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23/10/2023 | LUXEMBOURG | N°47993

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 23 octobre 2023, 47993


Tribunal administratif N° 47993 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:47993 2e chambre Inscrit le 30 septembre 2022 Audience publique du 23 octobre 2023 Recours formé par Monsieur … et consorts, sans domicile connu, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de police des étrangers

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 47993 du rôle et déposée le 30 septembre 2022 au greffe du tribunal administratif par Maître Nour E. Hellal, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au

nom de Monsieur …, né le … à … (Tunisie), de nationalité tunisienne, ayant été re...

Tribunal administratif N° 47993 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:47993 2e chambre Inscrit le 30 septembre 2022 Audience publique du 23 octobre 2023 Recours formé par Monsieur … et consorts, sans domicile connu, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de police des étrangers

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 47993 du rôle et déposée le 30 septembre 2022 au greffe du tribunal administratif par Maître Nour E. Hellal, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à … (Tunisie), de nationalité tunisienne, ayant été retenu au Centre de rétention au Findel au moment de l’introduction du recours, actuellement sans domicile connu, et de Madame …, née le … à …, de nationalité luxembourgeoise, demeurant à L-…, agissant en leurs noms personnels ainsi qu’en qualité de parents de la mineure …, née le … à …, de nationalité luxembourgeoise, tendant, aux termes de son dispositif, à l’annulation sinon à la réformation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 13 août 2022 « valant ordre de quitter le territoire » ;

Vu l’ordonnance du président du tribunal administratif du 9 novembre 2022, inscrite sous le numéro 48142 du rôle ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 23 décembre 2022 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Daniel Scheerer, en remplacement de Maître Nour E. Hellal, et Madame le délégué du gouvernement Pascale Millim en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 18 septembre 2023.

Monsieur … fit l’objet en date du 13 août 2022 d’un contrôle d’identité par la police grand-ducale à Luxembourg-Gare. Il s’avéra à cette occasion qu’il était en possession d’une carte d’identité italienne portant la mention « non valida per l’espatrio ». En outre, suite à une recherche effectuée dans le Système d’Information Schengen II (SIS), il s’avéra que l’intéressé y était signalé avec la mention « Refuser l’entrée sur le territoire. Interpeller et interroger la personne. Prendre contact avec le bureau SIRENE national. Prendre contact avec l’autorité compétente en vue du renvoi de la personne ».

Par arrêté du 13 août 2022, notifié à l’intéressé le même jour, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après désigné par « le ministre », déclara irrégulier le séjour dece dernier sur le territoire luxembourgeois et lui ordonna de quitter ledit territoire sans délai, ledit arrêté étant motivé comme suit :

« […] Vu les articles 100 et 109 à 115 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration ;

Vu le rapport N° … - 1 du 13 août 2022 établi par la Police Grand-Ducale, Commissariat …, … ;

Attendu que l’intéressé n’est pas en possession d’un passeport en cours de validité ;

Attendu que l’intéressé n’est pas en possession d’un visa en cours de validité ;

Attendu que l’intéressé ne justifie pas l’objet et les conditions envisagées ;

Attendu que l’intéressé ne justifie pas de ressources personnelles suffisantes, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans le pays d’origine ou le transit vers un pays tiers dans lequel son admission est garantie ;

Attendu que l’intéressé n’est ni en possession d’une autorisation de séjour valable pour une durée supérieure à trois mois ni d’une autorisation de travail ;

Arrête :

Art. 1er.- Le dénommé …, né le … à …, de nationalité tunisienne, est en séjour irrégulier sur le territoire luxembourgeois.

Art. 2.- L’intéressé devra quitter le territoire sans délai à destination du pays dont il a la nationalité, la Tunisie ou à destination du pays qui lui aura délivré un document de voyage en cours de validité, ou à destination d’un autre pays dans lequel il est autorisé à séjourner.

Art. 3.- Copie du présent arrêté est remise à l’intéressé. […] ».

Par arrêté séparé du même jour, notifié à l’intéressé à la même date, le ministre ordonna encore son placement en rétention pour une durée d’un mois.

Par jugement du 24 août 2022, inscrit sous le numéro 47829 du rôle, le tribunal administratif débouta Monsieur … du recours contentieux introduit le 17 août 2022 à l’encontre de l’arrêté ministériel du 13 août 2022 ordonnant son placement en rétention, jugement qui fut confirmé en appel par arrêt de la Cour administrative du 7 septembre 2022, inscrit sous le numéro 47876C du rôle.

Par arrêtés du 12 septembre et du 11 octobre 2022, notifiés à l’intéressé respectivement les 13 septembre et 13 octobre 2022, le ministre prorogea la susdite mesure de placement en rétention, à chaque fois, pour une nouvelle durée d’un mois.

Par courrier de son litismandataire du 15 septembre 2022, Monsieur … demanda au ministre « […] à titre exceptionnel de bien vouloir le laisser résider auprès de sa compagne, et de sa fille à …, le temps qu’il puisse régulariser sa situation. », demande qui fut rejetée par courrier du ministre du 21 septembre 2022.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 30 septembre 2022, inscrite sous le numéro 47994 du rôle, Monsieur … fit introduire un recours contentieux à l’encontre de l’arrêté ministériel, prémentionné, du 12 septembre 2022, recours dont il fut débouté par jugement du 10 octobre 2022, confirmé en appel par arrêt de la Cour administrative du 25 octobre 2022, inscrit sous le numéro 48056C du rôle.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 30 septembre 2022, inscrite sous le numéro 47993 du rôle, Monsieur … ainsi que sa compagne, Madame …, agissant en leurs noms personnels ainsi qu’en qualité de parents de la mineure …, ont fait introduire un recours tendant, aux termes de son dispositif, à l’annulation, sinon à la réformation de la décision ministérielle, précitée, du 13 août 2022 « valant ordre de quitter le territoire ».

Par courrier de son litismandataire du 20 octobre 2022, Monsieur … fit introduire une demande d’autorisation de séjour en tant que membre de famille d’un citoyen de l’Union européenne sur base de l’article 12 (2) 3 b) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration.

Par arrêté du 3 novembre 2022, notifié à l’intéressé le 10 novembre 2022, le ministre rapporta sa décision de retour du 13 août 2022 et prit l’arrêté suivant :

« […] Vu les articles 100 paragraphe 1 et paragraphe 2, 109 à 110 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration ;

Revu ma décision de retour du 13 août 2022 ;

Considérant que l’intéressée est démunie d’un document de voyage valable ;

Considérant que l’intéressé est marié avec une citoyenne de l’Union ;

Considérant que l’intéressé s’est maintenu sur le territoire au-delà de la durée de trois mois à compter de son entrée sur le territoire ;

Arrête :

Art. 1er.- La décision de retour du 13 août 2022 est rapportée et remplacée par le présent arrêté.

Art. 2.- Le nommé …, né le … à …, de nationalité tunisienne, est en séjour irrégulier sur le territoire luxembourgeois.

Art. 3.- L’intéressé est tenu de se rendre immédiatement vers l’Italie, Etat membre qui lui a délivré un titre de séjour.

Art. 4.- Copie du présent arrêté est remise à l’intéressé. […] ».

Par requête déposée le 7 novembre 2022, inscrite sous le numéro 48142 du rôle, Monsieur … ainsi que sa compagne, Madame …, agissant en leurs noms personnels ainsi qu’en qualité de parents de la mineure …, ont encore introduit une demande tendant à voir ordonner le sursis à exécution, sinon une mesure de sauvegarde par rapport à l’arrêté, précité, du 13 août 2022, recours dont ils furent déboutés par ordonnance du président du tribunal administratif du 9 novembre 2022.

Par jugement du 9 novembre 2022, inscrit sous le numéro 48118 du rôle, le tribunal administratif débouta Monsieur … du recours contentieux introduit le 31 octobre 2022 à l’encontre de l’arrêté ministériel du 11 octobre 2022 ordonnant la prorogation de son placement en rétention.

Concernant le recours contre la décision de retour et l’ordre de quitter le territoire contenus dans l’arrêté ministériel du 13 août 2022, dont le tribunal est saisi, les demandeurs requièrent, aux termes de leur dispositif, l’annulation sinon la réformation dudit arrêté.

Quand bien même une partie a formulé un recours en annulation à titre principal et un recours en réformation à titre subsidiaire, le tribunal a l’obligation d’examiner en premier lieu la possibilité d’exercer un recours en réformation contre la décision critiquée.

Etant donné qu’aucune disposition légale ne prévoit un recours au fond en la présente matière, le tribunal est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre subsidiaire contre l’arrêté ministériel du 13 août 2022. Il est par contre compétent pour connaître du recours principal en annulation.

A l’audience des plaidoiries du 18 septembre 2023, le tribunal a soulevé d’office la question du maintien de l’objet du recours introduit contre l’arrêté ministériel du 13 août 2022, dans la mesure où celui-ci a été rapporté et remplacé par l’arrêté ministériel du 3 novembre 2022, notifié en mains propres à Monsieur … en date du 10 novembre 2022.

Tant le litismandataire des demandeurs que le délégué du gouvernement se sont rapportés à prudence de justice quant à cette question.

Dans ce contexte, il y a lieu de rappeler que la recevabilité d’un recours est conditionnée en principe par l’existence et la subsistance d’un objet, qui s’apprécie du moment de l’introduction du recours jusqu’au prononcé du jugement. Ainsi, si l’acte dont l’annulation est recherchée à travers le recours disparaît, le recours devient sans objet, le demandeur n’ayant a priori et sauf circonstances particulières, plus aucun intérêt à poursuivre un recours contre un acte ayant disparu et qui ne lui fait plus grief1.

En l’espèce, si au moment de l’introduction du recours sous analyse, celui-ci avait certes un objet, à savoir l’annulation de l’arrêté ministériel du 13 août 2022, ladite décision a entretemps été rapportée et remplacée par l’arrêté du 3 novembre 2022 par lequel le ministre a de nouveau constaté le séjour irrégulier de Monsieur … sur le territoire luxembourgeois, tout en lui ordonnant de se rendre immédiatement en Italie, Etat membre qui lui a délivré un titre de séjour.

Au vu des considérations qui précèdent et compte tenu de l’arrêté du ministre du 3 novembre 2022, le recours introduit à l’encontre de la décision du 13 août 2022 a perdu son objet, de sorte à encourir le rejet.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours subsidiaire en réformation ;

rejette le recours principal en annulation pour défaut d’objet ;

1 Trib. adm. 20 octobre 2010 n° 26758 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 33 et les autres références y citées.condamne les demandeurs aux frais et dépens.

Ainsi jugé par :

Alexandra Bochet, premier juge, Annemarie Theis, premier juge, Caroline Weyland, juge, et lu à l’audience publique du 23 octobre 2023 par le premier juge Alexandra Bochet, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Alexandra Bochet Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 24 octobre 2023 Le greffier du tribunal administratif 5


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 47993
Date de la décision : 23/10/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-10-23;47993 ?

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