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16/06/2025 | LUXEMBOURG | N°52867

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 16 juin 2025, 52867


Tribunal administratif N° 52867 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:52867 2e chambre Inscrit le 19 mai 2025 Audience publique du 16 juin 2025 Recours formé par Monsieur (A), …, contre une décision du ministre des Affaires intérieures en matière de protection internationale (art. 28 (1), L.18.12.2015)

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 52867 du rôle et déposée le 19 mai 2025 au greffe du tribunal administratif par Maître Lukman ANDIC, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A),

né le … à … (République Démocratique du Congo), de nationalité congolaise, ass...

Tribunal administratif N° 52867 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:52867 2e chambre Inscrit le 19 mai 2025 Audience publique du 16 juin 2025 Recours formé par Monsieur (A), …, contre une décision du ministre des Affaires intérieures en matière de protection internationale (art. 28 (1), L.18.12.2015)

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 52867 du rôle et déposée le 19 mai 2025 au greffe du tribunal administratif par Maître Lukman ANDIC, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A), né le … à … (République Démocratique du Congo), de nationalité congolaise, assigné à résidence à …, sise à L-…, tendant à la réformation d’une décision du ministre des Affaires intérieures du 5 mai 2025 de le transférer vers la Belgique comme étant l’Etat membre responsable pour connaître de sa demande de protection internationale ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 30 mai 2025 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Parina MASKEEN, en remplacement de Maître Lukman ANDIC, et Monsieur le délégué du gouvernement Vincent STAUDT en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 2 juin 2025.

___________________________________________________________________________

Le 23 janvier 2025, Monsieur (A) introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires intérieures, direction générale de l’Immigration, ci-après désigné par « le ministère », une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par « la loi du 18 décembre 2015 ».

Le même jour, Monsieur (A) fut entendu par un agent du service de police judiciaire, section criminalité organisée, de la police grand-ducale, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Une recherche effectuée à la même date par les autorités luxembourgeoises dans la base de données EURODAC révéla que Monsieur (A) avait auparavant introduit une demande de protection internationale en Belgique en date du 7 décembre 2022.

Le 28 janvier 2025, Monsieur (A) fut entendu par un agent du ministère en vue de 1 déterminer l’Etat responsable de l’examen de sa demande de protection internationale en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ci-après désigné par « le règlement Dublin III ».

En date du 13 février 2025, les autorités luxembourgeoises adressèrent à leurs homologues belges une demande de reprise en charge de Monsieur (A), basée sur l’article 18, paragraphe (1), point b) du règlement Dublin III, demande qui fut acceptée par les autorités belges par courrier du 18 février 2025 sur le fondement de l’article 18, paragraphe (1), point d) du même règlement.

Par arrêté du 25 février 2025, notifié à l’intéressé en mains propres le même jour, le ministre des Affaires intérieures, ci-après désigné par le « ministre », assigna l’intéressé à … pour une durée de trois mois à compter de la notification de la décision en question.

Par décision du 5 mai 2025, notifiée à l’intéressé par courrier recommandé expédié le 7 mai 2025, le ministre informa Monsieur (A) que le Grand-Duché de Luxembourg avait pris la décision de ne pas examiner sa demande de protection internationale et de le transférer dans les meilleurs délais vers la Belgique sur base de l’article 28, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 et des dispositions de l’article 18, paragraphe (1), point d) du règlement Dublin III, ladite décision étant libellée comme suit :

« […] Vous avez introduit une demande de protection internationale au Luxembourg en date du 23 janvier 2025 au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire (ci-après « la loi modifiée du 18 décembre 2015 »). En vertu des dispositions de l'article 28(1) de la loi précitée et des dispositions de l'article 18(1)d du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 (ci-après « le règlement DIII »), le Grand-Duché de Luxembourg n'examinera pas votre demande de protection internationale et vous serez transféré vers la Belgique qui est l'Etat membre responsable pour traiter cette demande.

Les faits concernant votre demande, la motivation à la base de la présente décision, les bases légales sur lesquelles elle s'appuie, de même que les informations quant aux voies de recours ouvertes sont précisés ci-après.

En mains le rapport de Police Judiciaire du 23 janvier 2025 et le rapport d'entretien Dublin III sur votre demande de protection internationale du 28 janvier 2025. En mains également deux courriels que vous avez transmis aux autorités luxembourgeoises en date des 12 et 27 mars 2025.

1. Quant aux faits à la base de votre demande de protection internationale En date du 23 janvier 2025, vous avez introduit une demande de protection internationale au Luxembourg.

La comparaison de vos empreintes dactyloscopiques avec la base de données Eurodac a révélé que vous avez introduit une demande de protection internationale en Belgique en date 2 du 7 décembre 2022.

Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat responsable, un entretien Dublin III a été mené en date du 28 janvier 2025.

Sur base des éléments à notre disposition, une demande de reprise en charge en vertu de l'article 18(1)b du règlement DIII a été adressée aux autorités belges en date du 13 février 2025, demande qui fut acceptée par lesdites autorités belges au titre de l'article 18(1)d en date du 18 février 2025.

2. Quant aux bases légales En tant qu'Etat membre de l'Union européenne, l'Etat luxembourgeois est tenu de mener un examen aux fins de déterminer l'Etat responsable conformément aux dispositions du règlement DIII établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride.

S'il ressort de cet examen qu'un autre Etat est responsable du traitement de la demande de protection internationale, la Direction générale de l'immigration rend une décision de transfert après que l'Etat requis a accepté la prise ou la reprise en charge du demandeur.

Aux termes de l'article 28(1) de la loi modifiée du 18 décembre 2015, le Luxembourg n'est pas responsable pour le traitement d'une demande de protection internationale si cette responsabilité revient à un autre Etat.

Dans le cadre d'une reprise en charge, et notamment conformément à l'article 18(1), point d) du règlement DIII, l'Etat responsable de l'examen d'une demande de protection internationale en vertu du règlement est tenu de reprendre en charge - dans les conditions prévues aux art. 23, 24, 25 et 29 - le ressortissant de pays tiers ou l'apatride dont la demande a été rejetée et qui a présenté une demande auprès d'un autre Etat membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre Etat membre.

Un Etat n'est pas autorisé à transférer un demandeur vers l'Etat normalement responsable lorsqu'il existe des preuves ou indices avérés qu'un demandeur risquerait dans son cas particulier d'être soumis dans cet Etat à un traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 3 de la Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (ci-après la « CEDH ») ou 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (ci-après « la Charte UE »).

3. Quant à la motivation de la présente décision de transfert En l'espèce, il ressort de la comparaison de vos empreintes dactyloscopiques avec la base de données Eurodac que vous avez introduit une demande de protection internationale en Belgique en date du 7 décembre 2022.

Selon vos déclarations, vous auriez quitté votre pays d'origine en décembre 2022 en direction du Rwanda. A Kigali, vous auriez embarqué à bord d'un vol direct à destination de 3 Bruxelles (Belgique), en utilisant des documents falsifiés. En date du 7 décembre 2022, vous avez introduit une demande de protection internationale à Bruxelles et vous auriez résidé dans un centre pour demandeurs de protection internationale durant toute la période de votre procédure, et ce, jusqu'à votre départ vers le Luxembourg. Votre demande de protection internationale a été rejetée en Belgique et le refus a été confirmée par les juridictions belges.

Or, vous considérez que « la Belgique a été injuste dans le traitement de [votre] demande » (p.5 du rapport d'entretien Dublin) et vous êtes d'avis que les autorités belges vont vous rapatrier dans votre pays d'origine, raison pour laquelle vous êtes venu au Luxembourg, où vous seriez arrivé par voie ferroviaire en date du 22 janvier 2025.

Monsieur, vous n'avez pas fait mention d'éventuelles particularités sur votre état de santé ou fait état d'autres problèmes généraux empêchant un transfert vers la France qui est l'Etat membre responsable pour traiter votre demande de protection internationale.

Rappelons à cet égard que la Belgique est liée à la Charte UE et est partie à la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (ci-après « la Convention de Genève »), à la CEDH et à la Convention du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (« Conv. torture »).

Il y a également lieu de soulever que la Belgique est liée par la Directive (UE) n° 2013/32 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale [refonte] (« directive Procédure ») et par la Directive (UE) n° 2013/33 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale [refonte] (« directive Accueil »).

Soulignons en outre que la Belgique profite, comme tout autre Etat membre, de la confiance mutuelle qu'elle respecte ses obligations découlant du droit international et européen en la matière.

Par conséquent, la Belgique est présumée respecter ses obligations tirées du droit international public, en particulier le principe de non-refoulement énoncé expressément à l'article 33 de la Convention de Genève, ainsi que l'interdiction des mauvais traitements ancrée à l'article 3 CEDH et à l'article 3 Conv. torture.

Par ailleurs, il n'existe en particulier aucune jurisprudence de la Cour EDH ou de la CJUE, de même qu'il n'existe aucune recommandation de I'UNHCR visant de façon générale à suspendre les transferts vers la Belgique sur base du règlement (UE) n° 604/2013.

En l'occurrence, vous ne rapportez pas la preuve que votre demande de protection internationale n'aurait pas fait l'objet d'une analyse juste et équitable, ni que vous n'auriez pas les moyens de faire valoir vos droits, notamment devant les autorités judiciaires belges.

Vous n'avez fourni aucun élément susceptible de démontrer que la Belgique ne respecterait pas le principe de non-refoulement à votre égard et faillirait à ses obligations internationales en vous renvoyant dans un pays où votre vie, votre intégrité corporelle ou votre liberté seraient sérieusement menacées.

4 Dans le cadre de la procédure « Dublin », il ne revient pas aux autorités luxembourgeoises d'analyser les risques d'être soumis à des traitements inhumains au sens de l'article 3 CEDH dans votre pays d'origine, mais dans l'Etat de destination, en l'occurrence la Belgique. Vous ne faites valoir aucun indice que la Belgique ne vous offrirait pas le droit à un recours effectif conformément à l'article 13 CEDH ou que vous n'aviez ou n'auriez pas la possibilité de faire valoir vos droits quant au fond de votre demande devant les juridictions belges, notamment en vertu de l'article 46 de la directive « Procédure ».

Monsieur, vous n'avez pas non plus démontré que, dans votre cas concret, vos conditions d'existence en Belgique revêtiraient un tel degré de pénibilité et de gravité qu'elles seraient constitutives d'un traitement contraire à l'article 3 CEDH ou encore à l'article 3 Conv.

torture.

Il n'existe en outre pas non plus de raisons pour une application de l'article 16(1) du règlement DIII pouvant amener le Luxembourg à assumer la responsabilité de l'examen au fond de votre demande de protection internationale.

Il convient encore de souligner qu'en vertu de l'article 17(1) du règlement DIII (clause de souveraineté), chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par le ressortissant d'un pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le règlement, pour des raisons humanitaires ou exceptionnelles. Les autorités luxembourgeoises disposent d'un pouvoir discrétionnaire à cet égard, et l'application de la clause de souveraineté ne constitue pas une obligation.

Il ne ressort pas de l'ensemble des éléments de votre dossier que les autorités luxembourgeoises auraient dû faire application de la clause de souveraineté prévue à l'article 17(1) du règlement DIII. En effet, vous ne faites valoir aucun élément humanitaire ou exceptionnel qui ne serait pas couvert par les dispositions du règlement DIII et qui devrait amener les autorités luxembourgeoises à se déclarer responsables pour le traitement de votre demande de protection internationale.

Pour l'exécution du transfert vers la Belgique, seule votre capacité de voyager est déterminante et fera l'objet d'une détermination définitive dans un délai raisonnable avant le transfert.

Si votre état de santé devait temporairement constituer un obstacle à l'exécution de votre renvoi vers la Belgique, l'exécution du transfert serait suspendue jusqu'à ce que vous seriez à nouveau apte à être transféré. Par ailleurs, si cela s'avère nécessaire, la Direction générale de l'immigration prendra en compte votre état de santé lors de l'organisation du transfert vers la Belgique en informant les autorités belges conformément aux articles 31 et 32 du règlement DIII à condition que vous exprimiez votre consentement explicite à cette fin.

D'autres raisons individuelles pouvant éventuellement entraver la remise aux autorités belges n'ont pas été constatées. […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 19 mai 2025, Monsieur (A) a fait introduire un recours tendant à la réformation de la décision ministérielle, précitée, du 5 5 mai 2025.

Etant donné que l’article 35, paragraphe (4) de la loi du 18 décembre 2015 prévoit un recours au fond contre les décisions de transfert visées à l’article 28, paragraphe (1) de la même loi, telles que la décision litigieuse, le tribunal est compétent pour statuer sur le recours en réformation introduit en l’espèce, recours qui est, par ailleurs, recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Prétentions des parties A l’appui de son recours, le demandeur expose, en substance, les faits et rétroactes gisant à la base de la décision déférée.

En droit, le demandeur invoque en premier lieu la violation, par la décision déférée, de l’article 17, paragraphe (1) du règlement Dublin III, en reprochant au ministre de ne pas avoir fait application de la clause discrétionnaire y prévue, malgré le fait qu’il existerait de sérieuses raisons de croire qu’en cas de transfert en Belgique, il risquerait d’être renvoyé dans son pays d’origine et ce, en violation du principe de non-refoulement énoncé à l’article 33 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, ci-après désignée par « la Convention de Genève ». Il fait également valoir que comme il serait très fragile psychologiquement, son transfert vers la Belgique ne ferait qu’accentuer ses troubles, ce d’autant plus qu’il aurait tenté de reconstruire « un cocon » au Luxembourg et qu’il y aurait même trouvé « un patron pour un contrat d’apprentissage en tant que … ». Comme il aurait déjà été obligé « une première fois de faire ses valises » et de quitter son pays d’origine, il estime qu’un transfert vers la Belgique, où il serait éloigné vers la République Démocratique du Congo, risquerait de porter atteinte à son intégrité physique et psychique.

Le demandeur conclut ensuite à une violation de l’article 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III. Tout en ne contestant pas la compétence de principe de la Belgique pour connaître de sa demande de protection internationale, respectivement des suites à y réserver, il réfute cependant qu’il puisse être affirmé que la Belgique respecte le principe de non-refoulement énoncé à l’article 33 de la Convention de Genève, tout en reprochant au ministre de se contenter de présumer que ledit Etat membre respecte ledit principe. Afin de sous-tendre ce reproche, il s’appuie sur des extraits d’une note du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (« UNHCR ») sur le principe de non-refoulement, ainsi que sur un extrait du discours du Haut-

Commissaire pour les Réfugiés du 4 mars 2025 « concernant le sort des demandeurs d’asile provenant du RDC », accessibles à travers des liens hypertextes reproduits dans la requête.

Le demandeur fait ensuite valoir que de nombreux rapports témoigneraient de violations répétées des droits des demandeurs de protection internationale en Belgique. Il s’appuie, dans ce contexte, sur des extraits d’un rapport de l’organisation Amnesty International publié en avril 2025, accessible à travers un lien hypertexte reproduit dans la requête, qui ferait état de pratiques adoptées par la Belgique lesquelles reflèteraient une défaillance systémique certaine dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale. Après avoir relevé qu’il se dégagerait du rapport COI FOCUS publié par le Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides qu’en 2023, vingt-

deux ressortissants congolais auraient été rapatriés vers … au départ de la Belgique tandis qu’entre janvier et septembre 2024, leur nombre se serait élevé à quatre, le demandeur insiste sur le fait que la Belgique devrait être considérée comme violant le principe de non-refoulement 6 et que ce serait à tort que le ministre se retrancherait derrière le principe de confiance mutuelle pour présumer que tel ne serait pas le cas.

Au vu de ces considérations, le demandeur est d’avis qu’il risquerait de se voir priver de ses droits et notamment de ceux découlant de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale.

Le demandeur reproche encore au ministre d’affirmer péremptoirement que la Belgique profite de la confiance mutuelle qu’elle respecte non seulement ses obligations découlant du droit international et européen et notamment le principe d’interdiction des mauvais traitements ancré à l’article 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales (« CEDH »), ainsi qu’à l’article 3 de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (« Convention torture »), mais également les conditions minimales d’accueil fixées dans la directive (UE) n° 2013/33 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale [refonte], désignée ci-après par « la directive Accueil », dont il cite les articles 17, paragraphes (1) et (2) et 18. Il se dégagerait, au contraire, de nombreuses sources que ledit Etat membre ne respecterait pas les principes posés par ces instruments, voire que de nombreux faits avérés et répétés de violences policières à l’encontre des demandeurs de protection internationale auraient pu y être constatés. Il renvoie, à cet égard, au rapport de l’organisation Amnesty International, prémentionné, lequel ferait état de plusieurs évènements impliquant le non-respect, par la Belgique, des articles 3 et 13 de la CEDH, tout en reprochant au ministre de ne pas chercher à s’assurer qu’il pourra jouir pleinement de ses droits en cas de transfert, ce d’autant plus eu égard à sa situation d’homme célibataire noir qui ferait qu’il serait « sans nul doute sans abri à son retour en Belgique », le demandeur affirmant avoir été hébergé par un de ses amis lors de sa procédure de demande de protection internationale dans ledit pays.

Le demandeur est, en tout état de cause, d’avis que dans la mesure où le ministre aurait été au courant de tous ces éléments au moment de la prise de la décision litigieuse, il aurait dû en tenir compte et « rechercher auprès des autorités belges des garanties individuelles ainsi que l’accès aux besoins les plus élémentaires », le tout afin d’écarter un risque concret qu’il soit exposé à des traitements inhumains et dégradants « pour le cas où les autorités belges n’étaient pas aptes à les lui garantir ». Il souligne, dans ce contexte, que l’obligation de rechercher des garanties individuelles auprès des autorités belges aurait également incombé au ministre au regard de l’article 3 de la CEDH et de la jurisprudence y afférente de la Cour européenne des droits de l’Homme (« CourEDH »).

Au vu de toutes les considérations qui précèdent, il y aurait lieu de conclure qu’en Belgique, il serait exposé à un risque de subir des traitements inhumains et dégradants au sens des articles 4 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (« Charte ») et 3 de la CEDH.

Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet du recours pour n’être fondé en aucun de ses moyens.

Appréciation du tribunal 7 A titre liminaire, il y a lieu de rappeler que le tribunal n’est pas tenu par l’ordre des moyens, tel que présenté par le demandeur, mais qu’il détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et l’effet utile s’en dégageant.

En vertu de l’article 28, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015, « Si, en application du règlement (UE) n°604/2013, le ministre estime qu’un autre Etat membre est responsable de la demande, il sursoit à statuer sur la demande jusqu’à la décision du pays responsable sur la requête de prise ou de reprise en charge. Lorsque l’Etat membre requis accepte la prise en charge ou la reprise en charge du demandeur, le ministre notifie à la personne concernée la décision de la transférer vers l’Etat membre responsable et de ne pas examiner sa demande de protection internationale ».

Il s’ensuit que si le ministre estime qu’en application du règlement Dublin III, un autre pays est responsable de l’examen de la demande de protection internationale et si ce pays accepte la prise en charge ou la reprise en charge de l’intéressé, le ministre décide de transférer la personne concernée vers l’Etat responsable et de ne pas examiner la demande de protection internationale introduite au Luxembourg.

L’article 18, paragraphe (1), point d) du règlement Dublin III, sur lequel le ministre s’est basé pour conclure à la responsabilité des autorités belges pour procéder à l’examen de la demande de protection internationale de Monsieur (A), prévoit que « L’État membre responsable en vertu du présent règlement est tenu de […] reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le ressortissant de pays tiers ou l’apatride dont la demande a été rejetée et qui a présenté une demande auprès d’un autre État membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d’un autre État membre. […] ».

Il est constant en cause que la décision litigieuse a été adoptée par le ministre en application de l’article 28, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 et de l’article 18, paragraphe (1), point d) du règlement Dublin III, au motif que ce ne serait pas le Luxembourg qui serait compétent pour le traitement de la demande de protection internationale présentée par Monsieur (A), respectivement des suites à y réserver, mais bien la Belgique, Etat dans lequel il a déposé une demande de protection internationale en date du 7 décembre 2022 et qui a accepté de reprendre en charge le concerné le 18 février 2025. Ainsi, c’est a priori à bon droit que le ministre a décidé de ne pas examiner la demande de protection internationale déposée au Luxembourg par Monsieur (A) et de le transférer vers la Belgique.

En l’espèce, le demandeur, qui ne conteste pas cette compétence de principe des autorités belges, et, par conséquent, l’incompétence de principe des autorités luxembourgeoises pour traiter sa demande de protection internationale, respectivement les suites à y réserver, soutient, en substance, que la décision de le transférer vers la Belgique serait contraire aux articles 17, paragraphe (1) et 3, paragraphe (2), alinéa 2 du règlement Dublin III, en ce qu’il risquerait de subir dans ce pays des traitements inhumains et dégradants au sens des articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte, de même qu’il y serait exposé à un risque sérieux d’être refoulé vers son pays d’origine en violation plus particulièrement de l’article 33 de la Convention de Genève.

Il y a lieu de rappeler que les possibilités légales pour le ministre de ne pas procéder au transfert d’un demandeur de protection internationale et d’examiner, le cas échéant, sa 8 demande sont prévues, d’une part, par l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2 du règlement Dublin III lequel présuppose l’existence de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs dans le pays de transfert qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la Charte, auquel cas le ministre ne peut pas transférer l’intéressé dans cet Etat et doit poursuivre la procédure de détermination de l’Etat membre responsable, ainsi que, d’autre part, par l’article 17, paragraphe (1) du même règlement, accordant au ministre la faculté d’examiner la demande de protection internationale en passant outre la compétence de principe d’un autre Etat membre pour ce faire.

S’agissant tout d’abord de l’invocation par le demandeur de l’existence, en Belgique, de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale, le tribunal rappelle qu’en vertu de l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2 du règlement Dublin III : « Lorsqu’il est impossible de transférer un demandeur vers l’État membre initialement désigné comme responsable parce qu’il y a de sérieuses raisons de croire qu’il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, l’État membre procédant à la détermination de l’État membre responsable poursuit l’examen des critères énoncés au chapitre III afin d’établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. ».

Force est au tribunal de constater que cette disposition impose à l’Etat membre procédant à la détermination de l’Etat responsable de l’examen de la demande de protection internationale d’un demandeur d’asile de s’abstenir de transférer l’intéressé vers l’Etat initialement désigné comme responsable, en application des critères prévus par le règlement Dublin III, s’il y a de sérieuses raisons de croire qu’il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la Charte.

La situation visée par ledit article 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III est celle de l’existence de défaillances systémiques empêchant tout transfert de demandeurs d’asile vers un Etat membre déterminé1.

A cet égard, le tribunal relève que la Belgique est tenue au respect, en tant que membre de l’Union européenne et signataire de ces conventions, des droits et libertés prévus par la CEDH, le Pacte international des droits civils et politiques ou la Convention torture, ainsi que du principe de non-refoulement prévu par la Convention de Genève et dispose a priori d’un système de recours efficace contre les violations de ces droits et libertés. Il y a encore lieu de souligner, dans ce contexte, que le système européen commun d’asile a été conçu dans un contexte permettant de supposer que l’ensemble des Etats y participant qu’ils soient Etats membres ou Etats tiers, respectent les droits fondamentaux, en ce compris les droits trouvant leur fondement dans la Convention de Genève, ainsi que dans la CEDH, et que les Etats membres peuvent s’accorder une confiance mutuelle à cet égard2. C’est précisément en raison de ce principe de confiance mutuelle que le législateur de l’Union européenne a adopté le règlement Dublin III en vue de rationaliser le traitement des demandes d’asile et d’éviter 1 CJUE, 16 février 2017, C. K., H. F., A.S. c. Republika Slovenija, n° C-578/16, pt. 92.

2 CJUE, 21 décembre 2011, affaires jointes C-411/10, N.S. c. Secretary of State for the Home Department et C-493/10, M.E. et al. c. Refugee Applications Commissioner Minister for Justice, Equality and Law Reform, pt 78.

9 l’engorgement du système par l’obligation, pour les autorités des Etats, de traiter des demandes multiples introduites par un même demandeur, d’accroître la sécurité juridique en ce qui concerne la détermination de l’Etat responsable du traitement de la demande d’asile et ainsi d’éviter le « forum shopping », l’ensemble ayant pour objectif principal d’accélérer le traitement des demandes tant dans l’intérêt des demandeurs d’asile que des Etats participants3.

Dès lors, comme ce système européen commun d’asile repose sur la présomption – réfragable – que l’ensemble des Etats y participant respectent les droits fondamentaux, en ce compris les droits trouvant leur fondement dans la Convention de Genève, et que les Etats membres, ainsi que les Etats y adhérant, peuvent s’accorder une confiance mutuelle à cet égard, il appartient au demandeur de rapporter la preuve matérielle de défaillances avérées4.

Dans son arrêt, précité, du 16 février 20175, la Cour de Justice de l’Union européenne (« CJUE ») a, d’ailleurs, expressément réaffirmé l’existence tant de ce principe de confiance mutuelle que de la présomption réfragable s’en dégageant du respect des droits fondamentaux par les Etats participant au système européen commun d’asile, tout en apportant des précisions quant à l’interprétation de l’article 4 de la Charte et aux obligations en découlant pour les Etats membres et les Etats y adhérant.

Le tribunal est également amené à souligner que le système Dublin III est basé sur l’hypothèse que tous les Etats membres de l’Union européenne, ainsi que les Etats y adhérant sont des Etats de droit dans lesquels les demandeurs de protection internationale peuvent faire valoir leurs droits et requérir l’aide des organes étatiques, notamment judiciaires, au cas où ils estiment que leurs droits ont été lésés. S’il est exact qu’il est admis qu’une acceptation de prise en charge par un Etat peut être remise en cause par un demandeur de protection internationale lorsqu’il existe des défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale dans cet Etat, il n’en reste pas moins que suivant la jurisprudence des juridictions administratives6, reposant elle-même sur un arrêt de la CJUE7, des défaillances systémiques au sens de l’article 3, précité, du règlement Dublin III requièrent, pour être de nature à s’opposer à un transfert, d’être qualifiées de traitements inhumains et dégradants au sens de l’article 4 de la Charte. Telle est encore la conclusion à laquelle arrive la CJUE dans son arrêt, précité, du 16 février 20178.

Quant à la preuve à rapporter par le demandeur, il se dégage d’un arrêt de la CJUE du 19 mars 20199 que pour relever de l’article 4 de la Charte, auquel l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2, précité, du règlement Dublin III renvoie, des défaillances existant dans l’Etat membre responsable, au sens dudit règlement, doivent atteindre un seuil particulièrement élevé de gravité, qui dépend de l’ensemble des données de la cause. Aux termes de ce même arrêt, ce seuil particulièrement élevé de gravité serait atteint lorsque l’indifférence des autorités d’un Etat aurait pour conséquence qu’une personne entièrement dépendante de l’aide publique se trouverait, indépendamment de sa volonté et de ses choix personnels, dans une situation de dénuement matériel extrême, qui ne lui permettrait pas de faire face à ses besoins les plus 3 Ibidem, pt 79 ; voir également : trib. adm., 26 février 2014, n° 33956 du rôle, trib. adm., 17 mars 2014, n° 34054 du rôle, ainsi que trib. adm., 2 avril 2014, n° 34133 du rôle, disponibles sur www.jurad.etat.lu.

4 Voir aussi Verwaltungsgerichtshof Baden-Württemberg, 8 janvier 2015, n° A11 S 858/14.

5 CJUE, 16 février 2017, C. K., H. F., A.S. c. Republika Slovenija, n° C-578/16, pt. 95.

6 Trib. adm., 26 avril 2016, n° 37591, disponible sur: www.jurad.etat.lu.

7 CJUE, 10 décembre 2013, C-394/12, Shamso Abdullahi c. Bundesasylamt, pt. 62.

8 CJUE, 16 février 2017, C.K., H.F., A.S. c. Republika Slovenija, n° C-578/16.

9 CJUE, grande chambre, 19 mars 2019, affaire C-163/17, Abubacarr Jawo c. Bundesrepublik Deutschland, pt.

91.

10 élémentaires, tels que notamment ceux de se nourrir, de se laver et de se loger, et qui porterait atteinte à sa santé physique ou mentale ou la mettrait dans un état de dégradation incompatible avec la dignité humaine10. Ledit seuil ne saurait donc couvrir des situations caractérisées même par une grande précarité ou une forte dégradation des conditions de vie de la personne concernée, lorsque celles-ci n’impliquent pas un dénuement matériel extrême plaçant cette personne dans une situation d’une gravité telle qu’elle peut être assimilée à un traitement inhumain ou dégradant11.

En l’espèce, le demandeur remettant en question cette présomption du respect par la Belgique des droits fondamentaux, puisqu’il fait état de défaillances systémiques dans ce pays, il lui incombe de fournir des éléments concrets susceptibles de la renverser en présentant des éléments permettant de retenir que la situation en Belgique, telle que décrite par lui, atteint le degré de gravité tel que requis par la jurisprudence précitée de la CJUE et par les principes dégagés ci-avant, étant, à cet égard, relevé que sa situation est celle d’un demandeur de protection internationale débouté, de sorte que c’est sur cette toile de fond que ses contestations sont à examiner.

Or, force est de constater que pareilles défaillances systémiques atteignant un tel seuil particulièrement élevé de gravité ne résultent pas des éléments soumis à l’appréciation du tribunal.

En effet, s’il ressort certes de l’extrait d’un rapport de l’organisation Amnesty International, publié en avril 2025, auquel le demandeur se contente de renvoyer pour le surplus sans autre discussion en reproduisant un lien hypertexte afférent dans sa requête et dans les pièces versées à l’appui de celle-ci, que la Belgique fait face à des difficultés dans l’accueil de demandeurs de protection internationale l’ayant amenée à accorder la priorité aux demandeurs les plus vulnérables par rapport aux hommes seuls, respectivement s’il se dégage de ce même extrait que ladite organisation dénonce des insuffisances dans l’évaluation, par les autorités belges, des conditions de vulnérabilité lors de la détermination de l’éligibilité à l’accueil, il ne s’en dégage néanmoins pas, ni, par ailleurs, d’autres éléments de la cause, que les conditions matérielles d’accueil des demandeurs de protection internationale en Belgique seraient caractérisées par des carences structurelles d’une ampleur telle qu’il y aurait lieu de conclure d’emblée, et quelles que soient les circonstances du cas d’espèce, à l’existence de risques suffisamment réels et concrets, pour l’ensemble des demandeurs de protection internationale, indépendamment de leur situation personnelle, d’être systématiquement exposés à une situation de dénuement matériel extrême qui ne leur permettrait pas de faire face à leurs besoins les plus élémentaires, tels que notamment ceux de se nourrir, de se laver et de se loger, et qui porterait atteinte à leur santé physique ou mentale ou les mettrait dans un état de dégradation incompatible avec la dignité humaine, au point que leur transfert dans ce pays constituerait en règle générale un traitement prohibé par l’article 3 de la CEDH et par l’article 4 de la Charte.

Si le demandeur s’appuie encore sur un autre extrait du même rapport de l’organisation Amnesty International pour critiquer de manière générale le fait que les personnes présentant des problèmes psychologiques ne seraient pas suffisamment prises en charge en Belgique, il ne se dégage toutefois pas des éléments soumis à l’appréciation du tribunal que tous les demandeurs de protection internationale ayant besoin d’une aide psychologique se retrouvent systématiquement en Belgique dans une situation telle que leurs besoins essentiels ne soient 10 Ibid., pt. 92.

11 Ibid., pt. 93.

11 pas satisfaits de sorte à les placer dans une situation d’une gravité telle qu’elle peut être assimilée à un traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la Charte.

Il convient, par ailleurs, de constater qu’en ce qui concerne plus particulièrement la problématique de l’accès à des structures d’hébergement en Belgique, l’ensemble des développements du demandeur concernent des personnes dont la demande de protection internationale est toujours en cours d’instruction, tandis qu’il est constant en cause que le demandeur a été débouté de sa demande de protection internationale en Belgique, cet Etat membre ayant accepté sa reprise en charge sur base de l’article 18, paragraphe (1), point d) du règlement Dublin III, précité.

En cas de transfert vers la Belgique, il devra, dans ces conditions, soit y être considéré comme un migrant en situation irrégulière, à défaut d’y introduire une nouvelle demande de protection internationale, et, partant en sa qualité de demandeur d’asile débouté comme sortant du champ d’application de la Convention de Genève, soit, dans l’hypothèse de l’introduction d’une nouvelle demande, comme demandeur ayant formulé une demande ultérieure au sens de la législation européenne, de sorte à pouvoir, théoriquement, se voir opposer la limitation, voire le retrait de l’accès aux conditions matérielles d’accueil.

En effet, la directive Accueil prévoit explicitement la faculté de « limiter les possibilités d’abus du système d’accueil en précisant les circonstances dans lesquelles le bénéfice des conditions matérielles d’accueil pour les demandeurs peut être limité ou retiré, tout en garantissant un niveau de vie digne à tous les demandeurs »12. L’article 20 de cette directive prévoit, pour sa part, explicitement la possibilité pour les Etats membres notamment de limiter, voire de retirer, le bénéfice des conditions matérielles d’accueil, notamment lorsqu’un demandeur « a) abandonne le lieu de résidence fixé par l’autorité compétente sans en avoir informé ladite autorité ou, si une autorisation est nécessaire à cet effet, sans l’avoir obtenue » ou encore lorsqu’il « c) a introduit une demande ultérieure telle que définie à l’article 2, point q), de la directive 2013/32/UE », c’est- à-dire une nouvelle demande de protection internationale « présentée après qu’une décision finale a été prise sur une demande antérieure, y compris le cas dans lequel le demandeur a explicitement retiré sa demande et le cas dans lequel l’autorité responsable de la détermination a rejeté une demande à la suite de son retrait implicite, conformément à l’article 28, paragraphe 1 ».

De même, si le 11ème considérant du règlement Dublin III prévoit explicitement que la directive Accueil est applicable aux demandeurs d’asile soumis à une procédure Dublin, il admet également explicitement l’application des limitations figurant dans cette même directive Accueil.

Ainsi, même à admettre que la Belgique ait adopté une politique visant à restreindre l’accès au système d’accueil à certaines catégories de personnes et notamment à celles y ayant déjà été définitivement déboutées de leur demande de protection internationale, une telle politique ne saurait s’analyser per se en un traitement inhumain ou dégradant au sens des articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte.

Le tribunal relève encore qu’outre de ne pas fournir de précisions quant à la situation des demandeurs de protection internationale définitivement déboutés et transférés en Belgique 12 Considérant 25.

12 dans le cadre du règlement Dublin III, le demandeur n’invoque pas non plus une jurisprudence de la CourEDH relative à une suspension générale des transferts vers la Belgique, voire une demande en ce sens de la part de l’UNHCR. Il ne fait pas non plus état de l’existence d’un rapport ou avis émanant de l’UNHCR, ou d’autres institutions ou organismes internationaux, interdisant ou recommandant l’arrêt des transferts vers la Belgique de ressortissants congolais dans le cadre du règlement Dublin III en raison plus particulièrement de la politique d’asile belge qui les exposerait à un traitement inhumain ou dégradant au sens des articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte.

Le demandeur reste, en tout état de cause, en défaut de rapporter la preuve que, de manière générale, les droits des demandeurs de protection internationale déboutés en Belgique risquent systématiquement de ne pas être respectés, ou encore que les demandeurs de protection internationale déboutés n’auraient en Belgique aucun droit ou aucune possibilité de les faire valoir, étant encore relevé que la Belgique est signataire de la CEDH et de la Convention torture, de la Convention de Genève, ainsi que du Protocole additionnel du 31 janvier 1967 relatif aux réfugiés et, à ce titre, devrait en appliquer les dispositions.

Par ailleurs, même à admettre que le demandeur ne puisse pas accéder au système d’aide belge - que ce soit celui offert aux demandeurs de protection internationale ou celui accessible à tous les résidents belges -, respectivement si le demandeur devait estimer que le système d’aide belge serait à tel point avilissant qu’il impliquerait per se un traitement inhumain et dégradant contraire à l’article 4 de la Charte, respectivement à l’article 3 de la CEDH, il lui appartiendrait de faire valoir ses droits directement auprès des autorités belges en usant des voies de droit adéquates, respectivement devant les instances européennes compétentes. Il en va de même si le demandeur devait estimer que le système belge ne serait pas conforme aux normes européennes.

Au vu des considérations qui précèdent, le tribunal conclut que le demandeur n’a pas rapporté la preuve de l’existence, en Belgique, de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale, qui entraîneraient un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens des articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte, empêchant tout transfert de demandeurs d’asile vers ce pays, de sorte que le moyen tenant à l’existence de défaillances systémiques en Belgique est à rejeter pour ne pas être fondé.

Cependant, si les Etats sont dans l’obligation d’appliquer les règlements européens, il ressort de la jurisprudence de la CourEDH que, dans certains cas, il ne peut être exclu que l’application des règles prescrites par le règlement Dublin III puisse entraîner un risque de violation de l’article 3 de la CEDH, corollaire de l’article 4 de la Charte, la présomption selon laquelle les Etats participants respectent les droits fondamentaux prévus par la CEDH n’étant en effet pas irréfragable13.

Dans ce contexte, la CJUE a suivi le raisonnement de la CourEDH en décidant que, même en l’absence de raisons sérieuses de croire à l’existence de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs dans l’Etat membre responsable de l’examen de la demande d’asile, le transfert d’un demandeur d’asile dans le cadre du règlement Dublin III ne peut être opéré que dans des conditions excluant que ce transfert 13 CourEDH, grande chambre, 4 novembre 2014, Tarakhel c. Suisse, n° 29217/12; CourEDH, grande chambre, 21 janvier 2011, M.S.S. c. Belgique et Grèce, n° 30696/09.

13 entraîne un risque réel et avéré que l’intéressé subisse des traitements inhumains ou dégradants, au sens de l’article 4 de la Charte14, et qu’il est indifférent, aux fins de l’application dudit article 4 de la Charte, que ce soit au moment même du transfert, lors de la procédure d’asile ou à l’issue de celle-ci que la personne concernée encourrait, en raison de son transfert vers l’Etat membre responsable, au sens du règlement Dublin III, un risque sérieux de subir un traitement inhumain et dégradant15.

Il appartient dès lors au tribunal de vérifier s’il existe, dans le chef du demandeur, un risque de mauvais traitement qui doit atteindre un seuil minimal de gravité, l’examen de ce seuil minimum étant relatif et dépendant des circonstances concrètes du cas d’espèce, telles que la durée du traitement et ses conséquences physiques et mentales et, dans certains cas, du sexe, de l’âge et de l’état de santé de l’intéressé16.

En l’espèce, le tribunal constate que Monsieur (A) n’allègue et a fortiori n’établit pas, que ce soit au cours de la phase précontentieuse ou contentieuse, que, personnellement et concrètement, ses droits n’auraient pas été respectés en Belgique dans le cadre du traitement de sa demande de protection internationale. A cet égard, il y a plus particulièrement lieu de relever que le demandeur n’a pas fait état de problèmes concrets en relation avec le traitement de sa demande de protection internationale, voire en relation avec le rejet définitif de celle-ci, mais s’est contenté d’affirmer péremptoirement lors de son entretien Dublin III que, selon lui, « la Belgique a été injuste dans le traitement de [s]a demande »17, sans avoir fourni d’autres précisions à ce sujet dans le recours sous analyse. Par ailleurs, il ne ressort pas non plus des déclarations du concerné qu’il aurait lui-même rencontré des problèmes au niveau des conditions d’hébergement. S’il affirme péremptoirement dans le cadre du recours sous analyse qu’il aurait été hébergé par un ami lors du traitement de sa demande de protection internationale en pointant à cet égard l’absence d’assistance de la part des autorités belges, le tribunal se doit de constater que cette affirmation se trouve contredite par ses déclarations faites dans le cadre de son entretien Dublin III au cours duquel il a affirmé avoir été « logé dans un centre pour demandeur d’asile toute la période de [s]a procédure »18. En tout état de cause, le demandeur reste en défaut de démontrer qu’au cours de son séjour en Belgique, ses propres conditions d’existence dans ce pays aient atteint un degré de pénibilité et de gravité tel qu’elles puissent être qualifiées de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 3 de la CEDH, corollaire de l’article 4 de la Charte, ni qu’en cas de transfert, il serait personnellement exposé au risque que ses besoins existentiels minimaux ne soient pas satisfaits et ce, de manière durable, sans perspective d’amélioration, au point qu’il aurait fallu renoncer à son transfert ou bien demander des garanties individuelles auprès des autorités belges avant de le transfert.

Au vu des considérations qui précèdent, et à défaut d’autres éléments, il n’est pas établi que, compte tenu de sa situation personnelle, Monsieur (A) serait exposé à un risque réel de subir des traitements contraires aux articles 3 de la CEDH, 4 de la Charte ou 3 de la Convention torture, en cas de transfert vers la Belgique, nonobstant le constat fait ci-avant de l’absence, dans ce pays, de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil 14 CJUE, 16 février 2017, C.K., H.F., A.S. c. Republika Slovenija, n° C-578/16, pts. 65 et 96.

15 CJUE, grande chambre, 19 mars 2019, affaire C-163/17, Abubacarr Jawo c. Bundesrepublik Deutschland, pt.

88.

16 CourEDH, grande chambre, 4 novembre 2014, Tarakhel c. Suisse, n°29217/12 ; CourEDH, grande chambre, 21 janvier 2011, M.S.S. c. Belgique et Grèce, n°30696/09.

17 Page 5/7 du rapport d’entretien Dublin III.

18 Page 4/7 du rapport d’entretien Dublin III.

14 des demandeurs, au sens de l’article 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III.

L’argumentation afférente est dès lors à rejeter.

En ce qui concerne encore la crainte du demandeur d’un refoulement vers la République Démocratique du Congo, il y a tout d’abord lieu de préciser que suivant un arrêt de la CJUE du 30 novembre 202319, la juridiction de l’Etat membre requérant, saisie d’un recours contre une décision de transfert, ne peut examiner s’il existe un risque, dans l’Etat membre requis, d’une violation du principe de non-refoulement auquel le demandeur de protection internationale serait soumis à la suite de son transfert vers cet Etat membre, ou par suite de celui-ci, lorsque, tel que c’est le cas en l’espèce, cette juridiction ne constate pas l’existence, dans l’Etat membre requis, de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs d’une protection internationale. Des divergences d’opinions entre les autorités et les juridictions de l’Etat membre requérant, d’une part, et celles de l’Etat membre requis, d’autre part, en ce qui concerne l’interprétation des conditions matérielles de la protection internationale n’établissent pas l’existence de défaillances systémiques.

Par ailleurs et en tout état de cause, le tribunal se doit de relever que la décision entreprise n’implique pas un retour au pays d’origine, mais désigne uniquement l’Etat membre responsable pour le traitement de la demande de protection internationale, respectivement de ses suites, soit en l’espèce la Belgique, ce pays ayant, comme relevé ci-dessus, reconnu sa compétence pour reprendre en charge l’intéressé, ce point n’étant d’ailleurs pas contesté.

Le tribunal relève ensuite que le demandeur reste en défaut d’étayer concrètement l’existence dans son chef d’un risque d’être renvoyé dans son pays d’origine alors même qu’il y encourrait un risque sérieux de subir des traitements inhumains ou dégradants.

Il convient, dans ce contexte, de rappeler que la Belgique respecte a priori - le demandeur ne fournissant aucun indice tangible permettant au tribunal d’en douter - en tant que membre de l’Union européenne et signataire de ces conventions, les droits et libertés prévus par la CEDH, le Pacte international des droits civils et politiques ou la Convention torture, ainsi que, plus particulièrement, le principe de non-refoulement prévu par la Convention de Genève et que ledit Etat membre dispose d’un système de recours efficace contre les violations de ces droits et libertés, le règlement Dublin III qualifiant d’ailleurs explicitement, en son considérant 3, les Etats membres comme pays sûrs respectant le principe de non-refoulement (« À cet égard, et sans affecter les critères de responsabilité posés par le présent règlement, les États membres, qui respectent tous le principe de non-refoulement, sont considérés comme des pays sûrs par les ressortissants de pays tiers »).

A cela s’ajoute qu’il n’apparaît pas que la mise en œuvre d’une décision définitive de refus de protection internationale et de renvoi vers le pays d’origine constituerait en soi une violation du principe de non-refoulement, le règlement Dublin III visant précisément à lutter contre les demandes d’asile multiples (« asylum shopping ») en retenant le principe de l’examen de la demande par un seul Etat membre (« one chance only »). Le règlement Dublin III cherche, en effet, à pallier les mouvements secondaires des demandeurs d’asile qui souhaitent, pour différentes raisons, notamment au vu d’une jurisprudence nationale plus favorable, faire leur demande dans l’Etat membre de leur choix.

19 CJUE, 30 novembre 2023, affaires jointes C-228/21, C-254/21, C-297/21, C-315/21 et C-328/21.

15 S’il se dégage de l’extrait d’un rapport « COI FOCUS », publié par le Commissariat général aux réfugiés et apatrides en date du 25 octobre 2024, auquel le demandeur se contente également de renvoyer pour le surplus sans autre discussion en reproduisant un lien hypertexte afférent dans sa requête et dans les pièces versées à l’appui de celle-ci, qu’en 2023 et en 2024, un certain nombre de ressortissants congolais ont été rapatriés par les autorités belges à …, force est au tribunal de relever qu’il ne ressort toutefois pas des éléments soumis à l’appréciation du tribunal que tout ressortissant congolais ayant été débouté de sa demande de protection internationale en Belgique est renvoyé systématiquement et arbitrairement dans son pays d’origine par les autorités belges en violation de leurs obligations internationales et plus précisément du principe de non-refoulement, tel qu’entend le faire valoir le demandeur. En effet, la simple existence de rapatriements de ressortissants congolais, dont la situation personnelle ne se dégage pas autrement de l’extrait prémentionné, n’est pas de nature à laisser conclure automatiquement à une violation quelconque par la Belgique du principe de non-

refoulement.

Par ailleurs, il ne se dégage pas des éléments produits par le demandeur que si les autorités belges devaient décider de le rapatrier en violation des articles 3 de la CEDH, 4 de la Charte et 33 de la Convention de Genève, alors même qu’il serait exposé dans son pays d’origine à un risque concret et grave pour sa vie, il ne lui serait pas possible de faire valoir ses droits directement auprès des autorités belges en usant des voies de droit adéquates.

Dans ces circonstances, et compte tenu des éléments soumis au tribunal, il n’est pas non plus établi que le transfert du demandeur vers la Belgique exposerait ce dernier à un refoulement en cascade qui serait contraire au principe de non-refoulement ancré à l’article 33 de la Convention de Genève. Le moyen afférent est dès lors à rejeter.

S’agissant enfin du moyen tiré d’une violation de l’article 17, paragraphe (1) du règlement Dublin III, au motif de la non-application de la clause discrétionnaire y inscrite, il y a lieu de relever que ledit article prévoit ce qui suit : « Par dérogation à l’article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d’examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. […] ».

A cet égard, le tribunal précise que la possibilité, pour le ministre, d’appliquer cette disposition du règlement Dublin III relève de son pouvoir discrétionnaire, s’agissant d’une disposition facultative qui accorde un pouvoir d’appréciation étendu aux Etats membres20, le caractère facultatif du recours à la disposition en question ayant encore été souligné dans l’arrêt, précité, de la CJUE du 16 février 201721.

Un pouvoir discrétionnaire des autorités administratives ne s’entend toutefois pas comme un pouvoir absolu, inconditionné ou à tout égard arbitraire, mais comme la faculté qu’elles ont de choisir, dans le cadre des lois, la solution qui leur paraît préférable pour la satisfaction des intérêts publics dont elles ont la charge22, le juge administratif étant appelé, en matière de recours en réformation, non pas à examiner si l’administration est restée à l’intérieur de sa marge d’appréciation, une telle démarche s’imposant en matière de recours en annulation, 20 CJUE, 21 décembre 2011, N.S. e.a., C-411/10 et C-493/10, pt. 65.

21 CJUE, 16 février 2017, C. K., H. F., A.S. c. Republika Slovenija, n° C-578/16, pts. 88 et 97.

22 Trib. adm., 10 octobre 2007, n° 22641 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Recours en annulation, n° 64 (3e volet) et les autres références y citées.

16 mais à vérifier si son appréciation se couvre avec celle de l’administration et, dans la négative, à substituer sa propre décision à celle de l’administration23.

Pour se voir appliquer l’article 17, paragraphe (1) du règlement Dublin III, le demandeur invoque outre son risque d’être refoulé par les autorités belges vers son pays d’origine en méconnaissance du principe de non-refoulement, la fragilité de son état de santé mental et le fait qu’un transfert vers la Belgique ne ferait qu’accentuer ses troubles ce qui porterait atteinte à son intégrité psychique et physique.

Dans la mesure où le tribunal vient de retenir ci-avant dans le cadre de l’examen du bien-fondé de la décision entreprise que les prétentions du demandeur en relation avec sa crainte d’un retour forcé vers son pays d’origine qui serait contraire au principe de non-

refoulement ne sont pas fondées, il ne saurait valablement s’appuyer sur cette même argumentation pour se voir appliquer la clause de souveraineté.

Pour ce qui est de la prétendue fragilité de son état de santé mentale, le tribunal relève qu’outre le fait que celle-ci reste à l’état de pure allégation, l’intéressé n’en ayant d’ailleurs pas fait état au cours de la phase précontentieuse, il n’est de toute façon pas établi que si le demandeur devait effectivement avoir un quelconque problème de santé il ne pourrait pas avoir accès à un traitement adéquat en Belgique. Ce constat s’impose d’autant plus que le demandeur n'allègue pas avoir à un moment donné sollicité infructueusement l’aide ou l’assistance des autorités belges en raison de son état de santé.

A toutes fins utiles, il convient encore de souligner que le règlement Dublin III ne s’oppose de toute façon pas au transfert des personnes vulnérables, à savoir les personnes handicapées, les personnes âgées, les femmes enceintes, les mineurs et les personnes ayant été victimes d’actes de torture, de viol ou d’autres formes graves de violence psychologique, physique ou sexuelle, mais prévoit dans son article 32, paragraphe (1), premier alinéa une obligation à charge de l’Etat membre procédant au transfert de transmettre à l’Etat membre responsable des informations relatives aux besoins particuliers de la personne à transférer aux seules fins de l’administration de soins ou de traitements médicaux, et avec le consentement explicite de la personne concernée, de sorte qu’en cas de besoin, il pourra être tenu compte de l’état de santé de Monsieur (A) lors de l’organisation du transfert vers la Belgique par le biais de la communication aux autorités belges des informations adéquates, pertinentes et raisonnables le concernant conformément aux articles 31 et 32 du règlement Dublin III, à condition que l’intéressé exprime son consentement explicite à cet égard.

Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que le demandeur n’a pas mis en avant des raisons humanitaires ou exceptionnelles justifiant le recours à la clause discrétionnaire prévue à l’article 17, paragraphe (1) du règlement Dublin III, de sorte qu’il ne saurait être reproché au ministre de s’être mépris sur ses possibilités de choix et sur les limites de son pouvoir d’appréciation en ne faisant pas usage de ladite clause. Le moyen afférent est dès lors à rejeter pour ne pas être fondé.

A défaut d’autres moyens, le recours est à rejeter pour n’être fondé en aucun de ses moyens.

23 Cour adm., 23 novembre 2010, n° 26851C du rôle, Pas. adm. 2024, V° Recours en réformation, n°12 et les autres références y citées.

17 Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

condamne le demandeur aux frais et dépens.

Ainsi jugé par :

Alexandra Castegnaro, vice-président, Alexandra Bochet, vice-président, Melvin Roth, attaché de justice délégué, et lu à l’audience publique du 16 juin 2025 par le vice-président Alexandra Castegnaro, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Alexandra Castegnaro 18


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 52867
Date de la décision : 16/06/2025

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2025
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2025-06-16;52867 ?

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