Tribunal administratif N° 48484 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:48484 3e chambre Inscrit le 2 février 2023 Audience publique du 17 décembre 2024 Recours formé par Monsieur (A), sans domicile connu, contre deux actes du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de police des étrangers
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 48484 du rôle et déposée le 2 février 2023 au greffe du tribunal administratif par Maître Brian HELLINCKX, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A), né le … à … (Guinée-
Bissau), de nationalité bissau-guinéenne, ayant été retenu au Centre de rétention au Findel au moment de l’introduction de sa requête, tendant, aux termes du dispositif de sa requête, à l’annulation d’une décision de retour du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 23 septembre 2022, ainsi que de la « décision implicite de refus » du même ministre suite au recours gracieux du 29 septembre 2022 resté sans réponse ;
Vu l’ordonnance du président du tribunal administratif du 3 février 2023, inscrite sous le numéro 48485 du rôle ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 2 mai 2023 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Vincent STAUDT en sa plaidoirie à l’audience publique du 26 novembre 2024.
En date du 11 novembre 2009, Monsieur (A) introduisit une demande de carte de séjour de membre de famille d’un citoyen de l’Union européenne, laquelle lui fut délivrée le 10 décembre 2009, valable jusqu’au 10 novembre 2014.
Ayant été interpellé en date du 18 décembre 2009 par la police grand-ducale à la suite d’un vol à l’étalage, Monsieur (A) fut placé en détention préventive au Centre pénitentiaire de Luxembourg du 30 novembre 2012 au 26 janvier 2013.
Monsieur (A) fut ensuite condamné pour infractions à la loi modifiée du 19 février 1983 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie à une peine d’emprisonnement de 18 mois par jugement d’une chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg en date du 13 juin 2014, respectivement par arrêt de la Cour d’appel de Luxembourg du 17 novembre 2014 ayant ramené la peine d’emprisonnement à 9 mois.
1 Monsieur (A) purgea encore une peine d’emprisonnement du 26 février 2015 au 4 avril 2016.
Il fut de nouveau placé en détention préventive en date du 15 juin 2018 dont il fut libéré en date du 20 juin 2018. Il fut encore placé en détention préventive en date du 23 janvier 2021 et il fut libéré du Centre pénitentiaire de Luxembourg en date du 12 avril 2021 après avoir subi une contrainte par corps de 5 jours.
En date du 17 mars 2022, Monsieur (A) fit encore l’objet d’un placement en détention préventive jusqu’au 23 septembre 2022.
Par arrêté du 23 septembre 2022, notifié à l’intéressé en mains propres à la même date, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après désigné par « le ministre », prit une décision de retour, assortie d’une interdiction d’entrée sur le territoire pour une durée de cinq ans, ladite décision étant libellée comme suit :
« […] Vu les articles 100 et 109 à 115 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration ;
Vu les antécédents judiciaires de l’intéressé ;
Considérant que l’intéressé n’est pas en possession d’un visa en cours de validité ;
Considérant que l’intéressé ne justifie pas de ressources personnelles suffisantes, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans le pays d’origine ou le transit vers un pays tiers dans lequel son admission est garantie ;
Considérant que l’intéressé n’est ni en possession d’une autorisation de séjour valable pour une durée supérieure à trois mois ni d’une autorisation de travail ;
Considérant que l’intéressé constitue une menace pour l’ordre public ;
Que par conséquent il existe un risque de fuite dans le chef de l’intéressé ;
Arrête :
Art. 1er. - Le nommé (A), né le … à …, de nationalité bissau-guinéenne, est en séjour irrégulier sur le territoire luxembourgeois.
Art. 2.- L’intéressé devra quitter le territoire sans délai à destination du pays dont il a la nationalité, le Guinée-Bissau, ou à destination du pays qui lui aura délivré un document de voyage en cours de validité, ou à destination d’un autre pays dans lequel il est autorisé à séjourner.
Art. 3.- Copie du présent arrêté est remise à l’intéressé.
Art. 4.- Une interdiction d’entrée sur le territoire pour une durée de cinq ans est prononcée à l’égard de l’intéressé à partir de la sortie du territoire luxembourgeois ou à partir de la sortie de l’espace Schengen […] ».
2 Par arrêté séparé du même jour, le ministre ordonna le placement en rétention de Monsieur (A) au Centre de rétention pour une durée d’un mois à compter de la notification de l’arrêté en question.
En date du 30 septembre 2022, Monsieur (A) introduisit un recours gracieux, daté du 29 septembre 2022, à l’encontre de l’arrêté ministériel, précité, du 23 septembre 2022, recours gracieux qui est libellé comme suit :
« […] J’ai l’honneur de vous informer que je suis le conseil de Monsieur (A), né le … à … (Guinée-Bissau), qui m’a chargé de la défense des intérêts suite à son placement au Centre de Rétention de l’État.
Par arrêté du 23 septembre 2022, dont copie en annexe, Vous avez prononcé une interdiction de territoire à l’encontre de mon mandant pour une durée de 5 ans. (Pièce n°1) Sur base de cette décision, Vous avez également arrêté que Monsieur (A) serait placé au Centre de Rétention de l’Etat en attendant son expulsion. (Pièce n°2) Vos décisions se basent sur plusieurs motifs, à savoir :
- l’absence de visa - l’absence de ressources suffisantes - l’absence d’autorisation de séjour - qu’il serait une menace pour l’ordre public - qu’il présenterait un risque de fuite.
S’il est vrai que Monsieur (A) ne dispose plus de visa et d’autorisation de séjour en cours de validité, il faut cependant préciser qu’il s’agit là d’un oubli se part de mettre ses papiers en ordre.
En effet, Monsieur (A) se trouve au Luxembourg depuis de nombreuses années.
Durant cette période il a fait la connaissance de Madame (B), née le … à … (France) et demeurant à …, avec laquelle il a eu une fille nommée (C) en date du …. (Pièce n°3) Cependant cette relation n’a pas durée et Monsieur (A) s’est par la suite mis en relation avec Madame (D), née le …, demeurant à …, avec laquelle il a également eu une fille, nommée (E), en date du …. (Pièce n°4) Or, étant donné qu’il se trouvait en détention préventive au moment de la naissance de sa deuxième fille, il n’a à ce jour pas eu la possibilité de se présenter à l’officier d’état civil pour la reconnaître. (Pièce n°5).
La Cour Européenne des Droits de l’Homme a décidé, dans son arrêt Onur c/ Royaume-
Uni du 27 février 2009, que les liens familiaux entre les enfants et les parents existent de plein droit dès la naissance, que les parents forment un couple marié ou qu’ils vivent en union libre.
De plus, l’absence de cohabitation n’exclut pas l’existence de liens familiaux. Le fait que le père ait ou non reconnu cet enfant ne saurait valoir non plus étant donné que la participation à l’entretien et à l’éducation de l’enfant, et la qualité et la régularité du contact seraient déterminantes.
3 De toute évidence, au vu de ses deux enfants qui vivent au Luxembourg et qui ont la nationalité luxembourgeoise, Monsieur (A) n’aurait pas eu de difficulté à obtenir les papiers nécessaires pour pouvoir légalement séjourner au Luxembourg.
De même, il serait inhumain d’interdire Monsieur (A) du territoire, alors que ces enfants s’y trouvent.
Qui plus est, cela serait contraire à ses obligations en tant que père.
Toute personne a le droit au respect de sa vie privée, ce qui englobe le droit au rassemblement familial.
Ensuite, il est également faux de prétendre que Monsieur (A) présenterait un danger pour l’ordre public.
A cet effet, il convient de préciser que bien que Monsieur (A) se soit déjà trouvé en détention préventive dans une autre affaire pendant plusieurs mois, que cette détention était tout à fait illégitime étant donné qu’il a été acquitté pour les faits qui lui étaient reprochés.
En ce qui concerne l’affaire dans laquelle il était détenu du 17 mars 2022 au 23 septembre 2022, il convient de rappeler le principe de la présomption d’innocence.
Finalement, suite à ce qui précède, j’ose prétendre que la présence de ses deux enfants de nationalité luxembourgeoise au Grand-Duché de Luxembourg suffit à endiguer tout risque de fuite de sa part.
Dès lors, Monsieur (A) demande respectueusement à ce que Votre décision soit revue, son interdiction de territoire soit levée, et par conséquent également l’arrêté de placement et d’expulsion pris sur base de cet arrêté. […] ».
Par arrêté du 21 octobre 2022, le ministre prorogea pour une durée supplémentaire d’un mois le placement en rétention de Monsieur (A).
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 2 novembre 2022 et inscrite sous le numéro 48126, Monsieur (A) fit introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation du prédit arrêté ministériel du 21 octobre 2022, recours dont il fut débouté par un jugement du 14 novembre 2022.
Par arrêté du 21 novembre 2022, le ministre prorogea pour une durée supplémentaire d’un mois le placement en rétention de Monsieur (A).
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 6 décembre 2022 et inscrite sous le numéro 48244, Monsieur (A) fit introduire un recours en annulation de la prédite décision ministérielle datée du 23 septembre 2022 lui ayant interdit l’entrée sur le territoire et par requête déposée le 24 janvier 2023, inscrite sous le numéro 48446 du rôle, il fit également introduire un recours tendant, aux termes de son dispositif, à se voir « accorder l’autorisation de se maintenir au Luxembourg, en attendant que le recours au fond déposé le 6 décembre 2022 ait été vidé », recours dont il fut débouté par ordonnance du 27 janvier 2023.
4Par arrêté du 21 décembre 2022, le ministre prorogea pour une durée supplémentaire d’un mois le placement en rétention de Monsieur (A). Le recours afférent introduit par ce dernier en date du 28 décembre 2022, inscrit sous le numéro 48328 du rôle, fut rejeté par jugement du 4 janvier 2023.
Par arrêté du 20 janvier 2023, le ministre prorogea pour une nouvelle durée d’un mois le placement en rétention de Monsieur (A).
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 2 février 2023, Monsieur (A) a fait introduire un recours tendant, aux termes du dispositif de sa requête introductive d’instance auquel le tribunal est seul tenu, à l’annulation de l’arrêté ministériel, précité, du 23 septembre 2022 portant décision de retour à son égard, ainsi qu’à l’annulation de la « décision implicite de refus » du même ministre suite au recours gracieux du 29 septembre 2022, resté sans réponse.
Par requête séparée déposée le même jour, inscrite sous le numéro 48485 du rôle, il a également sollicité le sursis à exécution à l’encontre de la décision de retour du 23 septembre 2022, recours dont il fut débouté par ordonnance du 3 février 2023.
Etant donné que l’article 113 de la loi modifiée du 29 août 2008 relative à la libre circulation des personnes et l’immigration, désignée ci-après par « la loi du 29 août 2008 », prévoit un recours en annulation à exercer devant le tribunal administratif dans les formes et délai ordinaires, le tribunal est compétent pour connaître du recours en annulation introduit en l’espèce.
Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement conclut à l’irrecevabilité ratione temporis du recours, en se référant à l’ordonnance du président du tribunal administratif, prémentionnée, du 3 février 2023.
Le litismandataire du demandeur n’a pas pris position quant à ce moyen d’irrecevabilité, le concerné n’ayant pas déposé de mémoire en réplique et ne s’étant pas non plus exprimé sur cette question lors de l’audience des plaidoiries du 26 novembre 2024 à laquelle il ne s’est pas présenté.
Aux termes de l’article 13 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après dénommée « la loi du 21 juin 1999 » : « (1) Sauf dans les cas où les lois ou les règlements fixent un délai plus long ou plus court et sans préjudice des dispositions de la loi du 22 décembre 1986 relative au relevé de la déchéance résultant de l’expiration d’un délai imparti pour agir en justice, le recours au tribunal n’est plus recevable après trois mois du jour où la décision a été notifiée au requérant ou du jour où le requérant a pu en prendre connaissance.
(2) Toutefois si la partie intéressée a adressé un recours gracieux à l’autorité compétente avant l’expiration du délai de recours fixé par la disposition qui précède ou d’autres dispositions législatives ou réglementaires, le délai du recours contentieux est suspendu et un nouveau délai commence à courir à partir de la notification de la nouvelle décision qui intervient à la suite de ce recours gracieux.
(3) Si un délai de plus de trois mois s’est écoulé depuis la présentation du recours gracieux sans qu’une nouvelle décision ne soit intervenue, le délai du recours contentieux 5commence à courir à partir de l’expiration du troisième mois. La date du dépôt du recours gracieux est constatée par la notification qui en a été faite ou par un récépissé délivré au requérant par l’autorité administrative compétente ou son préposé. Ce récépissé doit être produit à l’appui du recours contentieux du tribunal. […] ».
Il se dégage de la disposition légale qui précède que le délai pour introduire un recours auprès des juridictions administratives court à compter du jour où le demandeur a eu notification ou connaissance de la décision concernée, mais que ce délai peut être interrompu par l’introduction d’un recours gracieux, sous condition toutefois que ce recours gracieux ait à son tour été introduit avant l’expiration du délai pour introduire un recours contentieux.
Aux termes de l’article 3, point h) de la loi du 29 août 2008, une décision de retour est définie comme « toute décision du ministre déclarant illégal le séjour d’un ressortissant de pays tiers et imposant ou énonçant une obligation de quitter le territoire ».
Il est constant en cause que par arrêté ministériel, précité, du 23 septembre 2022, Monsieur (A) a fait l’objet d’une décision de retour, assortie d’une interdiction d’entrée sur le territoire pour une durée de cinq ans, tandis que par arrêté séparé du même jour, il a encore fait l’objet d’un placement au Centre de rétention afin de préparer l’exécution de son éloignement.
Il ressort encore du dossier administratif que le demandeur a, par requête déposée le 6 décembre 2022 et inscrite sous le numéro 48244 du rôle, introduit un recours séparé contre l’interdiction d’entrée sur le territoire contenue dans l’arrêté ministériel du 23 septembre 2022, de sorte que l’objet du présent recours est limité au volet dudit arrêté portant décision de retour à l’égard de Monsieur (A).
Il échet dès lors d’analyser si l’introduction d’un recours gracieux par le demandeur a utilement fait courir un nouveau délai de recours contentieux à l’encontre de la décision de retour litigieuse.
En l’espèce, le demandeur soutient certes, dans sa requête introductive d’instance, avoir introduit en date du 29 septembre 2022 un recours gracieux « afin de voir annuler autant l’interdiction de territoire, que les décisions de retour (voire d’expulsion) et de placement », en s’emparant du passage suivant de son recours gracieux « Dès lors, Monsieur (A) demande respectueusement à ce que Votre décision soit revue, son interdiction de territoire soit levée, et par conséquent également l’arrêté de placement et d’expulsion pris sur base de cet arrêté. ».
Force est toutefois au tribunal de constater, à l’instar du juge du provisoire, au regard du libellé du recours gracieux, cité in extenso ci-avant, que ledit recours visait, d’une part, « l’interdiction de territoire » du 23 septembre 2022, identifiée par le demandeur comme pièce n° 1, annexée à son recours gracieux et, d’autre part, « l’arrêté de placement et d’expulsion » du 23 septembre 2022, par lequel le demandeur s’est nécessairement référé à l’arrêté ministériel du 23 septembre 2022 ayant ordonné son placement en rétention pour une durée d’un mois, identifié par le demandeur comme pièce n° 2, annexée à son recours gracieux.
En désignant un « arrêté de placement et d’expulsion pris sur base de cet arrêté1 », le demandeur s’est, en effet, manifestement référé à un acte séparé, distinct de l’arrêté portant interdiction d’entrée sur le territoire à son égard, de sorte qu’il peut être exclu qu’il a entendu 1 Souligné par le tribunal.
6se référer à la décision de retour, contenue dans le même acte que l’interdiction d’entrée sur le territoire.
Par ailleurs, tel que déjà relevé par le juge du provisoire, il échet de retenir qu’en précisant que « sur base de cette décision [la décision d’interdiction d’entrée], Vous avez également arrêté que Monsieur (A) serait placé au Centre de Rétention de l’Etat en attendant son expulsion », le demandeur a indéniablement considéré l’arrêté de rétention comme synonyme d’« arrêté de placement et d’expulsion ».
A la lecture du corps du recours gracieux en question, le tribunal constate encore que le demandeur n’a, outre le prétendu « arrêté de placement et d’expulsion », partant l’arrêté de rétention, critiqué que l’interdiction d’entrée sur le territoire prononcée à son égard : « Vous avez prononcé une interdiction de territoire à l’encontre de mon mandant pour une durée de 5 ans. […] il serait inhumain d’interdire Monsieur (A) du territoire […] cela serait contraire à ses obligations en tant que père […] Monsieur (A) demande respectueusement à ce que Votre décision soit revue, son interdiction de territoire soit levée […] ».
Enfin, il convient de relever, à l’instar du juge du provisoire, qu’une interdiction d’entrée sur le territoire constitue, le cas échéant, l’accessoire, conformément à l’article 112 de la loi du 29 août 2008, d’une décision de retour, tandis qu’une décision d’expulsion constitue une décision distincte d’une décision de retour, et, le cas échéant, conformément à l’article 116, paragraphe (1) de la même loi, la conséquence du non-respect d’une interdiction d’entrée sur le territoire. Par conséquent, en identifiant la « décision d’expulsion » comme la suite d’une interdiction d’entrée sur le territoire, le demandeur ne pouvait en toute logique viser une décision de retour.
Au vu de ce qui précède, force est au tribunal de conclure qu’à travers son recours gracieux du 29 septembre 2022, le demandeur n’a déféré au ministre que les seules décisions d’interdiction d’entrée sur le territoire et de placement en rétention, à l’exclusion de la décision de retour, étant encore relevé que ledit recours gracieux ne mentionne d’ailleurs à aucun moment l’ordre de quitter le territoire.
Or, dans la mesure où la décision de retour litigieuse n’a pas été visée par le recours gracieux du 29 septembre 2022, le délai de recours contentieux n’a pas été interrompu à l’égard de ce volet de l’arrêté ministériel du 23 septembre 2022, conformément à l’article 13, paragraphe (2) de la loi du 21 juin 1999 et aucune « décision implicite de refus », - du moins en ce qui concerne le volet de la décision de retour -, n’a pu résulter du silence gardé par le ministre pendant plus de trois mois suite audit recours gracieux.
Partant, le délai de recours contre la décision de retour du 23 septembre 2022 a commencé à courir, conformément aux dispositions de l’article 3 de la Convention européenne sur la computation des délais signée à Bâle le 16 mai 1972, approuvée par la loi du 30 mai 1984, à la date de la notification de la décision litigieuse au demandeur, à savoir en date du 23 septembre 2022 à minuit et a expiré trois mois plus tard, à savoir le vendredi, 23 décembre 2022.
Il s’ensuit que la requête introductive d’instance déposée au greffe du tribunal administratif le 2 février 2023 est à considérer comme tardive et que le recours sous analyse est à déclarer irrecevable ratione temporis.
7Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant contradictoirement ;
se déclare compétent pour statuer sur le recours en annulation introduit par le demandeur ;
le déclare irrecevable ratione temporis ;
condamne le demandeur aux frais et dépens de l’instance.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 17 décembre 2024 par :
Thessy Kuborn, premier vice-président, Laura Urbany, premier juge, Sibylle Schmitz, premier juge, en présence du greffier Judith Tagliaferri.
s. Judith Tagliaferri s. Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 17 décembre 2024 Le greffier du tribunal administratif 8