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25/03/2024 | LUXEMBOURG | N°47243

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 25 mars 2024, 47243


Tribunal administratif N° 47243 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:47243 2e chambre Inscrit le 28 mars 2022 Audience publique du 25 mars 2024 Recours formé par la société à responsabilité limitée “A” SARL, …, contre une décision du ministre des Classes moyennes en matière de contribution temporaire de l’Etat aux coûts non couverts pour le mois de septembre 2021

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 47243 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 28 mars 2022 par la société à responsabilité limitée duvieusa

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Tribunal administratif N° 47243 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:47243 2e chambre Inscrit le 28 mars 2022 Audience publique du 25 mars 2024 Recours formé par la société à responsabilité limitée “A” SARL, …, contre une décision du ministre des Classes moyennes en matière de contribution temporaire de l’Etat aux coûts non couverts pour le mois de septembre 2021

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 47243 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 28 mars 2022 par la société à responsabilité limitée duvieusart ebel avocats associés SARL, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-1134 Luxembourg, 55, rue Charles Arendt, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B262624, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Stéphane Ebel, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée “A” SARL, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son conseil de gérance actuellement en fonctions, tendant à l’annulation d’une décision du ministre des Classes moyennes du 28 décembre 2021 refusant l’octroi d’une aide sous forme de contribution aux coûts non couverts pour le mois de septembre 2021 au titre de la loi modifiée du 19 décembre 2020 ayant pour objet la mise en place d’une contribution temporaire de l’Etat aux coûts non couverts de certaines entreprises ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 22 juin 2022 ;

Vu les pièces versées en cause ainsi que la décision attaquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Felipe Lorenzo en sa plaidoirie à l’audience publique du 18 décembre 2023.

___________________________________________________________________________

En date du 5 novembre 2021, la société à responsabilité limitée “A” SARL, ci-après désignée par « la société “A” », introduisit, auprès du ministère de l’Economie une demande en obtention d’une aide étatique pour les coûts non couverts pour le mois de septembre 2021, en application de la loi modifiée du 19 décembre 2020 ayant pour objet la mise en place d’une contribution temporaire de l’Etat aux coûts non couverts de certaines entreprises, ci-après désignée par « la loi du 19 décembre 2020 ».

Par décision du 28 décembre 2021, le ministre des Classes moyennes, ci-après désigné par « le ministre », refusa de faire droit à la demande de la société “A” sur base des considérations et motifs suivants :

« […] En référence à votre demande d’aide sous rubrique et suite à l’analyse de cette dernière par mes services, conformément à la loi, je constate notamment que l’entreprise faisant partie d’un groupe, le chiffre d’affaires réalisé par toutes les entreprises du groupe n’a pas baissé de 40 % entre le mois de la demande et le même mois en 2019.

Par conséquent, je vous informe qu’aucune suite favorable n’a été réservée à votre demande. […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 28 mars 2022, la société “A” a fait introduire un recours tendant à l’annulation de la décision, précitée, du 28 décembre 2021.

Aucune disposition légale ne prévoyant de recours au fond en la présente matière, le tribunal est compétent pour connaître du recours en annulation introduit à l’encontre de la décision attaquée, recours qui est, par ailleurs, recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours, et après avoir repris en substance les faits tels qu’ils ressortent de la décision déférée, la société demanderesse reproche au ministre un excès ou détournement de pouvoir, sinon une violation de la loi.

Après avoir relevé que concernant les groupes d’entreprises, la perte du chiffre d’affaires devrait effectivement être constatée au niveau de la totalité des entreprises luxembourgeoises du groupe et non au niveau de l’entreprise individuelle, elle conteste, en substance, faire elle-même partie d’un groupe d’entreprises.

Elle poursuit en citant l’article 3, alinéa 4 de la loi du 19 décembre 2020, définissant la notion d’« entreprise unique ».

La société demanderesse fait ensuite valoir que, lors de sa constitution en date du 19 février 2016, elle aurait connu deux associés à parts égales, à savoir Monsieur “x” et Madame “y”, et qu’elle n’appartiendrait à aucun groupe de sociétés, de sorte à ne pas relever d’une des quatre catégories visées à l’article 3, alinéa 4, précité, de la loi du 19 décembre 2020. Ainsi :

- elle ne détiendrait pas de participation majoritaire lui donnant la majorité des droits de vote dans une autre société, - elle ne disposerait d’aucun pouvoir de nomination ou de révocation de la majorité des membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance d’une autre société, - elle n’exercerait aucune influence dominante sur une autre société en vertu d’un contrat conclu avec celle-ci ou en vertu d’une clause des statuts de celle-ci, et - elle, seule ou avec une autre société, ne contrôlerait pas, - en vertu d’un accord conclu avec d’autres actionnaires ou associés de cette autre société -, la majorité des droits de vote de cette autre société.

La société demanderesse donne à considérer que la circonstance que Madame “y” détient 50% de ses parts sociales, de même qu’elle détient 25% de la nue-propriété des actions de la société anonyme “B” SA, ci-après désignée par « la société “B” », ne la ferait pas rentrer dans l’une des quatre catégories prévues par l’article 3, alinéa 4 de la loi du 19 décembre 2020.

Comme elle ne ferait, dès lors, pas partie d’un groupe de sociétés, ce serait à tort que sa demande d’aide aurait été rejetée par le ministre sur base d’une telle prémisse erronée.

Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet du recours pour ne pas être fondé.

Le tribunal relève tout d’abord que lorsqu’il est saisi d’un recours en annulation, le juge administratif est appelé à vérifier, d’un côté, si, au niveau de la décision administrative querellée, les éléments de droit pertinents ont été appliqués et, d’un autre côté, si la matérialité des faits sur lesquels l’autorité de décision s’est basée est établie. Au niveau de l’application du droit aux éléments de fait, le juge de l’annulation vérifie encore s’il n’en est résulté aucune erreur d’appréciation se résolvant en dépassement de la marge d’appréciation de l’auteur de la décision querellée. Le contrôle de légalité à exercer par le juge de l’annulation n’est pas incompatible avec le pouvoir d’appréciation de l’auteur de la décision qui dispose d’une marge d’appréciation. Ce n’est que si cette marge a été dépassée que la décision prise encourt l’annulation pour erreur d’appréciation. Ce dépassement peut notamment consister dans une disproportion dans l’application de la règle de droit aux éléments de fait. Le contrôle de légalité du juge de l’annulation s’analyse alors en contrôle de la proportionnalité1 de la mesure prise par rapport aux faits établis.

Il convient encore de rappeler que l’acte administratif individuel, et plus particulièrement celui qui est de nature à faire grief soit à son destinataire, soit à de tierces personnes, bénéficie de la présomption de légalité ainsi que de conformité par rapport aux objectifs de la loi sur base de laquelle il a été pris, de sorte qu’il appartient à celui qui prétend subir un préjudice ou des inconvénients non justifiés de l’acte administratif en question, et qui partant souhaite le voir réformer ou annuler en vue d’obtenir une situation de fait qui lui est plus favorable, d’établir concrètement en quoi l’acte administratif en question viole une règle fixée par une loi ou un règlement grand-ducal2, sans qu’il n’appartienne au tribunal de suppléer à la carence de la partie demanderesse à cet égard3.

Il ressort de la décision ministérielle, précitée, du 28 décembre 2021 que le ministre a refusé d’octroyer à la société “A” une aide sous la forme d’une contribution aux coûts non couverts pour le mois de septembre 2021 au motif que comme elle ferait partie d’un groupe de sociétés, elle ne pourrait se voir octroyer l’aide sollicitée qu’à la condition que le chiffre d’affaires réalisé par toutes les entreprises du groupe dont elle fait partie avait baissé d’au moins 40% entre le mois de la demande et le même mois en 2019. La société demanderesse conteste, quant à elle, faire partie d’un groupe de sociétés et donc de devoir remplir les conditions imposées aux entreprises uniques.

Dans sa version en vigueur lors de l’adoption de la décision déférée, la loi du 19 décembre 2020 prévoyait, en son article 1er, que « L’Etat, représenté par le ministre ayant les Classes moyennes dans ses attributions […] peut octroyer une aide sous forme de contribution aux coûts non couverts aux entreprises […] ».

L’article 4 quinquies de la même loi prévoyait, quant à lui, qu’« Une aide peut être accordée les mois de juillet, août, septembre, octobre, novembre et décembre 2021 aux 1 Cour adm., 9 novembre 2010, n° 26886C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Recours en annulation, n°39 et les autres références y citées.

2 Trib. adm., 26 avril 2019, n° 40810 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Actes administratifs, n°157 et les autres références y citées.

3 Trib. adm., 26 mars 2003, n°15115 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n°504 et les autres références y citées.

entreprises visées à l’article 1er, point 1°, pour autant que les conditions énoncées ci-après soient remplies:

1° l’entreprise remplit les conditions prévues à l’article 4, paragraphe 1er, points 1° et 3°;

2° elle exerçait l’activité visée à l’article 1er, point 1°, au 31 décembre 2019 et l’exerce durant le mois pour lequel l’aide est sollicitée. Cette dernière condition ne s’applique pas dans l’hypothèse où l’entreprise se trouve dans l’impossibilité d’exercer l’activité en vertu des dispositions de la loi modifiée du 17 juillet 2020 sur les mesures de lutte contre la pandémie Covid-19;

3° son chiffre d’affaires pour l’année fiscale 2019 est au moins égal ou supérieur à 15 000 euros; pour les entreprises créées au cours de l’année fiscale 2019, le montant de 15 000 euros est adapté au prorata en fonction de la durée effective pendant laquelle l’entreprise a été en activité avant le 31 décembre 2019;

4° l’entreprise unique a subi, au cours du mois pour lequel l’aide est sollicitée, une perte du chiffre d’affaires d’au moins 40 pour cent par rapport au même mois de l’année fiscale 2019 ou, si l’entreprise n’a pas encore été en activité au cours du même mois de l’année fiscale 2019, par rapport au chiffre d’affaires mensuel moyen réalisé au cours de l’année fiscale 2019. ».

Au vu de ce qui précède, le ministre pouvait, sous certaines conditions, octroyer pour le mois de septembre 2021 une aide étatique aux entreprises, sous forme de contribution aux coûts non couverts.

Les parties sont, en l’espèce, en désaccord sur la question de savoir si la société “A” est à considérer comme constituant une entreprise unique au sens de l’article 3, alinéa 4 de la loi du 19 décembre 2020, aux termes duquel :

« Aux fins de la présente loi, on entend par : […] « entreprise unique » : toutes entreprises qui entretiennent entre elles au moins l’une des relations suivantes :

a) une entreprise a la majorité des droits de vote des actionnaires ou associés d’une autre entreprise ;

b) une entreprise a le droit de nommer ou de révoquer la majorité des membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance d’une autre entreprise ;

c) une entreprise a le droit d’exercer une influence dominante sur une autre entreprise en vertu d’un contrat conclu avec celle-ci ou en vertu d’une clause des statuts de celle-ci ;

d) une entreprise actionnaire ou associée d’une autre entreprise contrôle seule, en vertu d’un accord conclu avec d’autres actionnaires ou associés de cette autre entreprise, la majorité des droits de vote des actionnaires ou associés de celle-ci.

Les entreprises qui entretiennent au moins une des relations visées au présent point à travers une ou plusieurs autres entreprises sont également considérées comme une entreprise unique. ».

Tout en admettant, dans le cadre de sa requête introductive d’instance, que Madame “y” détient tant 50% des parts sociales de la société “A” que 25% des actions en nue-propriété de la société “B”, la société demanderesse conteste toutefois que cette circonstance serait suffisante pour la qualifier d’entreprise unique.

Il y a lieu de relever que la notion d’« entreprise unique », telle que retenue par l’article 3, alinéa 4 de la loi du 19 décembre 2020, précité, tire sa définition d’une transcription textuelle en droit interne de l’article 2, alinéa 2 du règlement (UE) n° 1407/2013 de la Commission du 18 décembre 2013 relatif à l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne aux aides de minimi.

Etant donné qu’il se dégage de ce qui précède que plusieurs entités juridiques distinctes peuvent être considérées comme constituant une entreprise unique, il y a lieu de cerner si la société demanderesse peut être qualifiée comme constituant une entreprise unique. Il se dégage, à cet égard, de la jurisprudence européenne relative à l’appréciation de la portée du terme d’entreprise unique que plusieurs éléments sont à prendre en compte pour établir l’existence d’une unité économique, tels que, entre autres, la possibilité, pour une entité détenant des participations de contrôle dans une autre société, d’exercer, au-delà d’un simple placement de capitaux par un investisseur, des fonctions de contrôle, d’impulsion et de soutien financier à l’égard de cette société ainsi que l’existence de liens organiques, fonctionnels et économiques entre elles4. Peuvent illustrer l’existence de liens organiques et fonctionnels entre une entité détenant des participations de contrôle dans une société et cette même société contrôlée les circonstances que des membres du comité de gestion et de l’organe de contrôle de ladite entité sont nommés aux organes équivalents de la société contrôlée5.

En l’espèce, le tribunal relève que l’article 2 des statuts de la société “A”, relatif à l’objet social de ladite société, énonce que « La Société a pour objet :

- l’exploitation d’un établissement de restauration, petite restauration, Tea-Room avec débit de boissons alcoolisées et non alcoolisées ;

- l’activité de traiteur, le party-service, la fabrication et la livraison de salades, sandwiches et de plats préparés ;

- organisateur de banquets, d’évènements-Team Building ;

- l’exploitation d’un hôtel, chambres d’hôtes, Gîte ;

- Négoce de vin et spiritueux.

La Société a également pour objet toutes prises de participations sous quelque forme que ce soit, dans des entreprises ou sociétés luxembourgeoises ou étrangères ; l’acquisition par voie d’achat, d’échange, de souscription, d’apport et de toute autre manière, ainsi que l’aliénation par voie de vente, d’échange et de toute autre manière de parts sociales et de valeurs mobilières de toutes espèces ; le contrôle et la mise en valeur de ces participations, notamment grâce à l’octroi aux entreprises auxquelles elle s’intéresse de tous concours, prêts, avances ou garanties ; l’emploi de ses fonds, la création, la gestion, la mise en valeur et la liquidation d’un portefeuille se composant de tous titres et brevets de toute origine, l’acquisition par voie d’apport, de souscription, de prise ferme ou d’option d’achat et de toute autre manière, de tous titres et brevets, la réalisation par voie de vente, de cession, d’échange ou autrement et la mise en valeur de ces affaires et brevets. […] ».

4 En ce sens: TUE, 19 mai 2021, Ryanair DAC c/ Commission européenne, T-643/20, et TUE, 7 février 2024, Ryanair DAC c/ Commission européenne, T-146/22.

5 CJUE, 16 décembre 2010, AceaElectrabel Produzione c/ Commission européenne, C-480/09 P.

Conformément à cette description statutaire, la société “A” a, notamment, comme objet social la participation dans d’autres sociétés et le contrôle et la mise en valeur de ces participations, en octroyant à ces sociétés, entre autres, des prêts, des avances ou des garanties.

Il est encore constant en cause que Madame “y” détient 50% des parts sociales de la société “A”, de sorte à disposer d’un droit de vote aux assemblées générales ordinaires et extraordinaires de celle-ci. S’y ajoute qu’elle a été nommée gérante technique par l’assemblée générale extraordinaire du 19 février 2016, de sorte à pouvoir, en application de l’article 13 des statuts de la société “A”, engager ladite société par sa signature individuelle.

En ce qui concerne la société “B”, son objet social, tel qu’il est fixé à l’article 5 de ses statuts, prévoit que : « La Société a pour objet la gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier, la prise de participations, sous quelque forme que ce soit, dans d’autres sociétés luxembourgeoises ou étrangères, ainsi que la gestion, le contrôle et la mise en valeur de ces participations. […] La Société peut emprunter et accorder à d’autres sociétés dans lesquelles la société détient un intérêt, tous concours, prêts, avances ou garanties. […] ».

Ainsi, la société “B” a, tout comme c’est le cas pour la société “A”, notamment, comme objet social la participation dans d’autres sociétés. Elle peut encore procéder à la gestion, au contrôle et à la mise en valeur de ces participations, tout en pouvant emprunter et accorder à ces autres sociétés tous concours, prêts, avances ou garanties.

Tel que soulevé à juste titre par la partie étatique et non contestée par la société demanderesse, - laquelle n’a ni apporté la moindre explication plus poussée pour soutenir son affirmation selon laquelle le fait que Madame “y” détienne tant 50% des parts sociales de la société “A” que 25% des actions en nue-propriété de la société “B” ne suffirait pas pour considérer qu’elle constitue ensemble avec la société “B” une entreprise unique, ni pris position à travers un mémoire en réplique par rapport aux explications supplémentaires fournies par la partie étatique en cours de procédure contentieuse -, il ressort encore de l’article 9 des statuts de la société “B” que le nu-propriétaire d’actions dispose du droit de vote aux assemblées générales ordinaires et extraordinaires. Madame “y” détenant 25% des actions en nue-propriété de la société “B”, elle dispose partant du droit de vote auxdites assemblées, tout en ayant la qualité d’administrateur de cette même société dont il n’est pas non plus contesté que l’intégralité de l’actionnariat est exclusivement constituée par les membres de famille de Madame “y”.

Au vu de ce qui précède, et en l’absence de contestations circonstanciées de la part de la société demanderesse, laquelle n’a, tel que relevé ci-dessus, pas jugé utile de produire un mémoire en réplique pour contredire utilement les explications complémentaires fournies par la partie étatique, le tribunal est amené à rejoindre la partie étatique dans son constat suivant lequel il existe une situation d’influence dominante entre les deux sociétés “A” et “B” au sens de l’article 3, alinéa 4, point c) de la loi du 19 décembre 2020 et ce, en raison (i) du fait que l’objet social des deux sociétés consiste dans la prise de participations dans d’autres sociétés avec la possibilité de procéder à leur gestion et à leur mise en valeur, (ii) du fait que Madame “y” dispose d’un droit de vote aux assemblées dans les deux sociétés au vu de sa détention de 50% des parts sociales dans la société “A” et de 25% de la nue-propriété des actions dans la société “B”, et (iii) de la qualité de gérant technique de Madame “y” dans la société “A” et d’administrateur dans la société “B”, impliquant qu’elle a la qualité à la fois de propriétaire et associé-gérant de la société “A” et celle de propriétaire et administrateur de la société “B”. Au vu de ces considérations, aucun reproche ne saurait être fait au ministre pour avoir retenu que la société demanderesse est à considérer comme faisant partie d’un groupe de sociétés au sens de l’article 3, alinéa 4 de la loi du 19 décembre 2020.

C’est dès lors également à bon droit que le ministre a pris en compte le chiffre d’affaires réalisé par toutes les entreprises du groupe pour apprécier si la société “A” était éligible à une aide étatique pour les coûts non couverts pour le mois de septembre 2021, telle que prévue à l’article 4 quinquies de la loi du 19 décembre 2020, étant relevé que la société demanderesse ne conteste, pour le surplus, pas les calculs effectués par le ministre pour venir à la conclusion que le chiffre d’affaires réalisé par toutes les entreprises du groupe dont elle fait partie n’a pas baissé d’au moins 40% entre le mois de la demande et le même mois en 2019, - la société demanderesse s’étant effectivement limitée à contester qu’elle constituerait une entreprise unique au sens de l’article 3, alinéa 4 de la loi du 19 décembre 2020.

Au vu des considérations qui précèdent, la décision ministérielle refusant à la société demanderesse l’octroi d’une aide sous forme de contribution aux coûts non couverts pour le mois de septembre 2021 au titre de la loi du 19 décembre 2020 n’encourt aucune critique et le recours sous analyse est, par conséquent, à rejeter pour être non fondé.

Quant à la demande en distraction des frais au profit du mandataire de la société, demanderesse, il convient de rappeler qu’il ne saurait être donné suite à la demande en distraction des frais posés par le mandataire d’une partie, pareille façon de procéder n’étant point prévue en matière de procédure contentieuse administrative6.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

rejette la demande en distraction des frais formulée par le mandataire de la société demanderesse ;

condamne la société demanderesse aux frais et dépens.

Ainsi jugé par :

Alexandra Castegnaro, vice-président, Annemarie Theis, premier juge, Caroline Weyland, juge, et lu à l’audience publique du 25 mars 2024 par le vice-président, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

6 Trib. adm., 14 février 2001, n° 11607 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 1289 et les autres références y citées.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Alexandra Castegnaro Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 26 mars 2024 Le greffier du tribunal administratif 8


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 47243
Date de la décision : 25/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2024-03-25;47243 ?

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