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26/03/2024 | LUXEMBOURG | N°50219

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 26 mars 2024, 50219


Tribunal administratif N°50219 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:50219 4e chambre Inscrit le 19 mars 2024 Audience publique du 26 mars 2024 Recours formé par Monsieur …, Findel, contre une décision du ministre des Affaires intérieures en matière de rétention administrative (art. 120, L. 29.08.2008)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 50219 du rôle et déposée le 19 mars 2024 au greffe du tribunal administratif par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avo

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Tribunal administratif N°50219 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:50219 4e chambre Inscrit le 19 mars 2024 Audience publique du 26 mars 2024 Recours formé par Monsieur …, Findel, contre une décision du ministre des Affaires intérieures en matière de rétention administrative (art. 120, L. 29.08.2008)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 50219 du rôle et déposée le 19 mars 2024 au greffe du tribunal administratif par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à … (Monténégro), de nationalité monténégrine, actuellement retenu au Centre de rétention au Findel, tendant à la réformation d’une décision du ministre des Affaires intérieures du 14 mars 2024 ayant ordonné son placement au Centre de rétention pour une durée d’un mois à compter de la notification de la décision en question ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 21 mars 2024 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Ardavan Fatholahzadeh, et Monsieur le délégué du gouvernement Yannick Genot en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique de ce jour.

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Par décision du 21 décembre 2017, le ministre de l’Immigration et de l’Asile rejeta la demande de Monsieur … en obtention d’un titre de séjour en tant que membre de famille d’un citoyen de l’Union européenne, tout en déclarant son séjour irrégulier et en lui ordonnant de quitter le territoire luxembourgeois dans un délai de trente jours à partir de la notification de ladite décision.

Par décision du 25 janvier 2018, le ministre de l’Immigration et de l’Asile déclara irrecevable la demande de Monsieur … de se voir octroyer un titre de séjour en qualité de travailleurs salarié et lui ordonna de quitter sans délai le territoire luxembourgeois.

Le recours contentieux introduit par Monsieur … à l’encontre des prédites décisions ministérielles fut rejeté définitivement par un jugement du tribunal administratif du 15 mars 2019, inscrit sous le numéro 40935 du rôle.

Par décisions ministérielles des 21 juillet 2021 et 11 février 2022, Monsieur … se vit rejeter ses demandes en obtention d’une autorisation de séjour en qualité de travailleur salarié auprès des sociétés …, respectivement … SARL.

Le ministre de l’Immigration et de l’Asile délivra le 5 janvier 2023 une autorisation de séjour temporaire en qualité de travailleur salarié à Monsieur … d’une durée de validité allant du 5 juillet 2022 au 4 juillet 2023.

Par décision du 20 octobre 2023, ledit ministre refusa à Monsieur … de renouveler son titre de séjour, tout en déclarant son séjour irrégulier et en lui ordonnant de quitter le territoire luxembourgeois dans un délai de trente jours à compter de la notification de ladite décision, décision qui fut confirmée, sur recours gracieux, le 23 janvier 2024 par le ministre des Affaires intérieures, entretemps en charge du dossier et désigné ci-après par « le ministre ».

Par arrêté ministériel du 14 mars 2014, notifié à l’intéressé le même jour, le ministre prononça une interdiction d’entrée sur le territoire pour une durée de 3 ans à l’égard de Monsieur … à partir de sa sortie de l’Espace Schengen.

Par arrêté séparé du même jour, notifié à l’intéressé également le 14 mars 2024, le ministre ordonna encore le placement de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée d’un mois à compter de la notification de la décision en question, laquelle est basée sur les motifs et les considérations suivants :

« (…) Vu les articles 111, 120 à 123 et 125 (1) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l'immigration ;

Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;

Vu le rapport no JDA 2024/152741-1 MARO & FUKE du 14 mars 2024 du 14 mars 2024 établi par la Police grand-ducale ;

Vu ma décision de retour du 20 octobre 2023, notifiée le 24 octobre 2023 ;

Vu ma décision d'interdiction d'entrée sur le territoire du 14 mars 2024, notifiée le même jour ;

Considérant que l'intéressé ne s'est pas présenté au Ministère des Affaires intérieures en vue de l'organisation de son retour volontaire dans son pays d'origine ;

Considérant que l'intéressé n'est pas disposé à retourner volontairement dans son pays d'origine ;

Considérant que l'intéressé n'a jusqu'à présent pas fait des démarches pour un retour volontaire dans son pays d'origine ;

Considérant qu'il existe un risque de fuite dans le chef de l’intéressé ;

Considérant que les mesures moins coercitives telles qu'elles sont prévues par l'article 125, paragraphe (1), points a), b) et c) de la loi modifiée du 29 août 2008 précitée ne sauraient être efficacement appliquées ;

Considérant que les démarches nécessaires en vue de l'éloignement de l'intéressé seront engagées dans les plus brefs délais ;

Considérant que l'exécution de la mesure d'éloignement est subordonnée au résultat de ces démarches ;(…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 19 mars 2024, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation de l’arrêté ministériel, précité, du 14 mars 2024 ayant ordonné son placement au Centre de rétention pour une durée d’un mois à partir de la notification dudit arrêté ministériel à son égard.

Étant donné que l’article 123, paragraphe (1) de loi modifiée du 29 août 2008 portant sur la libre circulation des personnes et l’immigration, ci-après désignée par « la loi du 29 août 2008 », institue un recours de pleine juridiction contre une décision de rétention administrative, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation, lequel est encore recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours et en fait, le demandeur expose, tout d’abord, s’être vu délivrer, le 14 juin 2022, une autorisation de séjour en qualité de travailleur salarié pour un emploi auprès de la société … SARL, autorisation dont le renouvellement lui aurait été refusé par décision ministérielle du 20 octobre 2023 au motif qu’il n’aurait jamais été affilié auprès de ladite société, mais, à partir du 5 septembre 2022, auprès de la société … SARL.

Il explique, dans ce contexte, que la société … SARL, lorsqu’il s’y serait présenté le 6 juillet 2022, l’aurait informé de l’annulation de son contrat de travail, de sorte à l’avoir ainsi contraint à rechercher un nouveau travail, ce qu’il aurait fait en signant le 25 juillet 2022 un contrat avec la société … SARL. Le ministère des Affaires étrangères et européennes lui aurait, par ailleurs, confirmé oralement que son autorisation de séjour continuerait à être valable en cas de changement d’employeur, à condition d’exercer la même profession, ce qu’il aurait fait. Le demandeur conteste en conséquence le bien-fondé du refus ministériel de renouvellement de son autorisation de séjour.

Il soutient finalement, dans le cadre de l’exposé des faits à la base du litige sous examen, avoir répondu à l’ensemble des convocations lui adressées, avoir coopéré avec les autorités luxembourgeoises, en ayant répondu aux questions lui posées et en ayant remis son passeport lors de son arrestation, ainsi qu’avoir manifesté sa volonté de retourner immédiatement dans son pays d’origine en raison de la grossesse de son épouse dont le terme serait imminent.

En droit, le demandeur s’empare, tout d’abord, de l’article 15, paragraphe (1) de la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, ci-après désignée par « la directive 2008/115/CE », du considérant n° 16 de ladite directive, ainsi que de l’article 125 de la loi du 29 août 2008 ayant transposé la prédite disposition communautaire en droit interne, selon lesquels un placement en rétention ne serait justifié, en vertu du principe de proportionnalité, que pour préparer le retour ou procéder à l’éloignement de l’intéressé et uniquement si l’application de mesures moins coercitives ne suffisait pas, pour faire valoir que la légalité d’une mesure de rétention administrative devrait s’inscrire dans un contexte permettant d’établir l’existence d’un risque non négligeable de fuite apprécié à la lumière de la situation individuelle de l’étranger, ainsi que le caractère proportionné d’un placement en rétention basé sur ce premier critère et l’inexistence de mesures adéquates moins coercitives.

Il critique, dans ce contexte, son placement en rétention et soutient que le ministre aurait dû lui appliquer une mesure moins coercitive au regard de la circonstance, d’une part, qu’il serait locataire d’un appartement sis à L-…, et, d’autre part, que sa femme serait enceinte et que le terme de ladite grossesse serait imminent, tout en précisant qu’il ne représenterait aucun trouble pour l’ordre public, de sorte que son placement en rétention devrait être considéré comme une atteinte injustifiée à sa liberté.

Le demandeur conclut encore à la réformation de la décision déférée pour violation du principe de proportionnalité en ce que son placement en rétention serait disproportionné par rapport au but poursuivi. Il se prévaut, dans ce contexte, du fait qu’il se serait trouvé à la disposition des autorités ministérielles à l’adresse de son logement, qu’il leur aurait remis son passeport et qu’il se serait présenté lui-même au commissariat de police en vue de collaborer avec les autorités, comportement qui serait en inadéquation avec son placement abrupt au Centre de rétention, mesure ayant eu un effet traumatisant tant pour lui que pour son épouse.

Monsieur … conteste finalement que le ministre aurait entrepris toutes les diligences requises afin d’écourter au maximum son placement en rétention, le demandeur se prévalant, dans ce contexte, de la circonstance que les autorités ministérielles seraient en possession de son passeport, ce qui devrait entraîner que son éloignement serait dépourvu de tout obstacle.

Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet du recours pour n’être fondé en aucun de ses moyens.

En présence de plusieurs moyens invoqués, le tribunal n’est pas lié par l’ordre dans lequel ils lui ont été soumis et détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et l’effet utile s’en dégageant, de manière que le moyen tenant au bien-fondé du principe d’un placement en rétention doit être examiné, dans une bonne logique juridique, avant ceux portant sur l’existence de mesures moins coercitives, ainsi que sur l’accomplissement de diligences suffisantes.

Quant à la légalité interne de l’arrêté ministériel litigieux, il convient de rappeler qu’aux termes de l’article 120, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008 : « [a]fin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement en application des articles 27, 30, 100, 111, 116 à 118 (…), l’étranger peut, sur décision du ministre, être placé en rétention dans une structure fermée, à moins que d’autres mesures moins coercitives telles que prévues à l’article 125, paragraphe (1), ne puissent être efficacement appliquées. Une décision de placement en rétention est prise contre l’étranger en particulier s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. (…) ».

Par ailleurs, en vertu de l’article 120, paragraphe (3) de la même loi : « [l]a durée de la rétention est fixée à un mois. La rétention ne peut être maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. Elle peut être reconduite par le ministre à trois reprises, chaque fois pour la durée d’un mois si les conditions énoncées au paragraphe (1) qui précède sont réunies et qu’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien. (…) ».

L’article 120, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008 permet ainsi au ministre, afin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement, de placer l’étranger concerné en rétention dans une structure fermée pour une durée maximale d’un mois, ceci plus particulièrement s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. En effet, la préparation de l’exécution d’une mesure d’éloignement nécessite en premier lieu l’identification de l’intéressé et la mise à disposition de documents d’identité et de voyage valables, lorsque l’intéressé ne dispose pas des documents requis pour permettre son éloignement et que des démarches doivent être entamées auprès d’autorités étrangères en vue de l’obtention d’un accord de reprise en charge ou de réadmission de l’intéressé. Elle nécessite encore l’organisation matérielle du retour, en ce sens qu’un moyen de transport doit être choisi et que, le cas échéant, une escorte doit être organisée. C’est précisément afin de permettre à l’autorité compétente d’accomplir ces formalités que le législateur a prévu la possibilité de placer un étranger en situation irrégulière en rétention pour une durée maximale d’un mois, mesure qui peut être prorogée par la suite.

En vertu de l’article 120, paragraphe (3) de la même loi, le maintien de la rétention est cependant conditionné par le fait que le dispositif d’éloignement soit en cours et soit exécuté avec toute la diligence requise, impliquant plus particulièrement que le ministre est dans l’obligation d’entreprendre toutes les démarches requises pour exécuter l’éloignement dans les meilleurs délais.

Quant à l’existence d’un risque de fuite dans le chef de Monsieur …, le tribunal constate qu’en l’espèce, il est constant en cause que le demandeur, qui a fait l’objet d’une décision de retour en date du 20 octobre 2023, se trouve actuellement en situation de séjour irrégulier au Luxembourg. Par ailleurs, il a encore fait l’objet, le 14 mars 2024, d’une interdiction d’entrée sur le territoire d’une durée de 3 ans, de sorte qu’il existe, dans son chef, un risque de fuite lequel est présumé en vertu de l’article 111, paragraphe (3), lettre c), point 1. de la loi du 29 août 2008, aux termes duquel « (…) [l]e risque de fuite dans le chef du ressortissant de pays tiers est présumé (…) s’il ne remplit pas ou plus les conditions de l’article 34 (…) », étant précisé, à cet égard, que parmi les conditions posées par ledit article 34 de la loi du 29 août 2008, figure justement celle de ne pas faire l’objet d’une décision d’interdiction de territoire, telle que prévue au paragraphe (2), point 3. de la disposition légale en question.

Il s’ensuit que le ministre pouvait a priori valablement, sur base de l’article 120, paragraphe (1) précité de la loi du 29 août 2008, placer l’intéressé en rétention afin d’organiser son éloignement, sans violer, de ce chef, le principe de proportionnalité. Le demandeur n’ayant soumis aucun élément pertinent de nature à renverser la présomption de l’existence d’un risque de fuite dans son chef, sans que cette conclusion ne soit énervée par les contestations du demandeur par rapport au non-renouvellement de son titre de séjour, alors que de telles argumentations sont étrangères au présent dossier, ne visant qu’une mesure de placement en rétention Par ailleurs, la volonté du demandeur de retourner immédiatement au Monténégro en raison du terme très proche de la grossesse de son épouse, mis à part le fait que ladite circonstance ne ressort pas des pièces versées par le demandeur, est encore de nature à conforter l’existence, dans son chef, d’un risque de fuite, alors que la notion de fuite se définit comme le risque de se soustraire à la mesure d’éloignement. Il en va de même du constat ministériel que le demandeur ne s’est pas présenté au ministère au rendez-vous lui fixé en vue d’un retour volontaire dans son pays d’origine.

Sur base des mêmes considérations, le tribunal est encore amené à rejeter le moyen du demandeur suivant lequel le ministre aurait dû lui appliquer une mesure moins coercitive qu’un placement en rétention.

A cet égard, le tribunal relève que l’article 125, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008, dispose que : « Dans les cas prévus à l’article 120, le ministre peut également prendre la décision d’appliquer une autre mesure moins coercitive à l’égard de l’étranger pour lequel l’exécution de l’obligation de quitter le territoire, tout en demeurant une perspective raisonnable, n’est reportée que pour des motifs techniques et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite tel que prévu à l’article 111, paragraphe (3).

On entend par mesures moins coercitives :

a) l’obligation pour l’étranger de se présenter régulièrement, à intervalles à fixer par le ministre, auprès des services de ce dernier ou d’une autre autorité désignée par lui, après remise de l’original du passeport et de tout document justificatif de son identité en échange d’un récépissé valant justification de l’identité ;

b) l’assignation à résidence pour une durée maximale de six mois dans les lieux fixés par le ministre ; l’assignation peut être assortie, si nécessaire, d’une mesure de surveillance électronique qui emporte pour l’étranger l’interdiction de quitter le périmètre fixé par le ministre. Le contrôle de l’exécution de la mesure est assuré au moyen d’un procédé permettant de détecter à distance la présence ou l’absence de l’étranger dans le prédit périmètre. La mise en œuvre de ce procédé peut conduire à imposer à l’étranger, pendant toute la durée du placement sous surveillance électronique, un dispositif intégrant un émetteur. Le procédé utilisé est homologué à cet effet par le ministre. Sa mise en œuvre doit garantir le respect de la dignité, de l’intégrité et de la vie privée de la personne.

La mise en œuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance et le contrôle à distance proprement dit, peuvent être confiés à une personne de droit privé ;

c) l’obligation pour l’étranger de déposer une garantie financière d’un montant de cinq mille euros à virer ou à verser soit par lui-même, soit par un tiers à la Caisse de consignation, conformément aux dispositions y relatives de la loi du 29 avril 1999 sur les consignations auprès de l’Etat. Cette somme est acquise à l’Etat en cas de fuite ou d’éloignement par la contrainte de la personne au profit de laquelle la consignation a été opérée. La garantie est restituée par décision écrite du ministre enjoignant à la Caisse de consignation d’y procéder en cas de retour volontaire.

Les décisions ordonnant des mesures moins coercitives sont prises et notifiées dans les formes prévues aux articles 109 et 110. L’article 123 est applicable. Les mesures prévues peuvent être appliquées conjointement. En cas de défaut de respect des obligations imposées par le ministre ou en cas de risque de fuite, la mesure est révoquée et le placement en rétention est ordonné. ».

Les dispositions des articles 120 et 125 de la loi du 29 août 2008, précités, sont à interpréter en ce sens que les trois mesures moins coercitives énumérées à l’article 125, paragraphe (1) sont à considérer comme bénéficiant d’une priorité sur le placement en rétention, à condition que l’exécution d’une mesure d’éloignement, qui doit rester une perspective raisonnable, soit reportée uniquement pour des motifs techniques et que l’étranger présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite tel que prévu à l’article 111, paragraphe (3) de la même loi. Ainsi, s’il existe une présomption légale de risque de fuite de l’étranger se trouvant en situation irrégulière sur le territoire national, celui-ci doit la renverser en justifiant notamment de garanties de représentation suffisantes.1 En l’espèce, le tribunal est amené, pour les mêmes considérations que celles retenues 1 Trib. adm., 9 mai 2016, n° 37854 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Etrangers, n° 957 et les autres références y citées.

ci-avant, à retenir que le demandeur ne lui a pas soumis suffisamment d’éléments concluants permettant de retenir l’existence, dans son chef, de garanties de représentation suffisantes au sens de l’article 125, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008 nécessaires pour que le recours aux mesures moins contraignantes visées aux points a), b) et c) dudit article s’impose.

En effet, en ce qui concerne la possibilité d’une assignation à résidence, seule mesure qu’il propose dans ce contexte, il est constant en cause que le demandeur ne dispose pas d’autres attaches au Luxembourg que d’un logement loué à …, de sorte qu’en l’absence d’autres éléments mis en avant par le demandeur à ce sujet, et surtout au regard du fait que le demandeur affirme vouloir quitter au plus vite le Luxembourg afin de rejoindre son épouse au Monténégro et d’assister à la naissance de son enfant, c’est à bon droit que le ministre a retenu que les mesures moins coercitives prévues par l’article 125, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008 ne sauraient être efficacement appliquées en l’espèce.

Il s’ensuit que les moyens afférents tirés du caractère prétendument disproportionné de la mesure de placement litigieuse, respectivement d’une application erronée et arbitraire des dispositions légales applicables, encourent le rejet pour ne pas être fondés.

En ce qui concerne, finalement, les diligences entreprises par le ministre pour procéder à l’éloignement du demandeur, le tribunal constate qu’il ressort du dossier administratif que le jour même du placement en rétention, à savoir le 14 mars 2024, l’Unité de garde et d’appui opérationnel de la police grand-ducale a été chargée par le ministre afin d’organiser le transfert de Monsieur … vers le Monténégro.

Au vu de ces éléments, force est au tribunal de constater que les démarches entreprises par les autorités luxembourgeoises en vue d’organiser le transfert du demandeur ont été exécutées avec toute la diligence requise pour écourter au maximum son placement au Centre de rétention et que les contestations du demandeur y relatives sont à rejeter pour ne pas être fondés.

Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le tribunal conclut qu’en l’état actuel du dossier et à défaut d’autres moyens, en ce compris des moyens à soulever d’office, la légalité et le bien-fondé de la décision déférée ne portent pas à critique.

Il s’ensuit que le recours sous analyse est à rejeter comme non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

condamne le demandeur aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 26 mars 2024 par :

Paul Nourissier, vice-président, Olivier Poos, vice-président, Emilie Da Cruz De Sousa, premier juge, en présence du greffier Marc Warken.

s.Marc Warken s.Paul Nourissier Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 26 mars 2024 Le greffier du tribunal administratif 8


Synthèse
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 50219
Date de la décision : 26/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2024-03-26;50219 ?

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