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09/10/2024 | LUXEMBOURG | N°47522

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 09 octobre 2024, 47522


Tribunal administratif N° 47522 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:47522 5e chambre Inscrit le 7 juin 2022 Audience publique du 9 octobre 2024 Recours formé par Monsieur (A), …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes, en matière d’impôt sur le revenu

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 47522 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 7 juin 2022 par Maître Marcel MARIGO, avocat à

la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, assisté de Maître Jean-...

Tribunal administratif N° 47522 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:47522 5e chambre Inscrit le 7 juin 2022 Audience publique du 9 octobre 2024 Recours formé par Monsieur (A), …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes, en matière d’impôt sur le revenu

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 47522 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 7 juin 2022 par Maître Marcel MARIGO, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, assisté de Maître Jean-Xavier MANGA, avocat, inscrit à la liste II du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A), demeurant à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 8 mars 2022, répertoriée sous le numéro 1, ayant rejeté sa réclamation contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2017 et 2018, tous émis le 6 octobre 2021 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 25 octobre 2022 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision déférée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Jean-Xavier MANGA, en remplacement de Maître Marcel MARIGO et Monsieur le délégué du gouvernement Steve COLLART en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 15 mai 2024.

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En date du 16 août 2018, le bureau d’imposition …, Section des personnes physiques, émit les bulletins d’établissement des revenus d’entreprises collectives des années 2017 et 2018 à l’égard de la copropriété (A) – … – …, désignée ci-après par « la copropriété », fixant le revenu provenant de la location de biens de la copropriété à … euros pour l’année 2017 respectivement à … euros pour l’année 2018. Les mêmes bulletins fixèrent la quote part de Monsieur (A) dans les revenus collectifs de la copropriété à … euros pour l’année 2017, ainsi qu’à … euros pour l’année 2018.

En date du 6 octobre 2021, le bureau d’imposition …, section des personnes physiques, émit à l’égard de Monsieur (A) les bulletins de l’impôt sur le revenu de l’année 2017 ainsi que de l’année 2018.

Par courrier de son litismandataire du 20 octobre 2021, Monsieur (A) fit introduire une réclamation contre les bulletins de l’impôt sur le revenus des années 2017 et 2018 émis le 6 octobre 2021, auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par le « directeur ».

Par une décision du 8 mars 2022, référencée sous le numéro 1, le directeur rejeta la réclamation précitée pour ne pas être fondée. Ladite décision est libellée comme suit :

« […] Vu la requête introduite en date du 21 octobre 2021 par Me Jean-Xavier Manga, au nom du sieur (A), demeurant à L-…, pour réclamer contre les bulletins de l'impôt sur le revenu des années 2017 et 2018, tous les deux émis en date du 6 octobre 2021 ;

Vu le dossier fiscal ;

Vu les §§ 228 et 301 de la loi générale des impôts (AO) ;

Considérant que si l'introduction de plusieurs instances par une seule et même requête n'est incompatible, en l'espèce, ni avec le secret fiscal, ni avec les règles de compétence et de procédure, elle ne dispense pas d'examiner chaque acte attaqué en lui-même et selon ses propres mérites et ne saurait imposer une jonction qu'il est loisible au directeur des contributions de prononcer lorsque les instances lui paraissent suffisamment connexes ; qu'il n'y a pas lieu de la refuser en la forme ;

Considérant que les réclamations ont été introduites par qui de droit (§ 238 AO), dans les forme (§ 249 AO) et délai (§ 245 AO) de la loi, qu'elles sont partant recevables ;

Considérant que le réclamant conteste « les montants retenus par l'Administration des Contributions Directes à titre de revenu net de la location de biens » ;

Considérant qu'en vertu du § 243 AO, une réclamation régulièrement introduite déclenche d'office un réexamen intégral de la cause, sans égard aux conclusions et moyens du requérant, la loi d'impôt étant d'ordre public ; qu'à cet égard le contrôle de la légalité externe de l'acte doit précéder celui du bien-fondé ; qu'en l'espèce, la forme suivie par le bureau d'imposition ne prête pas à critique ;

Considérant que le revenu de location contesté des années 2017 et 2018 a été établi séparément et en commun conformément au § 215, alinéa 2 AO par le bureau d'imposition Luxembourg 7 sous la désignation « Copropriété (A) », numéro fiscal … ;

Considérant que le bureau d'imposition est lié par le § 218, alinéa 2 AO lorsqu'un revenu net mis en compte résulte d'un bulletin d'établissement séparé ; que les bases fixées par un bulletin d'établissement séparé sont reprises dans le bulletin d'impôt individuel du contribuable concerné, en vue de la fixation de la cote de l'impôt sur le revenu lui applicable ;

Considérant qu'une imposition qui est basée en tout ou en partie sur des revenus établis séparément, ne peut être attaquée pour le motif que ces bases d'imposition seraient inexactes ;

qu'une telle réclamation ne peut être formée que contre les bulletins portant établissement desdits revenus (§ 232, alinéa 2 AO) ;

Considérant d'ailleurs que si un bulletin d'établissement séparé et en commun a fait l'objet d'une réclamation, sa réformation entraînera d'office un redressement du bulletin d'impôt établi sur base dudit bulletin d'établissement conformément au § 218, alinéa 4 AO ;

2 Considérant que pour le surplus, les impositions sont conformes à la loi et aux faits de la cause et ne sont d'ailleurs pas autrement contestées PAR CES MOTIFS reçoit les réclamations en la forme, les rejette comme non fondées. […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 7 juin 2022, inscrite sous le numéro 47522 du rôle, Monsieur (A) a fait introduire un recours tendant à l’annulation de la décision directoriale précitée du 8 mars 2022 rejetant sa réclamation contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2017 et 2018.

1.

Quant à la compétence du tribunal et à la recevabilité du recours Conformément aux dispositions combinées du § 228 de la loi générale des impôts modifiée du 22 mai 1931, « Abgabenordnung », en abrégé « AO », et de l’article 8, paragraphe (3), 1. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, le tribunal est appelé à statuer comme juge du fond sur un recours dirigé par un contribuable contre une décision du directeur ayant statué sur les mérites d’une réclamation de sa part contre un bulletin d’impôt.

Dans la mesure où les termes juridiques employés par un professionnel de la postulation sont a priori à appliquer à la lettre, ce plus précisément concernant la nature du recours introduit, ainsi que son objet, tel que circonscrits dans le dispositif de la requête introductive d’instance, il y a lieu de conclure en l’espèce, au vu du libellé non équivoque de la requête introductive d’instance tendant à voir annuler la décision directoriale du 8 mars 2022, que le recours, en dépit de la possibilité plus large et plus favorable au contribuable, d’un recours en réformation prévue par la loi, tend à la seule annulation de la décision précitée.

Or, si dans une matière dans laquelle la loi a institué un recours en réformation, le demandeur conclut à la seule annulation de la décision attaquée, le recours est néanmoins recevable dans la mesure où le demandeur se borne à invoquer des moyens de légalité1. Le recours en annulation sous examen est dès lors recevable, étant par ailleurs relevé qu’il a été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.

2.

Quant au fond Moyens et arguments des parties A l’appui de son recours, le demandeur explique être « membre de la copropriétaire (A)-

… » au titre de 6,25%. Un contrat de crédit-bail immobilier aurait été conclu en date du 10 mai 1994 entre la société anonyme (AA) SA « au nom et pour le compte de la copropriété (A)-… » et l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg. Ledit contrat de crédit-bail aurait prévu qu’à partir de la dixième année de location, l’Etat pourrait faire valoir son droit au rachat de l'immeuble.

1 Trib. adm. 3 mars 1997, n° 9693 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Recours en réformation, n° 2 ainsi que les autres références y citées.Le demandeur conteste désormais en substance que les loyers payés par l’Etat aux copropriétaires sur base dudit contrat seraient à qualifier de revenus locatifs. A ses yeux, lesdits revenus seraient à qualifier de remboursement progressif du financement de la construction de l’immeuble. Il conclut à une violation du § 215, alinéa 2 AO.

Le demandeur reproche encore au directeur d’avoir renvoyé au § 218, alinéa 2 AO en insistant sur le fait que les montants payés par l’Etat aux copropriétaires ne seraient pas à qualifier de revenus locatifs.

Enfin, le demandeur reproche au directeur de s’être référé au § 232, alinéa 2 AO en précisant qu’il s’attaquerait « aux bases d'impositions figurant sur ses bulletins d'impôt pour les années 2017 et 2018. Plus précisément les montants concernant les revenus nets de la location de biens. Ces montants qui ont été évalués par l'Administration des contributions directes à … EUR pour l'année 2017 et à … EUR pour l'année 2018 ». Il demande plus particulièrement « à ce que l'administration des contributions directes se base sur ses déclarations d'impôts établies au mois de juin 2019 pour les années 2017 et 2018 » étant donné que « les revenus nets de la location de biens servant de base d'imposition et calcul de l'impôt figurant sur les déclarations d'impôts des années 2017 et 2018 [seraient] les montants réellement perçus [par lui] ».

Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours en affirmant en substance que le directeur aurait retenu à juste titre qu’une imposition qui est basée en tout ou en partie sur des revenus établis séparément ne pourrait être attaquée pour le motif que ces bases d’imposition seraient inexactes et qu’une telle réclamation ne pourrait être valablement formée que contre les bulletins portant établissement desdits revenus. Le délégué du gouvernement renvoie dans ce contexte aux §§ 218 et 232 AO.

Le demandeur n’a pas déposé de mémoire en réplique en cause de sorte à ne pas avoir pris position par rapport aux explications du délégué du gouvernement.

Appréciation du tribunal Aux termes du § 232, alinéa 2 AO: « Liegen einem Steuerbescheid Entscheidungen zugrunde, die in einem Feststellungsbescheid oder in einem Steuermessbescheid getroffen worden sind, so kann der Steuerbescheid nicht mit der Begründung angefochten werden, dass die in einem Feststellungsbescheid oder in einem Steuermessbescheid getroffenen Entscheidungen unzutreffend seien. Dieser Einwand kann nur gegen den Feststellungsbescheid oder gegen den Steuermessbescheid erhoben werden. ».

Il suit de cette disposition qu’une imposition qui est assise en tout ou en partie sur des bases fixées par établissement séparé ne peut être attaquée pour le motif que ces bases d’imposition seraient inexactes et qu’une telle réclamation ne peut être formée que contre les bulletins portant établissement séparé.

Le demandeur reproche en l’espèce aux bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2017 et 2018 ainsi qu’au directeur d’avoir qualifié les revenus qu’il touche de la copropriété de revenus nets de la location de biens et non point de remboursement d’un financement.

Force est au tribunal de constater que le revenu net de la location de biens repris par les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2017 et 2018 émis à l’égard du demandeur reposesur les bulletins portant établissement des revenus d’entreprises collectives et de copropriété pour les années 2017 et 2018 dressés à l’égard de la copropriété. Toutefois, le recours sous examen est dirigé exclusivement contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2017 et 2018 émis à l’égard du demandeur et non point contre les bulletins d’établissement séparé précités.

Eu égard aux considérations qui précèdent ainsi qu’dispositions précitées du § 232, alinéa 2 AO, le directeur a donc valablement pu rejeter la réclamation du demandeur au motif qu’une réclamation tendant exclusivement à mettre en cause la qualification de revenus établis par voie de bulletins d’établissement séparés, en l’occurrence les bulletins d’établissement des revenus d’entreprises collectives et de copropriété pour 2017 et 2018, n’a pu être formée que contre lesdits bulletins et non point contre les revenus de l’impôt sur le revenu établis corrélativement à l’égard du demandeur.

Force est, enfin, de souligner que le demandeur se limite à contester la qualification des revenus telle que retenue par les bulletins d’établissement séparés dans le cadre de son recours sous examen dirigé contre les bulletins de l’impôt sur le revenu, sans pour autant contester de manière circonstanciée les développements du directeur fondés sur le § 232, alinéa 2 AO.

Le recours sous examen est partant à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, cinquième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit en la forme le recours en annulation dirigé contre la décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 8 mars 2022 ;

au fond, le déclare non justifié, partant déboute ;

condamne le demandeur aux frais et dépens.

Ainsi jugé par :

Françoise EBERHARD, premier vice-président, Benoît HUPPERICH, premier juge, Caroline WEYLAND, premier juge, et lu à l’audience publique du 9 octobre 2024 par le premier vice-président Françoise EBERHARD en présence du greffier Lejila ADROVIC.

s.Lejila ADROVIC s.Françoise EBERHARD Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 9 octobre 2024 Le greffier du tribunal administratif 5


Synthèse
Formation : Cinquième chambre
Numéro d'arrêt : 47522
Date de la décision : 09/10/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2024-10-09;47522 ?

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