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16/01/2024 | LUXEMBOURG | N°47121

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 16 janvier 2024, 47121


Tribunal administratif N° 47121 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:47121 3e chambre Inscrit le 3 mars 2022 Audience publique du 16 janvier 2024 Recours formé par Madame …, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de sursis à éloignement

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 47121 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 3 mars 2022 par Maître Michel KARP, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le … à â

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Tribunal administratif N° 47121 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:47121 3e chambre Inscrit le 3 mars 2022 Audience publique du 16 janvier 2024 Recours formé par Madame …, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de sursis à éloignement

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 47121 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 3 mars 2022 par Maître Michel KARP, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le … à … (Moldavie), de nationalité moldave, demeurant à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 3 décembre 2021 lui refusant l’octroi d’un sursis à l’éloignement ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 23 mai 2022 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jeff RECKINGER en sa plaidoirie à l’audience publique du 21 novembre 2023.

Le 11 août 2017, Madame … introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, ci-après désigné par le « ministère », pour son propre compte, ainsi que pour sa fille mineure …, désignées ci-après « les consorts … » une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par la « loi du 18 décembre 2015 ».

Par une décision du 25 janvier 2019, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, désigné ci-après par « le ministre », rejeta comme non fondées les demandes de protection internationale des consorts …, tout en leur ordonnant de quitter le territoire dans un délai de trente jours, le recours contentieux introduit contre cette décision ayant été définitivement rejeté par un arrêt de la Cour administrative du 7 juillet 2020, inscrit sous le numéro 44471C du rôle.

Le 2 septembre 2020, les consorts … introduisirent des nouvelles demandes de protection internationale au sens de la loi du 18 décembre 2015, demandes qui furent déclarées irrecevables par décision du ministre du 22 septembre 2020.

1Par courrier réceptionné par le ministère en date du 13 novembre 2020, Madame … sollicita un sursis à l’éloignement sur base de l’article 130 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration, désignée ci-après par « la loi du 29 août 2008 ».

Sur base d’un avis du médecin délégué de la Direction de la Santé, Division de l’Inspection Sanitaire du ministère de la Santé, ci-après désigné par le « médecin-délégué », du 25 novembre 2021, le ministre rejeta la demande de Madame … par décision du 3 décembre 2021, cette décision étant formulée comme suit :

« […] Par la présente j'ai l'honneur de me référer au courrier de Madame … du 13 novembre 2020 sollicitant un sursis à l'éloignement en raison de son état de santé.

La présente pour vous rappeler que le médecin délégué de la Direction de la Santé a été saisi en date du 19 novembre 2020 concernant l'état de santé de votre mandante. Un rappel a été dressé le 22 mars 2021.

Suivant avis du médecin délégué du 25 novembre 2021, reçu le 1er décembre 2021, un sursis à l'éloignement est refusé à Madame … conformément aux articles 130 et 132 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l'immigration.

En effet, il ressort du prédit avis, dont vous trouverez une copie en annexe, que « (…) Vu l'examen médical par le médecin délégué en date du 25.11.2021 (…) Considérant que la prise en charge médicale de Mme … peut être réalisée dans le pays vers lequel l'éloignement est prévu. Le médecin délégué est d'avis que : 1. l'état de santé de Mme … ne nécessite pas de prise en charge médicale dispensée au Luxembourg dont le défaut entraînerait pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; 2. par conséquent, Mme … ne remplit pas les conditions médicales pour bénéficier d'un sursis à l'éloignement ».

La présente décision est susceptible d'un recours en annulation devant le Tribunal administratif. Ce recours doit être introduit par requête signée d'un avocat à la Cour dans un délai de trois mois à partir de la notification de la présente. Le recours n'est pas suspensif.

Votre mandante, ainsi que sa fille … restent donc dans l'obligation de quitter le territoire. […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 3 mars 2022, Madame … a fait introduire un recours tendant à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 3 décembre 2021.

Etant donné qu’aucune disposition légale n’instaure un recours au fond en matière de sursis à l’éloignement, le tribunal administratif est compétent pour connaître du recours en annulation introduit en l’espèce, lequel est encore recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’audience des plaidoiries, le tribunal a soulevé d’office la question de la recevabilité du recours en ce qu’il a été signé par Maître Elena FROLOVA, avocate inscrite à la liste II du tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg.

2Maître Michel KARP ne s’étant pas présenté à l’audience, n’a pas pris position quant à cette question.

Le délégué du gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours introduit.

Aux termes de l’article 1er de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, désignée ci-après « la loi du 21 juin 1999 », « Tout recours, en matière contentieuse, introduit devant le tribunal administratif, dénommé ci-après « tribunal », est formé par requête signée d’un avocat inscrit à la liste I des tableaux dressés par les conseils des Ordres des avocats. […] ».

Selon une jurisprudence constante, la formalité de la signature de la requête introductive d’instance par un avocat inscrit à la liste I des tableaux dressés par les conseils des Ordres des avocats est une condition substantielle de recevabilité de la procédure contentieuse par laquelle le mandataire des parties en cause manifeste, par rapport à la juridiction saisie, son mandat ainsi que l’élection de domicile accordée à ses mandants. En l’absence d’une telle signature, la requête introductive d’instance est irrecevable.1 Par ailleurs, il y a lieu de préciser que si un avocat constitué pour une partie, d’après les termes du corps d’un acte de procédure, peut faire signer cet acte par un autre avocat, dont la personnalité s’éclipse derrière celle de l’avocat constitué lequel est censé avoir signé lui-même l’acte en question par l’effet de la représentation, l’avocat signataire doit pourtant, au vu de l’article 1er de la loi du 21 juin 1999, être inscrit sur la liste I du tableau de l’ordre des avocats et l’acte doit contenir la mention de l’identité et des qualités de l’avocat signataire ainsi que la précision non équivoque que l’avocat signataire agit en représentation de l’avocat constitué.2 En l’espèce, force est de constater que la requête introductive d’instance porte in fine la mention dactylographiée « s. Me Michel KARP ». En amont et en aval de l’indication « s.

Me Michel KARP » ont été ajoutées de manière manuscrite les indications « p. » et « emp. » signifiant respectivement « pour » et « empêché », lesquelles indications sont suivies du nom « Me Elena FROLOVA », ainsi que de la signature de cette dernière.

Or, il ressort du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, qu’à l’heure actuelle et a fortiori également à la date de la signature de la requête introductive d’instance, à savoir le 3 mars 2022, Maître Elena FROLOVA y était inscrite sur la liste II, de sorte qu’elle n’a pu valablement signer le recours et l’introduire devant le tribunal administratif.

Partant, il suit de ces considérations que la requête introductive d’instance viole les prescriptions de l’article 1er de la loi du 21 juin 1999, de sorte que le recours est à déclarer irrecevable.

Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant contradictoirement ;

déclare irrecevable le recours déposé au greffe du tribunal administratif le 3 mars 2022;

1 Trib. adm., 10 février 1999, n° 10933 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 526 et les autres références y citées.

2 Trib. adm., 7 mai 1997, n° 9322 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 530 et les autres références y citées.

3condamne la demanderesse aux frais et dépens.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 16 janvier 2024 par :

Thessy Kuborn, premier vice-président, Laura Urbany, premier juge, Sibylle Schmitz, juge, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 16 janvier 2024 Le greffier du tribunal administratif 4


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 47121
Date de la décision : 16/01/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2024-01-16;47121 ?

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