Tribunal administratif N° 52277 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:52277 2e chambre Inscrit le 24 janvier 2025 Audience publique du 3 février 2025 Recours formé par Monsieur (A), Findel, contre une décision du ministre des Affaires intérieures, en matière de rétention administrative (art. 22, L.18.12.2015)
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 52277 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 24 janvier 2025 par Maître Sanae IGRI, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A), déclarant être né le … à … (Iran) et être de nationalité iranienne, actuellement retenu au Centre de rétention au Findel, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires intérieures du 4 novembre 2024 ayant ordonné son placement au Centre de rétention pour une durée maximale de trois mois à partir de la notification de la décision en question ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 29 janvier 2024 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Marina LIFA, en remplacement de Maître Sanae IGRI, et Madame le délégué du gouvernement Sarah ERNST en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique de ce jour.
Le 23 mars 2023, Monsieur (A), alias (A), désigné ci-après par « Monsieur (A) », introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, une demande en obtention d’une protection internationale au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par « la loi du 18 décembre 2015 ».
Le même jour, Monsieur (A) fut entendu par un agent de la police grand-ducale, service de police judiciaire, section criminalité organisée - police des étrangers, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.
Il s’avéra à cette occasion, tel que confirmé par une recherche dans la base de données EURODAC, que Monsieur (A) avait préalablement introduit une demande de protection internationale en Lituanie le 24 août 2021.
Par décision du 14 septembre 2023, notifiée à l’intéressé en mains propres le même jour, le ministre de l’Immigration et de l’Asile informa Monsieur (A) de sa décision de le transférer dans les meilleurs délais vers la Lituanie sur base des dispositions de l’article 28, 1paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 et de celles de l’article 18, paragraphe (1), point b) du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ci-après désigné par « le règlement Dublin III ».
Le recours introduit à l’encontre de la décision du 14 septembre 2023 fut rejeté par un jugement du tribunal administratif du 25 octobre 2023, inscrit sous le numéro 49491 du rôle.
En date du 16 novembre 2023, Monsieur (A) fut transféré vers la Lituanie.
Le 2 août 2024, Monsieur (A) introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires intérieures, direction générale de l’Immigration, ci-après désigné par « le ministère », une deuxième demande en obtention d’une protection internationale au sens de la loi du 18 décembre 2015.
Le même jour, Monsieur (A) fut entendu par un agent de la police grand-ducale, service de police judiciaire, section criminalité organisée, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.
Par arrêté du 2 août 2024, notifié à l’intéressé le même jour, le ministre des Affaires intérieures, entretemps en charge du dossier, ci-après désigné par « le ministre », décida de placer Monsieur (A) au Centre de rétention pour une durée maximale de trois mois à partir de la notification de la décision en question.
Toujours le 2 août 2024, les autorités luxembourgeoises contactèrent leurs homologues lituaniens en vue de la reprise en charge de l’intéressé sur base de l’article 18, paragraphe (1), point d) du règlement Dublin III, demande qui fut acceptée par lesdites autorités lituaniennes en date du 7 août 2024 sur base de la même disposition réglementaire.
Par décision du 9 août 2024, notifiée à l’intéressé en mains propres le 19 août 2024, le ministre informa Monsieur (A) de sa décision de le transférer dans les meilleurs délais vers la Lituanie sur base des dispositions de l’article 28, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 et de celles de l’article 18, paragraphe (1), point d) du règlement Dublin III.
Le recours contentieux introduit en date du 23 août 2024 contre la décision de transfert précitée fut rejeté par jugement du tribunal administratif du 23 septembre 2024, inscrit sous le numéro 50972 du rôle.
Le 30 septembre 2024, le ministre chargea l’Unité de Garde et d’Appui Opérationnel (« UGAO ») de la police grand-ducale d’organiser le transfert de l’intéressé vers la Lituanie.
Par arrêté du 30 octobre 2024, notifié à l’intéressé le lendemain, le ministre prorogea la mesure de placement initiale de Monsieur (A) pour une nouvelle durée de trois mois avec effet au 2 novembre 2024.
Il se dégage ensuite d’un rapport de la police grand-ducale du 4 novembre 2024, référencé sous le numéro …, que le transfert initialement prévu pour le 4 novembre 2024 ne put 2être exécuté en raison de l’opposition manifestée par Monsieur (A) lors de la phase d’embarquement dans l’avion.
Par arrêté du même jour, notifié à l’intéressé le jour même, le ministre ordonna sur le fondement de l’article 22, paragraphe (2), point d) de la loi modifiée du 18 décembre 2015, le placement de Monsieur (A) au Centre de rétention pour une durée maximale de trois mois à partir de la notification de la décision en question. Ledit arrêté est motivé comme suit :
« […] Vu l’article 22 de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire ;
Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;
Attendu que l’intéressé a déjà été transféré en date du 16 novembre 2023 vers la Lituanie en vertu de l’article 18, paragraphe (1), point b) du règlement (UE) n°604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
Attendu que l’intéressé s’est de nouveau présenté sur le territoire luxembourgeois après l’exécution effective d’une mesure de transfert ;
Attendu que l’intéressé a introduit une deuxième demande de protection internationale au Luxembourg en date du 2 août 2024 ;
Attendu que l’intéressé est signalé au système EURODAC comme ayant introduit une demande de protection internationale en Lituanie et une demande au Luxembourg ;
Attendu mon arrêté du 2 août 2024, notifié le 2 août 2024, décidant de soumettre l’intéressé à une mesure de placement ;
Attendu l’accord de reprise en charge des autorités lituaniennes du 7 août 2024 sur base de l’article 18, paragraphe (1), point d) du règlement (UE) n°604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
Attendu ma décision de transfert du 9 août 2024 ;
Considérant que le transfert vers la Lituanie était prévu pour le 4 novembre 2024 ;
Considérant que l’intéressé s’est opposé au moment de l’embarquement, de sorte que le transfert a dû être interrompu ;
Considérant que le transfert immédiat de l’intéressé est impossible en raison de circonstances de fait ;
Considérant qu’il existe un risque de fuite non négligeable dans le chef de l’intéressé comme défini à l’article 22, paragraphe (2), point d) de la loi modifiée du 18 décembre 2015 précitée ;
Considérant que le transfert vers la Lituanie sera organisé dans les meilleurs délais ;
Considérant que l’exécution de la mesure de son transfert est subordonnée au résultat de ces démarches ; […] ».
Il se dégage du dossier administratif que suivant le dernier plan de vol établi en date du 14 janvier 2025 par l’UGAO, le transfert de Monsieur (A) vers la Lituanie est actuellement prévu pour le 17 février 2025 par le biais d’un vol direct à partir de Bruxelles.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 24 janvier 2025, Monsieur (A) a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de l’arrêté ministériel, précité, du 4 novembre 2024.
Etant donné que l’article 22, paragraphe (6) de la loi du 18 décembre 2015 institue un recours de pleine juridiction contre une décision de rétention administrative, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit par le requérant à titre principal.
3 Ledit recours est encore recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi.
Il n’y a partant pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.
A l’appui de son recours, le demandeur reprend, en substance, les faits et rétroactes tels qu’exposés ci-dessus, tout en précisant que si son transfert vers la Lituanie initialement prévu pour le 4 novembre 2024 n’avait pas abouti ce serait en raison de ses problèmes de santé, l’intéressé expliquant être psychologiquement instable et souffrir de dépressions depuis plusieurs années. Il ajoute avoir déjà tenté par le passé de mettre fin à ses jours et être actuellement sous traitement médical, tel qu’en attesterait l’ordonnance médicale émise le 30 juillet 2024 par le docteur (B).
Le demandeur affirme encore que lors de l’exécution de son transfert, il aurait été victime de violences policières dont il aurait fourni le détail à l’occasion du dépôt d’une plainte.
En droit et après avoir cité l’article 22, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015, le demandeur conteste la légalité externe de l’arrêté ministériel litigieux en affirmant qu’il ne contiendrait que des formules stéréotypées et ne serait pas suffisamment motivé. Il estime que l’autorité ministérielle se serait plus particulièrement abstenue d’indiquer précisément et concrètement les circonstances de fait ayant conduit à l’impossibilité de l’éloigner, le demandeur estimant que la seule référence faite à son opposition à l’éloignement ne serait pas suffisante compte tenu du fait que ce serait en réalité son instabilité psychologique qui aurait rendu l’éloignement impossible. Tout en soutenant avoir subi des violences policières, il affirme également avoir informé les policiers chargés de son transfert que sa vie serait en danger en Lituanie. Il ajoute que comme il aurait eu les mains menottées et qu’il ne se serait montré ni menaçant ni agressif, il devrait être admis qu’il avait fait preuve d’un comportement irréprochable à l’égard des policiers.
En ce qui concerne la légalité interne de l’arrêté ministériel litigieux, le demandeur reproche au ministre de ne pas lui avoir appliqué l’une des mesures moins coercitives prévues à l’article 22, paragraphe (3) de la loi du 18 décembre 2015 alors même que « [l]ors de son séjour », il aurait exprimé sa volonté de respecter les obligations lui imposées par le ministre en vue d’organiser son éloignement.
Après avoir relevé qu’en tout état de cause le placement au Centre de rétention, qui serait constitutif d’une entrave à sa liberté d’aller et venir laquelle serait garantie par l’article 5 de la de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales (« CEDH »), devrait rester une mesure exceptionnelle à laquelle il existerait des alternatives, il fait valoir qu’il faudrait réexaminer sa situation personnelle et qu’un tel réexamen permettrait de constater que son placement au Centre de rétention serait incompatible avec son état de santé, de sorte à constituer un traitement inhumain et dégradant au sens de l’article 3 de la CEDH ainsi qu’une entrave à sa liberté d’aller et de venir. Ce constat s’imposerait d’autant plus eu égard au fait que le demandeur représenterait un danger pour lui-même et qu’en conséquence son état de santé nécessiterait une surveillance médicale en continu en milieu hospitalier.
4Au vu de ces considérations, il sollicite son placement en milieu hospitalier, sinon dans tout autre établissement spécialisé dans lequel des soins appropriés à son état de santé lui seront prodigués, sinon au sein de la maison retour.
Après avoir cité l’article 22, paragraphe (3) de la loi du 18 décembre 2015 définissant les mesures moins coercitives pouvant être ordonnées à la place d’une mesure de placement en rétention, il souligne que le placement dans une structure fermée d’un étranger présentant des garanties de représentation propres à limiter sinon à exclure tout risque de fuite dans son chef serait à considérer comme illégal, tel que cela ressortirait de l’article 15, paragraphes (2) et (4) de la directive 2008/115/CE du Parlement Européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, dénommée ci-après « la directive 2008/115 », selon lequel le ressortissant concerné d’un pays tiers devrait être immédiatement remis en liberté si sa rétention n’est pas légale, article qui serait suffisamment clair et inconditionnel, de sorte qu’il devrait, faute de transposition dans le droit national, être d’application directe.
Il précise ensuite qu’aucun risque de fuite ne serait établi dans son chef alors qu’il aurait fait preuve d’un comportement irréprochable et respectueux au Centre de rétention, de même qu’il aurait manifesté sa volonté de coopérer avec les autorités luxembourgeoises. Tout en insistant sur ses problèmes de santé qui nécessiteraient une prise en charge, respectivement un suivi en milieu hospitalier, il conclut que son maintien en rétention ne serait plus justifié, serait illégal et disproportionné au but recherché en raison de l’existence de mesures moins coercitives, le demandeur étant d’avis qu’un placement dans une structure hospitalière sinon à la maison retour seraient constitutives dans son chef d’une garantie de représentation suffisante.
Le demandeur cite encore, dans ce contexte, un jugement du tribunal administratif du 19 février 2009, inscrit sous le numéro 25374 du rôle, qui aurait souligné l’importance de vérifier, par rapport à la situation d’un étranger, si une structure particulière répond aux critères posés par le principe de proportionnalité en tenant compte de l’opportunité du principe de l’enfermement et du type de structure fermée retenu par le ministre.
Par ailleurs, le demandeur fait valoir que « dans le droit commun », le juge aurait « une certaine habitude de formules permettant à un justiciable d’indiquer qu’il sera présent à une audience sans qu’il soit nécessaire de recourir à son emprisonnement jusque-là ». D’après le demandeur, le risque de « volatilité » pourrait être contré du moment que l’intéressé n’aurait pas enfreint ses obligations et vivrait dans un cadre lui permettant de rendre compte de sa présence.
Au vu de l’ensemble de ces considérations, il conclut à la réformation de l’arrêté de placement litigieux et à sa libération immédiate.
Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet du recours pour n’être fondé en aucun de ses moyens.
Quant à la légalité externe de l’arrêté ministériel déféré et, plus particulièrement, au moyen tiré d’une insuffisance de motivation de celui-ci, le tribunal relève tout d’abord que s’il est vrai qu’en vertu de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, dénommé ci-après le « règlement grand-ducal du 8 juin 1979 », toute décision administrative doit reposer sur des motifs légaux et les catégories de décisions y énumérées doivent formellement indiquer les 5motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui leur sert de fondement et des circonstances de fait à leur base, le cas d’espèce sous examen ne tombe cependant dans aucune des hypothèses énumérées à l’alinéa 2 de l’article 6 précité, de sorte que l’obligation inscrite à l’article 6, alinéa 2, du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 précité, ne trouve pas à s’appliquer en l’espèce.
Il n’en demeure pas moins que l’article 22, paragraphe (4) de la loi du 18 décembre 2015, en vertu duquel : « […] La décision de placement en rétention indique les motifs de fait et de droit sur lesquels elle est basée […] », impose une obligation de motivation des décisions de rétention administrative fondées sur ledit article 22.
En l’espèce, force est au tribunal de constater que la décision déférée satisfait à l’exigence de motivation se dégageant de cette disposition légale, en ce qu’elle indique en détail et par référence aux textes légaux applicables - en l’occurrence la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention, ci-après désignée par « la loi du 28 mai 2009 », ainsi que l’article 22 de la loi du 18 décembre 2015 - les motifs gisant à la base de la mesure de placement en rétention, à savoir plus particulièrement les considérations selon lesquelles (i) il existerait un risque de fuite non négligeable dans le chef de l’intéressé, au sens de l’article 22, paragraphe (2), point d) de la loi du 18 décembre 2015, de sorte que le placement en rétention s’avérerait nécessaire de ce fait, (ii) l’intéressé aurait introduit en date du 2 août 2024 une deuxième demande de protection internationale au Luxembourg après avoir déjà été transféré en date du 16 novembre 2023 vers la Lituanie en vertu de l’article 18, paragraphe (1), point b) du règlement Dublin (iii) les autorités lituaniennes auraient accepté la reprise en charge de l’intéressé en date du 7 août 2024 sur base de l’article 18, paragraphe (1), point d) du règlement Dublin III, (iv) une décision de transfert aurait été prise par le ministre en date du 9 août 2024 et le transfert prévu vers la Lituanie en date du 4 novembre 2024 aurait dû être interrompu parce que l’intéressé s’était opposé à son éloignement au moment de l’embarquement et (vi) comme le transfert vers la Lituanie serait réorganisé dans les meilleurs délais, l’exécution de la mesure de transfert serait subordonnée au résultat des démarches entreprises.
Au vu des considérations qui précèdent, le moyen tenant à une absence de motivation d’un point de vue purement formel de l’arrêté ministériel litigieux est à rejeter pour ne pas être fondé, étant relevé que le ministre n’avait pas à spécifier les circonstances de fait exactes ayant empêché que le transfert du demandeur initialement prévu pour le 4 novembre 2024 ait pu être mené à bien, ces circonstances n’étant susceptibles de jouer un rôle que dans le cadre de l’appréciation du caractère suffisant des diligences entreprises par le ministre pour procéder au transfert du demandeur, donc au niveau de la légalité interne de la décision entreprise.
Quant à la légalité interne de l’arrêté ministériel déféré, il y a lieu de relever qu’aux termes de l’article 22, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015 : « Un demandeur ne peut être placé en rétention que :
[…] d) conformément à l’article 28 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant d’un pays tiers ou un apatride (refonte) et lorsqu’il existe un risque non négligeable de fuite établissant que le demandeur a l’intention de se 6soustraire aux autorités dans le seul but de faire obstacle à une mesure d’éloignement. Le risque non négligeable de fuite est présumé dans les cas suivants :
i. si le demandeur s’est précédemment soustrait, dans un autre État membre, à la détermination de l’État responsable de sa demande de protection internationale en vertu du droit de l’Union européenne ou à l’exécution d’une décision de transfert ou d’une mesure d’éloignement ;
ii. si le demandeur fait l’objet d’un signalement dans le SIS aux fins de non-admission et d’interdiction de séjour conformément au règlement (UE) 2018/1861 du Parlement européen et du Conseil du 28 novembre 2018 sur l’établissement, le fonctionnement et l’utilisation du système d’information Schengen (SIS) dans le domaine des vérifications aux frontières, modifiant la convention d’application de l’accord de Schengen et modifiant et abrogeant le règlement (CE) n ° 1987/2006, tel que modifié, ou d’un signalement aux fins de retour conformément au règlement (UE) 2018/1860 du Parlement européen et du Conseil du 28 novembre 2018 relatif à l’utilisation du système d’information Schengen aux fins du retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, tel que modifié ;
iii. si le demandeur a été débouté de sa demande de protection internationale dans l’État membre responsable ;
iv. si le demandeur est de nouveau présent sur le territoire luxembourgeois après l’exécution effective d’une mesure de transfert ou s’il s’est soustrait à l’exécution d’une précédente mesure de transfert ;
v. si le demandeur a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un document d’identité ou de voyage ou s’il a fait usage d’un tel document ;
vi. si le demandeur a dissimulé des éléments de son identité ou s’il est démontré qu’il a fait usage d’identités multiples soit sur le territoire luxembourgeois, soit sur celui d’un autre État membre ;
vii. si le demandeur qui a refusé le lieu d’hébergement proposé ne peut justifier du lieu de sa résidence effective ou si le demandeur qui a accepté le lieu d’hébergement proposé a abandonné ce dernier sans motif légitime ;
viii. si le demandeur a exprimé l’intention de ne pas se conformer à une décision de transfert vers l’État responsable de sa demande de protection internationale ou si une telle intention découle clairement de son comportement ;
ix. si le demandeur, sans motif légitime et bien que régulièrement convoqué ou informé, ne s’est pas soumis à une mesure préparatoire et nécessaire à l’exécution matérielle de son transfert vers l’État membre responsable ou s’il a antérieurement manifesté son intention de ne pas se conformer à une telle mesure ;
[…] 7(3) La décision de placement en rétention est ordonnée par écrit par le ministre sur la base d’une appréciation au cas par cas, lorsque cela s’avère nécessaire et si d’autres mesures moins coercitives ne peuvent être efficacement appliquées.
On entend par mesures moins coercitives :
a) l’obligation pour le demandeur de se présenter régulièrement, à intervalles à fixer par le ministre, auprès des services de ce dernier ou d’une autre autorité désignée par lui, après remise de l’original du passeport et de tout document justificatif de son identité en échange d’un récépissé valant justification de l’identité ;
b) l’assignation à résidence dans les lieux fixés par le ministre, si le demandeur présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite ; l’assignation à résidence peut être assortie, si nécessaire, d’une mesure de surveillance électronique qui emporte pour le demandeur l’interdiction de quitter le périmètre fixé par le ministre. Le contrôle de l’exécution de la mesure est assuré au moyen d’un procédé permettant de détecter à distance la présence ou l’absence du demandeur dans le prédit périmètre. La mise en œuvre de ce procédé peut conduire à imposer au demandeur, pendant toute la durée du placement sous surveillance électronique, un dispositif intégrant un émetteur. Le procédé utilisé est homologué à cet effet par le ministre. Sa mise en œuvre doit garantir le respect de la dignité, de l’intégrité et de la vie privée de la personne. La mise en œuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance et le contrôle à distance proprement dit, peuvent être confiés à une personne de droit privé ;
c) l’obligation pour le demandeur de déposer une garantie financière d’un montant de cinq mille euros à virer ou à verser soit par lui-même, soit par un tiers à la Caisse de consignation, conformément aux dispositions y relatives de la loi du 29 avril 1999 sur les consignations auprès de l’Etat. Cette somme est acquise à l’Etat en cas de fuite ou d’éloignement par la contrainte de la personne au profit de laquelle la consignation a été opérée. La garantie est restituée par décision écrite du ministre enjoignant à la Caisse de consignation d’y procéder si les motifs énoncés au paragraphe (2) ne sont plus applicables ou en cas de retour volontaire.
Les mesures moins coercitives sont ordonnées par écrit et peuvent être appliquées conjointement. En cas de défaut de respect des obligations imposées par le ministre ou en cas de risque de fuite, la mesure est révoquée et le placement en rétention est ordonné. […] ».
Il y a encore lieu de relever que le paragraphe (4) de l’article 22 de la loi du 18 décembre 2015 dispose comme suit : « La décision de placement en rétention indique les motifs de fait et de droit sur lesquels elle est basée. Elle est prise pour une durée la plus brève possible ne dépassant pas trois mois. Sans préjudice des dispositions du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 en matière de rétention, la mesure de placement en rétention peut être reconduite par le ministre chaque fois pour une durée de trois mois tant que les motifs énoncés au paragraphe 2, sont applicables, mais sans que la durée de rétention totale ne puisse dépasser douze mois.
Les procédures administratives liées aux motifs de rétention énoncés au paragraphe (2) sont exécutées avec toute la diligence voulue. Les retards dans les procédures 8administratives qui ne sont pas imputables au demandeur ne peuvent justifier une prolongation de la durée de rétention. […] ».
L’article 22, paragraphe (2), point d) de la loi du 18 décembre 2015, sur base duquel la mesure litigieuse a été prise, qui renvoie à l’article 28 du règlement Dublin III, permet dès lors de placer un demandeur de protection internationale en rétention administrative pour une durée maximale de trois mois en vue de garantir les procédures de transfert prévues par ledit règlement, sous condition, (i) qu’il existe un risque de fuite non négligeable dans le chef de cette personne, risque de fuite qui est présumé dans les circonstances précitées, (ii) que le placement en rétention soit proportionnel et (iii) que d’autres mesures moins coercitives ne puissent être effectivement appliquées.
L’article 22, paragraphe (3) de la même loi ajoute que le placement en rétention ne peut être ordonné que si aucune des mesures moins coercitives prévues à ses points a), b) et c) - à savoir, (i) l’obligation pour le demandeur de se présenter régulièrement, à des intervalles à fixer par le ministre, auprès des services de ce dernier ou d’une autre autorité désignée par lui, (ii) l’assignation à résidence, assortie, le cas échéant, d’une mesure de surveillance électronique, et (iii) le dépôt d’une garantie financière d’un montant de cinq mille euros - ne peut être efficacement appliquée.
L’article 22, paragraphe (4) de la loi du 18 décembre 2015 précise, par renvoi au règlement Dublin III, que la mesure de placement en rétention est prise pour une durée la plus brève possible ne dépassant pas trois mois et que les procédures liées aux motifs de rétention énoncés au paragraphe (2) sont exécutées avec toute la diligence voulue, sans que les retards dans les procédures administratives qui ne sont pas imputables au demandeur ne peuvent justifier une prolongation de la durée de rétention, impliquant plus particulièrement que le ministre est dans l’obligation d’entreprendre toutes les démarches requises pour exécuter le transfert dans les meilleurs délais et que le placement ne se prolonge pas au-delà du délai raisonnable nécessaire pour accomplir les procédures administratives requises. Cette mesure de placement en rétention peut être reconduite, chaque fois pour une durée de trois mois, tant que les motifs énoncés à l’article 22, paragraphe (2), précité, de la loi du 18 décembre 2015 sont applicables, mais sans que la durée de rétention totale ne puisse dépasser douze mois.
Le tribunal se doit tout d’abord de relever qu’il n’est pas tenu par l’ordre des moyens tel que présenté par le demandeur mais qu’il détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et de l’effet utile s’en dégageant.
En l’espèce, le demandeur conteste tant la légalité que le bien-fondé de la décision de placement en rétention en arguant notamment qu’il n’existerait aucun risque de fuite dans son chef.
Le tribunal rejoint toutefois la partie étatique dans son constat de l’existence d’un risque de fuite non négligeable dans le chef du demandeur.
A cet égard, il convient en premier lieu de rappeler que l’article 22, paragraphe (2), point d), tel que modifié par la loi du 20 juillet 2023 portant modification de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, dispose que « […] Le risque non négligeable de fuite est présumé dans les cas suivants :
[…] 9 iii.
si le demandeur a été débouté de sa demande de protection internationale dans l’État membre responsable ;
iv.
si le demandeur est de nouveau présent sur le territoire luxembourgeois après l’exécution effective d’une mesure de transfert ou s’il s’est soustrait à l’exécution d’une précédente mesure de transfert ; […] ».
Or, force est de constater qu’il ressort du dossier administratif que le demandeur est à nouveau présent sur le territoire luxembourgeois après l’exécution effective d’une mesure de transfert vers la Lituanie en date du 16 novembre 2023 sur le fondement de l’article 18, paragraphe (1), point b) du règlement Dublin III, de même qu’il s’en dégage que l’intéressé a été débouté de sa demande de protection internationale introduite en Lituanie.
Au vu de ces seules considérations, et indépendamment de la question de savoir si le demandeur a coopéré avec les services ministériels et a fait preuve d’un comportement prétendument irréprochable, question non pertinente en l’espèce, il y a lieu d’admettre qu’un risque de fuite non négligeable est présumé dans le chef de celui-ci, de sorte que c’est a priori à juste titre que le ministre a pris une décision de placement en rétention à son encontre.
Ce constat n’est pas ébranlé par les développements du demandeur suivant lesquels au vu de l’incompatibilité de son état de santé avec un placement en rétention, son maintien au Centre de rétention serait contraire à l’article 3 de la CEDH pour être constitutif d’un traitement inhumain et dégradant, respectivement serait disproportionné eu égard aux troubles d’ordre psychologique dont il serait atteint.
En effet, le tribunal se doit de constater, à l’instar de la partie étatique, qu’il ne se dégage ni du rapport médical non daté émanant du docteur (C), médecin spécialiste en orthopédie au sein du Centre Hospitalier de Luxembourg, ni de l’ordonnance médicale établie le 30 juillet 2024 par le docteur (B), médecin au sein du groupe Urgence au sein des Hôpitaux Robert Schuman, que l’état de santé du demandeur serait incompatible avec un placement en rétention. En effet, le rapport du docteur (C) ne fait que constater, outre l’existence d’une lésion ancienne de nature traumatique au niveau d’un doigt de la main gauche, « une avulsion au niveau de la base du P1D5 » ayant impliqué la « mise en place [d’]une attelle type Zimmer sur le doigt », tout en préconisant la prise d’un rendez-vous « chez les collègues de chirurgie de la main à Kirchberg », en prescrivant des antidouleurs et anti-inflammatoires et en conseillant l’«[é]lévation des membres blessés et de mettre la glace ». L’ordonnance médicale du 30 juillet 2024 prescrit, quant à elle, uniquement la prise de trois médicaments pour une durée d’un mois.
Le tribunal relève encore que l’affirmation du demandeur suivant laquelle il aurait déjà essayé par le passé de mettre fin à ses jours reste à l’état de pure allégation, aucun élément du dossier administratif ou pièce versée en cause n’établissant une telle tentative de suicide. A cela s’ajoute que le demandeur reste, en tout état de cause, en défaut d’expliquer dans quelle mesure il ne saurait bénéficier au Centre de rétention des soins médicaux dont il pourrait, le cas échéant, avoir besoin, étant relevé qu’en application de l’article 9 de la loi du 28 mai 2009, précitée, le demandeur a droit aux soins médicaux requis au cours de son séjour au Centre de rétention. Il se dégage, dans ce contexte, du dossier administratif et plus particulièrement d’une ordonnance médicale établie le 19 décembre 2024 par le docteur (D), médecin spécialiste en psychiatrie, que le demandeur « bénéficie de consultations médicales et d’entretiens infirmiers réguliers au Centre de Rétention de Luxembourg depuis le 04/08/2024 », sans que ledit médecin n’ait, par ailleurs, soulevé une quelconque incompatibilité de l’état de santé de l’intéressé avec son 10placement au Centre de rétention.
Il s’ensuit que le moyen tenant à une violation de l’article 3 de la CEDH résultant d’une incompatibilité entre l’état de santé du demandeur et son maintien au Centre de rétention est à rejeter.
Pour les mêmes raisons les reproches du demandeur tenant au caractère prétendument disproportionné de la mesure de placement litigieuse encourent également le rejet.
En ce qui concerne ensuite l’argumentation du demandeur selon laquelle il aurait dû bénéficier de l’application de mesures moins coercitives, le tribunal rappelle que le placement en rétention ne peut être ordonné que si aucune des mesures moins coercitives prévues aux points a), b) et c) de l’article 22, paragraphe (3), précités, de la loi du 18 décembre 2015 ne peut être efficacement appliquée.
A cet égard, et en ce qui concerne plus précisément la mesure moins coercitive prévue au point a) de l’article 22, paragraphe (3) de la loi du 18 décembre 2015, à savoir l’obligation pour le demandeur de se présenter régulièrement devant les services ministérielles, force est de constater que celle-ci n’est pas concevable en l’espèce dans la mesure où il n’est pas contesté en cause que le demandeur ne dispose pas de l’original de son passeport, étant rappelé à cet égard que la remise aux services ministériels de l’original du passeport, accompagné, le cas échéant, d’un autre document justificatif de son identité, est, au vu du libellé du point a) de l’article 22, paragraphe (3) une condition sine qua non à l’application éventuelle de cette même mesure coercitive.
Quant à l’assignation à résidence telle que prévue par l’article 22, paragraphe (3), point b) de la loi du 18 décembre 2015, il y a lieu de rappeler que celle-ci n’est envisageable que si le demandeur présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite. Or, en l’espèce, le demandeur n’a pas fourni le moindre élément au tribunal qui serait de nature à renverser la présomption de risque de fuite pesant sur lui. Plus particulièrement, le demandeur est resté en défaut de fournir le moindre élément concluant quant à des attaches particulières au Luxembourg, respectivement quant à une possibilité concrète de résidence ou d’hébergement au Luxembourg, éléments qui seraient susceptibles d’établir dans son chef l’existence de garanties de représentation effective propres à prévenir un risque de fuite conformément à la disposition légale prémentionnée, risque de fuite non négligeable, qui, tel que relevé ci-avant, est présumé dans son chef, étant encore précisé, dans ce contexte, que la maison retour ne saurait être considérée comme domicile stable ni comme fournissant à elle seule une garantie de représentation suffisante.
Ce même constat s’impose également en ce qui concerne les développements du demandeur tendant à se voir assigner à résidence dans une structure hospitalière, alors qu’au-
delà du constat que le demandeur reste, tel que relevé ci-avant, en défaut d’établir un tel besoin médical dans son chef, une telle structure ne saurait, en tout état de cause, être considérée comme un domicile stable ni comme fournissant à elle seule une garantie de représentation suffisante, de sorte qu’une assignation à résidence n’y est de toute façon pas non plus concevable.
S’agissant finalement de la mesure moins coercitive prévue par le point c) de l’article 22, paragraphe (3) de la loi du 18 décembre 2015, force est au tribunal de constater que le 11demandeur n’a fourni aucune proposition d’une garantie financière.
Au vu des considérations qui précèdent aucun reproche ne saurait être adressé au ministre pour ne pas avoir appliqué au demandeur l’une des mesures moins coercitives prévues par la loi.
Quant à l’invocation par le demandeur d’une atteinte à son droit à sa liberté de mouvement, consacrée notamment par l’article 5 de la CEDH, ensemble la violation alléguée du principe de proportionnalité, il y a lieu de rappeler qu’aux termes de l’article 5 de la CEDH : « 1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales: […] f) S’il s’agit de l’arrestation ou de la détention régulières d’une personne pour l’empêcher de pénétrer irrégulièrement sur le territoire, ou contre laquelle une procédure d’expulsion ou d’extradition est en cours. […] ».
Il ressort du libellé de l’article 5, paragraphe (1), point f) précité de la CEDH que celui-
ci prévoit expressément la possibilité de détenir une personne contre laquelle une procédure d’expulsion ou d’extradition est en cours. Le terme d’expulsion doit être entendu dans son acception la plus large et vise toutes les mesures d’éloignement respectivement de refoulement de personnes qui se trouvent en séjour irrégulier dans un pays1.
Dans un arrêt du 15 décembre 20162, la Cour européenne des droits de l’Homme a encore retenu que : « […] L’article 5 § 1 f) n’exige pas que la détention d’une personne soit considérée comme raisonnablement nécessaire, par exemple pour l’empêcher de commettre une infraction ou de s’enfuir. Cependant, une privation de liberté fondée sur le second membre de phrase de cette disposition ne peut se justifier que par le fait qu’une procédure d’expulsion ou d’extradition est en cours. Si celle-ci n’est pas menée avec la diligence requise, la détention cesse d’être justifiée au regard de l’article 5 § 1 f) […] ».
En l’espèce, dans la mesure où une procédure de transfert est actuellement en cours d’exécution à l’encontre du demandeur et que celui-ci ne conteste, par ailleurs, pas que cette procédure est menée avec la diligence requise, le ministre a valablement pu placer le demandeur au Centre de rétention et maintenir cette mesure de placement sans violer l’article 5 de la CEDH.
Il s’ensuit que les développements du demandeur relatifs à une prétendue violation de l’article 5 de la CEDH sont également à rejeter pour ne pas être fondés.
Enfin, quant à la référence faite par le demandeur à l’article 15, paragraphes (2) et (4) de la directive 2008/115, le tribunal précise qu’outre le fait qu’il vient d’être retenu ci-avant que la mesure de placement en rétention actuellement litigieuse est légale, sans que le demandeur n’ait, par ailleurs, allégué qu’il n’existerait pas de perspective raisonnable que son transfert soit mené à bien, de sorte qu’une remise en liberté, telle que prévue aux paragraphes (2) et (4) de l’article 15 de la directive 2008/115 ne se conçoit de toute façon pas, indépendamment, par ailleurs, de la question de l’effet direct de ces dispositions, il y a encore lieu de relever que dans la mesure où, en l’espèce, Monsieur (A) a été placé en rétention sur le fondement de la loi du 18 décembre 2015 en sa qualité de demandeur de protection internationale faisant l’objet d’une procédure de transfert s’inscrivant dans le cadre du 1 Trib. adm. 25 janvier 2006, n° 20913 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Etrangers, n° 812 (1er volet), et les autres références y citées.
2 CourEDH, 15 décembre 2016, grande chambre, Affaire Khlaifia et autres c. Italie, requête n° 16483/12, § 90.
12règlement Dublin III et non pas en qualité de ressortissant de pays tiers se trouvant en séjour illégal sur le territoire luxembourgeois et faisant l’objet d’une décision de retour vers un pays tiers sur le fondement de la loi du 29 août 2008, la directive en question n’a de toute façon pas vocation à s’appliquer. Le moyen afférent est dès lors à rejeter.
Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, et en l’absence d’autres moyens, même à soulever d’office, le recours sous analyse est à rejeter pour ne pas être fondé.
Compte tenu de l’issue du litige, le demandeur est à débouter de sa demande en allocation d’une indemnité de procédure de 1.000.- euros fondée sur l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;
reçoit le recours principal en réformation en la forme ;
au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;
dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;
rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure de 1.000 euros telle que formulée par le demandeur ;
condamne le demandeur aux frais et dépens.
Ainsi jugé par :
Alexandra Castegnaro, vice-président, Caroline Weyland, premier juge, Melvin Roth, attaché de justice délégué, et lu à l’audience publique du 3 février 2025 par le vice-président en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.
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