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12/06/2025 | LUXEMBOURG | N°48411

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 12 juin 2025, 48411


Tribunal administratif N° 48411 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:48411 2e chambre Inscrit le 19 janvier 2023 Audience publique du 12 juin 2025 Recours formé par Monsieur (A), …, contre une décision du conseil communal d’Esch-sur-Sûre et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement général

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 48411 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 19 janvier 2023 par la société anonyme KRIEGER ASSOCIATES SA, inscrite sur la liste V du tableau de l’Ordr

e des avocats à Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2146 Luxembourg, 63-65...

Tribunal administratif N° 48411 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:48411 2e chambre Inscrit le 19 janvier 2023 Audience publique du 12 juin 2025 Recours formé par Monsieur (A), …, contre une décision du conseil communal d’Esch-sur-Sûre et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement général

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 48411 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 19 janvier 2023 par la société anonyme KRIEGER ASSOCIATES SA, inscrite sur la liste V du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2146 Luxembourg, 63-65, rue de Merl, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B240929, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Georges KRIEGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A), demeurant à L-…, tendant à l’annulation 1) de la « […] décision du conseil communal du 11 février 2022 portant approbation de la refonte du plan d’aménagement général de la commune d’Esch-sur-Sure […] » et 2) de la « […] décision de la ministre de l’Intérieur datée du 05 octobre 2022 portant approbation de la délibération du conseil communal datant du 11 février 2022 portant approbation de la refonte du plan d'aménagement général de la commune d’Esch-sur-Sure […] » ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Patrick MULLER, demeurant à Diekirch, du 20 janvier 2023, portant signification de ce recours à l’administration communale d’Esch-sur-

Sûre, ayant sa maison communale à L-9150 Eschdorf, 1, an der Gaass, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 6 février 2023 par Maître François MOYSE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 8 février 2023 par Maître Steve HELMINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale d’Esch-sur-Sûre, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 12 avril 2023 par Maître François MOYSE, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

1Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 20 avril 2023 par Maître Steve HELMINGER, au nom de l’administration communale d’Esch-sur-Sûre, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 22 mai 2023 par la société anonyme KRIEGER ASSOCIATES SA, au nom de Monsieur (A), préqualifié ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 14 juin 2023 par Maître Steve HELMINGER, au nom de l’administration communale d’Esch-sur-Sûre, préqualifiée ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 21 juin 2023 par Maître François MOYSE, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu les pièces versées en cause ainsi que les actes attaqués ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Sébastien COUVREUR, en remplacement de Maître Georges KRIEGER, Maître Steve HELMINGER et Maître François MOYSE en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 13 janvier 2025.

___________________________________________________________________________

Lors de sa séance publique du 3 juillet 2020, le conseil communal d’Esch-sur-Sûre, ci-

après désigné par le « conseil communal », émit un vote favorable, en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après désignée par « la loi du 19 juillet 2004 », sur le projet d’aménagement général et chargea le collège des bourgmestre et échevins, ci-après désigné par « le collège échevinal », de procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi du 19 juillet 2004.

Par courrier du 5 août 2020, Monsieur (A), agissant en sa qualité de propriétaire de deux parcelles inscrites au cadastre de la commune d’Esch-sur-Sûre sous les numéros (P1) et (P2), anciennement cadastrées sous les numéros (P3) et (P4), ci-après désignées par « la parcelle (P1) », respectivement par « la parcelle (P2) », soumit ses observations et objections à l’encontre dudit projet d’aménagement général au collège échevinal - lesquelles furent complétées par courrier recommandé avec accusé de réception de son litismandataire du 7 août 2020 - et sollicita que les parties de ses parcelles classées en zone de jardins familiaux [JAR], ci-après désignée par « zone [JAR] », et en zone agricole [AGR], ci-après désignée par « zone [AGR] », soient intégralement classées en zone d’habitation [HAB-1], ci-après désignée par « zone [HAB-1] ».

La commission d’aménagement émit son avis dans sa séance du 10 août 2021.

Lors de sa séance publique du 11 février 2022, le conseil communal décida à la lumière des avis et objections lui soumis, d’adopter le projet d’aménagement général. Pour ce qui est des objections de Monsieur (A), le conseil communal décida, suivant ce qui était indiqué dans le document annexé à sa délibération et comprenant un résumé des objections présentées au collège échevinal et du sort à y réserver, (i) d’« [a]dapter la limite de la zone HAB 1, y inclure l’emprise du hangar » et de « [m]aintenir [en partie les parcelles litigieuses] en zone agricole (zone verte), l’objectif du PAG projet est de ne pas autoriser d’extension du périmètre d’agglomération existant. ».

2Par courrier recommandé avec accusé de réception du 2 mars 2022, Monsieur (A) introduisit, par l’intermédiaire de son litismandataire, une réclamation auprès du ministre de l’Intérieur, ci-après désigné par « le ministre », à l’encontre de la susdite délibération du conseil communal du 11 février 2022 portant adoption du projet d’aménagement général et ayant statué sur les objections dirigées par les administrés à l’encontre de ce même projet.

Dans sa séance du 2 août 2022, la commission d’aménagement émit son avis sur les réclamations introduites auprès du ministre.

Par décision du 5 octobre 2022, le ministre approuva la délibération du conseil communal du 11 février 2022 portant adoption du projet d’aménagement général, tout en statuant sur les réclamations lui soumises, et déclara partiellement fondée la réclamation de Monsieur (A). Les passages de la décision ministérielle précitée se rapportant à cette réclamation sont libellés comme suit :

« […] Ad réclamation (A) (rec 23) Le réclamant sollicite l'intégration de la parcelle cadastrale n° (P3), sise à …, actuellement classée en zone agricole [AGR], en zone destinée à être urbanisée.

Le PAP « … » avait été approuvé par le Ministre de l’intérieur en 1989.

Dans cette logique, il convient d’adapter la délimitation de la zone destinée à être urbanisée.

Afin d'éviter l’implantation de constructions de taille trop élevée, il convient d’intégrer les parties situées à l’arrière des maisons implantées sur les parcelles cadastrales n°(P5), (P6),(P7), (P8) et (P3), en « zone de jardins familiaux [JAR]».

La réclamation est donc partiellement fondée.

La partie graphique est modifiée en conséquence comme suit : […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 19 janvier 2023, Monsieur (A) a fait introduire un recours tendant à l’annulation de la « […] décision du conseil communal du 11 février 2022 portant approbation de la refonte du plan d’aménagement général de la commune d’Esch-sur-Sure […] » et de la « […] décision de la ministre de l’Intérieur datée du 05 octobre 2022 portant approbation de la délibération du conseil communal datant du 11 février 2022 portant approbation de la refonte du plan d'aménagement général de la commune d’Esch-sur-Sure […] ».

I. Quant à la compétence du tribunal Le tribunal relève que les décisions sur les projets d’aménagement, lesquels ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’ils concernent et le régime des constructions à ériger, ont un caractère réglementaire. La décision d’approbation du ministre de l’Intérieur participe au caractère réglementaire de l’acte 3approuvé1, étant précisé qu’en ce qui concerne la procédure d’adoption du plan d’aménagement général (« PAG »), le caractère réglementaire ainsi retenu s’étend également au volet de la décision ministérielle du 5 octobre 2022 ayant statué sur la réclamation introduite par le demandeur, intervenue dans le processus général de l’élaboration de l’acte approuvé.

Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, désignée ci-après par « la loi du 7 novembre 1996 », seul un recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère réglementaire.

Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours en annulation sous examen.

II. Quant à la recevabilité du recours Dans son mémoire en réponse, la partie communale se rapporte à prudence de justice quant à la recevabilité du recours. S’il est exact que le fait, pour une partie, de se rapporter à prudence de justice équivaut à une contestation, il n’en reste pas moins qu’une contestation non autrement étayée est à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au juge administratif de suppléer à la carence des parties et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions2. Dès lors et dans la mesure où la partie communale est restée en défaut d’expliquer en quoi le recours serait irrecevable, ses contestations afférentes encourent le rejet.

A défaut d’autres moyens d’irrecevabilité à soulever, le cas échéant d’office, le tribunal conclut que le recours en annulation est à déclarer recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

III. Quant à la loi applicable Le tribunal précise que la procédure d’adoption d’un PAG est prévue par la loi du 19 juillet 2004. Or, celle-ci a été modifiée à plusieurs reprises et dernièrement (i) par une loi du 28 juillet 2011 entrée en vigueur, en application de son article 45, en date du 1er août 2011, (ii) par la loi du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire, publiée au Mémorial A, n° 160 du 6 septembre 2013, (iii) par la loi du 14 juin 2015 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, publiée au Mémorial A, n° 113 du 17 juin 2015, (iv) par la loi du 3 mars 2017 dite « Omnibus », entrée en vigueur, en application de son article 76, le 1er avril 2017, (v) par la loi du 17 avril 2018 concernant l’aménagement du territoire, (vi) par la loi du 18 juillet 2018 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, (vii) par la loi du 30 juillet 2021 relative au Pacte logement 2.0, entrée en vigueur le 1er janvier 2021, en application de l’article 16 de la loi en question, (viii) par la loi du 7 août 2023 relative au logement abordable et (ix) par la loi du 4 novembre 2024, publiée au Mémorial A, n° 449 du 7 novembre 2024.

Etant donné, d’une part, que le tribunal vient de retenir que seul un recours en annulation a pu être introduit à l’encontre de l’acte déféré et, d’autre part, que dans le cadre 1 Cour adm., 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2024, V° Actes réglementaires, n° 65 et les autres références y citées.

2 Trib. adm., 23 janvier 2013, n° 30455 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 930 et les autres références y citées.

4d’un tel recours, le juge administratif est amené à en apprécier la légalité en considération de la situation de droit et de fait ayant prévalu au jour où ils ont été pris3, les modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par les lois précitées du 7 août 2023 et du 4 novembre 2024, entrées en vigueur postérieurement à la délibération du conseil communal du 11 février 2022 portant adoption du projet d’aménagement général ne sont pas à prendre en considération en l’espèce, étant plus particulièrement précisé, à cet égard, que les actes de tutelle administrative, tels que la décision ministérielle litigieuse, rétroagissent à la date de la décision approuvée et tombent dès lors sous le champ d’application des lois en vigueur à la date de la prise de décision de l’acte initial.

Il s’ensuit que la version de la loi du 19 juillet 2004 applicable au présent litige est celle résultant des modifications opérées par les lois des 28 juillet 2011, 30 juillet 2013, 14 juin 2015, 3 mars 2017, 17 avril 2018, 18 juillet 2018 et 30 juillet 2021.

IV. Quant au fond Moyens des parties A l’appui de son recours et en fait, le demandeur explique être le propriétaire des parcelles inscrites au cadastre de de la commune d’Esch-sur-Sûre sous les numéros (P5), (P9), (P6), (P7), (P8), ci-après désignées par « les parcelles (P5), (P9), (P6), (P7), (P8) », ainsi que des parcelles (P1) et (P2) correspondant aux anciennes parcelles inscrites sous les numéros (P3) et (P4) dudit cadastre. Il fait valoir que toutes les prédites parcelles seraient impactées par les décisions déférées, de sorte que ces dernières lui causeraient grief.

Après avoir décrit, images cartographiques à l’appui, la situation factuelle des parcelles litigieuses, le demandeur expose, pour la bonne compréhension du dossier, un certain nombre d’éléments historiques. Il explique, dans ce contexte, qu’en 1979, sans préjudice quant à une date plus exacte, le PAG de l’ancienne commune de Neunhausen aurait été adopté en application de la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes et que le 29 décembre 1988, un plan d’aménagement particulier (« PAP ») concernant la parcelle inscrite au cadastre sous le numéro (P10), sise à … au lieu-dit « … » aurait été définitivement adopté par le conseil communal et approuvé par le ministre en date du 22 novembre 1989. Le demandeur continue en expliquant qu’à cette occasion, il aurait agrandi la profondeur de construction de la parcelle en question, destinée à être divisée en cinq lots, à savoir les lots désignés par les lettres A, B, C, D, respectivement E. Il insiste, à cet égard, sur le fait que l’existence du prédit PAP serait primordiale, dans la mesure où avant la loi du 19 juillet 2004, la législation n’aurait pas fait de distinction entre le PAG et le PAP, alors qu’aucune hiérarchie n’aurait existé entre ces deux outils. Etant donné qu’avant l’entrée en vigueur de la loi du 19 juillet 2004, un PAG aurait, dès lors, pu être modifié par un PAP, le plan d’aménagement le plus récent aurait automatiquement modifié le plan antérieur sur base du principe « Lex posterior derogat priori ». Le demandeur donne, dans ce contexte, à considérer qu’en vertu du prédit PAP, sa parcelle aurait été située en zone constructible et divisée en cinq lots, de sorte qu’il serait établi que ledit PAP avait nécessairement modifié le PAG en question.

Il expose ensuite que dans les années 2004-2005, l’ancienne commune de Neunhausen 3 Trib. adm., 27 janvier 1997, n° 9724 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Recours en annulation, n° 52 et les autres références y citées.

5aurait entamé la refonte de son PAG conformément aux exigences de la loi du 19 juillet 2004 et en application des règlements grand-ducaux de l’époque, à savoir notamment le règlement grand-ducal du 25 octobre 2004 concernant le contenu du plan d’aménagement général d’une commune. Le demandeur avance avoir, à cette occasion, introduit une réclamation en sollicitant que ses deux parcelles, correspondant aux deux lots dénommés « F » et « G » (dans le prolongement des lots numérotés par les lettres « A » à « E » repris dans le PAP susmentionné), soient reclassées de la zone verte en zone constructible. Il continue en expliquant que le conseil communal de l’ancienne commune de Neunhausen aurait été d’accord avec le prédit reclassement, alors que des autorisations de construire auraient été délivrées par rapport aux parcelles en cause, classées antérieurement partiellement en zone verte.

Il affirme, ensuite, que par décision du 11 mai 2007, le ministre de l’Environnement de l’époque aurait refusé d’approuver le projet d’aménagement général de la commune de Neunhausen, tel qu’adopté provisoirement par le conseil communal le 19 décembre 2005, tout en précisant que ledit refus d’approbation aurait porté sur des points spécifiques qui n’auraient pas concerné ses parcelles. Le demandeur indique, par ailleurs, être d’avis que les lots désignés par les lettres « F » et « G » auraient valablement été classés en zone constructible à l’époque, tout en faisant valoir que, mis à part les modifications de la zone verte qui auraient été rejetées par le ministre de l’Environnement de l’époque, la partie graphique du PAG actualisé classerait les prédits lots « F » et « G », où à tout le moins une partie de ceux-ci, en zone constructible.

Le demandeur continue en exposant qu’à travers la loi du 24 mai 2011 portant fusion des communes d’Esch-sur-Sûre, de Heiderscheid et de Neunhausen, les localités de Neunhausen, d’Esch-sur-Sûre et de Heiderscheid auraient été réunies dans une même entité administrative, tout en indiquant que selon l’article 5 de ladite loi « [l]es règlements communaux qui existent dans les communes au jour de la fusion sont maintenus en vigueur pour le territoire pour lequel ils ont été édictés jusqu’à leur remplacement par des règlements communs ».

Il fait valoir qu’en juillet 2020, la procédure de refonte globale du PAG de la commune d’Esch-sur-Sûre aurait été entamée, tout en insistant sur le fait que le projet de PAG y relatif lui aurait porté préjudice à deux niveaux, dans la mesure où la partie arrière des lots désignés par les lettres « A » à « E » aurait été partiellement reclassée en zone verte, tandis que les lots désignés plus particulièrement par les lettres « F » et « G » auraient été, quant à eux, purement et simplement reclassés en zone verte. Le demandeur explique avoir, en conséquence, fait valoir, tant par courrier du 5 août 2020 qu’en personne, ses objections auprès du collège des échevinal, objections qui auraient pointé l’absence, dans le cadre de l’élaboration du projet de PAG en question, de prise en considération (i) du « PAP existant », c’est-à-dire du PAP approuvé par le ministre de l’époque en date du 22 novembre 1989, ainsi que (ii) de l’ancien PAG de la commune de Neunhausen.

Le demandeur explique ensuite que son litismandataire aurait, en complément de ses objections du 5 août 2020, encore fait valoir des objections supplémentaires en date du 7 août 2020 et qu’il aurait ensuite formulé, en son nom et pour son compte, une réclamation auprès du ministre, tout en faisant valoir que celui-ci n’aurait, dans sa décision du 5 octobre 2022, pas tenu compte de la délimitation de la zone constructible suivant le PAG anciennement en vigueur ni statué sur la demande relative au maintien en vigueur du PAP de 1989, de sorte que le reclassement des parcelles litigieuses pour partie en zone [JAR] ne correspondrait ni au PAP de 1989, ni à la demande qu’il aurait formulée.

6En droit, le demandeur, après avoir cité l’article 108 de la loi du 19 juillet 2004, soutient que dans le cadre de la refonte de son PAG, la commune aurait été confrontée à deux choix concernant les terrains « concerné[s] par un PAP approuvé », à savoir le choix de soit abroger ledit PAP, soit de le maintenir en vigueur.

Etant donné que la commune ne se serait pas prononcée concernant le sort du PAP en question, qui aurait pourtant été approuvé tant par le conseil communal que par le ministre, tel que pré-exposé, le demandeur conclut que la commune aurait « occulté », respectivement ignoré l’existence de ce PAP, de sorte qu’elle aurait commis une erreur de fait et de droit, alors qu’elle aurait méconnu non seulement le prédit article 108 de la loi du 19 juillet 2004, mais également le principe constitutionnel d’égalité devant la loi prévu à l’article 10bis de la Constitution, dans sa version en vigueur jusqu’au 1er juillet 2023, alors que « d’autres PAP en vigueur » auraient été maintenus, sans que les raisons pour lesquelles le conseil communal avait décidé de ne pas tenir compte du PAP concernant les parcelles en cause ne soient connues.

Le demandeur donne, à cet égard, à considérer que si « cette erreur de fait et de droit » n’avait pas été commise par le conseil communal, et que celui-ci avait décidé de prendre en compte le PAP existant de 1989, il ne se serait pas retrouvé dans une situation défavorable, caractérisée par le classement d’une partie de ses parcelles en zone [JAR]. Il ajoute qu’au vu du fait que l’erreur commise par la commune en début de procédure ne serait plus redressable, les décisions litigieuses seraient à annuler.

En deuxième lieu, le demandeur réitère qu’il aurait initié une « procédure de PAP » en 1988 qui aurait abouti à l’adoption d’un PAP en 1989. Il avance, dans ce contexte, qu’en vertu du principe de confiance légitime, l’administration communale ne pourrait pas procéder à des « changements brusques et imprévisibles » dans la mesure où l’administré serait en droit de se fier au comportement de ladite administration. Il soulève, dans ce contexte, une violation du prédit principe de confiance légitime en réitérant qu’un PAP portant sur la parcelle (P3) aurait été définitivement adopté par le conseil communal en date du 29 décembre 1988 et approuvé par le ministre de l’Intérieur de l’époque en date du 22 novembre 1989, sans que la commune n’en ait tenu compte dans le cadre de la refonte du PAG actuellement litigieux.

Le demandeur avance que malgré le fait qu’il ait sollicité l’intégration de ses parcelles dans la zone urbanisée, ce qui aurait été dans l’esprit du PAP en question, le conseil communal aurait décidé de maintenir les parcelles en zone [AGR], au motif que « l’objectif du PAG projet est de ne pas autoriser d’extension du périmètre d’agglomération existant », de sorte à avoir méconnu le principe de confiance légitime.

Il ajoute, dans ce contexte, que bien que le ministre ait eu conscience de « la problématique » relative aux parcelles litigieuses, il aurait décidé de procéder au reclassement d’une partie de ses parcelles en zone [JAR], zone qui ne constituerait certes pas une zone verte, « mais qui ne serait pas aussi flexible qu’une zone d’habitation par exemple ». Il s’ensuivrait que l’erreur commise par la commune n’aurait plus pu être redressée au niveau ministériel, de sorte que les décisions déférées seraient à annuler.

En dernier lieu, le demandeur conclut à une violation de l’article 16 de la Constitution, dans sa version en vigueur jusqu’au 1er juillet 2023. Il réitère une nouvelle fois que la commune de Neunhausen aurait adopté un PAG le 18 mai 2006 dans lequel une partie de la parcelle (P3) et une partie de la parcelle (P4) auraient été classées en zone constructible et plus particulièrement en zone [HAB-1], tout en faisant valoir que bien que ledit PAG aurait été approuvé par le ministre de l’Intérieur de l’époque, il aurait cependant été partiellement rejeté 7par le ministre de l’Environnement de l’époque.

Le demandeur avance, dans ce contexte, que la commune de Neunhausen aurait toujours considéré que le PAG en question avait valablement été adopté, nonobstant le refus d’approbation partiel du prédit ministre de l’Environnement, tout en insistant plus particulièrement sur le fait que ladite commune aurait délivré des autorisations « sur cette parcelle » dès 2006, portant sur la réalisation d’un garage, d’une terrasse ou encore d’un abri de jardin.

Au vu de ces considérations, le demandeur conclut qu’il serait démontré que la commune aurait considéré « cette zone » comme étant constructible, respectivement comme étant à urbaniser. Il se réfère, à cet égard, à nouveau à l’article 5 de la loi du 24 mai 2011 portant fusion des communes d’Esch-sur-Sûre, de Heiderscheid et de Neunhausen pour faire valoir que le classement en zone [AGR] d’une partie des parcelles (P3) et (P4), ayant été classées sous l’empire de l’ancien PAG en zone [HAB-1], constituerait un reclassement en zone verte d’une zone qui aurait antérieurement été constructible. Il estime que selon la jurisprudence des juridictions administratives, un tel reclassement devrait être justifié par une motivation « particulièrement forte », tout en donnant à considérer que l’article 16 de la Constitution exigerait, pour sa part, l’invocation de motifs relatifs à l’utilité publique.

Le demandeur conclut finalement qu’étant donné que « par définition » de tels motifs ne sauraient - en raison du fait que tant la commune que le ministre seraient partis du postulat erroné qu’il aurait sollicité une extension du périmètre d’agglomération, alors qu’il aurait, en réalité, sollicité la « réintégration des limites constructibles prévues tantôt par le PAP de 1989, tantôt par l’ancien PAG régime 2004 de la commune de Neunhausen » - exister en l’espèc, les décisions déférées encourraient l’annulation.

Dans son mémoire en réplique, le demandeur, en s’appuyant sur différentes autorisations de construire versées en cause, explique que la première autorisation de construire aurait été délivrée le 19 mars 1996 pour la construction d’une maison d’habitation sur la parcelle (P3). Il s’ensuivrait que cette autorisation lui aurait été accordée au moment où cette parcelle aurait encore été « soumise au PAP de 1989 » et, dès lors, classée en zone constructible. Le même constat s’imposerait concernant l’autorisation de bâtir accordée en date du 15 juillet 2002 pour la construction d’un garage, le demandeur affirmant que cette autorisation de construire lui aurait également été délivrée alors que la parcelle en question aurait encore été classée en zone constructible.

Le demandeur avance, dans ce contexte, qu’afin de déterminer le classement des parcelles (P1) et (P2), il y aurait lieu de se référer à la partie graphique du PAG en vigueur et actualisé de la commune de … d’avril 2015, tout en précisant que le ministre de l’Environnement de l’époque n’aurait pas refusé « l’approbation de ces extensions de périmètres approuvées par le conseil communal ». Il estime qu’étant donné que le ministre de l’Environnement disposerait, en matière de PAG, d’une compétence tutélaire d’approbation qui se limiterait « aux modifications des limites de la zone verte », alors qu’il n’aurait aucune compétence pour approuver ni pour rejeter un PAG dans sa globalité, les lots désignés par les lettres « F » et « G » auraient valablement été classés en zone constructible suivant le PAG de 2006, ce que la commune aurait, par ailleurs, explicitement reconnu, en reprenant « ledit classement dans son PAG actualisé de 2015… ». Le demandeur donne, à cet égard, encore à considérer que ce ne serait pas parce que le ministre de l’Environnement se serait trompé dans sa décision du 23 janvier 2023 quant à « la nécessité d’approuver une modification des limites 8dans la zone verte qui n’en était pas une », qu’il serait démontré que les lots désignés par les lettres « F » et « G » n’auraient pas été auparavant classés en zone constructible.

Concernant, ensuite, les photos versées par la partie communale à l’appui de son mémoire en réponse, censées témoigner de la « beauté du paysage » justifiant le classement des parcelles litigieuses en zone verte, le demandeur fait valoir que la commune aurait volontairement omis de photographier la station de pompage se trouvant en face de son terrain et qui serait « moins appréciable à la vue », tout en ajoutant, dans ce contexte, que si ladite station de pompage avait pu être construite à cet endroit, ce serait parce qu’en tant que propriétaire limitrophe, il ne s’y serait pas opposé « d’autant plus qu’une partie des lots F et G venaient d’être incorporés dans le nouveau PAG ».

En se référant à trois photos reproduites dans son mémoire en réplique, le demandeur donne à considérer que les « ambitions touristiques » et une prétendue volonté de préserver l’environnement seraient placées au-dessus des intérêts des habitants du village, tout en précisant que la dernière des trois photos aurait été prise à l’endroit qui aurait offert « jusque-

là » la plus belle vue sur le lac du village et que ladite vue serait désormais « totalement défiguré[e] ».

Le demandeur explique, dans ce contexte, que « la construction » sur laquelle les élus locaux se seraient accordés abriterait un restaurant « takeout » et des WC publics, lesquelles ne seraient, par ailleurs, pas nécessaires à cet endroit, puisque d’autres WC existeraient en nombre suffisant dans un périmètre très proche. Il ajoute que pour le restaurant « take-out », aucun parking ne serait prévu en raison du fait que « les auteurs du projet » auraient estimé que les clients dudit restaurant s’y rendraient à pied, tout en faisant valoir que « [l]a réalité sera toutefois différente et l’avenir le prouvera ».

Monsieur (A) donne encore à considérer que certains équipements publics auraient « confortablement trouvé […] leurs places dans cet écrin de verdure » sans que cela n’ait dérangé les autorités publiques, tout en contestant la conclusion de la commune suivant laquelle le classement des parcelles (P1) et (P2) en zone constructible « relèverait d’une aberration urbanistique ». Il est, plus particulièrement, d’avis qu’une telle affirmation péremptoire, subjective et non étayée, serait dénuée de tout fondement, alors que la présence d’habitations et par conséquent d’habitants, permettrait justement d’entretenir le paysage bucolique de la localité, de sorte que le classement de terrains privés en zone verte aurait pour conséquence l’abandon desdits terrains, ce qui serait justement de nature à nuire au paysage, en raison du fait que la végétation s’y développerait de manière « anarchique ».

Le demandeur affirme ensuite que ses arguments, tels que formulés dans sa requête introductive d’instance, ne seraient pas contredits par les parties communale et étatique. Il explique, à cet égard, que le « problème » qu’il aurait invoqué en l’espèce ne serait pas lié au fait que la commune ait choisi d’abroger le PAP de 1989 - ce qui aurait effectivement été une possibilité lui étant légalement accordée dans la mesure où elle ne serait pas soumise à l’obligation de maintenir en vigueur les anciens PAP suite à la refonte du PAG - mais au fait qu’elle ait ignoré ledit PAP de 1989 et n’en aurait donc, en toute logique, pas tenu compte. Il précise, à cet égard, que la commune, étant donné qu’elle aurait ignoré l’existence du prédit PAP, n’aurait ni décidé de conserver ledit PAP, ni de l’abroger, de sorte qu’elle n’aurait de facto pas statué sur la question du maintien en vigueur du PAP en question et n’aurait dès, lors, pas respecté l’article 108 de la loi du 19 juillet 2004.

9Le demandeur reproche, dans ce contexte, à la commune de se contredire, en ce que celle-ci estime que le prédit PAP de 1989 aurait été abrogé suite à l’entrée en vigueur du PAG de 2006. Il donne, à cet égard, à considérer qu’il n’existerait que deux solutions : soit le PAG de 2006 serait entré en vigueur, soit il ne serait pas entré en vigueur. Il ajoute que s’il était retenu en l’espèce que le PAG de 2006 était entré en vigueur, celui-ci aurait de facto abrogé le PAP de 1989, de sorte qu’il y aurait lieu de considérer que les lots désignés par les lettres « F » et « G » ont été reclassés en zone constructible suite à l’entrée en vigueur du PAG de 2006.

Monsieur (A) est cependant d’avis que quoiqu’il en soit, les deux hypothèses aboutiraient, concernant le classement de ses parcelles pour partie en zone [JAR], à la même conclusion :

suivant le PAP de 1989, mais également suivant le « PAP de 2000 », l’intégralité des lots désignés par les lettres « A », « B », « C », « D » et « E » auraient été classés dans la zone constructible, y compris donc la partie arrière desdits lots, désormais classés en zone [JAR].

Etant donné que l’intégralité des lots désignés par les lettres « A » à « E », de même que les lots dénommés « F » et « G » auraient été classés, sous le PAG de 2006, en zone [HAB-1], le demandeur estime que ce serait à bon droit qu’il réclamerait qu’une partie de la parcelle (P1), désormais classée en zone [JAR], aurait dû être classée en zone [HAB-1], conformément au PAP de 1989, au « PAP de 2000 » et au PAG de 2006.

Monsieur (A) ajoute, dans ce contexte, que le ministre, statuant en tant qu’autorité de tutelle, aurait des pouvoirs limités, de sorte qu’il ne pourrait pas porter atteinte à des compétences réservées à l’autorité communale en vertu du principe de l’autonomie locale, tout en donnant à considérer qu’au vu du fait que celui-ci aurait constaté à juste titre dans sa décision du 5 octobre 2022 que « « [l]e PAP … » a été approuvé par le Ministre de l’Intérieur en 1989 » et que « [d]ans cette logique, il convient d’adapter la délimitation de la zone destinée à être urbanisée », il ne lui serait plus loisible de maintenir en vigueur ledit PAP dans la mesure où ce choix appartiendrait à l’autorité communale en application de l’article 108 de la loi du 19 juillet 2004.

Concernant son moyen ayant trait à une violation du principe de confiance légitime, le demandeur affirme que ce principe se rencontrerait tout au long de « l’historique de cette affaire, dans laquelle la commune a[urait] changé son fusil d’épaule et ses visions urbanistiques à plusieurs reprises ». Il soutient, dans ce contexte, que la violation du principe de confiance légitime viserait tant le classement d’une partie de ses parcelles en zone [JAR] que le classement des lots désignés par les lettres « F » et « G » en zone verte, tout en réitérant que, concernant le classement d’une partie des parcelles litigieuses en zone [JAR], l’incohérence des décisions communales serait illustrée par les PAP de 1989 et de 2000, ainsi que par le PAG de 2006 qui auraient intégré « la désormais zone JAR en zone constructible respectivement en zone d’habitation 1 ».

Concernant le classement des lots désignés par les lettres « F » et « G » en zone verte, le demandeur réitère que suite à sa réclamation introduite le 10 février 2006, le lot dénommé « G », c’est-à-dire l’ancienne parcelle (P3) et l’actuelle parcelle (P2), aurait été partiellement reclassé en zone [HAB-1] par décision du conseil communal du 18 mai 2006, tout en précisant qu’à ce moment-là, il n’aurait nullement été question pour la commune de plaider une soi-

disant « aberration urbanistique » d’un tel classement puisque le conseil communal y aurait fait droit.

Il réitère, à cet égard, que le principe de confiance légitime viserait précisément à éviter des changements brusques d’attitude de la part des autorités publiques, sous réserve que ces changements d’attitude soient motivés par des évolutions factuelles ou législatives justifiant un 10revirement, le demandeur faisant, dans ce contexte, plus particulièrement valoir que la commune n’aurait, en l’espèce, nullement mis en avant des considérations factuelles ou juridiques qui justifieraient « que ce qui [aurait été] valable en 2006, ne le serait plus en 2022 ».

Concernant, en dernier lieu, le moyen relatif à la violation de l’article 16 de la Constitution, dans sa version en vigueur jusqu’au 1er juillet 2023, le demandeur estime que les affirmations des parties communale et étatique, suivant lesquelles les prédits lots désignés par les lettres « F » et « G » n’auraient jamais fait l’objet d’un classement en zone constructible, seraient erronées. Monsieur (A) pointe, dans ce contexte, le fait que la partie étatique aurait affirmé que « les lots F et G n’ont jamais fait l’objet d’une décision officielle et n’ont jamais été classés en zone constructible », de sorte qu’elle aurait ainsi purement et simplement nié l’existence de la décision du conseil communal du 18 mai 2006 ayant classé les prédits lots en zone constructible.

Le demandeur avance encore que certaines modifications relatives aux délimitations de la zone verte, opérées suivant la délibération du conseil communal du 18 mai 2006, n’auraient pas été approuvées par le ministre de l’Environnement de l’époque, tout en donnant à considérer qu’il se serait agi « de projet[s] de reclassement de certaines parties du territoire communal en zone de sports et loisirs respectivement en zone artisanale, ou encore en zone mixte ». Il fait valoir que le classement en zone constructible des lots désignés par les lettres « F » et « G » opéré à travers la décision du conseil communal du 18 mai 2006 aurait fait droit à sa réclamation et n’aurait pas fait l’objet d’un refus d’approbation suivant la décision précitée du ministre de l’Environnement de l’époque. Il affirme, à cet égard que la partie graphique du PAG de … d’avril 2015 indiquerait sans équivoque que l’intégralité du lot désigné par la lettre « F » et une partie du lot désigné par la lettre « G » auraient été classées en zone [HAB-1], lots qui auraient, cependant, par la suite, été reclassés en zone verte. Etant donné qu’aucun argument particulièrement fort ne serait invoqué par les autorités communale et étatique pour justifier ce classement en zone verte et qu’au contraire, ledit classement serait incohérent par rapport aux décisions prises par la commune dans le passé, le demandeur conclut à l’annulation des décision déférées.

La commune, de même que la partie étatique, concluent, quant à elles, au rejet du recours pour ne pas être fondé.

Analyse du tribunal A titre liminaire, le tribunal relève que sur question afférente posée à l’audience des plaidoiries, le litismandataire du demandeur a, par courrier électronique du 20 janvier 2025 adressé au greffe du tribunal administratif, informé le tribunal que son mandant est uniquement propriétaire des parcelles (P1) et (P2) et que son recours est circonscrit au seul classement desdites parcelles, de sorte que l’analyse du tribunal portera sur les seules contestations dirigées à l’encontre du classement des prédites parcelles (P1) et (P2), dont il est le propriétaire.

Le tribunal relève ensuite qu’il lui appartient de déterminer la suite du traitement des moyens et arguments des parties compte tenu de la logique juridique dans laquelle ils s’inscrivent, sans être lié par l’ordre dans lequel les moyens ont été présentés par les parties.

1) Quant aux contestations ayant trait à la justification avancée à la base du classement opéré 11 Il y a d’abord lieu de relever que les autorités communales, lorsqu’elles initient des modifications de leurs plans d’aménagement, doivent être mues par des considérations légales d’ordre urbanistique ayant trait à l’aménagement des agglomérations et d’ordre politique tirées de l’organisation de la vie en commun sur le territoire donné, tendant les unes et les autres à une finalité d’intérêt général et dans ce contexte, lesdites autorités doivent veiller tant à la conservation de l’esthétique urbaine qu’au développement rationnel des agglomérations4.

Dans ce contexte, il y a lieu d’insister sur le fait que, saisi d’un recours en annulation, le juge administratif est appelé à vérifier, d’un côté, si, au niveau de la décision administrative querellée, les éléments de droit pertinents ont été appliqués et, d’un autre côté, si la matérialité des faits sur lesquels l’autorité de décision s’est basée est établie. Au niveau de l’application du droit aux éléments de fait, le juge de l’annulation vérifie encore s’il n’en est résulté aucune erreur d’appréciation se résolvant en dépassement de la marge d’appréciation de l’auteur de la décision querellée. Le contrôle de légalité à exercer par le juge de l’annulation n’est pas incompatible avec le pouvoir d’appréciation de l’auteur de la décision qui dispose d’une marge d’appréciation. Ce n’est que si cette marge est dépassée que la décision prise encourt l’annulation pour erreur d’appréciation. Ce dépassement peut notamment consister dans une disproportion dans l’application de la règle de droit aux éléments de fait. Le contrôle de légalité du juge de l’annulation s’analyse alors en contrôle de proportionnalité5.

S’il est certes vrai que le choix d’entériner ou de ne pas entériner la modification d’un plan d’aménagement relève d’une dimension politique et échappe comme tel au contrôle des juridictions de l’ordre administratif saisies d’un recours en annulation, il n’en demeure pas moins que tout acte administratif doit reposer sur un motif dont le juge administratif vérifie tant l’existence que la légalité. Cette exigence découle du fait que le juge administratif a l’obligation de vérifier si les autorités administratives compétentes n’ont pas violé la loi, commis un excès de pouvoir ou un détournement de pouvoir et cette obligation de motivation existe également pour les actes à caractère réglementaire qui, quoique discrétionnaires, doivent être pris dans l’intérêt général, de sorte qu’il importe que les autorités administratives compétentes fassent connaître le ou les motifs qui les ont guidées dans leur décision6, le contrôle exercé par le juge de l’annulation ne portant dès lors pas sur l’opportunité, mais sur la réalité et la légalité des motifs avancés.

Quant aux objectifs devant guider les autorités communales lorsqu’elles initient des modifications de leurs plans d’aménagement, ainsi que l’autorité ministérielle, dans le cadre de l’exercice de son contrôle tutélaire, il y a lieu de se référer à l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, aux termes duquel : « Les communes ont pour mission de garantir le respect de l’intérêt général en assurant à la population de la commune des conditions de vie optimales par une mise en valeur harmonieuse et un développement durable de toutes les parties du territoire communal par:

(a) une utilisation rationnelle du sol et de l’espace tant urbain que rural en garantissant la complémentarité entre les objectifs économiques, écologiques et sociaux ;

(b) un développement harmonieux des structures urbaines et rurales, y compris les 4 Trib. adm., 20 octobre 2004, n° 17604 du rôle, Pas. adm. 2024, Urbanisme, n° 220 et les autres références y citées.

5 Cour adm., 9 novembre 2010, n° 26886C du rôle, Pas. adm. 2024, Recours en annulation, n° 42 et les autres références y citées.

6 Trib. adm., 23 mars 2005, n° 18463 du rôle, Pas. adm. 2024, Actes réglementaires, n° 37 et les autres références y citées.

12réseaux de communication et d’approvisionnement compte tenu des spécificités respectives de ces structures, et en exécution des objectifs de l’aménagement général du territoire ;

(c) une utilisation rationnelle de l’énergie, des économies d’énergie et une utilisation des énergies renouvelables ;

(d) le développement, dans le cadre des structures urbaines et rurales, d’une mixité et d’une densification permettant d’améliorer à la fois la qualité de vie de la population et la qualité urbanistique des localités ;

(e) le respect du patrimoine culturel et un niveau élevé de protection de l’environnement naturel et du paysage lors de la poursuite des objectifs définis ci-dessus ;

(f) la garantie de la sécurité, la salubrité et l’hygiène publiques. ».

L’article 6 de la loi du 19 juillet 2004 prévoit, quant à lui, que « Le plan d’aménagement général a pour objectif la répartition et l’implantation judicieuse des activités humaines dans les diverses zones qu’il arrête aux fins de garantir le développement durable de la commune sur base des objectifs définis par l’article 2 de la loi. ».

Il convient encore de noter que la décision d’adopter, respectivement de procéder à la refonte d’un PAG est, dans son essence même, prise dans l’intérêt général, cette caractéristique étant présumée jusqu’à preuve du contraire7.

Par ailleurs, il échet de rappeler que la mutabilité des PAG relève de leur essence même, consistant à répondre à des contraintes variables à travers le temps concernant à la fois les aspects urbanistiques de l’aménagement des agglomérations et le volet politique de la vie en commun sur le territoire donné8. Il s’ensuit qu’en se fondant sur des considérations d’ordre urbanistique correspondant à une finalité d’intérêt général, les autorités communales peuvent procéder à des modifications de leur règlementation urbanistique, pourvu toutefois que la décision soit proportionnelle à son objectif et qu’elle soit dépourvue d’un dépassement dans le chef des autorités compétentes de leur marge d’appréciation, analyse qui sera effectuée ci-

après.

Dans un souci de clarté et de compréhension, le tribunal est, en premier lieu, amené à analyser la situation urbanistique des parcelles (P1) et (P2), anciennement cadastrées sous les numéros (P3) et (P4), parcelles ayant été, selon les explications du demandeur, intégrées, en 1989, dans un PAP divisé en sept lots, à savoir les lots dénommées « A », « B », « C », « D », « E », « F » et « G ».

Le tribunal se doit, à cet égard, de relever que Monsieur (A) part de la prémisse erronée que les deux parcelles en cause avaient, sous l’égide du prédit PAP, chacune fait l’objet d’un lot, en l’occurrence les lots dénommés respectivement « F » et « G ».

Force est en effet au tribunal de constater qu’il se dégage des pièces versées en cause et plus particulièrement de l’extrait graphique du PAP de 1989, que les parcelles litigieuses avaient, certes, été incluses dans l’assiette du prédit PAP de 1989 mais qu’en vertu des délimitations des sept lots repris dans ledit extrait graphique, ensemble les délimitations des parcelles litigieuses reproduites dans la partie graphique du PAG sous analyse, le lot dénommé « E » du prédit PAP de 1989 constitue, de l’entendement du tribunal, également une partie de 7 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, Pas. adm. 2024, Recours en annulation, n° 11 et les autres références y citées.

8 Trib. adm., 7 mars 2001, n° 12233 du rôle, confirmé par Cour adm., 20 décembre 2001, n° 13291C du rôle, Pas.

adm. 2024, Urbanisme, n° 234 (1er volet) et les autres références y citées.

13l’actuelle parcelle (P1). Ce constat est corroboré par le fait que (i) ledit lot dénommé « E », était, suivant l’extrait graphique dudit PAP de 1989, destiné à accueillir des constructions, étant, à cet égard, précisé que la parcelle (P1) accueille actuellement une construction et (ii) les explications du demandeur contenues dans son courrier du 5 août 2022 relatif aux objections présentées au collège échevinal - explications à travers lesquelles il entend cerner l’objet de ces dernières en précisant l’étendue du terrain duquel il est propriétaire - portent notamment sur le lot ayant été dénommé « E » dans le PAP de 1989 en question.

Au vu de ce qui précède, il y a lieu de retenir que les délimitations des lots dénommés « E » et « F » dans le prédit PAP de 1989 correspondent aux délimitations de l’actuelle parcelle (P1), tandis que les délimitations du lot dénommé « G », correspondent, quant à elles, aux délimitations de l’actuelle parcelle (P2).

Il échet ensuite de relever que dans le cadre du PAG sous analyse, il a été décidé de classer (i) la parcelle (P1) pour partie en zone [HAB-1] et pour partie en zone [JAR] (correspondant au lot dénommé « E »), ainsi que pour partie en zone [AGR] (correspondant au lot dénommé « F ») et (ii) la parcelle (P2) entièrement en zone [AGR] (correspondant au lot dénommé « G »). Le demandeur conteste, en l’espèce et de l’entendement du tribunal, le classement de la parcelle (P1) pour partie en zone [JAR] et pour partie en zone [AGR], ainsi que le classement de la parcelle (P2) en zone [AGR] et sollicite le classement de l’entièreté de ses parcelles en zone constructible et, toujours de l’entendement du tribunal, plus particulièrement en zone [HAB-1].

Concernant, en premier lieu, le classement pour partie de la parcelle (P1) (lot dénommé « F »), ainsi que celui de l’entièreté de la parcelle (P2) (lot dénommé « G ») en zone [AGR], le tribunal est amené à relever que la commune, dans sa décision du 11 février 2022, a justifié le prédit classement en zone [AGR] par le fait que « l’objectif du PAG projet est de ne pas autoriser d’extension du périmètre d’agglomération existant », la partie communale ayant encore, dans le cadre de la présente instance, fait valoir que le classement en zone [AGR], du moins en partie en ce qui concerne la parcelle (P1) et intégralement pour ce qui est la parcelle (P2), se justifierait par le souci d’éviter un développement tentaculaire à l’extérieur de la zone urbanisée, respectivement à l’extrémité de la localité de ….

Si le demandeur argue qu’un classement en zone constructible des lots dénommés « F » et « G » s’imposerait en l’espèce au motif qu’« un classement en zone verte de terrains privés laisserait ceux-ci à l’abandon, de sorte justement à nuire au paysage, alors que la végétation s’y développerait de manière anarchique », il convient toutefois de relever, en ce qui concerne les considérations urbanistiques mises en avant par la commune pour refuser de faire droit à la demande de reclassement des parcelles litigieuses en zone constructible formulée par Monsieur (A), que l’accent mis sur un développement concentrique d’une agglomération par exclusion, dans la mesure du possible, de toute excroissance d’ordre tentaculaire ou désordonnée répond à des considérations légales d’ordre urbanistique ayant trait à l’aménagement des agglomérations de nature à tendre à confluer de manière utile avec l’organisation de la vie en commun sur le territoire donné et est de nature à tendre à une finalité d’intérêt général9.

Le tribunal relève ensuite qu’il ressort tant de la partie graphique du PAG sous analyse que des photos reproduites dans le mémoire en réponse de la partie communale que les 9 Trib. adm., 4 décembre 2002, n° 14923 du rôle, confirmé par Cour adm., 1er juillet 2003, n° 15879C du rôle, Pas. adm. 2024, Urbanisme, n° 189 et les autres références y citées.

14parcelles litigieuses sont situées à l’extrémité de la localité de …, le long de la route de …. S’il ressort certes encore de la partie graphique du PAG que lesdites parcelles sont, pour partie et à leur extrémité sud-ouest, attenantes à une zone d’habitation, et, pour partie et de leur côté sud-

est, attenantes à une zone de bâtiments et d’équipements publics [BEP], il n’en reste pas moins que celles-ci sont, pour le surplus, entourées de verdure - tel qu’en témoignent les prédites photos reproduites dans le mémoire en réponse de la partie communale - pour être adjacentes à une zone [AGR] et se trouvent, de surcroît, en bordure du lac de la Haute-Sûre.

Force est à cet égard de constater que l’intégration des parcelles litigieuses en zone urbanisée (lots dénommés « F » et « G »), telle que sollicitée par Monsieur (A), engendrerait une densification des constructions aux abords de la localité de …, de sorte à favoriser nécessairement, compte tenu de leur situation géographique, le développement et l’accroissement d’une extension tentaculaire et désordonnée à l’entrée de ladite localité, développement manifestement contraire aux objectifs ancrés à l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004 et plus particulièrement aux points a) et b) dudit article, relatifs à une utilisation rationnelle du sol et de l’espace urbain, ainsi qu’à un développement harmonieux et cohérent du territoire.

Il s’ensuit que le choix opéré par l’autorité communale et entériné par l’autorité de tutelle de classer lesdites parcelles, du moins pour partie, en zone [AGR] se justifie par des arguments suffisamment vérifiés quant à leur matérialité et tirés d’une saine urbanisation, tendant à une finalité d’intérêt général, à savoir une utilisation rationnelle du sol et de l’espace urbain et rural ainsi qu’un développement harmonieux et cohérent du territoire de la commune d’Esch-sur-Sûre, conformément aux objectifs inscrits aux points a) et b) de l’article 2, précité, de la loi du 19 juillet 2004. Les contestations afférentes du demandeur sont, dès lors, à rejeter.

Concernant, ensuite, les contestations relatives au classement de la parcelle (P1) pour partie en zone [JAR] (lot dénommé « E »), force est au tribunal de constater que c’est à juste titre que la partie communale soutient que le demandeur reste en défaut d’expliquer et a fortiori d’établir concrètement pour quelle raison il serait contraire à l’intérêt général de classer une partie de la prédite parcelle en zone [JAR]. Il s’ensuit que Monsieur (A) n’a pas renversé la présomption selon laquelle la modification du PAG a été, dans son essence même, adoptée dans l’intérêt général, de sorte que les contestations relatives au classement d’une partie de la parcelle (P1) (lot dénommé « E ») en zone [JAR], laissent également d’être fondées.

Dans un souci d’exhaustivité, il convient d’ajouter que l’article 10 de la partie écrite du PAG sous analyse prévoit que « [l]a zone de jardins familiaux est destinée à la culture jardinière et à la détente. […] Y sont admis des aménagements ainsi que des dépendances de faible envergure en relation directe avec la destination de la zone. » Le tribunal relève, à cet égard, qu’il ressort de la partie graphique du PAG que la parcelle (P1), et plus précisément le lot dénommé « E », est, tel que relevé ci-avant, classée pour partie (i) en zone [HAB-1], laquelle accueille la maison d’habitation du demandeur et dont la limite a été, d’après les explications de la partie communale non contestées en l’espèce, adaptée dans le cadre du PAG sous analyse, afin d’y inclure le carport de celui-ci et (ii) en zone [JAR], ladite zone étant, de son côté nord, attenante à la bordure du lac de la Haute-Sûre.

Force est, à cet égard, de constater que le ministre a, dans sa décision du 11 février 2022, confirmé le choix communal de classer une partie de la prédite parcelle (P1) en zone [JAR] par le souci « d’éviter l’implantation de constructions de taille trop élevée » à l’arrière 15de la maison située sur la parcelle en question. A ceci s’ajoute que la partie communale a encore, dans son mémoire en réponse, précisé que le classement en cause était justifié au regard de la situation urbanistique de la parcelle (P1), alors que celle-ci serait, d’une part, située le long d’une voirie de desserte et accueillerait, tel que relevé ci-avant, notamment une maison d’habitation et que, d’autre part, elle longerait, à l’arrière, le lac de la Haute-Sûre, tout en précisant, dans ce contexte, qu’il serait évident qu’entre ladite maison d’habitation et la bordure du prédit lac, aucune autre maison d’habitation ne saurait plus être implantée sur la parcelle en question.

Le tribunal est, à cet égard, amené à rejoindre la partie communale, de même que le ministre, dans leurs constats selon lesquels le classement en zone [HAB-1] de la partie de la parcelle (P1) ayant été classée en zone [JAR] ne se justifie pas en l’espèce, alors qu’au vu de la situation urbanistique de la prédite parcelle - qui accueille d’ores et déjà une maison d’habitation et un carport et qui est située aux abords du lac de la Haute-Sûre - il y a lieu d’éviter que des constructions de taille trop importante soient implantées dans le jardin du demandeur, en l’occurrence entre sa maison d’habitation et les rives du prédit lac. En effet, un classement de la partie litigieuse de la parcelle (P1) en zone [HAB-1], permettant l’implantation d’une construction derrière la maison d’habitation du demandeur, c’est-à-dire en seconde position par rapport à la rue …, n’est pas de nature à tendre vers une utilisation rationnelle du sol et ne répond, dès lors, pas à l’objectif prévu au point a) de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004.

C’est sur cette toile de fond que le tribunal arrive à la conclusion que le classement de la partie litigieuse de la prédite parcelle en zone [JAR] permet, quant à lui, d’assurer une utilisation rationnelle du sol, dans la mesure où tant la destination de ladite zone prévue à l’article 10 de la partie écrite du PAG, précité, à savoir la « culture jardinière et la détente », que l’éventuelle implantation « [d’] aménagements et [de] dépendances de faible envergure en relation directe avec la destination de la zone [JAR] » sur la partie litigieuse de la parcelle (P1) sont adaptées à la configuration et à la situation urbanistique de ladite parcelle, étant relevé que celle-ci accueille, tel que décrit ci-avant, d’ores et déjà une maison d’habitation et qu’elle se situe, de surcroît, le long du Lac de la Haute-Sûre, de sorte que le prédit classement en zone [JAR] est justifié pour être conforme à l’objectif prévu au point a) de l’article 2, précité, de la loi du 19 juillet 2004. Les contestations afférentes de Monsieur (A) laissent, dès lors, d’être fondées.

Au vu de toutes les considérations qui précèdent, il y convient de constater que les décisions communale et ministérielle déférées se justifient par des arguments vérifiés quant à leur matérialité et tirés d’une saine urbanisation, axée sur une utilisation rationnelle du sol et un développement harmonieux et cohérent de la localité de …, conformément aux points a) et b) de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, de sorte que les contestations afférentes du demandeur sont à rejeter dans leur ensemble.

(2) Quant au moyen ayant trait à la violation alléguée de l’article 108, paragraphe (2) de la loi du 19 juillet 2004 Concernant le moyen du demandeur ayant trait à la violation de l’article 108, paragraphe (2) de la loi du 19 juillet 2004, le tribunal relève que le demandeur reproche à la commune d’avoir « occulté, respectivement ignoré l’existence » du PAP de 1989, dans la mesure où celle-ci n’aurait décidé « ni de conserver ledit PAP, ni de l’abroger » pour conclure qu’étant donné qu’elle n’aurait pas statué « sur la question du maintien en vigueur du PAP de 1989, elle n’a[urait] pas pu respecter l’article 108 de la[dite] loi ». Le tribunal constate ensuite 16qu’il ressort des explications de la partie communale à cet égard que la « prédite disposition ne trouve[rait] pas à s’appliquer puisque le PAP de 1989 dont fait état le [demandeur] avait déjà été abrogé par le PAG de 2006 », explications que Monsieur (A) réfute.

Il échet, dans ce contexte, de relever que selon l’article 26 de la loi du 19 juillet 2004 « (1) Les plans d’aménagement particulier « nouveau quartier » et « quartier existant » ont pour objet d’exécuter le plan d’aménagement général […] » et qu’aux termes de l’article 108, paragraphe 2 de la même loi « Les plans d’aménagement particulier approuvés par le ministre conformément à la loi du 12 juin 1937 précitée qui existent au moment de l’entrée en vigueur de la présente loi, respectivement qui ont été approuvés conformément à la présente loi, peuvent soit garder leur validité lors de la refonte du plan d’aménagement général pour autant qu’ils sont conformes à ce dernier, soit être abrogés. ».

Il ressort de ce qui précède que la loi dévolue expressément la faculté à la commune de décider, lors de la refonte du PAG, soit de maintenir un PAP en vigueur au moment de ladite refonte, sous condition qu’il soit conforme au PAG, soit d’abroger ledit PAP.

Il convient, dans ce contexte, de relever qu’il ressort de la partie écrite du PAG sous analyse, et plus particulièrement de l’article 19 intitulé « Zone délimitant les plans d’aménagement particulier approuvés », que « [l]es plans d’aménagement particulier (PAP) dûment approuvés par le Ministre perdent leur validité, à l’exception des plans d’aménagement particulier (PAP) énumérés dans le tableau ci-après et indiqués sur le plan de repérage des plans d’aménagement particulier « quartier existant » (PAP QE). Les PAP maintenus énumérés dans le tableau ci-après peuvent être modifiés conformément à la loi […] » et que ledit article 19 contient un tableau reprenant les « [p]lans d’aménagement particulier (PAP) approuvés à maintenir ».

Force est ainsi de relever que (i) contrairement aux affirmations du demandeur selon lesquelles « la commune ne s’est pas prononcée sur le sort du PAP initié […] en 1988 », la commune s’est bel et bien prononcée quant au sort à réserver au PAP litigieux de 1989, tel qu’en témoigne l’article 19, précité, de la partie écrite du PAG sous analyse et (ii) le PAP litigieux de 1989 ne figure pas dans le tableau reproduit dans le prédit article 19, contenant une liste relative aux PAP approuvés à maintenir en vigueur, de sorte qu’il ne peut qu’en être déduit que - même à admettre que ledit PAP ait été maintenu sous l’empire de l’ancien PAG de 2006 auquel fait, dans ses mémoires respectifs, référence la partie communale - celui-ci a définitivement été abrogé au plus tard dans le cadre du PAG sous analyse.

Au vu de ces considérations, le moyen ayant trait à une violation de l’article 108, paragraphe (2) de la loi du 19 juillet 2004 au motif que la commune ne se serait pas prononcée « sur la question du maintien en vigueur du PAP de 1989 » est à rejeter pour ne pas être fondé.

3) Quant au moyen relatif à une prétendue violation du principe d’égalité de traitement Concernant l’invocation par le demandeur d’une violation du principe d’égalité de traitement au motif que la commune aurait, contrairement au PAP litigieux de 1989, maintenu « d’autres PAP » en vigueur, le tribunal relève tout d’abord que le principe constitutionnel de l’égalité devant la loi, tel qu’inscrit à l’article 10bis de la Constitution en vigueur jusqu’au 1er juillet 2023, suivant lequel tous les Luxembourgeois sont égaux devant la loi, applicable à tout individu touché par la loi luxembourgeoise si les droits de la personnalité, et par extension les droits extrapatrimoniaux sont concernés, ne s’entend pas dans un sens absolu, mais requiert 17que tous ceux qui se trouvent dans la même situation de fait et de droit soient traités de la même façon. Le principe d’égalité de traitement est compris comme interdisant le traitement de manière différente de situations similaires, à moins que la différenciation soit objectivement justifiée. Il appartient par conséquent aux pouvoirs publics, tant au niveau national qu’au niveau communal, de traiter de la même façon tous ceux qui se trouvent dans la même situation de fait et de droit. Par ailleurs, lesdits pouvoirs publics peuvent, sans violer le principe de l’égalité, soumettre certaines catégories de personnes à des régimes légaux différents, à condition que les différences instituées procèdent de disparités objectives, qu’elles soient rationnellement justifiées, adéquates et proportionnées à leur but10. Pour que le principe d’égalité devant la loi puisse être valablement mis en œuvre, il convient partant de pouvoir dégager deux situations comparables par rapport auxquelles une inégalité de traitement puisse être utilement invoquée.

Le tribunal se doit, à cet égard, de constater que le demandeur reste en défaut de préciser à quels PAP il entend se référer en affirmant que la commune aurait maintenu « d’autres PAP » en vigueur. Or, à défaut de toute explication ou précision à cet égard, le tribunal n’est pas en mesure d’établir si la situation du demandeur et celle des propriétaires des parcelles superposées « d’autres PAP » ayant prétendument été maintenus en vigueur sont comparables, ni a fortiori que lesdites situations sont suffisamment comparables pour que le principe de l’égalité constitutionnelle puisse trouver vocation à s’appliquer. Force est, à cet égard, de relever qu’un moyen simplement suggéré sans être soutenu effectivement n’est pas de nature à énerver la régularité des décisions litigieuses et est à rejeter étant donné qu’il n’appartient pas au tribunal de suppléer à la carence du demandeur et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de ses conclusions.

Au vu de ces considérations, le moyen tiré d’une violation du principe constitutionnel d’égalité de traitement est à rejeter pour être non fondé.

4) Quant au moyen relatif à une prétendue violation du droit de propriété A travers ses développements selon lesquels les décision déférées auraient refusé de « maintenir les lots F et G en zone constructible », de sorte que « le classement en zone agricole d’une partie des parcelles n°(P3) et (P4), antérieurement classées suivant le PAG en vigueur, en zone d’habitation 1, doit s’analyser comme un reclassement en zone verte d’une zone antérieurement constructible », le demandeur invoque, de l’entendement du tribunal, une violation de l’article 16 de la Constitution en vigueur jusqu’au 1er juillet 2023 et une violation de l’article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, ci-après désigné par « le premier Protocole ».

L’article 16 de la Constitution dispose que « Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et moyennant juste indemnité, dans les cas et de manière établis par la loi. », tandis que l’article 1er du premier Protocole, intitulé « Protection de la propriété », dispose comme suit : « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etat s 10 Trib. adm., 6 décembre 2000, n° 10019 du rôle, Pas. adm. 2024, Lois et règlements, n° 9 et les autres références y citées.

18de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes. ».

L’article 16 de la Constitution concerne l’expropriation tandis que l’article 1er du premier Protocole prévoit deux types de limites au droit de propriété, à savoir, en son alinéa 1er, l’expropriation et, en son alinéa 2, la réglementation de l’usage des biens.

Il convient, en l’espèce, en premier lieu, de constater qu’aucun transfert de propriété des lots dénommés « F » et « G » et n’a été décidé ou ne s’est opéré en l’espèce, de sorte qu’en principe, aucune expropriation au sens des articles 16 de la Constitution et 1er, alinéa 1er du premier Protocole ne peut être constatée.

Ensuite et en ce qui concerne la prétendue violation du droit de propriété, tel que consacré à travers l’article 16 de la Constitution et 1er du premier Protocole, il y a lieu de se référer à l’arrêt rendu par la Cour constitutionnelle en date du 4 octobre 201311, par lequel celle-

ci, tout en consacrant le principe de la mutabilité des PAG et en soulignant que le juge administratif n’était pas autorisé à sanctionner un reclassement d’un terrain précédemment classé en zone constructible en zone non constructible, mais que les propriétaires concernés pouvaient se pourvoir, le cas échéant, devant le juge judiciaire en vue de l’allocation d’une indemnité éventuelle, a déclaré contraires à l’article 16 de la Constitution en vigueur jusqu’au 1er juillet 2023, les dispositions de la loi du 19 juillet 2004 posant en principe que les servitudes résultant d’un PAG n’ouvrent droit à aucune indemnité et prévoyant des exceptions à ce principe qui ne couvrent pas toutes les hypothèses dans lesquelles la privation de la jouissance du terrain frappé par une telle servitude est hors de proportion avec l’utilité publique. Dans le même arrêt, la Cour constitutionnelle a réaffirmé la considération qu’elle avait retenue dans son arrêt du 26 septembre 200812, selon laquelle un changement dans les attributs de la propriété, qui est à tel point substantiel qu’il prive celle-ci d’un de ses aspects essentiels, peut constituer une expropriation.

Deux conclusions s’imposent donc. D’une part, l’article 16 de la Constitution n’érige pas de manière générale le droit de propriété en matière réservée à la loi, mais se limite à interdire l’expropriation autrement que pour cause d’utilité publique, moyennant juste indemnité et dans les cas et de la manière établis par la loi, de sorte que seule l’expropriation constitue une matière réservée à la loi, étant précisé, dans ce contexte, qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour constitutionnelle qu’un changement dans les attributs de la propriété qui est à tel point essentiel qu’il prive le propriétaire de ses aspects essentiels peut constituer une expropriation. Cependant, étant donné que les dispositions de la loi du 19 juillet 2004 n’autorisent pas les autorités communales à prendre des règlements en matière d’expropriation, mais seulement à réglementer l’usage des biens, notamment par le biais de mesures destinées à protéger les sites et monuments, respectivement le caractère harmonieux d’un quartier ou d’une partie de quartier, et que la réglementation de l’usage des biens n’est pas une matière réservée à la loi par la Constitution, ces dispositions légales ne se heurtent manifestement pas à l’article 16 de la Constitution, ni d’ailleurs à l’article 32, paragraphe (3) de la Constitution en vigueur jusqu’au 1er juillet 2023.

D’autre part, la Cour constitutionnelle n’a pas retenu que, de manière générale, toute 11 Cour constitutionnelle, arrêt du 4 octobre 2013, inscrit sous le numéro 00101 du registre.

12 Cour constitutionnelle, arrêt du 26 septembre 2008, inscrit sous le numéro 00046 du registre.

19servitude d’urbanisme constituait une expropriation, mais elle a, en revanche, retenu de manière nuancée que seul un changement dans les attributs de la propriété à tel point substantiel qu’il prive celle-ci d’un de ses aspects essentiels peut constituer une expropriation.

Au vu de la solution ainsi dégagée par la Cour constitutionnelle, il convient de vérifier si le classement des lots dénommés « F » et « G » en zone [AGR] a entraîné un changement substantiel dans les attributs de la propriété de Monsieur (A).

Le tribunal constate que s’il est vrai que l’article 13 de la partie écrite du PAG relatif à la zone [AGR] limite l’usage de la propriété du demandeur en ce que ne sont permises en zone [AGR] que des « […] constructions et aménagement servant à l’exploitation agricole, jardinière, maraîchère, sylvicole, piscicole, apicole ou cynégétique ou à un but d’utilité publique […] », il n’est toutefois pas démontré que ledit classement entrave les attributs du droit de propriété d’une manière telle que la limitation opérée puisse être qualifiée d’équivalente à une expropriation.

Le classement litigieux n’est dès lors pas à considérer comme expropriation et ne tombe par conséquent pas dans le champ d’application de l’article 16 de la Constitution, ni dans celui de l’article 1er, alinéa 1er du premier Protocole.

Toutefois dans la mesure où, tel que relevé ci-avant, le classement litigieux implique une certaine limitation de l’usage que Monsieur (A) peut faire des lots dénommés « F » et « G », il y a lieu d’analyser si cette limitation est conforme aux exigences de l’alinéa 2 de l’article 1er du premier Protocole, tel qu’interprété par la Cour européenne des droits de l’Homme, ci-après désignée par la « CourEDH ».

Il ressort du libellé même de l’article 1er, alinéa 2 du premier Protocole qu’une restriction de l’usage de la propriété doit être prévue par la loi. Il se dégage à cet égard de la jurisprudence constante de la CourEDH, que la « loi », au sens de la CEDH, ne vise pas une loi au sens formel du terme, mais englobe le droit écrit et le droit non écrit et qu’une ingérence est « prévue par la loi », si elle a une base en droit interne. Il faut encore que la « loi » soit suffisamment accessible : le citoyen doit pouvoir disposer de renseignements suffisants, dans les circonstances de la cause, sur les normes juridiques applicables à un cas donné. En second lieu, ne peut être considérée comme « loi » qu’une norme énoncée avec assez de précision pour permettre au citoyen de régler sa conduite. En s’entourant au besoin de conseils éclairés, il doit être à même de prévoir, à un degré raisonnable dans les circonstances de la cause, les conséquences de nature à dériver d’un acte déterminé13.

En l’espèce, les affections portées au droit de propriété sont à considérer comme étant prévues par la « loi », au sens de la jurisprudence de la CourEDH. En effet, le classement des lots dénommés « F » et « G » en zone [AGR] est opéré par le PAG lequel constitue un acte à caractère normatif adopté conformément au cadre juridique tracé, notamment, par la Constitution et par la loi du 19 juillet 2004. L’ingérence dans le droit de propriété dispose donc bien d’une base en droit interne. Par ailleurs, la disposition normative qui prévoit les restrictions litigieuses au droit de propriété est suffisamment accessible, compte tenu, d’une part, de la publication au Mémorial de l’ensemble des textes normatifs sur base desquels le PAG a été élaboré et, d’autre part, du fait qu’en vertu de l’article 82 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988, le texte des règlements du conseil communal ou du collège 13 Voir, entre autres : CourEDH, 2 août 1984, affaire Malone c. Royaume-Uni, Requête n° 8691/79, n° 66.

20échevinal, tels que le PAG « […] est à la disposition du public, à la maison communale, où il peut en être pris copie sans déplacement, le cas échéant contre remboursement […] ». Quant au critère de précision, force est au tribunal de constater que le libellé de l’article 13 de la partie écrite du PAG est sans équivoque en ce qu’il consacre la définition ainsi que l’affectation et les spécificités de la zone [AGR]. Par ailleurs, une prévisibilité absolue n’est pas requise par la jurisprudence de la CourEDH. Le tribunal déduit de ces considérations que les restrictions litigieuses portées au droit de propriété de la partie intervenante résultent d’une « loi », au sens de disposition normative, suffisamment précise et accessible, conformément aux exigences se dégageant de la jurisprudence de la CourEDH.

Par ailleurs, la condition selon laquelle une réglementation de l’usage des biens doit être conforme à l’intérêt général, telle qu’inscrite à l’alinéa 2 de l’article 1er du premier Protocole, est également remplie en l’espèce, le tribunal venant de conclure que le classement des lots « F » et « G » en zone [AGR] est justifié à suffisance de droit au regard des objectifs d’intérêt général tenant à une utilisation rationnelle du sol et de l’espace urbain ainsi qu’à un développement harmonieux et cohérent du territoire de la commune d’Esch-sur-Sûre au sens des points a) et b) prévus à l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004.

Il n’y a, par conséquent, pas non plus eu de violation des exigences découlant de l’alinéa 2 de l’article 1er du premier Protocole.

Au vu des considérations qui précèdent, le moyen afférent est à rejeter.

5) Quant au moyen relatif à une prétendue violation du principe général de confiance légitime Le demandeur invoque une violation du principe de confiance légitime au motif que la commune n’aurait pas tenu compte du PAP de 1989, lequel aurait classé ses parcelles en zone constructible, tout en ajoutant que concernant le classement d’une partie de ses parcelles en zone [JAR], « l’incohérence des décisions communales p[ourrait] se démontrer en reprenant les PAP de 1989, 2000 et le PAG de 2006 qui intégraient la désormais zone JAR en zone constructible respectivement en zone d’habitation 1 ».

A cet égard, il échet de relever que le principe général de la confiance légitime, qui s’apparente au principe de la sécurité juridique, a été consacré tant par la jurisprudence communautaire en tant que principe du droit communautaire14, que par la jurisprudence nationale en tant que principe général du droit.

Ce principe général du droit tend à ce que les règles juridiques ainsi que l’activité administrative soient empreintes de clarté et de prévisibilité, de manière à ce qu’un administré puisse s’attendre à un comportement cohérent et constant de la part de l’administration dans l’application d’un même texte de l’ordonnancement juridique par rapport à une même situation administrative qui est la sienne.

En vertu de ce principe, l’administré peut exiger de l’autorité administrative qu’elle se conforme à une attitude qu’elle a suivie dans le passé, ce principe garantissant la protection de l’administré contre les changements brusques et imprévisibles de l’attitude de l’administration.

14 CJUE 5 juin 1973, aff. 81/72, Commission c/ Conseil.

21D’une manière générale, un administré ne peut toutefois prétendre au respect d’un droit acquis que si, au-delà de ses expectatives, justifiées ou non, l’autorité administrative a créé à son profit une situation administrative acquise et réellement reconnu ou créé un droit subjectif dans son chef. Ce n’est qu’à cette condition que peut naître dans le chef d’un administré la confiance légitime que l’administration respectera la situation par elle créée, les deux notions de droits acquis et de légitime confiance étant voisines.

En l’espèce, il ne ressort d’aucun élément du dossier que l’autorité communale se serait départie brusquement, à l’égard du demandeur, d’une attitude qu’elle aurait suivie dans le passé ou qu’elle aurait opéré un revirement de comportement en revenant sur ses promesses. En effet, force est de constater que le demandeur base ses prétentions sur la seule considération que ses parcelles auraient été classées en zone constructible sous l’empire du PAP de 1989, prémentionné, du PAP en vigueur en 2000, respectivement du PAG en vigueur en 2006.

Or, quel qu’ait été le classement antérieur des parcelles litigieuses, le tribunal se doit de relever qu’en faisant plaider qu’en vertu du seul principe de confiance légitime, un prétendu classement retenu lors de l’élaboration d’un ancien PAP, respectivement d’un ancien PAG il y a plus de 20 ans devrait être maintenu et ce indépendamment des nouveaux enjeux et objectifs du développement du territoire communal, le demandeur semble nier le principe de mutabilité des PAG, lequel a toutefois été retenu à de maintes reprises par les juridictions administratives15, étant rappelé à cet égard que compte tenu de la mutabilité intrinsèque des situations générales, due aux changements de circonstances de fait et de droit, les actes réglementaires ne créent, en principe, que des droits précaires et maintiennent dans le chef de l’autorité administrative le pouvoir soit de changer soit d’abroger un acte réglementaire, en faisant usage des pouvoirs qui lui sont conférés dans l’exercice de sa mission16.

Etant donné que le tribunal vient de retenir ci-avant que le classement intégral de la parcelle (P2), de même que les classements partiels de la parcelle (P1) en zone [AGR] et en zone [JAR] se justifient par des arguments vérifiés quant à leur matérialité et tirés d’une saine urbanisation, axée sur une utilisation rationnelle du sol et un développement harmonieux et cohérent de la localité de …, conformément aux points a) et b) de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, le moyen tenant à une prétendue violation, par l’autorité communale, du principe de la confiance légitime est à rejeter pour être dénué de fondement.

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le recours en annulation sous analyse pour n’être fondé en aucun de ses moyens.

V) Quant à la demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure En ce qui concerne encore la demande de Monsieur (A) tendant à voir condamner l’administration communale d’Esch-sur-Sûre et l’Etat à lui payer une indemnité de procédure d’un montant de 5.000 euros sur le fondement de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, celle-ci est à rejeter au vu de l’issue du litige.

15 Cour adm., 6 février 2014, n°33257C du rôle, Pas. adm. 2024, Urbanisme, n° 234 et les autres références y citées.

16 Trib. adm., 9 juin 2004, n°11415a du rôle, Pas. adm. 2024, Urbanisme, n°234 et les autres références y citées.

22Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

rejette la demande tendant à l’octroi d’une indemnité de procédure d’un montant de 5.000 euros, telle que formulée par le demandeur ;

condamne le demandeur aux frais et dépens.

Ainsi jugé par :

Alexandra Castegnaro, vice-président, Alexandra Bochet, vice-président, Caroline Weyland, premier juge, et lu à l’audience publique du 12 juin 2025 par le vice-président Alexandra Castegnaro, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Alexandra Castgenaro 23


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 48411
Date de la décision : 12/06/2025

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2025
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2025-06-12;48411 ?

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