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23/10/2023 | LUXEMBOURG | N°46574

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 23 octobre 2023, 46574


Tribunal administratif N° 46574 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:46574 2e chambre Inscrit le 14 octobre 2021 Audience publique du 23 octobre 2023 Recours formé par la société à responsabilité limitée “A” SARL, …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes, et contre des bulletins rectificatifs de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux, de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal en matière d’impôt

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46574 du rôle et d...

Tribunal administratif N° 46574 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:46574 2e chambre Inscrit le 14 octobre 2021 Audience publique du 23 octobre 2023 Recours formé par la société à responsabilité limitée “A” SARL, …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes, et contre des bulletins rectificatifs de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux, de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal en matière d’impôt

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46574 du rôle et déposée le 14 octobre 2021 au greffe du tribunal administratif par Maître Marianne Goebel, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée “A” SARL, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre du commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son gérant unique actuellement en fonctions, tendant, suivant son dispositif, à la réformation, sinon à l’annulation 1) de la décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 14 juillet 2021 portant rejet de la réclamation introduite contre les bulletins de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux, de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal des années 2016 à 2019, tous émis le 11 novembre 2020 et 2) des bulletins rectificatifs de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux des années 2016 à 2019, et des bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal de l’année 2016, tous émis le 25 août 2021 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 10 janvier 2022 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 3 février 2022 par Maître Marianne Goebel pour compte de la société à responsabilité limitée “A” SARL, préqualifiée ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les actes déférés ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Allyson Noel, en remplacement de Maître Marianne Goebel, et Monsieur le délégué du gouvernement Steve Collart en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 5 juin 2023.

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Suite au dépôt des déclarations pour l’impôt sur le revenu des collectivités et pour l’impôt commercial communal des années 2016 à 2019, le bureau d’imposition … de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le bureau d’imposition », informa la société à responsabilité limitée “A” SARL, ci-après désignée par « la société “A” », par courrier du 5 octobre 2020, sur le fondement du paragraphe 205, alinéa 3, de la loi générale 1des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », qu’il envisageait de dévier des déclarations fiscales telles que déposées par ladite société pour les exercices 2016 à 2019, tout en l’invitant à formuler ses éventuelles objections de façon écrite jusqu’au 30 octobre 2020. Ledit courrier est formulé comme suit :

« […] En vertu du §205(3) de la loi générale des impôts je vous informe que le bureau d’imposition envisage de s’écarter de vos déclarations pour l’impôt sur le revenu et l’impôt commercial des années 2016 à 2019. A ce sujet, veuillez noter que le courrier du 15/09/2020 est à ignorer en raison d’un calcul inexact. (cf. comptes annuels déposés sur le RCS) Respectant le principe de l’instruction contradictoire dans le cadre de la procédure d’imposition, je vous soumets pour analyse les points en question :

Les voitures … (utilisation jusqu’en novembre 2016), … (janvier 2017 - janvier 2018), … (mars 2018 - juillet 2019), … et … (avril 2019 - aujourd’hui) sont mises à la disposition de M. “x”, gérant unique de la société “A” S.A R.L., dans le cadre d’un contrat de leasing. Le bureau d’imposition … estime que, sur base des informations présentées par ladite société en date du 28 août 2020, la voiture du modèle … est suffisante pour garantir les déplacements en France. Sous l’aspect du loyer disproportionnel des différents modèles, il s’avère que seul le loyer mensuel du modèle … à hauteur … EUR (limite forfaitaire à hauteur de … EUR pour les années 2016 et 2017) ainsi que les frais afférents (Primes d’assurance, Entretiens et réparations sur matériel roulant, Carburants & Taxe) sont à considérer comme dépenses d’exploitation tout en reprenant pour chaque année la quote-part privée pour un tel véhicule.

En effet, tous les autres frais jugés excessifs des voitures …, …, … et … constituent une distribution cachée de bénéfice qui est, par la suite, à comprendre dans le revenu imposable en vertu de l’article 164 L.I.R. étant donné qu’il s’agit d’un avantage alloué à l’actionnaire dont normalement il n’aurait pas bénéficié s’il n’avait pas eu cette qualité. Par conséquent, une retenue sur les revenus de capitaux en vertu de l’article 146 L.I.R. est à effectuer sur l’avantage en nature alloué à M. “x” pour les années en question. (cf. Annexes) […] Bien disposé de vous entendre en cas de désaccord, je vous prie de formuler vos objections éventuelles pour le 30 octobre 2020 au plus tard. […] ».

Par courrier recommandé de son litismandataire du 19 octobre 2020, la société “A” formula ses observations à l’égard de l’imposition envisagée par le bureau d’imposition.

Par courrier du 3 novembre 2020, le bureau d’imposition informa la société “A” que ses objections lui parvenues le 21 octobre 2020 avaient été jugées comme n’étant pas assez pertinentes, de sorte qu’il procéderait à l’imposition en vertu du paragraphe 205, alinéa 3 AO.

En date du 11 novembre 2020, le bureau d’imposition émit à l’égard de la société “A” les bulletins de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux en y indiquant (i) pour l’année 2016 : « […] La société n’a pas pris la retenue à sa charge […] 15,000 % de EUR … – EUR … Base d’imposition totale et montant de la retenue repris au décompte […] 2 base : EUR … retenue : EUR … Motif et remarques […] Retenue sur la distribution cachée de bénéfice à hauteur de … EUR. Imposition svt.

lettre du 05/10/2020. […] », (ii) pour l’année 2017 :

« […] La société n’a pas pris la retenue à sa charge […] 15,000 % de EUR … – EUR … Base d’imposition totale et montant de la retenue repris au décompte […] base : EUR … retenue : EUR … Motif et remarques […] Retenue sur la distribution cachée de bénéfice à hauteur de … EUR. Imposition svt.

lettre du 05/10/2020. […] », (iii) pour l’année 2018 :

« […] La société n’a pas pris la retenue à sa charge […] 15,000 % de EUR … – EUR … Base d’imposition totale et montant de la retenue repris au décompte […] base : EUR … retenue : EUR … Motif et remarques […] Retenue sur la distribution cachée de bénéfice à hauteur de … EUR. Imposition svt.

lettre du 05/10/2020. […] », et (vi) pour l’année 2019 :

« […] La société n’a pas pris la retenue à sa charge […] 15,000 % de EUR … – EUR … Base d’imposition totale et montant de la retenue repris au décompte […] base : EUR … retenue : EUR … Motif et remarques […] 3Retenue sur la distribution cachée de bénéfice à hauteur de … EUR. Imposition svt.

lettre du 05/10/2020. […] ».

En date du même jour, le bureau d’imposition émit encore à l’égard de la société “A” les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités des années 2016 à 2019 en ajoutant une distribution cachée de bénéfices de respectivement … EUR, … EUR, … EUR et … EUR et en y indiquant à chaque fois « […] Distribution cachée de bénéfice, voir explications sur le bulletin de la retenue sur les revenus de capitaux […] L’imposition diffère de la déclaration sur les points suivants […] Imposition svt. lettre du 05/10/2020 […] ».

Toujours le 11 novembre 2020, le bureau d’imposition émit à l’égard de la société “A” les bulletins de l’impôt commercial communal des années 2016 à 2019 en y indiquant à chaque fois « […] Détail concernant l’établissement de la base d’assiette globale […] Imposition svt.

lettre du 05/10/2020 […] ».

Par un courrier recommandé de son litismandataire du 11 décembre 2020, la société “A” fit introduire une réclamation contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités, de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux et de l’impôt commercial communal des années 2016 à 2019, ainsi que contre le décompte relatif à ces bulletins émis à la même date, auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le directeur », qui fut réceptionnée le 14 décembre 2020 et portée au rôle du contentieux sous le numéro ….

Par décision du 14 juillet 2021, le directeur déclara (i) irrecevable la réclamation introduite par la société “A” contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2017, 2018 et 2019, et (ii) partiellement fondée la réclamation introduite contre le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2019, tout en ramenant, par réformation, la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2019 à … EUR, et en reformant in pejus les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal de l’année 2016 ainsi que les bulletins de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux des années 2016, 2017 et 2018. Il déclara, par ailleurs, irrecevable la réclamation introduite contre le décompte relatif aux bulletins d’imposition émis le 11 novembre 2020.

Ladite décision est libellée dans les termes suivants :

« […] Vu la requête introduite le 14 décembre 2020 par Maître Marianne Goebel, au nom de la société à responsabilité limitée “A”, avec siège social à L-…, pour réclamer contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités, de la base d’assiette de l’impôt commercial et de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux, tous relatifs aux années 2016 à 2019 et émis en date du 11 novembre 2020, ainsi que contre le décompte relatif à ces bulletins émis à la même date ;

Vu le dossier fiscal ;

Vu les §§ 102, 107, 228, 238, 254, alinéa 2 et 301 de la loi générale des impôts (AO) ;

Considérant que si l’introduction de plusieurs instances par une seule et même requête n’est incompatible, en l’espèce, ni avec le secret fiscal, ni avec les règles de compétence et de procédure, elle ne dispense pas d’examiner chaque acte attaqué en lui-même et selon ses 4propres mérites et ne saurait imposer une jonction qu’il est loisible au directeur des contributions de prononcer lorsque les instances lui paraissent suffisamment connexes ; qu’il n’y a pas lieu de la refuser en la forme ;

Considérant que les réclamations ont été introduites par qui de droit (§ 238 AO), dans les forme (§ 249 AO) et délai (§ 245 AO) de la loi, qu’elles sont partant recevables ;

Considérant en guise de rappel, que le décompte n’a qu’une valeur de simple renseignement et n’engendre aucun droit nouveau au profit du Trésor ni aucune obligation nouvelle à charge du contribuable ; qu’il en résulte que la voie de la réclamation contentieuse n’est pas admise contre le décompte des montants imputés sur la cote d’impôt (cf. déjà arrêt du Conseil d’Etat du 16 juillet 1982, n° 6502 du rôle, Tribunal administratif du 26 avril 1999, n° 10668 du rôle) ;

Considérant que la réclamante fait grief au bureau d’imposition d’avoir admis des distributions cachées de bénéfices en relation avec des frais de véhicules de transport déclarés comme dépenses d’exploitation ;

Considérant qu’en vertu du § 243 AO, une réclamation régulièrement introduite déclenche d’office un réexamen intégral de la cause, sans égard aux conclusions et moyens du réclamant, la loi d’impôt étant d’ordre public ;

qu’à cet égard, le contrôle de la légalité externe de l’acte doit précéder celui du bien-fondé ; qu’en l’espèce la forme suivie par le bureau d’imposition ne prête pas à critique ;

Des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2017, 2018 et 2019 Considérant qu’aux termes du § 232, alinéa 1er AO, un bulletin d’impôt ne peut être attaqué qu’au cas où le contribuable se sent lésé par le montant de l’impôt fixé ou conteste son assujettissement à l’impôt ;

Considérant que le montant de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal des années 2017, 2018 et 2019 a été fixé à chaque fois à 0 (zéro) euro ;

Considérant qu’il en découle que les réclamations contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2017, 2018 et 2019 doivent être déclarées irrecevables pour défaut d’intérêt ;

Des autres bulletins Considérant qu’au cours des exercices litigieux, la réclamante a fait valoir à titre de dépenses d’exploitation des frais de voitures se décomposant comme suit :

2016 2017 2018 2019 Leasing … … … … Entretiens et réparations … … … … 5Assurances … … … … Taxe … … … … Carburants … … … … Amortissements … … … … Total des frais … … … … Frais refacturés à l’associé (selon … … … … facture) Total … … … … Considérant que le bureau d’imposition a, pour chaque exercice litigieux, considéré comme distribution cachée de bénéfices envers les associés de la réclamante une quote-part d’utilisation privée de ces frais aux motifs que « sur base des informations présentées par ladite société en date du 28 août 2020, la voiture du modèle … est suffisante pour garantir les déplacements en France. Sous l’aspect du loyer disproportionnel des différents modèles, il s’avère que seul le loyer mensuel du modèle … à hauteur de … EUR (limite forfaitaire à hauteur de … EUR pour les années 2016 et 2017) ainsi que les frais afférents (Primes d’assurance, Entretiens et réparations sur matériel roulant, Carburants et Taxe) sont à considérer comme dépenses d’exploitation tout en reprenant pour chaque année la quote-part privée pour un tel véhicule. » ;

Considérant que la réclamante conteste les redressements opérés par le bureau ;

qu’elle explique que l’activité de la réclamante consiste en la gestion de 6 restaurants basés en France et au Luxembourg, ce qui implique de nombreux déplacements ; que, dans le cadre de ces activités, les deux gérants de la réclamante utilisent chacun un véhicule, la dame “y” utilisant le véhicule « … » et le sieur “x” le deuxième véhicule (différents modèles au cours des exercices litigieux) ; qu’elle concède que les véhicules sont également utilisés à titre privé par les gérants ; qu’il ressort d’ailleurs du dossier fiscal qu’au titre de l’exercice 2017, la réclamante a facturé au sieur “x” un montant de … euros hors TVA à titre de frais de déplacement privés ;

Considérant qu’afin de démontrer l’utilisation à titre professionnel, la réclamante verse des relevés des déplacements effectués au cours des exercices litigieux avec lesdits véhicules, à l’exception du véhicule « … » pour lequel aucun relevé n’est fourni, incluant un calcul des parts privées/parts professionnelles des différents véhicules ainsi que des extraits du grand livre relatifs à ces frais ; qu’elle soutient sur cette base avoir « démontré la cause professionnelle (« die berufliche Veranlassung ») de l’utilisation des véhicules et plus particulièrement du pourcentage de l’utilisation professionnelle effective des véhicules en présentant les carnets de bords et détails de calculs » ; qu’elle est en outre d’avis que « l’intégralité des frais de véhicules exposés dans ses déclarations fiscales auraient dû être déductibles sans considération d’un montant forfaitaire fixé arbitrairement par le Bureau d’imposition » ;

Considérant qu’aux termes de l’article 164, alinéa 3 de la loi concernant l’impôt sur le revenu (L.I.R.), il y a distribution cachée de bénéfices si un associé, sociétaire ou intéressé, reçoit directement ou indirectement des avantages d’une société ou d’une association dont, normalement, il n’aurait pas bénéficié s’il n’avait pas eu cette qualité ; que « les distributions cachées de bénéfices visées par l’article 164 (3) L.I.R. existent si un associé ou un actionnaire reçoit directement ou indirectement d’une société des avantages qui s’analysent pour cette dernière en un emploi de revenus sans contrepartie effective et que l’associé ou actionnaire 6n’aurait pas pu obtenir en l’absence de ce lien. La situation concernée est celle où un gestionnaire prudent et avisé n’aurait pas accordé un avantage similaire à un tiers. » (Cour administrative du 11 février 2009, n° 24642C du rôle) ;

Considérant qu’aux termes de l’article 45, alinéa 1er L.I.R., les dépenses provoquées exclusivement par l’entreprise constituent des dépenses d’exploitation déductibles ; que c’est à juste titre que la réclamante rappelle que « le droit fiscal soumet à l’impôt l’activité à but de lucre du contribuable qu’il a effectivement réalisée, mais n’affecte pas sa liberté individuelle de définir lui-même l’envergure de son initiative entrepreneuriale, il incombe au seul contribuable de déterminer l’étendue de son activité commerciale, les moyens y engagés et le niveau de profit qu’il entend en tirer. Par voie de conséquence, le contribuable est seul juge de l’opportunité d’une dépense d’exploitation et la notion du lien de causalité n’implique aucun contrôle si la dépense était nécessaire pour l’activité ou si elle était effectivement susceptible de profiter à l’exploitation. Il faut et il suffit que la dépense ait trouvé sa cause exclusive dans l’activité commerciale. » (Cour administrative du 9 août 2017, n° 39043C du rôle) ; qu’eu égard à la position prise par le bureau d’imposition selon laquelle « la voiture du modèle … est suffisante pour garantir les déplacements en France », il échet de constater que cette approche ne procède pas d’un examen du lien de causalité entre les dépenses litigieuses et l’activité de la réclamante ; que partant, la méthodologie appliquée par le bureau est à rejeter ;

Considérant qu’il convient néanmoins de rappeler qu’en tout état de cause, le directeur des contributions, saisi par une réclamation au sens du § 228 AO, a le devoir de procéder d’office à un réexamen intégral de la cause (§ 243, alinéa 1er AO), tant en faveur qu’en défaveur des réclamants ; que, dans ce contexte, le directeur n’est lié, ni par les moyens invoqués par les réclamants (§ 243, alinéa 2 AO) ni par les calculs et conclusions du bureau d’imposition ;

Considérant que les frais concernant les déplacements sont en principe déductibles, sous réserve, comme établi ci-avant, de la présentation d’éléments de preuve justifiant leur relation avec les revenus professionnels ; que conformément à la jurisprudence constante, il incombe au contribuable d’établir le lien causal exclusif entre l’activité de l’entreprise et la dépense engagée (voir par exemple Tribunal administratif du 18 octobre 2017, n° 38667 du rôle) ; qu’un carnet de bord dûment tenu, contenant l’ensemble des déplacements effectués, leur durée et leur destination, le but poursuivi et son utilité pour la société permet une séparation nette, aisément et objectivement contrôlable entre déplacements privés et professionnels ;

Considérant que les relevés versés par la réclamante ne permettent cependant pas un contrôle effectif des déplacements ; que ces derniers se résument à indiquer approximativement les kilomètres parcourus (les chiffres étant arrondis) ; que ne sont mentionnés que des noms de villes, voire uniquement des abréviations non explicitées (par ex. …, …, …, …, …, …), ne permettant pas de déterminer le point de départ ou la destination exacte ; qu’aucun nom ou adresse de client n’est mentionné ; que le relevé ne contient aucun descriptif même sommaire des activités professionnelles ou privées relatives aux déplacements ; qu’il s’en suit que les relevés fournis par la réclamante sont à écarter pour défaut de pertinence et de force probante ;

Considérant que les déplacements mentionnés dans les relevés ne sont par ailleurs corroborés par aucun élément objectivement vérifiable permettant de les lier à des déplacements professionnels ; que la réclamante indique gérer 6 restaurants alors que les 7relevés contiennent bien plus que 6 destinations ; que la simple production d’extraits du grand livre et de factures se rapportant aux coûts d’achat de voiture, aux frais d’entretien ou autres frais liés ne sauraient servir de moyen de preuve concluant pour justifier le bien-fondé des déplacements professionnels ;

Considérant qu’un dirigeant même moyennement diligent et consciencieux, tendant à assurer la rentabilité d’une exploitation commerciale, n’assumerait pas des frais dont la relation avec l’activité de la société n’est pas clairement établie ;

Considérant qu’il n’est pas litigieux que le sieur “x”, gérant de la réclamante, en est également l’associé unique ; que depuis le 13 mars 2018, la dame “y”, épouse du sieur “x”, a été nommée gérante administrative de la réclamante ; qu’il n’est pas contesté que les véhicules sont utilisés exclusivement par eux de sorte à être de nature à pouvoir profiter en même temps à l’activité de la réclamante et à leur vie privée ;

Considérant que la réclamante a versé au dossier deux contrats de prestations de services conclus en 2014, tous deux relatifs à l’assistance à la gestion de restaurants en France et au Luxembourg ; qu’il ressort des contrats que les services dont il est question sont prestés par le sieur “x”, fort d’une expérience dans le domaine ; qu’eu égard aux activités exercées, il est dès lors admis que celui-ci soit amené à effectuer des déplacements en relation directe avec l’exercice de ces activités, de sorte que la nécessité de déplacements professionnels ne saurait être mise en doute en son chef ;

Considérant que la réclamante n’apporte cependant aucun élément justifiant ou expliquant la nécessité de déplacements professionnels pour la dame “y” en sa qualité de gérante administrative ; qu’aucun relevé ni élément n’est d’ailleurs fourni pour le véhicule … ;

Considérant qu’il ressort de ce qui précède un faisceau d’indices concordants permettant de conclure que cet avantage tire son origine de la relation particulière entre les parties liées par le même bénéficiaire effectif et représente une distribution cachée de bénéfices ;

Considérant que « l’administration peut supposer une diminution indue des bénéfices de l’entreprise si les circonstances la rendent probable, sans avoir à la justifier exactement. Il y a alors renversement de la charge de la preuve, le contribuable devant prouver qu’il n’y a pas diminution de bénéfice ou que celle-ci est économiquement justifiée, et non seulement motivée par des relations particulières entre deux entités liées. » (Tribunal administratif du 9 juin 2008, n° 23324 du rôle, Cour administrative du 11 février 2009, n° 24642C du rôle) ;

Considérant qu’à défaut d’éléments probants de nature à départager les frais privés des frais en relation avec l’activité professionnelle de la réclamante, la réclamante ne laisse d’autre choix que de procéder à la taxation conformément au § 217 AO ;

Considérant en effet que « La taxation d’office consiste en une évaluation unilatérale de la base imposable par le fait de l’administration. Le but de la taxation d’office est d’aboutir, à défaut de pouvoir évaluer la valeur réelle, à une valeur probable ou approximative de la base imposable, le contribuable devant s’imputer à lui-même les conséquences éventuellement désavantageuses de la taxation d’office. La prise en compte pour l’administration fiscale d’une 8marge de sécurité est licite, dès lors qu’elle est faite avec mesure et modération. » (Cour administrative du 11 juin 2002, n° 14725C du rôle) ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la quote-part privée des frais de voiture est évaluée à 80% ; que partant les distributions cachées de bénéfices en relation avec les frais de voiture se chiffrent comme suit :

2016 2017 2018 2019 Total des frais … … .- … … Taux quote-part privée 80% 80% 80% 80% Quote-part privée … … … … Reprise part privée déclarée - … - … Distribution cachée de bénéfices … … … … Considérant qu’en vertu des dispositions de l’article 146 L.I.R., les distributions de bénéfices tant ouvertes que cachées doivent faire l’objet d’une retenue d’impôt sur les revenus de capitaux ;

Considérant qu’aux termes de l’article 148, alinéa 1er L.I.R., le taux de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux est de 15%, à moins que le débiteur des revenus ne prenne à sa charge l’impôt à retenir, ce qui, même en matière de distribution cachée de bénéfices, n’est jamais présumé ;

Considérant que les redressements des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal de l’année 2016 et les redressements des bulletins de la retenue sur revenus de capitaux des années 2016, 2017, 2018 et 2019 font l’objet des annexes 1 et 2 qui forment des parties intégrantes de la présente décision ;

Considérant que pour le surplus, les impositions sont conformes à la loi et aux faits de la cause et ne sont d’ailleurs pas autrement contestées ;

PAR CES MOTIFS dit la réclamation contre le décompte irrecevable, dit les réclamations contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2017, 2018 et 2019 irrecevables pour défaut d’intérêt, reçoit les autres réclamations en la forme, dit la réclamation contre le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2019 partiellement fondée, réformant, ramène la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2019 à … euros, réformant in pejus en ce qui concerne les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal de l’année 2016 et les bulletins de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux des années 2016, 2017 et 2018, 9 fixe l’impôt sur le revenu des collectivités de l’année 2016, y compris la contribution au fonds pour l’emploi, à … euros, établit la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2016 à … euros, fixe l’impôt commercial communal de l’année 2016 à … euros, fixe la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2016 à … euros, fixe la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2017 à … euros, fixe la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2018 à … euros, renvoie au bureau d’imposition pour exécution. […] ».

En date du 25 août 2021, le bureau d’imposition émit à l’égard de la société “A” les bulletins rectificatifs de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux en y indiquant (i) pour l’année 2016 :

« […] La société n’a pas pris la retenue à sa charge […] 15,000 % de EUR … = EUR … Base d’imposition totale et montant de la retenue repris au décompte […] base : EUR … retenue : EUR … Extourne d’un débit antérieur - … Motif et remarques […] Annulation du bulletin du 11/11/2020 … Retenue sur la distribution cachée de bénéfice à hauteur de … EUR. Imposition svt.

décision directoriale […] », (ii) pour l’année 2017 :

« […] La société n’a pas pris la retenue à sa charge […] 15,000 % de EUR … = EUR … Base d’imposition totale et montant de la retenue repris au décompte […] base : EUR … retenue : EUR … Extourne d’un débit antérieur - … Motif et remarques […] Annulation du bulletin du 11/11/2020 … 10Retenue sur la distribution cachée de bénéfice à hauteur de … EUR. Imposition svt.

décision directoriale […] », (iii) pour l’année 2018 :

« […] La société n’a pas pris la retenue à sa charge […] 15,000 % de EUR … = EUR … Base d’imposition totale et montant de la retenue repris au décompte […] base : EUR … retenue : EUR … Extourne d’un débit antérieur - … Motif et remarques […] Annulation du bulletin du 11/11/2020 … Retenue sur la distribution cachée de bénéfice à hauteur de … EUR. Imposition svt.

décision directoriale […] », et (vi) pour l’année 2019 :

« […] La société n’a pas pris la retenue à sa charge […] 15,000 % de EUR … = EUR … Base d’imposition totale et montant de la retenue repris au décompte […] base : EUR … retenue : EUR … Extourne d’un débit antérieur - … Motif et remarques […] Annulation du bulletin du 11/11/2020 … Retenue sur la distribution cachée de bénéfice à hauteur de … EUR. Imposition svt.

décision directoriale […] ».

En date du même jour, le bureau d’imposition émit encore à l’égard de la société “A” le bulletin rectificatif de l’impôt sur le revenu des collectivités de l’année 2016 retenant une distribution cachée de bénéfices de … EUR et en y indiquant « […] Distribution cachée de bénéfice, voir explications sur le bulletin de la retenue sur les revenus de capitaux […] L’imposition diffère de la déclaration sur les points suivants […] Imposition suivant décision directoriale […] ».

Toujours le 25 août 2021, le bureau d’imposition émit à l’égard de la société “A” le bulletin rectificatif de l’impôt commercial communal de l’année 2016 en y indiquant « […] Détail concernant l’établissement de la base d’assiette globale […] Imposition décision directoriale […] ».

11Par requête déposée le 14 octobre 2021 au greffe du tribunal administratif, la société “A” a fait introduire un recours en réformation, sinon en annulation 1) de la décision du directeur du 14 juillet 2021 portant rejet de la réclamation introduite contre les bulletins de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux, de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal des années 2016 à 2019, tous émis le 11 novembre 2020 et 2) des bulletins rectificatifs de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux des années 2016 à 2019, et des bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal de l’année 2016, tous émis le 25 août 2021.

1) Quant à la compétence du tribunal et à la recevabilité du recours Conformément aux dispositions combinées du § 228 AO et de l’article 8, paragraphe (3), point 1. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », le tribunal est compétent pour statuer comme juge du fond sur le recours dirigé par un contribuable contre une décision du directeur ayant statué sur les mérites d’une réclamation de sa part contre un bulletin de l’impôt.

Le tribunal est dès lors compétent pour connaître du recours principal en réformation introduit à l’encontre de la décision directoriale précitée du 14 juillet 2021.

Il n’y a partant pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation en ce qu’il est dirigé contre cette même décision.

A l’audience des plaidoiries, le tribunal a soulevé d’office la question de la recevabilité du recours en ce qu’il est dirigé contre les bulletins de l’impôt rectificatifs émis le 25 août 2021.

Tant le litismandataire de la société “A” que le délégué du gouvernement se sont rapportés à prudence de justice en ce qui concerne la question de la recevabilité du recours soulevée.

En l’espèce, le directeur a statué sur la réclamation introduite en date du 14 décembre 2020 contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités, de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux et de l’impôt commercial communal des années 2016 à 2019, tous émis le 11 novembre 2020, en la déclarant partiellement fondée, et en ramenant la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2019 à … euros, tout en réformant in pejus l’imposition pour les années 2016 à 2018 relatives à l’impôt sur le revenu des collectivités, l’impôt commercial communal et les revenus de capitaux. Le directeur a ensuite renvoyé le dossier au bureau d’imposition pour exécution suite à quoi celui-ci a émis, le 25 août 2021, les bulletins rectificatifs de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux des années 2016 à 2019, et les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal de l’année 2016.

Dans la mesure où ces bulletins rectificatifs trouvent leur fondement dans la décision directoriale du 14 juillet 2021 en exécution de laquelle ils ont été pris, leur sort suit nécessairement celui de la décision directoriale dont le tribunal a à connaître du bien-fondé.

Il s’ensuit que le recours en ce qu’il est dirigé contre les bulletins rectificatifs de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux des années 2016 à 2019, et les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal de l’année 2016, 12tous émis le 25 août 2021 à la suite de la décision directoriale déférée et se basant sur celle-ci, est irrecevable1.

En revanche, le recours principal en réformation dirigé contre la décision directoriale du 14 juillet 2021 est recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi.

2) Quant au fond Moyens et arguments des parties A l’appui de son recours et en fait, après avoir mentionné qu’elle aurait été créée le 10 mai 2010 et cité l’article 3 de ses statuts relatif à son objet social, la société demanderesse explique qu’en date du 19 mai 2010, Monsieur “x” aurait été nommé gérant unique pour une durée indéterminée. Le 13 mars 2018, Madame “y” aurait été nommée gérante administrative jusqu’au 31 décembre 2020, de sorte que durant cette période, les deux auraient formé son conseil de gérance.

Elle continue en expliquant que l’activité des deux gérants aurait consisté en la gestion de restaurants basés en France et au Luxembourg, ce qui aurait impliqué de nombreux déplacements et donc l’utilisation par chacun d’eux d’un véhicule pour lesquels des frais professionnels auraient été déclarés.

Elle avance que dans le cadre des déclarations fiscales relatives aux années 2016 à 2019, elle aurait fait état de dépenses professionnelles en lien avec l’utilisation de véhicules par Monsieur “x”, d’une part, à savoir (i) une voiture de la marque …, modèle …, de janvier 2016 à novembre 2016, (ii) une voiture de la marque …, modèle …, de janvier 2017 à mars 2018, (iii) une voiture de la marque …, modèle …, de mars 2018 à juillet 2019, et (iv) une voiture de la marque …, modèle …, à partir d’avril 2019, et par Madame “y”, d’autre part, à savoir une voiture de la marque …, modèle …, d’avril 2018 jusqu’à décembre 2020, tout en opérant une distinction entre l’utilisation professionnelle et privée desdits véhicules.

Ainsi, les frais professionnels évalués pour les années 2016 à 2019 auraient été les suivants :

frais 2016 2017 2018 2019 Leasing mobilier … EUR … EUR … EUR … EUR Entretien et réparation sur … EUR … EUR … EUR … EUR matériel roulant Primes d’assurances … EUR … EUR … EUR … EUR Taxe … EUR … EUR … EUR … EUR Carburant … EUR … EUR … EUR … EUR 1 Voir en ce sens : Trib. adm., 29 mars 2023, n° 46641 du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu.

13Amortissement/ acomptes … EUR … EUR … EUR Total … EUR … EUR … EUR … EUR Part privée Evaluation à … EUR + … EUR + 15% sans … EUR … EUR … EUR carnet de bord (…) (…) Elle donne à considérer que si ladite répartition des frais entre l’utilisation professionnelle et privée des véhicules, telle que détaillée dans les carnets de bord, n’avait pas été remise en question par le bureau d’imposition dans le cadre des bulletins d’imposition émis le 11 novembre 2020, en ce que celui-ci aurait retenu les mêmes taux de quote-part privée qu’elle-même, à savoir 15% pour 2016, 11,32% pour 2017, 14,80% pour 2018 et 16,16% pour 2019, il aurait néanmoins jugé les frais en relation avec lesdits véhicules comme étant excessifs, de sorte à avoir retenu l’existence de distributions cachées de bénéfices pour ces mêmes années.

Tout en mettant en avant que le directeur, dans le cadre de sa décision sur réclamation, lui aurait donné en partie raison en décidant que l’approche du bureau d’imposition ne procéderait pas d’un examen de lien de causalité entre les dépenses litigieuses et son activité tel qu’indiqué par l’article 45 de la loi modifiée de l’impôt sur le revenu du 4 décembre 1967, ci-après désignée par « LIR », et que donc la méthodologie appliquée par celui-ci serait à rejeter, elle reproche toutefois au directeur d’avoir considéré que les pièces versées par elle ne permettraient pas d’exercer un contrôle effectif des déplacements déclarés pour ses deux gérants.

Pour justifier les déplacements professionnels effectués par ses gérants, elle met en exergue qu’elle serait en charge de la gestion des restaurants suivants :

- la société anonyme “B” SA, sise à … (restaurant « ”C” »), indiquée par « … » dans les carnets de bord ;

- la société anonyme “D” SA, sise à … (restaurant « ”E” »), indiquée par « … » dans les carnets de bord ;

- la société à responsabilité limitée “F” SARL, sise à rue … (France) (restaurant « ”E” »), indiquée par « … » dans les carnets de bord ;

- la société par action simplifiée “G” SAS, sise à … (France) (restaurant « ”E” »), indiquée par « … » dans les carnets de bord ;

- la société par action simplifiée “H” SAS, sise à … (France) (restaurant « ”E” »), indiquée par « … » dans les carnets de bord ; et - la société à responsabilité limitée “I” SARL, sise à … (France) (restaurant « ”E” »), indiquée par « … » dans les carnets de bord.

Par ailleurs, les déplacements auprès de ses filiales seraient liés à l’assistance technique apportée par elle en vertu de plusieurs contrats, à savoir (i) un contrat d’assistance conclu le 15 décembre 2014 entre elle et la société à responsabilité limitée “F” SARL et (ii) un contrat de services conclu le 30 avril 2014 entre elle et la société anonyme “J” SA qui déteindrait les filiales “B” SA, “D” SA, “G” SAS, “H” SAS et “I” SARL, prémentionnées, lesquels prévoiraient l’exécution de missions telles que (i) l’assistance dans le recrutement, la formation du personnel, l’établissement des plannings et le suivi du personnel, (ii) le contrôle de la gestion avec les analyses sur place du respect des procédures mises en place et la réalisation d’audits, et (iii) le contrôle des normes d’hygiène ou autres normes imposées par l’enseigne visée.

14Elle continue en expliquant que les déplacements à … (« … ») seraient liés aux déplacements à l’ancienne adresse de son siège social lequel aurait été transféré à … à compter du mois de janvier 2018. Quant aux déplacements à …, ceux-ci seraient liés au restaurant exploité d’abord sous l’enseigne « ”K” », et ensuite sous l’enseigne « “L” » avant qu’elle n’ait trouvé un repreneur via une cession de fonds de commerce intervenue en juin 2018. L’entité juridique “B” SA aurait ensuite été conservée pour l’exploitation du restaurant « ”C” » qui aurait ouvert ses portes le 23 septembre 2018.

La société “A” donne ensuite à considérer qu’en lien avec son assistance au niveau de la gestion et du développement des restaurants « ”E” » qu’elle superviserait, son gérant aurait été amené à participer aux « … » lesquelles auraient été organisées de manière annuelle, ainsi qu’à certaines réunions régionales. Conformément aux missions de supervision devant être réalisées par elle, son gérant se serait également déplacé dans le sud de la France dans les restaurants « ”K” » situés à …, …, …, … et … pour le compte de son associé majoritaire, Monsieur “z”, qui serait le représentant de la société par action simplifiée “M” SAS. D’autres déplacements seraient encore liés aux études de marché, dont notamment l’implantation de restaurants exploités sous l’enseigne « “N” », projets qui auraient par contre été abandonnés au cours de l’année 2019.

Elle explique que d’autres abréviations seraient également visibles dans les carnets de bord litgieux, à savoir :

- « … » (…) : ces déplacements seraient essentiellement liés aux visites dans les restaurants « ”K” » et concerneraient notamment des trajets … / … lesquels permettraient la visite desdits restaurants situés dans le sud de la France et également des réunions en France avec d’autres franchisés « ”E” » ;

- « … » : ces déplacements seraient essentiellement liés aux visites dans les restaurants « ”E” » au sud de la France ainsi qu’au siège social situé à … et aux réunions régionales concernant le réseau de franchisés « ”E” » ;

- « … » (…) : lequel serait un des lieux principaux de formation de son gérant, la société demanderesse ajoutant à cet égard que d’autres formations des équipes d’encadrement auraient également été suivies aux … au cours de l’année 2018 pendant environ 5 à 6 semaines, notamment à …, - « … » : siège social de « ”C” », - « … » : siège social de « ”N” » et visite des restaurants de l’enseigne sur place en vue d’un éventuel accord de développement pour la France n’ayant au final jamais abouti, la société demanderesse expliquant à cet égard que son gérant y aurait rencontré sur place Monsieur …. et Monsieur …, gérants de l’enseigne « ”N” » en Allemagne, ainsi que leur « CEO », Monsieur … ;

- « … » : déplacement de son gérant au … à … (Suisse) ;

- « … » : déplacements vers la gare … TGV permettant les déplacements vers le sud de la France pour la supervision des restaurants « ”K” » ;

- « … » : déplacements vers la gare pour se rendre à … ou pour récupérer le responsable opérationnel « ”C” » pour des visites opérationnelles du restaurant « ”C” » au ….

La société demanderesse reprend ensuite le contenu de l’intégralité des carnets de bord pour les années 2017, 2018 et 2019, tout en précisant que le point de départ serait établi à … et que les relevés ne prendraient en compte que les déplacements professionnels.

15Il se dégagerait de ces carnets de bord que, pour l’année 2017, son gérant, Monsieur “x”, aurait effectué un total de 39.000 km dont 34.585 km auraient été réalisés à titre professionnel, de sorte que dans le cadre de ses déclarations fiscales, elle aurait retenu une quote-part privée relative aux frais de véhicules de 11,32%. Pour l’année 2018, un total de 33.800 km auraient été réalisés dont 28.750 km à titre professionnel, de sorte que la quote-part privée y relative serait de 14,80%. En ce qui concerne l’année 2019, son gérant aurait effectué un total de 33.247 km dont 27.875 km auraient été réalisés à titre professionnel. Dans le cadre de ses déclarations fiscales, elle aurait donc retenu une quote-part privée relative aux frais de véhicule pour cette même année de 16,16%.

Concernant l’année 2016, elle avance que si elle n’avait pas fourni de carnet de bord détaillé, il se dégagerait néanmoins du tableau des dépenses que les frais de déplacement réalisés par son gérant, Monsieur “x”, pendant cette année seraient semblables à ceux réalisés pour les années postérieures.

Il s’ensuivrait que l’évaluation d’une quote-part privée des frais de déplacement à 80% pour l’ensemble des déplacements relatifs aux véhicules utilisés par son gérant, Monsieur “x”, au cours des années 2016 à 2019 ne correspondrait pas à la réalité économique de la situation.

En ce qui concerne les frais relatifs aux déplacements de sa gérante administrative, Madame “y”, pour les années 2016 à 2019, la société demanderesse déclare accepter une reprise pour part privée évaluée à 80% concernant les frais relatifs à l’utilisation du véhicule « … » par celle-ci, telle que cela aurait été retenu par le directeur dans sa décision du 14 juillet 2021.

En droit, la société demanderesse critique tant le bureau d’imposition que le directeur pour avoir refusé la déduction des frais de véhicules pour les années 2016 à 2019, déclarés comme dépenses d’exploitation, et pour avoir requalifié les montants en relation avec ces frais en distributions cachées de bénéfices au sens de l’article 164 LIR.

Elle reproche plus particulièrement au directeur d’avoir considéré que les pièces présentées par elle ne seraient pas suffisantes afin d’accepter les déductions telles que déclarées sur base de l’article 45 LIR, et ce au motif qu’elle n’aurait pas apporté la preuve du lien causal exclusif entre l’activité de l’entreprise et la dépense engagée.

Tout en admettant qu’en vertu des articles 45 LIR et 59 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », ensemble les principes posés par les paragraphes 171, alinéa (1), 204, alinéa (1), et 205, alinéas (1) et (2) AO, il appartiendrait au contribuable non seulement de rapporter la preuve de l’existence matérielle des dépenses d’exploitation, c’est-à-dire que les dépenses alléguées ont causé une diminution effective de son patrimoine, mais encore la preuve de la relation économique de la dépense alléguée avec la catégorie de revenu choisie, elle soutient qu’elle aurait, en l’espèce, fourni l’ensemble des preuves permettant de lier les déplacements de ses gérants à la réalisation de ses activités, dont notamment la prospection et le développement de son réseau.

Elle reproche dans ce contexte encore au bureau d’imposition et au directeur d’être restés en défaut d’expliquer quel document manquant aurait permis de compléter son dossier fiscal afin que les déductions en lien avec les déplacements professionnels puissent être considérées comme admissibles, tout en faisant valoir que s’il s’agissait simplement d’un problème d’abréviations ou de détails à fournir dans le cadre des déplacements réalisés au cours des années 2016 à 2019, elle aurait pu satisfaire à n’importe quelle demande de renseignements.

16 La société demanderesse fait valoir que le droit fiscal soumettrait à l’impôt l’activité à but de lucre du contribuable qu’il a effectivement réalisée, mais n’affecterait pas sa liberté individuelle de définir lui-même l’envergure de son initiative entrepreneuriale, de sorte qu’il incomberait au seul contribuable de déterminer l’étendue de son activité commerciale, les moyens engagés en relation avec celle-ci et le niveau de profit qu’il entend en tirer. Par voie de conséquence, le contribuable serait seul juge de l’opportunité d’une dépense d’exploitation et la notion du lien de causalité n’impliquerait aucun contrôle si la dépense était nécessaire pour l’activité ou si elle était effectivement susceptible de profiter à l’exploitation. Il faudrait et il suffirait en effet que la dépense ait trouvé sa cause exclusive dans l’activité commerciale.

De même, le contribuable serait seul juge du niveau d’une dépense, c’est-à-dire s’il entend investir des moyens plus ou moins importants à son activité.

Elle estime que dans la mesure où l’ensemble des déplacements tels qu’établis dans les carnets de bord auraient été réalisés par son gérant dans son intérêt, la prise en charge des dépenses y liées devrait être considérée comme présentant un lien causal direct et exclusif suffisant avec son exploitation, de manière que lesdites dépenses rentreraient dans le champ des dépenses d’exploitation.

Il s’ensuivrait que la décision de son gérant d’effectuer des déplacements au titre de la supervision de ses filiales, de la formation des managers et de la prospection commerciale relèverait de son pouvoir de discrétion quant à l’opportunité des dépenses d’exploitation, pouvoir que l’administration des Contribution directes ne serait pas fondée à remettre en question.

Au vu de tout ce qui précède, il devrait dès lors être retenu que la quote-part privée des frais de voitures évaluée à 80% ne correspondrait pas à la réalité économique de la situation en l’espèce, de sorte que la requalification de ces dépenses en distributions cachées de bénéfices serait erronée tant en fait qu’en droit.

Par voie de conséquence, la décision directoriale déférée serait à réformer en ce sens.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement, après avoir relevé que la société demanderesse marquerait son accord avec une reprise pour quote-part privée évaluée à 80% concernant les frais relatifs à l’utilisation du véhicule « … » par sa gérante administrative, Madame “y”, qui serait l’épouse de Monsieur “x”, précise que le litige porterait en l’espèce sur la quote-part privée retenue par le fisc en relation avec les véhicules « de luxe » utilisés par Monsieur “x”, à savoir les voitures de la marque …, modèles … et …, la voiture de la marque …, modèle …, et la voiture de la marque …, modèle ….

Il soutient que dans la mesure où la société “A” ne serait pas en mesure de fournir un carnet de bord détaillé concernant l’année d’imposition 2016, les frais de voitures y relatifs ne pourraient être pris en considération à titre de dépenses d’exploitation déductibles pour rester à l’état d’allégations.

Il donne à considérer que les véhicules litigieux seraient également utilisés à titre privé par les gérants, alors qu’il ressortirait du dossier fiscal qu’au titre de l’exercice 2017, la société demanderesse aurait facturé à Monsieur “x” un montant de … EUR hors TVA à titre de frais de déplacement privés.

17 Après avoir mis en exergue que les frais concernant les déplacements seraient en principe déductibles sous réserve de la présentation d’éléments de preuve justifiant leur relation avec les revenus professionnels, et souligné que conformément à la jurisprudence constante des juridictions administratives, il incomberait au contribuable d’établir le lien causal exclusif entre l’activité de l’entreprise et la dépense engagée, le délégué du gouvernement fait valoir que seul un carnet de bord dûment tenu, contenant l’ensemble des déplacements effectués, leur durée et leur destination, le but poursuivi, ainsi que son utilité pour la société contribuable, de sorte à permettre une séparation nette et objectivement contrôlable entre les déplacements privés et professionnels, pourrait être pris en considération, ce qui ne serait en tout état de cause pas le cas pour l’année d’imposition 2016.

Concernant les relevés relatifs aux années d’imposition 2017 à 2019, tels que reproduits dans la requête introductive d’instance, il soutient que ceux-ci ne permettraient pas d’ébranler les contestations du directeur en ce qu’ils (i) ne permettraient pas un contrôle effectif des déplacements, (ii) se résumeraient à indiquer approximativement les kilomètres parcourus avec des chiffres arrondis, (iii) mentionneraient des abréviations pour des noms de villes, (iv) ne permettraient pas de déterminer le point de départ ou la destination exacte, (v) ne mentionneraient pas le nom ou l’adresse des clients, et (vi) ne contiendraient aucun descriptif, même sommaire, des activités professionnelles ou privées relatives aux déplacements. Les révélés contiendraient, selon lui, une indication stéréotypée des activités de la société demanderesse pour se limiter à mentionner, par exemple, la « supervision des filiales ». A cela s’ajouterait que lesdits relevés indiqueraient plus de 6 destinations différentes quand bien même la société demanderesse aurait indiqué gérer seulement 6 restaurants.

Il s’ensuivrait que les relevés seraient à écarter pour défaut de pertinence et de force probante, et ce dans la mesure où les déplacements y mentionnés ne seraient pas corroborés par des éléments de preuve objectivement vérifiables permettant de les lier à des déplacements professionnels, le délégué du gouvernement insistant à cet égard encore sur le fait que la simple production d’extraits du grand livre et de factures se rapportant aux coûts d’achat de voiture, aux frais d’entretien ou à d’autres frais liés ne sauraient servir de moyen de preuve concluant pour justifier le bien-fondé des déplacements professionnels avec ces voitures.

Après avoir rappelé, d’une part, que Monsieur “x” serait le gérant et l’associé unique de la société “A” et que depuis le 13 mars 2018, Madame “y”, épouse de Monsieur “x”, aurait été nommée gérante administrative, et, d’autre part, qu’il ne serait pas contesté que les véhicules litigieux seraient utilisés exclusivement par eux, de sorte à être de nature à pouvoir profiter à la fois à l’activité de la société demanderesse et à leur vie privée, il conclut, au vu des éléments repris ci-dessus, qu’il existerait un faisceau d’indices concordants permettant de retenir des distributions cachées de bénéfices concernant les frais de voitures déclarés au titre de l’activité professionnelle de la société demanderesse, de sorte que le recours à la taxation d’office au sens du § 217 AO serait pleinement justifié.

Au vu de ce qui précède, la décision directoriale en ce qu’elle a évalué les quotes-parts privées des frais de voitures relatifs aux années d’imposition 2016 à 2019 à 80%, et retenu des montants à titre de distributions cachées de bénéfices, serait à confirmer.

Dans son mémoire en réplique, la société demanderesse prend tout d’abord position sur la nécessité de déplacements dans le chef de Madame “y” dans le cadre de ses fonctions de gérante administrative. Elle précise à cet égard que ce serait à défaut d’avoir tenu un carnet de bord justifiant l’ensemble des déplacements professionnels précis de Madame “y” qu’elle aurait décidé de consentir aux redressements qui ont été faits par le directeur dans le cadre de 18sa décision du 14 juillet 2021, sans qu’il ne puisse exister aucun doute sur l’utilité professionnelle du véhicule utilisé par Madame “y” au cours de son mandat. Elle rappelle dans ce contexte que le véhicule de la marque …, modèle …, aurait été utilisé par Madame “y” pour effectuer des trajets en relation avec l’exercice de ses activités, notamment en assistant Monsieur “x” dans le cadre de la supervision des restaurants situés sur le territoire luxembourgeois et à l’étranger, tout en donnant à considérer que la possibilité d’avoir deux véhicules de société leur permettait d’exercer leur pouvoir d’assistance et de supervision de manière simultanée. Ce serait donc pour cette raison que les frais déclarés en relation avec l’utilisation de ce véhicule auraient été destinés à la réalisation de son objet social.

En ce qui concerne les contestations de la partie étatique relatives aux carnets de bord en lien avec les déplacements professionnels de Monsieur “x”, elle fait valoir que l’ensemble des justifications nécessaires y relatives auraient été fournies, tout en reprochant plus particulièrement à la partie étatique de ne pas indiquer quels seraient les déplacements qui seraient précisément à mettre en doute.

En ce qui concerne le reproche du délégué du gouvernement suivant lequel il existerait une incompréhension concernant la gestion de ses filiales et d’autres restaurants, elle rappelle qu’elle aurait conclu des contrats de supervision avec ses 6 filiales et que, parallèlement, elle aurait également des missions de supervisions dans d’autres restaurants situés notamment dans le sud de la France, conformément aux factures de « management fees » auxquelles elle se réfère.

Il serait donc évident que la réalisation de ses missions, lesquelles généreraient des revenus imposables dans son chef, requerrait des déplacements professionnels réalisés par son gérant.

Elle met à cet égard en avant que le délégué du gouvernement n’émettrait aucune remarque quant aux pièces qui ont été jointes à sa requête introductive d’instance, mais qu’il se contenterait de se rallier aux arguments du directeur selon lesquels les relevés en question ne permettraient pas d’effectuer un contrôle effectif des déplacements effectués par Monsieur “x” et de rejeter l’ensemble des justifications et preuves fournies.

Elle rappelle à cet égard qu’en matière administrative, la charge de la preuve serait partagée et que s’il incombait à l’administré d’articuler les moyens tendant à établir l’illégalité de l’acte, la partie étatique ne pourrait se confiner dans une attitude purement passive, mais devrait, à son tour, tenter d’établir la légalité de l’acte.

Elle soutient que face aux éléments soumis en l’espèce, il appartiendrait à la partie étatique de relever précisément les éléments qui lui paraissent douteux et qui pourraient indiquer l’existence de distributions cachées de bénéfices plutôt que de mettre en doute l’intégralité des déplacements effectués sans prendre en considération l’ensemble de ses explications et des pièces justificatives y relatives produites par elle.

En ce qui concerne ensuite le reproche du délégué du gouvernement suivant lequel les kilomètres parcourus par Monsieur “x” auraient été indiqués de manière approximative et que les chiffes en question auraient été arrondis, la société demanderesse, tout en admettant que l’ensemble des kilomètres auraient été arrondis voire tronqués à plus ou moins 5 km, insiste sur le fait qu’à aucun moment ces kilomètres n’auraient été surévalués. Au contraire, pour certains trajets, les déplacements auraient été arrondis à la dizaine inférieure, et ce afin de 19faciliter les calculs nécessaires pour l’évaluation de ses trajets professionnels. Or, cette façon de faire ne se distinguerait pas de celle utilisée par d’autres contribuables qui procéderaient de la même façon, la société “A” avançant encore que la distance parcourue entre deux lieux serait facilement vérifiable par la partie étatique au moyen des outils à disposition sur Internet et qu’il lui appartiendrait dès lors de préciser en quoi les kilomètres indiqués pour chaque position du relevé seraient faux. Elle ajoute qu’il n’y aurait aucune loi ou jurisprudence qui imposerait à un contribuable un itinéraire plutôt qu’un autre, de sorte que le fait d’arrondir ou de tronquer le nombre des kilomètres parcourus ne saurait mettre en doute l’ensemble des trajets professionnels effectués par son gérant dans son intérêt.

S’agissant du reproche que les noms de villes et les abréviations ne seraient pas toutes explicitées, elle souligne qu’elle aurait pris le soin de justifier dans son recours l’ensemble des abréviations utilisées, ainsi que les trajets en relation avec les villes citées, de sorte qu’à nouveau, le délégué du gouvernement se contenterait de reprendre le contenu de la décision directoriale sans indiquer quels déplacements seraient douteux et quelles seraient les abréviations qui seraient à justifier.

En ce qui concerne l’absence de nom ou d’adresse de client mentionné, elle fait valoir que cette carence aurait été complétée dans sa requête introductive d’instance avec des précisions sur les abréviations utilisées et les destinations correspondantes. Des pièces auraient également été jointes pour justifier l’ensemble des déplacements déclarés en tant que déplacements professionnels, de sorte que les contestations afférentes et non autrement précisées du délégué du gouvernement seraient à rejeter.

Il en serait de même des contestations du délégué du gouvernement relatives au descriptif des activités professionnelles exercées par Monsieur “x”, lesquelles auraient également été précisées dans sa requête introductive d’instance.

Enfin, concernant le descriptif des activités privées, la société demanderesse fait valoir le droit au respect de la vie privée lequel serait consacré aux articles 22 de la Constitution et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, de sorte qu’il suffirait à Monsieur “x”, en sa qualité de gérant, d’indiquer le nombre de kilomètres parcourus à titre privé sans en justifier précisément le contenu.

Elle en conclut que les pièces versées à l’appui de son recours, ensemble les explications y relatives apportées en cours d’instance contentieuse permettraient de justifier la nature professionnelle des frais de véhicules déclarés par elle, conformément à l’article 59 de la loi du 21 juin 1999.

Elle se prévaut à cet égard encore d’attestations testimoniales versées en cause qui permettraient d’établir que Monsieur “x”, en sa qualité de gérant, se serait rendu dans les différents restaurants pour effectuer ses missions de supervision et donc de confirmer que les déplacements effectués par celui-ci seraient nécessaires pour la gestion et le développement des restaurants.

Elle fait finalement valoir qu’en application du paragraphe 171 AO, le principe de l’obligation de preuve à charge du contribuable se trouverait limité à ce que l’on peut raisonnablement exiger de celui-ci, tout en insistant sur le fait que si aucune preuve n’est suffisante mais qu’une incertitude subsiste en la matière, le caractère irréalisable de la preuve matérielle devrait en toutes circonstances bénéficier au contribuable.

20 Au vu de tout ce qui précède, la décision directoriale serait à reformer.

Appréciation du tribunal A titre liminaire, le tribunal relève que la société demanderesse affirme limiter son recours dirigé contre la décision directoriale déférée au volet des distributions cachées de bénéfices dans le cadre des frais liés aux voitures utilisées à titre professionnel ou privé par son gérant, Monsieur “x”, voire aux quotes-parts privées retenues à cet égard par le fisc, sans viser la qualification de distribution cachée de bénéfices pour la quote-part privée évaluée à 80% concernant les frais relatifs à l’utilisation du véhicule de la marque …, modèle …, par la gérante administrative, Madame “y”. Il y a, par conséquent, lieu de lui en donner acte. L’analyse du tribunal se limitera dès lors à ce volet de la décision directoriale déférée.

A cet égard, force est de constater que le litige porte sur les frais liés aux voitures prises en leasing par la société demanderesse et utilisées à titre professionnel et privé par Monsieur “x”, à savoir (i) une voiture de la marque …, modèle …, de janvier 2016 à novembre 2016, (ii) une voiture de la marque …, modèle …, de janvier 2017 à mars 2018, (iii) une voiture de la marque …, modèle …, de mars 2018 à juillet 2019, et (iv) une voiture de la marque …, modèle …, à partir d’avril 2019, et sur la question de savoir si les frais y relatifs déclarés à titre de dépenses d’exploitation déductibles pour les années d’imposition 2016 à 2019 doivent s’analyser en des distributions cachées de bénéfices, étant à cet égard précisé qu’il n’est pas contesté par la société demanderesse que son gérant, Monsieur “x”, a également utilisé les véhicules en question à titre privé.

Il convient, en premier lieu, de relever qu’en ce qui concerne la charge de la preuve au cours de la procédure contentieuse se déroulant devant le tribunal administratif, conformément à l’article 59 de la loi du 21 juin 1999, la preuve des faits libérant de l’obligation fiscale ou réduisant la cote d’impôt appartient au contribuable.

Dès lors, en ce qui concerne plus particulièrement la question de la déductibilité de dépenses d’exploitation au sens de l’article 45 LIR, aux termes duquel « Sont considérées comme dépenses d’exploitation déductibles les dépenses provoquées exclusivement par l’entreprise », il appartient non seulement au contribuable de rapporter la preuve de l’existence matérielle de ces dépenses, c’est-à-dire que les dépenses alléguées ont causé une diminution effective de son patrimoine, mais encore la preuve de la relation économique de la dépense alléguée avec la catégorie de revenu choisie.

D’autre part, et dans la mesure où la partie étatique a refusé la déductibilité des dépenses sous le couvert de la qualification de distributions cachées de bénéfices au sens de l’article 164, alinéa (3) LIR, aux termes duquel « Les distributions cachées de bénéfices sont à comprendre dans le revenu imposable. Il y a distribution cachée de bénéfices notamment si un associé, sociétaire ou intéressé reçoit directement ou indirectement des avantages d’une société ou d’une association dont normalement il n’aurait pas bénéficié s’il n’avait pas eu cette qualité », il convient encore de prendre en compte les règles de preuve y relatives telles que retenues par la jurisprudence des juridictions administratives. En effet, conformément à l’article 59 de la loi du 21 juin 1999, en vertu duquel la preuve des faits déclenchant l’obligation fiscale appartient à l’administration, la charge de la preuve de l’existence d’une distribution cachée de bénéfices repose en premier lieu sur le bureau d’imposition. Celui-ci doit, en effet, procéder à un examen impartial et objectif des déclarations du contribuable et relever des éléments qui lui 21paraissent douteux et qui pourraient indiquer l’existence d’une distribution cachée de bénéfices. Ainsi, c’est essentiellement lorsque le bureau d’imposition peut faire état d’un faisceau de circonstances qui rendent une telle distribution probable et qui n’ont pas été éclairées ou documentées par le contribuable que le bureau d’imposition peut mettre en cause la réalité économique des opérations et supposer une diminution indue des bénéfices de l’entreprise sans avoir à la justifier exactement. Il y a alors renversement de la charge de la preuve, le contribuable devant prouver qu’il n’y a pas diminution de bénéfice ou que celle-ci est économiquement justifiée, et non seulement motivée par des relations particulières entre deux entités liées2.

De manière générale, il convient encore de relever que si, en la présente matière, le tribunal est certes investi du pouvoir de statuer en tant que juge du fond et qu’il est ainsi investi du pouvoir de substituer à une décision administrative jugée illégale sa propre décision, il n’en demeure pas moins que s’il est saisi d’un recours contentieux contre un acte déterminé, l’examen auquel il doit se livrer s’effectue en principe dans le cadre des moyens invoqués par la partie demanderesse pour contrer les points spécifiques de l’acte déféré faisant grief, sans que son contrôle ne consiste à procéder à un réexamen général et global de la situation fiscale du contribuable.

Il s’ensuit qu’il incombe au demandeur en réformation de fournir à l’appui de sa requête des éléments suffisamment précis pour permettre, le cas échéant, l’exercice utile de ce pouvoir de réformation3.

C’est sur cette toile de fond que les contestations de la société demanderesse en relation avec les dépenses d’exploitation qu’elle fait valoir sont examinées.

En l’espèce, la société demanderesse entend faire valoir à titre de dépenses d’exploitation des frais de voitures qu’elle déclare avoir engagés en relation avec l’utilisation des véhicules pris en leasing par elle et mis à disposition de son gérant unique, Monsieur “x”, pour les années 2016 à 2019, à savoir un montant de … EUR pour l’année 2016, un montant de … EUR pour l’année 2017, un montant de … EUR pour l’année 2018 et un montant de … EUR pour l’année 2019, tout en concédant que des quotes-parts de l’ordre de 15% pour l’année 2016, de 11,32% pour l’année 2017, de 14,80% pour l’année 2018 et de 16,16% pour l’année 2019, seraient en relation avec une utilisation privée de ces véhicules par son gérant, Monsieur “x”.

Le bureau d’imposition a considéré qu’un seul véhicule, à savoir le véhicule de la marque …, modèle …, serait suffisant pour assurer les déplacements professionnels des deux gérants et a ainsi retenu l’existence de distributions cachées de bénéfices pour les montants en relation avec les autres véhicules, c’est-à-dire … EUR pour l’année 2016, … EUR pour l’année 2017, … EUR pour l’année 2018 et … EUR pour l’année 2019. Le directeur, tout en retenant que l’approche du bureau d’imposition selon laquelle « la voiture du modèle … est suffisante pour garantir les déplacements en France » ne procéderait pas d’un examen du lien de causalité entre les dépenses litigieuses et l’activité de la société demanderesse, de sorte que la méthodologie appliquée par ledit bureau serait à rejeter, a, quant à lui, considéré que les pièces versées par la société demanderesse à l’appui de sa réclamation ne permettraient pas d’exercer un contrôle effectif des déplacements professionnels des deux gérants de la société “A” et a 2 Cour adm., 12 février 2009, n° 24642C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Impôts, n° 656 et les autres références y citées.

3 Trib. adm., 31 mai 2006, n° 20705 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Impôts, n° 1266 et les autres références y citées.

22évalué les quotes-parts en relation avec l’utilisation privée des voitures à 80%, et, en conséquence, retenu des distributions cachées de bénéfices d’un montant de … EUR pour l’année 2016, d’un montant de … EUR pour l’année 2017, d’un montant de … EUR pour l’année 2018 et d’un montant de … EUR pour l’année 2019.

Il échet de prime abord au tribunal de constater que dans le cadre de sa réclamation auprès du directeur, la société demanderesse s’est basée sur (i) des carnets de bord relatifs à l’utilisation des véhicules litigieux pour les années 2017 à 2019, (ii) des calculs des parts privées/professionnelles des différents véhicules, (iii) des historiques des comptes généraux des années 2017 à 2019 et (iv) deux contrats de prestations de services conclus en 2014 relatifs à l’assistance à la gestion de restaurants en France et au Luxembourg, à savoir la convention d’assistance conclue le 15 décembre 2014 avec la société à responsabilité limitée “F” SARL et le contrat de services conclu le 30 avril 2014 avec la société anonyme “J” SA.

A cet égard, le directeur a considéré que les carnets de bord versés par la société demanderesse ne permettraient pas un contrôle effectif des déplacements professionnels en ce qu’ils (i) se résumeraient à indiquer approximativement les kilomètres parcourus, les chiffres étant arrondis, (ii) ne mentionneraient que des noms de villes, voire uniquement des abréviations non explicitées (par exemple « …, …, …, …, …, … »), ne permettant pas de déterminer le point de départ ou la destination exacte, (iii) ne mentionneraient aucun nom ou adresse de client, et (iv) ne contiendraient aucun descriptif même sommaire des activités professionnelles ou privées relatives aux déplacements, tout en admettant toutefois, au vu des deux contrats de prestations de services versés par la société demanderesse, que Monsieur “x” soit effectivement amené à effectuer des déplacements en relation directe avec l’exercice des activités de la société “A”, de sorte que la nécessité de déplacements professionnels ne saurait être mise en doute en son chef.

Force est ensuite de constater que dans le cadre du présent recours, la société demanderesse a versé l’ensemble des pièces versées à l’appui de sa réclamation, telles que listées ci-dessus, tout en complétant celles-ci par (i) l’acte de transfert de son siège social du 3 janvier 2018, (ii) des documents relatifs à l’exploitation du restaurant sous l’enseigne « ”K” » devenue « ”L” » situé à … entre 2015 et 2018, (iii) les premières pages des compte-rendus des conventions et réunions « ”E” » de juin, mars, septembre et décembre 2017, mars, septembre et décembre 2018, et juin, octobre et décembre 2019, (iv) un certificat de formation « Manager Certification Exam - France » du 1er juin 2018, (v) une information relative au … ayant eu lieu du 25 au 27 septembre 2017 à … (Suisse) auquel Monsieur “x” aurait participé, (vi) une attestation du représentant de la société par action simplifiée “M” SAS du 7 octobre 2021 confirmant les prestations de supervision régulières des filiales « ”K” » par Monsieur “x” entre 2015 et 2018, (vii) des factures en lien avec l’assistance technique des restaurants « ”K” » situés en France au cours des années 2017 et 2018, (viii) des contrats de mandat et des études de marché relatifs au développement au Luxembourg et en France de restaurants exploités sous l’enseigne « ”N” » au cours de l’année 2018, (ix) une facture qui serait relative au déplacement à Farébersviller en France, (x) un tableau des dépenses de l’année 2016, (xi) une attestation de la part de la directrice Marketing et Communication du réseau « ”O” » du 13 octobre 2021 confirmant la participation de Monsieur “x” à différentes réunions de 2015 à 2019, ainsi que (xii) diverses attestations testimoniales de la part des gérants des filiales de la société “A” confirmant les visites régulières de Monsieur “x” entre 2016 et 2019.

A cet égard, elle a expliqué dans son recours qu’elle serait en charge de la gestion de différents restaurants situés au Luxembourg et en France, ainsi que de la supervision et de 23l’assistance technique de ses filiales étrangères, tout en précisant les noms et adresses de ses clients chez lesquels Monsieur “x” se serait déplacé dans le cadre de ses missions de gérant de la société “A”, ainsi que les abréviations utilisées dans ce contexte dans les carnets de bord, et en donnant à considérer que tous les déplacements auraient comme point de départ son siège social à …, respectivement, depuis le mois de janvier 2018, celui situé à …. Elle a encore expliqué de manière détaillée la raison des déplacements de son gérant à … jusqu’en juin 2018, ainsi que ceux liés aux études de marché quant à l’implantation de restaurants exploités sous l’enseigne « ”N” », de même que sa participation à différentes réunions et conventions dans le cadre de la gestion et du développement des restaurants « ”E” » qu’elle supervise, ses déplacements au sud de la France dans le cadre de sa mission de supervision des filiales « ”K” », ainsi que d’autres déplacements effectués par son gérant notamment vers …, …, …, …, … ou encore …, soit dans le cadre de sa mission de supervision, soit dans le cadre de formations réalisées par celui-ci.

Le tribunal constate qu’en ce qui concerne tout d’abord l’année d’imposition 2016, dans la mesure où la société demanderesse n’a pas fourni un carnet de bord relatif aux déplacements professionnels effectués par son gérant pendant cette année, l’ensemble des frais de voiture y relatifs ne sauraient être considérés comme étant des dépenses d’exploitation déductibles au sens de l’article 45, alinéa 1er LIR, étant relevé que le seul tableau de dépenses fourni à cet égard et la simple affirmation suivant laquelle les frais de déplacements réalisés pendant cette année seraient semblables à ceux réalisés pour les années postérieures sont insuffisantes pour retenir le contraire, à défaut de preuve tangible.

Il s’ensuit que la décision directoriale déférée en ce qu’elle a évalué la quote-part privée des frais de voiture relatifs à l’année 2016 à 80%, et retenu, en conséquence, une distribution cachée de bénéfices en relation avec lesdits frais de voiture se chiffrant à un montant de … EUR, est à confirmer.

En ce qui concerne ensuite les années d’impositions 2017 à 2019, il se dégage d’une combinaison des pièces versées en cause et des explications afférentes de la société demanderesse que les déplacements effectués par Monsieur “x” dans le cadre de sa mission de gérant correspondent en général avec la liste détaillée des déplacements effectués par celui-ci au cours des années 2017 à 2019 et tels que retranscrits dans les carnets de bord versés en cause, respectivement dans les relevés figurant dans la requête introductive d’instance, notamment en ce qui concerne les lieux des déplacements, leurs dates, les raisons professionnelles et, le cas échéant, les noms des clients, de sorte qu’elles sont de nature à permettre de retracer à suffisance les trajets professionnels de celui-ci.

En effet, et si certes il peut être admis que les carnets de bord contenant des abréviations de destinations non explicitées, sans point de départ, ni mise en relation avec un déplacement professionnel concret, ont pu amener le directeur à conclure à un défaut de preuve de la part de la société demanderesse de l’existence matérielle d’une partie de ces dépenses d’exploitation, il n’en reste pas moins que les explications et preuves documentaires présentées par la société demanderesse au stade de la procédure contentieuse et non remises en cause de façon circonstanciée et pertinente par la partie étatique, sont de nature à corroborer l’existence d’un lien entre les déplacements en cause et l’activité exercée par le gérant, Monsieur “x”, au profit de la société demanderesse Face à ces éléments, il aurait, par conséquent, appartenu à la partie étatique d’indiquer avec précision quels déplacements sont encore douteux et quelles abréviations de villes encore 24à justifier, ce qu’elle est pourtant restée en défaut de faire, étant relevé que la seule affirmation suivant laquelle le kilométrage des déplacements aurait été arrondi n’est pas suffisante pour retenir le contraire. Il en est de même des autres contestations non autrement circonstanciées du délégué du gouvernement, notamment en ce qui concerne les relevés des déplacements professionnels litigieux ou encore le descriptif des activités professionnelles exercées par Monsieur “x”, le délégué du gouvernement se contentant, en effet, de reprendre en substance le contenu de la décision directoriale sans critiquer de manière tangible les pièces et explications fournies par la société demanderesse dans le cadre du présent recours en réformation à cet égard.

Au vu des considérations qui précèdent, le tribunal arrive à la conclusion que les redressements effectués par le directeur concernant les quotes-parts privées des frais de voiture relatifs aux années d’imposition 2017 à 2019 ne sont pas justifiés et que le recours est à cet égard fondé.

Il s’ensuit qu’il y a lieu de réformer la décision directoriale déférée en ce sens que c’est à tort que le directeur a évalué les quotes-parts privées des frais de voiture à 80% et qu’il a retenu des distributions cachées de bénéfices en relation avec lesdits frais se chiffrant à des montants de … EUR pour l’année 2017, de … EUR pour l’année 2018 et de … EUR pour l’année 2019.

Dans la mesure où la société demanderesse a fourni des pièces explicatives supplémentaires quant aux déplacements professionnels de son gérant au cours des années 2017 à 2019 lesquelles n’avaient pu être prises en compte ni par le bureau d’imposition ni par le directeur, pour avoir seulement été produites dans le cadre du présent recours, il y a lieu de renvoyer le litige devant le directeur afin de lui permettre d’examiner les pièces versées en cause et de procéder à l’imposition de la société demanderesse, étant souligné qu’il était dans l’intention du législateur de ne pas faire du tribunal un « taxateur » et de ne pas l’amener à « s’immiscer dans le domaine de l’administration » sous peine de « compromettre son statut judiciaire »4, son rôle consistant à dégager les règles de droit et à opérer les qualifications nécessaires à l’application utile de la législation fiscale, sans pour autant porter sur l’intégralité de l’imposition, ni aboutir à fixer nécessairement une nouvelle cote d’impôt5.

Au vu de l’ensemble des conclusions qui précèdent, il y a lieu de déclarer le recours sous analyse partiellement fondé.

Au vu de l’issue du litige, il est fait masse des frais et des dépens pour les imposer pour un tiers à la société demanderesse et pour deux tiers à l’Etat.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours principal en réformation irrecevable en ce qu’il est dirigé contre les bulletins de l’impôt rectificatifs émis le 25 août 2021 ;

4 cf. doc. parl. 3940A², p. 11, ad (3) 8. et doc. parl. 3940A⁴, avis complémentaire du Conseil d’Etat, p. 7, ad amendement 5.

5 Trib. adm., 29 mars 1999, n° 10428 du rôle, confirmé par Cour adm., 11 janvier 2000, n° 11285C du rôle, Pas.

adm. 2022, V° Impôts, n° 1300 et les autres références y citées.

25reçoit le recours principal en réformation en la forme pour le surplus ;

donne acte à la société demanderesse qu’elle limite le recours principal en réformation au volet de la décision du directeur du 14 juillet 2021 retenant des distributions cachées de bénéfices en relation avec les frais liés aux voitures utilisées à titre professionnel ou privé par son gérant, Monsieur “x”, voire aux quotes-parts privées retenues à cet égard par le fisc ;

au fond, déclare ledit recours partiellement justifié ;

partant, confirme la décision du directeur du 14 juillet 2021 en ce qu’elle a évalué la quote-part privée des frais de voitures relatifs à l’année d’imposition 2016 à 80% et retenu une distribution cachée de bénéfices en relation avec ces frais se chiffrant à un montant de … EUR ;

pour le surplus et par réformation de la décision directoriale du 14 juillet 2021, dit que c’est à tort que le directeur a évalué les quotes-parts privées des frais de voiture relatifs aux années d’imposition 2017 à 2019 à 80% et retenu des distributions cachées de bénéfices en relation avec ces frais se chiffrant à des montants de … EUR pour l’année 2017, de … EUR pour l’année 2018 et de … EUR pour l’année 2019 ;

renvoie le dossier en prosécution de cause devant le directeur de l’administration des Contributions directes ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

condamne la société demanderesse à un tiers et l’Etat à deux tiers des frais et dépens.

Ainsi jugé par :

Alexandra Castegnaro, vice-président, Alexandra Bochet, premier juge, Annemarie Theis, premier juge, et lu à l’audience publique du 23 octobre 2023 par le vice-président, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Alexandra Castegnaro Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 24 octobre 2023 Le greffier du tribunal administratif 26


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 46574
Date de la décision : 23/10/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-10-23;46574 ?

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