Tribunal administratif Numéro 52874 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:52874 5e chambre Inscrit le 19 mai 2025 Audience publique du 28 mai 2025 Recours formé par Monsieur (A), connu sous différents alias, …, contre une décision du ministre des Affaires intérieures en matière d’assignation à résidence (art. 22, L.18.12.2015)
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 52874 du rôle et déposée le 19 mai 2025 au greffe du tribunal administratif par Maître Samira MABCHOUR, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A), déclarant être né le … à … (Algérie) et être de nationalité algérienne, connu sous différents alias, actuellement assigné à résidence à la maison retour sise à L-…, tendant, d’après son dispositif, à la réformation d’une décision du ministre des Affaires intérieures « du 28 mars 2025 » l’assignant à résidence à la maison retour pour une durée de trois mois à partir de la notification de la décision en question ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 22 mai 2025 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jeff RECKINGER en sa plaidoirie à l’audience publique de ce jour, Maître Samira MABCHOUR s’étant excusée.
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Le 24 mars 2025, Monsieur (A), connu sous différents alias, introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires intérieures, direction générale de l’Immigration, ci-après désigné par « le ministère », une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par « la loi du 18 décembre 2015 ».
Le même jour, Monsieur (A) fut entendu par un agent du service de police judiciaire, section criminalité organisée, de la police grand-ducale, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.
Il s’avéra à cette occasion, suite à une recherche effectuée le même jour dans la base de données EURODAC, que l’intéressé avait introduit une demande de protection internationale en Allemagne en date du 12 novembre 2024. Une demande de renseignements effectuée à cette même occasion via le Centre de coopération policière et douanière (« CCPD ») révéla que la demande de protection internationale introduite en Allemagne par Monsieur (A) avait été rejetée en date du 4 décembre 2024 et n’était plus susceptible de recours depuis le 11 février 2025, tandis qu’une recherche effectuée dans la base de données du système d’informationSchengen (« SIS ») révéla que l’intéressé faisait l’objet d’un signalement de la part des autorités allemandes au motif « Ressortissant d’un pays tiers en vue d’une décision de retour », valable du 12 décembre 2024 au 12 décembre 2027.
En date du 8 avril 2025, Monsieur (A) fut entendu par un agent du ministère en vue de déterminer l’Etat responsable de l’examen de sa demande de protection internationale en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ci-après désigné par le « règlement Dublin III ».
Le 14 avril 2025, les autorités luxembourgeoises contactèrent leurs homologues allemands en vue de la reprise en charge de l’intéressé sur le fondement de l’article 18, paragraphe (1), point d) du règlement Dublin III, demande qui fut acceptée par lesdites autorités en date du 16 avril 2025 sur le fondement de la même disposition.
Par arrêté du 30 avril 2025, notifié à l’intéressé en mains propres le jour même, le ministre des Affaires intérieures, ci-après désigné par « le ministre », ordonna l’assignation à résidence de Monsieur (A) à la maison retour sise à L-… pour une durée de trois mois à partir de la notification de l’arrêté en question, avec l’obligation de se présenter quotidiennement durant cette période au plus tard à 23 heures du soir ainsi qu’à 8 heures du matin au personnel de la prédite structure. Cette décision est libellée comme suit :
« (…) Vu l’article 22 (2) d) et 22 (3) a), b), c) de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire ;
Attendu que la mesure moins coercitive prévue à l’article 22, (3), point b) peut être efficacement appliquée.
Arrête :
Art. 1.- Monsieur (A), né le … à … (Algérie) et de nationalité algérienne, est assigné à résidence à la maison retour sise à …, L-… pour une durée de trois mois à partir de la notification du présent arrêté. La personne susvisée a l’obligation de se présenter durant cette période quotidiennement au plus tard à 23h00 du soir ainsi qu’à 08h00 du matin au personnel de la structure prémentionnée.
Art. 2.- La personne susvisée est informée qu’en cas de défaut de respect de l’obligation imposée ou en cas de risque de fuite, la mesure pourra être révoquée et le placement en rétention pourra être ordonné comme prévu à l’article 22, paragraphe (2) d) de la loi modifiée du 18 décembre 2015 précitée. (…) ».
Par décision du même jour, notifiée à l’intéressé en mains propres le même jour, le ministre informa Monsieur (A) de sa décision de ne pas examiner sa demande de protection internationale et de le transférer vers l’Allemagne sur le fondement des dispositions de l’article 28, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 et de celles de l’article 18, paragraphe (1), point d) du règlement Dublin III.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 19 mai 2025, Monsieur (A) a fait introduire un recours tendant, d’après son dispositif auquel le tribunal est seul tenu, à laréformation de l’arrêté ministériel « du 28 mars 2025 » l’assignant à résidence à la maison retour pour une durée de trois mois à compter de la notification de la décision en question.
A titre préliminaire, le tribunal constate que la référence, faite dans la requête introductive d’instance, à une décision du ministre prise en date du 28 mars 2025 est manifestement constitutive d’une simple erreur matérielle alors qu’il ressort sans équivoque de la pièce versée à l’appui de la requête introductive d’instance et de l’ensemble des circonstances de la cause que la décision ministérielle visée est bien celle du 30 avril 2025, qui a été notifiée au litismandataire du demandeur par courriel du 30 avril 2025, la partie étatique ne s’étant d’ailleurs pas méprise sur l’objet du recours.
Etant donné que l’article 22, paragraphe (6) de la loi du 18 décembre 2015 institue un recours de pleine juridiction contre une décision ordonnant une mesure moins coercitive que le placement en rétention, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit en l’espèce.
Dans son mémoire en réponse, en se référant à un jugement du tribunal administratif du 29 avril 2025, inscrit sous le numéro 50264 du rôle, le délégué du gouvernement invoque de prime abord l’irrecevabilité du recours au motif que Monsieur (A) serait dépourvu d’un intérêt à agir contre son assignation à résidence pour avoir disparu « dans la nature » depuis le 15 mai 2025. Il estime qu’il y aurait lieu de tirer les conséquences de sa disparition et de prendre note du fait que Monsieur (A) ne présenterait plus aucune garantie de représentation effective propre à prévenir le risque de fuite dans son chef, de sorte qu’il ne mériterait plus de bénéficier, en cas de nouvelle interpellation, d’une mesure moins coercitive telle que l’assignation à résidence lui accordée, rendant donc désormais inutile de chercher à la contester. Le délégué du gouvernement fait encore relever qu’en disparaissant, Monsieur (A) aurait rendu toute exécution de la décision de transfert impossible, ce qui rendrait sans objet la question du bien-
fondé de la mesure d’assignation prise afin de permettre aux autorités luxembourgeoises de préparer son transfert vers l’Allemagne. Par référence à un arrêt de la Cour administrative du 3 décembre 2024, inscrit sous le numéro 50575C du rôle, la partie gouvernementale considère que la disparition de Monsieur (A), sans laisser d’adresse, traduirait son mépris à l’égard de l’autorité de la juridiction saisie, laquelle ne serait acceptée que pour le cas d’un recours victorieux en se heurtant à l’exigence de loyauté du procès administratif. Le délégué du gouvernement critique, par ailleurs, le litismandataire de Monsieur (A) d’avoir omis, dans sa requête introductive d’instance, de faire part de sa disparition de la maison retour depuis le 15 mai 2025 et d’avoir continué à plaider l’absence de risque de fuite dans son chef, argumentation en décalage avec la réalité et faisant présumer que Monsieur (A) n’aurait pas prévenu son litismandataire de sa fuite, démontrant un désintérêt total pour le présent recours dans le chef de l’intéressé.
Monsieur (A) n’a pas autrement pris position quant à ce moyen.
Force est au tribunal de relever que l’intérêt à agir est l’utilité que présente pour le demandeur la solution du litige qu’il demande au juge d’adopter1, étant souligné que l’intérêt à agir n’est pas à confondre avec le fond du droit en ce qu’il se mesure non au bien-fondé des 1 Voir Encyclopédie Dalloz, Contentieux administratif, V° Recours pour excès de pouvoir (Conditions de recevabilité), n°247.moyens invoqués à l’appui d’une prétention, mais à la satisfaction que la prétention est censée procurer à une partie, à supposer que les moyens invoqués soient justifiés2.
En matière de contentieux administratif portant sur des droits objectifs, l’intérêt ne consiste pas dans un droit allégué, mais dans le fait vérifié qu’une décision administrative affecte négativement la situation en fait et en droit d’un administré qui peut partant tirer un avantage corrélatif de la sanction de cette décision par le juge administratif3.
A cet égard, il convient de souligner que si stricto sensu l’intérêt à agir est à apprécier au moment de l’introduction du recours, il n’en reste pas moins que le maintien d’un intérêt à agir, ou plus précisément d’un intérêt à poursuivre une action, doit être vérifié au jour du jugement sous peine de vider ce dernier de tout effet utile, d’encombrer le rôle des juridictions administratives et d’entraver la bonne marche des services publics en imposant à l’autorité compétente de devoir se justifier inutilement devant les juridictions administratives, exposant, le cas échéant, ses décisions à la sanction de l’annulation ou de la réformation, sans que l’administré ayant initialement introduit le recours ne soit encore intéressé par l’issue de ce dernier4.
Or, la première personne à pouvoir justifier s’il existe effectivement dans son chef un intérêt concret et personnel suffisant pour intenter un procès et pour le poursuivre ensuite, est le justiciable lui-même qui a saisi le tribunal administratif d’une demande, et ce, en établissant qu’il a été porté atteinte à ses droits ou que ses intérêts ont été lésés et que le redressement obtenu au moyen d’une décision juridictionnelle apportera à sa situation une amélioration qui compense les frais qu’entraîne et les désagréments que comporte un procès. La volonté du justiciable, manifestée par l’introduction d’une demande en justice, de défendre ce qu’il considère comme un intérêt le concernant est donc le premier élément qui est nécessaire pour rendre possible la constatation que ce justiciable justifie effectivement de l’intérêt concret et personnel requis en droit pour être recevable à intenter un procès5.
En l’espèce, au-delà du constat que le délégué du gouvernement n’a pas autrement établi la disparition de Monsieur (A) de la maison retour, cette affirmation restant à l’état de pure allégation pour ne pas avoir été corroborée par des pièces probantes, le tribunal ne saurait suivre le raisonnement du délégué du gouvernement suivant lequel par le seul fait de son comportement tendant à refuser de se présenter à la maison retour, le demandeur aurait implicitement renoncé à son recours, de sorte à entraîner son irrecevabilité.
En effet, il échet de constater qu’à travers un courriel du 27 mai 2025, le litismandataire de Monsieur (A) s’est rapporté à ses écrits et a confirmé que son mandant avait rejoint la structure d’hébergement dont il ferait partie. Ainsi, au vu de la considération que cette dernière déclare avoir toujours mandat pour défendre les droits de son mandant en justice, et du fait que ce dernier aurait rejoint la maison retour, il ne saurait être retenu un défaut d’intérêt dans le chef du demandeur de voir examiner au fond son recours contentieux dirigé contre la décision d’assignation à résidence litigieuse.
2 Trib. adm. prés., 27 septembre 2002, n° 15373 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 3 (1er volet) et les autres références y citées.
3 Cour adm., 14 juillet 2009, nos 23857C et 23871C du rôle, Pas adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 2 et les autres références y citées.
4 Trib. adm. 11 mai 2016, n° 35579 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 37 et les autres références y citées.
5 Ibidem.
Ce constat ne saurait être ébranlé par l’invocation par le délégué du gouvernement du jugement précité du tribunal administratif du 29 avril 2025, ainsi que de l’arrêt précité de la Cour administrative du 3 décembre 2024, dans la mesure où les circonstances dans le cadre de ces affaires diffèrent de celles de l’espèce alors que l’affaire sous examen ne concerne ni la prolongation d’une date limite de transfert, ni l’octroi d’un regroupement familial.
Le moyen afférent est partant à rejeter.
Concernant, enfin, les critiques étatiques relatives à une impossibilité d’exécuter le transfert vers l’Allemagne au vu de la disparition du demandeur, force est de souligner que ces considérations ont trait à l’exécution d’une décision de transfert ne faisant pas l’objet de la présente instance et ne sauraient justifier un défaut d’intérêt à agir dans le chef de Monsieur (A), de sorte que ce moyen d’irrecevabilité est pareillement à écarter.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent, et à défaut d’un autre moyen d’irrecevabilité, que le recours en réformation, ayant, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi, est recevable.
A l’appui de son recours et en fait, le demandeur reprend, en substance, les faits et rétroactes énoncés ci-avant, tout en donnant à considérer que son assignation à résidence à la maison retour impliquerait qu’il devrait se soumettre au règlement d’ordre intérieur de ladite structure lequel serait très contraignant en ce qu’il n’autoriserait ses résidents à sortir de l’enceinte de la maison retour que dans le cadre de la plage horaire se situant entre 8 heures du matin et 23 heures du soir. A fortiori, les résidents de la maison retour seraient obligés d’y être présents entre 23 heures du soir et 8 heures du matin, le non-respect de cette obligation, comme d’ailleurs l’existence d’un risque de fuite dans leur chef, entraînant la révocation de la mesure moins coercitive qu’est l’assignation à résidence. Or, le demandeur estime que ces restrictions entraveraient sans aucune justification sa liberté d’aller et de venir sans tenir à suffisance compte de sa situation de demandeur de protection internationale qui impliquerait que, dès son arrivée sur le territoire luxembourgeois, il aurait vécu sous une pression psychologique et un état d’angoisse constants, sans que cette vulnérabilité ne soit prise en compte.
Le demandeur ajoute que le règlement d’ordre intérieur de la maison retour prévoirait la possibilité de procéder à des inspections générales entre 6 heures du matin et 23 heures du soir, ce qui constituerait également une ingérence dans sa vie privée, laquelle serait déjà très restreinte. Comme les demandeurs de protection internationale feraient, par ailleurs, l’objet de fouilles et d’un contrôle à chaque entrée et sortie de la maison retour, ils se sentiraient nécessairement traités comme des criminels plutôt que comme des personnes ayant sollicité l’octroi d’une protection.
Il estime que l’assignation à résidence lui causerait un préjudice moral et physique certain en ce qu’elle serait non seulement constitutive d’une mesure restrictive de liberté, mais aussi en raison des conditions de son exécution, en ce qu’elle serait notamment renouvelable à souhait.
Il conclut de ce qui précède que les faits à la base de son recours justifieraient à suffisance que l’arrêté ministériel ordonnant son assignation à résidence soit réformé et qu’il puisse bénéficier des conditions d’accueil « normales », telles que prévues par la loi modifiéedu 18 décembre 2015 sur les conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale et de protection temporaire, ci-après désignée par la « loi accueil du 18 décembre 2015 ».
En droit, après avoir cité les dispositions de l’article 22, paragraphes (2) et (3) de la loi du 18 décembre 2015, le demandeur insiste sur le fait qu’en application de celles-ci, le ministre ne serait autorisé à placer un demandeur de protection internationale en rétention que dans certains cas limitativement prévus et plus particulièrement lorsque les conditions cumulatives de l’article 22, paragraphe (2), point d) seraient remplies, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce.
En effet, il est d’avis qu’il n’existerait dans son chef pas de risque de fuite non négligeable au sens de l’article 28 du règlement Dublin III, disposition à laquelle renvoie l’article 22, paragraphe (2), point d) de la loi du 18 décembre 2015.
Le demandeur donne, dans ce contexte, à considérer qu’en optant pour l’assignation à résidence, le ministre aurait lui-même estimé que l’application d’une mesure moins coercitive qu’un placement au Centre de rétention pouvait lui être efficacement appliquée. Or, comme la loi imposerait comme condition préalable à la possibilité de placer un demandeur de protection internationale en rétention l’impossibilité corrélative de lui appliquer efficacement d’autres mesures moins coercitives parmi lesquelles figurerait justement l’assignation à résidence, il devrait être admis que le ministre aurait pris « acte » de l’absence de risque de fuite dans son chef au sens de l’article 22, paragraphe (2), point d) de la loi du 18 décembre 2015. Ce constat s’imposerait d’autant plus que, dans l’arrêté litigieux, le ministre aurait précisé que ce ne serait qu’en cas de défaut de respect de l’obligation imposée ou en cas de risque de fuite que la mesure serait révoquée et son placement en rétention ordonné en application de l’article 22, paragraphe (2), point d), prévisé.
Au vu de ces considérations, l’arrêté ministériel litigieux serait à réformer.
Ensuite, le demandeur invoque une violation de la loi accueil du 18 décembre 2015, en reprochant à la maison retour d’être une structure ayant pour seule vocation de cantonner en son sein les demandeurs de protection internationale assignés à résidence. Comme ladite structure ferait partie intégrante de la structure d’hébergement d’urgence du Kirchberg (« SHUK ») et qu’elle se trouverait sous la direction du Centre de rétention, de sorte à ne pas dépendre de l’Office national d’accueil (« ONA »), mais dudit centre, dont elle serait une émanation, il ne s’agirait pas d’une structure d’hébergement permettant de répondre au droit au logement de tout demandeur de protection internationale, tel que garanti par la loi accueil du 18 décembre 2015.
Dans la mesure où la maison retour ne serait dès lors pas à considérer comme une structure d’hébergement au sens plus particulièrement de l’article 2, point h) de la loi accueil du 18 décembre 2015, elle ne saurait servir de lieu de résidence à une personne qui, tel que ce serait son cas, s’y serait vue loger. A cela s’ajouterait qu’il se dégagerait du visa et de l’attendu de l’arrêté ministériel déféré qu’en l’espèce, ce ne serait pas l’épuisement temporaire des capacités d’hébergement qui avait motivé son assignation à résidence à la maison retour, laquelle serait en réalité un centre semi-fermé.
Le demandeur ajoute que même à admettre que son assignation à résidence pourrait être considérée comme étant légale, il n’en resterait pas moins qu’elle ne devrait pas porter préjudice à son droit au logement dans une véritable structure d’hébergement, telle que prévuepar la loi accueil du 18 décembre 2015, et non pas dans une structure qui ne serait en réalité rien d’autre qu’une émanation du Centre de rétention.
Au vu de ces considérations, son assignation à résidence à la maison retour serait, en raison de la nature même de ce centre, disproportionnée, et l’exigence de se présenter quotidiennement deux fois par jour entraverait de manière tout aussi disproportionnée non seulement le droit au logement du demandeur, tel que prévu par la loi accueil du 18 décembre 2015, mais aussi sa liberté individuelle et ce, au-delà de ce qui serait nécessaire pour pouvoir assurer l’organisation d’un transfert.
Enfin, le demandeur invoque une violation de l’article 6 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, ci-après désignée par la « Charte », en donnant à considérer qu’au vu de toutes les considérations ci-avant développées, le fait de recourir systématiquement à l’assignation à résidence des demandeurs de protection internationale faisant l’objet d’une procédure Dublin III serait contraire audit article.
Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet du recours pour être non fondé.
Le tribunal rappelle tout d’abord qu’il n’est pas tenu par l’ordre dans lequel des moyens lui ont été soumis et qu’il détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et de l’effet utile s’en dégageant.
Il y a lieu de relever que l’article 22 de la loi du 18 décembre 2015 dispose notamment comme suit dans ses paragraphes (1) à (3) pertinents en l’espèce :
« (1) On entend par rétention, toute mesure d’isolement d’un demandeur dans un lieu déterminé où le demandeur est privé de sa liberté de mouvement.
Le placement en rétention est effectué au Centre de rétention créé par la loi du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention. (…) (2) Un demandeur ne peut être placé en rétention que :
a) pour établir ou vérifier son identité ou sa nationalité ;
b) pour déterminer les éléments sur lesquels se fonde la demande de protection internationale qui ne pourraient pas être obtenus sans un placement en rétention, en particulier lorsqu’il y a un risque de fuite du demandeur ;
c) lorsque la protection de la sécurité nationale ou l’ordre public l’exige ;
d) conformément à l’article 28 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant d’un pays tiers ou un apatride (refonte) et lorsqu’il existe un risque non négligeable de fuite établissant que le demandeur a l’intention de se soustraire aux autorités dans le seul but de faire obstacle à une mesure d’éloignement. Le risque non négligeable de fuite est présumé dans les cas suivants :
i.
si le demandeur s’est précédemment soustrait, dans un autre État membre, à la détermination de l’État responsable de sa demande de protection internationale en 7 vertu du droit de l’Union européenne ou à l’exécution d’une décision de transfert ou d’une mesure d’éloignement ;
ii.
si le demandeur fait l’objet d’un signalement dans le SIS aux fins de non-admission et d’interdiction de séjour conformément au règlement (UE) 2018/1861 du Parlement européen et du Conseil du 28 novembre 2018 sur l’établissement, le fonctionnement et l’utilisation du système d’information Schengen (SIS) dans le domaine des vérifications aux frontières, modifiant la convention d’application de l’accord de Schengen et modifiant et abrogeant le règlement (CE) n ° 1987/2006, tel que modifié, ou d’un signalement aux fins de retour conformément au règlement (UE) 2018/1860 du Parlement européen et du Conseil du 28 novembre 2018 relatif à l’utilisation du système d’information Schengen aux fins du retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, tel que modifié ;
iii.
si le demandeur a été débouté de sa demande de protection internationale dans l’État membre responsable ;
iv.
si le demandeur est de nouveau présent sur le territoire luxembourgeois après l’exécution effective d’une mesure de transfert ou s’il s’est soustrait à l’exécution d’une précédente mesure de transfert ;
v.
si le demandeur a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un document d’identité ou de voyage ou s’il a fait usage d’un tel document ;
vi.
si le demandeur a dissimulé des éléments de son identité ou s’il est démontré qu’il a fait usage d’identités multiples soit sur le territoire luxembourgeois, soit sur celui d’un autre État membre ;
vii.
si le demandeur qui a refusé le lieu d’hébergement proposé ne peut justifier du lieu de sa résidence effective ou si le demandeur qui a accepté le lieu d’hébergement proposé a abandonné ce dernier sans motif légitime ;
viii.
si le demandeur a exprimé l’intention de ne pas se conformer à une décision de transfert vers l’État responsable de sa demande de protection internationale ou si une telle intention découle clairement de son comportement ;
ix.
si le demandeur, sans motif légitime et bien que régulièrement convoqué ou informé, ne s’est pas soumis à une mesure préparatoire et nécessaire à l’exécution matérielle de son transfert vers l’État membre responsable ou s’il a antérieurement manifesté son intention de ne pas se conformer à une telle mesure ;
(…) (3) La décision de placement en rétention est ordonnée par écrit par le ministre sur la base d’une appréciation au cas par cas, lorsque cela s’avère nécessaire et si d’autres mesures moins coercitives ne peuvent être efficacement appliquées.
On entend par mesures moins coercitives :
a) l’obligation pour le demandeur de se présenter régulièrement, à intervalles à fixer par le ministre, auprès des services de ce dernier ou d’une autre autorité désignée par lui, après remise de l’original du passeport et de tout document justificatif de son identité en échange d’un récépissé valant justification de l’identité ;
b) l’assignation à résidence dans les lieux fixés par le ministre, si le demandeur présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite ;
l’assignation à résidence peut être assortie, si nécessaire, d’une mesure de surveillance électronique qui emporte pour le demandeur l’interdiction de quitter le périmètre fixé par le ministre. Le contrôle de l’exécution de la mesure est assuré au moyen d’un procédé permettant 8 de détecter à distance la présence ou l’absence du demandeur dans le prédit périmètre. La mise en œuvre de ce procédé peut conduire à imposer au demandeur, pendant toute la durée du placement sous surveillance électronique, un dispositif intégrant un émetteur. Le procédé utilisé est homologué à cet effet par le ministre. Sa mise en œuvre doit garantir le respect de la dignité, de l’intégrité et de la vie privée de la personne. La mise en œuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance et le contrôle à distance proprement dit, peuvent être confiés à une personne de droit privé ;
c) l’obligation pour le demandeur de déposer une garantie financière d’un montant de cinq mille euros à virer ou à verser soit par lui-même, soit par un tiers à la Caisse de consignation, conformément aux dispositions y relatives de la loi du 29 avril 1999 sur les consignations auprès de l’Etat. Cette somme est acquise à l’Etat en cas de fuite ou d’éloignement par la contrainte de la personne au profit de laquelle la consignation a été opérée. La garantie est restituée par décision écrite du ministre enjoignant à la Caisse de consignation d’y procéder si les motifs énoncés au paragraphe (2) ne sont plus applicables ou en cas de retour volontaire.
Les mesures moins coercitives sont ordonnées par écrit et peuvent être appliquées conjointement. En cas de défaut de respect des obligations imposées par le ministre ou en cas de risque de fuite, la mesure est révoquée et le placement en rétention est ordonné.
(4) La décision de placement en rétention indique les motifs de fait et de droit sur lesquels elle est basée. Elle est prise pour une durée la plus brève possible ne dépassant pas trois mois. Sans préjudice des dispositions du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 en matière de rétention, la mesure de placement en rétention peut être reconduite par le ministre chaque fois pour une durée de trois mois tant que les motifs énoncés au paragraphe 2, sont applicables, mais sans que la durée de rétention totale ne puisse dépasser douze mois.
Les procédures administratives liées aux motifs de rétention énoncés au paragraphe (2) sont exécutées avec toute la diligence voulue. Les retards dans les procédures administratives qui ne sont pas imputables au demandeur ne peuvent justifier une prolongation de la durée de rétention. (…) ».
Il est incontesté que l’arrêté ministériel litigieux se situe dans le cadre d’une procédure de transfert du demandeur vers l’Allemagne en tant qu’Etat membre responsable pour l’examen de sa demande de protection internationale et que l’arrêté en question se fonde sur les bases légales de l’article 22, paragraphe (2), point d) et de l’article 22, paragraphe (3), point b) de la loi du 18 décembre 2015.
Le paragraphe (1) dudit article 22 définit la mesure de placement en rétention et le paragraphe (2) du même article précise les hypothèses dans lesquelles une mesure de rétention peut être prise, dont celle pertinente en l’espèce, à savoir dans le cadre d’une procédure de transfert en cours conformément au règlement Dublin III, visée au point d) de l’article 22, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015. C’est dans le cadre de cette hypothèse que cette dernière disposition érige la vérification de l’existence d’un risque de fuite non négligeable établissant que le demandeur a l’intention de se soustraire aux autorités dans le seul but de faire obstacle à une mesure d’éloignement comme condition de la validité d’une mesure de rétention prise en vue de garantir une procédure de transfert.
C’est par rapport à ces mêmes dispositions que le paragraphe (3) de l’article 22 de la loi du 18 décembre 2015 impose au ministre, si l’un des cas d’ouverture du paragraphe (2) du même article se trouve vérifié, d’examiner si la mesure de rétention ne peut pas être remplacée par des mesures moins coercitives définies à l’alinéa 2 dudit paragraphe (3) qui pourraient être efficacement appliquées. Ainsi plus particulièrement le ministre doit vérifier si l’assignation à résidence peut être prononcée parce que le demandeur présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite existant dans son chef.
Il s’ensuit que l’existence d’un risque de fuite non négligeable, tel que requis par l’article 28, paragraphe (2) du règlement Dublin III auquel renvoie l’article 22, paragraphe (2), point d) de la loi du 18 décembre 2015 est une condition sous-jacente devant a priori être vérifiée dans le chef de demandeurs de protection internationale qui font l’objet d’une procédure de transfert vers un autre Etat membre compétent pour le traitement de leur demande de protection internationale, respectivement des suites à y donner, pour permettre au ministre de prononcer à leur égard une mesure de rétention ou une mesure moins coercitive pouvant leur être efficacement appliquée6. Il s’ensuit encore que l’affirmation péremptoire du demandeur suivant laquelle il serait prétendument systématiquement recouru à l’assignation à résidence des demandeurs de protection internationale faisant l’objet d’une procédure de transfert dans le cadre du règlement Dublin III est à rejeter pour rester à l’état de pure allégation, le recours à une telle mesure étant strictement encadrée par la loi.
S’agissant ensuite concrètement de l’existence d’un risque de fuite non négligeable dans le chef du demandeur, il convient de rappeler que l’article 22, paragraphe (2), point d) de la loi du 18 décembre 2015 dispose que « (…) Le risque non négligeable de fuite est présumé dans les cas suivants : i. si le demandeur s’est précédemment soustrait, dans un autre État membre, à la détermination de l’État responsable de sa demande de protection internationale en vertu du droit de l’Union européenne ou à l’exécution d’une décision de transfert ou d’une mesure d’éloignement ; ii. si le demandeur fait l’objet d’un signalement dans le SIS aux fins de non-admission et d’interdiction de séjour conformément au règlement (UE) 2018/1861 du Parlement européen et du Conseil du 28 novembre 2018 sur l’établissement, le fonctionnement et l’utilisation du système d’information Schengen (SIS) dans le domaine des vérifications aux frontières, modifiant la convention d’application de l’accord de Schengen et modifiant et abrogeant le règlement (CE) n ° 1987/2006, tel que modifié, ou d’un signalement aux fins de retour conformément au règlement (UE) 2018/1860 du Parlement européen et du Conseil du 28 novembre 2018 relatif à l’utilisation du système d’information Schengen aux fins du retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, tel que modifié ; iii. si le demandeur a été débouté de sa demande de protection internationale dans l’État membre responsable ; (…) vi.
si le demandeur a dissimulé des éléments de son identité ou s’il est démontré qu’il a fait usage d’identités multiples soit sur le territoire luxembourgeois, soit sur celui d’un autre État membre ; (…) ».
Or, il ressort du dossier administratif que non seulement le demandeur a été débouté de sa demande de protection internationale dans l’Etat membre responsable de sa demande, respectivement des suites à y donner, en l’occurrence l’Allemagne, de même qu’il s’est soustrait dans ce même Etat membre à une mesure d’éloignement, mais que, par ailleurs, il fait l’objet d’un signalement dans le SIS de la part de l’Allemagne « en vue d’une décision de retour ». Il se dégage encore du dossier administratif et plus particulièrement du procès-verbal établi par la police grand-ducale le 24 mars 2025, ainsi que du courrier du 16 avril 2025 des 6 Cour adm., 24 novembre 2017, n° 40390C du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu.autorités allemandes acceptant la reprise en charge de Monsieur (A) que l’intéressé est connu sous différents alias. Au vu de tous ces éléments, un risque de fuite non négligeable est présumé dans son chef et les contestations afférentes du demandeur sont à rejeter.
Il convient toutefois encore d’ajouter que la justification d’une mesure d’assignation à résidence est axée non pas sur l’existence d’un risque de fuite non négligeable, mais sur l’existence dans le cas d’espèce de garanties de représentation effectives propres à prévenir ledit risque de fuite, lesquelles garanties pouvant découler non seulement de mesures concrètes proposées par le demandeur de protection internationale ou imposées par le ministre, mais également de la situation personnelle existante du demandeur au moment de la prise de décision7.
Or, en l’espèce, le ministre a considéré qu’il existe dans le chef de l’intéressé un risque non négligeable de fuite établissant qu’il a l’intention de se soustraire aux autorités luxembourgeoises dans le seul but de faire obstacle à une mesure d’éloignement vers l’Allemagne, mais qu’il présentait toutefois des garanties de représentation suffisantes pour ne pas être placé en rétention et de bénéficier de la mesure moins coercitive prévue à l’article 22, paragraphe (3), point b) de la loi du 18 décembre 2015, à savoir l’assignation à résidence.
A cet égard, le demandeur reste en défaut de soumettre au tribunal le moindre élément concret de nature à renverser la présomption de risque de fuite existant dans son chef.
Il s’ensuit qu’aucun reproche ne saurait a priori être adressé au ministre pour avoir, en application de l’article 22, paragraphes (2) et (3) de la loi du 18 décembre 2015, considéré que l’assignation à résidence à la maison retour est de nature à prévenir un risque de fuite dans le chef de Monsieur (A) au vu de son obligation de passer les nuits dans cette structure, cette mesure permettant, au contraire, au ministre de s’assurer que l’exécution du transfert de l’intéressé puisse être menée à bien.
Cette conclusion n’est pas ébranlée par les reproches du demandeur tenant à une violation des dispositions de la loi accueil du 18 décembre 2015, respectivement de l’article 6 de la Charte.
En effet, pour ce qui est tout d’abord du moyen tenant à une violation de la loi accueil du 18 décembre 2015, il y a lieu de relever que certes en vertu de son article 1er, cette loi « a pour objectif d’établir des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale (…) sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg, ainsi que les droits des bénéficiaires de la protection internationale » et que, toujours suivant le même article, elle « s’applique à tous les ressortissants de pays tiers et apatrides qui présentent une demande de protection internationale sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg (…), tant qu’ils sont autorisés à demeurer sur le territoire en qualité de demandeurs, ainsi qu’aux membres de leur famille, s’ils sont couverts par cette demande de protection internationale », tandis qu’en vertu de son article 10, paragraphe (1), « Le demandeur est logé dans une des structures d’hébergement suivantes : a) structures d’hébergement publiques ; b) structures d’hébergement privées », les structures d’hébergement étant encore définies à l’article 2, point h) de la même loi comme une « structure communautaire ou individuelle où sont hébergés les demandeurs ». Il n’en reste pas moins que, tel que relevé ci-avant, l’assignation à résidence dont fait l’objet le demandeur s’inscrit dans le contexte spécifique de l’article 22, 7 Ibidem.paragraphe (2), point d) de la loi du 18 décembre 2015, en vertu duquel un demandeur de protection internationale peut être placé en rétention conformément à l’article 28 du règlement Dublin III lorsqu’il existe un risque non négligeable de fuite dans son chef, à moins que d’autres mesures moins coercitives peuvent être appliquées efficacement. Or, il vient d’être retenu ci-
avant que c’était à bon droit que le ministre avait considéré qu’il existait dans le chef du demandeur un risque de fuite non négligeable susceptible de justifier son placement au Centre de rétention, mais qu’il présentait toutefois des garanties de représentation suffisantes pour ne pas être placé en rétention et de bénéficier d’une mesure moins coercitive, en l’occurrence celle de l’assignation à résidence à la maison retour.
Au vu de ces considérations, la loi accueil du 18 décembre 2015 qui prévoit les conditions dans lesquelles les demandeurs de protection internationale sont « logés » dans une des structures d’hébergement énumérées dans son article 10 et qui permet, à travers son article 11 « [p]ar dérogation à l’article 10 », d’héberger un demandeur « dans une structure d’accueil d’urgence » uniquement « lorsque les capacités d’hébergement normalement disponibles sont temporairement épuisées », ne trouve pas à s’appliquer au demandeur.
Dans la mesure où l’article 22, paragraphe (2), point d) de la loi du 18 décembre 2015 permet, quant à lui, expressément au ministre d’assigner un demandeur de protection internationale par rapport auquel il a estimé qu’il existait des garanties de représentations effectives propres à prévenir le risque de fuite non négligeable retenu dans son chef « dans les lieux fixés » par lui, aucun reproche ne saurait être adressé au ministre pour avoir assigné le demandeur en l’espèce à la maison retour et non pas dans une des « structures d’hébergement » prévues à l’article 10 de la loi accueil du 18 décembre 2015. Ce constat s’impose d’autant plus que, tel que relevé ci-avant, l’assignation à résidence dans une structure telle que la maison retour doit, en l’espèce, être considérée comme étant de nature à prévenir le risque de fuite présumé dans le chef de Monsieur (A) au vu de son obligation de passer les nuits dans cette structure, cette mesure permettant, en effet, au ministre de s’assurer que l’exécution du transfert de l’intéressé puisse être menée à bien.
Le moyen afférent est dès lors à rejeter.
Pour ce qui est enfin du moyen tenant à une violation par la décision déférée de l’article 6 de la Charte, aux termes duquel « Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. », le tribunal se doit de relever que dans la mesure où l’assignation à résidence à la maison retour a comme seule conséquence d’imposer un lieu de résidence déterminé où l’intéressé pourra être contacté et retrouvé en cas de besoin par les services du ministre, ainsi qu’une obligation de présentation à raison de deux fois par jour, il ne saurait être question d’une privation de sa liberté d’aller et de venir contraire audit article. Ce constat n’est pas ébranlé par l’affirmation péremptoire du demandeur suivant laquelle les conditions de vie dans la maison retour correspondraient à un centre semi-fermé au vu des fouilles quotidiennes, du régime de contrôle et des restrictions aux mouvements prescrites par son règlement interne, les mesures de contrôle ainsi décrites n’étant pas non plus de nature à dénoter une atteinte suffisamment caractérisée à sa vie privée ou à sa liberté d’aller et de venir.
Au vu des développements qui précèdent, en l’état actuel du dossier et en l’absence d’autres moyens, en ce compris des moyens à soulever d’office, le tribunal ne saurait utilement mettre en cause ni la légalité ni le bien-fondé de la décision déférée.
Il s’ensuit que le recours sous analyse est à rejeter comme non fondé.
Par ces motifs, le tribunal administratif, cinquième chambre, statuant contradictoirement ;
reçoit le recours en réformation en la forme ;
au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;
condamne le demandeur aux frais et dépens de l’instance.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 28 mai 2025 par :
Emilie Da Cruz De Sousa, premier juge, Georges Gedgen, attaché de justice délégué, Melvin Roth, attaché de justice délégué, en présence du greffier Luana Poiani.
s. Luana Poiani s. Emilie Da Cruz De Sousa Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 28 mai 2025 Le greffier du tribunal administratif 13