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12/07/2024 | LUXEMBOURG | N°47705

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 12 juillet 2024, 47705


Tribunal administratif N° 47705 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:47705 3e chambre Inscrit le 18 juillet 2022 Audience publique extraordinaire du 12 juillet 2024 Recours formé par Monsieur …, … (Allemagne), contre une décision du Conseil de discipline des fonctionnaires communaux en présence de l’administration communale de la Ville de … en matière de discipline

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 47705 du rôle et déposée le 18 juillet 2022 au

greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit...

Tribunal administratif N° 47705 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:47705 3e chambre Inscrit le 18 juillet 2022 Audience publique extraordinaire du 12 juillet 2024 Recours formé par Monsieur …, … (Allemagne), contre une décision du Conseil de discipline des fonctionnaires communaux en présence de l’administration communale de la Ville de … en matière de discipline

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 47705 du rôle et déposée le 18 juillet 2022 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, fonctionnaire communal, demeurant à D-… (Allemagne), … et élisant domicile en l’étude de son litismandataire préqualifié, sise à L-2227 Luxembourg, 15, Avenue de la Porte-Neuve, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du Conseil de discipline des fonctionnaires communaux du 21 avril 2022 prononçant à son égard la sanction disciplinaire de la suspension des majorations biennales pendant une durée de 3 ans et le retard dans la promotion ou l’avancement pendant une année ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Kelly FERREIRA SIMOES, en remplacement de l’huissier de justice Frank SCHAAL, demeurant tous les deux à Luxembourg, du 25 juillet 2022, portant signification de la précitée requête à l’administration communale de la Ville de …, établie à L-…, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions ;

Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 4 août 2022, par laquelle Maître Jean KAUFFMAN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, déclare avoir été mandaté pour la défense des intérêts de la Commune de la Ville de … ;

Vu le mémoire en réponse déposé le 13 décembre 2022 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean KAUFFMAN, préqualifié, au nom et pour le compte de la Commune de la Ville de … ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 12 janvier 2023 par Maître Jean-Marie BAULER, pour compte de son mandant, préqualifié ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 10 février 2023 par Maître Jean KAUFFMAN, pour compte de sa mandante, préqualifiée ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Jonathan HOLLER, en remplacement de Maître Jean-Marie BAULER, et Maître Jean KAUFFMAN en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 23 avril 2024.

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Il ressort du dossier administratif que, suite à un certain nombre de demandes de congé tardives, voire d’absences non autorisées, Monsieur … fonctionnaire communal, rédacteur, classé à l’échelon …, grade …, affecté au « … » de la commune de la Ville de …, désignée ci-

après par « la commune », se vit convoquer, par courriel du 1er février 2021 par le chef de service du « … » de la commune, à une entrevue avec le directeur des ressources humaines de la commune le 8 février 2021.

Par courrier du 2 février 2021, le directeur du « … » de la commune désigné ci-après par « le directeur », s’adressa à la direction des ressources humaines de la commune signalant l’absence de respect de la réglementation en vigueur en matière de prise de congés par Monsieur …, respectivement d’absences non excusés dans son chef.

Par courriel du 3 février 2021, le directeur pria Monsieur … de contacter le support psychologique de la commune.

En date du 12 février 2021, l’entrevue de Monsieur … avec la direction des ressources humaines de la commune, initialement fixée au 8 février 2021, eut lieu et un rapport fût établi et adressé au collège échevinal de la commune, ledit rapport faisant état de problèmes de Monsieur … avec une consommation excessive d’alcool et un état de santé physique et psychique dégradé en conséquence.

Par courrier du 17 mars 2021, le collège échevinal adressa un rappel à l’ordre à Monsieur … en relation avec les faits énoncés dans le prédit rapport et l’informa de sa décision de lui retirer un trentième de son traitement mensuel brut pour une absence non autorisée d’un jour et le somma à se tenir strictement au règlement interne ainsi qu’aux dispositions de la loi modifiée du 24 décembre 1985 fixant le statut général des fonctionnaires communaux, dénommée ci-après « le statut général », .

Par courriel du 22 mars 2021, Monsieur … informa Madame … du service psychologique de la commune de son engagement d’un suivi par ledit service, en collaboration avec le « … », ainsi que de se soumettre à des tests d’alcoolémie par le docteur … pour une période de 6 à 12 mois.

Par courrier du 25 mars 2021, le collège échevinal de la commune somma Monsieur … de faire une cure respectivement une thérapie stationnaire avant toute reprise de travail, l’informa qu’il fera l’objet d’un programme de prévention-dépendance assorti de screening inopinés une fois par mois suite à son retour au travail pendant la durée d’un an et lui rappela, par le même courrier, que toute absence non-excusée pour une consultation auprès de la chargée de mission du support psychologique l’exposerait à des suites disciplinaires.

Par courriers des 31 mai 2021, 9 et 22 juin 2021, le chef de service, s’adressa de nouveau à la direction des ressources humaines de la commune signalant des nouveaux faits d’absences non excusés de Monsieur ….

Par courriers des 4, 11, 29 juin et 2 juillet 2021, le collège échevinal adressa à chaque fois un ordre de justification à Monsieur … en relation avec des faits d’absences non excusées dans son chef et l’informa, à chaque reprise, de sa décision de procéder à une retenue sur son prochain traitement en raison desdites absences non excusés, tout en l’invitant de présenter ses explications dans les dix jours de la notification dudit courrier, courriers auquel Monsieur … prit position par courrier du 1er juillet 2021.

Par courrier du 28 juillet 2021, le collège échevinal adressa une mise en demeure à Monsieur … de se présenter à son poste de travail endéans les trois jours de réception de réception dudit courrier, sous peine de se voir appliquer les dispositions de l’article 51 du statut général menant à la démission d’office dans son chef.

Par courrier du 30 juillet 2021, Monsieur … prit position par rapport à la prédite mise en demeure en informant la direction des ressources humaines de sa volonté de continuer à travailler auprès de la commune et de son intention de « minimiser voir d’arrêter les absences non excusées ».

Par courriel du 4 août 2021, Monsieur … informa le directeur de son hospitalisation.

Par courrier du 4 août 2021, le chef de service s’adressa à la direction des ressources humaines de commune en la priant d’entamer une procédure disciplinaire à l’encontre de Monsieur ….

Par décision du 17 septembre 2021, le collège échevinal décida de déclencher une procédure disciplinaire à l’encontre de Monsieur … et de transmettre le dossier au commissaire du Gouvernement chargé de l’instruction disciplinaire, désigné ci-après par « le commissaire du gouvernement », par application des dispositions de l’article 68 du statut général, saisine qui eut lieu par courrier du collège échevinal adressé au commissaire du gouvernement le 26 octobre 2021, lequel en accusa réception par courrier du 28 octobre 2021.

Par courrier envoyé par lettre recommandée avec avis de réception du 28 octobre 2021, le commissaire du gouvernement adjoint chargé de l’instruction disciplinaire, désigné ci-après par « le commissaire du gouvernement adjoint », informa Monsieur … qu’une instruction disciplinaire avait été ordonnée à son encontre, tout en l’invitant à se présenter au commissariat du gouvernement chargé de l’instruction disciplinaire pour une audition devant se dérouler le 10 novembre 2021 afin de prendre position par rapport aux faits lui reprochés, ladite audition ayant eu lieu le 24 novembre 2021.

En date du 21 décembre 2021, le commissaire du gouvernement adjoint clôtura son instruction par l’émission d’un rapport d’instruction et, par un courrier du même jour, informa Monsieur … qu’il envisagea de transmettre le dossier au Conseil de discipline des fonctionnaires communaux, ci-après dénommé le « Conseil de discipline », conformément à l’article 68, paragraphe (5) du statut général, sans préjudice de son droit de prendre inspection du dossier disciplinaire en vue, le cas échéant, de présenter ses observations, respectivement de demander un complément d’instruction.

Par décision du 21 avril 2022, le Conseil de discipline prononça à l’encontre de Monsieur … la sanction disciplinaire de la suspension des majorations biennales pendant une durée de trois ans ainsi que le retard dans la promotion ou l’avancement pendant une années, décision motivée comme suit :

« […] Vu le dossier constitué à charge de … par le commissaire du Gouvernement adjoint, ci-après le commissaire, régulièrement saisi par courrier daté du 26 octobre 2021, de la part du collège des bourgmestre et échevins de la Ville de …, en application de l'article 68 § 2, alinéa 1er de la loi du 24 décembre 1985 fixant le statut général des fonctionnaires communaux, ci-après le Statut, d'une instruction disciplinaire à charge de … et transmis pour attribution au Conseil de discipline, ci-après le Conseil, par courrier du 7 janvier 2022.

Vu le rapport d'instruction du 21 décembre 2021.

Le Conseil est régulièrement saisi de l'affaire, conformément aux dispositions de l'article 68 § 5 du Statut, par la lettre du commissaire datée du 7 janvier 2022.

A l'audience publique du Conseil du jeudi 10 mars 2022, … s'est présenté, assisté de son mandataire, Maître Jonathan HOLLER, en remplacement de Maître Jean-Marie BAULER.

La Commune de …, régulièrement représentée par Mme …, a été entendue à cette audience.

Les faits reprochés à … se dégagent de la lettre de saisine datée du 26 octobre 2021 du collège des bourgmestre et échevins de la Ville de ….

Ce courrier est conçu comme suit.

« Monsieur le commissaire du Gouvernement, Nous référant à l'article 68, sub 2), alinéa 1er de la loi du 24 décembre 1985 fixant le statut général des fonctionnaires communaux, tel que ce texte a été modifié par la suite, désigné par après comme le « statut », nous nous permettons de vous saisir aux fins de procéder à une instruction à l'encontre de Monsieur …, rédacteur, qui est actuellement classé à l'échelon … du grade … du barème des fonctionnaires.

Comme il est précisé au rapport et aux pièces annexées, le concerné est présumé avoir manqué à ses obligations statutaires:

L'intéressé s'est fait remarquer par des absences non-autorisées au travail. Quatre ordres de justification lui ont été transmis et la partie du traitement correspondant à ses absences non-autorisées lui a été retirée de son traitement à chaque fois :

• Le 4 juin 2021 un premier ordre de justification lui a été notifié suite à une absence non-autorisée pour la période du 25 mai 2021 au 31 mai 2021. La somme de … € lui a été retirée.

• Le 11 juin 2021 un deuxième ordre de justification lui a été notifié suite à une absence non-autorisée pour la période du 1er juin au 2 juin 2021. La somme de … € lui a été retirée.

• Le 29 juin 2021 un troisième ordre de justification lui a été notifié suite à une absence non-autorisée pour la période du 14 juin au 18 juin 2021. La somme de … € lui a été retirée.

• Le 2 juillet 2021 un quatrième ordre de justification lui a été notifié suite à une absence non-autorisée pour la période du 21 juin au 23 juin 2021. La somme de … € lui a été retirée.

Malgré les 4 ordres de justification avec la sommation de répondre endéans les 10 jours, M … n'a daigné répondre que par un seul courrier daté du 1er juillet 2021 réceptionné le 5 juillet 2021 aux trois premiers ordres de justification. Le dernier est resté sans réponse jusqu'à aujourd'hui.

M … a ensuite remis un certificat médical couvrant la période du 24 juin 2021 jusqu'au 16 juillet 2021.

Lorsque M … ne s'est pas présenté à son poste le 19 juillet 2021, le chef de service lui a écrit par courriel le 19 juillet 2021 qu'il devait constater qu'il ne s'était pas présenté au travail et qu'il n'avait pas introduit de certificat de maladie, ni informé oralement son service d'une nouvelle absence. Le 22 juillet 2021, après 4 jours sans certificat de maladie ni explication, M … a répondu « Deen kann ech leider net virlehen. Ech iwerlehen ze kënnegen ». Suite à ce courriel, un courrier de « mise en demeure » lui a été notifié le 28 juillet 2021 constatant une absence sans excuse depuis le 19 juillet 2021, cette absence étant à qualifier d'abandon de poste au sens de l'article 51 de la loi modifiée du 24 décembre 1985 fixant le statut général des fonctionnaires communaux. Par la mise en demeure, le collège sommait M … de se présenter à son poste ou de notifier sa démission en bonne et due forme dans un délai de 3 jours.

Le vendredi 30 juillet 2021 à 12h20, M … s'est présenté au travail après avoir reçu la lettre de mise en demeure et a demandé les modalités de démission. Ensuite, il a informé son supérieur qu'il fournirait un certificat médical ce qui le libérerait de l'obligation de répondre à la lettre de mise en demeure et qu'il ne voyait aucun intérêt de répondre à une telle lettre puisqu'il s'était présenté au travail. Le chef de service lui a expliqué qu'il aurait dû se présenter à l'heure et non pas à l'heure de midi, c'est alors que M … a répliqué que la lettre ne mentionnait pas l'heure de reprise du travail. Sur ce le chef de service a demandé à M … de s'installer au guichet pour reprendre son travail, ce que M … a cependant refusé.

Par courrier du 30 juillet 2021, réceptionné le 3 août 2021, M … informe la DRH qu'il souhaite continuer à travailler auprès de l'Administration communale et qu'il essaiera de « minimiser voir d'arrêter ses absences non excusées ».

Partant de ce qui précède, M … a enfreint les articles 11, 12 et 14 de la loi modifiée du 24 décembre 1985 fixant le statut général des fonctionnaires communaux, qui dispose :

Article 11 « 1. Le fonctionnaire est tenu de se conformer consciencieusement aux lois et règlements qui déterminent les devoirs que l'exercice de ses fonctions lui impose.

Il doit de même se conformer aux instructions du collège des bourgmestre et échevins qui ont pour objet l'accomplissement régulier de ses devoirs ainsi qu'aux ordres de service de ses supérieurs.

2. Le fonctionnaire est responsable de l'exécution des tâches qui lui sont confiées ; il doit prêter aide à ses collègues dans la mesure où l'intérêt du service l'exige ; la responsabilité de ses subordonnés ne le dégage d'aucune des responsabilités qui lui incombent…. ».

Article 12 « 1. Le fonctionnaire doit, dans l'exercice comme en dehors de l'exercice de ses fonctions, éviter tout ce qui pourrait porter atteinte à la dignité de ces fonctions ou à sa capacité de les exercer, donner lieu à scandale ou compromettre les intérêts du service public.

Il est tenu de se comporter avec dignité et civilité et faire preuve de courtoisie tant dans ses rapports de service avec ses supérieurs, collègues et subordonnés que dans ses rapports avec les usagers de son service qu'il doit traiter avec compréhension, prévenance et sans aucune discrimination. ».

Art. 14.

1. Le fonctionnaire ne peut s'absenter de son service sans autorisation.

3. En cas d'absence sans autorisation, le fonctionnaire perd de plein droit la partie de sa rémunération correspondant au temps de son absence, sans préjudice de l'application éventuelle de sanctions disciplinaires. … » M … a non seulement accumulé des absences non-autorisées répétitives, mais aussi, il ne prend pas son problème d'addiction en mains. Il avait accepté de faire un suivi externe auprès du … ainsi que de participer au programme prévention auprès de la responsable du support psychologique (courriel du 22 mars 2021). Malheureusement, il a rechuté et il n'a pas débuté le programme prévention.

Par son courrier du 4 août 2021, le chef de service a informé que M … ne s'est toujours pas présenté au travail et a omis de solliciter un congé pour raisons de santé pour la période du 19 juillet au 4 août 2021; que la mère de M … l'a informé le 3 août 2021 que son fils se trouvait à l'hôpital pour cause d'intoxication alcoolique et qu'elle essayait de le convaincre de suivre une cure de désintoxication. Par la suite, M … a envoyé un courriel à son supérieur hiérarchique l'informant qu'il se trouvait à l'hôpital et qu'un certificat médical lui parviendrait.

Un certificat médical est parvenu à la Direction des ressources humaines le 3 août 2021 couvrant la période du 29 juillet 2021 au 27 août 2021.

Par ses nombreux manquements, M … prouve un manque de respect et de discipline envers ses supérieurs hiérarchiques et son comportement est à qualifier d'inaptitude professionnelle. Malgré plusieurs rappels à l'ordre, plusieurs entretiens avec ses supérieurs et un suivi auprès de la responsable du support psychologique, un changement d'attitude n'est pas venu. » Lors de son audition au cours de l'instruction disciplinaire … n'a pas contesté les faits qui lui sont reprochés.

… se voit reprocher, d'une part, un certain nombre d'absences non-autorisées au travail et, d'autre part, un refus de travail.

Les absences non-autorisées au travail :

… a été absent de son travail le 29 janvier 2021 et les 8 et 9 février 2021 sans avoir au préalable sollicité un congé et sans avoir versé de certificat de maladie avec la circonstance particulière que … avait été convoqué dans le bureau de Mme … de la DRH le 8 février 2021 afin de faire le point sur sa situation professionnelle. Apparemment … avait versé en date du 10 février 2021 un certificat de maladie couvrant la période du 8 au 12 février 2021.

Pour l'absence non autorisée du 29 janvier 2021 … s'est vu infliger un rappel à l'ordre et il s'est vu retirer un 30e de son traitement mensuel brut.

Lors d'une entrevue avec Mme … en date du 12 février 2021, … a expliqué qu'en raison du manque de contacts dû à la pandémie, il s'est mis à boire et qu'il a pris des antidépresseurs et consommé occasionnellement du cannabis.

En date du 10 février 2021 … a remis un certificat de maladie rétroactif couvrant la période du 8 au 12 février inclus. Etant donné que le certificat en question n'a pas été versé au dossier le Conseil n'est pas en mesure de vérifier s'il est rétroactif, c.à.d. s'il couvre une période précédant sa délivrance au sens de l'article 16, sub 1) alinéa 3 du règlement grand-ducal du 3 novembre 1987 concernant le temps de travail et les congés des fonctionnaires communaux.

Cette période de maladie n'a cependant pas été déclarée conformément aux dispositions de l'article 16, sub 1) du prédit règlement qui dispose que le fonctionnaire empêché d'exercer ses fonctions par suite de maladie doit en informer d'urgence son supérieur. … a repris son travail le 12 février 2021, bien que le certificat de maladie constate son incapacité de travail jusqu'au 12 février inclus.

… a été absent du 25 au 31 mai 2021 sans avoir sollicité un congé et sans verser dans les formes et délais prévus par le prédit règlement un certificat de maladie pour cette période d'absence. Il s'est vu retenir la somme de … € sur sa fiche de salaire pour cette période conformément aux dispositions de l'article 14, 3) du Statut.

… s'est vu adresser un ordre de justification pour cette absence non autorisée qui est restée sans réponse.

… a expliqué à son supérieur qu'il avait fait une rechute.

A ce propos le commissaire a estimé que l'alcoolisme n'est pas susceptible de justifier l'absence de …, alors que le droit disciplinaire ne permettrait pas d'excuser les actes d'un fonctionnaire qui, objectivement, sont à qualifier de fautes disciplinaires.

Le Conseil ne partage pas entièrement cette approche du commissaire, alors que l'alcoolisme est reconnu comme étant une maladie et qu'il est de jurisprudence qu'une absence qui a pour origine un motif de santé ne peut être qualifiée d'abandon de poste - TA, 3-5-07 (21953 c. 22-11-07, 23047C). Il n'en reste pas moins que pour cette période litigieuse, comme pour d'autres périodes d'absences non autorisées, aucun certificat médical n'a été versé, même si l'alcoolisme de … ne peut plus faire de doute à partir du moment où il a été hospitalisé pour une intoxication alcoolique au mois d'août 2021. Il ne suffit pas d'affirmer son alcoolisme pour que toutes les absences soient justifiées.

… a encore été absent sans autorisation et sans certificat de maladie du 1er au 2 juin 2021. Ce n'est que le 4 juin 2021 que … a versé un certificat de maladie rétroactif puisque daté du 4 juin 2021 pour la période du 3 au 11 juin 2021.

Pour cette absence non autorisée … s'est vu retirer le montant de … € sur sa fiche de salaire.

… n'a pas répondu à l'ordre de justification qui lui a été envoyé pour cette absence.

… a encore été absent sans autorisation pour la période consécutive du 14 au 18 juin 2021.

Pour cette absence non autorisée il s'est vu retenir le montant de … € sur sa fiche de salaire.

… a encore été absent sans autorisation du 21 au 22 juin 2021. Pour cette période d'absence non autorisée il s'est vu retenir la somme de … € sur sa fiche de salaire.

Il a versé en date du 27 juin 2021 un certificat médical daté du 25 juin 2021 pour la période suivante, du 24 juin au vendredi 16 juillet 2021. Il s'agit dès lors d'un certificat rétroactif pour la journée du 24 juin 2021, qui reste donc inexcusée.

Pour la période subséquente du 19 juillet au 4 août 2021 … a de nouveau été absent sans autorisation et sans verser de certificat de maladie.

En date du 28 juillet 2021 … s'est vu adresser une mise en demeure de se présenter à son lieu de travail ou de notifier sa démission, sous peine de se voir reprocher un abandon de poste au sens de l'article 51 du statut.

Il s'est brièvement présenté au travail le vendredi 30 juillet 2021 à 12h20 pour demander les modalités de sa démission avant de repartir. Ce n'est qu'en date du 3 août 2021 que la Commune s'est vue délivrer un certificat médical daté du 30 juillet 2021 attestant une incapacité de travail du 29 juillet au 27 août 2021. Ce certificat médical est dès lors rétroactif pour la journée du 29 juillet 2021. Il en résulte que la période du 19 au 29 juillet 2021 est à considérer comme absence non excusée.

Si la Commune a retenu sur les fiches de salaire les montants correspondant aux périodes d'absences inexcusées conformément à l'article 14 sub 3) alinéa 1 du Statut, ces retenues de salaire sont de droit et ne constituent pas une sanction disciplinaire telle que prévue à l'article 58 du Statut, même s'il est vrai qu'à titre de pure faveur, le collège des bourgmestre et échevins peut imputer ces absences inexcusées sur le congé de récréation et si le conseil communal peut disposer au même titre jusqu'à la moitié de cette retenue en faveur de l'épouse et/ou des enfants mineurs du fonctionnaire concerné.

Refus de travail du 30 juillet 2021:

A la suite de la lettre de mise en demeure du 28 juillet 2021 de reprendre son travail ou de soumettre sa demande de démission, il s'est présenté le 30 juillet 2021 à 12h20 pour s'informer sur les modalités de la démission. Il a cependant refusé de reprendre le travail et il n'a pas présenté sa démission. Il a toutefois informé son supérieur qu'il allait consulter un médecin et envoyer un certificat médical, ce qu'il a fait dans la suite. Par ailleurs il a répondu à la lettre de mise en demeure en informant son supérieur qu'il voulait garder son emploi auprès de la Commune et qu'il allait essayer de minimiser ses absences non excusées.

Après avoir été hospitalisé pour une intoxication alcoolique et après avoir suivi une cure stationnaire en Allemagne du 16 octobre au 12 novembre 2021, il a repris le travail le 15 novembre 2021. Depuis cette date … s'est fait prendre en charge pour le traitement de sa maladie et il n'a plus récidivé.

S'il est vrai que l'article 51, sub 2) du Statut dispose que si le fonctionnaire mis en demeure ne donne pas suite dans un délai de trois jours, la démission d'office peut notamment être prononcée en cas d'abandon caractérisé de l'exercice de ses fonctions, il résulte cependant des éléments du dossier que le 30 juillet 2021 … s'est présenté sur son lieu de travail, soit endéans le délai de trois jours, en informant son supérieur qu'il n'était pas en l'état de reprendre ses fonctions et qu'il allait consulter un médecin. Sa maladie a été constatée le jour-

même suivant certificat médical du même jour, de sorte que le Conseil considère que son refus de reprendre le travail le 30 juillet 2021 était justifié pour un motif médical et que de la sorte il ne saurait être question en l'occurrence d'un abandon caractérisé de l'exercice de ses fonctions au sens de l'article 51, sub 2) du Statut.

Il se dégage de ce qui suit que … a contrevenu à :

- l'article 11, paragraphe 1, du statut général des fonctionnaires communaux (ci-après le « Statut ») qui dispose que le fonctionnaire est tenu de se conformer consciencieusement aux lois et règlements qui déterminent les devoirs que l'exercice de ses fonctions lui impose ; et en l'occurrence de se tenir aux devoirs résultant de :

• l'article 16, paragraphe 1, du règlement grand-ducal du 21 octobre 1987 concernant le temps de travail et les congés des fonctionnaires communaux qui dispose que le fonctionnaire empêché d'exercer ses fonctions par suite de maladie ou d'accident doit en informer d'urgence son supérieur hiérarchique et solliciter un congé pour raisons de santé. Ce congé est accordé sans production d'un certificat médical pour une période de trois jours consécutifs au plus.

Pour toute incapacité de travail dépassant trois jours le fonctionnaire doit présenter un certificat mentionnant la durée de l'incapacité de travail, le lieu de traitement (domicile ou hôpital) et, le cas échéant, les heures de sortie.

Le certificat médical prend cours le jour de sa délivrance.

• l'article 17 du même règlement grand-ducal du 21 octobre 1987 qui dispose que si le fonctionnaire s'absente pendant plus de trois jours consécutifs sans présenter le certificat médical requis, toute l'absence est considérée comme non motivée et donne lieu à l'application des dispositions de l'article 14, n°3 de la loi du 24 décembre 1985 fixant le statut général des fonctionnaires communaux ;

- l'article 11, paragraphe 2, du Statut qui prévoit que le fonctionnaire est responsable de l'exécution des tâches qui lui sont confiées ; il doit prêter aide à ses collègues dans la mesure où l'intérêt du service l'exige ; la responsabilité de ses subordonnés ne le dégage d'aucune des responsabilités qui lui incombent ;

- l'article 12, paragraphe 1, du Statut qui dispose que le fonctionnaire doit, dans l'exercice comme en dehors de l'exercice de ses fonctions, éviter tout ce qui pourrait porter atteinte et la dignité de ces fonctions ou à sa capacité de les exercer, donner lieu à scandale ou compromettre les intérêts du service public.

Il est tenu de se comporter avec dignité et civilité et faire preuve de courtoisie tant dans ses rapports de service avec ses supérieurs, collègues et subordonnés que dans ses rapports avec les usagers de son service qu'il doit traiter avec compréhension, prévenance et sans aucune discrimination ;

- l'article 14, paragraphe 1,. du Statut qui dispose que le fonctionnaire ne peut s'absenter de son service sans autorisation.

Le mandataire de … a donné à considérer que son client avait surmonté sa maladie, qu'il a été suffisamment puni par cette maladie et qu'il était contre-indiqué de lui infliger une sanction disciplinaire.

La représentante la Commune de … a estimé que les nombreuses absences inexcusées de … avaient profondément désorganisé ses services, de sorte qu'il y avait lieu de prononcer une sanction disciplinaire. Elle a proposé à ce titre la suspension des majorations biennales pendant 3 ans.

Aux termes de l'article 64 du Statut, l'application des sanctions se règle notamment d'après la gravité de la faute commise, la nature et le grade des fonctions et les antécédents du fonctionnaire inculpé. Elles peuvent être appliquées cumulativement.

Dès lors la procédure disciplinaire a pour but principal d'élucider, si, et, le cas échéant sous quelles conditions, les manquements établis à charge du fonctionnaire sont compatibles avec le statut de fonctionnaire.

S'il ne fait aucun doute que l'alcoolisme peut être considéré comme une maladie, il n'en reste pas moins que cette maladie doit être médicalement constatée et que les incapacités de travail dues à cette maladie doivent être portées à la connaissance de l'employeur dans les conditions des articles 16 et 17 du règlement grand-ducal du 3 novembre 1987. Tel n'a manifestement pas toujours été le cas dans la présente affaire et le comportement imprévisible de … a mis la Commune dans une situation particulièrement difficile dans l'organisation à court terme du « … ». Il y a cependant lieu de prendre en considération le fait que … a réussi à se ressaisir et que depuis la reprise de travail il ne s'est plus fait remarquer par aucune absence inexcusée.

… est rédacteur affecté au « … » de la Ville de …, il est classé au groupe de traitement Bl, grade …, échelon … ; il est entré en service le … 2015 et tient sa nomination du … 2017.

Il n'a aucun antécédent disciplinaire.

Le Conseil considère que les sanctions prévues à l'article 58 sub 6) du Statut, à savoir la suspension des majorations biennales pendant une durée de 3 ans et à l'article 58 sub 7), à savoir le retard dans la promotion ou l'avancement pendant une année, constituent des sanctions adéquates. […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 18 juillet 2022, inscrite sous le numéro 47705 du rôle, Monsieur … a introduit un recours en réformation, sinon en annulation dirigé contre la décision précitée du 21 avril 2022.

I.

Quant à la compétence et la recevabilité des mémoires et du recours Dans son mémoire en réponse, Monsieur … se rapporte à prudence de justice en ce qui concerne la recevabilité du mémoire en réponse déposé par le litismandataire de la commune au tribunal administratif en date du 13 décembre 2022.

Force est au tribunal de préciser que s’il est exact que le fait, pour une partie de se rapporter à prudence de justice équivaut à une contestation1, il n’en reste pas moins qu’une contestation non autrement étayée est à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au juge administratif de suppléer la carence des parties au litige et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions2.

Dès lors, dans la mesure où Monsieur … est resté en défaut de préciser en quelle mesure le mémoire en réponse déposé par le litismandataire de la commune le 13 décembre 2022 ne serait pas recevable, le moyen afférent encourt le rejet.

Il s’ensuit que ledit mémoire est recevable, étant encore relevé que le tribunal n’entrevoit pas non plus de cause d’irrecevabilité d’ordre public à soulever d’office.

Aux termes de l’article 66, paragraphe 2, du statut général : « En dehors des cas où le Conseil de discipline statue en appel, le fonctionnaire frappé d’une sanction disciplinaire prononcée par le Conseil de discipline ou suspendu conformément à l’article 59, paragraphe 1er, peut, dans les trois mois de la notification de la décision, prendre recours au Tribunal administratif qui statue comme juge du fond. Le même droit de recours appartient au collège des bourgmestre et échevins, qui peut exercer ce droit par l’intermédiaire du délégué visé à l’article 70, alinéa 3. […] ».

Monsieur …, fonctionnaire communal, ayant été frappé d’une sanction disciplinaire prononcée par le Conseil de discipline en dehors des cas où celui-ci statue en appel, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre principal.

Il n’y a partant pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

En ce qui concerne la recevabilité du recours, la commune se rapporte à prudence de justice en ce qui concerne la forme du recours, tout en signalant, en ce qui concerne le délai d’introduction du recours, qu’elle-même se serait vue notifier la décision du Conseil de discipline en date du 26 juillet 2022.

Monsieur …, quant à lui, n’a pas pris position à ce moyen.

Force est au tribunal de rappeler qu’une contestation non autrement étayée est à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au juge administratif de suppléer la carence des parties au 1 Trib. adm., 27 octobre 2004, n° 17634 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 905 et les autres références y citées.

2 Trib. adm., 23 janvier 2013, n° 30455 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 905 et les autres références y citées.

litige et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions3.

Dès lors, dans la mesure où la commune est restée en défaut de préciser dans quelle mesure la requête introductive sous analyse ne serait pas recevable, notamment en ce qui concerne la forme ou le délai d’introduction, la commune ne tirant en effet aucune conclusion de l’allégation suivant laquelle la décision du Conseil de discipline lui aurait été notifiée en date du 26 juillet 2022, le moyen afférent encourt le rejet.

Il s’ensuit que le recours principal en réformation est recevable, pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi, étant encore relevé que le tribunal n’entrevoit pas non plus de cause d’irrecevabilité d’ordre public à soulever d’office.

Malgré le fait que l’Etat n’a pas comparu pour assurer la défense des intérêts du Conseil de discipline, bien que la requête introductive d’instance ait été déposée au greffe du tribunal administratif ce qui vaut signification de celle-ci à l’égard de l’Etat, conformément à l’article 4, paragraphe (3) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le tribunal est amené à statuer à l’égard de toutes les parties suivant un jugement ayant les effets d’une décision juridictionnelle contradictoire conformément aux dispositions de l’article 6 de la même loi.

A titre liminaire, il y a lieu de rappeler que le tribunal n’est pas tenu par l’ordre des moyens, tel que présenté par le demandeur, mais détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et l’effet utile s’en dégageant.

II.

Quant à la légalité externe de la décision déférée 1) Quant à la violation du principe de légalité Moyens et arguments des parties Le demandeur conclut tout d’abord à une violation du principe de légalité consacré par l’article 14 de la Constitution et l’article 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, désignée ci-après par « la CEDH », alors que les peines prononcées par le Conseil de discipline n’auraient pas été prévisibles au regard de critères logiques, techniques et d’expérience professionnelle, prévus à l’article 64 du statut général.

A cet égard, le demandeur fait valoir que (i) la gravité de la faute commise par lui serait très faible, vu l’alcoolémie dont il aurait souffert à l’époque des faits reprochés et l’incapacité de travail en résultant, telle qu’attestée par des certificats médicaux versés en cause, (ii) le représentant de la commune n’aurait requis que l’application de la sanction de la suspension des majorations biennales pendant trois ans, (iii) le Conseil de discipline aurait reconnu qu’il se serait repris en mains depuis et qu’il n’y aurait eu aucune absence injustifiée de sa part depuis la période litigieuse et (iv) il n’y aurait aucun antécédent disciplinaire dans son chef, l’ensemble de ces élément constituant, d’après lui, des éléments à sa décharge. Il reproche dans ce contexte au Conseil de discipline d’avoir pris l’ensemble de ces éléments à sa charge pour prononcer les 3 Trib. adm., 23 janvier 2013, n° 30455 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 905 et les autres références y citées.

sanctions disciplinaires litigieuses et de l’avoir, ainsi, exposé à une insécurité juridique, de sorte que la décision déférée encourrait l’annulation.

Dans son mémoire en réplique, le demandeur réitère ses développements tout en estimant que le simple listing de ses périodes d’absences contenu dans la décision déférée ne suffirait pas à l’exigence de légalité prévue aux articles 14 de la Constitution et 7 de la CEDH.

La commune, quant à elle, conclut au rejet de ce moyen pour ne pas être fondé.

Analyse du tribunal En vertu de l’article 7, paragraphe 1er de la CEDH « Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction d’après le droit national ou international. De même il n’est infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l’infraction a été commise ». Ledit article consacre le principe de la légalité des peines tel que consacré également par l’article 14 de la Constitution, en vertu duquel « Nulle peine ne peut être établie ni appliquée qu’en vertu de la loi ». Tel que cela a été retenu par la Cour Constitutionnelle à différentes occasions, en droit disciplinaire, la légalité des peines suit les principes généraux du droit pénal et doit observer les mêmes exigences constitutionnelles de base. Le principe de la légalité de la peine entraîne la nécessité de définir les infractions en termes suffisamment clairs et de préciser le degré de répression pour en exclure l’arbitraire et pour permettre aux intéressés de mesurer exactement la portée de ces dispositions et le principe de la spécification de l’incrimination est le corollaire de celui de la légalité des peines. La Cour Constitutionnelle a encore retenu que le droit disciplinaire tolère dans la formulation des comportements illicites et dans l’établissement des peines à encourir une marge d’indétermination sans que le principe de la spécification de l’incrimination et de la peine n’en soit affecté, si des critères logiques, techniques et d’expérience professionnelle permettent de prévoir avec une sureté suffisante la conduite à sanctionner et la sévérité de la peine à appliquer.4 La Cour Constitutionnelle a pareillement retenu que le principe de la légalité des peines ne fait pas obstacle à ce qu’en matière disciplinaire les infractions soient définies par référence aux obligations légales et réglementaires auxquelles est soumise une personne en raison des fonctions qu’elle exerce, de la profession à laquelle elle appartient ou de l’institution dont elle relève.5 En l’espèce, le tribunal constate que l’argumentation du demandeur tendant à la violation des articles 14 de la Constitution et 7 de la CEDH, se résume, en substance, à la critique faite au Conseil de discipline d’avoir retenu des éléments à sa charge alors que ceux-

ci auraient dû être retenus à sa décharge et conduire à l’application d’une sanction disciplinaire moins lourde que celle prononcée par la décision déférée, étant encore relevé que le demandeur ne conteste pas que les faits lui reprochés ainsi que les dispositions légales lesquelles il lui est reproché d’avoir méconnues ont été énoncés avec précision dans la décision déférée.

Or, le tribunal se saurait partager l’analyse du demandeur, alors que ses développements manquent en fait. En effet, il ne se dégage d’aucun élément de la décision déférée que le Conseil de discipline aurait retenu les divers éléments mises en avant par le demandeur en tant 4 cf. arrêt n° 23/04 du 3 décembre 2004 de la Cour Constitutionnelle, Mém. A n° 201 du 23 décembre 2004.

5 cf. arrêt n° 41/07 du 14 décembre 2007 de la Cour Constitutionnelle, Mém. A n° 1 du 11 janvier 2008.

qu’éléments à sa charge et que ceux-ci auraient conduit à l’alourdissement de la sanction disciplinaire retenue à son encontre, étant encore relevé que le Conseil de discipline n’est pas tenu pas la proposition de la sanction à appliquer faite par le représentant de la commune.

Dans la mesure où le demandeur reste, par ailleurs, en défaut d’expliquer en quelle mesure les sanctions disciplinaires litigieuses ne seraient pas basées sur des critères logiques, techniques et d’expérience professionnelle qui permettent de prévoir avec une sureté suffisante la conduite à sanctionner et la sévérité de la peine à appliquer, le moyen tendant à une violation des articles 7 de la Convention et 14 de la CEDH sont à rejeter pour manquer en fait, étant relevé que la proportionnalité des sanctions retenues à l’encontre du demandeur feront l’objet d’une analyse ci-après.

2) Quant à l’impartialité du commissaire du gouvernement Arguments et moyens des parties Le demandeur conclut ensuite à une absence d’impartialité objective du commissaire du gouvernement ayant instruit l’affaire et renvoyé le dossier devant le Conseil de discipline, alors que celui-ci dépendrait directement du ministère de la Fonction publique et que l’appartenance tant de l’autorité chargée de l’instruction que de l’autorité de jugement au même ministère ne garantirait pas l’impartialité et l’indépendance requise en matière disciplinaire.

Il soutient ensuite qu’il serait permis de douter de l’impartialité du commissaire du gouvernement du fait pour celui-ci de cumuler de facto et de jure trois fonctions incompatibles, à savoir celle de juge d’instruction (instruire à charge et à décharge), de juge (classer l’affaire, sinon de renvoyer à l’autorité, sinon au Conseil de discipline) et celle de procureur (son rapport devant être considéré comme un réquisitoire), le demandeur réitérant ces mêmes développements dans son mémoire en réplique.

La commune conclut au rejet du moyen fondé sur le principe d’impartialité et d’indépendance du commissaire du gouvernement pour ne pas être fondé.

Analyse du tribunal L’article 6, paragraphe 1er de la CEDH, certes non invoqué en l’espèce, dispose que « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle […] ». Si l’article 6, précité, impose certes des impératifs à respecter en matière de procès équitable, les garanties afférentes n’ont néanmoins pas pour autant vocation à s’appliquer au niveau d’une procédure disciplinaire purement administrative, en ce qu’elles n’entrent en ligne de compte qu’à un stade ultérieur, au niveau de l’instance juridictionnelle compétente pour connaître du recours dirigé contre la décision administrative traduisant l’aboutissement de ladite procédure disciplinaire.

Force est encore de relever que, même si l’autorité administrative en charge de la procédure disciplinaire n’est pas formellement soumise au respect de l’article 6 de la CEDH, il a été jugé qu’elle est néanmoins tenue d’observer les principes généraux de droit, tels que le principe de procédure équitable, le respect des droits de la défense ou encore le principe général d’impartialité, et ce, même en l’absence d’un texte exprès6, ce même principe ayant été retenu, certes dans une moindre mesure, en ce qui concerne l’organe chargé de l’instruction de la procédure disciplinaire7.

Ainsi, il y a lieu d'une manière générale d'assurer que l'enquête disciplinaire soit conduite par une personne compétente à condition que son impartialité ne soit pas contestable.

Ainsi, à part le fait que l'organe enquêteur, chargé de l'instruction de l'affaire disciplinaire, doit être impartial d'un point de vue subjectif, en ce qu'il ne doit pas avoir procédé à des prises de position antérieures de nature à préjuger du résultat de la procédure disciplinaire, il est exigé que, d'un point de vue objectif, ledit enquêteur ne puisse pas être soupçonné de partialité objective, la partialité objective pouvant découler de conditions structurelles ou organisationnelles qui autoriseraient à suspecter l'impartialité d'un organe.8 Or, il convient de rappeler qu’il a été jugé que du seul fait que le commissaire du gouvernement soit appelé, en fonction des résultats de l’enquête, soit à classer l’affaire, soit à transmettre le dossier à l’autorité administrative ou encore au Conseil de discipline aux fins de décision, le commissaire du gouvernement ne peut pas être soupçonné de partialité objective au cours de l’enquête, la partialité ne pouvant être déduite ex post du seul résultat de l’enquête.

En effet, la possibilité du commissaire du gouvernement aux termes d’une instruction à charge et à décharge, à décider du sort de l’affaire, n’a par ailleurs que la qualité d’un acte préparatoire, le Conseil de discipline demeurant souverain dans son appréciation9 . La seule circonstance, par ailleurs, que le commissaire du gouvernement soit administrativement lié au ministère dont relèverait « le Conseil de discipline » ne révèle pas une partialité objective, le demandeur restant en défaut d’établir de manière circonstanciée en quelle mesure cet élément contribuerait in concreto à l’impartialité ou l’indépendance du commissaire du gouvernement chargé de l’instruction de l’affaire, le rapport d’instruction de ce dernier ne liant, tel que relevé ci-avant, pas le Conseil de discipline.

Dans la mesure où le demandeur n’avance par ailleurs pas le moindre élément de nature à établir une partialité subjective dans le chef du commissaire du gouvernement, le moyen tendant à une impartialité ou indépendance dans le chef du commissaire du gouvernement est à rejeter.

3) Quant à la violation du principe non bis in idem Arguments et moyens des parties Le demandeur conclut encore à une violation par la décision déférée du principe non bis in idem, en faisant valoir, d’une part, que le Conseil de discipline aurait prononcé à son encontre deux sanctions distinctes pour les mêmes faits et que, d’autre part, il aurait d’ores et déjà fait l’objet de retenues de salaires en relation avec les faits lui reprochés.

6 Trib. adm.. 12 mars 2008, n° 21852a du rôle, Pas. adm. 2023, V° Fonction publique, n° 273 (1er volet) et autres références y citées 7 Trib. adm. 1er avril 2009, n° 24318 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Fonction publique, n° 290 et l’autre référence y citée.

8 Trib. adm. 12 mars 2008, n° 21852a du rôle, Pas. adm. 2023, V° Fonction publique, n° 289 et l’autre référence y citée.

9 En ce sens : trib. adm., 12 mars 2008, n° 21852a du rôle, Pas. adm. 2023, V° Fonction publique, n° 287 (1er volet) et les autres références y citées.

En ce qui concerne d’abord les sanctions prononcées par le Conseil de discipline, le demandeur fait valoir que celles-ci seraient essentiellement pécuniaires et auraient été prononcées pour les mêmes faits et en application de règles protégeant les mêmes intérêts sociaux. Tout en admettant que l’article 64, alinéa 1er du statut général prévoirait la possibilité d’un cumul de sanctions, le demandeur estime que cette faculté serait réservée, d’une part, à l’hypothèse où plusieurs manquements de nature différente seraient reprochés au fonctionnaire, tel qu’il résulterait également des travaux parlementaires relatifs audit article et, d’autre part, à l’hypothèse où des sanctions de nature différente seraient prononcées. L’intéressé poursuit son argumentation en faisant valoir qu’il ne se trouverait dans aucune de ces deux hypothèses, alors que la faute lui reprochée serait celle de ne pas avoir signalé ses absences pour raisons de santé selon les modalités de l’article 16 du règlement grand-ducal modifié du 21 octobre 1987 concernant le temps de travail et les congés des fonctionnaires communaux, désigné ci-après par « le règlement grand-ducal du 21 octobre 1987 », et que les sanctions prononcées à son égard seraient de la même nature.

En ce qui concerne ensuite les retenues sur son traitement qui auraient été opérées suite à ses absences, le demandeur fait plaider que celles-ci constitueraient des sanctions nonobstant le fait de ne pas figurer au catalogue des sanctions disciplinaire prévu à l’article 58 du statut général. Il précise encore que le caractère punitif desdites retenues ressortirait, d’une part, de l’article 14, point 3 du statut général indiquant que des sanctions disciplinaires pourraient s’ajouter aux retenues sur le traitement, de sorte à sous-entendre, d’après le demandeur, le caractère punitif desdites retenues et, d’autre part, de la décision du Conseil de discipline déférée, celle-ci précisant que le collège des bourgmestres et échevins aurait pu imputer ses absences inexcusées sur son congé de recréation et que le Conseil communal pourrait disposer jusqu’à la moitié de cette retenue en faveur de son épouse et/ou de ses enfants mineurs.

Dans son mémoire en réplique, le demandeur réfute encore l’argumentation de la commune suivant laquelle le texte de l’article 64, alinéa 1er du statut général serait clair et qu’il n’y aurait dès lors pas lieu de se référer aux travaux parlementaires y relatifs, en répliquant que ledit article ne permettrait pas de connaître l’esprit des auteurs du projet de loi y ayant abouti, de sorte qu’il s’imposerait de prendre en compte lesdits travaux parlementaires.

La commune, quant à elle, conclut au rejet de ce moyen pour ne pas être fondé.

Analyse du tribunal Il y a, tout d’abord, lieu de relever que le principe non bis in idem a été repris tant par l’article 4 du Protocole n° 7 à la CEDH, dénommé ci-après « le Protocole n° 7 », dont le paragraphe (1) est libellé comme suit : « Nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même Etat en raison d’une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet Etat » que par l’article 14-7 du Pacte des Nations Unies relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966, dénommé ci-après « le Pacte », en vertu duquel « Nul ne peut être poursuivi ou puni en raison d’une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de chaque pays ».

Il échet de conclure de ces textes de droit international qu’il s’agit d’un principe consacré dans les grands systèmes internationaux de protection des droits de l’homme. Ce principe répond à une exigence de justice et de sécurité juridique et fait obstacle à ce qu’une même personne puisse être sanctionnée deux fois en raison des mêmes faits.

Il convient, par ailleurs, de constater que si l’autorité administrative n’est pas soumise au respect de l’article 4 du Protocole n° 7, qui prévoit le principe non bis idem en matière pénale, lorsqu’elle statue en matière disciplinaire10, elle est néanmoins tenue d’observer les principes généraux du droit qui s’imposent en la matière, dont plus particulièrement le principe non bis in idem qui interdit qu’une personne soit sanctionnée à plusieurs reprises pour les mêmes faits, sans que ce principe soit limité à la seule sphère d’une procédure pénale.

Il échet dès lors de vérifier si le demandeur, tel qu’il le soutient, a été sanctionné à plusieurs reprises pour les mêmes faits.

En ce qui concerne d’abord les retenus sur le traitement du demandeur, il ressort du dossier administratif et plus particulièrement des courriers du collège échevinal de la commune des 4, 11 et 29 juin et 2 juillet 2021 que celui-ci a décidé, sur base de l’article 14 point 3 du statut général, d’opérer une retenue sur le traitement du demandeur correspondant aux temps de ses absences non motivées respectives, ledit article 14 point 3 prévoyant « 3. le fonctionnaire qui s’absente sans autorisation ni excuse valable perd de plein droit la partie de son traitement à raison d’un trentième par journée d’absence entière ou entamée, sans préjudice de l’application éventuelle de sanctions disciplinaires. ».

Indépendamment du constat que ledit article prévoit lui-même expressément la possibilité de l’application de sanctions disciplinaires en raison des absences injustifiées pour lesquelles une retenue de traitement a été opérée, le tribunal ne saurait que rejoindre la commune dans son analyse suivant laquelle les retenues de traitement opérées en vertu de cet article ne sont pas à qualifier de sanctions, faute de caractère punitif. En effet, le traitement d’un fonctionnaire constitue la contrepartie de son travail auprès de son administration, de sorte qu’une absence injustifiée et une absence de prestation de travail concomitante se solde logiquement par une absence de paiement du traitement relatif auxdites périodes d’absence.

L’application d’une sanction disciplinaire à l’encontre du demandeur par le Conseil de discipline pour les mêmes absences ne se heurte dès lors pas au principe non bis idem.

En ce qui concerne ensuite les développements du demandeur relatifs au fait qu’il se serait vu infliger deux sanctions disciplinaires distinctes de la même nature pour des faits qui seraient également de la même nature, il échet de constater, à l’instar de la partie communale, que suivant l’article 64, paragraphe (3) du statut général, les sanctions disciplinaires « […] peuvent être, le cas échéant, appliquées cumulativement. », de sorte que le cumul de différentes sanctions disciplinaires à l’occasion d’une procédure disciplinaire à l’encontre d’un fonctionnaire communal est expressément prévu par ledit article.

Indépendamment de ce constat, le tribunal relève que suivant la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, l’application du principe non bis in idem exige la réunion de quatre conditions : il faut qu’il y ait 1) identité de la personne poursuivie ou sanctionnée ; 2) identité des faits visés par la procédure (idem), 3) cumul des procédures de sanctions (bis) et 4) que l’une des deux décisions ait été prononcée à titre définitif 11, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, alors qu’il n’y pas eu, à l’encontre du demandeur, un cumul de 10 CourEDH, 8 septembre 2020, Prina c. Roumanie, requête n° 37697.

11 CourEDH, 8 juin 1976, Affaire Engel et autres c. Pays-Bas, requête no 5100/71; 5101/71; 5102/71; 5354/72;

5370/72.

procédures de sanctions, mais que deux sanctions disciplinaires distinctes lui ont été infligées à l’occasion d’une même procédure disciplinaire.

Il s’ensuit que le moyen du demandeur tendant à une violation du principe non bis idem encourt le rejet en son double volet.

III.

Quant au fond A l’appui de son recours, le demandeur expose, tout d’abord, les faits et rétroactes à la base du litige sous examen, en relevant avoir été au service de la Commune, en tant que fonctionnaire communal depuis le … 2015.

A titre liminaire, le demandeur estime que la gravité des faits lui reprochés devrait être relativisée au vu des circonstances de fait les ayant entourés.

Ainsi, après avoir rappelé que ce serait à juste titre que le reproche d’un refus de travail n’aurait pas été retenu dans son chef par la décision déférée, le demandeur fait valoir, en ce qui concerne le reproche relatif à ses absences non autorisées au travail, que les certificats médicaux versés en cause établiraient son incapacité de travail pendant « un grand nombre de ses périodes d’absences », dû à son alcoolisme dont il aurait été atteint depuis la pandémie. A cet égard, il fait valoir que l’alcoolisme serait reconnu comme une maladie, tel que l’aurait à juste titre également reconnu le Conseil de discipline dans la décision déférée. Il estime ainsi que, malgré le fait qu’une absence pendant plus de trois jours consécutifs sans présentation d’un certificat médical, serait à considérer comme une absence « non motivée », quasiment toutes ses absences auraient pourtant été « justifiées » par sa maladie et que le manquement lui reproché s’analyserait plutôt en celui de ne pas avoir informé son supérieur hiérarchique dans les conditions prévues par l’article 16 du règlement grand-ducal du 21 octobre 1987.

Après avoir rappelé les articles du statut général et du règlement grand-ducal du 21 octobre 1987 auquel il aurait, suivant la décision déférée, contrevenu, il estime que cette liste d’articles serait « exagérée et erronée » Ainsi, il fait valoir que les articles 11, paragraphes (1) et (2) et 12, paragraphe (1) du statut général seraient trop généraux dans la mesure où ceux-ci pourraient s’appliquer à n’innombrables situations, alors qu’en l’espèce, il aurait toujours fait preuve d’un professionnalisme exemplaire dans l’exécution de ses tâches, de courtoisie dans les rapports avec ses collègues et qu’il se serait toujours comporté avec dignité et civilité.

Il conteste ensuite avoir contrevenu à l’article 16 du règlement grand-ducal du 21 octobre 1987 en estimant qu’il serait établi qu’il aurait souffert d’éthylisme pendant les périodes litigieuses. De même, il fait valoir qu’aucun manquement de sa part à l’article 17 dudit règlement n’aurait eu lieu, alors que ledit article ne prévoirait « que des conséquences aux manquements à l’article précédent, à savoir l’application des dispositions de l’article 14, n° 3 » du statut général, lesquels lui auraient d’ores et déjà été appliqués à l’occasion de plusieurs retenues de son traitement.

Il fait ensuite valoir qu’un manquement à l’article 14, paragraphe (1) du statut général aurait été retenu de manière superfétatoire à son égard, alors qu’un tel reproche serait déjà formulé à travers le reproche d’avoir contrevenu aux articles 16 et 17 du règlement grand-ducal du 21 octobre 1987.

En droit, le demandeur reproche à la décision déférée d’avoir été prise en violation de l’article 1bis du statut général, alors que ses absences auraient indéniablement été liées à son état de santé fragilisé et médicalement constaté en raison de son alcoolisme, lequel entraînerait des atteintes physiques et mentales faisant obstacle à sa participation effective à sa vie professionnelle, de sorte qu’il aurait dû bénéficier des dispositions protectrices dudit article et que la décision déférée encourrait la réformation de ce chef.

Il estime ensuite que les sanctions prononcées à son encontre, à savoir la suspension des majorations biennales pendant une durée de trois ans, ainsi que le retard dans la promotion ou l’avancement pendant une année, seraient manifestement disproportionnées par rapport aux manquements lui reprochés, alors que les critères prévus à l’article 64 du statut général ainsi que des éléments à sa décharge n’auraient pas été pris en compte par le Conseil de discipline.

Il conteste, dans ce contexte, tout d’abord avoir contrevenu aux articles 11, 12 et 14 du statut général, ainsi qu’aux articles 16 et 17 du règlement grand-ducal du 21 octobre 1987, tout en renvoyant, à cet égard, à ses développements précédents et en estimant que même si tel était le cas, les faits ne seraient que d’une faible gravité.

Le demandeur fait encore valoir, dans le cadre de la question de la proportionnalité des sanctions prononcées à son encontre, qu’alors même qu’il aurait manqué de signaler l’ensemble de ses absences litigieuses « dans le délai requis », celles-ci auraient néanmoins été justifiées pour des raisons d’ordre médical, argumentation qui aurait également conduit le Conseil de discipline de ne pas qualifier de refus de travail son départ de son poste de travail en date du 30 juillet 2021, malgré le fait qu’il n’aurait pu établir que « par la suite » que son refus de reprendre le travail était justifié pour un motif médical.

Il fait encore plaider qu’il n’aurait pas eu de rechute depuis sa reprise de travail le 15 novembre 2021, de sorte qu’aucun risque de récidive ne se présenterait de sa part, élément qui devrait, tout comme l’absence d’antécédents disciplinaires dans son chef, être pris en compte dans le cadre du contrôle de la proportionnalité des sanctions disciplinaires prononcées à son encontre.

En ce qui concerne la circonstance qu’il n’aurait pas répondu aux différents ordres de justification lui adressés, il rétorque que, d’une part, l’absence de réponse à un tel ordre n’encourrait per se, aucune sanction disciplinaire et que, d’autre part, il aurait répondu à l’ensemble desdits ordres de justification hormis un seul. Il précise à cet égard (i) qu’il aurait répondu à l’ordre de justification lui adressé pour son absence du 1er au 2 juin 2021 par la communication d’un certificat médical couvrant ladite période, (ii) que son courrier du 1er juillet 2021 aurait répondu aux trois ordres de justification des 4, 11 et 29 juin 2021 et (iii) qu’il aurait estimé que sa communication d’un certificat médical couvrant la période du 24 juin au 16 juillet 2021 suffirait à titre de justification face à l’ordre de justification du 2 juillet 2021.

Dans son mémoire ne réplique, le demandeur réitère ses développements par rapport à l’article 1bis du statut général, en faisant valoir que le concept de la discrimination indirecte supposerait qu’une disposition, un critère ou une pratique en apparence neutre soit susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d’autres personnes, en raison d’un critère prohibé, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soient objectivement justifiés par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but soient nécessaires et appropriés, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce, alors que la commune lui imposerait le respect « à la lettre » des délais d’établissement des certificats médicaux en cas de maladie, en ce en dépit du fait que il n’aurait manifestement pas été en mesure de s’y conformer vu son état de santé, tant physique que mental.

Il réfute encore l’argumentation de la commune selon laquelle il n’aurait pas profité des propositions d’aides en relation avec son alcoolisme de la part de son employeur, alors qu’il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir été en mesure de se libérer de son alcoolisme « dès son premier essai », le demandeur faisant valoir, dans ce contexte, qu’en moyenne les personnes souffrant d’une addiction à l’alcool mettraient cinq ans pour leur rétablissement et qu’uniquement 50% de ces personnes arriveraient effectivement à s’en libérer.

Le demandeur s’offusque encore dans ce contexte des développements de la commune suivants lesquels l’alcoolisme, tout en étant une maladie, procèderait, à la base, d’un fait volontaire humain, alors qu’au contraire, personne ne déciderait volontairement de devenir chroniquement dépendante de l’alcool, et que l’alcoolisme ne serait dès lors pas « un choix » de la personne en souffrant.

Il rajoute encore que les efforts de la part de la commune de l’aider à surmonter sa pathologie seraient uniquement basés sur l’article 32 du statut général, lequel imposerait à l’Etat de protéger la santé des fonctionnaires, de sorte que la commune ne saurait, d’après le demandeur, prétendre d’avoir pris des mesures au-delà de ses devoirs, ce d’autant plus alors que par la suite, elle n’aurait pas manqué de diligenter une procédure disciplinaire à son encontre malgré la gravité minime des faits lui reprochés et tout en connaissant son état de santé fragilisé.

Le demandeur réfute encore l’argumentation de la commune suivant laquelle la remise tardive de ses certificats médicaux aurait désorganisé le service auquel il est affecté, alors que tant ses collègues de travail que ses supérieurs hiérarchiques auraient « […] nécessairement [été] habitués [à ses] absences et que partant, ils [auraient] […] nécessairement [du] avoir pris les mesures appropriées en cas de nouvelle absence. […] » et que la commune resterait en défaut d’établir un préjudice concret et grave causé au service.

Il précise encore ne pas être d’accord avec l’affirmation de la part de la commune qu’il aurait dû communiquer à son responsable son absence le jour même de celle-ci au plus tard, ce à quoi il se serait engagé à l’avenir, alors que « cette décision du responsable » serait manifestement contraire à la loi et que ce dernier ne viserait qu’à le harceler. Il estime encore dans ce contexte que contrairement aux développements de la commune, une absence, même injustifiée ne saurait être qualifiée de comportement irrespectueux envers un supérieur hiérarchique.

Le demandeur réitère encore ses développements suivant lesquels il n’aurait pas contrevenu à l’article 11, paragraphe (2) du statut général, alors que celui-ci imposerait au fonctionnaire d’exécuter les tâches qui lui sont confiées, tandis qu’en l’espèce, la remise d’un certificat médical couvrant une période d’absence ne constituerait pas une « tâche » lui confiée, de sorte que l’absence de remise d’un tel certificat ne constituerait pas non plus un manquement audit article.

Il rappelle ensuite que le Conseil de discipline l’aurait acquitté d’un quelconque manquement à l’article 51, sub 2) du statut général, de sorte que les développements de la commune relatifs à un abandon caractérisé de l’exercice de ses fonctions seraient à écarter du débat.

Quant à l’argumentation de la commune suivant laquelle une absence de réponse à un ordre de justification endéans dix jours vaudrait, en application de l’article 3 du règlement grand-ducal du 5 mars 2004 fixant les conditions et modalités de l’ordre de justification à adresser aux fonctionnaires de l’Etat, aveu des faits y contenus, le demandeur fait répliquer que le fonctionnaire concerné n’encourrait pas pour autant de sanction disciplinaire de ce fait et qu’en tout état de cause, il ne saurait être nié qu’il a transmis des certificats médicaux couvrant l’ensemble des périodes litigieuses.

La commune, quant à elle, conclut au rejet du recours pour ne pas être fondé en aucun de ses moyens.

Analyse du tribunal A titre liminaire, le tribunal constate que si, certes, il ressort de la lettre de saisine du collège des bourgmestre et échevin du 26 octobre 2021 qu’il a été reproché au demandeur d’avoir été absent de son poste de travail depuis le 19 juillet 2021 et que cette absence constituerait un abandon de poste au sens de l’article 51 du statut général, ledit reproche n’a pas été retenu à son encontre dans le cadre de la décision du Conseil de discipline du 21 avril 2022. Dans la mesure où la commune n’a pas introduit de recours à l’encontre de la décision déférée et notamment contre ce volet de ladite décision, le tribunal n'est pas saisi de celui-ci, lequel n’est pas critiqué par les moyens du demandeur dans sa requête introductive d’instance.

Dans un même ordre d’idées, dans la mesure où il ne ressort pas de la décision déférée qu’une sanction disciplinaire aurait été infligée au demandeur du fait de ne pas avoir répondu dans un délai de 10 jours aux ordres de justifications lui adressés, les développements y afférents du demandeur sont à écarter pour manquer de pertinence, étant relevé que cet élément rentre dans le cadre de l’examen de la proportionnalité des sanctions prononcées à son encontre et fera l’objet d’une analyse par le tribunal dans ce cadre.

Le tribunal constate ensuite qu’il ressort de la décision du Conseil de discipline déférée qu’il est reproché au demandeur d’avoir été, au cours de l’année 2021, absent de son lieu de travail sans avoir sollicité un congé conformément à l’article 16 du règlement grand-ducal du 21 octobre 1987 en dates des 29 janvier, 8 et 9 février 2021, du 25 au 31 mai, du 1er au 2 juin, du 14 au 18 juin, du 21 au 22 juin, du 19 juillet au 4 août, de ne pas avoir, dans les délais requis par les articles 16 et 17 du règlement grand-ducal du 21 octobre 1987, versé les certificats médicaux couvrant ces périodes et qu’une partie desdites périodes ne serait pas couverte par un quelconque certificat médical.

Il échet ensuite de constater que la matérialité de l’ensemble de ces faits n’est pas contestée par le demandeur, l’argumentation de ce dernier se résumant, en substance, à une contestation de la qualification juridique desdits faits en manquements à ses obligations statutaires, le demandeur estimant plus particulièrement, d’une part, ne pas avoir été dans l’obligation de respecter « à la lettre » l’article 16 du règlement grand-ducal du 21 octobre 1987 en raison de son état de santé tenant à l’alcoolisme dont il souffrait à ladite période et, d’autre part, qu’il n’aurait pas méconnu les articles 17 du même règlement et 11, 12 et 14 du statut général.

En ce qui concerne tout d’abord les articles 16 et 17 du règlement grand-ducal du 21 octobre 1987 ceux-ci prévoient respectivement « Le fonctionnaire empêché d´exercer ses fonctions par suite de maladie ou d´accident doit en informer d´urgence son supérieur hiérarchique et solliciter un congé pour raisons de santé. Ce congé est accordé sans production d´un certificat médical pour une période de trois jours consécutifs au plus.

Pour toute incapacité de travail dépassant trois jours le fonctionnaire doit présenter un certificat mentionnant la durée de l´incapacité de travail, le lieu de traitement (domicile ou hôpital) et, le cas échéant, les heures de sortie.

Le certificat médical prend cours le jour de sa délivrance. […] » et « Si le fonctionnaire s´absente pendant plus de trois jours consécutifs sans présenter le certificat médical requis, toute l´absence est considérée comme non motivée et donne lieu à l´application des dispositions de l´article 14, n° 3 de la loi du 24 décembre 1985 fixant le statut général des fonctionnaires communaux. ».

Il échet tout d’abord de constater qu’il résulte ainsi des articles précités, d’une part, une obligation pour le fonctionnaire d’informer d’urgence son supérieur hiérarchique de toute absence par suite de maladie ou d’accident qui l’empêche d’exécuter sa tâche et, d’autre part, une obligation dans son chef de présenter un certificat médical pour de telles absences dépassant trois jours consécutifs, étant relevé que le demandeur ne conteste pas a priori avoir méconnu les obligations lui incombant en vertu desdits articles, celui-ci estimant essentiellement qu’il ne saurait, sous peine de violation de l’article 1bis du statut général, être sanctionné disciplinairement pour ses manquements, alors qu’il se serait trouvé dans l’impossibilité de respecter lesdites dispositions en raison de son état de santé altéré par son alcoolisme.

Or, indépendamment du constat que l’article 1bis, paragraphe (1), aux termes duquel « Dans l’application des dispositions de la présente loi, toute discrimination directe ou indirecte fondée sur la religion ou les convictions, le handicap, l’âge, l’orientation sexuelle, l’appartenance ou non appartenance, vraie ou supposée, à une race ou ethnie est interdite. Il en est de même pour toute discrimination directe ou indirecte fondée sur la nationalité, sans préjudice des dispositions prévues à l’article 2, paragraphe 1er, alinéa 1 er, point a) et alinéa 3. […] », ne fait pas état d’une discrimination basée sur l’état de santé du fonctionnaire, le tribunal constate que le demandeur reste en défaut d’établir qu’il se serait trouvé, pendant les périodes litigieuses, dans l’impossibilité de prévenir son supérieur hiérarchique de son absence et de se ménager un certificat médical attestant de son incapacité de travail. En effet, si, certes, un état d’ébriété est de nature à altérer l’état physique et mental d’une personne, cette simple affirmation ne permet pas de conclure que le demandeur se serait trouvé, à chaque reprise, dans un état d’inconscience, sinon qu’il n’aurait pas été en mesure de prévenir son supérieur hiérarchique de son incapacité de travail avant l’arrivée d’un éventuel état, nécessairement progressif, d’inconscience, ce d’autant plus, alors qu’il ne conteste pas que l’obligation de prévenir son employeur de ses absences lui a été rappelée à de maintes reprises par celui-ci et qu’il a nécessairement été conscient de la problématique liée à son absentéisme en raison de son alcoolisme.

Ce constat n’est pas énervé par les développements du demandeur tendant à établir que l’ordre de son supérieur hiérarchique de l’informer le jour même de son absence pour maladie serait contraire à l’article 16 du règlement grand-ducal du 21 octobre 1987, alors que la décision déférée ne retient pas de manquement dans le chef du demandeur du fait d’avoir méconnu cet ordre spécifique et que seul une méconnaissance de sa part aux articles 16 et 17 dudit règlement, ainsi qu’aux articles 11, 12 et 14 du statut général ont été retenus à sa charge. Dans la mesure où le demandeur ne conteste, par ailleurs, pas avoir omis d’informer « d’urgence », tel que prévu à l’article 16 dudit règlement grand-ducal, son supérieur hiérarchique de ses absences pour maladie, les développements afférents du demandeur sont, en ce qui concerne la qualification des faits lui reprochés en tant que manquement aux articles précités, à rejeter pour manquer de pertinence.

Ce constat n’est pas non plus énervé par les développements du demandeur relatifs au fait que l’ensemble de ses absences auraient de facto été justifiées par un état d’incapacité de travail dans son chef, alors que suivant les termes de l’article 16 précité du règlement grand-ducal du 21 octobre 1987 les certificats médicaux ne sauraient couvrir des jours d’absence pour maladie ou d’accident de manière rétroactive au jour de leur établissement. C’est dès lors à bon droit que le Conseil de discipline, outre le constat qu’une partie des certificats médicaux litigieux n’ont pas été remis par le demandeur dans les délais requis, a estimé que les absences de celui-

ci en dates des 3, 24 juin et 29 juillet 2021 n’étaient pas motivées, malgré un certificat médical en ce sens, alors que ces dates précédaient les dates d’établissement des certificats médiaux respectifs faisant état d’une incapacité de travail de sa part aux dates respectives. C’est, dans ce contexte, également à tort que le demandeur estime que le Conseil de discipline aurait, dans le cadre de son analyse d’un refus de travail de sa part prévu à l’article 51 du statut général, pris en compte une quelconque incapacité de travail de facto du demandeur et laquelle ce dernier n’aurait pu qu’établir « par la suite » moyennant un certificat médical pour son absence au travail en date du 30 juillet 2021, alors que le Conseil de discipline a, pour ladite date, pris en compte un certificat médical établi en date du 30 juillet 2021 et constatant l’incapacité de travail du demandeur le jour même, de sorte que son incapacité de travail a été dûment établie le jour-même et non « par la suite ».

Toujours dans ce contexte, le tribunal relève que s’il n’est, certes, pas reproché au demandeur d’avoir simulé ses incapacités de travail pour maladie aux dates litigieuses, il n’en reste pas moins que les articles 16 et 17 du règlement grand-ducal du 21 octobre 1987 visent précisément à réglementer l’hypothèse d’un fonctionnaire incapable d’exécuter ses tâches en raison d’une maladie ou d’un accident et que l’objectif desdits articles n’est pas seulement de permettre audit fonctionnaire de bénéficier d’un congé dans les conditions y prévues, mais également de permettre à l’employeur d’organiser son service en connaissance de l’absence du fonctionnaire concerné, de sorte que la seule circonstance que le demandeur aurait de facto été en incapacité de travail pendant les périodes litigieuses, mais n’a pas respecté les délais prévus par lesdits articles, ne suffit pas pour autant pour conclure à une absence de méconnaissance de sa part desdits articles.

Le tribunal ne saurait, par ailleurs, suivre le raisonnement du demandeur suivant lequel il n’aurait, en omettant de verser pendant les périodes litigieuses les certificats médicaux dans les délais requis, pas méconnu l’article 17 précité puisque ledit article ne prévoirait que « la conséquence » d’une méconnaissance du paragraphe (2) de l’article 16 précité, alors qu’au contraire, ledit article 17, en ce qu’il qualifie d’« absence non motivée » les manquements à l’article 16 précité, se situe dans la suite logique de celui-ci, ces deux dispositions formant un tout, de sorte qu’un manquement audit article 16, paragraphe (2) constitue ipso facto également un manquement à l’article 17.

Il s’ensuit que c’est à bon droit que le Conseil de discipline a retenu un manquement aux articles 16 et 17 du règlement grand-ducal du 21 octobre 1987 dans le chef du demandeur et que le moyen tendant à une violation de l’article 1bis du statut général est à rejeter pour manquer de fondement.

En ce qui concerne ensuite les développements du demandeur tendant à établir que le fait pour le Conseil de discipline de retenir à son égard un manquement à l’article 14 du statut général serait superfétatoire, alors que ledit article prévoirait la même obligation que celle prévue aux article 16 et 17 du règlement grand-ducal du 21 octobre 1987, le tribunal relève, outre de constater que le demandeur ne conteste dès lors pas avoir également méconnu son obligation résultant de l’article 14 du statut général, qui prévoit en son paragraphe (1) : « Le fonctionnaire ne peut s’absenter de son service sans autorisation. », que celui-ci reste en défaut de tirer de ses développements une quelconque conclusion en droit. Or, il n’appartient pas au tribunal de suppléer la carence des parties et de rechercher lui-même le fondement juridique susceptible de se trouver à la base de leurs conclusions, de sorte que ces développements sont à rejeter pour ne pas être fondés.

Ce même constat vaut en ce qui concerne les contestations du demandeur quant à l’absence de manquement de sa part aux articles 11, paragraphes (1) et (2) du statut général, alors que le demandeur reste en défaut de tirer une quelconque conclusion en droit du fait que la formulation desdits articles serait prétendument trop vaste, de sorte que ces développements son également à rejeter.

En ce qui concerne encore la critique du demandeur suivant laquelle ses obligations de prévenir son supérieur hiérarchique de ses absences et de verser un certificat médical y afférant ne constitueraient pas des « tâches lui confiées » au sens de l’article 11, paragraphe (2) du statut général et que ses manquements en ce sens ne constitueraient dès lors pas une omission de sa part d’exécuter les tâches lui confiées, le tribunal relève qu’il résulte de cette disposition que « Le fonctionnaire est responsable de l’exécution des tâches qui lui sont confiées; il doit prêter aide à ses collègues dans la mesure où l’intérêt du service l’exige; la responsabilité de ses subordonnés ne le dégage d’aucune des responsabilités qui lui incombent. ». Or, contrairement aux développements du demandeur, celui-ci a bien manqué à son obligation d’exécuter les tâches lui confiées, alors qu’une absence non autorisée et non motivée au sens des articles 16 et 17 du règlement grand-ducal du 21 octobre 1987 entraîne nécessairement une absence de prestation de travail de sa part et ainsi, une omission de sa part, pendant les périodes litigieuses, d’exécuter les tâches lui confiées.

Il s’ensuit que c’est à bon droit que la décision déférée a retenu à la charge du demandeur une méconnaissance des articles 11, paragraphes (1) et (2), 12, paragraphe (1) et 14 du statut général, de sorte que les moyens afférents du demandeur encourent le rejet.

En ce qui concerne la proportionnalité de la décision déférée et partant l’adéquation de la sanction à appliquer par rapports aux faits retenus, l’article 64 du statut général prévoit que « L’application des sanctions se règle notamment d’après la gravité de la faute commise, la nature et le grade des fonctions et les antécédents du fonctionnaire inculpé. », impliquant, d’après la jurisprudence en la matière selon laquelle les critères d’appréciation de l’adéquation de la sanction prévus légalement sont énoncés de manière non limitative, que le tribunal est susceptible de prendre en considération tous les éléments de fait lui soumis qui permettent de juger de la proportionnalité de la sanction à prononcer, à savoir, entre autres, l’attitude générale du fonctionnaire.12 Il a également été jugé que, dans le cadre du recours en réformation exercé contre une sanction disciplinaire, le tribunal est amené à apprécier les faits commis par le fonctionnaire en vue de déterminer si la sanction prononcée par l'autorité compétente a un caractère proportionné et juste, en prenant notamment en considération la situation personnelle et les antécédents éventuels du fonctionnaire.13 En ce qui concerne précisément l’attitude du demandeur, si celui-ci a certes reconnu les faits lui reprochés et qu’il n’est pas contesté qu’il s’est entretemps, avec succès, fait soigner contre son alcoolisme, il continue néanmoins à essayer de se délier de sa responsabilité en poussant la faute sur son état de santé, tout en contestant non seulement l’impact que son comportement a eu sur l’organisation du service auquel il est affecté, mais également la légitimité du besoin de la commune de pouvoir organiser ledit service.

En effet, le demandeur, dans le cadre de son mémoire en réplique conteste toute désorganisation du service en raison de son absence en affirmant qu’il ne comprendrait pas « […] l’acharnement de la [commune] sur la prétendue gravité de ses absences […]» et qu’ « […] au vu de la fréquence de [ses] absences et de son alcoolisme bien connu par ses collègues de travail, [la commune] ne saurait valablement arguer que celles-ci auraient causées un majeur dysfonctionnement au sein du service. Il est évident que les autres fonctionnaires se sont, sinon auraient dû se réorganiser au de [ses] fréquentes absences prévisibles […] »14, celui-ci faisant ainsi preuve d’une absence d’introspection et de repentir réel, et s’érigeant, en substance, en la seule victime en l’espèce.

Or, les nombreuses absences non annoncées du demandeur, ont nécessairement causé une désorganisation au service du « … » auquel il était affecté sur un poste d’accueil, alors que le demandeur a omis de prévenir dans les plus brefs délais ses supérieurs hiérarchiques de ses absences, ces derniers ayant souvent été sans nouvelles de sa part pendant des jours.

S’il est certes vrai que le demandeur a nécessairement souffert de son alcoolisme, le fait de ne pas reconnaître l’importance de ses obligations envers son employeur et du préjudice qu’il a, en tant que fonctionnaire, fait subir à l’accueil du « … », fait preuve de l’absence de prise de conscience du demandeur de la gravité des faits lui reprochés, de même que de l’absence d’introspection, de sorte qu’il est surabondant d’examiner si le demandeur a répondu, dans les conditions, légales aux différents ordres de justification lui adressés ou si les efforts de la commune de l’aider à surmonter son alcoolisme résultent de l’obligation de cette dernière de protéger la santé de ses fonctionnaires.

Au vu dès lors de la gravité des faits reprochés au demandeur et de son attitude du moins désinvolte, le tribunal ne saurait que confirmer les sanctions prononcées par le Conseil de discipline dans la décision déférée à son égard, sans que ce constat ne soit énervé par l’absence d’antécédents disciplinaires dans son chef ou encore le fait, certes louable, qu’il aurait surmonté son alcoolisme.

12 Trib. adm. 12 juillet 2019, nos 40837 et 41256 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Fonction Publique, n° 348 et les autres références y citées.

13 Trib. adm. 1er juillet 1999, n° 10936 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Fonction Publique, n° 387 et les autres références y citées.

14 Page 3 du mémoire en réplique.

Ce constat n’est pas non plus énervé par les développements du demandeur relatifs au fait que le Conseil de discipline a prononcé des sanctions plus sévères à son encontre que celle requise par le commissaire du gouvernement ou le représentant de la commune à son audience, alors que le Conseil de discipline n’est, tel que retenu ci-avant, pas tenu par l’une quelconque de ces propositions et reste de libre de fixer une sanction disciplinaire prévues à l’article 58 du statut général.

Il s’ensuit que le moyen du demandeur tendant à une disproportion des sanctions prononcées à son égard par la décision déférée du Conseil de discipline encourt le rejet pour ne pas être fondé.

S’agissant encore de la demande en communication du dossier administratif formulée par le demandeur au dispositif de son recours, le tribunal constate que la commune a déposé ensemble avec son mémoire en réponse, une farde de pièces correspondant a priori au dossier administratif. A défaut pour le demandeur de remettre en question le caractère complet du dossier mis à disposition à travers le mémoire en réponse, la demande en communication du dossier administratif est à rejeter comme étant sans objet.

Au regard de l’issue du litige, il y encore a lieu de rejeter la demande en allocation d’une indemnité de procédure de 2.500 euros formulée par le demandeur.

Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit en la forme le recours en réformation introduit à titre principal ;

au fond le dit non justifié et en déboute ;

dit qu’il n’y pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure telle que formulée par le demandeur ;

rejette la demande sollicitant la communication du dossier administratif ;

condamne le demandeur aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique extraordinaire du 12 juillet 2024 par :

Thessy Kuborn, premier vice-président, Laura Urbany, premier juge, Anna Chebotaryova, attaché de justice délégué, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 12 juillet 2024 Le greffier du tribunal administratif 27


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 47705
Date de la décision : 12/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2024-07-12;47705 ?

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