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05/10/2023 | LUXEMBOURG | N°46567

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 05 octobre 2023, 46567


Tribunal administratif N° 46567 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:46567 2e chambre Inscrit le 12 octobre 2021 Audience publique du 5 octobre 2023 Recours formé par la société à responsabilité limitée “A” SARL, …, contre une décision du ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Economie sociale et solidaire, en présence de la société anonyme “B” SA, …, et des administrations communales de Wincrange et de Wiltz, en matière d’établissements classés

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JUGE

MENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46567 du rôle et déposée au greffe du tribunal admin...

Tribunal administratif N° 46567 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:46567 2e chambre Inscrit le 12 octobre 2021 Audience publique du 5 octobre 2023 Recours formé par la société à responsabilité limitée “A” SARL, …, contre une décision du ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Economie sociale et solidaire, en présence de la société anonyme “B” SA, …, et des administrations communales de Wincrange et de Wiltz, en matière d’établissements classés

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46567 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 12 octobre 2021 par la société anonyme Krieger Associates SA, inscrite sur la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2146 Luxembourg, 63-65, rue de Merl, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B240929, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Georges Krieger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée “A” SARL, établie et ayant son siège social à L- …, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son gérant actuellement en fonctions, tendant à la réformation, sinon à l’annulation de l’arrêté n°… du ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Economie sociale et solidaire du 31 août 2021 portant autorisation dans le chef de la société anonyme “B” SA pour l’installation et l’exploitation à Eschweiler, respectivement à Brachtenbach, d’un parc éolien se composant plus particulièrement de trois éoliennes, de trois postes de transformation triphasé et de trois appareils de levage ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Patrick Muller, demeurant à Diekirch, du 15 octobre 2021 portant signification de ladite requête 1) à la société anonyme “B” SA, établie et ayant son siège social à L- …, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, 2) à l’administration communale de Wincrange, ayant sa maison communale à L-9780 Wincrange, 27, Haaptstrooss, représentée par son bourgmestre, sinon par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions et 3) à l’administration communale de Wiltz, ayant sa maison communale à L-9530 Wiltz, 2, Grand-rue, représentée par son bourgmestre, sinon par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour de Maître Thibault Chevrier, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, déposée au greffe du tribunal administratif le 26 octobre 2021, au nom de la société anonyme “B” SA, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement, déposé au greffe du tribunal administratif le 23 décembre 2021 au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

1Vu le mémoire en réponse de Maître Thibault Chevrier, déposé au greffe du tribunal administratif le 5 janvier 2022 au nom de la société anonyme “B” SA, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réplique de la société anonyme Krieger Associates SA, déposé au greffe du tribunal administratif le 7 février 2022 au nom de la société à responsabilité limitée “A” SARL, préqualifiée ;

Vu le mémoire en duplique de Maître Thibault Chevrier, déposé le 7 mars 2022 au greffe du tribunal administratif au nom de la société anonyme “B” SA ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement, déposé au greffe du tribunal administratif le 7 mars 2022 au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Sébastien Couvreur, en remplacement de Maître Georges Krieger, Maître Thibault Chevrier et Madame le délégué du gouvernement Sarah Ernst en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 12 juin 2023.

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A la suite d’une demande présentée le 11 mars 2020 et des informations complémentaires fournies le 16 novembre 2020 par la société anonyme “B” SA, ci-après désignée par « la société “B” », le ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Economie sociale et solidaire, ci-après désigné par « le ministre », délivra à celle-ci, par arrêté référencé sous le numéro … du 31 août 2021, l’autorisation de procéder à l’installation et l’exploitation d’un parc éolien à Eschweiler, respectivement à Brachtenbach sous réserve du respect d’un certain nombre de conditions d’exploitation, ladite autorisation ayant été sollicitée plus particulièrement pour les éléments suivants :

« -

une éolienne dénommée « SGO2 » :

- situé à la position géographique LUREF 62500E 119427,5 N ;

- inscrit au cadastre de la commune de Wincrange, section OB de Brachtenbach, au lieu-dit « Jongbësch », sous le numéro cadastral 18 ;

avec les caractéristiques techniques suivantes :

- éolienne du type « SG 6,6-155 » ;

-

puissance électrique nominale de 6 MW ;

-

hauteur maximale de 242,5 m ;

-

hauteur du moyeu maximale de 165 m ;

-

diamètre hélice maximale de 155 m ;

-

une éolienne dénommée « SGO3 » :

- située à la position géographique LUREF 62848E 119110N ;

2- inscrit au cadastre de la commune de Wiltz, section EC d'Eschweiler, au lieu-dit « Nasheck », sous le numéro cadastral 864 ;

avec les caractéristiques techniques suivantes :

-

éolienne du type « SG 3,465-132 » ;

- puissance électrique nominale de 3,465 MW ;

-

hauteur maximale de 200 m ;

-

hauteur du moyeu maximale de 134 m ;

-

diamètre hélice maximale de 132 m ;

-

une éolienne dénommée « SG04 » :

-

située à la position géographique LUREF 63636,5 E 119230N -

inscrit au cadastre de la commune de Wiltz, section EC d’Eschweiler, au lieu-dit « An der Feherchen », sous le numéro cadastral 1021/3186 ;

avec les caractéristiques suivantes :

- éolienne du type « SG 6,6,-155 » ;

-

puissance électrique nominale de 6MW ;

-

hauteur maximale de 243 m ;

-

hauteur du moyeu maximale de 165 m ;

-

diamètre hélice maximale de 155 m ;

- deux postes de transformation triphasés d’une puissance apparente nominale unitaire de maximale 7.332 kVA, refroidi à l’huile ou alternativement refroidi à l’air, installé à l’intérieur de la tour au pied de l’éolienne « SG02 » et « SG04 » ;

- un poste de transformation triphasé d’une puissance apparente nominale de maximale 3.900 kVA, refroidi à l’huile ou alternativement refroidi à l’air, installé à l’intérieur de la tour au pied de l’éolienne « SG03 » ;

- trois appareils de levage du type plateforme élévatrice dénommés « Aufstiegshilfe » d’une charge maximale de 240 kg pouvant chacun transporter au maximum deux personnes, installés dans chaque tour de l’éolienne ; […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 12 octobre 2021, la société à responsabilité limitée “A” SARL, ci-après désignée par « la société demanderesse », a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de l’arrêté ministériel, précité, du 31 août 2021.

3Etant donné que l’article 19, alinéa 1er de la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés, ci-après désignée par « la loi du 10 juin 1999 », prévoit un recours au fond en la présente matière, le tribunal est compétent pour connaître du recours principal en réformation introduit en l’espèce, de sorte qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

Avant tout autre progrès en cause, il convient d’abord de relever que les administrations communales de Wincrange et de Wiltz n’ont pas fourni de mémoire en réponse en cause dans le délai légal bien que la requête introductive leur ait été signifiée en date du 15 octobre 2021 par exploit d’huissier de justice. Conformément aux dispositions de l’article 6 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », le tribunal statue néanmoins à l’égard de toutes les parties, même si deux des parties tierces intéressées n’ont pas comparu dans le délai prévu par la loi.

Quant à la demande en communication de l’intégralité du dossier administratif En ce qui concerne la demande de la société demanderesse telle que formulée dans sa requête introductive d’instance et réitérée dans son mémoire en réplique de se voir communiquer l’intégralité du dossier administratif, le tribunal se doit de constater qu’après avoir communiqué une première farde de 14 pièces, intitulée « dossier administratif », à l’appui de son mémoire en réponse, la partie étatique a encore déposé ensemble avec son mémoire en duplique trois classeurs de pièces lesquelles correspondent, suivant ses explications, à « l’intégralité des pièces relatives au dossier de demande d’autorisation pour l’installation et l’exploitation d’un parc éolien à Eschweiler ».

Dans la mesure où la société demanderesse - laquelle a souligné ne pas faire de l’absence de communication ab initio de l’intégralité du dossier administratif un moyen d’annulation de l’arrêté ministériel litigieux et annoncé à travers son mémoire en réplique qu’elle se réserverait le droit de prendre position sur des pièces transmises ultérieurement - n’a pas fait état d’éléments qui lui feraient encore défaut ni d’éléments qui lui permettraient d’affirmer qu’elle n’aurait pas eu communication de l’intégralité du dossier administratif à la base du présent litige, ni enfin demandé à pouvoir prendre position, à travers un mémoire supplémentaire, par rapport aux pièces communiquées avec le mémoire en duplique, il doit être admis que l’intégralité du dossier administratif lui a été communiqué, de sorte que la demande en communication afférente est à rejeter pour être dépourvu d’objet.

Quant à la recevabilité du recours Moyens et arguments des parties Afin de justifier l’existence d’un intérêt à agir dans son chef, la société demanderesse fait plaider qu’elle serait sur le point de faire approuver un projet éolien sur le même site que celui sur lequel est prévu le projet de parc éolien de la société “B” et qu’un « problème de compatibilité entre son éolienne n° 1 et l’éolienne “x” » de la société “B” engendrerait dans son chef des risques, nuisances et pertes de rentabilité. Elle invoque plus particulièrement sa crainte de se voir opposer un refus à sa propre demande d’autorisation pour l’installation de son « éolienne n°1 en raison de la réalisation, à trop grande proximité, de l’éolienne “x” ».

Il se dégage, à cet égard, des faits et rétroactes tels que présentés par la société 4demanderesse à l’appui du présent recours que celle-ci se serait enquise, dès février 2018 sur la nécessité de réaliser une évaluation des incidences environnementales de son projet de parc éolien et que par courrier du 20 mars 2018, le ministre de l’Environnement lui aurait répondu par l’affirmative, tout en insistant sur la nécessité pour elle de vérifier la compatibilité de son projet avec celui de la société anonyme “C” SA, ci-après désignée par « la société “C” », intitulé « Parc éolien Eschweiler », laquelle aurait, selon les explications de la société demanderesse, initialement planifié de réaliser 5 éoliennes sur le même site.

La société demanderesse a encore précisé avoir introduit une demande auprès du ministre de l’Environnement sur base d’un premier screening du bureau “D” SA du 18 juin 2018, à la suite duquel ledit ministre aurait décidé, en date du 6 août 2018, que l’élaboration d’un rapport d’évaluation conformément à l’article 6 de la loi modifiée du 15 mai 2018 relative à l’évaluation des incidences sur l’environnement (EIE), ci-après désignée par « la loi du 15 mai 2018 », était requise.

Elle a, dans ce contexte, ajouté que son projet aurait initialement visé l’implantation de 4 éoliennes sur un site localisé dans le nord de la commune de Wiltz, à la limite avec la commune de Wincrange, à environ 3 km au nord de la Ville de Wiltz et à un peu plus de 1 km à l’ouest du village d’Eschweiler et que de nombreux avis sur son projet éolien auraient déjà été émis en 2018, en application de l’article 5 de la loi du 15 mai 2018, tout en soulignant qu’à la suite du processus d’évaluation environnemental et compte tenu des divers avis reçus, notamment de la part de la direction de l’aviation civile, elle aurait déclaré renoncer à ses éoliennes projetées sous les n° 3 et 4.

La société demanderesse a encore précisé que toutes les données du dossier d’évaluation des incidences environnementales de son projet auraient été et seraient toujours consultables et qu’en conséquence, la société “C”, respectivement, à la suite de celle-ci, la société “B”, auraient disposé non seulement de tous les renseignements nécessaires concernant notamment l’implantation exacte des éoliennes projetées par elle, mais également de toutes les études environnementales réalisées.

Toujours selon la société demanderesse, le projet de la société “B”, lequel aurait déjà posé des problèmes de compatibilité à la base, aurait été modifié en cours de route sur des points fondamentaux en ce sens que les sites d’implantation des éoliennes auraient été revus, le type de machines aurait changé, la puissance des éoliennes initialement prévue serait passée du simple au double et le nombre d’éoliennes projetées aurait été réduit de 5 à 3. Malgré ces changements, le problème de compatibilité entre l’éolienne “x” de la société “B” et sa propre éolienne n°1 subsisterait. Elle précise, à cet égard, que le fait que l’éolienne “x” soit projetée à faible distance de la sienne soulèverait des questions en termes de sécurité que le « dossier commodo » de la société “B” aurait dû aborder. A cela s’ajouterait, tel que l’aurait souligné à juste titre l’administration communale de Wiltz dans son avis, que la réalisation conjointe de deux éoliennes sur un même site multiplierait les nuisances tandis que cette même situation induirait des pertes de productivité dans le chef de l’éolienne de la société “B”.

La société demanderesse souligne enfin qu’au vu des considérations qui précèdent, elle aurait demandé à la société “B” qu’elle abandonne l’éolienne “x” ou bien qu’alternativement cette éolienne soit déplacée à une distance d’environ 5 fois « le diamètre du rotor de l’éolienne, c'est-à-dire à environ 750 mètres du centre de l’éolienne n° 1 projetée par [elle], dans la direction NNE à ENE ». Comme il n’y aurait pas eu de suites à cette demande, les problèmes de compatibilité existant entre les deux éoliennes projetées l’auraient contrainte d’introduire le 5recours sous analyse.

Tant la partie étatique que la société “B” dénient dans le chef de la société demanderesse tout intérêt effectif, né et actuel à agir contre l’arrêté ministériel litigieux.

La partie étatique insiste, à cet égard, plus particulièrement sur le fait que l’argumentaire de la société demanderesse se limiterait à de simples suppositions vagues et générales tenant notamment à sa crainte de se voir elle-même refuser l’autorisation pour son projet d’éolienne n°1 en raison de la réalisation, à trop grande proximité de celle-ci, de l’éolienne “x” de la société “B”. Or, étant donné qu’aucune décision n’aurait encore été prise au sujet du projet d’éolienne de la société demanderesse, cette dernière ne saurait pas non plus se prévaloir d’un quelconque préjudice qui lui serait personnellement causé à ce titre par l’arrêté entrepris. Ce constat s’imposerait d’autant plus que la société demanderesse n’établirait pas que la réformation ou l’annulation de l’arrêté en cause impliquerait automatiquement la réalisation de son éolienne n°1 et encore moins de l’intégralité de son propre projet. Il ne faudrait pas non plus perdre de vue que le recours sous analyse porterait exclusivement sur la validité de l’arrêté ministériel du 31 août 2021 et non pas sur les autres autorisations futures ou d’ores et déjà existantes. Dans la mesure où ni la réformation ni l’annulation de l’arrêté ministériel litigieux n’apporterait une quelconque satisfaction personnelle et certaine à la société demanderesse, son recours serait à déclarer irrecevable.

L’argumentaire de la société “B” pour dénier à la société demanderesse tout intérêt personnel, direct, légitime, certain, né et actuel pour agir contre l’arrêté ministériel litigieux rejoint en grandes lignes celui de la partie étatique.

Elle précise, à cet égard, que la société “C” serait une holding créée en 2015 qui, d’un point de vue organisationnel, jouerait un rôle de porteuse de projets éoliens afin de déterminer en amont leur faisabilité sur le plan technique, commercial et environnemental et qui, une fois le projet élaboré et les études préliminaires réalisées, confierait les projets à des filiales dédiées à chacun des parcs éoliens. Ainsi, ce serait la société “C” qui aurait lancé le en septembre 2017 un projet de parc éolien devant se composer initialement de 5 éoliennes sur les communes de Wiltz et de Wincrange et qui aurait, une fois que le projet aurait été concrétisé et face au constat que son dossier de scoping était complet, confié la poursuite du projet à la société “B” laquelle aurait, en conséquence, introduit sa première « demande de commodo » le 11 mars 2020 pour un projet de parc éolien ne comportant à ce moment plus que 4 éoliennes.

Eu égard à ces considérations et tout en mettant en avant l’antériorité de son projet par rapport à celui de la société demanderesse, la société “B” insiste plus particulièrement sur le fait que comme l’intérêt à agir de la société demanderesse ne serait en réalité qu’un intérêt purement concurrentiel et donc indirect, le recours serait à déclarer irrecevable.

Dans son mémoire en réplique, la société demanderesse insiste tout d’abord sur le fait que le dossier de demande d’autorisation ayant porté sur la réalisation de 3 éoliennes et ayant abouti à l’arrêté ministériel litigieux aurait été introduit le 11 mars 2020 par la société “B”. Ce serait, à cet égard, à tort que la société “B” tenterait de se référer à un projet antérieur ayant visé 5 éoliennes, lequel aurait été introduit par une autre société, la société “C”, et qui aurait été abandonné par la suite. Il se serait, en tout état de cause, agi d’un projet différent de celui faisant l’objet de l’autorisation ministérielle litigieuse dans le chef de la société “B” et ce tant du point de vue du nombre des éoliennes projetées, que du point de vue du modèle de celles-

6ci, ou encore du point de vue des parcelles destinées à les accueillir, voire même du promoteur d’énergie verte en charge du dossier.

Il serait dès lors tout à fait incompréhensible qu’il ait été exigé de sa part qu’elle tienne compte dans le contexte de ses études de la situation du projet de la société “B”, donc d’un projet pour lequel un dossier n’aurait été introduit que le 11 mars 2020, tandis que la société “B” n’aurait, pour sa part, pas dû tenir compte du projet de la société demanderesse alors même que le dossier afférent aurait été déposé le 18 juin 2018.

En tout état de cause, la société demanderesse est d’avis qu’il se dégagerait à suffisance du dossier administratif que le projet de 5 éoliennes de la société “C” aurait été abandonné pour des raisons de faisabilité faute pour elle d’avoir disposé des droits réels sur les terrains concernés pour l’implantation de celles-ci et que 3 années plus tard, la société “B” aurait introduit un nouveau projet visant cette fois-ci à mettre en place 3 éoliennes, tout en modifiant le site d’implantation de l’éolienne “x” pour la décaler sur le territoire de la commune de Wincrange, implantation qui poserait des problèmes de compatibilité avec sa propre éolienne n°1.

Au vu de ces considérations, elle conteste que son recours puisse être assimilé à un « recours populaire », voire être réduit à un recours basé sur son seul « intérêt concurrentiel ».

Elle insiste plus particulièrement sur l’existence, dans son chef, d’un projet concret qui serait en phase finale d’autorisation et sur le fait qu’il serait « établi de manière certaine » que l’éolienne “x” de la société “B” se trouverait en situation conflictuelle avec sa propre éolienne n°1.

Elle continue en faisant valoir que son action ne serait pas motivée par un soi-disant « intérêt de concurrence », mais basée sur des éléments de risques qui auraient été épinglés tant par elle-même que par l’administration de l’Environnement et les communes concernées.

Ainsi, la situation de proximité entre les deux éoliennes projetées serait-elle susceptible de créer non seulement des inconvénients majeurs en termes de sécurité des installations respectives, mais également des risques environnementaux accrus néfastes pour son propre projet et des pertes économiques liées aux dégâts pouvant être occasionnés aux machines en raison de la trop grande proximité. Elle insiste, à cet égard, sur le caractère incompatible entre son propre projet d’éolienne et l’éolienne “x” de la société “B” en renvoyant à un avis émis le 8 décembre 2020 par un bureau d’ingénieur expert en matière de projets éoliens et ayant été chargé de la réalisation des études pour son propre projet.

La société demanderesse est, en tout état de cause, d’avis qu’elle disposerait d’un intérêt à agir direct, personnel, né et actuel à l’encontre du « projet litigieux » qui lui causerait indubitablement des griefs. En effet, non seulement serait-elle obligée de tenir compte, par le biais de la réalisation d’études diverses et coûteuses, du projet de la société “B” et ce, alors même que celui-ci serait postérieur au sien et que la société en question, de son côté, ne réaliserait aucune étude de compatibilité pour ses propres machines par rapport aux éoliennes projetées par la société demanderesse, mais à cela s’ajouteraient encore des risques de sécurité, de même que des pertes de productivité qui seraient engendrés par la présence trop rapprochée de deux éoliennes incompatibles.

Le risque tenant aux conséquences environnementales cumulatives engendrées par les éoliennes “x” de la société “B” et sa propre éolienne n°1 conduirait ainsi les autorités 7administratives à refuser d’autoriser son projet bien qu’il ait été introduit en amont du projet litigieux.

Au vu de ces considérations, la société demanderesse estime que la réformation, sinon l’annulation de l’arrêté ministériel litigieux serait de nature à lui donner une satisfaction directe puisque ce faisant, la société “B” serait obligée de reprendre son projet pour en corriger les vices et illégalités qu’il comporterait actuellement, tout en tenant compte des incidences cumulatives avec son propre projet.

Dans son mémoire en duplique, la société “B” maintient, en substance, ses contestations quant à l’absence d’intérêt à agir dans le chef de la société demanderesse en insistant sur le fait que les problèmes mis en avant par celle-ci ne seraient pas liés à la validité de l’autorisation ayant été délivrée et faisant l’objet du recours sous analyse mais qu’ils tireraient en réalité leur origine dans l’antériorité de son projet, antériorité qui aboutirait à imposer des sujétions additionnelles à la société demanderesse. Or, sous cet angle de vue, le tribunal ne devrait pas se laisser instrumentaliser pour permettre à une partie « de remporter une course qui risque d’être perdue de par le fait que l’un des concurrents est parti bien après l’autre ».

La partie étatique maintient également ses contestations antérieures en soulignant que le ministre ayant le Travail dans ses attributions n’aurait toujours pas été saisi d’une demande d’exploitation de la part de la société demanderesse et que la réalisation du projet invoqué par cette dernière resterait, en tout état de cause, incertaine.

Analyse du tribunal De manière générale, pour justifier d’un intérêt à agir il faut pouvoir se prévaloir de la lésion d’un intérêt personnel dans le sens que la réformation ou l’annulation de l’acte attaqué confère au demandeur une satisfaction certaine et personnelle1.

L’intérêt à agir conditionnant la recevabilité d’un recours administratif ne doit pas seulement être personnel et direct, effectif, né et actuel, mais encore être légitime et ne pas viser à voir consacrer une situation contraire à la loi2.

Il y a ensuite lieu de relever qu’en matière d’établissements classés, les voisins directs par rapport à un établissement projeté peuvent légitimement craindre des inconvénients résultant pour eux du projet. Ils ont intérêt à voir respecter les règles applicables en matière d’établissements dangereux et de permis de construire, du moins dans la mesure où la non-

observation éventuelle de ces règles est susceptible de leur causer un préjudice nettement individualisé3. En revanche, l’intérêt à agir personnel et direct de propriétaires ou habitants -

personnes physiques ou morales - d’immeubles situés dans les environs d’une exploitation litigieuse, lesquels n’ont pas la qualité de voisins directs par rapport à l’établissement litigieux, est conditionné par le caractère suffisant de la proximité géographique de leur lieu d’habitation par rapport au lieu d’implantation de l’établissement classé dont s’agit, lequel caractère 1 Trib. adm., 22 octobre 2007, n° 22489 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 12 et les autres références y citées.

2 Trib. adm., 27 janvier 1999, n° 10858 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 22 et les autres références y citées.

3 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9474 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 131 et les autres références y citées.

8suffisant est lui-même fonction de l’envergure de l’installation en cause, ainsi que de la nature et de l’importance des risques de nuisances mis en avant par les demandeurs4.

En l’espèce, la société demanderesse n’a, de manière non contestée, ni la qualité de voisin direct par rapport au projet éolien autorisé par l’arrêté ministériel litigieux, ni celle de propriétaire ou occupant d’un immeuble situé dans les environs du projet litigieux.

En effet, il est constant en cause, pour se dégager de ses propres explications, qu’elle a pour activité principale la construction et la gestion d’installations de production d’énergie renouvelable et pour objet social, notamment le « développement et la réalisation, sous quelque forme que ce soit, de projets en énergies classique et renouvelable ». Elle affirme, dans ce contexte, avoir l’intention « de mener à bien un projet de construction d’un parc éolien - ou à tout le moins l’installation d’éoliennes - sur le territoire de la commune de Wiltz (intitulé également « Parc éolien d’Eschweiler »), commune voisine de Wincrange », projet dans le cadre duquel elle serait en voie de faire approuver un projet éolien sur le même site que celui sur lequel est projeté le parc éolien de la société “B”. Cette situation de proximité impliquerait plus particulièrement que l’éolienne n° 1 qu’elle projetterait serait en conflit direct avec l’éolienne “x” projetée par la société “B”, faisant l’objet de l’autorisation litigieuse, et risquerait de ce fait de ne pas être autorisée.

Le tribunal est, à cet égard, amené à constater que l’argumentaire de la société demanderesse pour justifier l’existence dans son chef d’un intérêt à agir repose en substance sur la prémisse de l’antériorité de son projet éolien par rapport à celui de la société “B”, de même que sur le caractère concret de son propre projet qui serait lui-même en phase finale d’autorisation, la société “A” se prévalant principalement, voire exclusivement des prétendus griefs qu’elle craint de subir dans le cadre de la réalisation de son propre projet en raison de l’autorisation délivrée à la société “B” par le biais de l’arrêté ministériel litigieux.

En ce qui concerne d’abord la question litigieuse de savoir lequel des 2 projets en cause est antérieur à l’autre, le tribunal relève qu’il se dégage des éléments soumis à son appréciation que par courrier du 27 septembre 2017, la société “C” a introduit auprès de l’administration de l’Environnement un dossier de screening relatif à un projet de parc éolien se composant de 5 éoliennes qu’il était prévu de répartir sur le territoire des communes de Wiltz, à Eschweiler, et de Wincrange, à Derenbach, courrier auquel l’administration en question a donné suite le 30 novembre 2017, tout en informant la société “C” qu’une évaluation des incidences sur l’environnement devrait être réalisée en vertu du règlement grand-ducal modifié du 7 mars 2003 concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement.

Il n’est, dans ce contexte, pas contesté que la société “C” est une holding créée en 2015 qui, d’un point de vue organisationnel, joue un rôle de porteuse de projets éoliens afin de déterminer en amont leur faisabilité sur le plan technique, commercial et environnemental et qu’une fois qu’un projet est élaboré et que les études préliminaires ont été réalisées, les projets sont confiés à des filiales qui sont dédiées chacune à des parcs éoliens et qui, en tant que telles, exploitent les installations. Il se dégage ainsi des explications non autrement énervées de la société “B”, de même que, par ailleurs, de l’introduction contenue dans l’évaluation des incidences sur l’environnement, dans sa version introduite en avril 2019, que, face à la 4 Trib. adm. 16 décembre 2002, n° 14920 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 134 et les autres références y citées.

9concrétisation du projet éolien pour lequel la société “C” s’était adressée dès le mois de septembre 2017 à l’administration de l’Environnement et suite au constat que son dossier de scoping était complet, la société “C” a, en sa qualité de société holding et actionnaire unique de la société “B”, confié la poursuite du projet à cette dernière qui a, introduit le 11 mars 2020, la première demande d’autorisation d’établissement suivant la loi du 10 juin 1999 pour un projet de parc éolien s’étant composé au moment de l’introduction de ladite demande de 4 éoliennes pour, au final, se limiter à 3 éoliennes.

Si certes le projet pour lequel la société “C” a introduit une demande de screening prévoyait la mise en place de 5 éoliennes et qu’au final, la demande d’autorisation introduite par la société “B” a porté sur 3 éoliennes - suite à l’abandon des éoliennes prévues aux points 1 et 4 du dossier de scoping - et qu’un des emplacements prévus n’était plus à l’exact endroit envisagé initialement - suite au déplacement d’une centaine de mètres de l’éolienne prévue au point 2 -, cette circonstance ne change rien au fait qu’il s’agit d’un seul et même projet dont a été saisi l’administration de l’Environnement par le biais de l’introduction, en date du 27 septembre 2017, par la société “C” du dossier de screening y relatif. En effet, suivant les explications non autrement énervées de la société “B”, telles que sous-tendues par les pièces du dossier, la réduction du nombre initialement prévu et annoncé de 5 éoliennes à 4, et en définitive à 3 éoliennes, a été guidée par les avis des différents organismes qui ont été saisis au cours des études environnementales menées depuis septembre 2017 dans le cadre de l’évaluation des incidences et par le constat que certaines implantations initialement prévues étaient incompatibles avec les contraintes existantes sur les sites concernés. L’affirmation non autrement sous-tendue de la société demanderesse suivant laquelle le type de machines et la puissance des éoliennes initialement prévus par la société “B” auraient également changé en cours de route n’est pas de nature à ébranler ce constat. En effet, le caractère évolutif d’un projet d’éoliennes n’a rien d’exceptionnel, étant, à cet égard, relevé que la société demanderesse admet qu’à la suite du processus d’évaluation environnemental et compte tenu des divers avis reçus dans ce cadre, elle a elle-même été amenée à renoncer à deux des éoliennes initialement projetées. Au vu de ces considérations, c’est dès lors à tort que la société demanderesse tente de plaider l’existence de deux projets différents, l’un qu’elle désigne comme étant le « projet d’”C” » et l’autre comme étant le « projet d’”B” » lequel n’aurait vu le jour que le 11 mars 2020 suite à l’introduction de l’autorisation d’établissement afférente.

De l’autre côté, il se dégage clairement du dossier, et plus particulièrement d’un courrier du 20 mars 2018 émanant du ministre de l’Environnement, que ce n’est que le 16 février 2018 - soit près de 5 mois après que la société “C” ait déjà introduit le dossier de screening relatif au projet de parc éolien actuellement litigieux auprès de l’administration de l’Environnement, respectivement près de 3 mois après que ladite administration ait informé la société “C” de la nécessité de faire procéder à une évaluation des incidences sur l’environnement -, que la société demanderesse a contacté le département de l’Environnement pour solliciter « un avis préalable relatif à un projet de parc éolien sur le territoire de la commune de Wiltz, plus précisément à l’Ouest de la localité de Eschweiler aux lieux-dits « Wald », « Naassheck », « Knapp » et « Schoorthaff » ». Il ressort encore du courrier du 20 mars 2018 adressé par le ministre de l’Environnement à la société demanderesse que cette dernière a été rendue attentive au fait que « […] le site en question fait déjà l’objet d’un projet de parc éolien comprenant cinq éoliennes.

Le maître d’ouvrage dudit projet a été informé en date du 30 novembre 2017 par l’Administration de l’environnement sur la nécessité d’élaborer une évaluation des incidences sur l’environnement (EIE) pour ce projet. », tout en s’étant vue communiquer en annexe la décision afférente. Par le biais du même courrier, il a été signalé sans ambiguïté à la société demanderesse que son propre projet devait également être soumis à une étude sur les incidences 10environnementales et que celle-ci « devra aussi se pencher sur la compatibilité de [son] projet avec celui planifié par la société “C” S.A. et leurs effets cumulatifs. ». La société demanderesse a finalement été informée que si elle entendait poursuivre son projet de parc éolien, il était nécessaire qu’elle saisisse formellement l’autorité compétente par une demande dite de « screening » étant donné que l’avis préalable lui transmis par le biais du courrier du 20 mars 2018 ne constituerait pas une décision en vertu de la loi du 10 juin 1999.

Il se dégage dès lors sans équivoque des éléments et pièces du dossier que la société demanderesse était au courant de l’existence du projet de parc éolien litigieux et du fait qu’une demande dite de « screening » avait déjà été présentée auprès de l’autorité compétente en relation avec celui-ci, le tout à un moment où son propre projet n’en était qu’à la phase de l’introduction d’une demande d’avis préalable. Le tribunal relève, à cet égard, que ce n’est que le 18 juin 2018, soit près de 9 mois après que la société “C” ait déposé son dossier de screening, que la société demanderesse a finalement introduit auprès du ministre l’Environnement un « document de screening » comportant un projet d’éolienne à quelques 30 mètres de celle projetée par la société “C”. Dans son avis du 6 août 2018 sur le champ d’application et le niveau de détail du rapport d’évaluation à fournir dans le cadre de son projet de parc éolien, le département de l’Aménagement du territoire a également rendu la société demanderesse attentive au fait que se poserait « la question de la compatibilité de [son] projet avec un premier projet éolien de 5 machines planifié par la société « ”C” S.A. » sur le même site », avec la précision que ce dernier projet « dont le rapport scoping réalisé par « ”E” » date[rait] de mars 2018, et pour lequel [le département de l’Aménagement du territoire aurait] formulé un avis en date du 13 juin dernier, envisage[rait] pour ses éoliennes n°1 et n°2 quasiment le même emplacement que pour les éoliennes n°1 et n°2 » du projet de la société demanderesse.

Au vu des considérations qui précèdent, l’antériorité du projet de parc éolien de la société “B” par rapport à celui de la société demanderesse ne saurait être valablement remise en cause.

Pour être tout à fait complet, le tribunal se doit encore de constater que l’affirmation de la société demanderesse suivant laquelle son projet serait « en phase finale d’autorisation » reste à l’état de pure allégation pour n’être sous-tendue par aucun élément de preuve, la partie étatique soutenant, au contraire, que le ministre n’aurait à l’heure actuelle encore été saisi d’aucune demande d’exploitation afférente.

Il suit des développements qui précèdent que tout l’argumentaire de la société demanderesse pour justifier dans son chef l’existence d’un intérêt à agir en ce qu’il est fondé sur la prémisse aussi bien de l’antériorité de son projet d’éolienne par rapport à celui de la société “B” que sur le fait que son projet serait prétendument en phase finale d’autorisation, est d’ores et déjà à rejeter pour manquer de fondement.

A fortiori, la société demanderesse ne saurait se prévaloir de prétendus griefs que lui causerait le projet litigieux pour justifier dans son chef un « intérêt à agir direct, personnel, né et actuel à l’encontre » de celui-ci, la seule nécessité de devoir, le cas échéant, tenir compte d’un projet préexistant au sien afin de se voir autoriser son propre projet n’étant pas suffisante pour fonder un intérêt à agir direct, certain et actuel contre l’autorisation d’exploitation délivrée à une société concurrente. En effet, les griefs ainsi mis en avant trouvent en réalité leur origine non pas dans l’autorisation d’exploitation qui a été délivrée dans le chef de la société “B” et dont est seule saisi le tribunal à travers le recours sous analyse, mais dans l’antériorité du projet de la société “B” et les conséquences susceptibles d’en découler pour elle.

11 Ce constat s’impose d’autant plus que la société demanderesse n’établit pas que la réformation sinon l’annulation de l’arrêté ministériel litigieux impliquerait ipso facto qu’elle se verra attribuer une autorisation pour l’exploitation de son éolienne n°1 et encore moins pour l’intégralité de son projet de parc éolien.

En conclusion, le tribunal se doit de relever qu’en tant qu’hypothétique exploitant futur d’une éolienne sur une parcelle environnante à l’une des éoliennes ayant été autorisée par l’arrêté ministériel litigieux, l’intérêt à agir invoqué par la société demanderesse s’analyse concrètement dans l’intérêt concurrentiel. En effet, le recours sous analyse ne vise en fin de compte ni plus ni moins à empêcher, voire à retarder la réalisation d’un projet d’éoliennes dont l’antériorité par rapport à son propre projet vient d’être retenue ci-avant et en raison de l’existence duquel elle cherche à éviter de se voir, le cas échéant, imposer des obligations additionnelles afin de pouvoir réaliser son propre projet. Or, un tel intérêt concurrentiel doit s’analyser comme étant essentiellement indirect. En effet, un tel intérêt concurrentiel est étranger à l’intérêt dont un administré peut disposer à faire contrôler la légalité d’une décision administrative et ne saurait pas justifier la saisine des juridictions administratives d’une telle action de contrôle de légalité.

Il suit des considérations qui précèdent que l’intérêt à agir allégué de la société demanderesse ne se trouve pas vérifié en l’espèce, de sorte que le recours principal en réformation est à déclarer irrecevable.

Au vu de l’issue du litige, la demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 5.000 euros formulée par la société demanderesse sur le fondement de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999 est à rejeter.

Le même sort est à réserver à la demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 10.000 euros formulée par la société “B” et fondée sur la même disposition légale aux termes de laquelle « Lorsqu’il paraît inéquitable de laisser à la charge d’une partie les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, le juge peut condamner l’autre partie à lui payer le montant qu’il détermine. », étant donné qu’elle n’établit pas qu’il serait inéquitable de laisser les frais non répétibles à sa charge.

Par ces motifs le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

déclare le recours principal en réformation irrecevable ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

rejette la demande en communication de l’intégralité du dossier administratif ;

rejette les demandes tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure, telles que formulées respectivement par la société à responsabilité limitée “A” SARL et la société anonyme “B” SA ;

condamne la société demanderesse aux frais et dépens.

12Ainsi jugé par :

Françoise Eberhard, premier vice-président, Alexandra Castegnaro, vice-président, Alexandra Bochet, premier juge, et lu à l’audience publique du 5 octobre 2023 par le premier vice-président, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Françoise Eberhard Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 6 octobre 2023 Le greffier du tribunal administratif 13


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 46567
Date de la décision : 05/10/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-10-05;46567 ?

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