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11/03/2025 | LUXEMBOURG | N°52475

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 11 mars 2025, 52475


Tribunal administratif N° 52475 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:52475 3e chambre Inscrit le 5 mars 2025 Audience publique du 11 mars 2025 Recours formé par Monsieur (A), connu sous différents alias, …, contre une décision du ministre des Affaires intérieures en matière de rétention administrative (art. 120, L. 29.08.2008)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 52475 du rôle et déposée le 5 mars 2025 au greffe du tribunal administratif par Maître

Eric SAYS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, ...

Tribunal administratif N° 52475 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:52475 3e chambre Inscrit le 5 mars 2025 Audience publique du 11 mars 2025 Recours formé par Monsieur (A), connu sous différents alias, …, contre une décision du ministre des Affaires intérieures en matière de rétention administrative (art. 120, L. 29.08.2008)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 52475 du rôle et déposée le 5 mars 2025 au greffe du tribunal administratif par Maître Eric SAYS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A), déclarant être né le … à … (Tunisie) et être de nationalité tunisienne, connu sous différents alias, actuellement retenu au Centre de rétention au Findel, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires intérieures du 25 février 2025 ayant ordonné la prorogation de son placement au Centre de rétention pour une durée d’un mois à partir de la notification de la décision en question ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 7 mars 2025 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Madame le délégué du gouvernement Pascale MILLIM en sa plaidoirie à l’audience publique de ce jour, Maître Eric SAYS s’étant excusé.

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Le 14 septembre 2021, Monsieur (A), alias …, né le … et de nationalité algérienne, alias …, né le … et de nationalité syrienne, désigné ci-après par « Monsieur (A) », introduisit auprès du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par « la loi du 18 décembre 2015 ».

Le même jour, Monsieur (A) fut entendu par un agent de la police grand-ducale, service de police judiciaire, section criminalité organisée – police des étrangers, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg. Il s’avéra à cette occasion, tel que confirmé par une recherche effectuée le même jour dans la base de données EURODAC, que Monsieur (A) avait préalablement introduit une demande de protection internationale en France en date du 4 novembre 2020. Il s’avéra encore à cette occasion, suite à une recherche dans la base de données du système d’information Schengen (« SIS ») que Monsieur (A) faisait l’objet de deux 1signalements de la part des autorités françaises pour « Interdiction de l’accès ou du séjour dans l’espace Schengen d’un ressortissant d’un pays tiers » respectivement « contrôle spécifique ».

Il ressort également du dossier administratif qu’en date du même jour, des renseignements complémentaires portant sur la situation administrative de Monsieur (A) furent adressés aux autorités luxembourgeoises par les autorités françaises via le réseau nommé « SIRENE » (Supplément d’Information Requis à l’Entrée Nationale), lesquelles indiquèrent que l’intéressé était connu en France pour des faits de « violence avec usage ou menace d’une arme suivie d’incapacité n’excédant pas 8 jours », « recel de bien provenant d’un vol en réunion », « soustraction à l’exécution d’une mesure de reconduite à la frontière », « violence sans incapacité par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité », « vol simple » et « menace de mort réitérée ».

Toujours en date du même jour, Monsieur (A) fut entendu par un agent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, en vue de déterminer l’Etat responsable de l’examen de sa demande de protection internationale en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ci-après désigné par le « règlement Dublin III ».

En date du 20 septembre 2021, les autorités luxembourgeoises contactèrent les autorités françaises aux fins de la reprise en charge de Monsieur (A) sur base de l’article 18, paragraphe (1), point b) du règlement Dublin III, demande qui fut acceptée par ces dernières en date du 1er octobre 2021 sur le fondement du même article.

Par arrêté du 21 septembre 2021, le ministre de l’Immigration et de l’Asile ordonna l’assignation à résidence de Monsieur (A) à … pour une durée de trois mois.

Par décision du 14 octobre 2021, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, informa Monsieur (A) qu’en vertu des dispositions de l’article 28, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 et de celles de l’article 18, paragraphe (1), point b) du règlement Dublin III, le Grand-Duché de Luxembourg n’examinerait pas sa demande de protection internationale et qu’il serait transféré vers la France, Etat membre responsable pour traiter sa demande de protection internationale.

En date du 19 novembre 2021, les autorités luxembourgeoises informèrent leurs homologues français qu’en raison de la disparition de Monsieur (A), le délai de transfert devrait être prolongé sur base de l’article 29, paragraphes (1) et (2) du règlement Dublin III.

Il se dégage ensuite d’un rapport de la police grand-ducale, région Capitale, Commissariat …, référencé sous le numéro …, dit « Fremdennotiz », du 22 novembre 2021, que le même jour, Monsieur (A) fut interpellé par les forces de l’ordre suite à des faits de troubles à l’ordre public et qu’à cette occasion l’intéressé ne fut pas en mesure de présenter des documents d’identité ou de voyage valables.

Il ressort encore d’un rapport de la police grand-ducale, région Nord, Commissariat …, référencé sous le numéro …, du 16 décembre 2021, qu’en date du même jour, Monsieur (A) fit l’objet d’un contrôle d’identité où il ne put présenter des documents d’identité ou de voyage valables.

2Par arrêté du 16 décembre 2021, notifié à l’intéressé le même jour, le ministre de l’Immigration et de l’Asile ordonna, sur base de l’article 22 de la loi du 18 décembre 2015, le placement de Monsieur (A) au Centre de rétention pour une durée maximale de trois mois à partir de la notification de l’arrêté en question.

Une demande de renseignements via le Centre de coopération policière et douanière, désigné ci-après par « le CCPD » en date du 24 décembre 2021 révéla que l’intéressé était signalé et connu en France pour diverses infractions, qu’il y faisait l’objet d’une interdiction administrative de retour et qu’il y avait fait l’objet d’une condamnation par le tribunal correctionnel de … en date du 22 mai 2020.

Par arrêté du 15 mars 2022, notifié à l’intéressé le lendemain, le ministre de l’Immigration et de l’Asile ordonna la prorogation du placement de Monsieur (A) au Centre de rétention pour une durée de trois mois à partir de la notification de l’arrêté en question.

Par arrêté du 14 juin 2022, notifié à l’intéressé le 16 juin 2022, le ministre de l’Immigration et de l’Asile ordonna la prorogation du placement de Monsieur (A) au Centre de rétention pour une durée supplémentaire de trois mois à partir de la notification de l’arrêté en question.

Il ressort d’une notification de transfert aux autorités françaises et d’un plan de vol établi par la police grand-ducale, service de police judiciaire, section criminalité organisée – police des étrangers, du 21 juin 2022 figurant au dossier administratif que Monsieur (A) fut transféré vers la France le 1er juillet 2022.

Il ressort d’un rapport de la police grand-ducale, région Sud-Ouest, Commissariat …, référencé sous le numéro …, dit « Fremdennotiz », du 23 novembre 2022, d’un rapport de la police grand-ducale, région Capitale, Commissariat …, référencé sous le numéro …, dit « Fremdennotiz », du 28 novembre 2022, d’un rapport de la police grand-ducale, région Sud-

Ouest, Commissariat …, référencé sous le numéro …, dit « Fremdennotiz », du 28 janvier 2023, d’un rapport de la police grand-ducale, région Sud-Ouest, Commissariat …, référencé sous le numéro …, dit « Fremdennotiz », du 25 février 2023, d’un rapport de la police grand-ducale, région Sud-Ouest, Commissariat …, référencé sous le numéro …, dit « Fremdennotiz », du 4 mai 2023, d’un rapport de la police grand-ducale, région Sud-Ouest, Commissariat …, référencé sous le numéro …, dit « Fremdennotiz », du 22 mai 2023, d’un rapport de la police grand-

ducale, région Sud-Ouest, Commissariat …, référencé sous le numéro …, dit « Fremdennotiz », du 4 juillet 2023, d’un rapport de la police grand-ducale, région Sud-Ouest, Commissariat …, référencé sous le numéro …, dit « Fremdennotiz », du 24 juillet 2023, et d’un rapport de la police grand-ducale, région Sud-Ouest, Commissariat …, référencé sous le numéro …, dit « Fremdennotiz », du 15 décembre 2023, qu’en date des mêmes jours, Monsieur (A) fut interpellé par les forces de l’ordre suite à des faits de troubles à l’ordre public respectivement de recel et qu’à cette occasion l’intéressé ne fut pas en mesure de présenter des documents d’identité ou de voyage valables.

Il ressort enfin d’un rapport de la police grand-ducale, région Sud-Ouest, Commissariat …, référencé sous le numéro …, dit « Fremdennotiz », du 8 mars 2024, qu’en date du même jour, Monsieur (A) fit l’objet d’un contrôle d’identité où il ne put présenter des documents d’identité ou de voyage valables.

3Par arrêté du même jour, le ministre des Affaires intérieures, ci-après désigné par « le ministre », déclara le séjour de celui-ci sur le territoire luxembourgeois irrégulier et lui ordonna de quitter le territoire sans délai.

Par arrêté séparé du même jour, notifié à l’intéressé le même jour, le ministre ordonna le placement de Monsieur (A) au Centre de rétention pour une durée d’un mois à partir de la notification de l’arrêté en question.

En date des 12 mars et 15 avril 2024, les autorités luxembourgeoises contactèrent les autorités françaises aux fins de la reprise en charge de Monsieur (A) sur base de l’article 18, paragraphe (1), point d) du règlement Dublin III, demande qui fut définitivement refusée par ces dernières en date du 29 avril 2024.

Par arrêté du 5 avril 2024, notifié à l’intéressé le 8 avril 2024, le ministre ordonna la prorogation du placement de Monsieur (A) au Centre de rétention pour une durée d’un mois à partir de la notification de l’arrêté en question.

En date du 30 avril 2024, les autorités luxembourgeoises demandèrent aux autorités françaises de reconsidérer leur décision de refus, demande qui resta sans réponse.

Le 8 mai 2024, le ministre ordonna la libération immédiate de Monsieur (A).

Il ressort d’un rapport de la police grand-ducale, région Sud-Ouest, Commissariat …, référencé sous le numéro …, dit « Fremdennotiz », du 12 août 2024, d’un rapport de la police grand-ducale, région Sud-Ouest, Commissariat …, référencé sous le numéro …, dit « Fremdennotiz », du 3 octobre 2024, et d’un rapport de la police grand-ducale, région Sud-

Ouest, Commissariat …, référencé sous le numéro …, dit « Fremdennotiz », du 31 décembre 2024, qu’en date des mêmes jours, Monsieur (A) fut interpellé par les forces de l’ordre suite à des faits de troubles à l’ordre public et qu’à cette occasion l’intéressé ne fut pas en mesure de présenter des documents d’identité ou de voyage valables.

Par arrêté du 31 décembre 2024, notifié à Monsieur (A) le même jour, le ministre rapporta sa décision de retour du 8 mars 2024 et déclara le séjour de celui-ci sur le territoire luxembourgeois irrégulier, lui ordonna de quitter le territoire sans délai et lui interdit l’entrée sur le territoire pour une durée de cinq ans à partir de la sortie de l’espace Schengen.

Par arrêté séparé du même jour, notifié à l’intéressé également le même jour, le ministre ordonna le placement de Monsieur (A) au Centre de rétention pour une durée d’un mois à partir de la notification de l’arrêté en question, ledit arrêté étant fondé sur les motifs et considérations suivants :

« […] Vu les articles 111, 120 à 123 et 125 (1) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration ;

Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;

Vu les rapports no … du 31 décembre 2024, no … du 3 octobre 2024 et no … du 12 août 2024 établis par la Police grand-ducale ;

Vu ma décision de retour du 31 décembre 2024 assortie d’une interdiction d’entrée sur le territoire de cinq ans ;

4Considérant que l’intéressé est démuni de tout document d’identité et de voyage valable ;

Considérant qu’il existe un risque de fuite dans le chef de l’intéressé alors qu’il ne dispose pas d’une adresse officielle au Grand-Duché de Luxembourg ;

Considérant que les mesures moins coercitives telles qu’elles sont prévues par l’article 125, paragraphe (1), points a), b) et c) de la loi modifiée du 29 août 2008 précitée ne sauraient être efficacement appliquées ;

Considérant que les démarches nécessaires en vue de l’éloignement de l’intéressé seront engagées dans les plus brefs délais ;

Considérant que l’exécution de la mesure d’éloignement est subordonnée au résultat de ces démarches ; […] ».

Par arrêté du 30 janvier 2025, notifié à l’intéressé le lendemain, le ministre ordonna la prorogation du placement de Monsieur (A) au Centre de rétention pour une durée d’un mois à partir de la notification de l’arrêté en question.

Par arrêté du 25 février 2025, notifié à l’intéressé le 28 février 2025, le ministre prorogea le placement en rétention de Monsieur (A) une nouvelle fois pour une durée d’un mois à partir de la notification dudit arrêté, ce dernier étant fondé sur les motifs et considérations suivants :

« […] Vu les articles 111 et 120 à 123 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration ;

Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;

Vu mes arrêtés des 31 décembre 2024 et 30 janvier 2025, notifiés le 31 décembre 2024 respectivement le 31 janvier 2025, décidant de soumettre l'intéressé à une mesure de placement ;

Considérant que les motifs à la base de la mesure de placement du 31 décembre 2024 subsistent dans le chef de l’intéressé ;

Considérant que toutes les diligences en vue de l’identification de l’intéressé afin de permettre son éloignement ont été entreprises auprès des autorités compétentes ;

Considérant que ces démarches n'ont pas encore abouti ;

Considérant qu'il y a lieu de maintenir la mesure de placement afin de garantir l'exécution de la mesure de l'éloignement ; […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 5 mars 2025, Monsieur (A) a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 25 février 2025.

Etant donné que l’article 123, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008 institue un recours de pleine juridiction contre une décision de rétention administrative, le tribunal est compétent pour connaître du recours principal en réformation, lequel est, par ailleurs, recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.

Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

Moyens et arguments des parties 5A l’appui de son recours et après avoir exposé les faits et rétroactes à la base de la décision déférée, tels que rappelés ci-avant, le demandeur, en droit et quant à la légalité externe, se rapporte à prudence de justice en ce qui concerne la compétence du ministre pour prendre l’arrêté litigieux.

Quant à la légalité interne de la décision déférée, et après avoir cité l’article 120, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008, le demandeur conteste que les démarches requises pour exécuter son éloignement dans les meilleurs délais auraient été entamées par le ministre.

Il conteste encore l’existence d’un danger de fuite dans son chef.

Enfin, il soutient que ni le manque de démarches nécessaires des autorités, ni l’absence de vols ne saurait justifier son placement en rétention.

Le demandeur en conclut que son placement au Centre de rétention ne serait pas justifié.

Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet du recours pour ne pas être fondé.

Appréciation du tribunal C’est de prime abord à tort que le demandeur conteste, par le fait de s’être rapporté à prudence de justice, la compétence du ministre ayant pris la décision déférée, étant donné qu’en vertu de l’article 3, point g) de la loi du 29 août 2008, le ministre visé dans les dispositions de cette loi est le membre du gouvernement ayant l’immigration dans ses attributions, soit, conformément à l’annexe B du règlement interne du Gouvernement tel qu’approuvé par arrêté grand-ducal du 27 novembre 2023 portant approbation et publication du règlement interne du Gouvernement, le ministre des Affaires intérieures.

Le moyen de légalité externe afférent est dès lors à rejeter pour ne pas être fondé.

Quant à la légalité interne de la décision déférée, le tribunal relève qu’aux termes de l’article 120, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008 : « Afin de préparer l’éloignement en application des articles 27, 30, 100, 111, 116 à 118, […], l’étranger peut, sur décision du ministre, être placé en rétention dans une structure fermée, à moins que d’autres mesures moins coercitives telles que prévues à l’article 125, paragraphe (1), ne puissent être efficacement appliquées. Une décision de placement en rétention est prise contre l’étranger en particulier s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. […] ».

Par ailleurs, en vertu de l’article 120, paragraphe (3) de la même loi : « La durée de la rétention est fixée à un mois. La rétention ne peut être maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. Elle peut être reconduite par le ministre à trois reprises, chaque fois pour la durée d’un mois si les conditions énoncées au paragraphe (1) qui précède sont réunies et qu’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien.

6Si, malgré les efforts employés, il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération de l’étranger ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires, la durée de la rétention peut être prolongée à deux reprises, à chaque fois pour un mois supplémentaire. ».

L’article 120, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008 permet ainsi au ministre, afin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement, de placer l’étranger concerné en rétention dans une structure fermée pour une durée maximale d’un mois, ceci plus particulièrement s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. En effet, la préparation de l’exécution d’une mesure d’éloignement nécessite notamment la mise à disposition de documents de voyage valables, lorsque l’intéressé ne dispose pas des documents requis pour permettre son éloignement et que des démarches doivent être entamées auprès d’autorités étrangères notamment en vue de l’obtention d’un accord de réadmission ou de reprise en charge de l’intéressé. Elle nécessite encore l’organisation matérielle du retour, en ce sens qu’un moyen de transport doit être choisi et que, le cas échéant, une escorte doit être organisée. C’est précisément afin de permettre à l’autorité compétente d’accomplir ces formalités que le législateur a prévu la possibilité de placer un étranger en situation irrégulière en rétention pour une durée maximale d’un mois, mesure qui peut être prorogée par la suite.

En vertu de l’article 120, paragraphe (3) de la même loi, le maintien de la rétention est cependant conditionné par le fait que le dispositif d’éloignement soit en cours et soit exécuté avec toute la diligence requise, impliquant plus particulièrement que le ministre est dans l’obligation d’entreprendre toutes les démarches requises pour exécuter l’éloignement dans les meilleurs délais.

Une mesure de placement peut être reconduite à trois reprises, chaque fois pour une durée d’un mois, si les conditions énoncées au paragraphe (1) de l’article 120, précité, sont réunies et s’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien.

Une décision de prorogation d’un placement en rétention est partant en principe soumise à la réunion de quatre conditions, à savoir que les conditions ayant justifié la décision de rétention initiale soient encore données, que le dispositif d’éloignement soit toujours en cours, que celui-ci soit toujours poursuivi avec la diligence requise et qu’il y ait des chances raisonnables de croire que l’éloignement en question puisse être « mené à bien ».

En ce qui concerne d’abord les contestations de l’intéressé quant à l’existence, dans son chef, d’un risque de fuite, le tribunal constate qu’il est constant en cause que le demandeur est en séjour irrégulier au Luxembourg, étant relevé qu’une décision de retour comportant une interdiction d’entrée sur le territoire d’une durée de cinq ans a été prise à son encontre le 31 décembre 2024, décision qui ne fait pas l’objet de la présente instance contentieuse.

Il s’ensuit qu’il existe, dans son chef, un risque de fuite qui est présumé en vertu de l’article 111, paragraphe (3), point c), numéro 1. de la loi du 29 août 2008, aux termes duquel « […] Le risque de fuite dans le chef du ressortissant de pays tiers est présumé […] s’il ne remplit pas ou plus les conditions de l’article 34 […] », étant précisé, à cet égard, que parmi 7les conditions posées par ledit article 34 de la loi du 29 août 2008 figurent justement celles d’être en possession d’un passeport et d’un visa en cours de validité ou d’une autorisation de voyage en cours de validité et de ne pas faire, tel que c’est pourtant le cas pour le demandeur, l’objet d’un signalement dans le SIS, ni d’une décision d’interdiction d’entrée sur le territoire, telles que prévues au paragraphe (2), points 1. à 3. de la disposition légale en question.

Dès lors, et dans la mesure où le concerné est resté en défaut de soumettre au tribunal le moindre élément permettant de renverser cette présomption de risque de fuite dans son chef, ses contestations quant à l’existence d’un risque de fuite dans son chef sont à rejeter, ce constat étant d’autant plus renforcé par un courrier de son litismandataire adressé au ministre en date du 17 février 2025 par lequel il l’a informé de son intention de se rendre en France, étant relevé que le risque de fuite se définit comme le risque de se soustraire à sa mesure d’éloignement.

Il s’ensuit que le ministre pouvait a priori valablement, sur base de l’article 120, paragraphe (1) précité de la loi du 29 août 2008, placer et maintenir le demandeur en rétention afin d’organiser son éloignement.

En ce qui concerne ensuite les contestations du demandeur quant aux démarches entreprises par le ministre en vue de permettre l’éloignement du demandeur dans les meilleurs délais, le tribunal constate qu’il ressort du dossier administratif que par courrier électronique du 24 janvier 2025, le ministre s’est adressé aux autorités consulaires tunisiennes en se référant à un courrier électronique leur adressé le 3 janvier 2025 dans le cadre d’une demande d’identification du demandeur en vue de la délivrance d’un laissez-passer et s’enquit de l’état d’avancement du dossier.

Il en ressort encore que par courrier électronique du 7 février 2025, le ministre a adressé un nouveau rappel aux autorités consulaires tunisiennes.

Les 21 février et 7 mars 2025, les autorités luxembourgeoises relancèrent de nouveau les autorités consulaires tunisiennes et s’enquirent de l’état d’avancement du dossier du demandeur.

Force est ainsi de constater, au regard des diligences accomplies à ce jour par le ministre, actuellement tributaire de la collaboration des autorités étrangères - étant relevé qu’il ne saurait être nui aux relations diplomatiques par un nombre exagéré de rappels adressés aux autorités étrangères compétentes -, que c’est à tort que le demandeur estime que le ministre n’aurait pas accompli les démarches appropriées et nécessaires afin de préparer son éloignement rapide du territoire luxembourgeois. Les démarches concrètement entreprises en l’espèce par l’autorité ministérielle doivent, au contraire, être considérées comme étant à ce stade suffisantes au regard des exigences de l’article 120 de la loi du 29 août 2008, de sorte que les contestations afférentes du demandeur sont à rejeter.

Eu égard aux développements qui précèdent et en l’absence d’autres moyens, en ce compris des moyens à soulever d’office, le tribunal ne saurait, en l’état actuel du dossier, utilement mettre en cause ni la légalité ni le bien-fondé de la décision déférée.

8Il s’ensuit que le recours sous analyse est à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours principal en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

condamne le demandeur aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 11 mars 2025 par :

Thessy Kuborn, premier vice-président, Laura Urbany, premier juge, Felix Hennico, attaché de justice délégué, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 11 mars 2025 Le greffier du tribunal administratif 9


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 52475
Date de la décision : 11/03/2025

Origine de la décision
Date de l'import : 15/03/2025
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2025-03-11;52475 ?

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