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15/01/2024 | LUXEMBOURG | N°49898

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 15 janvier 2024, 49898


Tribunal administratif Numéro 49898 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:49898 2e chambre Inscrit le 5 janvier 2024 Audience publique du 15 janvier 2024 Recours formé par Monsieur …, Findel, contre une décision du ministre des Affaires intérieures en matière de rétention administrative (art. 120, L. 29.08.2008)

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 49898 du rôle et déposée le 5 janvier 2024 au greffe du tribunal administratif par Maître Eric Says, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Mon

sieur …, déclarant être né le … et être de nationalité nigériane, actuellement ...

Tribunal administratif Numéro 49898 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:49898 2e chambre Inscrit le 5 janvier 2024 Audience publique du 15 janvier 2024 Recours formé par Monsieur …, Findel, contre une décision du ministre des Affaires intérieures en matière de rétention administrative (art. 120, L. 29.08.2008)

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 49898 du rôle et déposée le 5 janvier 2024 au greffe du tribunal administratif par Maître Eric Says, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, déclarant être né le … et être de nationalité nigériane, actuellement retenu au Centre de rétention au Findel, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires Intérieures du 22 décembre 2023 ayant ordonné la prorogation de son placement au Centre de rétention pour une durée d’un mois avec effet au 27 décembre 2023 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 9 janvier 2024 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Madame le délégué du gouvernement Tara Desorbay en sa plaidoirie à l’audience publique de ce jour, Maître Eric Says s’étant excusé.

Suite à une interpellation lors d’un contrôle d’identité le 29 décembre 2019, lors duquel Monsieur … présenta une attestation de demande d’asile délivrée par la Préfecture du Bas-Rhin en France valable jusqu’au 18 mars 2020, le ministre de l’Immigration et de l’Asile déclara irrégulier le séjour de Monsieur … sur le territoire luxembourgeois, lui ordonna de quitter le territoire sans délai et lui interdit l’entrée sur le territoire pour une durée de trois ans.

Lors d’un contrôle d’identité par des agents de la police grand-ducale en date du 13 juillet 2023, Monsieur … ne put présenter aucune pièce d’identité valable. Une vérification dans la base de données intitulée : « Système d’information Schengen », désignée ci-après par « le SIS », révéla à la même occasion que Monsieur … fit l’objet d’un refus d’entrée sur le territoire national français depuis le 13 avril 2022.

En réponse à une demande adressée par la police grand-ducale au Centre de coopération policière et douanière, désigné ci-après par le « CCPD », en date du 1er août 2023, les autorités françaises informèrent les autorités luxembourgeoises que l’attestation de demande d’asile dont Monsieur … faisait état n’était plus valide depuis le 29 décembre 2021 et que Monsieur … avait 1fait l’objet de deux arrêtés portant obligation de quitter le territoire national, dont le premier lui avait été notifié le 11 avril 2022 et le second avait été prononcé le 1er août 2023.

Il ressort d’un rapport de la police grand-ducale du 1er octobre 2023 qu’à cette même date Monsieur … fut interpellé suite à une altercation physique avec d’autres personnes et qu’il ne fut pas en mesure de présenter une pièce d’identité valable.

Par arrêté ministériel du 1er octobre 2023, notifié à l’intéressé le même jour, le ministre de l’Immigration et de l’Asile ordonna le placement de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée d’un mois à compter de la notification de la décision en question, ledit arrêté étant fondé sur les motifs et les considérations suivants :

« […] Vu les articles 100, 111, 120 à 123 et 125, paragraphe (1) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration ;

Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;

Vu le rapport no … du 1er octobre 2023 établi par la Police grand-ducale ;

Considérant que l’intéressé fait l’objet d’un signalement dans le Système d’information Schengen (SIS) ;

Considérant que l’intéressé est démuni de tout document d’identité et de voyage valable ;

Considérant qu'il existe un risque de fuite dans le chef de l’intéressé, alors qu’il ne dispose pas d’une adresse officielle au Grand-Duché de Luxembourg ;

Considérant par conséquent que les mesures moins coercitives telles qu’elles sont prévues par l'article 125, paragraphe (1), points a), b) et c) de la loi modifiée du 29 août 2008 précitée ne sauraient être efficacement appliquées ;

Considérant que les démarches nécessaires en vue de l’éloignement de l’intéressé seront engagées dans les plus brefs délais ;

Considérant que l’exécution de la mesure d'éloignement est subordonnée au résultat de ces démarches ; […] ».

Une recherche effectuée en date du 2 octobre 2023 dans la base de données EURODAC en vue de la comparaison des empreintes digitales aux fins de l’application du règlement (UE) 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ci-après désigné par « le règlement Dublin III », révéla que Monsieur … avait introduit une demande de protection internationale notamment en Suisse en date du 30 novembre 2022 ainsi qu’en France en date du 9 mars 2023.

En date du 10 octobre 2023, les autorités luxembourgeoises contactèrent les autorités françaises en vue de la reprise en charge de Monsieur … en application de l’article 18, paragraphe (1), point b) du règlement Dublin III. A défaut par les autorités françaises de répondre à ladite demande, les autorités luxembourgeoises les contactèrent par courrier du 25 octobre 2023 pour les informer qu’elles étaient obligées de considérer que la France avait tacitement accepté la reprise en charge de l’intéressé en date du 25 octobre 2023. La demande de reprise en charge du demandeur fut ensuite formellement acceptée en date du 27 décembre 2023 par les autorités françaises sur base de l’article 18, paragraphe (1), point d) du règlement Dublin III.

Par arrêté du 26 octobre 2023, notifié à l’intéressé le 27 octobre 2023, le ministre de 2l’Immigration et de l’Asile rapporta la décision de retour du 29 décembre 2019 et décida que l’intéressé serait transféré vers la France.

Par un second arrêté du 26 octobre 2023, notifié à l’intéressé le lendemain, ledit ministre prononça la mainlevée de la mesure de placement au Centre de rétention de l’intéressé du 1er octobre 2023 et prit une nouvelle décision de placement au Centre de rétention à l’égard de Monsieur … pour une durée d’un mois à compter de la notification de la décision. Ledit arrêté étant fondé sur les motifs et les considérations suivants :

« […] Vu les articles 100, 111, 120 à 123 et 125, paragraphe (1) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l'immigration ;

Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;

Vu l’accord tacite de reprise en charge des autorités françaises du 25 octobre 2023 sur base de l’article 25, paragraphe (2), du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

Vu ma décision de transfert du 26 octobre 2023 ;

Considérant qu’il existe un risque de fuite dans le chef de l’intéressé, alors qu’il ne dispose pas d’une adresse officielle au Grand-Duché de Luxembourg ;

Considérant par conséquent que les mesures moins coercitives telles qu’elles sont prévues par l'article 125, paragraphe (1), points a), b) et c) de la loi modifiée du 29 août 2008 précitée ne sauraient être efficacement appliquées ;

Considérant que les démarches nécessaires en vue du transfert de l’intéressé vont être engagées ;

Considérant que l’exécution de la mesure de son transfert est subordonnée au résultat de ces démarches ; […] ».

Par arrêté du 27 novembre 2023, notifié à l’intéressé en date du même jour, le ministre des Affaires intérieures, entretemps en charge du dossier, ci-après désigné par « le ministre », prorogea la mesure de placement de Monsieur … pour une durée d’un mois avec effet à partir de la notification dudit arrêté. Le recours contentieux introduit le 6 décembre 2023 contre ledit arrêté fut déclaré non fondé par jugement du tribunal administratif du 13 décembre 2023 inscrit sous le numéro 49779 du rôle.

Par arrêté du 22 décembre 2023, notifié à l’intéressé le 27 décembre 2023, le ministre prorogea la mesure de placement de Monsieur … pour une nouvelle durée d’un mois avec effet au 27 décembre 2023, ledit arrêté étant fondé sur les motifs et les considérations suivants :

« […] Vu les articles 100, 111, 120 à 123 et 125, paragraphe (1) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration ;

Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;

Vu mes arrêtés des 26 octobre 2023 et 24 novembre 2023, notifiés en date des 27 octobre 2023 et 27 novembre 2023, décidant de soumettre l’intéressé à une mesure de placement ;

Vu l’accord tacite de reprise en charge des autorités françaises du 25 octobre 2023 sur base de l’article 25, paragraphe (2) du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

Vu ma décision de transfert du 26 octobre 2023 ;

Considérant que le transfert vers la France prévu en date du 21 décembre 2023 n’a pas pu être exécuté pour des raisons organisationnelles ;

Considérant que le transfert vers la France sera réorganisé dans les meilleurs délais ;

3Considérant que les motifs à la base de la mesure de placement du 26 octobre 2023 subsistent dans le chef de l’intéressé ;

Considérant qu’il y a lieu de maintenir la mesure de placement afin de garantir l’exécution de la mesure du transfert ; […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 5 janvier 2024, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de l’arrêté ministériel, précité, du 22 décembre 2023.

Etant donné que l’article 123, paragraphe (1) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration, ci-après désignée par « la loi du 29 août 2008 », institue un recours de pleine juridiction contre une décision de rétention administrative, le tribunal est compétent pour connaître du recours principal en réformation, lequel est encore recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Il n’y a partant pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

A l’appui de son recours et quant à la légalité externe de la décision déférée, le demandeur se rapporte à prudence de justice quant à la compétence du ministre pour prendre l’arrêté litigieux.

En ce qui concerne la légalité interne de la décision déférée, il conclut à une violation de l’article 120 de la loi du 29 août 2008 en contestant qu’il existerait dans son chef un danger de fuite ou qu’il empêcherait la préparation de son retour ou de la procédure d’éloignement.

Dans ce contexte, il conteste que toutes les démarches nécessaires des autorités luxembourgeoises auraient été entamées, en expliquant que son transfert vers la France aurait été prévu le 21 décembre 2023, que ledit transfert n’aurait pas pu être exécuté, de sorte qu’il serait en attente d’une nouvelle date d’éloignement vers la France.

Il souligne que jusqu’à présent aucune proposition de retour ne lui aurait été faite et qu’aucune date de son extradition ne lui aurait été proposée et qu’il souhaiterait retourner au plus vite en France.

Enfin, le demandeur fait valoir que ni le manque de démarches nécessaires des autorités, ni l’absence de vols ne sauraient justifier un placement en rétention.

Le demandeur en conclut que son placement au Centre de rétention ne serait pas justifié.

Le délégué du gouvernement conclut, pour sa part, au rejet du recours pour ne pas être fondé.

C’est de prime abord à tort que le demandeur conteste, par le fait de s’être rapporté à prudence de justice, la compétence du ministre ayant pris la décision déférée - qui est le ministre des Affaires intérieures et non pas le ministre de l’Immigration, tel qu’indiqué erronément dans la requête introductive d’instance - étant donné qu’en vertu de l’article 3, point g) de la loi du 29 août 2008, le ministre visé dans les dispositions de cette loi est le membre du gouvernement ayant l’immigration dans ses attributions, soit conformément à l’annexe B du 4règlement interne du gouvernement1 tel qu’approuvé par arrêté grand-ducal du 27 novembre 2023 portant approbation et publication du règlement interne du Gouvernement, le ministre des Affaires intérieures.

Le moyen de légalité externe afférent est dès lors à rejeter pour ne pas être fondé.

Quant à la légalité interne de la décision déférée, le tribunal relève qu’aux termes de l’article 120, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008 : « Afin de préparer l’éloignement en application des articles 27, 30, 100, 111, 116 à 118 […], l’étranger peut, sur décision du ministre, être placé en rétention dans une structure fermée, à moins que d’autres mesures moins coercitives telles que prévues à l’article 125, paragraphe (1), ne puissent être efficacement appliquées.

Une décision de placement en rétention est prise contre l’étranger en particulier s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement […] ».

Par ailleurs, en vertu de l’article 120, paragraphe (3) de la même loi : « La durée de la rétention est fixée à un mois. La rétention ne peut être maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. Elle peut être reconduite par le ministre à trois reprises, chaque fois pour la durée d’un mois si les conditions énoncées au paragraphe (1) qui précède sont réunies et qu’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien. […] ».

L’article 120, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008 permet ainsi au ministre, afin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement, de placer l’étranger concerné en rétention dans une structure fermée pour une durée maximale d’un mois, ceci plus particulièrement s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. En effet, la préparation de l’exécution d’une mesure d’éloignement nécessite notamment la mise à disposition de documents de voyage valables, lorsque l’intéressé ne dispose pas des documents requis pour permettre son éloignement et que des démarches doivent être entamées auprès d’autorités étrangères notamment en vue de l’obtention d’un accord de réadmission ou de reprise en charge de l’intéressé. Elle nécessite encore l’organisation matérielle du retour, en ce sens qu’un moyen de transport doit être choisi et que, le cas échéant, une escorte doit être organisée. C’est précisément afin de permettre à l’autorité compétente d’accomplir ces formalités que le législateur a prévu la possibilité de placer un étranger en situation irrégulière en rétention pour une durée maximale d’un mois, mesure qui peut être prorogée par la suite.

En vertu de l’article 120, paragraphe (3) de la même loi, le maintien de la rétention est cependant conditionné par le fait que le dispositif d’éloignement soit en cours et soit exécuté avec toute la diligence requise, impliquant plus particulièrement que le ministre est dans l’obligation d’entreprendre toutes les démarches requises pour exécuter l’éloignement dans les meilleurs délais.

Une mesure de placement peut être reconduite à trois reprises, chaque fois pour une durée d’un mois, si les conditions énoncées au paragraphe (1) de l’article 120, précité, sont réunies et s’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien.

1 Publié au Mémorial A, n° 778 du 28 novembre 2023.

5 Une décision de prorogation d’un placement en rétention est partant en principe soumise à la réunion de quatre conditions, à savoir que les conditions ayant justifié la décision de rétention initiale soient encore données, que le dispositif d’éloignement soit toujours en cours, que celui-ci soit toujours poursuivi avec la diligence requise et qu’il y ait des chances raisonnables de croire que l’éloignement en question puisse être « mené à bien ».

S’agissant d’abord des contestations de Monsieur … quant à l’existence, dans son chef, d’un risque de fuite, il convient de constater qu’en l’espèce et tel que cela avait déjà été retenu par le tribunal administratif dans son jugement du 13 décembre 2023, prémentionné, il n’est pas contesté que le demandeur, dont il est constant en cause qu’il se trouve en séjour irrégulier au Luxembourg, ne dispose ni d’un document d’identité, ni d’un document de voyage valable, ni d’une autorisation de séjour de plus de 3 mois, ni d’une autorisation de travail, de sorte qu’il ne remplit pas les conditions de l’article 34 de la loi du 29 août 2008 et que, dès lors, il existe, dans son chef, un risque de fuite qui est présumé en vertu de l’article 111, paragraphe (3), point c), numéro 1. de la loi du 29 août 2008, aux termes duquel « […] Le risque de fuite dans le chef du ressortissant de pays tiers est présumé […] s’il ne remplit pas ou plus les conditions de l’article 34 […] », étant précisé, à cet égard, que parmi les conditions posées par ledit article 34 de la loi du 29 août 2008 figure justement celle de disposer d’un passeport en cours de validité et d’un visa ou d’une autorisation de voyage en cours de validité.

Il aurait par conséquent appartenu au demandeur de soumettre des éléments permettant de renverser cette présomption de risque de fuite dans son chef en fournissant des éléments susceptibles d’être qualifiés de garanties de représentation effectives de nature à prévenir le risque de fuite ce qu’il est toutefois resté en défaut de faire. Au contraire, force est de constater que le demandeur a affirmé, dans sa requête introductive d’instance, qu’il souhaiterait « retourner le plus vite possible en France », affirmation qui est, au contraire, de nature à renforcer le risque de fuite tel que retenu ci-avant, lequel se définit comme le risque de se soustraire à la mesure d’éloignement.

Les contestations quant à l’existence d’un risque de fuite sont partant rejetées.

Au vu des considérations qui précèdent, le ministre pouvait, dès lors, a priori valablement, sur base de l’article 120, paragraphe (1), précité, de la loi du 29 août 2008, placer et maintenir le demandeur en rétention afin d’organiser son éloignement.

Quant à l’argumentation du demandeur selon laquelle il n’empêcherait pas la préparation de son retour ou de la procédure d’éloignement, le tribunal retient que la mesure litigieuse n’est pas motivée par une telle considération, de sorte que l’argumentation en question est à rejeter pour défaut de pertinence.

En ce qui concerne, enfin, les contestations du demandeur quant aux démarches entreprises par le ministre en vue de procéder à son éloignement, le tribunal a relevé, dans son jugement, précité, du 13 décembre 2023, qu’il ressortait du dossier administratif que par courrier électronique du 28 novembre 2023 un agent ministériel luxembourgeois du Service Réfugiés – Dublin Unit avait contacté les autorités françaises pour organiser les modalités concrètes du transfert de Monsieur … vers la France. Le tribunal avait encore soulevé qu’il ressortait du dossier administratif qu’à défaut de réponse par les autorités françaises, le même agent ministériel luxembourgeois avait recontacté les autorités françaises en date du 4 décembre 2023, en insistant sur le fait que l’intéressé se trouvait en rétention administrative.

6Enfin, par courrier électronique du 8 décembre 2023, le même agent ministériel avait recontacté une nouvelle fois les autorités françaises en vue de l’organisation du transfert de Monsieur … vers la France. Le tribunal en a conclu qu’au moment où il était amené à statuer, le dispositif de l’éloignement était en cours et toujours poursuivi avec la diligence légalement requise.

En ce qui concerne les démarches entreprises depuis lors pour organiser le transfert du demandeur, il convient de noter qu’il se dégage des explications fournies par le délégué du gouvernement dans son mémoire en réponse ainsi que des éléments du dossier administratif, que le transfert de Monsieur … vers la France n’a pas pu être exécuté pour des raisons organisationnelles, alors que suite à une demande de transfert adressée par les autorités luxembourgeoises au CCPD le 21 décembre 2023, les autorités françaises ont informé ces dernières qu’« aucun service PAF n’a été avisé » « d’une remise Dublin ». Il ressort encore des éléments du dossier administratif que les autorités françaises ont, par courrier électronique du 27 décembre 2023, formellement accepté la reprise en charge de Monsieur … sur base de l’article 18, paragraphe (1), point d) du règlement Dublin III. En date du 4 janvier 2024, les autorités luxembourgeoises ont contacté les autorités françaises afin de fixer une date en vue du transfert de Monsieur …, tout en informant les autorités françaises qu’elles auraient prévu le transfert de Monsieur … vers la France pour le 19 janvier 2024, via le poste frontière de Evrange-Frisange.

Au regard des démarches concrètement entreprises par les autorités luxembourgeoises, le tribunal est amené à conclure que le dispositif d’éloignement est actuellement toujours en cours et poursuivi avec la diligence nécessaire et ce vers la France, tel que souhaité par le demandeur, de sorte que les contestations afférentes du demandeur sont à rejeter.

Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le tribunal conclut qu’en l’état actuel du dossier et en l’absence d’autres moyens, en ce que compris les moyens à soulever d’office, la légalité et le bien-fondé de la décision déférée ne portent pas à critique.

Il s’ensuit que le recours sous analyse est à rejeter comme non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit en la forme le recours principal en réformation ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

condamne le demandeur aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé par :

Alexandra Castegnaro, vice-président, Annemarie Theis, premier juge, Caroline Weyland, juge, 7et lu à l’audience publique du 15 janvier 2024 par le vice-président en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Alexandra Castegnaro Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 15 janvier 2024 Le greffier du tribunal administratif 8


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 49898
Date de la décision : 15/01/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2024-01-15;49898 ?

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