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05/10/2023 | LUXEMBOURG | N°42205a

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 05 octobre 2023, 42205a


Tribunal administratif N° 42205a du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:42205a 2e chambre Inscrit le 8 janvier 2019 Audience publique du 5 octobre 2023 Recours formé par Monsieur … et Madame …, …, contre deux décisions du conseil communal de la commune de Boevange/Attert et une décision du ministre de l’Intérieur, en présence de Madame … et consorts, …, en matière de plan d’aménagement général

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 42205 du r

ôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 8 janvier 2019 par Maître Hervé Hansen, av...

Tribunal administratif N° 42205a du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:42205a 2e chambre Inscrit le 8 janvier 2019 Audience publique du 5 octobre 2023 Recours formé par Monsieur … et Madame …, …, contre deux décisions du conseil communal de la commune de Boevange/Attert et une décision du ministre de l’Intérieur, en présence de Madame … et consorts, …, en matière de plan d’aménagement général

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 42205 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 8 janvier 2019 par Maître Hervé Hansen, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … et de son épouse, Madame …, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation :

1) de la délibération du conseil communal de la commune de Boevange/Attert (actuellement commune de Helperknapp) du 19 juin 2017 portant mise sur orbite de la procédure de refonte du plan d’aménagement général ;

2) des délibérations du conseil communal de la commune de Boevange/Attert des 20 et 27 décembre 2017 portant adoption du projet d’aménagement général, parties graphique et écrite, et ;

3) de la décision du ministre de l’Intérieur du 23 août 2018 portant approbation des délibérations du conseil communal de la commune de Boevange/Attert des 20 et 27 décembre 2017 et ayant déclaré recevable et partiellement fondé leur réclamation ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Martine Lisé, demeurant à Luxembourg, du 6 février 2019, portant signification de ce recours à l’administration communale de Helperknapp, établie à L-7481 Tuntange, 2, rue de Hollenfels, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 8 février 2019 par Maître Steve Helminger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la commune de Helperknapp, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 5 avril 2019 ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 3 mai 2019 par Maître Steve Helminger, au nom de la commune de Helperknapp ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 3 juin 2019 par Maître Hervé Hansen au nom de Monsieur … et de Madame …, préqualifiés ;

1 Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 1er juillet 2019 par Maître Steve Helminger, au nom de la commune de Helperknapp ;

Vu le jugement de la troisième chambre du tribunal administratif du 14 décembre 2021;

Vu l’arrêt de la Cour administrative du 14 juillet 2022, inscrit sous le numéro 46928C du rôle ayant annulé le jugement du 14 décembre 2021, inscrit sous le numéro 42205 du rôle, et renvoyé le dossier devant le tribunal administratif autrement composé en prosécution de cause ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Laura Geiger, en remplacement de l’huissier de justice Martine Lisé, demeurant à Luxembourg, du 22 novembre 2022, portant signification du recours en réformation, sinon en annulation introduit le 8 janvier 2019, ainsi que du jugement du tribunal administratif du 14 décembre 2021, prévisé, à Madame …, demeurant à L-…, à Monsieur …, demeurant à L-…, et à Monsieur …, demeurant à L-…, ci-

après désignés par « les consorts … » ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 23 novembre 2022 par la société anonyme Schiltz & Schiltz SA, inscrite sur la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-1610 Luxembourg, 24-26, avenue de la Gare, immatriculée au registre de commerce et des sociétés sous le numéro B 220251 et représentée aux fins de la présente procédure par Maître Charles Hurt, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom des consorts …, préqualifiés ;

Entendues toutes les parties en leurs observations en chambre du conseil du 12 décembre 2022 ;

Vu l’ordonnance du président de la deuxième chambre du tribunal administratif du 13 décembre 2022 ayant autorisé les parties à produire chacune un mémoire ;

Vu le mémoire de la société anonyme Schiltz & Schiltz SA, déposé au greffe du tribunal administratif le 10 mars 2023, pour compte des consorts …, préqualifiés ;

Vu le mémoire de Maître Steve Helminger, déposé au greffe du tribunal administratif le 31 mars 2023, pour compte de la commune de Helperknapp, préqualifiée ;

Vu le mémoire du délégué du gouvernement, déposé au greffe du tribunal administratif le 11 avril 2023, pour compte de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire de Maître Hervé Hansen, déposé au greffe du tribunal administratif le 15 mai 2023, pour compte de Monsieur … et de Madame …, préqualifiés ;

Vu les pièces versées en cause ainsi que les actes critiqués ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Hervé Hansen, Maître Steve Helminger, Maître Charles Hurt et Monsieur le délégué du gouvernement Luc Reding en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 5 juin 2023.

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2Lors de sa séance publique du 19 juin 2017, le conseil communal de Boevange/Attert (actuellement commune de Helperknapp), ci-après désigné par « le conseil communal », fut saisi par le collège des bourgmestre et échevins de la même commune, ci-après dénommé le « collège échevinal », en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après désignée par la « loi du 19 juillet 2004 », d’un projet d’aménagement général pour ladite commune qu’il mit sur orbite en conséquence à travers un vote positif, de sorte que le collège échevinal put procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi du 19 juillet 2004.

Par courrier adressé au collège échevinal le 18 juillet 2017, Monsieur … et son épouse, Madame …, ci-après désignés par les « époux … », propriétaires de la parcelle cadastrale n° …, inscrite au cadastre de la commune de Boevange/Attert, section … de Buschdorf, soumirent leurs objections à l’encontre du projet d’aménagement général de la commune de Boevange/Attert.

Lors de sa séance publique du 20 décembre 2017, le conseil communal décida « […] d’adopter le projet PAG suivant les différents votes ci-avant et les termes de la délibération ci-dessus […] » et lors de sa séance publique du 27 décembre 2017, il décida encore d’approuver les propositions du collège échevinal sur les observations d’autres réclamants, tout en retenant que « […] la délibération ci-dessus s’ajoute à celle n° 2 du 20 décembre 2017 et clôture et termine le vote du conseil communal concernant l’adoption du nouveau projet PAG de la commune de Boevange/Attert, vote prévu par l’article 14 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain […] ».

Par courrier du 16 janvier 2018, les époux … introduisirent auprès du ministre de l’Intérieur, ci-après désigné par « le ministre », une réclamation à l’encontre des délibérations du conseil communal des 20 et 27 décembre 2017.

Par décision du 23 août 2018, notifiée aux époux … le 8 octobre 2018, le ministre approuva les délibérations précitées du conseil communal des 20 et 27 décembre 2017, portant adoption du plan d’aménagement général, ci-après désigné le « PAG », et déclara recevable et partiellement fondée la réclamation introduite par les époux ….

Ladite décision ministérielle est libellée comme suit dans ses parties pertinentes pour le présent litige :

« […] Par la présente, j’ai l’honneur de vous informer que j’approuve les délibérations du conseil communal des 20 et 27 décembre 2017 portant adoption de la refonte du plan d’aménagement général (dénommé ci-après « PAG ») couvrant le territoire de l’ancienne commune de Boevange-sur-Attert, présenté par les autorités communales de Helperknapp.

Conformément à l’article 18 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, j’ai fait droit à certaines objections et observations formulées par les réclamants à l’encontre du projet d’aménagement général.

La procédure d’adoption du projet d’aménagement général s’est déroulée conformément aux exigences des articles 10 et suivants de la loi précitée du 19 juillet 2004.

3Les modifications ainsi apportées à la partie graphique et à la partie écrite du PAG sont illustrées dans la présente décision et en font partie intégrante. Il est laissé le soin aux autorités communales d’adapter les délimitations des plans d’aménagement particulier « quartier existant » sur les plans de repérage et les parties graphiques afférentes et ce conformément aux modifications résultant de la décision ministérielle. Les autorités communales sont ainsi tenues de me faire parvenir des versions coordonnées de la partie écrite et de la partie graphique du PAG, ainsi que des plans d’aménagement particulier « quartier existant » adaptés en conséquence.

Il est statué sur les réclamations émanant de […] Monsieur et Madame … […].

Ad réclamation … Premièrement, les réclamants contestent la réalisation du plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » intitulé « BU- ʺ…ʺ » et préfèreraient voir ces terrains maintenus en « zone agricole » Cette partie de la réclamation s’avère partiellement fondée étant donné que la réalisation du projet d’urbanisation « BU- ʺ…ʺ » constituerait un développement tentaculaire en ces lieux. Aussi, l’existence de deux exploitations agricoles d’une certaine envergure à proximité directe, source de nuisances certaines, ne plaide pas en faveur de la création d’un quartier d’habitation en ces lieux. Vu le fait qu’actuellement deux maisons d’habitations sont incluses dans le périmètre d’agglomération, il convient de maintenir les parcelles cadastrales nos …, …, … en « zone mixte villageoise [MIX-v] » et de soumettre ces fonds à un plan d’aménagement « quartier existant » afin d’arrondir le tissu urbain avec cohérence en ces lieux. Quant aux autres terrains du projet d’urbanisation « BU- ʺ…ʺ », il convient de les maintenir en zone verte.

Deuxièmement, les réclamants relèvent une erreur matérielle au niveau de la partie graphique du PAG quant à l’emplacement actuel de la « zone de servitude urbanisation – corridor 15m » qui recouvre une partie de leur parcelle n° …, sise au lieu-dit « … » à Buschdorf.

Cette partie de la réclamation est fondée étant donné que cette servitude couvre effectivement le silo à fourrages verts actuellement existant. Dans la mesure où une partie des terrains initialement prévus en « zone mixte villageoise [MIX-v] » sont maintenus en zone verte, il convient de supprimer ladite « zone de servitude urbanisation – corridor 15m » afin de préserver la constructibilité des terrains restants.

La partie graphique est modifiée en conséquence, conformément à l’illustration telle reprise ci-dessous. […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 8 janvier 2019, les époux … ont fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation :

1) de la délibération du conseil communal de la commune de Boevange/Attert (actuellement commune de Helperknapp) du 19 juin 2017 portant mise sur orbite de la procédure de refonte du plan d’aménagement général ;

42) des délibérations du conseil communal de la commune de Boevange/Attert des 20 et 27 décembre 2017 portant adoption du projet d’aménagement général, parties graphique et écrite, et ;

3) de la décision du ministre de l’Intérieur du 23 août 2018 portant approbation des délibérations du conseil communal de la commune de Boevange/Attert des 20 et 27 décembre 2017 et ayant déclaré recevable et partiellement fondé leur réclamation.

Par jugement du 14 décembre 2021, le tribunal administratif, troisième chambre, après s’être déclaré incompétent pour connaître du recours principal en réformation, tout en ayant déclaré le recours subsidiaire en annulation irrecevable pour autant qu’il était dirigé contre la délibération du conseil communal de Boevange/Attert (actuellement la commune de Helperknapp) du 19 juin 2017 portant mise sur orbite de la procédure de refonte du plan d’aménagement général, a reçu pour le surplus le recours subsidiaire en annulation en la forme et l’a déclaré partiellement justifié, de sorte à avoir annulé la décision du ministre de l’Intérieur du 23 août 2018 et les délibérations du conseil communal de la commune de Boevange/Attert des 20 et 27 décembre 2017 portant adoption du projet d’aménagement général, dans l’unique mesure où elles ont classé les parcelles nos …, … et … en zone [Mix-v] et partant en zone constructible.

Par arrêt du 14 juillet 2022, inscrit sous le numéro 46928C du rôle, la Cour administrative a annulé le jugement du 14 décembre 2021 pour violation du principe fondamental de l’Etat de droit et des exigences d’un procès équitable pour avoir statué sans avoir conféré la qualité de parties au procès aux propriétaires de parcelles dont le classement a été attaqué en annulation par des parties dans le cadre de la procédure d’aplanissement des difficultés devant les juridictions administratives, en l’occurrence aux consorts …, et renvoyé le dossier devant le tribunal administratif autrement composé en prosécution de cause.

Suite à l’arrêt en question, le recours en réformation, sinon en annulation déposé au greffe du tribunal administratif le 8 janvier 2019 par les époux … a été signifié à l’initiative de ceux-ci le 22 novembre 2022 par exploit d’huissier de justice aux consorts … au nom desquels la société anonyme Schiltz & Schiltz SA s’est constituée avocat à la Cour dès le lendemain.

Par ordonnance du président de la deuxième chambre du tribunal administratif du 13 décembre 2022, les consorts … se sont vu autoriser à produire un mémoire afin de prendre position par rapport aux écrits contentieux échangés entre parties depuis l’introduction du recours sous analyse. Les époux …, l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg et la commune ont, quant à eux, été autorisés, dans le respect du principe du contradictoire, à produire chacun un mémoire ayant pour seule finalité de prendre position par rapport au mémoire à produire par les consorts …, l’affaire ayant pour le surplus été fixée pour plaidoiries au 5 juin 2023 devant la deuxième chambre du tribunal administratif.

Etant donné que la Cour administrative a annulé purement et simplement le jugement prévisé et renvoyé le dossier en prosécution de cause devant le tribunal autrement composé, il appartient à présent au tribunal, dans sa nouvelle composition, de statuer à nouveau en fait et en droit sur l’affaire en cause.

A titre liminaire, il convient de relever qu’il est constant en cause que jusqu’au 6 mai 2021 et donc aussi bien au moment de la prise des décisions litigieuses que de l’introduction du recours sous analyse, les parcelles nos …, … et … appartenaient à Madame … et que par acte de donation-partage passé devant notaire à cette même date, Madame … a transféré lesdites 5parcelles à ses deux fils, de sorte à ce que depuis cette date, Monsieur … est propriétaire de la parcelle no …, tandis que Monsieur … est propriétaire des parcelles nos … et ….

1. Quant à la compétence Les décisions sur les projets d’aménagement, lesquels ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’ils concernent et le régime des constructions à y ériger, ont un caractère réglementaire. La décision d’approbation du ministre participe au caractère réglementaire de l’acte approuvé1, étant précisé que le caractère réglementaire ainsi retenu s’étend également au volet de la décision ministérielle du 23 août 2018 ayant statué sur les réclamations introduites par les époux …, intervenue dans le processus général de l’élaboration de l’acte approuvé.

Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par la « loi du 7 novembre 1996 », seul un recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère réglementaire.

Le tribunal est partant incompétent pour statuer sur le recours principal en réformation.

En revanche, il est compétent pour statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

2. Quant à la loi applicable Le tribunal précise que la procédure d’adoption d’un PAG, est prévue par la loi du 19 juillet 2004. Or, celle-ci a été modifiée à plusieurs reprises à savoir (i) par une loi du 28 juillet 2011 entrée en vigueur, en application de son article 45, en date du 1er août 2011, (ii) par la loi du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire, publiée au Mémorial A, n° 160 du 6 septembre 2013, (iii) par la loi du 14 juin 2015 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, publiée au Mémorial A, n° 113 du 17 juin 2015, (iv) par la loi du 3 mars 2017 dite « Omnibus », entrée en vigueur, en application de son article 76, le 1er avril 2017, (v) par la loi du 17 avril 2018 concernant l’aménagement du territoire, (vi) par la loi du 18 juillet 2018 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain et dernièrement (vii) par la loi du 30 juillet 2021 relative au Pacte logement 2.0.

Etant donné, d’une part, que le tribunal vient de retenir que seul un recours en annulation a pu être introduit à l’encontre des décisions déférées et, d’autre part, que dans le cadre d’un tel recours, le juge administratif est amené à apprécier la légalité de la décision déférée en considération de la situation de droit et de fait ayant prévalu au jour où elle a été prise2, les modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par les lois précitées du 17 avril 2018, du 18 juillet 2018 et du 30 juillet 2021, entrées en vigueur postérieurement à la prise des actes litigieux, ne sont pas à prendre en considération en l’espèce, étant plus particulièrement précisé à cet égard que les actes de tutelle administrative, tels que les décisions ministérielles 1 Cour adm., 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Actes réglementaires, n° 55et les autres références y citées.

2 Trib. adm., 27 janvier 1997, n° 9724 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Recours en annulation, n° 21 et les autres références y citées.

6litigieuses, rétroagissent à la date de la décision approuvée et tombent dès lors sous le champ d’application des lois en vigueur à la date de la prise de décision de l’acte initial.

Il s’ensuit que la version de la loi du 19 juillet 2004 applicable au présent litige est celle résultant des modifications opérées par les lois des 28 juillet 2011, 30 juillet 2013, 14 juin 2015 et 3 mars 2017, sous réserve du fait que les lois des 17 avril et 18 juillet 2018, sont susceptibles de s’appliquer à l’examen de la légalité de la seule décision ministérielle du 23 août 2018, qui est, parmi les actes litigieux, la seule à avoir été adoptée postérieurement à leur entrée en vigueur.

3. Quant à la recevabilité du recours subsidiaire en annulation 3.1. Quant au volet du recours subsidiaire en annulation dirigé contre la délibération du conseil communal du 19 juin 2017 portant mise sur orbite de la procédure de refonte du PAG Tant le délégué du gouvernement que la commune se sont rapportés dans leurs mémoires en réponse à prudence de justice en ce qui concerne la recevabilité en la pure forme du recours, étant relevé que le fait de se rapporter à justice équivaut à une contestation3.

S’agissant du volet du recours en ce qu’il est dirigé contre la délibération du conseil communal de la commune de Boevange/Attert du 19 juin 2017 portant mise sur orbite de la procédure de refonte du PAG, il y a lieu de relever qu’aux termes de l’article 2, paragraphe (1), de la loi du 7 novembre 1996, un recours est ouvert « contre toutes les décisions administratives à l’égard desquelles aucun autre recours n’est admissible ». Par ailleurs, en vertu de l’article 7 de la même loi : « (1) Le tribunal administratif statue encore sur les recours dirigés pour incompétence, excès et détournement de pouvoir, violation de la loi ou des formes destinées à protéger les intérêts privés, contre les actes administratifs à caractère réglementaire, quelle que soit l’autorité dont ils émanent.

(2) Ce recours n’est ouvert qu’aux personnes justifiant d’une lésion ou d’un intérêt personnel, direct, actuel et certain. ».

Ces articles limitent ainsi l’ouverture d’un recours devant les juridictions administratives notamment aux conditions cumulatives que l’acte litigieux doit constituer une décision administrative, c’est-à-dire émaner d’une autorité administrative légalement habilitée à prendre des décisions unilatérales obligatoires pour les administrés et qu’il doit s’agir d’une véritable décision, affectant les droits et intérêts de la personne qui la conteste4.

L’acte administratif susceptible de faire l’objet d’un recours contentieux doit constituer une véritable décision de nature à faire grief, c’est-à-dire un acte susceptible de produire par lui-même des effets juridiques affectant la situation personnelle et patrimoniale de celui qui réclame. N’ont pas cette qualité de décision faisant grief, comme n’étant pas destinées à 3 Trib. adm., 23 janvier 2013, n° 30455 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 883 et les autres références y citées.

4 F. Schockweiler, Le contentieux administratif et la procédure administrative non contentieuse en droit luxembourgeois, n° 46, p. 28.

7produire, par elles-mêmes, des effets juridiques, les informations données par l’administration, tout comme les déclarations d’intention ou les actes préparatoires d’une décision5.

Force est au tribunal de constater que la Cour administrative a retenu dans un arrêt du 15 décembre 2016, portant le numéro 38139C du rôle, que « le vote du conseil communal prévu à l’article 10, alinéa 2, de la loi sous revue n’est plus comparable à l’adoption provisoire du PAG et ne saurait dès lors être analysé en adoption du projet de plan, mais en une sorte de mise sur orbite dudit projet qui, par les soins non pas du conseil communal, mais du collège échevinal, dès ce feu vert donné, procède aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la même loi. Complémentairement, sur les consultations menées, l’opération visée à l’article 14 consiste en règle générale dans l’adoption unique et définitive par le conseil communal du projet de PAG qui devient le PAG adopté par l’organe compétent de la commune. Cette adoption peut se faire soit sous la forme originale, soit, dans la majorité des cas, sur les modifications opérées par le conseil communal compte tenu des consultations menées. […] ».

Dès lors, le vote positif émis par le conseil communal le 19 juin 2017, en application de l’article 10, paragraphe (2) de la loi du 19 juillet 2004, n’est pas à qualifier de décision administrative, étant donné qu’aux termes dudit arrêt de la Cour administrative, le vote en question n’est plus comparable à l’adoption provisoire du PAG à laquelle le conseil communal procédait sous l’empire de la loi du 19 juillet 2004, dans sa version antérieure à la modification intervenue par la loi du 28 juillet 2011, en ce qu’il ne constitue qu’une « mise sur orbite » du projet, respectivement un « feu vert » que le conseil communal donne au collège échevinal pour continuer la procédure et pour procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi du 19 juillet 2004, après avoir constaté que le projet est suffisamment élaboré à cette fin.

Or, une telle « mise sur orbite », respectivement un tel « feu vert », qui n’emporte aucune adoption ou approbation du projet d’aménagement général, mais qui traduit le seul constat du conseil communal que le projet est suffisamment élaboré pour que le collège échevinal puisse continuer la procédure, ne fait que préparer l’adoption ultérieure du PAG, sans être susceptible de produire par elle-même, respectivement par lui-même des effets juridiques sur la situation personnelle ou patrimoniale des administrés, de sorte à constituer, non pas un acte administratif de nature à faire grief, mais un simple acte préparatoire ne pouvant, en tant que tel, faire l’objet d’un recours contentieux6.

Il s’ensuit que le recours subsidiaire en annulation est à déclarer irrecevable pour autant qu’il vise la délibération du conseil communal du 19 juin 2017.

3.2. Quant à la question de la recevabilité du recours subsidiaire en annulation en ce qu’il est dirigé contre les décisions du conseil communal des 20 et 27 décembre 2017, ainsi que contre la décision du ministre du 23 août 2018 Dans le mémoire qu’ils ont été autorisés à déposer après s’être vu signifier le recours sous analyse, les consorts … soulèvent l’irrecevabilité du recours pour défaut d’intérêt à agir dans le chef des époux ….

5 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, confirmé sur ce point par Cour adm., 19 février 1998, n° 10263C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Actes administratifs, n° 68 et les autres références y citées.

6 Trib. adm., 25 septembre 2017, n° 37637 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Actes réglementaires, n° 62 et les autres références y citées.

8Afin de sous-tendre ce moyen d’irrecevabilité, ils expliquent que dans le cadre de la fusion entre les communes de Boevange-sur-Attert et Tuntange, ayant pris effet le 1er janvier 2018, un nouveau projet de PAG de la commune « fusionnée » aurait été mis en procédure et qu’aux termes de celui-ci, il serait prévu de classer une zone bien plus vaste et directement adjacente à la propriété des demandeurs dans le périmètre constructible, tout en supprimant la zone tampon « … » revendiquée par ces derniers. Ils précisent que ce projet de modification ponctuelle serait toujours en cours d’approbation par-devant le ministre.

Au vu de ces considérations, les consorts … sont d’avis que le recours sous analyse, en ce qu’il est dirigé contre des dispositions du PAG actuellement en vigueur serait dépourvu de tout effet utile et donc à rejeter pour défaut d’intérêt à agir.

Les consorts … dénient encore tout un intérêt à agir dans le chef des époux … en ce que ceux-ci n’établiraient pas en quoi le PAG, tel qu’approuvé, affecterait négativement leur situation personnelle. Ils se prévaudraient, en effet, des nuisances engendrées par leur propre exploitation pour soutenir que les terrains appartenant à autrui devraient être exclus du périmètre constructible ou encore pour demander la mise en place d’une « zone tampon » sur la propriété de Monsieur …, le tout sous prétexte de « préserver des futurs résidents de nuisances certaines » et de vouloir éviter un développement tentaculaire de la localité de Buschdorf. Or, ce faisant, ils plaideraient par procureur, voire exerceraient l’action populaire en ne se prévalant de la lésion d’aucun intérêt personnel, personnel, direct, actuel et certain, tel qu’exigé par l’article 7, paragraphe (2) de la loi du 7 novembre 1996. Ils n’établiraient, en tout état de cause, pas en quoi l’annulation des décisions entreprises leur procurerait une satisfaction personnelle.

Les consorts … sont d’avis que le véritable « intérêt » poursuivi par les demandeurs consisterait à tout mettre en œuvre pour ne pas avoir de voisins.

Les demandeurs plaident, quant à eux, qu’ils disposeraient bien d’un intérêt à agir contre les actes déférés.

Aux termes de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996, « (1) Le tribunal administratif statue encore sur les recours dirigés pour incompétence, excès et détournement de pouvoir, violation de la loi ou des formes destinées à protéger les intérêts privés, contre les actes administratifs à caractère réglementaire, quelle que soit l’autorité dont ils émanent.

(2) Ce recours n’est ouvert qu’aux personnes justifiant d’une lésion ou d’un intérêt personnel, direct, actuel et certain. […] ».

Un demandeur doit justifier d’un intérêt personnel distinct de l’intérêt général pour pouvoir introduire un recours contre un acte administratif à caractère règlementaire. Par ailleurs, concernant le caractère direct de l’intérêt à agir, pour qu’il puisse être reçu à agir contre un acte administratif à caractère règlementaire, il ne suffit pas qu’un demandeur fasse état d’une affectation de sa situation, mais il doit établir l’existence d’un lien suffisamment direct entre l’acte querellé et sa situation personnelle. Finalement, la condition relative au caractère né et actuel, c’est-à-dire au caractère suffisamment certain, d’un intérêt invoqué implique qu’un intérêt simplement éventuel ne suffit pas pour que le recours contre un acte administratif à 9caractère règlementaire soit déclaré recevable7. Ainsi, le recours contentieux contre un acte administratif à caractère règlementaire n’est recevable que si l’annulation est susceptible de profiter personnellement et directement au demandeur en ce sens que sa situation, de fait ou de droit, doit s’en trouver améliorée8.

En l’espèce, tel que relevé ci-avant, les époux … sont propriétaires de la parcelle cadastrale n°… sur laquelle ils exploitent de manière non contestée une ferme laitière et qui accueille une grange, deux étables à vaches laitières, ainsi qu’un silo pour plantes fourragères.

Il est encore un fait qu’avant la refonte du PAG en cause, la parcelle prévisée était classée en « zone d’habitation 1a », tandis que les parcelles adjacentes, respectivement situées à proximité directe de la parcelle en question, dont les parcelles portant les numéros cadastraux …, … et …, étaient classées en zone « secteur agricole ». Il se dégage ensuite des explications non contestées des demandeurs que lors de la réunion d’aplanissement des différends en date du 18 octobre 2017, il a été décidé qu’une « zone tampon » d’au moins 25 mètres à partir du mur extérieur du silo serait mise en place entre leur ferme laitière et la zone d’habitation prévue sur les parcelles adjacentes.

Il ressort ensuite des éléments du dossier que lors de l’adoption définitive du PAG, le conseil communal a classé les trois parcelles prévisées en zone mixte villageoise, ci-après désignée par « zone [MIX-v] », superposée d’une « Zone soumise à un plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » » appelée « BU- "…" », désignée ci-après par « PAP … ». La partie graphique du PAG ainsi adopté renseigne, par ailleurs, une superposition d’une « Zone de servitude urbanisation « corridor 15m », ci-après désignée par « la zone … », couvrant, de manière non contestée, pour un tiers la parcelle portant le numéro cadastral … et pour deux tiers la parcelle des époux … et ce, à l’endroit même où se trouve leur silo à plantes fourragères.

Il se dégage ensuite des explications concordantes des parties que les époux … ont formulé une réclamation auprès du ministre contre ladite délibération du conseil communal en vue de voir rectifier l’emplacement de la zone …, ainsi que reclasser les parcelles visées par la zone « PAP … » en zone agricole, réclamation suite à laquelle, le ministre a uniquement décidé de maintenir le classement des trois parcelles prévisées en zone [Mix-v] et supprimé pour le surplus la zone « PAP … », tout en supprimant, par ailleurs, la zone ….

Le tribunal se doit de relever que les époux … expliquent de manière cohérente que l’extension du périmètre d’agglomération sur les trois parcelles litigieuses et la suppression concomitante de la zone … risquerait d’avoir des répercussions négatives sur leur situation de propriétaires de la parcelle cadastrale n°… en ce que jusqu’à présent, ils auraient pu exploiter leur ferme laitière sans avoir égard aux répercussions que les nuisances découlant de cette exploitation et notamment celles émanant du silo seraient susceptibles d’avoir sur les propriétaires ou occupants des fonds voisins.

Or, il doit être admis que la modification des normes régissant le régime urbanistique de parcelles adjacentes à celles d’un voisin confère à celui-ci un intérêt à voir contrôler la légalité de cette modification lorsque cette dernière est susceptible d’affecter ses droits et 7 Trib. adm., 15 mai 2002, n° 14420 du rôle, confirmé par Cour adm., 22 janvier 2004, n° 16628C du rôle, Pas.

adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 39 et les autres références y citées.

8 Trib. adm., 25 juin 2008, n° 22066 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 39 et les autres références y citées.

10obligations et partant sa situation personnelle et patrimoniale9. De ce point de vue, les demandeurs ont un intérêt à agir contre les actes déférés.

Cette conclusion n’est pas ébranlée par la circonstance qu’il existe un projet de modification ponctuelle du PAG, respectivement qu’une révision du PAG de la commune fusionnée serait actuellement en cours de procédure, puisque, de manière non contestée, la procédure de modification en question n’a pas été poursuivie suite à un avis négatif du ministre, tandis que la révision du PAG de la commune fusionnée est toujours en procédure, de sorte que seul le PAG tel qu’adopté par le conseil communal lors de ses délibérations du 20 et 27 décembre 2017, elles-mêmes approuvées par décision du ministre du 23 août 2018, produit un effet juridique. De ce point de vue, les époux … conservent dès lors un intérêt à faire contrôler la légalité de ladite décision ministérielle rejetant partiellement leur réclamation et approuvant pour le surplus le PAG tel qu’adopté, de même que des délibérations du conseil communal des 20 et 27 décembre 2017 n’ayant pas tenu compte de leurs objections, respectivement rejeté celles-ci.

En l’absence d’autres moyens d’irrecevabilité et au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le tribunal est amené à conclure que le recours subsidiaire en annulation est recevable pour autant qu’il vise les décisions du conseil communal des 20 et 27 décembre 2017 et du ministre du 23 août 2018 portant adoption, respectivement approbation du PAG de la commune de Helperknapp.

4. Quant au fond A l’appui de leur recours, les époux … réitèrent tout d’abord et en substance les faits et rétroactes tels que repris ci-avant.

En droit, ils concluent, en premier lieu, à l’annulation de la décision ministérielle refusant de faire droit à leur demande en maintien du classement des parcelles portant les numéros cadastraux …, … et … en zone agricole pour erreur manifeste d’appréciation et défaut de motivation, voire pour cause de motivation contradictoire dans le chef du ministre. En effet, celui-ci aurait, d’un côté, reconnu qu’une urbanisation des parcelles visées par la zone « PAP … » entraînerait un développement tentaculaire des lieux et que l’existence de deux exploitations agricoles à proximité directe ne plaiderait pas en faveur de la création d’un quartier d’habitation, pour, de l’autre côté, maintenir le classement des trois parcelles les plus proches de leur exploitation laitière en zone [MIX-v]. Ils estiment, par ailleurs, qu’outre d’être contradictoire, la motivation ministérielle relative à l’existence de deux maisons d’habitation relèverait d’une mauvaise appréciation des faits alors que seule une maison, à savoir celle sise au 3, …, serait incluse dans ledit périmètre d’agglomération tandis que la deuxième, sise au 5, …, se situerait en zone agricole.

Le ministre aurait encore sous-estimé le degré de nuisances sonores et olfactives émanant de leur exploitation agricole, les demandeurs expliquant à cet égard que l’extension du périmètre d’agglomération aurait déjà, en 1994, fait l’objet d’une appréciation par la commission des bâtisses de la commune, laquelle aurait retenu que la construction de maisons d’habitation à moins de 100 mètres de leur exploitation serait problématique.

9 En ce sens : Trib. adm., 16 novembre 2017, n° 37748 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n°113.

11Les décisions entreprises reposeraient dès lors sur des motifs erronés, contradictoires et insuffisants et seraient à annuler.

En deuxième lieu, les époux … invoquent une violation de l’article 2, point d) de la loi du 19 juillet 2004 par la commune et par le ministre, en ce que le classement des parcelles portant les numéros cadastraux …, … et … en zone [MIX-v] plutôt qu’en zone agricole impacterait négativement la qualité de vie des habitants. Ils expliquent, à cet égard, qu’une urbanisation des parcelles dont question soumettrait les futurs habitants à des nuisances non négligeables en termes olfactif et visuel ou sonore inhérentes à l’exploitation de leur ferme laitière et qu’elle aurait encore des conséquences néfastes sur leur exploitation, dès lors qu’ils devraient « composer avec leur voisinage direct urbanisé ».

Les décisions litigieuses seraient dès lors à annuler de ce chef.

Les demandeurs font encore valoir que le programme directeur viserait notamment à éviter l’étalement urbain et un développement tentaculaire des localités via une densification du tissu urbain existant, objectif, qui aurait été ignoré en l’espèce, étant donné qu’au lieu de privilégier une urbanisation concentrique en modifiant l’affectation de terrains non urbanisés proches du noyau du village, la commune, respectivement le ministre, auraient décidé et autorisé l’étalement urbain. Ainsi, le classement des parcelles portant les numéros cadastraux …, … et … en zone [MIX-v] (i) aboutirait à un prolongement du village, (ii) conduirait à son extension excentrique et (iii) contribuerait à rendre plus difficile un développement cohérent et concentrique de la localité, les demandeurs se basant dans ce contexte sur l’avis de la commission d’aménagement du 7 novembre 2017, laquelle aurait déconseillé une extension du « périmètre d’agglomération » sur les lieux litigieux, de sorte que les décisions attaquées seraient également à annuler de ce point de vue.

Les époux … indiquent ensuite qu’au lieu de déplacer la zone … tel que sollicité par eux, le ministre aurait simplement supprimé cette zone, et ceci alors même qu’il aurait considéré leur réclamation y relative comme étant « fondée ». Ils estiment, à cet égard, qu’alors même que le ministre ne pourrait apporter des modifications au projet d’aménagement général que conformément aux réclamations des intéressés, en l’espèce, il n’aurait ni approuvé le projet en l’état, ni modifié celui-ci dans le sens de leur réclamation, mais aurait pris « la tangente » en supprimant la zone … dont l’utilité serait reconnue tant par la commune, que par eux-mêmes.

Le ministre aurait, par ailleurs, commis une erreur manifeste d’appréciation des faits en motivant la suppression de la zone … par la nécessité de « préserver la constructibilité des terrains restants », les demandeurs soulignant, dans ce contexte, qu’outre le fait que le ministre n’expliquerait pas en quoi cette « Pufferzone » contreviendrait à la constructibilité des terrains, il aurait, par ailleurs, omis de prendre en compte l’importance de l’existence d’une telle zone entre leur exploitation et des maisons d’habitation afin de limiter au maximum les nuisances olfactives, visuelles et sonores.

Finalement, les demandeurs s’emparent d’une violation des articles 4 et 5 ainsi que de l’annexe I du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 concernant le contenu du plan d’aménagement général d’une commune, ci-après désigné par le « règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 », en ce que la partie graphique du PAG litigieux n’indiquerait pas l’intégralité des « constructions existantes », et plus précisément le tracé du silo pour plantes fourragères construit sur leur parcelle en 2011.

12 Ainsi, la commune aurait omis d’indiquer sur la partie graphique du projet d’aménagement général le tracé du silo en question et le ministre aurait omis de procéder à une vérification adéquate du projet d’aménagement général « à l’aune » du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011, de sorte que les décisions déférées seraient à annuler pour violation de la loi.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement donne, en premier lieu, à considérer que la commune de Helperknapp aurait déjà à de maintes reprises tenté de rendre constructible le lieu-dit « … » et que le projet d’aménagement général tel que présenté à la commission d’aménagement en 2017 aurait prévu un classement en zone [MIX-v] considérablement plus étendu que le PAG approuvé par le ministre. Comme la commission d’aménagement aurait estimé que le phénomène du développement tentaculaire de la localité devrait s’arrêter, le ministre aurait cherché à trouver un compromis avec la commune.

En droit, la partie étatique estime tout d’abord que l’affectation des parcelles portant les numéros cadastraux …, … et … en zone [MIX-v] permettrait un arrondissement du tissu urbain existant alors que ce même classement intégrerait les deux maisons, moins isolées, sises aux numéros … et …, … dans le périmètre constructible.

Elle souligne ensuite qu’il existerait de nombreux exemples d’une cohabitation avec une exploitation agricole, telle que ce serait le cas dans la localité de Hupperdange, le délégué du gouvernement estimant qu’il existerait une grande demande pour des terrains constructibles en milieu agricole.

Elle réfute ensuite tout reproche relatif à un défaut de motivation de la décision ministérielle en s’appuyant sur la jurisprudence des juridictions administratives en la matière.

Le délégué du gouvernement fait encore valoir que le programme directeur invoqué par les demandeurs n’aurait pas de valeur normative, de sorte que leurs considérations y relatives seraient à rejeter.

Il estime, par ailleurs, qu’aucune violation de l’article 2, d) de la loi du 19 juillet 2004 ne saurait être reprochée au ministre, alors que ledit article viserait à atteindre une mixité et une densification des structures urbaines qui poursuivraient comme objectifs une amélioration de la qualité de vie de la population, ainsi que de la qualité urbanistique, ce qui serait le cas en l’espèce. Or, l’objectif de la mixité serait donné en l’espèce, tandis que celui de la densification, en ce qu’il viserait à permettre d’améliorer la qualité de vie de la population, serait contradictoire per se, dans la mesure où toute densification des structures urbaines apporterait nécessairement des nuisances pour la population existante. En revanche, la densification pourrait améliorer la qualité urbanistique en permettant un arrondissement du tissu urbain existant, tel que ce serait le cas en l’espèce.

En ce qui concerne la suppression de la zone …, la partie étatique donne à considérer que si cette servitude avait été placée sur le silo des demandeurs, le silo en question aurait, d’une part, été construit sur une parcelle qui se serait trouvée en zone verte selon l’ancien PAG et, d’autre part, il n’aurait figuré ni ne figurerait sur les registres du cadastre. Ce serait par erreur ou par manque d’information que cette zone de servitude aurait été placée sur le silo existant. Le délégué du gouvernement continue en expliquant que comme le ministre aurait estimé qu’il n’était pas souhaitable de réduire le potentiel constructible des trois parcelles à 13intégrer dans la zone [MIX-v], il aurait décidé de ne pas approuver le tracé de la zone de servitude tel que proposé par la commune.

Finalement la partie étatique fait encore valoir que le règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 ne serait pas applicable en l’espèce, alors qu’il résulterait du registre aux délibérations du 19 juin 2017 que le conseil communal aurait fait référence au règlement grand-

ducal du 8 mars 2017 concernant le contenu du plan d’aménagement général d’une commune, ci-après désigné par le « règlement grand-ducal du 8 mars 2017 » et aurait choisi de ne pas entamer la procédure d’adoption du PAG conformément aux dispositions de l’ancien règlement grand-ducal du 28 juillet 2011.

La commune, quant à elle, explique dans son mémoire en réponse que le conseil communal aurait prévu de classer toute la bande de terrains longeant le chemin « … » en zone constructible, et ceci des deux côtés du chemin et jusqu’à hauteur du dernier bâtiment existant du côté droit de celui-ci. Ce serait afin de préserver les intérêts des époux … que la commune aurait eu l’idée de prévoir sur les parcelles directement adjacentes à leur exploitation agricole une zone de servitude pour créer un écran de verdure qui aurait également pu accueillir, le cas échant, un bassin de rétention pour séparer les futures habitations de l’exploitation des demandeurs. Elle fait valoir que pour réaliser un tel aménagement de façon cohérente, il aurait été utile de maintenir le classement de l’intégralité des terrains en zone constructible et de rectifier « cette erreur matérielle » en déplaçant tout simplement la zone … sur le fonds voisin plutôt que de réduire la zone constructible et de supprimer la zone …. Elle estime à cet égard encore que l’agrandissement de la zone constructible « accepté » par le ministre « n’épouserait » même pas la situation existante de l’autre côté de la rue, alors que, pour être cohérent, il aurait fallu encore inclure l’immeuble d’habitation existant de l’autre côté de la rue. La commune explique ensuite que pour remédier à cette « erreur d’appréciation », un bureau d’études aurait été mandaté d’élaborer un projet de modification ponctuelle du PAG litigieux redressant la situation litigieuse.

Elle indique ainsi pouvoir suivre les considérations des demandeurs de voir séparer leur exploitation agricole par une zone … et estime que pour le cas où le tribunal devait suivre leur argumentation, il n’y aurait pas lieu d’annuler le PAG et l’approbation ministérielle dans son intégralité, mais d’annuler la seule approbation ministérielle en ce qu’elle n’a pas fait droit à la réclamation des demandeurs. Elle soutient encore que dans un souci d’un urbanisme cohérent il y aurait lieu de reprendre la délimitation de la zone constructible telle que projetée par la commune.

Elle souligne, dans ce contexte, que les demandeurs n’invoqueraient aucune argumentation ayant trait à la légalité générale du PAG litigieux alors que leurs développements relatifs aux dispositions du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 seraient à rejeter pour résulter d’une mauvaise appréciation des dispositions transitoires du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, la commune soulignant plus particulièrement qu’elle aurait été en droit d’appliquer les dispositions du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 pour son projet d’aménagement général.

Dans leur mémoire en réplique, les époux … ajoutent en ce qui concerne le maintien des parcelles portant les numéros cadastraux …, … et … en zone constructible que les nuisances de leur exploitation agricole seraient importantes et de nature visuelle (proximité visuelle avec le silo et les entrepôts), sonore (recours à des machines agricoles dans le cadre de l’utilisation du silo à plantes fourragères ainsi que pour l’entretien quotidien des vaches laitières et leur 14traite), olfactive (émanation d’odeurs désagréables liées à la fermentation des plantes fourragères et proximité avec le cheptel de plus de 200 bêtes) et de nature diverse (production importante de poussière en période de préfanage/enfanage et d’ensilage). Ces troubles auraient déjà été identifiés par la commune en 1994 et par la commission d’aménagement en 2017, de sorte que les décisions déférées devraient encourir l’annulation pour erreur manifeste d’appréciation.

Il y aurait également violation de l’article 2, d) de la loi du 19 juillet 2004 alors qu’en l’espèce, les auteurs du PAG auraient poussé la densification du tissu urbain trop loin, au détriment de la qualité de vie de la population. Ainsi et si, dans certains cas, une décision de densifier un tissu urbain ou rural pouvait aboutir à une amélioration de la qualité de vie de la population, ce ne serait toutefois pas le cas en présence d’une exploitation agricole située à côté d’habitations résidentielles, alors que ceci engendrerait des nuisances affectant manifestement la qualité de vie des personnes concernées, à savoir, d’une part, dans le chef des résidents voisins de l’exploitation, amenés à subir une pollution olfactive, sonore et visuelle inhérente à l’exploitation agricole, et, d’autre part, dans le chef des exploitants, amenés à faire face aux protestations des voisins troublés par l’exploitation agricole.

Les demandeurs soulignent ensuite, et en ce qui concerne la zone …, que le ministre n’aurait, contrairement à ses affirmations dans son mémoire en réponse, pas suivi l’avis de la commission d’aménagement, dans la mesure où celle-ci aurait, dans son avis du 12 mars 2018 considéré que la servitude en question couvrirait effectivement le silo existant, de sorte qu’il conviendrait de la déplacer sur la parcelle n° …. En supprimant purement et simplement ladite zone, le ministre aurait ignoré le problème des nuisances liées à leur exploitation agricole.

Ainsi, le ministre, saisi de leur réclamation, aurait, non seulement outrepassé ses pouvoirs et les aurait surpris en modifiant le projet de PAG non pas dans le sens de leur réclamation, mais à l’encontre de celle-ci, mais aurait, par ailleurs, fait l’économie de toute justification quant à l’utilité première de la zone …, à savoir la gestion des nuisances que pourraient subir les futurs voisins directs de leur exploitation.

Finalement, en ce qui concerne le tracé de leur silo sur la partie graphique du PAG, les demandeurs estiment que même si la commune avait décidé d’appliquer immédiatement le nouveau règlement grand-ducal du 8 mars 2017, la partie graphique d’un PAG devrait également renseigner les immeubles existants sur chaque parcelle, les demandeurs se référant à cet égard à la légende-type du PAG annexé au règlement grand-ducal du 8 mars 2017. Etant donné que la commune aurait décidé d’adopter un PAG contenant le tracé des bâtiments, il lui aurait appartenu d’après les demandeurs, dans un souci de cohérence et d’exhaustivité, d’y renseigner l’ensemble des bâtiments existants.

Finalement et à titre subsidiaire, les demandeurs sollicitent de voir ordonner une visite des lieux.

Dans son mémoire en duplique, la commune renvoie aux développements contenus dans son mémoire en réponse.

Dans le mémoire que les consorts … ont été autorisés à déposer, ceux-ci font valoir que ce serait à bon droit que le ministre a estimé que les parcelles portant les numéros cadastraux …, … et … seraient à classer en zone [MIX-v] et ce, eu égard au fait qu’un tel classement ne ferait qu’arrondir le tissu urbain à l’endroit en cause et, que par là-même il mettrait fin au développement tentaculaire de la localité de Buschdorf et ce, eu égard au fait que les parcelles 15situées en face de celles leur appartenant seraient d’ores et déjà construites. L’urbanisation de leurs parcelles serait dès lors un « cas d’école » d’arrondissement du tissu urbain d’ores et déjà existant, voire d’urbanisation prioritaire de terrains libres à l’intérieur des localités. De ce point de vue, l’approche ministérielle consistant à maintenir le classement de leurs trois parcelles en zone [MIX-v] serait conforme aux objectifs fixés par la loi du 19 juillet 2004.

Ils insistent ensuite sur le fait que la coexistence dans un village de plusieurs fermes et d’habitations, même voisines, n’aurait rien de particulier, tel que le délégué du gouvernement le montrerait dans son mémoire en réponse à travers l’exemple de la localité de Hupperdange, tout en donnant à considérer qu’une coexistence entre habitations et exploitations agricoles serait voulue par la législation en vigueur en vue d’assurer la mixité des fonctions urbaines mise en avant par l’article 2, point d) de la loi du 19 juillet 2004.

Les consorts … soutiennent ensuite que ce serait à bon droit que le ministre avait supprimé la zone …. Il se dégagerait, en effet, de l’article 13 (3) de la partie écrite du PAG que la servitude en cause serait de nature écologique et aurait pour seul but la protection de plantations existantes et non pas la protection contre des prétendues nuisances sonores, olfactives ou autres. La zone … aurait ainsi été détournée à des fins étrangères à sa véritable finalité.

Ils continuent en faisant valoir que la Cour administrative aurait eu l’occasion de retenir qu’une servitude d’urbanisation devrait être justifiée par l’intérêt public. Or, la protection contre des nuisances sonores ou olfactives, telles qu’invoquées par les demandeurs, ne saurait relever de l’intérêt public. Ils ajoutent que, de toute façon, ils seraient les seuls à pouvoir profiter de la servitude … et ce, en leur qualité de propriétaires de parcelles susceptibles de « subir « les nuisances » de l’exploitation » des demandeurs. Comme Monsieur … entendrait ériger sur la parcelle cadastrale référencée sous le numéro … une maison d’habitation et sur celle référencée sous le numéro …, située à l’arrière de la première, une exploitation agricole, la servitude litigieuse s’inscrirait tout au plus dans l’intérêt privé des consorts … et de celui de Monsieur … en particulier, lequel n’aurait toutefois manifestement aucun intérêt à ce que sa propriété soit couverte d’une zone de servitude.

Ils concluent que comme la zone … ne satisferait dès lors ni un intérêt public ni un intérêt privé, ce serait à bon droit que ministre l’aurait supprimée.

A cela s’ajouterait que la servitude … constituerait une atteinte au droit de propriété de Monsieur … tel que garanti par l’article 16 de la Constitution, dans sa version en vigueur au jour des décisions litigieuses, étant donné qu’elle rendrait la parcelle cadastrale référencée sous le numéro … entièrement inconstructible et le priverait ainsi d’un des aspects essentiels du droit de propriété, sans que cette privation ne soit justifiée par la poursuite d’un but d’utilité publique.

Dans son mémoire supplémentaire, la commune insiste sur le fait que l’annulation de la décision communale entreprise ne devrait concerner que le fait d’avoir mal placé la zone « tampon ». Il s’agirait, en effet, d’une erreur matérielle qui n’aurait pas été rectifiée par le ministre à travers la décision ministérielle entreprise.

La commune réfute ensuite la critique suivant laquelle la zone … ne serait pas appropriée pour atteindre l’objectif souhaité en donnant à considérer qu’il s’agirait d’une 16servitude qui pourrait tout aussi bien servir des raisons écologiques tout en ayant une deuxième fonction de réduction des nuisances olfactives, sonores ou visuelles.

Cette même servitude relèverait bien d’un intérêt public puisqu’il aurait été prévu de construire un bassin de rétention pour eaux pluviales qui profiterait non seulement aux demandeurs mais aussi aux consorts …. A cela s’ajouterait que, de toute façon, les consorts … ne prouveraient pas en quoi la zone en question serait contraire à l’intérêt général.

Enfin, la commune réfute toute atteinte prétendument portée par la servitude litigieuse au droit de propriété de Monsieur ….

Dans son mémoire supplémentaire, le délégué du gouvernement renvoie, quant à lui, à ses développements contenus dans ses écrits contentieux antérieurs.

Les demandeurs se rapportent, quant à eux, également à leurs écrits antérieurs pour ce qui est de leur contestation visant le maintien des trois parcelles litigieuses en zone [MIX-v].

Pour ce qui est de la zone …, ils rejoignent la commune en soutenant que la finalité d’une telle zone d’éviter des nuisances sonores et olfactives ne serait pas incompatible avec une finalité écologique.

Ils estiment, par ailleurs, que les consorts … resteraient en défaut de prouver en quoi la zone tampon litigieuse serait contraire à l’intérêt public, tout en insistant sur le fait que la protection des plantations existantes, le bassin de rétention évoqué par la commune et l’objectif d’éviter de créer une situation litigieuse ab initio entre voisins, suffiraient en l’espèce à caractériser l’intérêt public.

Enfin, ils contestent eux-aussi que l’imposition d’une zone tampon sur la parcelle n°… serait constitutive d’une expropriation, en pointant le fait qu’avant la refonte du PAG, la parcelle en question aurait été classée en zone verte, de sorte que les consorts … ne perdraient rien par rapport à la situation antérieure.

A titre liminaire, le tribunal relève qu’il lui appartient de déterminer la suite du traitement des moyens et arguments des parties compte tenu de la logique juridique dans laquelle ils s’inscrivent, sans être lié par l’ordre dans lequel les moyens ont été présentés par les parties, l’examen des moyens tenant à la légalité externe devant précéder celui des moyens tenant à la légalité interne.

4.1. Quant au moyen tiré d’un défaut de motivation de la décision ministérielle Concernant le moyen des époux … tiré d’un défaut de motivation de la décision ministérielle du 23 août 2018, l’article 18 de la loi du 19 juillet 2004 dispose dans son alinéa 1er que « Le ministre statue sur les réclamations dans les trois mois qui suivent le délai prévu à l’article 16 alinéa 1, respectivement dans les trois mois suivant la réception des avis de la commission d’aménagement et du conseil communal prévus à l’article qui précède, en même temps qu’il décide de l’approbation définitive du projet d’aménagement général, qui prend dès lors la désignation de plan d’aménagement général. ».

17Il s’ensuit que le ministre est appelé, d’une part, à statuer sur les réclamations et, d’autre part, à décider de l’approbation définitive du projet d’aménagement général, dans le cadre de la décision qu’il est amené à prendre en application de l’article 18 précité.

Il convient de préciser qu’au-delà de l’absence d’exigence légale ou réglementaire spécifique à l’indication formelle des motifs, les actes administratifs à caractère réglementaire doivent reposer sur de justes motifs légaux devant avoir existé au moment où ils ont été respectivement pris, motifs dont le juge administratif est appelé à vérifier tant l’existence que la légalité. Ces motifs doivent être rétractables, à la fois par la juridiction saisie et par les administrés intéressés, afin de permettre l’exercice effectif du contrôle juridictionnel de légalité prévu par la loi10.

En l’espèce, il ressort du libellé de la décision ministérielle déférée, reproduite par extraits ci-dessus, que le ministre a indiqué les raisons à la base de sa décision, à savoir que la demande des époux … à voir les terrains faisant l’objet du « PAP … » maintenus en zone verte était partiellement fondée, étant donné (i) que la réalisation du projet « … » constituerait un développement tentaculaire en ces lieux, (ii) que l’existence de deux exploitations agricoles d’une certaine envergure à proximité directe ne plaiderait pas en faveur de la création d’un quartier d’habitation et (iii) que compte tenu du fait que deux maisons d’habitation seraient incluses dans le périmètre d’agglomération, il conviendrait de maintenir les parcelles cadastrales nos …, …, … en zone [MIX-v] afin d’arrondir le tissu urbain. Concernant la zone …, le ministre a retenu (i) que cette servitude couvrirait effectivement le silo à fourrages verts actuellement existant sur la parcelle des demandeurs et (ii) que cette servitude serait à supprimer afin de préserver la constructibilité des terrains restants. Cette motivation, qui a encore été complétée par la partie étatique dans son mémoire en réponse, est suffisamment précise pour permettre aux demandeurs d’assurer la défense de leurs intérêts en connaissance de cause, étant précisé que la question du bien-fondé de cette motivation relève de la légalité interne de la décision litigieuse et sera abordée ci-après.

La décision ministérielle du 23 août 2018 comporte dès lors une indication suffisante de la motivation à sa base, de sorte que le moyen d’annulation tiré d’une absence de motivation, voire d’une insuffisance de motivation, est à rejeter pour ne pas être fondé.

4.2. Quant à la question du tracé du silo sur la partie graphique du PAG En ce qui concerne le moyen des demandeurs ayant trait à une violation des articles 4 et 5 ainsi que de l’annexe I du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 faute d’indication, dans la partie graphique du PAG, du tracé du silo existant sur leur parcelle, force est tout d’abord de constater qu’il ressort du registre aux délibérations relatif à la délibération du conseil communal du 19 juin 2017 portant mise sur orbite de la procédure de refonte du PAG litigieux et plus particulièrement des visas précédant ladite délibération, que la procédure d’adoption dudit PAG n’a pas été entamée conformément aux dispositions du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 abrogé, malgré la possibilité prévue à l’article 39, paragraphe (2) du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, qui dispose que « […] Toutefois, jusqu’au 8 août 2018, le collège 10 Cour adm., 23 février 2006, n° 20173C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Actes réglementaires, n° 34 et les autres références y citées.

18des bourgmestre et échevins peut entamer la procédure d’adoption d’un projet d’aménagement général élaboré conformément aux dispositions du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 précité », mais qu’elle a été entamée en application du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, de sorte que les moyens des demandeurs quant à une violation des articles 4, 5 et de l’annexe I du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 sont à rejeter pour être dénué de fondement.

Concernant le moyen des demandeurs tendant à une violation de l’annexe I du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 faute d’indication sur la partie graphique du PAG de tous les immeubles existants sur chaque parcelle, force est de constater que l’article 3 de ce règlement grand-ducal du 8 mars 2017 dispose que « (1) La partie graphique doit respecter les indications de la légende-type de l’annexe I.

Des variations en ce qui concerne les nuances de couleur ou les caractéristiques du graphisme ne sont tolérées. […] ».

Si la partie graphique d’un PAG doit donc respecter les indications de la légende-type figurant à l’annexe I du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 et s’il est certes exact que ladite légende-type contient, notamment, une boîte intitulée « Parcelle cadastrale / immeuble », dont les parcelles cadastrales et les immeubles existants sont représentés par des encadrés gris, il n’en reste pas moins que ces dispositions se limitent à réglementer la légende de la partie graphique d’un PAG et, notamment, la manière dont les éléments y visés, tels que les bâtiments existants, y sont représentés, sans toutefois formuler une quelconque obligation à l’égard des autorités communales d’indiquer, sous peine de nullité, l’ensemble des bâtiments existants sur le territoire communal dans la partie graphique de leur PAG11, une telle obligation ne résultant, par ailleurs, d’aucune autre disposition légale.

En tout état de cause, la partie graphique d’un PAG n’a pas vocation à servir de répertoire officiel de constructions existantes. En effet, un PAG est, aux termes de l’article 5 de la loi du 19 juillet 2004 « […] un ensemble de prescriptions graphiques et écrites à caractère réglementaire qui se complètent réciproquement et qui couvrent l’ensemble du territoire communal qu’elles divisent en diverses zones dont elles arrêtent l’utilisation du sol […] », cet ensemble de prescriptions réglementaires ayant, aux termes de l’article 6 de la même loi, pour objectif « […] la répartition et l’implantation judicieuse des activités humaines dans les diverses zones qu’il arrête aux fins de garantir le développement durable de la commune sur base des objectifs définis par l’article 2 de la loi […] ». Dès lors, en l’absence de disposition normative expresse imposant la représentation, sur la partie graphique d’un PAG, de l’ensemble du bâti existant sur le territoire communal, l’absence d’indication d’une construction existante dans la partie graphique d’un PAG est sans incidence sur la légalité de ce dernier12.

Il s’ensuit que le moyen fondé sur une non-indication du silo existant sur la parcelle des demandeurs dans la partie graphique du PAG encourt le rejet.

4.3. Quant au bien-fondé des décisions litigieuses 11 En ce sens, trib. adm., 22 juin 2000, n° 40639 du rôle, confirmé par Cour adm., 6 mai 2021, n° 44797C du rôle, disponibles sur www.ja.etat.lu.

12 Trib. adm., 22 juin 2000, n° 40639 du rôle, confirmé par Cour adm., 6 mai 2021, n° 44797C du rôle, Pas. adm., 2022 V° Urbanisme, n° 189.

19Le tribunal rappelle tout d’abord que saisi d’un recours en annulation, la mission de juge de la légalité exclut le contrôle des considérations d’opportunité et notamment d’ordre politique, à la base de l’acte administratif attaqué et inclut la vérification, d’après les pièces et éléments du dossier administratif, de ce que les faits et considérations sur lesquels s’est fondée l’administration sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute. Dans cette démarche de vérification des faits et des motifs à la base de l’acte déféré, le tribunal est encore amené à analyser si la mesure prise est proportionnelle par rapport aux faits dont l’existence est vérifiée, le tribunal étant ainsi appelé à opérer une balance valable et équilibrée des éléments en cause et à vérifier plus particulièrement si l’acte posé est proportionné à son but13.

En ce qui concerne ensuite les compétences du ministre, il ressort de la jurisprudence de la Cour administrative que le ministre, en statuant dans le cadre de l’article 18, précité, de la loi du 19 juillet 2004, revêt deux compétences. D’une part, il est appelé à toiser les réclamations portées devant lui dans le cadre du processus visant à résoudre autant que possible les doléances des administrés dont la participation est censée être garantie à travers la procédure de collaboration et de participation et à vider ces réclamations par rapport auxquelles il statue suivant un recours administratif en réformation. Il revêt à ce sujet un pouvoir de tutelle spéciale qui lui permet de substituer à la décision communale contrôlée une décision nouvelle. D’un autre côté, en tant qu’autorité tutélaire statuant dans le cadre de ses attributions prévues par l’article 107 de la Constitution et dans le respect des exigences découlant de la Charte d’autonomie locale, le ministre est appelé à contrôler, suivant le mécanisme de la tutelle d’approbation, la légalité de la procédure et de la démarche des autorités communales dans le cadre de l’adoption du projet d’aménagement général appelé à devenir le PAG. Ces deux compétences ne sont pas inconciliables, mais complémentaires. Même si elles s’expriment à travers un seul et même document, elles ne sont pas simultanées. Compte tenu de la systématique régissant ces deux compétences de nature différente, le ministre est nécessairement d’abord appelé à toiser les réclamations. Compte tenu de l’état de la délibération communale portant adoption de la réglementation communale d’urbanisme et du résultat de la décision ministérielle sur les réclamations, le ministre, en tant qu’autorité de tutelle est, dans un deuxième stade, amené soit à approuver dans sa globalité la délibération communale d’adoption définitive du projet d’aménagement communal, le cas échéant amendée suite aux réclamations accueillies par le ministre, soit à la désapprouver dans sa globalité14.

Il se dégage encore de la jurisprudence de la Cour administrative que le contrôle ministériel dans le système d’aplanissement des différends s’exerce par rapport aux réclamations subsistantes correspondant en principe nécessairement à des objections déjà portées antérieurement devant le conseil communal pour lesquelles leurs auteurs ont tout au plus trouvé une satisfaction partielle. Dans ce cas, la loi permet précisément aux auteurs d’objections non satisfaits de porter devant le gouvernement, en la personne du ministre de l’Intérieur, une réclamation dirigée contre la délibération communale portant adoption définitive du projet d’aménagement communal qui, par hypothèse, n’a pas du tout ou pas entièrement tenu compte de l’objection antérieure dudit réclamant. En statuant à nouveau sur la même problématique, le ministre est dès lors appelé à siéger en lieu et place du conseil communal pour juger du bien-fondé de l’ancienne objection devenue réclamation, non retenue par hypothèse par le conseil communal, du moins pas entièrement. Le système ainsi instauré comporte nécessairement que le ministre, en statuant sur la réclamation, prenne sa décision en tenant compte de la logique intrinsèque du plan, de la différenciation des optiques urbanistiques 13 Cour adm., 12 janvier 2021, n° 44684C du rôle, disponible sur www.ja.etat.lu.

14 Cour adm., 6 février 2014, n° 33257C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Tutelle administrative, n° 32, et les autres références y citées.

20épousée par la commune, de la systématique des options opérées et de la cohérence surtout du système global instauré. La réclamation portée devant le ministre correspond dès lors à un dernier échelon précontentieux d’un recours administratif prévu par la loi. L’intervention du ministre elle-même se trouve à nouveau soumise au contrôle juridictionnel à travers le recours contentieux prévu, à charge d’appel, devant les juridictions administratives15.

Il convient ensuite de relever que les autorités communales lorsqu’elles initient des modifications de leurs plans d’aménagement doivent être mues par des considérations légales d’ordre urbanistique ayant trait à l’aménagement des agglomérations et d’ordre politique tirées de l’organisation de la vie en commun sur le territoire donné, tendant les unes et les autres à une finalité d’intérêt général, lesdites autorités devant veiller tant à la conservation de l’esthétique urbaine qu’au développement rationnel des agglomérations.

Quant aux objectifs devant guider les autorités communales, lorsqu’elles initient une refonte de leur PAG, il y a lieu de se référer à l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, aux termes duquel « Les communes ont pour mission de garantir le respect de l’intérêt général en assurant à la population de la commune des conditions de vie optimales par une mise en valeur harmonieuse et un développement durable de toutes les parties du territoire communal par:

(a) une utilisation rationnelle du sol et de l’espace tant urbain que rural en garantissant la complémentarité entre les objectifs économiques, écologiques et sociaux;

(b) un développement harmonieux des structures urbaines et rurales, y compris les réseaux de communication et d’approvisionnement compte tenu des spécificités respectives de ces structures, et en exécution des objectifs de l’aménagement général du territoire;

(c) une utilisation rationnelle de l’énergie, des économies d’énergie et une utilisation des énergies renouvelables;

(d) le développement, dans le cadre des structures urbaines et rurales, d’une mixité et d’une densification permettant d’améliorer à la fois la qualité de vie de la population et la qualité urbanistique des localités;

(e) le respect du patrimoine culturel et un niveau élevé de protection de l’environnement naturel et du paysage lors de la poursuite des objectifs définis ci-

dessus;

(f) la garantie de la sécurité, la salubrité et l’hygiène publiques. ».

L’article 6 de la loi du 19 juillet 2004 prévoit, quant à lui, que « Le plan d’aménagement général a pour objectif la répartition et l’implantation judicieuse des activités humaines dans les diverses zones qu’il arrête aux fins de garantir le développement durable de la commune sur base des objectifs définis par l’article 2 de la loi. ».

Il s’ensuit que dans le cadre de la modification, respectivement de la refonte de leur PAG, les autorités communales doivent être mues par des considérations d’intérêt général, étant encore précisé que cette caractéristique est présumée jusqu’à preuve du contraire16.

Il convient ensuite de rappeler que la mutabilité des plans d’aménagement général relève de leur essence même, consistant à répondre à des contraintes variables à travers le temps 15 Cour adm. 6 février 2014, n° 33257C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Tutelle administrative, n° 33 et les autres références y citées.

16 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Recours en annulation, n° 10 et les autres références y citées.

21concernant à la fois les aspects urbanistiques de l’aménagement des agglomérations et le volet politique de la vie en commun sur le territoire donné17. Il s’ensuit qu’en se fondant sur des considérations d’ordre urbanistique correspondant à une finalité d’intérêt général, les autorités communales peuvent procéder à des modifications de leur règlementation urbanistique, pourvu toutefois que la décision soit proportionnelle à son objectif et qu’elle soit dépourvue d’une erreur d’appréciation, analyse qui sera effectuée ci-après.

En l’espèce, il est constant en cause pour ne pas être contesté que sous l’ancien PAG, la parcelle des demandeurs était classée partiellement en « zone d’habitation 1a » et partiellement en zone non-constructible « secteur agricole », tandis que les parcelles situées au sud de celle des demandeurs étaient toutes classées en zone non-constructible « secteur agricole ».

Il ressort ensuite des éléments du dossier administratif que le nouveau PAG, tel qu’adopté par le conseil communal de la commune de Boevange/Attert en date des 20 et 27 décembre 2017, a classé la parcelle des demandeurs pour partie en zone [MIX-v] pour la garder ainsi en zone constructible, tandis que plusieurs parcelles situées au lieu-dit « … » à l’est de celle des demandeurs ont également été classées en zone [MIX-v] superposée de la zone « PAP … », ainsi que pour partie d’une « mesure compensatoire anticipée H17/20 ». Ledit PAG a encore superposé la parcelle des demandeurs pour deux tiers, et la parcelle n° … adjacente à celle des demandeurs pour un tiers, de la zone ….

Il se dégage ensuite de la décision ministérielle litigieuse, que le ministre a, en l’espèce, fait application de son pouvoir de réformation en procédant à une modification du PAG tel qu’adopté par le conseil communal en date des 20 et 27 décembre 2017 pour avoir réduit la zone [MIX-v] aux parcelles portant les nos …, … et … du cadastre, et pour avoir supprimé la zone « PAP … » ainsi que la zone ….

Avant tout autre progrès en cause, il convient de relever qu’étant donné que le ministre a procédé à une modification du PAG tel qu’adopté par la commune et qu’à travers le présent recours, les demandeurs critiquent les décisions déférées (i) pour avoir classé les parcelles portant les nos …, … et … en zone [MIX-v] et (ii) pour avoir mal placé, respectivement supprimé la zone …, le tribunal est forcément limité dans son analyse quant à ces deux questions lui soumises, abstraction faite de la demande de la commune tendant à voir reprendre la délimitation de la zone constructible telle que projetée par elle dans ses décisions des 20 et 27 décembre 2017, sous peine de statuer ultra petita.

En effet, le tribunal statue en la présente matière en tant que juge de l’annulation, tandis que la commune n’a pas la qualité de demandeur pour ne pas avoir introduit de recours contentieux contre la décision ministérielle du 23 août 2018. Il ne se dégage, par ailleurs, pas des moyens des demandeurs, tels que résumés ci-avant, que ceux-ci critiquent la décision ministérielle du 23 août 2018 pour ne pas avoir maintenu le classement des parcelles du lieu-dit « … », tel que projeté par la commune, les demandeurs plaidant, au contraire, en faveur d’un classement en zone verte des trois parcelles nos …, … et ….

Quant au bien-fondé du classement des parcelles nos …, … et … en zone [MIX-v], il ressort de la lecture de la décision ministérielle litigieuse du 23 août 2018, que le ministre a 17 Trib. adm., 7 mars 2001, n° 12233 du rôle, confirmé par Cour adm., 20 décembre 2001, n° 13291C du rôle, Pas.

adm. 2022, V° Urbanisme, n° 215 et les autres références y citées.

22motivé ce classement, voire le maintien desdites parcelles en zone constructible par un arrondissement subséquent du tissu urbain existant, en mettant en exergue que deux maisons d’habitation seraient déjà incluses dans le périmètre d’agglomération.

A cet égard, il échet de prime abord de constater qu’il ressort de la partie graphique de l’ancien PAG de la commune que l’exploitation agricole des demandeurs se situe sur la parcelle n° …, laquelle constituait la dernière parcelle classée en zone constructible à l’extrémité sud-

est de la localité de Buschdorf.

Il ressort ensuite également de la partie graphique de l’ancien PAG de la commune qu’uniquement la partie nord-est de la parcelle n° … des demandeurs a été classée en zone constructible, tout comme la partie nord des parcelles nos …, …, … situées de l’autre côté de la rue … et longeant la rue … et que l’intégralité des parcelles situées au sud des parcelles désignées ci-avant se trouvaient en dehors de le zone constructible de la localité de Buschdorf, mis à part un îlot isolé comportant la parcelle n° … et la partie construite de la parcelle n° …, lequel a également été classé en zone constructible.

S’il peut ainsi être admis qu’il s’est avéré utile, dans un souci de remédier à une situation urbanistique malsaine existante, d’élargir le périmètre d’agglomération de la localité de Buschdorf au sud-est pour inclure la partie sud des parcelles construites précitées nos …, …, et … longeant la rue …, tout comme la parcelle construite n° …, et ceci afin d’intégrer l’îlot isolé comportant la parcelle construite n° … et la partie construite de la parcelle n° … harmonieusement dans la zone constructible, une telle utilité n’est que difficilement retracable en ce qui concerne les parcelles cadastrales litigieuses non-construites nos …, … et … longeant la rue … au sud de la parcelle des demandeurs.

En effet, d’un côté, et tel que relevé à juste titre par la commune, pour arriver à un arrondissement cohérent du tissu urbain existant à cet endroit, il aurait encore fallu inclure la parcelle n° … située au sud des parcelles nos … et … et comprenant une maison d’habitation, ce qui n’a cependant pas été fait, la maison d’habitation en question ayant été maintenue de manière isolée à l’extérieur de la zone constructible.

De l’autre côté, et de manière générale, il résulte tant de l’avis de la commission d’aménagement du 12 mars 2018 que de la décision ministérielle litigieuse que l’existence de deux exploitations agricoles d’une certaine envergure à proximité directe des parcelles nos …, … et … ne plaide pas en faveur de la création de la possibilité d’y installer des maisons d’habitation. Il se dégage ainsi des plans soumis au tribunal que le long de la rue … se situe non seulement l’exploitation agricole des demandeurs, mais également une deuxième exploitation agricole et ce sur la parcelle n° …, également susceptible de causer de nuisances. En ce qui concerne concrètement les nuisances causées par l’exploitation des demandeurs, il résulte des explications circonstanciées et non contestées ainsi que des pièces versées en cause, que leur ferme laitière comprenant une grange, deux étables à vaches laitières ainsi qu’un silo pour plantes fourragères provoque des nuisances importantes de nature visuelle, sonore et olfactive, de sorte qu’une partie des constructions admissibles en zone [MIX-v], dont notamment celles relatives à l’habitation, aux activités de loisirs et de récréation, à la restauration, aux hôtels et aux débits de boissons, ne se conçoivent que très difficilement sur les parcelles nos …, … et ….

Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il n’y ait lieu de procéder à une visite des lieux et de statuer sur les autres moyens présentés par les demandeurs dans ce contexte, que la décision ministérielle du 23 août 2018 encourt l’annulation pour erreur d’appréciation, dans la 23seule mesure toutefois où elle a classé les parcelles nos …, … et … en zone [Mix-v]. Par voie de conséquence, il y a également lieu d’annuler les délibérations du conseil communal des 20 et 27 décembre 2017 et ce également dans la seule mesure où elles ont classé les parcelles nos …, … et … en zone [Mix-v].

Etant donné que le tribunal vient de retenir ci-avant que la décision ministérielle du 23 août 2018 et celles du conseil communal des 20 et 27 décembre 2017 sont à annuler pour avoir classé les parcelles nos …, … et … en zone constructible, l’analyse des moyens des époux … relatifs à l’emplacement, voire à la suppression, de la zone … devient surabondante.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours subsidiaire en annulation est à déclarer fondé, en ce qu’il vise la décision du ministre du 23 août 2018 et les décisions du conseil communal des 20 et 27 décembre 2017, lesquelles n’encourent l’annulation que dans la seule mesure où elles ont classé les parcelles nos …, … et … en zone [Mix-v], c’est-à-dire en zone constructible.

Eu égard à l’issue du litige, la demande en allocation d’une indemnité de procédure de 4.000 euros telle que formulée par les consorts … sur le fondement de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », aux termes duquel « Lorsqu’il paraît inéquitable de laisser à la charge d’une partie les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, le juge peut condamner l’autre partie à lui payer le montant qu’il détermine. », est à rejeter.

Le même sort est à réserver à la demande des époux … tendant à l’octroi d’une indemnité de procédure de 3.000 euros, en application de la même base légale, étant donné qu’il n’est pas établi qu’il serait inéquitable de laisser les frais non répétibles à leur charge.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement et sur renvoi par l’arrêt de la Cour administrative du 14 juillet 2022, inscrit sous le numéro 46928C du rôle ;

se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation ;

déclare le recours subsidiaire en annulation irrecevable pour autant qu’il est dirigé contre la délibération du conseil communal de Boevange/Attert (actuellement commune de Helperknapp) du 19 juin 2017 portant mise sur orbite de la procédure de refonte du plan d’aménagement général ;

reçoit le recours subsidiaire en annulation en la forme pour le surplus ;

au fond, le déclare partiellement justifié, partant annule la décision du ministre de l’Intérieur du 23 août 2018 et les délibérations du conseil communal de la commune de Boevange/Attert des 20 et 27 décembre 2017 portant adoption du projet d’aménagement 24général, dans l’unique mesure où elles ont classé les parcelles nos …, … et … en zone [Mix-v] et partant en zone constructible ;

pour le surplus, le déclare non justifié, partant le rejette ;

rejette les demandes en obtention d’une indemnité de procédure formulées respectivement par les demandeurs et les consorts … ;

fait masse des frais et dépens et les met par moitié à charge de l’Etat et par moitié à charge de l’administration communale.

Ainsi jugé par :

Françoise Eberhard, premier vice-président, Alexandra Castegnaro, vice-président, Alexandra Bochet, premier juge, et lu à l’audience publique du 5 octobre 2023 par le premier vice-président, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Françoise Eberhard Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 6 octobre 2023 Le greffier du tribunal administratif 25


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 42205a
Date de la décision : 05/10/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-10-05;42205a ?

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