Tribunal administratif N° 50765 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:50765 chambre de vacation Inscrit le 17 juillet 2024 Audience publique du 24 juillet 2024 Recours formé par Madame …, …, contre une décision du ministre des Affaires intérieures en matière de rétention administrative (art. 22, L. 18.12.2015)
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 50765 du rôle et déposée le 17 juillet 2024 au greffe du tribunal administratif par Maître Eric SAYS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le … à … (Nigéria), de nationalité nigériane, actuellement retenue au Centre de rétention au Findel, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires intérieures du 1er juillet 2024 ayant ordonné son placement au Centre de rétention pour une durée de trois mois à compter du jour de la présentation de sa demande de protection internationale, à savoir jusqu’au 1er octobre 2024 ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 19 juillet 2024 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER en sa plaidoirie à l’audience publique de ce jour, Maître Eric SAYS s’étant excusé.
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Il ressort d’un rapport de la police grand-ducale, région Sud-Ouest, commissariat Porte du Sud, du 28 juin 2024, portant le numéro …, qu’à cette date, Madame … fut appréhendée dans un hôtel à …, alors qu’elle était signalisée dans le système d’information Schengen (SIS).
Par arrêté du 28 juin 2024, notifié à l’intéressée en mains propres à la même date, le ministre des Affaires intérieures, ci-après désigné par « le ministre », déclara irrégulier le séjour de Madame … sur le territoire luxembourgeois et lui ordonna de le quitter sans délai, tout en lui interdisant l’entrée sur ledit territoire pour une durée de trois ans.
Par arrêté séparé du même jour, notifié à l’intéressée en mains propres à la même date, le ministre ordonna le placement en rétention de Madame … sur base de l’article 120 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration, dénommée ci-après « la loi du 29 août 2008 ».
Toujours en date du 28 juin 2024, Madame … demanda à introduire une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, dénommée ci-après « la loi du 18 décembre 2015 », demande qu’elle déposa en date du 1er juillet 2024.
Le 1er juillet 2024, Madame … fit, dans ce contexte, l’objet d’un rapport de la police grand-ducale, service de police judiciaire, unité criminalité organisée, sur son identité ainsi que sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg. Il fut confirmé à cette occasion que Madame … était signalée dans le SIS par la Suède depuis le 9 juin 2023 pour « Ressortissant d’un pays tiers en vue d’une décision de retour ».
Par un arrêté du 1er juillet 2024, notifié à l’intéressée en mains propres le même jour, le ministre ordonna la mainlevée du placement en rétention de Madame … décidée en date du 28 juin 2024, tout en ordonnant, dans la même décision, le placement en rétention de cette dernière, sur base de l’article 22, points b) et e) de la loi du 18 décembre 2015 pour une durée de trois mois à partir de la présentation de sa demande de protection internationale, à savoir jusqu’au 1er octobre 2024, ledit arrêté étant basé sur la motivation suivante :
« […] Vu l'article 22 (2) b) et e) de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire ;
Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;
Vu le rapport de police n° … du 28 juin 2024 ;
Vu la décision de retour du 28 juin 2024 déclarant irrégulier le séjour de l'intéressée, lui ordonnant de quitter le territoire sans délai et de lui interdire l'entrée sur le territoire national pour une durée de trois ans ;
Vu l'arrêté ordonnant le placement en rétention de l'intéressé du 28 juin 2024, lui notifié le même jour ;
Attendu que l'intéressée a présenté une demande de protection internationale depuis le centre de rétention en date du 1er juillet 2024 ;
Attendu que des renseignements supplémentaires ont été demandées par le biais du Centre de coopération policière et douanière aux autorités des pays limitrophes en vue de son éloignement ;
Considérant que l'intéressée a reçu une décision de retour de la Suède avec la possibilité d'un retour volontaire jusqu'au 27 juin 2024 ;
Considérant que l'intéressée n'a pas respecté la décision de retour émise par la Suède, mais a fui la Suède pour se rendre au Luxembourg ;
Considérant qu'il existe un risque de fuite dans le chef de l'intéressée, alors qu'elle ne dispose pas d'une adresse officielle au Grand-Duché de Luxembourg ;
Considérant que l'intéressée a présenté la demande de protection internationale à la seule fin de retarder ou d'empêcher l'exécution de la décision de retour alors qu'elle avait déjà eu la possibilité d'accéder à la procédure d'asile ;
Considérant qu'il convient de déterminer les éléments sur lesquels se fonde la demande de protection internationale de l'intéressée ;
Considérant que les mesures moins coercitives prévues à l'article 22(3) ne sauraient être efficacement appliquées ;
Par conséquent, la décision de placement s'avère nécessaire. […] ».
En date du 12 juillet 2024, Madame … passa un entretien auprès du ministère des Affaires intérieures, direction générale de l’immigration, sur sa situation et sur les motifs se trouvant à la base de sa demande de protection internationale.
Par une décision du 23 juillet 2024, le ministre rejeta la demande de protection internationale de Madame … dans le cadre d’une procédure accélérée sur base de l’article 27 de la loi du 18 décembre 2015, paragraphe (1), points, a) et g), au motif qu’elle n'aurait soulevé que des questions sans pertinence au regard de l'examen visant à déterminer si elle remplit les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale et qu’elle n’aurait présenté une demande de protection internationale qu'afin de retarder ou d'empêcher l'exécution d'une décision antérieure ou imminente qui entraînerait son éloignement.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 17 juillet 2024, inscrite sous le numéro 50765 du rôle, Madame … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de l’arrêté ministériel, précité, du 1er juillet 2024 ayant pour objet son placement au Centre de rétention pour une durée maximale de trois mois à partir de la présentation de sa demande de protection internationale, à savoir jusqu’au 1er octobre 2024.
Etant donné que l’article 22, paragraphe (6) de la loi du 18 décembre 2015 institue un recours de pleine juridiction contre une décision de rétention administrative prise en vertu de cette loi, le tribunal est compétent pour connaître du recours principal en réformation introduit en l’espèce, lequel est, par ailleurs, recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.
Il n’y a partant pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.
A l’appui de son recours et après avoir rappelé en fait quelques rétroactes passés en revue ci-avant, la partie demanderesse se rapporte, quant à la légalité externe de la décision déférée, à prudence de justice quant à la compétence du ministre pour prendre l’arrêté litigieux.
En ce qui concerne la légalité interne de la décision déférée, la partie demanderesse conclut à une violation de l’article 22 de la loi du 18 décembre 2015 en contestant qu’il existerait, dans son chef, un risque de fuite.
Elle fait encore valoir à cet égard que les éléments sur lesquels se fonde sa demande de protection internationale pourraient être obtenus sans placement en rétention. Elle conteste ensuite avoir introduit sa demande de protection internationale dans le seul but de retarder ou d’empêcher l’exécution de la décision de retour, affirmant avoir déjà essayé sans succès à deux reprises de déposer une telle demande, tout en estimant finalement que ce serait encore à tort que le ministre l’aurait placé en rétention sans avoir eu recours aux mesures moins coercitives, et notamment celle figurant au point a) de l’article 22, paragraphe (3) de la loi du 18 décembre 2015, alors qu’elle disposerait d’un passeport nigérian.
La partie demanderesse explique finalement, dans ce contexte, avoir introduit sa demande de protection internationale en raison de sa crainte d’être persécuté ou de faire l’objet de traitements dégradants et inhumains dans son pays d’origine par un groupe islamique « portant des dénominations différentes, telles que « Boco Haram » ou encore « Islamic Terrorists » », qui attaquerait fréquemment l’église qu’elle aurait fréquentée chaque semaine en sa qualité de membre de l’association spirituelle et religieuse dénommée « … », laquelle promouvrait la religion catholique dans le région de …. Elle insiste encore sur le fait que sa vie serait en danger dans son pays natal et qu’elle n’aurait aucun intérêt et aucune volonté de s’enfuir.
Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet du recours pour ne pas être fondé.
C’est de prime abord à tort que la partie demanderesse conteste, par le fait de s’être rapporté à prudence de justice, la compétence du ministre pour prendre une mesure de placement au Centre de rétention, étant donné qu’en vertu de l’article 3, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015, le ministre visé dans les dispositions de cette loi est le ministre ayant l’asile dans ses attributions, soit conformément à l’annexe B du règlement interne du gouvernement, tel qu’approuvé par arrêté grand-ducal du 27 novembre 2023 portant approbation et publication du règlement interne du Gouvernement, le ministre des Affaires intérieures.
Le moyen de légalité externe afférent est dès lors à rejeter pour ne pas être fondé.
Quant au fond, force est d’abord au tribunal de relever qu’aux termes de l’article 22, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015 envisageant les conditions dans lesquelles un demandeur de protection internationale peut être placé au Centre de rétention, « […] Un demandeur ne peut être placé en rétention que : […] b) pour déterminer les éléments sur lesquels se fonde la demande de protection internationale qui ne pourraient pas être obtenus sans un placement en rétention, en particulier lorsqu’il y a risque de fuite du demandeur ; […] e) lorsque le demandeur est placé en rétention dans le cadre d’une procédure de retour en vertu de l’article 120 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration pour préparer le retour et procéder à l’éloignement et lorsqu’il existe des motifs raisonnables de penser que le demandeur a présenté la demande de protection internationale à la seule fin de retarder ou d’empêcher l’exécution de la décision de retour alors qu’il avait déjà eu la possibilité d’accéder à la procédure d’asile; dans ce cas, la durée de placement en vertu de la présente loi court à partir du jour du dépôt de la demande de protection internationale. ».
L’article 22, paragraphe (2), point b) de la loi du 18 décembre 2015 permet dès lors au ministre de placer un demandeur de protection internationale en rétention administrative afin de déterminer les éléments sur lesquels se fonde la demande de protection internationale qui ne pourraient pas être obtenus sans un placement en rétention, en particulier lorsqu’il existe un risque de fuite.
De son côté, l’article 22, paragraphe (2), point e) de la loi du 18 décembre 2015 permet de placer un demandeur de protection internationale en rétention administrative, pour une durée maximale de trois mois, à condition qu’il existe des motifs raisonnables de penser que ledit demandeur n’a présenté une demande de protection internationale qu’à la seule fin de retarder ou d’empêcher l’exécution de ladite décision de retour, alors qu’il avait déjà eu la possibilité d’accéder à la procédure d’asile.
Le paragraphe (4) de l’article 22 de la même loi ajoute que : « La décision de placement en rétention indique les motifs de fait et de droit sur lesquels elle est basée. Elle est prise pour une durée la plus brève possible ne dépassant pas trois mois. Sans préjudice des dispositions du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 en matière de rétention, la mesure de placement en rétention peut être reconduite par le ministre chaque fois pour une durée de trois mois tant que les motifs énoncés au paragraphe 2, sont applicables, mais sans que la durée de rétention totale ne puisse dépasser douze mois.
Les procédures administratives liées aux motifs de rétention énoncés au paragraphe (2) sont exécutées avec toute la diligence voulue. Les retards dans les procédures administratives qui ne sont pas imputables au demandeur ne peuvent justifier une prolongation de la durée de rétention. ».
En vertu de l’article 22, paragraphe (4) de la loi du 18 décembre 2015, la mesure de placement en rétention est prise pour une durée la plus brève possible ne dépassant pas trois mois et les procédures liées aux motifs de rétention énoncés au paragraphe (2) sont exécutées avec toute la diligence voulue, sans que les retards dans les procédures administratives qui ne sont pas imputables au demandeur ne puissent justifier une prolongation de la durée de rétention, impliquant plus particulièrement que le placement ne doit pas se prolonger au-delà du délai raisonnable nécessaire pour accomplir les procédures administratives requises. Cette mesure de placement en rétention peut être reconduite, chaque fois pour une durée de trois mois, tant que les motifs énoncés à l’article 22, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015, précité, subsistent, mais sans que la durée de rétention totale ne puisse dépasser douze mois.
Il y a encore lieu de relever que dans la mesure où les cas de figure énoncés aux points a) à e) de l’article 22, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015 sont envisagés de manière alternative et non cumulative, il suffit que l’une des hypothèses y visées – en l’occurrence l’une des hypothèses visées aux points b) ou e) – se trouve vérifiée en l’espèce pour que le placement en rétention de la partie demanderesse soit justifié.
En ce qui concerne plus particulièrement l’application par le ministre du point e) de l’article 22, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015, le tribunal relève, d’une part, qu’il est constant en cause qu’en date du 28 juin 2024, la partie demanderesse a été placée en rétention administrative sur le fondement de l’article 120 de la loi du 29 août 2008, mesure qui a été par la suite été remplacée par un placement sur base de l’article 22 de la loi du 18 décembre 2015, de sorte que la première condition prévue au point e) de l’article 22, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015 et tenant à ce que l’intéressée avait été placée au Centre de rétention dans le cadre d’une procédure en vertu de l’article 120 de la loi du 29 août 2008 se trouve vérifiée en l’espèce.
D’autre part, il est encore constant que la partie demanderesse a présenté une demande de protection internationale pendant son placement en rétention, à savoir en date du 1er juillet 2024.
S’agissant de la question de savoir si cette demande a été introduite dans l’unique but de retarder ou d’empêcher l’exécution de la décision de retour, il y a lieu de relever qu’il ressort du dossier administratif et notamment de la réponse du 4 juillet 2024 des autorités suédoises suite à la demande d’information SIRENE leur adressée le 28 juin 2024 par la police grand-ducale, que la partie demanderesse bénéficiait d’un titre de séjour valable jusqu’au 30 juin 2021 en Suède, où elle avait encore sollicité un titre de séjour en tant que membre de famille, demande qui fut rejetée en date du 9 juin 2023 avec un ordre de quitter le territoire de quatre semaines, coulé en force de chose décidée en date du 30 mai 2024. Or, il ne se dégage pas des éléments soumis à l’appréciation du tribunal ou des explications fournies dans la requête introductive d’instance que la partie demanderesse n’aurait auparavant pas eu la possibilité d’accéder à la procédure d’asile, alors qu’au contraire, la partie demanderesse a attendu de faire l’objet non seulement d’un ordre de quitter la Suède et d’une décision de retour au Luxembourg assortie d’une interdiction d’entrée sur le territoire pour une durée de trois ans, mais également d’être placée au Centre de rétention à Luxembourg pour enfin déposer sa demande de protection internationale, l’affirmation non autrement circonstanciée selon laquelle elle aurait essayé à deux reprises de déposer une demande de protection internationale au Luxembourg restant, par ailleurs, à l’état de pure allégation au regard des contestations y relatives de la partie gouvernementale. Il est finalement relevé que les faits invoqués, à savoir un risque de persécution, respectivement d’atteintes graves, manquent de pertinence dans le cadre de la présente analyse, alors que ces faits ont nécessairement déjà été connus par la partie demanderesse avant son arrivée en Suède, respectivement au Luxembourg.
Il s’ensuit que le ministre pouvait valablement conclure à l’existence de motifs raisonnables laissant penser que la partie demanderesse n’a présenté sa demande de protection internationale qu’à la seule fin de retarder ou d’empêcher son éloignement en exécution de la décision de retour dont elle fait l’objet - en l’espèce la décision du 28 juin 2024 -, et ainsi se baser sur le point e) de l’article 22, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015 pour justifier le placement de la partie demanderesse en sa qualité de demandeur d’une protection internationale.
Au regard du caractère alternatif des cas de figure énoncés aux points a) à e) de l’article 22, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015 et au regard de la circonstance que le ministre pouvait a priori valablement se baser sur le point e) dudit article, l’analyse de la légalité et du bien-fondé du recours ministériel au point b) du paragraphe (2) de l’article 22, précité, également invoqué pour justifier le placement au Centre de rétention de la partie demanderesse, devient surabondante.
S’agissant de l’argumentation de la partie demanderesse selon laquelle le ministre aurait dû appliquer des mesures moins coercitives, il y a lieu de relever que l’article 22, paragraphe (3) de la loi du 18 décembre 2015, cité ci-dessus, prévoit que le placement en rétention ne peut être ordonné que si aucune des mesures moins coercitives prévues à ses points a), b) et c) ne peut être efficacement appliquée.
Quant aux mesures moins coercitives, il y a lieu de relever que le paragraphe (3) de l’article 22 de la loi du 18 décembre 2015 dispose que : « La décision de placement en rétention est ordonnée par écrit par le ministre sur la base d’une appréciation au cas par cas, lorsque cela s’avère nécessaire et si d’autres mesures moins coercitives ne peuvent être efficacement appliquées.
On entend par mesures moins coercitives:
a) l’obligation pour le demandeur de se présenter régulièrement, à intervalles à fixer par le ministre, auprès des services de ce dernier ou d’une autre autorité désignée par lui, après remise de l’original du passeport et de tout document justificatif de son identité en échange d’un récépissé valant justification de l’identité ;
b) l’assignation à résidence dans les lieux fixés par le ministre, si le demandeur présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite;
l’assignation à résidence peut être assortie, si nécessaire, d’une mesure de surveillance électronique qui emporte pour le demandeur l’interdiction de quitter le périmètre fixé par le ministre. Le contrôle de l’exécution de la mesure est assuré au moyen d’un procédé permettant de détecter à distance la présence ou l’absence du demandeur dans le prédit périmètre. La mise en œuvre de ce procédé peut conduire à imposer au demandeur, pendant toute la durée du placement sous surveillance électronique, un dispositif intégrant un émetteur. Le procédé utilisé est homologué à cet effet par le ministre. Sa mise en œuvre doit garantir le respect de la 5 dignité, de l’intégrité et de la vie privée de la personne. La mise en œuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance et le contrôle à distance proprement dit, peuvent être confiés à une personne de droit privé ;
c) l’obligation pour le demandeur de déposer une garantie financière d’un montant de cinq mille euros à virer ou à verser soit par lui-même, soit par un tiers à la Caisse de consignation, conformément aux dispositions y relatives de la loi du 29 avril 1999 sur les consignations auprès de l’Etat. Cette somme est acquise à l’Etat en cas de fuite ou d’éloignement par la contrainte de la personne au profit de laquelle la consignation a été opérée. La garantie est restituée par décision écrite du ministre enjoignant à la Caisse de consignation d’y procéder si les motifs énoncés au paragraphe (2) ne sont plus applicables ou en cas de retour volontaire.
Les mesures moins coercitives sont ordonnées par écrit et peuvent être appliquées conjointement. En cas de défaut de respect des obligations imposées par le ministre ou en cas de risque de fuite, la mesure est révoquée et le placement en rétention est ordonné. » Or, la partie demanderesse reste en défaut de fournir des éléments suffisants lui permettant de remettre en cause le constat du ministre selon lequel les mesures moins coercitives prévues par l’article 22, paragraphe (3), points a), b) et c) de la loi du 18 décembre 2015 ne pouvaient être appliquées efficacement en l’espèce, étant relevé que le seul fait de disposer d’un passeport qu’elle aurait pu remettre en échange d’un récépissé valant justification de son identité ne suffit pas au regard des constatations qui précèdent, dénotant le souhait de la partie demanderesse de se soustraire systématiquement, d’abord en Suède puis au Luxembourg, aux mesures d’éloignement prises à son encontre. Il s’ensuit que la partie demanderesse est restée en défaut de fournir des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite, étant encore relevé qu’elle ne dispose d’aucun domicile fixe ni de quelconques attaches au Luxembourg, de sorte qu’une assignation à résidence ne saurait pas non plus être efficacement appliquée. Finalement, la partie demanderesse ne propose pas le paiement d’une garantie financière.
Il suit dès lors des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que le ministre a retenu que les mesures moins coercitives prévues par l’article 22, paragraphe (3), points a), b) et c) de la loi du 18 décembre 2015 ne sauraient être efficacement appliquées en l’espèce.
En ce qui concerne encore les diligences accomplies pour écourter au maximum sa privation de liberté, d’ailleurs non contestées par la partie demanderesse, le tribunal n’entrevoit pas, à travers les éléments du dossier à sa disposition, un manque de diligences dans le chef du ministre, ce d’autant plus que du fait que la demande de protection internationale de la partie demanderesse, déposée le 1er juillet 2024, a fait entretemps l’objet d’un rejet de la part du ministre, il incombe actuellement à ce dernier d’attendre l’écoulement du délai de recours contentieux afférent, respectivement éventuellement, le cas échéant, l’issue d’un tel recours, avant de pouvoir reprendre l’organisation de l’éloignement de la partie demanderesse.
Eu égard aux développements qui précèdent et en l’absence d’autres moyens, en ce compris des moyens à soulever d’office, le tribunal ne saurait, en l’état actuel du dossier, utilement mettre en cause ni la légalité ni le bien-fondé de la décision déférée. Il s’ensuit que le recours sous analyse est à rejeter comme non fondé.
Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant contradictoirement ;
reçoit le recours principal en réformation en la forme ;
au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;
dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;
condamne la partie demanderesse aux frais et dépens de l’instance.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 24 juillet 2024 par :
Thessy Kuborn, premier vice-président, Olivier Poos, vice-président, Laura Urbany, premier juge, en présence du greffier Paulo Aniceto.
s. Paulo Aniceto Lopes s. Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 24 juillet 2024 Le greffier du tribunal administratif 8