître dans le chef d’un administré la confiance légitime que l’administration respectera la situation par elle créée, les deux notions de droits acquis et de légitime confiance étant voisines4.
Or, il échet de constater qu’en l’espèce, le demandeur reste en défaut d’établir que la directrice du … aurait brusquement opéré un revirement de son comportement en relation avec son intention de qualifier d’absences non justifiées les trois jours d’absences litigieuses, alors que tant la lettre d’intention du 11 novembre 2022 que la décision déférée du 28 novembre 2022 se concordent dans le sens d’une qualification des absences de Monsieur (A) en absences non justifiées, sans véhiculer la moindre intention de la part de la directrice de le libérer de la perte de son traitement en vertu de l’article 12 du statut général.
Il en va de même en ce qui concerne la considération que la directrice du … l’aurait rassuré sur le fait qu’il aurait manifestement été de bonne foi, et que le congé lui aurait été accordé, s’il en aurait fait la demande avant, d’autant plus que ces éléments ont trait à la question du bien-fondé de la décision déférée, partant à la légalité interne du refus déféré, et seront partant examinés dans le contexte de l’analyse au fond.
Il s’ensuit que le demandeur reste en défaut d’établir une confiance légitime dans son chef d’être libéré de la perte de son traitement pour les jours d’absences non justifiées, de sorte que le moyen d’une violation des principes de sécurité juridique et de confiance légitime est à écarter pour ne pas être fondé.
3 Trib. adm., 22 juin 2016, n° 36604 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Lois et Règlements, n° 77 et les autres références y citées.
4 Trib. adm., 25 janvier 2010, n° 25548 du rôle, confirmé sur ce point par Cour adm., 18 mai 2010, n° 26683C du rôle, Pas. adm. 2024 V° Lois et Règlements, n° 75 (7e volet) et les autres références y citées.Le demandeur conclut encore à l’annulation de la décision déférée pour violation de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, au motif que la directrice du … aurait violé le principe du contradictoire en basant sa lettre d’intention du 11 novembre 2022 exclusivement sur l’article 12, paragraphe 1 du statut général, alors que lors de l’entrevue s’étant tenue le même jour, la directrice et le directeur adjoint du … se seraient basés à la fois sur l’article 12, paragraphes 1 et 3 du statut général, la décision déférée du 28 novembre 2022 se basant, à son tour, uniquement sur l’article 12, paragraphe 3 du statut général. Il estime que la directrice aurait violé l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 en n’indiquant qu’une partie des éléments de droit l’ayant amené à agir.
Il fait encore répliquer à l’appui de ce moyen qu’il ne contesterait pas avoir eu la possibilité de présenter ses observations suite à la lettre d’intention, mais que du fait que la lettre d’intention se baserait exclusivement sur l’article 12, paragraphe 1 du statut général, contrairement à la décision déférée laquelle se baserait elle sur le paragraphe 3 du même article, il y aurait eu violation de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 consistant en une particulière imprécision des motifs légaux à la base de la décision déférée, qui différeraient de ceux de la lettre d’intention.
Dans le même ordre d’idées, il conclut encore à une violation du principe de la collaboration administrative, consacrée à l’article 3 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 lequel imposerait à l’autorité étatique de faire bénéficier l’administré de la règle la plus favorable, obligation allant de pair avec l’obligation d’un administré de collaborer avec l'administration, notamment en précisant, en temps utile, la portée exacte de sa demande et, le cas échéant, en cas de demande incomplète, l’obligation de l’administration d’inviter l’administré à compléter sa demande.
En effet, le demandeur estime que lors de l’entrevue du 11 novembre 2022, il aurait, conformément à l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, pu prendre position, et aurait pu expliquer qu’il avait, sans aucune mauvaise intention, oublié d’indiquer dans sa demande de congé le restant des jours d’absence, à savoir du 2 au 4 novembre 2022, et qu’il s’agirait d’une simple erreur matérielle de sa part. Lors de cette même entrevue, la directrice du … aurait, oralement, reconnu que le demandeur aurait été de bonne foi et qu’il aurait apporté une excuse valable.
Cependant, il considère que ni le principe de collaboration, ni l’application de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 n’auraient trouvé une application utile et suffisante, alors que ni sa prise de position, ni ses explications données n’auraient eu une quelconque incidence sur la décision à intervenir, alors que la directrice du … n’aurait pas daigné revenir sur sa décision, et ce, même si cette dernière avait reconnu sa bonne foi.
Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet de ce moyen pour ne pas être fondé.
En vertu de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 « Sauf s’il y a péril en la demeure, l'autorité qui se propose de révoquer ou de modifier d'office pour l'avenir une décision ayant créé ou reconnu des droits à une partie, ou qui se propose de prendre une décision en dehors d'une initiative de la partie concernée, doit informer de son intention la partie concernée en lui communiquant les éléments de fait et de droit qui l'amènent à agir.
Cette communication se fait par lettre recommandée. Un délai d'au moins huit jours doit être accordé à la partie concernée pour présenter ses observations.
11 Lorsque la partie concernée le demande endéans le délai imparti, elle doit être entendue en personne.
L'obligation d'informer la partie concernée n'existe que pour autant que l'autorité compétente est à même de connaître son adresse. Les notifications sont valablement faites à l'adresse indiquée par la partie ou résultant de déclarations officielles. ».
L’article 9 précité du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 a pour objet d’instaurer une procédure contradictoire destinée à protéger les droits de la défense de l’administré, lorsque l’administration se propose de prendre, d’une part, des décisions de révocation ou de modification d’office pour l’avenir de décisions qui ont créé ou reconnu des droits et, d’autre part, des décisions en dehors d’une initiative de la partie concernée, c’est-à-dire sans avoir été saisie d’une demande préalable de l’administré concerné.
Force est au tribunal de constater que les reproches du demandeur tenant à une prétendue violation du principe du contradictoire tablent sur le fait que le courrier, à travers lequel la directrice du … a informé le demandeur de son intention de qualifier les absences de ce dernier comme absences non justifiées, n’indiquait qu’une seule base légale, à savoir l’article 12, paragraphe 1 du statut général, tandis que lors de l’entretien du 11 novembre 2022, l’article 12, paragraphes 1 et 3 du statut général auraient été mentionnés comme base légale de la décision envisagée, la décision déférée du 28 novembre 2022 ne se fondant finalement que sur le seul paragraphe 3 de l’article 12, du statut général.
Or, les formalités procédurales inscrites à l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, si elles ont certes trait aux droits de la défense, ne constituent pas pour autant une fin en soi, mais consacrent des garanties visant à ménager à l’administré concerné une possibilité de prendre utilement position par rapport à la décision projetée, de sorte que dans l’hypothèse où il est établi que cette finalité est atteinte, la question du respect de toutes les étapes procédurales préalables prévues afin de permettre d’atteindre cette finalité devient sans objet5.
En l’espèce, le demandeur reste en défaut d’établir de quelle manière ses droits de la défense auraient été concrètement violés du fait que lors de l’entrevue du 11 novembre 2022 une seconde disposition légale avait été ajoutée à la décision envisagée, ce d’autant plus que le paragraphe 36 de l’article 12 est la suite logique du paragraphe 17 du même article, de même que les éléments de fait ayant amené la directrice du … à agir sont restés inchangés et ne sont pas contestés par les parties. A cela s’ajoute que le demandeur, à l’issue de ladite entrevue et de la lettre d’intention, a pu formuler des observations à ce sujet dans son courrier du 15 novembre 2022.
Au regard de l’ensemble des considérations qui précèdent, le moyen du demandeur fondé sur une violation de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, ensemble les reproches tenant à une violation du principe du contradictoire sont à rejeter pour manquer en fait.
5 Trib. adm., 18 mars 2002, n° 12086, conf. Cour adm., 8 octobre 2002, n° 14845C du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 130 et les autres références y citées.
6 Article 12, paragraphe 1 du statut général : « 1. Le fonctionnaire ne peut s’absenter de son service sans autorisation. » 7 Article 12, paragraphe 3 du statut général : « 3. Le fonctionnaire qui s’absente sans autorisation ni excuse valable perd de plein droit la partie de son traitement à raison d’un trentième par journée d’absence entière ou entamée, sans préjudice de l’application éventuelle de sanctions disciplinaires. »En ce qui concerne l’invocation par le demandeur de l’article 3 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 aux termes duquel « Toute autorité administrative est tenue d´appliquer d´office le droit applicable à l´affaire dont elle est saisie », il y a lieu de relever que ledit article prévoit que l’administration doit écarter la base légale ou réglementaire invoquée par un administré et la remplacer par une autre base plus appropriée permettant d’arriver à un résultat identique ou similaire au bénéfice de l’administré. Le texte a donc consacré le principe général de collaboration de l’administration8.
Or, et s’il est vrai qu’il découle de ce principe de collaboration qui doit s’instituer entre l’administration et un administré au sujet d’une demande de celui-ci, que l’autorité publique, saisie d’une demande imprécise ou incomplète, ne saurait se prévaloir des défauts dont est affectée la demande pour garder le silence et se dispenser de répondre à la demande, mais doit activement inviter l’administré à préciser ou à compléter la demande en vue de lui permettre d’y statuer utilement9, il n’en reste pas moins qu’en l’espèce, la directrice du … n’était pas confrontée à une demande imprécise et incomplète, alors que le demandeur est en aveu d’avoir été absent de son service sans autorisation du fait de son oubli de poser du congé pour la période litigieuse, de sorte que le moyen tiré d’une violation de l’article 3 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 est à rejeter pour défaut de pertinence.
Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argumentation du demandeur selon laquelle l’oubli de poser son congé serait constitutif d’une erreur matérielle, voire qu’il aurait été de bonne foi, ce qui aurait dû mener la directrice du … à revenir sur sa décision, alors que ces éléments ont trait à la question du bien-fondé de ladite décision, partant à la légalité interne du refus déféré, et seront partant examinés dans le contexte de l’analyse au fond.
Quant au fond, le demandeur conclut à l’annulation de la décision déférée pour violation de l’article 12, paragraphe 3 du statut général et du principe de proportionnalité en soutenant que l’absence d’un fonctionnaire qui serait en congé pourrait être considérée comme excuse valable au vœu dudit article. En l’espèce, il explique avoir été en congé depuis le 31 octobre 2022, donc pendant les vacances de la Toussaint et se serait trouvé à plus de 1.000 km du Luxembourg avec sa famille, de sorte qu’il disposerait d’une excuse valable pouvant justifier son absence.
D’ailleurs, il y aurait encore lieu de noter que son absence du 2 au 4 novembre 2022 n’aurait aucunement porté préjudice au bon fonctionnement et à l’organisation du service informatique du ….
Il estime finalement que compte tenu des circonstances particulières de la présente affaire, la décision de la directrice du … de réduire son traitement à raison d’1/30 par jour d’absence serait disproportionnée au regard de l’absence d’antécédents disciplinaires dans son chef, étant encore relevé que la directrice du … aurait lors de l’entrevue du 11 novembre 2022 reconnu qu’il disposerait d’une excuse valable justifiant son absence.
Il fait encore répliquer, à cet égard, qu’il ressortirait à suffisance de son recours introductif d’instance qu’il aurait légitimement cru avoir été en congé, et que ce ne serait que par une simple erreur de sa part, qu’il aurait oublié d’inclure les 2, 3 et 4 novembre 2022 à sa demande de congé, étant encore relevé que lors de son entrevue, la directrice du … aurait elle-
8 Fernand Schockweiler, La procédure administrative non contentieuse et le contrôle de l’administration en droit luxembourgeois, Le citoyen et l’administration. P. Bauler éditions, p.41.
9 Trib. adm., 10 février 2016, n° 36150 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 20.même reconnu qu’il ne s’agirait que d’une simple erreur et qu’il n’y aurait aucune mauvaise foi de sa part.
Le délégué du gouvernement conclut au rejet du moyen du demandeur pour manquer de fondement.
Aux termes de l’article 12, paragraphe 3 du statut général « Le fonctionnaire qui s’absente sans autorisation ni excuse valable perd de plein droit la partie de son traitement à raison d’un trentième par journée d’absence entière ou entamée, sans préjudice de l’application éventuelle de sanctions disciplinaires. ».
Force est de constater que la loi prévoit ,« de plein droit », la perte de la rémunération correspondant au temps de l’absence non justifiée de sorte que la qualification d’une absence comme absence non justifiée entraîne automatiquement la perte de « la partie de son traitement à raison d’un trentième par journée d’absence ».
Si le demandeur estime que l’absence d’un fonctionnaire qui est en congé constituerait une excuse valable, conformément à l’article 12, paragraphe 3 du statut général, il n’en demeure pas moins qu’il ne se trouvait, en l’occurrence, pas en congé pour la période litigieuse des 2, 3 et 4 novembre 2022 pour avoir justement oublié de poser lesdits jours comme congé. Dans la mesure où il ressort de sa demande de congé pour l’année 2022 qu’il avait posé comme seul jour de congé le 31 octobre 2022, c’est à bon droit que la directrice du … a pu prendre la décision déférée de qualifier les jours d’absence du demandeur comme des absences non justifiées, qualification qui entraîne de plein droit la perte de la partie de son traitement à raison d’un trentième par journée d’absence, sans violer le principe de proportionnalité.
Cette conclusion n’est pas énervée par l’affirmation, non autrement établie, du demandeur selon laquelle son absence n’aurait aucunement porté préjudice au bon fonctionnement et à l’organisation du service informatique du …, laquelle n’est, dans tous les cas, pas de nature à mettre en cause la justification de la décision déférée constatant un trop payé dans le chef du demandeur en raison de son absence injustifiée, pour laquelle le demandeur est en aveu, en ce qu’il affirme lui-même avoir oublié de poser le congé pour la période litigieuse.
Il en va de même de l’argumentation du demandeur tirée d’une absence d’antécédents disciplinaires, voire de l’absence de toute mauvaise foi dans son chef, ces éléments n’étant pas non plus de nature à renverser la matérialité des faits retenues par la directrice du …, ni le bien-
fondé de sa décision y relative, d’autant plus que mis à part la conséquence de plein droit de la perte de traitement, il ne ressort pas des éléments de la cause qu’une procédure disciplinaire aurait été lancée à ce titre.
Au-delà du constat que l’affirmation du demandeur selon laquelle la directrice aurait affirmé, lors de l’entrevue du 11 novembre 2022, que son oubli de poser du congé pour le 2, 3 et 4 novembre 2022 ne constituerait qu’une simple erreur et qu’il aurait apporté une excuse valable pour son absence, reste à l’état de pure allégation pour n’être corroborée par aucun élément tangible et objectif, une telle argumentation aurait tout au plus été pertinente dans le cadre d’une procédure disciplinaire lancée dans ce contexte Le moyen afférent encourt dès lors le rejet en toutes ses branches.
Le demandeur invoque, enfin, une violation de l’article 19, paragraphe (1ter) du statut général, en ce qu’il aurait presté des heures supplémentaires pour le mois de novembre 2022d’un total de 15,23 heures et qu’il aurait, conformément à cette disposition légale, eu droit à 8 heures de congé de compensation, le restant devant être indemnisé. Il en déduit que la directrice du … aurait dû justifier son absence en date des 2 à 4 novembre 2022 pour une journée en raison de son droit à un congé de compensation pour heures supplémentaires.
Le délégué du gouvernement conclut au rejet de ce moyen.
Aux termes de l’article 19, paragraphe (1ter) du statut général, « Si le total mensuel des heures supplémentaires ne dépasse pas le nombre de huit, elles sont compensées moyennant un congé de compensation tel que prévu à l’article 28-4.
Si le total mensuel des heures supplémentaires dépasse le nombre de huit, les huit premières sont compensées moyennant un congé de compensation, le restant étant indemnisé suivant les dispositions de l’article 23.
Les heures supplémentaires sont indemnisées intégralement si les nécessités du service ne permettent pas la compensation moyennant congé dans le mois qui suit celui au cours duquel les heures supplémentaires ont été effectuées. » Force est au tribunal de constater s’il n’est pas contesté que le demandeur disposait de 8 heures supplémentaires prestées au moment des absences injustifiées litigieuses des 2, 3 et 4 novembre 2022, il n’en reste pas moins que le moyen du demandeur fondé sur l’article 19, paragraphe (1ter) du statut général manque en fait, alors que ce dernier n’affirme pas et a fortiori n’établit pas avoir sollicité et s’être vu accorder un tel congé de compensation en bonne et due forme, avant son absence litigieuse, de sorte que ledit moyen est à rejeter pour ne pas être fondé.
Il en résulte qu’à défaut d’autres moyens, le recours dirigé contre la décision directoriale du 28 novembre 2022 encourt le rejet.
Au vu de l’issue du litige, la demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 3.500 euros formulée par le demandeur sur le fondement de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives est à rejeter.
Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant contradictoirement ;
se déclare incompétent pour statuer sur le recours principal en réformation dirigé contre la décision de la directrice du … du 28 novembre 2022 ;
reçoit le recours subsidiaire en annulation dirigé contre la décision de la directrice du … du 28 novembre 2022 en la forme ;
au fond, le déclare non justifié, et en déboute ;
rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure formulée par Monsieur (A) ;
condamne Monsieur (A) aux frais et dépens de l’instance.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 24 juin 2025 par :
Paul Nourissier, premier vice-président, Olivier Poos, vice-président, Emilie Da Cruz De Sousa, premier juge, en présence du greffier Marc Warken.
s.Marc Warken s.Paul Nourissier Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 24 juin 2025 Le greffier du tribunal administratif 16