La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/09/2023 | LUXEMBOURG | N°46638

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 29 septembre 2023, 46638


Tribunal administratif Numéro 46638 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:46638 1re chambre Inscrit le 3 novembre 2021 Audience publique extraordinaire du 29 septembre 2023 Recours formé par la société de droit français A, … (France) contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt

___________________________________________________________________________


JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46638 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 3 novemb

re 2021 par Maître Georges Simon, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avo...

Tribunal administratif Numéro 46638 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:46638 1re chambre Inscrit le 3 novembre 2021 Audience publique extraordinaire du 29 septembre 2023 Recours formé par la société de droit français A, … (France) contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt

___________________________________________________________________________

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46638 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 3 novembre 2021 par Maître Georges Simon, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, au nom de la société de droit français A, établie et ayant son siège social à F-… (France), enregistrée au Registre du commerce de Nanterre sous le numéro …, représentée par ses mandataires actuellement en fonctions et ayant élu domicile en l’étude de son mandataire préqualifié, sise à L-1229 Luxembourg, 15, rue Bender, Le Dôme (Bâtiment A), tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 3 août 2021 portant la référence C 28744 ayant partiellement rejeté la réclamation introduite par la société anonyme B en date du 27 novembre 2020 ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 31 janvier 2022 par le délégué du gouvernement ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 28 févier 2022 par Maître Georges Simon au nom de sa mandante, préqualifée ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 22 mars 2022 par le délégué du gouvernement ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision déférée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Georges Simon et Monsieur le délégué du gouvernement Steve Collart en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 26 avril 2023.

___________________________________________________________________________

Il ressort des éléments du dossier administratif que la société anonyme B, ci-après désignée par la « société B », anciennement dénommée « Société B », introduisit, en date du 18 janvier 2019, sa déclaration pour l’impôt sur le revenu, l’impôt commercial et l’impôt sur la fortune des collectivités résidentes pour les années 2016 et 2017 et qu’elle en fit de même pour sa déclaration pour l’impôt sur le revenu, l’impôt commercial et l’impôt sur la fortune des collectivités résidentes pour l’année 2018 en date du 12 juin 2019.

1Par trois courriers séparés du 6 août 2020, le préposé du bureau d’imposition Société 6, ci-après désigné par le « bureau d’imposition », informa la société B qu’il envisageait de s’écarter de ses déclarations fiscales pour les années 2016, 2017 et 2018 sur le fondement du § 205, alinéa (3) de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, telle que modifiée, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », en substance, en (i) rejetant la déduction de certaines provisions au motif que de telles provisions ne seraient pas reconnues par la législation fiscale et comptable en vigueur, et (ii) en redressant, en conséquence, d’une part, le bénéfice commercial de la société B par la réintégration du montant desdites provisions au titre des années 2016, 2017 et 2019, et, d’autre part, la fortune nette de cette dernière par sa majoration d’un montant correspondant auxdites provisions au titre des mêmes années d’imposition, tout en l’invitant à formuler ses objections pour le 28 août 2020 au plus tard.

Par courrier du 28 août 2020, la société B fit parvenir, par l’intermédiaire de son ancien litismandataire, ses observations écrites.

En date du 3 septembre 2020, le bureau d’imposition émit à l’égard de la société B :

- les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités au titre des années 2016 et 2017 avec les mentions suivantes : « L’imposition diffère de la déclaration sur les points suivants […] », « Faute de présenter des documents pertinents, la dotation pour "provision for onerous contracts" est considérée comme une dépense d’exploitation non déductible », « Imposition svt projet §205/3 du 06/08/2020 » ;

- les bulletins de l’impôt commercial communal au titre des années 2016 et 2017 avec la mention « Imposition svt projet §205/3 du 06/08/2020 » ;

- les bulletins de l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2017, 2018 et 2019 avec les mentions suivantes : « L’imposition diffère de la déclaration sur les points suivants […] » et « Imposition svt projet §205/3 du 06/08/2020 » ; et - les bulletins d’établissement de la valeur unitaire au 1er janvier 2017, 2018 et 2019.

Par un courrier recommandé du 27 novembre 2020, la société de droit français A, ci-

après désignée par la « société A », ayant repris les droits et obligations de la société B suite à une fusion-absorption, introduisit une réclamation contre les prédits bulletins auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par le « directeur ».

Par courrier du 17 février 2021, le directeur invita la société A à « (1) fournir une copie de tous les contrats à la base des provisions litigieuses, incluant le contrat d’achat de gaz liquéfié avec Société C, les différentes contrats d’affrètement de navires, l’accord de capacité pour l’accès au terminal de gaz naturel liquéfié de Zeebrugge ainsi que le ou les accords de compensations » , ainsi qu’à « (2) produire, pour les exercices 2016, 2017 et 2018, une documentation détaillée et chiffrée justifiant de l’évaluation, en application des normes comptables applicables, desdites provisions, respectivement des reprises desdites provisions, au titre de chacun des contrats susmentionnés », le directeur ayant encore précisé que « Les pièces demandées sont à présenter, ensemble avec d’éventuelles observations écrites […] », et fixé la fourniture et la production desdites pièces pour le 15 mars 2021 au plus tard.

Par courrier électronique du 9 avril 2021 envoyé à la suite de l’obtention d’un report de délai, le litismandataire de la société A s’adressa à l’administration des Contributions directes, ci-après désignée par l’« administration », dans les termes suivants :

« […] Faisant suite à notre conversation téléphonique de cette semaine, je me permets 2de vous écrire au nom et pour le compte de Société A, ayant repris les droits et obligations de la société B (société B) en relation avec votre courrier du 17 février 2021 (le Courrier).

Comme convenu lors de notre discussion, au vu de la taille des documents demandés dans le Courrier, un lien vous donnant accès à la plateforme "sharepoint" de Microsoft vous parviendra par email séparé. Ce lien devrait vous permettre d’accéder aux documents suivants:

i.

des fiches récapitulatives reprenant de manière synthétique le contexte et le mode de calcul à la base de chacune des provisions en cause ; et ii.

les contrats conclus par société B ayant conduit à la comptabilisation desdites provisions.

La plateforme de partage "sharepoint" n’inclut pas, à ce stade, une copie de l’accord de capacité pour l’accès au terminal de …. Ledit accord n’a en effet pas fait l’objet des provisions comptabilisées par société B.

Nous sommes à votre entière disposition pour vous donner toute information/clarification que vous estimeriez nécessaire en relation avec les documents mis à votre disposition. De façon plus générale, n’hésitez pas à nous faire savoir si vous estimez qu’une réunion, physique ou par vidéo conférence ou par conférence téléphonique, serait opportune, compte tenu de la complexité technique du dossier et pour vous apporter des éclaircissements quant aux circonstances qui justifient la comptabilisation des provisions concernées. […] ».

Par décision du 3 août 2021, référencée sous le numéro C 28744 du rôle, le directeur fit partiellement droit à la réclamation de la société A, dans les termes suivants :

« […] Vu la requête introduite en date du 27 novembre 2020 par Maître Georges Simon, de la société Ashurst LLP, au nom de la société de droit français Société A, avec siège social à F-… (France), ayant repris les droits et obligations de la société anonyme B, ayant eu son siège social à L-…, pour réclamer contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial des années 2016 et 2017 ainsi que contre les bulletins de l’établissement séparé de la valeur unitaire et les bulletins de l’impôt sur la fortune des années 2017, 2018 et 2019, tous émis en date du 3 septembre 2020 ;

Vu le dossier fiscal ;

Vu la mise en état du directeur des contributions du 17 février 2021 en vertu des §§ 243, 244 et 171 de la loi générale des impôts (AO) et la réponse de la réclamante reçue le 9 avril 2021 ;

Vu les §§ 102, 107, 228, 238, 254 alinéa 2 et 301 de la loi générale des impôts (AO) ;

Considérant que si l’introduction de plusieurs instances par une seule et même requête n’est incompatible, en l’espèce, ni avec le secret fiscal, ni avec les règles de compétence et de procédure, elle ne dispense pas d’examiner chaque acte attaqué en lui-même et selon ses propres mérites et ne saurait imposer une jonction qu’il est loisible au directeur des contributions de prononcer lorsque les instances lui paraissent suffisamment connexes ; qu’il n’y a pas lieu de la refuser en la forme ;

3Considérant que les réclamations ont été introduites par qui de droit (§ 238 AO), dans les forme (§ 249 AO) et délai (§ 245 AO) de la loi ; qu’elles sont partant recevables ;

Considérant que la réclamante fait grief au bureau d’imposition d’avoir principalement refusé la déductibilité de certaines provisions et subsidiairement, de ne pas avoir tenu compte de la documentation relative au financement de la réclamante ;

Considérant qu’en vertu du § 243 AO, une réclamation régulièrement introduite déclenche d’office un réexamen intégral de la cause, sans égard aux conclusions et moyens de la réclamante, la loi d’impôt étant d’ordre public ;

qu’à cet égard le contrôle de la légalité externe de l’acte doit précéder celui du bien-fondé ;

qu’en l’espèce la forme suivie par le bureau d’imposition ne prête pas à critique ;

Des bulletins de l’impôt sur la fortune au 1er janvier des années 2017, 2018 et 2019 Considérant qu’une imposition qui est assise en tout ou en partie sur des bases fixées par établissement séparé ne peut être attaquée pour le motif que ces bases d’imposition seraient inexactes ; qu’une telle réclamation ne peut être formée que contre le bulletin portant établissement séparé, en l’espèce notamment contre les bulletins de l’établissement séparé de la valeur unitaire de la fortune d’exploitation au 1er janvier des années 2017, 2018 et 2019 ;

Considérant qu’il résulte des développements qui précèdent que les réclamations dirigées contre les bulletins de l’impôt sur la fortune au 1er janvier des années 2017, 2018 et 2019 doivent être rejetées comme non fondées ;

Considérant que si le bulletin d’établissement séparé a fait l’objet d’une réclamation, sa réformation entraîne d’office un redressement du bulletin d’impôt établi sur base dudit bulletin d’établissement séparé (§ 218, alinéa 4 AO) ;

Des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial des années 2016 et 2017 Considérant qu’au cours de l’exercice 2016, la réclamante a enregistré comptablement des provisions pour risques et charges à hauteur de … dollars américains appelées provisions pour contrats onéreux (« onerous contracts »), ou provisions pour contrats déficitaires, en relation avec deux contrats d’affrètement de navires ;

Considérant qu’au cours de l’exercice 2017, la réclamante a enregistré comptablement des provisions pour risques et charges à hauteur de … dollars américains et réparties comme suit :

- « Shipping onerous contracts » : … dollars américains, - « LNG compensation novation » : … dollars américains ;

Considérant que le bureau d’imposition refusa la déduction desdites provisions au titre des exercices litigieux en ces termes :

« En ce qui concerne le traitement comptable de la provision en question, il est porté à votre attention que la comptabilisation d’une provision pour contrats déficitaires n’est pas prescrite par la loi luxembourgeoise et ne rentre pas dans le champ d’application des normes comptables luxembourgeoises en vigueur (…). La provision pour contrats déficitaires tire son 4origine des normes comptables internationales, notamment des normes comptables internationales IAS 37 et IFRS qui exige qu’une entité comptabilise une provision lorsqu’un contrat est déficitaire. Ces normes comptables internationales se caractérisent, entre autres, par le fait que certains principes d’évaluation, dont la valorisation à la juste valeur, sont fondamentalement contraires aux grands principes comptables consacrés par la loi luxembourgeoise, notamment le principe de prudence, de l’image fidèle et de l’indépendance des exercices. Il est admis que, par la loi du 10 décembre 2010, certaines entreprises ont la faculté d’opter pour une évaluation basée sur les normes comptables IFRS, toutefois, cette évaluation n’est pas admise en matière de fiscalité directe. A cet égard, il convient de souligner que la constitution d’une provision doit avoir lieu dans le cadre et dans les limites des normes comptables luxembourgeoises en vigueur, notamment de l’article 51, lettre c) de la loi du 19 décembre 2002 concernant le registre de commerce et des sociétés et des articles 224, 235 al.1 lettre c) et 247 de la loi du 10 août 1915 concernant les sociétés commerciales. Il en résulte que la provision pour contrats déficitaires, de par sa nature même, ne peut pas figurer parmi les catégories principales de provisions reconnues par l’administration des contributions directes, à savoir les provisions pour correction d’éléments d’actif ou les provisions pour risques et charges.

En ce qui concerne le traitement en matière d’impôt sur le revenu et commercial, il est porté à votre attention que, en ligne avec les objections des alinéas précédents, la comptabilisation de la provision pour contrats déficitaires ne rentre pas dans le champ d’application des principes d’évaluation (art. 22 et 22bis LIR) et des règles d’évaluation (art.

23 et 24 LIR) en matière fiscale. Il en résulte, que la dotation n’est pas à ranger parmi les dépenses d’exploitation déductibles en matière d’impôt sur le revenu et commercial. A cet effet, le bureau envisage de diverger du principe de l’accrochement du bilan fiscal au bilan commercial (art. 40 LIR) (…).» ;

Considérant que la réclamante conteste la position du bureau d’imposition qui retient que les provisions pour contrats onéreux ne seraient pas reconnues par la législation comptable; qu’elle joint à cet effet une note établie par Maître Yvan Stempnierwsky de l’étude Arendt concluant à la conformité sur le principe des provisions pour contrats onéreux avec les normes comptables luxembourgeoises en vigueur ; qu’elle rajoute que ses comptes annuels ont fait chaque année l’objet d’une certification par un réviseur d’entreprise agréé, en l’occurrence …, qui a à chaque fois émis des rapports sans réserves ; qu’elle conteste également la position du bureau qui retient que ces provisions ne seraient pas admissibles pour les besoins de l’impôt sur le revenu des collectivités ; qu’elle explique que ces provisions sont à admettre par application du principe de l’accrochement du bilan fiscal au bilan commercial résultant de l’article 40 de la loi concernant l’impôt sur le revenu (L.I.R.) ; qu’aucune disposition du droit fiscal ne viendrait déroger au droit comptable en matière de provisions pour contrats onéreux alors que les articles 22, 22bis, 23 et 24 L.I.R. cités par le bureau d’imposition ne constituent nullement des dérogations au principe de l’accrochement en ce qui concerne lesdites provisions; qu’elle rajoute que la déduction de telles provisions devrait également être autorisée sur base de l’article 45 L.I.R. ;

Considérant, à titre introductif et en matière de principe, que le principe comptable communément appelé « principe de prudence », inscrit à l’article 51, alinéa 1er, littera c) de la loi du 19 décembre 2002 concernant le registre de commerce et des sociétés ainsi que la comptabilité et les comptes annuels des entreprises et modifiant certaines autres dispositions légales, est destiné à permettre aux tiers de se faire une idée du patrimoine et de la situation 5réelle de l’entreprise en en reflétant une image fidèle, en retenant notamment que tout événement qui risque de diminuer la valeur du patrimoine de l’entreprise doit immédiatement et formellement être pris en considération ; qu’en revanche, tout événement pouvant augmenter la valeur du patrimoine de l’entreprise ne peut pas faire l’objet d’un enregistrement comptable avant sa réalisation effective, de sorte qu’une entreprise doit imputer immédiatement sur son résultat les charges dès lors que leur probabilité de réalisation est importante, alors qu’inversement, elle n’enregistre ses produits que lorsqu’ils sont certains et/ou effectivement réalisés ;

Considérant que les principes de prudence et d’image fidèle imposent l’enregistrement de provisions telles que définies à l’article 44, alinéa 1er de la loi du 19 décembre 2002 précitée qui dispose que « les provisions ont pour objet de couvrir des pertes ou dettes qui sont nettement circonscrites quant à leur nature et qui, à la date de clôture du bilan, sont ou probables ou certaines, mais indéterminées quant à leur montant ou quant à la date de leur survenance. » ;

Considérant qu’en matière d’imposition du revenu, il convient de retenir que conformément au principe de l’accrochement du bilan fiscal au bilan commercial posé par l’article 40, alinéa 1er L.I.R.., aux termes duquel, lorsque « les prescriptions régissant l’évaluation au point de vue fiscal n’exigent pas une évaluation à un montant déterminé, les valeurs à retenir au bilan fiscal doivent être celles du bilan commercial ou s’en rapprocher le plus possible dans le cadre des prescriptions prévisées, suivant que les valeurs du bilan commercial répondent ou ne répondent pas aux mêmes prescriptions. », les règles du droit comptable sont en principe à respecter ;

Considérant ainsi qu’une provision régulièrement constatée comptablement est en principe admise pourvu qu’elle soit suffisamment justifiée eu égard aux règles applicables en matière fiscale ; que « s’il se peut que le résultat du bilan commercial soit établi en conformité avec les dispositions comptables et commerciales, une telle régularité n’exclut pas que ce même résultat ne soit pas acceptable du point de vue fiscal, de sorte que dans une telle hypothèse le bilan commercial doive faire l’objet de redressements afin de faire correspondre le résultat à celui qui aurait été atteint si toutes les règles fiscales avaient été respectées ». (Tribunal administratif du 27 novembre 2006, n° 21033 du rôle); qu’en effet, alors que les prescriptions comptables ont comme objectif principal la protection des tiers créanciers, elles tendent moins à faire apparaître le bénéfice effectivement réalisé qu’à ne pas faire apparaître des bénéfices non réalisés ;

Considérant que les provisions pour risques et charges sont des provisions régulatrices du passif car destinées à faire face à des dettes incertaines et à des charges d’exploitation que des événements en cours rendent probables et à rattacher ces dettes et charges à l’exercice auquel elles sont imputables du point de vue économique ; que dans ce cadre, la provision doit être la constatation comptable d’un bien économique négatif ; que l’existence d’un bien économique négatif est admise en cas de risques afférents aux opérations en cours à condition que ces risques entraînent, au jour de la clôture du bilan, une moins-value du patrimoine d’exploitation ; qu’en outre, le risque ou la charge que la provision est destinée à couvrir doit être réel et trouver son origine dans des faits ou opérations de l’exercice à la fin duquel la provision est constituée (cf. Hubert Dostert, L’impôt sur le revenu, in études fiscales nos 7 et 8, novembre - décembre 1964) ;

Considérant que l’article 22, alinéa 2 L.I.R. dispose que « la situation à la date de 6clôture de l’exercice d’exploitation est déterminante pour l’évaluation en fin d’exercice, l’exploitant pourra tenir compte des faits et circonstances qui ont existé à cette date et dont l’existence ne s’est révélée qu’ultérieurement, mais avant la date d’établissement du bilan » ;

Considérant qu’il convient d’analyser les provisions litigieuses comptabilisées par la réclamante à la lumière des principes susmentionnés afin de déterminer le traitement fiscal qui leur est applicable ;

Considérant que la réclamante explique qu’à l’époque des faits, elle était active dans le négoce de gaz naturel liquéfié (GNL) et avait comme principaux engagements à long terme un contrat d’achat de GNL avec Société C, différents contrats d’affrètement de navires et un accord de capacité pour l’accès au terminal de … ; qu’à partir d’avril 2015, en raison de la guerre civile au …, Société C, son principal fournisseur de GNL, a invoqué la clause de force majeure du contrat d’achat de GNL ; qu’il en a résulté une incapacité pour la réclamante à pouvoir honorer certains contrats ; que cette situation économique l’a amenée à devoir comptabiliser différentes provisions pour contrats déficitaires relatives à ses engagements ;

Considérant que la notion de contrats déficitaires provient de la norme IAS 37, reconnue compatible avec les normes comptables européennes (Règlement (CE) no 1126/2008 de la Commission du 3 novembre 2008 portant adoption de certaines normes comptables internationales conformément au règlement (CE) no 1606/2002 du Parlement européen et du Conseil - document 692/2001 de la Commission européenne) ; qu’un contrat déficitaire est défini comme un contrat pour lequel les coûts inévitables pour satisfaire aux obligations contractuelles sont supérieurs aux avantages économiques attendus du contrat ; qu’en application de cette norme, lorsqu’une entité a un contrat déficitaire, l’obligation actuelle résultant de ce contrat doit être comptabilisée et évaluée comme une provision ;

Quant aux provisions en relation avec les contrats d’affrètement à long terme de navires de transports de GNL Considérant que la réclamante expose qu’elle disposait historiquement de plusieurs contrats d’affrètement à long terme de navires de transport de GNL conclus avec les propriétaires respectifs des navires pour un tarif journalier fixe ; qu’en raison de la force majeure sur son principal contrat d’approvisionnement, la réclamante disposait d’un excédent de transport par rapport à ses cargaisons; que pour certains contrats d’affrètement, elle parvint à trouver d’autres opérateurs auxquels sous-affréter certains navires pendant certaines périodes, à un prix toutefois moindre que le prix payé par elle au titre des contrats d’affrètement (navires …, …, … et …), alors que pour d’autres contrats (navire … et …), elle négocia avec les propriétaires respectifs des navires une suspension de la charte d’affrètement moyennant paiement d’une indemnité journalière pendant la durée de suspension ; qu’elle explique que ces opérations lui ont permis de réduire les pertes au titre des contrats d’affrètement sans toutefois les supprimer de sorte que les contrats d’affrètement restaient déficitaires ;

Considérant qu’il ressort de ces explications que deux types de provisions ont été enregistrées par la réclamante au cours des exercices litigieux ;

Considérant tout d’abord, quant aux provisions en relation avec les contrats de sous-

affrètement de navire, qu’il est rappelé que les principes d’indépendance des exercices et le principe de rapprochement des charges et des produits obligent à imputer à un exercice donné 7les produits et les charges qui lui sont propres afin de dégager le résultat qui y trouve son origine ; que les principes émanant de la norme IAS, dont la réclamante se prévaut relativement aux contrats déficitaires, imposent également que seules les obligations qui résultent d’événements passés existant indépendamment d’actions futures de l’entité (c’est-à-dire de la conduite future de son activité) sont comptabilisées comme des provisions de sorte que c’est l’obligation actuelle résultant d’un contrat déficitaire qui doit être comptabilisée et évaluée comme une provision ; que des provisions ne doivent pas être comptabilisées au titre de pertes opérationnelles futures ;

Considérant que les provisions de l’espèce se rattachent à des prestations de services non encore réalisées à la clôture de l’exercice, au titre des contrats d’affrètement d’une part et des contrats de sous-affrètement d’autre part ; que par application des principes susénoncés, ces opérations sont à considérer comme économiquement en relation avec l’exercice au cours duquel les parties exécuteront leurs obligations respectives, c’est-à-dire au cours duquel les prestations de services seront effectivement réalisées ; que la simple signature des contrats d’affrètement et de sous-affrètement ne peut être considérée comme faits ou opérations à l’origine de la perte alors que ces contrats contiennent des obligations futures, à échéance successives au fur et à mesure de l’utilisation des navires de transport, mais ne contiennent aucune obligation actuelle ;

Considérant qu’il en résulte que les provisions litigieuses, représentant la différence entre les revenus futurs résultant du sous-affrètement des navires et le coût futur de l’affrètement, ne représentent pas des charges imputables sur le résultat de l’exercice ; que c’est dès lors à bon droit que le bureau d’imposition a considéré que ces provisions, d’un montant de … dollars américains au titre de l’exercice 2016 et d’un montant de 74.387.358 dollars américains au titre de l’exercice 2017, incluant les reprises sur provisions, ne sont pas des dépenses déductibles au titre des exercices considérés ;

Considérant ensuite, quant aux provisions relatives aux pertes générées par la suspension des contrats d’affrètement, toutes comptabilisées au cours de l’exercice 2017, que ces provisions correspondent à des pertes dont la survenance au cours d’un exercice ultérieur peut être tenue pour certaine dans son principe du fait même de la signature des contrats respectifs, qui en est le fait générateur ; qu’en effet, les parties sont liées pour la durée de la période de suspension sans autre formalité requise ou action possible ; qu’il ressort des contrats que la perte à venir, c’est-à-dire l’indemnité due au titre des contrats de suspension, est nettement circonscrite quant à sa nature, probable voire même certaine, alors que le montant exact, dépendant du nombre exact de jours de suspension, ainsi que la date précise de survenance, dépendant de la restitution effective des navires, restent encore à déterminer ; que partant, ces pertes à venir remplissent les conditions permettant l’enregistrement d’une provision au titre de l’exercice au cours duquel les contrats de suspension ont été conclus ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les provisions en relation avec les contrats de suspension des contrats d’affrètement, de l’ordre de … dollars américains (navire …) et de … dollars américains (navire …) enregistrées au titre de l’exercice 2017 sont à considérer comme des dépenses déductibles du revenu imposable ; que partant, le montant des dépenses considérées comme inadmissibles par le bureau d’imposition est à réduire d’un montant de … euros ;

Quant à la provision en relation avec la novation du contrat SPA 8 Considérant que la réclamante explique avoir conclu en 2011 un contrat de vente et d’achat de GNL (sale and purchase agreement - le contrat SPA) avec Société D (SOCIÉTÉ D) ; que ce contrat prévoyait la vente par la réclamante à un certain prix d’un volume déterminé de cargaisons de GNL à SOCIÉTÉ D sur une durée de 15 ans, soit jusqu’en 2026; que la réclamante se fournissait en GNL via son contrat d’approvisionnement à long terme avec la société Société C ; qu’en août 2015, en raison de la guerre au …, les approvisionnements en GNL depuis le … ont été interrompus ; que pour la période 2015 à 2017, les livraisons à SOCIÉTÉ D ont pu être réalisées à partir de volumes disponibles au titre d’autres contrats d’approvisionnement, à des conditions toutefois moins favorables que celles conclus avec …;

que fin 2017 « compte tenu des difficultés de trésorerie de société B et de l’incertitude persistante sur le redémarrage de SOCIÉTÉ C, Société B a décidé de se désengager de son contrat avec SOCIÉTÉ D en le transférant via une novation à SOCIÉTÉ E », soit à sa société mère ultime ; qu’elle explique qu’en contrepartie de cette novation, elle conclut un contrat de compensation avec la société E au titre duquel elle s’engageait à compenser à la société E la différence entre le prix de vente résultant du contrat SPA cédé et le prix de marché des cargaisons au fur et à mesure des livraisons, c’est-à-dire la valeur négative du contrat SPA cédé à la société E, sous forme d’une indemnité ; qu’elle précise que cette indemnisation fut déterminée au regard des conditions de marché applicables à la date de la novation ; qu’ainsi, « bien que Société B ne doive indemniser SOCIÉTÉ E qu’au fur et à mesure des livraisons à SOCIÉTÉ D et en fonction du prix du marché de chaque cargaison à la date de livraison, le principe de l’indemnisation était acquis. Il était donc nécessaire pour respecter les règles comptables de passer une provision pour risque (…). » ;

Considérant que les conditions de conclusion du contrat de compensation présentent certaines anormalités ; qu’ainsi, selon les termes du contrat SPA, la responsabilité du vendeur de GNL à SOCIÉTÉ D est limitée à un certain montant fixe maximum (2,5 USD par MMBtu, article 5.3.5 du SPA) ; que pourtant, le calcul de provision fourni par la réclamante fait état d’une indemnisation due au titre du contrat de compensation qui va bien au-delà de l’indemnisation maximum qui aurait été due par la réclamante si elle avait conservé le contrat SPA; qu’en outre, le contrat de compensation prévoit que l’indemnité sera due, sans prise en compte d’un éventuel ajustement de prix opéré au titre du contrat SPA ; qu’en d’autres termes, la réclamante resterait tenue de verser une indemnité basée sur le prix historique fixé au contrat de SPA alors même que des ajustements de prix seraient potentiellement opérés au bénéfice de la société E suite à la reprise du contrat SPA par cette dernière ; qu’un tel ajustement au bénéfice de la société E s’avère particulièrement probable alors qu’il ressort du document de référence de la société E pour 2017, disponible publiquement, qu’une des missions prioritaires de la société E en relation avec son activité GNL était de renégocier les contrats d’achat et de ventes de GNL qui ne reflétaient pas les conditions actuelles du marché ; que le document de référence pour 2018 précise même que « les négociations conduites ces dernières années ont permis d’intégrer des indices de marchés dans les contrats à long terme et/ou de réduire le différentiel entre les prix des contrats et ceux des places de marché. Elles ont également permis d’augmenter la fréquence des révisions de prix. » ; que même si les documents de référence ne visent pas expressément le contrat SPA, il n’en reste pas moins que la réclamante, en s’engageant à payer une indemnité au titre du contrat de compensation, ne pouvait ignorer que celle-ci serait en réalité notablement plus élevée que le coût négatif du contrat réellement subi;

que le contrat de compensation semble donc particulièrement artificiel, sachant qu’il fut d’un côté conclu entre des parties liées ou du moins intéressées, et que de l’autre côté, il ne tient aucunement compte de la réalité économique ;

9 Considérant par ailleurs que la provision pour risque évaluée correspond au montant total probable de l’indemnité due par la réclamante à la société E, calculée sur base d’une projection théorique de l’évolution du prix du GNL; qu’il ressort du calcul estimatif de la provision, fourni par la réclamante, que celle-ci sera amenée à verser annuellement à la société E une indemnité au titre du contrat de compensation estimée à près de … de dollars américains pour 2018 et jusqu’à plus de … de dollars américains en 2026 ;

Considérant qu’il ressort des comptes annuels de la réclamante que le contrat SPA cédé représentait sa source principale de revenus ; que les autres contrats de fourniture de GNL conclus par elle étaient par ailleurs tous destinés à prendre fin à court terme ; que depuis l’exercice 2017 et en raison de la novation du SPA, le chiffre d’affaires de la réclamante a continuellement chuté (2016 : … de dollars américains, 2017 : … de dollars américains, 2018:

… de dollars américains, 2019: … de dollars américains ; qu’il ressort d’ailleurs des comptes annuels que, dès l’année 2018, le résultat net de la réclamante (hors indemnité) fut inférieur à l’indemnité qu’elle devait payer au titre de l’exercice de sorte qu’elle était, dès la signature du contrat de compensation, en difficulté d’honorer sa part du contrat, ce qui corrobore, voire démontre de ce chef le caractère artificiel dudit contrat ;

Considérant que la réclamante et la société E ne pouvaient ignorer les difficultés financières de la réclamante engendrées par la perte de son contrat principal et partant, que la réclamante serait en difficulté, sinon dans l’impossibilité, de payer à la société E les indemnités dues au titre de chaque exercice ;

Considérant que dans des conditions normales de marché, une entreprise indépendante ne s’engagerait pas dans des activités déficitaires à moins de pouvoir raisonnablement compter sur des bénéfices futurs ; qu’il ressort du contrat de compensation que malgré les sommes importantes en jeu, la société E n’a pas estimé nécessaire de se ménager la moindre garantie au titre du contrat d’indemnisation ; qu’un acquéreur d’un contrat comme celui de l’espèce n’aurait pas accepté à titre de compensation une indemnité dont il savait à l’avance que sa contrepartie ne serait pas en mesure de l’honorer ;

Considérant qu’il ressort des attendus du contrat de compensation que la société E accepta la novation du SPA, pourtant déficitaire, parce qu’elle désirait conserver son accès au marché … du GNL; que cette explication ne concorde cependant pas avec les informations publiquement disponibles qui font apparaître qu’au même moment, la société E, en tant que société mère du groupe, était déjà en négociation pour la vente de ses activités GNL à …; qu’il ressort en effet du document de référence 2017 de la société E que dès novembre 2017, celle-

ci a reçu une offre ferme et irrévocable de … pour la vente de certaines de ces activités en relation avec le GNL (la liquéfaction, le transport maritime et le négoce international) ; qu’en 2018 et 2019, suite à ces annonces, la réclamante a ainsi été cédée au groupe …, puis a transféré son siège social en France pour y être absorbée par une autre société du groupe …, ces opérations ayant d’ailleurs entraîné que le sort de la provision n’est plus traçable ;

Considérant que les circonstances de l’espèce sont de nature à retenir que le contrat d’indemnisation n’a pas été conclu dans des conditions de pleine concurrence et qu’il n’était dès lors en réalité dans l’intention d’aucune des parties au contrat d’indemnisation que la réclamante ait effectivement à s’acquitter, totalement ou partiellement, de l’indemnité ;

10Considérant d’ailleurs que suite à son transfert de son siège social vers la France le 23 janvier 2019, la réclamante procéda à l’extourne de l’intégralité de la provision litigieuse dans sa déclaration finale pour l’exercice 2019 ; que le transfert de siège est considéré en vertu de l’article 172 L.LR. comme une dissolution, entraînant une imposition du bénéfice net réalisé ;

qu’en procédant à l’extourne des provisions effectuées, la réclamante confirme per se que celles-ci n’avaient aucune valeur économique ;

Considérant qu’une provision ne vise pas à couvrir des risques hypothétiques ; que l’absence de la moindre réalité économique relativement aux indemnités devant être effectivement payées par la réclamante à la société E au titre du contrat de compensation interdit l’enregistrement de la moindre provision y afférente ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que c’est à bon droit que le bureau d’imposition a refusé la déduction de la provision litigieuse ;

Des bulletins de l’établissement séparé de la valeur unitaire au 1er janvier des années 2017, 2018 et 2019 Considérant que le bureau d’imposition a également refusé de porter en déduction de la fortune d’exploitation les provisions litigieuses enregistrées au bilan de la requérante ; que le bureau d’imposition s’explique comme suit « En ce qui concerne le traitement en matière d’impôt sur la fortune, il est porté à votre attention qu’en vertu du §62(1) BewG et en considérant les objections des alinéas précédents, la provision pour contrats déficitaires ne peut pas non plus être considérée comme un élément du passif déductible de la fortune brute totale. » ;

Considérant que la réclamante conteste tout autant qu’en matière d’évaluation des biens et valeurs, ces provisions ne seraient pas déductibles de la fortune d’exploitation sur base du §§62 (1) de la loi sur l’évaluation des biens et valeurs (BewG) alors que cet article traiterait uniquement des dettes ou charges affectées d’une condition suspensive, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce ;

Considérant, en ce qui concerne la détermination de la valeur unitaire de la fortune d’exploitation, que le § 62 de la loi sur l’évaluation des biens et valeurs (BewG) prévoit que les dettes d’exploitation sont celles qui sont en relation économique avec l’entreprise commerciale alors que le § 6 traite des dettes ou charges affectées d’une condition suspensive;

qu’en vertu du § 66, alinéa 1er BewG, les biens faisant partie de la fortune d’exploitation sont en principe à évaluer à la valeur d’exploitation;

Considérant qu’il résulte des développements qui précèdent que tant les provisions liées aux contrats d’affrètement et de sous affrètement de navires, liées à des prestations de services futures, que la provision liée au contrat de compensation suite à la novation du contrat SPA, sans valeur économique, ne sont pas des dettes déductibles de la fortune d’exploitation ; qu’en revanche, les provisions en relation avec les contrats de suspension des contrats d’affrètement sont à considérer comme dettes déductibles de la fortune d’exploitation, soit un montant de … dollars américains (navires … et …) au 1er janvier 2018 et un montant de … dollars américains (provision résiduelle sur le navire …) au 1er janvier 2019, que partant, le montant des dettes considérées comme déductibles de la fortune d’exploitation par le bureau d’imposition est à augmenter de … euros au 1er janvier 2018 et de … euros au 1er janvier 2019 ;

11 Quant à l’accrétion au titre du contrat ZORA Considérant qu’à titre subsidiaire, la réclamante fait grief au bureau d’imposition, n’ayant pas accepté la déductibilité des provisions, de ne pas avoir alors pris en compte l’emprunt sans intérêt obligatoirement convertible en actions dénommé contrat « ZORA » souscrit par elle au cours des années litigieuses ; qu’elle explique que le contrat ZORA a été conclu entre elle et la société à responsabilité limitée Société B (Luxembourg) en 2009 pour une durée de 15 ans ; qu’ « en cas de remboursement du ZORA par l’émission d’actions, le contrat prévoit que le prix de conversion devra être égal au prix d’émission initial du ZORA majoré des montants accrus au cours de la vie du ZORA jusqu’à la date de remboursement dudit instrument (les Accrétions). Il résulte du contrat ZORA que les Accrétions annuelles doivent correspondre (i) au bénéfice commercial net de Société B (avant impôts), (ii) majoré, le cas échéant de la différence entre la valeur de marché et la valeur comptable des actifs de Société B et (iii) diminué d’une marge brute (telle que déterminée dans le contrat ZORA). » ;

qu’elle rajoute que le traitement fiscal du contrat ZORA a été confirmé par plusieurs décisions fiscales anticipées ; que sur cette base, le bureau d’imposition aurait dû procéder aux retraitements nécessaires en relation avec lesdites accrétions afin de, d’une part, n’être imposée que sur la marge brute précitée pour les besoins de l’impôt sur le revenu et d’autre part, de voir déduire les accrétions de la fortune imposable, ce qu’il n’a pas fait ;

Considérant que les conditions relatives aux accrétions sur le contrat ZORA sont plus spécifiquement décrites dans les décisions fiscales anticipées des 9 septembre 2008 et 9 mars 2012, les trois autres décisions citées par la réclamante étant relatives à diverses opérations de restructurations impactant la réclamante ainsi qu’aux opérations de conversion partielle des ZORA qui n’ont pas d’impact dans la présente instance ; que par les deux décisions des 9 septembre 2008 et 9 mars 2012, l’Administration des contributions directes confirma la marge devant être réalisée par la réclamante entre ses activités financées par le financement ZORA et les accrétions ;

Considérant que, contrairement à ce que prétend la réclamante, les réponses de l’administration ont bien été émises avec réserve ; qu’en effet, il ressort des décisions fiscales anticipées que la confirmation de l’Administration resterait valide tant qu’aucun changement dans la loi fiscale, les règlementations ou la doctrine administrative ne requiert autrement («»until a change of Luxembourg tax law, regulations or Luxembourg administrative policy requires otherwise »); qu’à partir du 1er janvier 2017, un nouvel article 56bis a été introduit dans la loi concernant l’impôt sur le revenu suivi d’une circulaire du directeur des contributions L.I.R. n° 56/1 - 56bis/1 du 27 décembre 2016 relative au traitement fiscal des sociétés exerçant des transactions de financement intra-groupe ; qu’eu égard à ces nouvelles réglementations, les décisions fiscales anticipées ne pouvaient plus être considérées comme valides alors qu’elles ne remplissaient pas les conditions y visées à défaut d’une analyse de prix de transfert conforme au principe de pleine concurrence ; qu’en outre, la circulaire susvisée précise expressément que toute décision administrative individuelle relative au principe de pleine concurrence rendue sur base des règles applicables avant l’entrée en vigueur de l’article 56bis L.I.R. ne lie plus l’Administration des contributions directes pour les années d’imposition postérieures à l’année 2016 ; que la réclamante ne pouvait ignorer ce changement de législation, qui n’est d’ailleurs probablement pas étranger aux différentes opérations ayant mené à l’enregistrement des provisions litigieuses ;

12Considérant en tout état de cause que, même si les décisions avaient été valides, il ressort des conditions contractuelles relatives au ZORA, que l’accrétion est à calculer sur base du résultat opérationnel net (« net operational income ») de la réclamante, c’est-à-dire le résultat net avant impôts et excluant le montant annuel d’accrétion ; que les décisions fiscales anticipées confirment d’ailleurs également que la marge est calculée sur base des comptes commerciaux (« commercial accounts ») de la réclamante ; qu’en l’espèce, il échet de constater que le refus au niveau fiscal de la déductibilité des provisions n’est pas de nature à modifier leur enregistrement comptable et donc n’est d’aucune influence sur le résultat opérationnel net de la réclamante, que dans ce contexte, aucune accrétion supplémentaire n’aurait été à admettre en vertu du contrat ZORA ;

Considérant qu’il en résulte que l’argument relatif à une prétendue accrétion au titre du contrat ZORA est à rejeter comme non fondé ;

Considérant que les redressements des impositions pour le revenu des collectivités et pour l’impôt commercial communal de l’année 2017 ainsi que de la valeur unitaire au 1er janvier des années 2018 et 2019 font l’objet des annexes 1 à 3 qui forment des parties intégrantes de la présente décision ;

Considérant que pour le surplus les impositions sont conformes à la loi et aux faits de la cause et ne sont d’ailleurs pas autrement contestées ;

PAR CES MOTIFS reçoit les réclamations en la forme, rejette les réclamations contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2016, contre les bulletins de l’impôt sur la fortune des années 2016, 2017 et 2018 ainsi que contre le bulletin de l’établissement séparé de la valeur unitaire de la fortune d’exploitation au 1er janvier 2017 comme non fondées, dit les réclamations contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2017 ainsi que contre les bulletins de l’établissement séparé de la valeur unitaire de la fortune d’exploitation au 1er janvier des années 2018 et 2019 partiellement fondées, réformant, ramène l’impôt sur le revenu des collectivités de l’année 2017, y compris la contribution au fonds pour l’emploi, à … euro, établit la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2017 à … euro, ramène l’impôt commercial communal de l’année 2017 à … euro, établit la valeur unitaire de la fortune d’exploitation au 1er janvier 2018 à … euros, établit la valeur unitaire de la fortune d’exploitation au 1er janvier 2019 à … euros, renvoie au bureau d’imposition pour exécution. […] ».

13Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 3 novembre 2021, la société A a fait introduire un recours en réformation, sinon en annulation de la décision directoriale précitée du 3 août 2021.

1) Quant à la compétence du tribunal et à la recevabilité du recours Conformément aux dispositions combinées du § 228 AO et de l’article 8, paragraphe (3), point 1. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par la « loi du 7 novembre 1996 », le tribunal est compétent pour statuer comme juge du fond sur le recours dirigé par un contribuable contre une décision du directeur ayant statué sur les mérites d’une réclamation de sa part contre une des décisions visées aux 166 alinéa 3, 211, 212, 212a alinéa (1), 214, 215, 215a et 235, 396 alinéa (1) et 402 AO.

Le directeur ayant pris sa décision sur le fondement du § 228 AO, le tribunal est dès lors compétent pour connaître du recours principal en réformation introduit par la société A contre la décision directoriale précitée du 3 août 2021 ayant partiellement fait droit à sa réclamation introduite en date du 27 novembre 2020.

Il n’y a dès lors pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

Ledit recours principal en réformation dirigé contre la décision directoriale du 3 août 2021 est, par ailleurs, recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.

Si le délégué du gouvernement s’est rapporté à prudence de justice en ce qui concerne la recevabilité de la présente requête, et si le fait, pour une partie, de se rapporter à prudence de justice équivaut à une contestation, il n’en reste pas moins qu’une contestation non autrement étayée est à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au juge administratif de suppléer la carence des parties au litige et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions1. Dès lors, étant donné que la partie étatique est restée en défaut d’apporter des développements circonstanciés à cet égard, le moyen d’irrecevabilité encourt le rejet.

2) Quant au fond Arguments des parties Dans sa requête introductive d’instance, la société demanderesse fait d’abord valoir que le bureau d’imposition aurait estimé que des provisions pour contrats déficitaires ne seraient pas reconnues par les législations fiscales et comptables en vigueur, mais que le directeur aurait semblé admettre que ces provisions rentreraient pleinement dans le champ d’application des normes comptables luxembourgeoises. Elle en déduit que la position du directeur s’alignerait avec les arguments qu’elle aurait développés dans sa réclamation, et que l’admissibilité, dans son principe, des provisions pour contrats onéreux tant en droit comptable qu’en droit fiscal luxembourgeois ne serait donc pas au cœur des débats dans la présente affaire.

1 Trib. adm., 23 janvier 2013, n° 30455 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 883 et les autres références y citées.

14 Tout en affirmant reprendre les principes que le directeur aurait dégagés dans sa décision sur réclamation afin de trancher la question de la déductibilité de provisions d’un point de vue fiscal, la société demanderesse explique qu’ils ne seraient pas « en soi » contestables, mais que le directeur les aurait interprétés et appliqués de façon erronée dans les circonstances de l’espèce en refusant, pour l’essentiel, la déductibilité des provisions litigieuses.

La société demanderesse indique, ensuite, que les comptes annuels de la société B auraient fait l’objet d’une certification par un réviseur d’entreprises agréé qui aurait émis des rapports aux termes desquels les états financiers de la société B donneraient une représentation correcte et juste (« true and fair ») de sa situation financière qui serait, par ailleurs, conforme au cadre légal et réglementaire applicable en matière de préparation et d’établissement des comptes financiers, la société demanderesse se référant à l’article 18, paragraphe (2) de la loi modifiée du 23 juillet 2016 relative à la profession de l’audit, ci-après désignée par la « loi du 23 juillet 2016 », pour soutenir que les réviseurs d’entreprises agréés (i) disposeraient d’un haut niveau de connaissances théoriques, caractérisé notamment par la nécessité d’avoir un agrément et de suivre une formation permanente, (ii) seraient soumis à un principe d’indépendance, (iii) seraient obligés d’exécuter leurs missions selon des normes techniques, telles que les « normes ISA », et (iv) seraient contraints de faire preuve de scepticisme, en particulier à l’égard des provisions.

La société demanderesse en conclut que la conformité des comptes annuels de la société B, en ce compris des provisions litigieuses, au droit comptable ne serait pas contestable en l’espèce, et renvoie « pour de plus amples informations » au sujet de l’admissibilité, voire l’obligation d’enregistrer des provisions pour contrats onéreux en droit luxembourgeois, à un « avis comptable » du 25 novembre 2020 joint à sa requête, ainsi qu’aux articles 44 et 51, paragraphe (1), point c) de la loi modifiée du 19 décembre 2002 concernant le registre de commerce et des sociétés ainsi que la comptabilité et les comptes annuels des entreprises, ci-

après désignée par la « loi du 19 décembre 2002 ».

La société demanderesse est d’avis que la question de la déductibilité des provisions litigieuses en droit luxembourgeois nécessiterait de se référer au principe de l’accrochement du bilan fiscal au bilan commercial ancré à l’article 40 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, ci-après désignée par la « LIR », et dont il ressortirait que s’il était possible qu’un résultat du bilan commercial établi en conformité avec les dispositions comptables ne soit pas acceptable d’un point de vue fiscal, il faudrait dans ce cas justifier de l’existence de la disposition du droit fiscal qui viendrait déroger aux dispositions du droit comptable et donc au principe de l’accrochement du bilan fiscal au bilan comptable.

A cet égard, la société demanderesse fait valoir qu’aucune disposition du droit fiscal ne viendrait déroger au droit comptable en ce qui concerne la question de la déductibilité des provisions litigieuses. Les dispositions citées par le bureau d’imposition, à savoir les articles 22, 22bis, 23 et 24 LIR, auxquels le directeur ne se serait référé que partiellement, ne constitueraient pas des dérogations au principe de l’accrochement en ce qui concerne les provisions litigieuses. Elle ajoute qu’à la différence d’autres catégories de provisions, aucune disposition spécifique ne prévoirait la non-déductibilité des provisions pour contrats déficitaires, la société demanderesse faisant valoir, au contraire, que leur déduction devrait être autorisée pour les besoins de de l’impôt sur le revenu des collectivités et l’impôt commercial communal sur base de l’article 45 LIR.

15 En ce qui concerne sa fortune imposable, la société demanderesse reproche au bureau d’imposition d’avoir refusé la déduction des provisions litigieuses au motif qu’une telle exclusion serait prévue par le § 62, alinéa (1) de la loi modifiée sur l’évaluation des biens et valeurs du 16 octobre 1934, appelée « Bewertungsgesetz », en abrégé, « BewG », la société demanderesse estimant que cette disposition ne prévoirait pas une telle exclusion. Elle ajoute, à « toutes fins utiles », que les provisions litigieuses auraient été constituées à raison d’obligations certaines, mais dont le montant n’aurait pas encore pu être déterminé de manière définitive à l’époque des faits, de sorte qu’elles n’auraient pas pu être assimilées à des dettes ou charges affectées d’une condition suspensive. Le § 6 BewG n’aurait, quant à lui, pas vocation à s’appliquer. La société demanderesse estime qu’aucune disposition excluant la déductibilité des provisions litigieuses en matière d’impôt sur la fortune ne serait applicable, de sorte qu’elle devrait être accordée.

Elle fait valoir, à « titre surabondant », que la jurisprudence des juridictions administratives ne permettrait aucunement de conclure à la non-admissibilité des provisions litigieuses et que si les juridictions administratives n’auraient, à sa connaissance, jamais eu à se prononcer spécifiquement sur la question des provisions pour contrats onéreux, respectivement déficitaires, il serait opportun de se référer à un jugement du tribunal administratif du 21 décembre 2016, inscrit sous le numéro 37047 du rôle, ainsi qu’à un jugement du même tribunal du 25 mars 2010, inscrit sous le numéro 24342 du rôle, qui porteraient sur les créances douteuses et qui seraient pertinents pour soutenir son argumentation tendant à voir accepter la déduction des provisions litigieuses.

La société demanderesse poursuit en expliquant que sur base de ces « simples » constatations, et notamment de l’absence de divergences entre les dispositions comptables et fiscales, le directeur aurait dû admettre la déduction des provisions litigieuses pour les années d’imposition concernées.

Elle reproche au directeur de s’être livrée à « des interprétations hasardeuses des principes et textes applicables et à des approximations parfois surprenantes, tout en formulant même des allégations infondées » qui l’auraient nécessairement amené à refuser, de façon erronée, la déductibilité de ses deux provisions litigieuses.

Au sujet de la première catégorie de provisions litigieuses, à savoir celle ayant trait aux contrats de sous-affrètement, la société demanderesse explique que la société B aurait disposé de plusieurs contrats d’affrètement à long terme de navires de transport de gaz naturel liquéfié (GNL) qu’elle aurait conclus avec les propriétaires respectifs des navires pour un tarif journalier fixe.

Suite à la survenance d’un évènement de force majeure sur son principal contrat d’approvisionnement avec la société de droit yéménite Société C, ci-après désignée par la « société C », la société B aurait disposé d’un excédent de capacité de transport par rapport à ses volumes de cargaisons de GNL. Tout en indiquant que la société B serait parvenue à trouver d’autres opérateurs auxquels elle aurait sous-affrété certains navires pendant certaines périodes, la société demanderesse fait valoir que le prix perçu aurait, en revanche, été moindre que le prix que la société B aurait été tenue de payer au titre des contrats d’affrètement. Les opérations auraient permis à cette dernière de réduire les pertes générées par les contrats d’affrètement, sans toutefois être en mesure de les résorber intégralement. Les contrats d’affrètement seraient 16restés déficitaires et auraient donc donné lieu aux provisions litigieuses.

La société demanderesse reproche au directeur d’avoir conclu que les provisions litigieuses représenteraient la différence entre les revenus futurs résultant du sous-affrètement des navires et le coût futur de l’affrètement et qu’elles ne représenteraient pas des charges imputables sur le résultat de l’exercice. Elle fait valoir qu’à l’instar de toute autre provision, les provisions litigieuses devraient, d’une part, être évaluées à la date de clôture de l’exercice comptable, à la meilleure estimation des charges probables ou, dans le cas d’une perte ou d’une dette, du montant nécessaire pour l’honorer, et, d’autre part, être constituées, conformément au principe de prudence, même si ces risques et charges ne sont connus qu’après la clôture de l’exercice comptable s’ils ont pris naissance au cours de l’exercice ou d’un exercice antérieur.

Le risque de pertes ou de charges devrait dès lors être né au cours d’un exercice - ou rattachable à cet exercice - pour qu’une provision puisse être comptabilisée, notamment une provision pour contrat onéreux, la société demanderesse se référant à un avis de la Commission des normes comptables belge, intitulé « Avis CNC 2018/24 » du 12 septembre 2018. Les provisions ne pourraient donc couvrir que des risques et charges qui trouveraient leur origine dans l’exercice comptable ou un exercice antérieur.

La société demanderesse estime que les provisions litigieuses rempliraient toutes les conditions pour une comptabilisation au sens de la loi du 19 décembre 2002, et plus particulièrement au sens des articles 44 et 55, paragraphe (1), point c).

Elle fait valoir que le directeur semblerait s’être livré à une mauvaise interprétation, respectivement lecture de la « norme IAS 37 » qui viserait notamment la comptabilisation des provisions et définirait dans ce cadre les provisions pour contrats déficitaires, dans la mesure où il aurait affirmé que la signature des contrats d’affrètement ne pourrait être considérée comme constitutive des faits ou opérations à l’origine de la perte.

La société demanderesse donne à considérer que la « norme IAS 37 » prévoirait cependant explicitement, dans ses paragraphes 66 à 69, qu’un passif, à savoir une provision, devrait être comptabilisé aussitôt qu’un contrat signé s’avérerait être déficitaire. Ainsi, il ne devrait même pas être nécessaire que l’exécution du contrat ait commencé avant la date de clôture de l’exercice au motif que l’obligation naîtrait lors de la signature du contrat, la société demanderesse citant un extrait d’une source doctrinale, intitulée « Memento Pratique Comptable 2020, p.232, n° 11625 ».

Elle poursuit en expliquant qu’en l’occurrence, le passif, respectivement le risque de perte naîtrait non seulement de l’existence même des contrats d’affrètement, qui auraient été signés bien avant la date de clôture des exercices concernés, mais également du fait que la société B n’aurait pas pu échapper à ses obligations contractuelles, sauf à faire face au paiement d’indemnités, la société demanderesse se référant « pour plus de détail » à des « Fiches Techniques "Affrètement / Sous-Affrètement" » jointes à sa requête. Elle poursuit en indiquant que les contrats d’affrètement engageraient l’affréteur pour la totalité des montants de la « charte à temps » dès le moment de la signature de ces contrats, indépendamment de l’utilisation ou non du navire, de sorte que les obligations liées au loyer à payer naîtraient bien dès la signature des contrats et pour la totalité de la durée de la location même si le paiement n’intervenait que de façon échelonnée. Elle ajoute qu’en vertu de l’article 64 de la loi du 19 décembre 2002, le montant de la provision devrait représenter le montant total nécessaire pour honorer la perte. Il s’ensuivrait que l’analyse du directeur irait à l’encontre des dispositions 17comptables et fiscales applicables.

La déduction des provisions en relation avec les contrats d’affrètement, respectivement de sous-affrètement devrait donc être admise dans sa totalité d’un point de vue de l’impôt sur le revenu des collectivités, de l’impôt commercial communal et de l’impôt sur la fortune.

En ce qui concerne la seconde catégorie de provisions, à savoir celle en relation avec le contrat de novation, respectivement de compensation, la société demanderesse se réfère à un contrat d’achat et vente de GNL, ci-après désigné par le « LNG Sale and Purchase Agreement », qu’aurait conclu la société B avec la société de droit chilien Société D, ci-après désignée par la « société E », en 2011.

Ledit contrat aurait prévu la vente par la société B à un certain prix d’un volume déterminé de cargaisons de GNL à la société E sur une durée de 15 ans, soit jusqu’en 2026.

Dans l’environnement commercial de 2017, le prix contractuel qu’aurait payé la société E aurait été inférieur au coût supporté par la société B pour la fourniture du GNL. Historiquement, la société B se serait fournie en GNL via son contrat d’approvisionnement à long terme avec la société C. En août 2015, en raison de la guerre au …, les approvisionnements en GNL depuis le … auraient été interrompus. Pendant un certain temps, les livraisons à la société E auraient pu être réalisées à partir de volumes disponibles au titre d’autres contrats d’approvisionnement, à des conditions toutefois moins favorables que celles qui auraient été conclues avec la société C. En 2017, compte tenu des difficultés de trésorerie de la société B et de l’incertitude persistante sur le redémarrage des activités au …, cette dernière aurait décidé de se désengager du « LNG Sale and Purchase Agreement » avec la société E en le transférant via une novation à la société de droit français Société E, ci-après désignée par la « société E », laquelle aurait disposé de ressources financières, de personnel et de contrats d’approvisionnement qui lui auraient permis de reprendre les engagements de la société B vis-à-vis de la société E. Compte tenu de ces éléments, la logique aurait donc été qu’elle accepte de reprendre le « LNG Sale and Purchase Agreement » tout en s’assurant de préserver son propre intérêt social et en respectant les règles de prix de transfert.

En contrepartie de cette novation, la société E et la société B auraient conclu un contrat de compensation, ci-après désigné par le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement », aux termes duquel cette dernière se serait engagée à compenser la différence entre le prix de vente prévu dans le « LNG Sale and Purchase Agreement » transféré et le prix de marché des cargaisons au fur et à mesure des livraisons.

Cette compensation aurait eu vocation à indemniser la société E en raison de la valeur négative du « LNG Sale and Purchase Agreement » lui transféré et dont le montant aurait été déterminé au regard des conditions de marché applicables à la date de la novation en tenant compte de la situation de la société B et de la société E, et ce en ligne avec les conditions qui auraient été requises d’un tiers qui aurait contracté avec la société B en lieu et place de la société E.

La société demanderesse poursuit en expliquant qu’afin de réorganiser les activités de la société B de la manière la plus optimale possible, en atténuant notamment l’impact financier et réputationnel, le conseil d’administration de la société B aurait analysé les différentes options envisageables. En raison de sa situation financière, cette dernière n’aurait pas été en mesure de trouver un contrat alternatif d’approvisionnement en GNL. La poursuite de l’exécution du « LNG Sale and Purchase Agreement » par la société B, avec l’impossibilité pour cette dernière d’honorer ses engagements sous le contrat, aurait assurément conduit la société E à engager une 18procédure d’arbitrage pour se voir indemniser l’entièreté de ses dommages (directs et indirects), et à sécuriser en parallèle des approvisionnements alternatifs en GNL directement sur le marché GNL, excluant à terme la société E et ses filiales de son portefeuille de fournisseurs.

La société demanderesse insiste sur la considération que l’option de la novation aurait présenté comme avantage, pour la société B, de figer la situation et donc de limiter les pertes/dommages dans le cadre du « LNG Sale and Purchase Agreement », alors qu’à défaut de livraison de sa part, le prix qu’elle aurait dû payer à la société E aurait été plus élevé. La novation aurait également permis à la société B de bénéficier de modalités de paiements différés, de même qu’elle aurait permis au « groupe E » et à ses filiales de conserver leur accès au marché chilien et de protéger leur réputation de fournisseurs fiables de GNL. La société demanderesse en conclut que la novation se serait donc justifiée à de nombreux égards.

Elle fait valoir qu’elle aurait expliqué ces raisons économiques, respectivement commerciales en détail à l’administration le 9 avril 2021 par le biais de la « plateforme sharepoint » et par l’email d’accompagnement.

La société demanderesse indique ensuite, au sujet de la question de la comptabilisation d’une provision, que le « principe de l’indemnisation » aurait été acquis alors même que la société B n’aurait été tenue que d’indemniser la société E au fur et à mesure des livraisons à la société E en fonction du prix du marché de chaque cargaison à la date de livraison, de sorte qu’il aurait été obligatoire de comptabiliser une provision pour respecter les règles comptables.

Elle reproche au directeur d’avoir considéré, « malgré ces évidences », que les conditions entourant la conclusion du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » présenteraient certaines anomalies, respectivement qu’il serait artificiel ou qu’il ne tiendrait pas compte de la réalité économique, et conteste que le calcul de l’indemnisation due au titre du contrat de compensation aurait été « bien au-delà » de l’indemnisation maximum dont la société B aurait été redevable si elle avait conservé le « LNG Sale and Purchase Agreement ».

La société demanderesse explique que le montant de la provision concernée en l’espèce refléterait la différence moyenne de prix entre le « prix [Société E] » et le prix de marché, et aboutirait à un montant qui serait égal à « environ 2,31 USD/mmbtu (en moyenne sur 9 ans) », et qui serait, dès lors, inférieur à ce que prétendrait le directeur et en deçà de l’indemnité qu’aurait dû payer la société B à la société E, la société demanderesse se référant à une « Fiche Technique "Novation" ». Le montant de la provision en relation avec le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » n’irait en aucun cas « bien au-delà » des difficultés pécuniaires qui auraient été anticipées au niveau de la société B si l’exécution du « LNG Sale and Purchase Agreement » avait dû être poursuivie, comme l’affirmerait à tort le directeur.

L’affirmation selon laquelle le « LNG Sale and Purchase Agreement » aurait été renégocié plus favorablement au bénéfice de la société E relèverait de la pure spéculation, à défaut de fondement ou d’éléments concrets venant étayer cette affirmation. La société demanderesse soutient que la novation aurait permis de renégocier certains termes du « LNG Sale and Purchase Agreement », notamment le passage à 4 livraisons annuelles, avec la société E, ce qui se serait reflété favorablement dans la détermination du montant de l’indemnisation à supporter par la société B et donc sur le calcul de la provision y relative.

19Elle indique que le contrat de compensation aurait été établi sur base de comparables de marché, respectivement des réalités économiques, en se basant sur ce qu’aurait dû payer la société B à un tiers, et qu’au vu de la faible solvabilité de cette dernière, un tiers aurait certainement demandé une garantie à la société E, ce qui serait tout à fait usuel entre tiers en cas de cession d’un contrat de longue durée assorti d’un passif dont le coût final aurait été difficile à connaître, ce qui aurait encore augmenté le coût de la novation dans le chef de la société B, la société demanderesse faisant valoir qu’il n’y aurait eu aucun arrangement économiquement plus favorable pour la société B que de nover le contrat à la société E.

Le raisonnement de l’administration serait pour le moins étonnant alors qu’il serait patent que si le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » n’avait pas été conclu, la société B aurait dû payer des indemnités à la société E et faire face à des procédures qui auraient à terme compromis sa survie.

Au regard du risque réputationnel encouru, ainsi qu’aux autres raisons commerciales mentionnées dans le présent recours, la conclusion du contrat litigieux avec la société E aurait donc été la meilleure option économique pour la société B pour lui permettre de limiter le risque d’accroître encore davantage le montant de ses pertes, d’étaler le montant de ses paiements (les indemnités), d’éviter des procédures longues et coûteuses avec la société E et d’atténuer le dommage réputationnel.

La décision des administrateurs de la société B de privilégier la novation en lieu et place du maintien du « LNG Sale and Purchase Agreement » aurait ainsi été tout à fait légitime, la société demanderesse considérant qu’il ne reviendrait pas à l’administration de se faire le juge a posteriori de la politique financière du contribuable.

Pour le surplus, la société demanderesse présente des arguments et moyens afin de contester la décision directoriale en ce qu’elle a, à l’instar du bureau d’imposition, refusé de prendre en compte, non seulement la documentation relative au financement ayant existé au niveau de la société B au cours des années litigieuses, et notamment des emprunts sans intérêts obligatoirement convertibles en actions qu’aurait souscrits la société B, mais également un ensemble de cinq décisions fiscales anticipées qu’aurait émises l’administration depuis l’année 2008.

A cet égard, la société demanderesse soutient, en substance, que le refus de déduction des provisions litigieuses aurait entraîné une majoration du bénéfice commercial de la société B pour un montant correspondant auxdites provisions, de même que de sa fortune imposable suite à la majoration de la valeur unitaire au 1er janvier des années 2017, 2018 et 2019 à hauteur desdites provisions, mais que le directeur aurait dû, d’une part, appliquer les décisions fiscales anticipées qui seraient toujours valables, auraient toujours « force obligatoire » et auraient confirmé les méthodes de calcul de ses base et fortune imposables, et, d’autre part, procéder aux retraitements y afférents afin de refléter la documentation relative aux emprunts sans intérêts obligatoirement convertibles en actions, tel que l’aurait approuvé l’administration à travers lesdites décisions fiscales anticipées.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement explique, d’abord, que la réformation des bulletins d’établissement séparé de la valeur unitaire entraînerait, le cas échéant, d’office la réformation des bulletins de l’impôt sur la fortune établis conformément au § 218, alinéa (4) AO, de sorte que le rejet de la réclamation dirigée contre ces derniers comme 20non fondée devrait être confirmé.

Par rapport à la notion de « provision pour contrat onéreux », le délégué du gouvernement retrace le raisonnement du bureau d’imposition l’ayant amené à rejeter les provisions litigieuses sur le fondement des articles 22, 22bis, 23, 34 et 40 LIR, ainsi que des principes de prudence, de l’image fidèle et de l’indépendance des exercices, tout en rejetant l’applicabilité des International Accounting Standards (IAS), et plus particulièrement la norme comptable 37 (IAS 37).

Le représentant étatique entend confirmer et réitérer les développements repris par le directeur en ce sens que le principe de prudence, inscrit à l’article 51, paragraphe (1), point c) de la loi du 19 décembre 2002, serait destiné à permettre aux tiers de se faire une idée du patrimoine et de la situation réelle de l’entreprise en en reflétant une image fidèle, de sorte que tout événement qui risquerait de diminuer la valeur du patrimoine de l’entreprise devrait immédiatement et formellement être pris en considération. Le délégué du gouvernement poursuit en expliquant que tout événement pouvant augmenter la valeur du patrimoine de l’entreprise ne pourrait, en revanche, pas faire l’objet d’un enregistrement comptable avant sa réalisation effective, de sorte qu’une entreprise devrait imputer immédiatement sur son résultat les charges dès lors que leur probabilité de réalisation serait importante, alors qu’inversement, elle ne devrait enregistrer ses produits que lorsqu’ils seraient certains et/ou effectivement réalisés.

Tout en se référant encore à l’article 40 LIR et à l’article 44, alinéa (1) de la loi du 19 décembre 2002 qui imposerait, à l’instar des principes de prudence et de l’image fidèle, l’enregistrement des provisions, pour soutenir qu’une provision régulièrement constatée comptablement serait en principe admise à la condition qu’elle soit suffisamment justifiée eu égard aux règles applicables en matière fiscale, le délégué du gouvernement s’adonne à une description de l’objectif poursuivi par les provisions pour risques et charges. Elles seraient des provisions régulatrices du passif au motif qu’elles seraient destinées à faire face à des dettes incertaines et à des charges d’exploitation que des événements en cours rendraient probables et à rattacher ces dettes et charges à l’exercice auquel elles seraient imputables du point de vue économique. Il poursuit en expliquant que la provision devrait être la constatation comptable d’un bien économique négatif et qui serait admise en cas de risques afférents aux opérations en cours à condition que ces risques entraînent, au jour de la clôture du bilan, une moins-value du patrimoine d’exploitation. Il s’y ajouterait que le risque ou la charge que la provision serait destinée à couvrir devrait être réel et trouver son origine dans des faits ou opérations de l’exercice à la fin duquel la provision est constituée, le représentant étatique se référant dans ce contexte à l’article 22, alinéa (2) LIR.

En ce qui concerne les provisions en relation avec les contrats d’affrètement à long terme de navires de transports de GNL, le délégué du gouvernement donne à considérer que les principes d’indépendance des exercices et de rapprochement des charges et des produits obligeraient à imputer à un exercice donné les produits et les charges qui lui seraient propres afin de dégager le résultat. Il rappelle que les principes émanant de la norme IAS 6 imposeraient également que seules les obligations qui résultent d’événements passés existant, indépendamment d’actions futures de l’entité, c’est-à-dire de la conduite future de son activité, seraient comptabilisées comme des provisions, de sorte que c’est l’obligation actuelle résultant d’un contrat déficitaire qui devrait être comptabilisée et évaluée comme une provision. Les pertes opérationnelles futures ne seraient pas à comptabiliser en tant que provision.

21 Le délégué du gouvernement fait valoir qu’en l’espèce, les provisions se rattacheraient à des prestations de services non encore réalisées à la clôture de l’exercice, au titre des contrats d’affrètement, d’une part, et, des contrats de sous-affrètement, d’autre part. En application des principes prémentionnés, ces opérations devraient être considérées comme étant économiquement en relation avec l’exercice au cours duquel les parties exécuteraient leurs obligations respectives, c’est-à-dire au cours duquel les prestations de services seraient effectivement réalisées. Il est d’avis que la simple signature des contrats d’affrètement et de sous-affrètement ne pourrait être considérée comme un fait ou une opération à l’origine de la perte au motif que ces contrats contiendraient des obligations futures, à échéance successives, au fur et à mesure de l’utilisation des navires de transport, mais ne contiendraient aucune obligation actuelle.

Il y aurait, dès lors, lieu de retenir que les provisions litigieuses, qui représenteraient la différence entre les revenus futurs résultant du sous-affrètement des navires et le coût futur de l’affrètement, ne représenteraient, par ailleurs, pas des charges imputables sur le résultat de l’exercice. Ce serait donc à bon droit que le bureau d’imposition et le directeur auraient considéré que les provisions en cause qui incluraient les reprises sur provisions, ne seraient pas des dépenses déductibles au titre des exercices considérés.

Le délégué du gouvernement entend rappeler que les provisions relatives aux pertes générées par la suspension des contrats d’affrètement, toutes comptabilisées au cours de l’exercice 2017, correspondraient à des pertes dont la survenance au cours d’un exercice ultérieur pourrait être tenue pour certaine dans son principe du fait même de la signature des contrats respectifs, qui en serait le fait générateur, au motif que les parties seraient liées pour la durée de la période de suspension sans autre formalité requise ou action possible.

Il ressortirait des contrats que la perte à venir, c’est-à-dire l’indemnité due au titre des contrats de suspension, serait nettement circonscrite quant à sa nature et probable voire même certaine, alors que, d’une part, son montant exact dépendrait du nombre précis de jours de suspension, et, d’autre part, la date précise de survenance, qui dépendrait de la restitution effective des navires, resterait encore à déterminer.

Le délégué du gouvernement en conclut que ces pertes à venir rempliraient les conditions permettant l’enregistrement d’une provision au titre de l’exercice au cours duquel les contrats de suspension auraient été conclus. Ce serait la raison pour laquelle les provisions en relation avec les contrats de suspension des contrats d’affrètement de l’ordre de … USD relatif au navire « … » et de … USD relatif au navire « Brussels » enregistrées au titre de l’exercice 2017 seraient considérées comme des dépenses déductibles du revenu imposable, de sorte que le montant des dépenses considérées comme inadmissibles par le bureau d’imposition serait à réduire d’un montant de … euros.

En ce qui concerne la provision en relation avec le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement », le délégué du gouvernement admet que s’il n’appartient certes pas à l’administration de s’immiscer dans la politique financière d’un contribuable, il n’en resterait cependant pas moins que ses attributions comporteraient celles d’apprécier la réalité économique des opérations réalisées et de tirer les conséquences fiscales de ces opérations voulues et recherchées par le contribuable.

22Le délégué du gouvernement explique ensuite ne pas contester les faits et rétroactes tels qu’exposés par la société demanderesse et tels qu’ils auraient été repris dans la décision directoriale déférée, mais fait valoir que les conditions de conclusion du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » présenteraient certaines « anormalités ».

Il explique que selon les termes du « LNG Sale and Purchase Agreement », la responsabilité du vendeur de GNL à la société E serait certes limitée à un certain montant fixe maximum, en l’occurrence 2,50 USD/MMBtu conformément à son article 5.3.5., mais que le calcul de la provision fournie par la société demanderesse ferait état d’une indemnisation due au titre du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » qui irait bien au-delà de l’indemnisation maximum qui aurait été due par la société B si elle avait conservé le « LNG Sale and Purchase Agreement », en l’occurrence la limite de 2,50 USD/MMBtu.

Le délégué du gouvernement donne également à considérer que le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » prévoirait, par ailleurs, que l’indemnité y prévue ne prendrait pas en compte un éventuel ajustement de prix opéré au titre du « LNG Sale and Purchase Agreement », en ce sens que la société B resterait tenue de verser une indemnité basée sur le prix historique fixé dans le « LNG Sale and Purchase Agreement », alors même que des ajustements de prix seraient « potentiellement opérés » au bénéfice de la société E suite à la reprise du « LNG Sale and Purchase Agreement » par cette dernière. Le représentant étatique fait valoir qu’un tel ajustement au bénéfice de la société E s’avérerait toutefois « particulièrement probable » au motif qu’il ressortirait d’un « document de référence de la société E pour 2017 » qui serait disponible publiquement sur le site internet « www….. », qu’une des missions prioritaires de la société E en relation avec son activité GNL aurait été de renégocier les contrats d’achat et de ventes de GNL qui ne refléteraient pas les conditions actuelles du marché.

Ce même « document de référence » pour 2018 issue du même site internet préciserait que « les négociations conduites ces dernières années ont permis d’intégrer des indices de marchés dans les contrats à long terme et/ou de réduire le différentiel entre les prix des contrats et ceux des places de marché. Elles ont également permis d’augmenter la fréquence des révisions de prix. ».

Tout en admettant que ces « documents de référence » ne viseraient pas expressément le « LNG Sale and Purchase Agreement », le délégué du gouvernement est d’avis qu’en s’engageant à payer une indemnité au titre du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement », la société B n’aurait pas pu ignorer que cette indemnité serait nettement plus élevée que le coût négatif du contrat réellement subi. Il en conclut que le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » « semble[rait] donc particulièrement artificiel », le délégué du gouvernement insistant sur la considération qu’il aurait été conclu entre des parties liées ou du moins intéressées et qu’il ne tiendrait aucunement compte de la réalité économique.

Le délégué du gouvernement explique ensuite qu’il ressortirait du calcul estimatif de la provision fourni par la société demanderesse que l’indemnité qui serait prévue d’être versée annuellement à la société E au titre du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » serait estimée à près de … USD pour 2018 et jusqu’à plus 23de … USD en 2026. Le « LNG Sale and Purchase Agreement » cédé représentait donc la source principale de revenus de la société B et les autres contrats de fourniture de GNL conclus par elle auraient, par ailleurs, tous été destinés à prendre fin à court terme.

Dans ce contexte, il estime « intéressant » de noter que depuis l’exercice 2017 et en raison de la novation du « LNG Sale and Purchase Agreement », le chiffre d’affaires de la société B aurait continuellement chuté, à savoir de … USD en 2016, à … USD en 2017, … USD en 2018 et finalement … USD en 2019.

Il ressortirait, par ailleurs, de ses comptes annuels que, dès l’année 2018, le résultat net de la société B, hors indemnité, aurait été inférieur à l’indemnité qu’elle aurait dû payer au titre de l’exercice, de sorte qu’elle aurait, dès la signature du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement », été en difficulté d’honorer sa part du contrat, ce qui corroborerait, voire démontrerait le caractère artificiel dudit contrat. Le délégué du gouvernement en conclut que la société E et la société B n’auraient pas pu ignorer les difficultés financières par la perte de son contrat principal et partant que cette dernière se trouverait en difficulté, sinon dans l’impossibilité, de payer à la société E les indemnités dues au titre de chaque exercice.

Dans des conditions normales de marché, une entreprise indépendante ne se serait pas engagée dans des activités déficitaires à moins de pouvoir raisonnablement compter sur des bénéfices futurs. Or, malgré les sommes importantes en jeu, la société E n’aurait pas estimé nécessaire de se ménager la moindre garantie au titre du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement », alors que l’acquéreur d’un contrat comme celui de l’espèce n’aurait pas accepté à titre de compensation une indemnité dont il aurait su, à l’avance, que sa contrepartie ne serait pas en mesure de l’honorer.

Le délégué du gouvernement ajoute qu’il ressortirait certes du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » que la société E aurait accepté la novation du « LNG Sale and Purchase Agreement », pourtant déficitaire, parce qu’elle aurait désiré conserver son accès au marché chilien du GNL, mais que cette explication ne concorderait pas avec les informations publiquement disponibles qui révéleraient qu’au même moment, la société E, en tant que société mère du groupe, aurait déjà été en négociation pour la vente de ses activités GNL à « … ». Dès novembre 2017, la société E aurait reçu une offre ferme et irrévocable de « … » pour la vente de certaines de ces activités en relation avec le GNL (la liquéfaction, le transport maritime et le négoce international). Compte tenu de ces annonces et d’« opérations imbriquées en 2018 et 2019 », la société B aurait ainsi été cédée au « groupe … », puis aurait transféré son siège social en France pour y être absorbée par une autre société du « groupe … », de sorte que le sort de la provision ne serait plus « traçable ».

Le délégué du gouvernement en déduit que ce serait à bon droit que le directeur aurait considéré que l’ensemble de ces circonstances seraient de nature à retenir que le « contrat d’indemnisation » n’aurait pas été conclu dans des conditions de pleine concurrence et qu’il n’aurait, en réalité, été dans l’intention d’aucune des parties au « contrat d’indemnisation » que la société B ait effectivement à s’acquitter, totalement ou partiellement, de l’indemnité projetée.

Il donne encore à considérer que suite à son transfert de son siège social vers la France le 23 janvier 2019, la société B aurait procédé à l’extourne de l’intégralité de la provision litigieuse dans sa déclaration finale pour l’exercice 2019. Ledit transfert de siège serait 24considéré, en vertu de l’article 172 LIR, comme une dissolution qui entraînerait une imposition du bénéfice net réalisé. En procédant à l’extourne des provisions effectuées, la société B aurait confirmé « per se » que celles-ci n’auraient aucune valeur économique.

Le représentant étatique en conclut que ce serait à bon droit que le bureau d’imposition aurait refusé la déductibilité de la provision litigieuse en considérant qu’une provision ne viserait pas à couvrir des risques hypothétiques, alors que l’absence de la moindre réalité économique, par rapport aux indemnités qui devraient être effectivement payées par la société B à la société E, au titre du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement », interdirait l’enregistrement de la moindre provision y afférente.

En ce qui concerne, finalement, les bulletins de l’établissement séparé de la valeur unitaire au 1er janvier des années 2017, 2018 et 2019, le délégué du gouvernement confirme la position du directeur fondée sur les §§ 6, alinéa (1) et 62 BewG pour soutenir que les provisions liées aux contrats d’affrètement et de sous affrètement de navires, qui seraient liées à des prestations de services futures, de même que la provision liée au « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement », qui serait sans valeur économique, ne seraient pas des dettes déductibles de la fortune d’exploitation de la société B.

Pour le surplus, le délégué du gouvernement prend position par rapport aux développements de la société demanderesse au sujet des emprunts sans intérêts obligatoirement convertibles en actions qu’aurait souscrits la société B et au sujet des cinq décisions fiscales anticipées qu’aurait émises l’administration depuis l’année 2008.

Dans son mémoire en réplique, la société demanderesse expose d’abord ses arguments et moyens concernant l’admissibilité des provisions pour contrats onéreux.

Elle indique ne pas contester « en substance » les principes ayant trait aux provisions pour risques et charges repris par le délégué du gouvernement dans son mémoire en réponse, ainsi que l’affirmation selon laquelle la situation à la date de clôture de l’exercice d’exploitation serait déterminante pour l’évaluation en fin d’exercice et que l’exploitant pourrait tenir compte des faits et circonstances qui ont existé à cette date et dont l’existence ne s’est révélée qu’ultérieurement, mais avant la date d’établissement du bilan.

En revanche, elle reproche au délégué du gouvernement d’omettre de prendre en considération plusieurs « éléments clés ».

Elle réaffirme que les comptes annuels de la société B auraient fait l’objet d’une certification par un réviseur d’entreprises agréé qui aurait émis, sans réserves, des rapports, la société demanderesse renvoyant aux annexes des déclarations fiscales de cette dernière pour les années 2016, 2017 et 2018. Elle fait valoir qu’il serait exclu que le réviseur impliqué n’aurait pas examiné le bien-fondé des provisions avec la plus grande diligence avant d’émettre, sans aucune réserve, les rapports de révision. La société demanderesse reproche au délégué du gouvernement d’être resté en défaut d’expliquer comment des réviseurs d’entreprises auraient pu émettre de tels rapports, pour l’ensemble des exercices d’exploitation concernés par la présente affaire, si le moindre doute avait existé quant à l’admissibilité des provisions litigieuses, et considère que le délégué du gouvernement ne remettrait pas en cause le travail des réviseurs.

25 Elle réaffirme que l’« avis comptable » du 25 novembre 2020 joint à son recours confirmerait, justification à l’appui, l’admissibilité et même le caractère obligatoire des provisions pour contrats onéreux en droit comptable luxembourgeois. Il aurait ainsi été confirmé dans ledit « avis comptable » que les provisions pour contrats déficitaires réuniraient toutes les conditions requises pour être considérées comme des provisions obligatoires au sens de l’article 44 de la loi du 19 décembre 2002 aux motifs qu’elles (i) auraient pour objet de couvrir des pertes ou dettes qui seraient nettement circonscrites quant à leur nature et qui, à la date de clôture du bilan, seraient, ou probables ou certaines, mais indéterminées quant à leur montant ou quant à la date de leur survenance, (ii) ne viseraient pas à couvrir un risque général d’exploitation, et (iii) n’auraient pas pour objet de corriger la valeur d’éléments portés à l’actif.

Ces provisions seraient encore conformes à l’article 51, paragraphe (1), point c) de la loi du 19 décembre 2002 qui imposerait de tenir compte de tous les passifs qui ont pris naissance au cours de l’exercice ou d’un exercice antérieur, même si des passifs ne sont connus qu’entre la date de clôture du bilan et la date à laquelle il est établi.

La société demanderesse en conclut que ces provisions seraient conformes aux principes comptables fondamentaux, à savoir les principes de prudence et de l’image fidèle. Ces éléments, « pour n’en citer que quelques-uns » au motif que l’« avis comptable » du 25 novembre 2020 détaillerait et complèterait encore davantage cette liste, témoigneraient indubitablement de l’admissibilité des provisions pour contrats onéreux en droit comptable luxembourgeois.

La société demanderesse déplore que le délégué du gouvernement se serait abstenu de tout commentaire par rapport au contenu de l’« avis comptable » du 25 novembre 2020, alors qu’il y serait confirmé que la comptabilisation de provisions pour contrats déficitaires serait prescrite par la loi luxembourgeoise. Elle ajoute que le principe de l’accrochement du bilan fiscal au bilan commercial ancré à l’article 40 LIR ne s’opposerait pas à ce qu’un résultat du bilan commercial ne soit pas transposable et acceptable d’un point de vue fiscal. Dans une telle situation, qui resterait cependant une exception au principe, il faudrait pouvoir justifier de la disposition du droit fiscal qui viendrait déroger aux dispositions du droit comptable et permettrait donc une inscription au bilan fiscal divergente du bilan commercial. Le délégué du gouvernement ne justifierait justement d’aucune disposition du droit fiscal venant déroger au droit comptable relativement aux provisions litigieuses, la société demanderesse réaffirmant qu’aucune disposition spécifique ne prévoirait la non déductibilité des provisions pour contrats déficitaires et que leur déduction serait autorisée pour les besoins de l’impôt sur le revenu des collectivités et l’impôt commercial communal sur base de l’article 45 LIR. Sur base de l’ensemble de ces éléments qui ne seraient pas contestés par le délégué du gouvernement, il y aurait lieu d’admettre la déduction des provisions litigieuses pour les années en cause.

Par rapport à la première catégorie de provisions litigieuses, à savoir celles ayant trait aux contrats de sous-affrètement, la société demanderesse donne à considérer que le délégué du gouvernement n’aurait pas contesté (i) que la société B aurait conclu plusieurs contrats d’affrètement à long terme de navires de transport de GNL avec les propriétaires respectifs des navires pour un tarif journalier fixe, (ii) que les contrats d’affrètement aurait engagé la société B pour la totalité des montants de la « charte à temps » dès le moment de la signature de ces contrats, indépendamment de l’utilisation ou non des navires, (iii) qu’à partir d’avril 2015, en raison de la guerre civile au …, le principal fournisseur de GNL de la société B, à savoir la société C, aurait invoqué la clause de force majeure de son contrat d’approvisionnement avec la société B pour se désengager de son obligation de livraison, (iv) que la détérioration du 26marché mondial du GNL n’aurait pas permis à la société B de négocier et conclure d’autres contrats d’approvisionnement de GNL, (v) que la société B aurait en conséquence disposé d’un excédent de capacité de transport par rapport à ses volumes de cargaisons, (vi) qu’afin de réduire les pertes liées à ses coûts fixes sous les contrats d’affrètement, la société B, d’une part, serait parvenue à suspendre deux contrats avec un de ses affréteurs, et, d’autre part, aurait pu trouver d’autres opérateurs auxquels elle aurait sous-affrété des navires pendant certaines périodes, à des prix toutefois moindres que le prix payé par elle au titre des contrats d’affrètement, la société demanderesse ajoutant que ces opérations auraient donc permis à la société B de réduire les pertes au titre des contrats d’affrètement, sans toutefois pouvoir annuler lesdits contrats. Les contrats d’affrètement seraient dès lors restés déficitaires et auraient donné lieu aux provisions litigieuses.

La société demanderesse reproche au délégué du gouvernement de faire une distinction qui ne serait pas justifiable.

D’un côté, il y aurait les provisions relatives aux pertes générées par la suspension des contrats d’affrètement pour lesquelles la déductibilité serait acceptée au motif que ces provisions correspondraient à des pertes dont la survenance au cours d’un exercice ultérieur pourrait être tenue pour certaine dans son principe du fait même de la signature des contrats respectifs. A ce sujet, le délégué du gouvernement aurait mentionné que les parties seraient liées pour la durée de la période de suspension sans autre formalité requise ou action possible.

Il ressortirait des contrats que la perte à venir, c’est-à-dire l’indemnité due au titre des contrats de suspension, serait nettement circonscrite quant à sa nature, probable, voire même certaine.

En revanche, le montant exact, qui dépendrait du nombre exact de jours de suspension, et la date précise de survenance, qui dépendrait, quant à elle, la restitution effective des navires, resteraient encore à déterminer.

D’un autre côté, il y aurait les provisions relatives aux contrats de sous-affrètement dont la déductibilité serait refusée par la partie étatique au motif que ces provisions seraient à considérer comme économiquement en relation avec l’exercice au cours duquel les prestations de services seraient effectivement réalisées. La société demanderesse considère qu’à ce sujet, le délégué du gouvernement aurait affirmé que la signature des contrats d’affrètement et de sous-affrètement ne pourrait être considérée comme constitutive des faits ou opérations à l’origine de la perte. Le délégué du gouvernement se serait appuyé sur le fait que ces contrats contiendraient des obligations futures, à échéance successives au fur et à mesure de l’utilisation des navires de transport, mais ne contiendraient aucune obligation actuelle.

La société demanderesse conteste cette distinction et donne à considérer que tout comme pour la suspension des obligations contractuelles, dans l’hypothèse du sous-affrètement des navires, la différence entre les taux de « charte » prévus dans les contrats d’affrètement et les taux prévus dans les contrats de sous-affrètement correspondrait à un passif à venir qui serait nettement circonscrit quant à sa nature probable, voire même certaine. Le traitement comptable et fiscal à réserver aux obligations de la société B en relation avec les contrats de sous-

affrètement devrait donc être aligné avec le traitement comptable et fiscal applicable aux obligations de la société B en relation avec la suspension des contrats d’affrètement.

Elle estime que le délégué du gouvernement n’aurait avancé aucun argument permettant de justifier d’une distinction de traitement entre ces deux hypothèses d’un point de vue comptable et fiscal luxembourgeois. Il serait incontestable que les provisions litigieuses, 27comme toute autre provision, devraient être évaluées à la date de clôture du bilan / de l’exercice comptable, à la meilleure estimation des charges probables ou, dans le cas d’une perte ou d’une dette, du montant nécessaire pour l’honorer. Conformément au principe de prudence, les provisions litigieuses devraient être constituées même si ces risques et charges n’étaient connus qu’après la clôture de l’exercice comptable, à partir du moment où ils ont pris naissance au cours de l’exercice ou d’un exercice antérieur.

Le risque de pertes ou de charges devrait dès lors être né au cours d’un exercice, ou être rattachable à cet exercice, pour qu’une provision puisse être comptabilisée, notamment une provision pour contrat onéreux. La société demanderesse ajoute qu’en vertu l’article 64 de la loi du 19 décembre 2002, le montant de la provision devrait représenter le montant total nécessaire pour honorer la perte.

Tout en affirmant qu’elle ne contesterait pas que les provisions litigieuses ne pourraient couvrir que des risques et charges qui trouveraient leur origine dans l’exercice comptable ou un exercice antérieur, la société demanderesse réaffirme, en se référant à nouveau à l’avis de la Commission des normes comptables belge, intitulé « Avis CNC 2018/24 » du 12 septembre 2018, que les provisions litigieuses réuniraient toutes les conditions pour une comptabilisation en tant que telle au sens de la loi du 19 décembre 2002.

Elle précise qu’en l’occurrence, le passif serait né de l’existence même des contrats d’affrètement, qui auraient été signés et seraient entrés en vigueur bien avant la date de clôture des exercices concernés, ainsi que du fait que la société B n’aurait pas pu échapper à ses obligations contractuelles, sauf à s’acquitter d’indemnités. Elle maintient que les contrats d’affrètement auraient engagé la société B pour la totalité des montants de la « charte à temps » dès le moment de la signature de ces contrats, indépendamment de l’utilisation ou non du navire. Les obligations liées aux montants à payer seraient donc bien nées dès la signature des contrats d’affrètement et pour la totalité de la durée de location, même si les paiements n’étaient intervenus que de façon échelonnée, la société demanderesse se référant aux « Fiches Techniques "Affrètement / Sous-Affrètement" » jointes à son recours qui contiendraient des explications détaillées pour tous les contrats concernés et les provisions y relatives. Une copie de l’ensemble des contrats à la base des provisions en relation avec les contrats d’affrètement et de sous-affrètement aurait été transmise à la partie étatique en date du 9 avril 2021, mais ne « semble[rait] » pas figurer dans le dossier fiscal déposé auprès du tribunal.

La société demanderesse en conclut que les arguments du délégué du gouvernement iraient à l’encontre des dispositions comptables et fiscales applicables, que la déduction des provisions en relation avec les contrats d’affrètement et les contrats de sous-affrètement devrait donc être admise dans sa totalité d’un point de vue de l’impôt sur le revenu des collectivités, de l’impôt commercial communal et de l’impôt sur la fortune.

Par rapport à la seconde catégorie de provisions litigieuses, à savoir celles ayant trait au « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement », la société demanderesse entend rappeler qu’en 2017, compte tenu des difficultés de trésorerie dont aurait souffert la société B et de l’incertitude persistante sur le redémarrage des activités au Yemen, cette dernière aurait décidé de se désengager du « LNG Sale and Purchase Agreement » avec la société E en le transférant à la société E à travers le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement ». Tout en ajoutant que la société E serait une société cotée à la bourse de Santiago au Chili, et que le « groupe E » 28ne détiendrait qu’une participation de 52,76% dans le capital de la société E, la société demanderesse indique que les règles de gouvernance qui pèseraient sur les sociétés cotées viseraient à assurer que leurs opérations soient conduites dans des conditions de marché.

En contrepartie de cette novation, la société B aurait conclu le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » avec la société E au titre duquel elle se serait engagée à compenser la différence entre le prix de vente résultant du « LNG Sale and Purchase Agreement » transféré et le prix de marché des cargaisons au fur et à mesure des livraisons. Cette compensation, qui aurait été déterminée au regard des conditions de marché applicables à la date de la novation, aurait eu vocation à indemniser la société E en raison de la valeur négative du « LNG Sale and Purchase Agreement » lui transféré.

La société demanderesse réaffirme qu’afin de réorganiser les activités de la société B de la manière la plus optimale possible, en atténuant notamment les impacts financier et réputationnels engendrés par ces réorganisations, le conseil d’administration de la société B aurait analysé les différentes options envisageables. Or, en raison de sa situation financière, la société B n’aurait pas été en mesure de trouver un contrat alternatif d’approvisionnement en GNL.

La société demanderesse regrette que malgré ces explications, le délégué du gouvernement continuerait d’affirmer que les conditions entourant la conclusion du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » présenteraient certaines anomalies.

Elle rappelle les avantages qu’aurait comporté la conclusion du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement », tels qu’explicités dans sa requête introductive d’instance, et rejette les développements du délégué du gouvernement à ce sujet.

A cet égard, la société demanderesse donne encore à considérer que les transactions seraient exécutées entre sociétés cotées, sociétés auxquelles s’appliqueraient des procédures strictes lors d’opérations conclues entre elles. Le montant de la provision refléterait la différence moyenne entre le prix du contrat défini dans le « LNG Sale and Purchase Agreement » et le prix de référence du marché. Il aboutirait à une indemnité à payer qui serait égale « à environ 2,31 USD/MMBtu (en moyenne sur 9 ans) ». La société demanderesse se réfère à nouveau à la « Fiche Technique "Novation" », jointe à son recours, qui contiendrait des explications détaillées à ce sujet. L’indemnité moyenne de « 2,31 USD/MMBtu » serait donc inférieure au montant fixe maximum prévu à l’article 5.3.5 du « LNG Sale and Purchase Agreement », à savoir les « 2,50 USD par MMBtu ». Il en résulterait que le montant de la provision en relation avec le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » n’irait en aucun cas « "bien au-delà" » des difficultés pécuniaires qui auraient été anticipées au niveau de la société B si l’exécution du « LNG Sale and Purchase Agreement » avait été poursuivie.

L’argument du délégué du gouvernement méconnaîtrait, en outre, le fait que le montant fixe maximum prévu à l’article 5.3.5 du « LNG Sale and Purchase Agreement » (c’est-à-dire, les 2,50 USD par MMBtu) n’inclurait pas tous les autres frais pour lesquels la société E aurait demandé à être indemnisée.

La société demanderesse maintient qu’en l’absence de novation, la société B aurait donc 29continué à être exposée au risque d’évolution négative des prix de marché du GNL (et du diesel) ainsi qu’au risque de procédures d’arbitrage initiées par la société E afin de se voir indemniser à hauteur de l’entièreté de ses dommages (directs et indirects).

L’indemnité forfaitaire fixée dans le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » aurait donc non seulement permis à la société B de couvrir ce risque de marché, y compris le risque d’ajustement de prix à la hausse auquel serait restée exposée la société E aux termes de la novation, mais également d’éviter les autres dommages.

La société demanderesse conteste ensuite l’affirmation du délégué du gouvernement selon laquelle ses explications ne concorderaient pas avec les informations publiquement disponibles qui feraient apparaître qu’au même moment, la société E, en tant que société mère du groupe, aurait déjà été en négociation pour la vente de ses activités liées au GNL à « … », à savoir que dès novembre 2017, celle-ci aurait reçu une offre ferme et irrévocable de « … » pour la vente de certaines de ces activités en relation avec le GNL (la liquéfaction, le transport maritime et le négoce international).

Elle estime que cette affirmation serait incorrecte et prêterait à confusion et fait valoir qu’aux termes du « LNG Sale and Purchase Agreement », le programme annuel de livraison («»Annual Delivrey Program », (ADP)) aurait dû être arrêté au mois de septembre pour l’année suivante. Or, lorsque la société B aurait été tenue de négocier l’ADP pour les livraisons de 2018, elle n’aurait pas été en mesure de faire face à ses obligations de livraisons, tandis que les contrats à moyen terme d’approvisionnement dont elle aurait encore disposé pour assurer ses livraisons en 2016 et 2017 auraient été échus au moment de l’ADP de 2017. La société demanderesse ajoute que la société B n’aurait « pas eu de visibilité sur le redémarrage du contrat » avec la société C. Pour limiter les risques de dommages importants, elle serait donc entrée en discussions avec la société E et la société E en vue de proposer une alternative via la novation. Elle donne à considérer que le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » aurait été conclu le 19 octobre 2017, soit avant l’offre conditionnelle de « … » du 8 novembre 2017.

La société demanderesse prend ensuite position par rapport à l’affirmation du délégué du gouvernement selon laquelle (i) la « société requérante » aurait, suite à son transfert de son siège social vers la France le 23 janvier 2019, procédé à l’extourne de l’intégralité de la provision litigieuse dans sa déclaration finale pour l’exercice 2019, (ii) ledit transfert de siège serait considéré en vertu de l’article 172 LIR comme une dissolution, entraînant une imposition du bénéfice net réalisé, et (iii) en procédant à l’extourne des provisions effectuées, la « société requérante » aurait confirmé per se qu’elles n’auraient eu aucune valeur économique.

Elle fait valoir que l’argument tenant à l’absence de valeur de la provision serait manifestement incorrect au motif qu’au moment du transfert de siège de la société B, la « provision [Société E] » aurait été maintenue dans les comptes commerciaux de cette dernière et ce jusqu’à ce qu’elles fusionnent en date du 5 juin 2019, fusion qui aurait entraîné la réunion, à son niveau, des qualités de créancier et de débiteur des obligations sous le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement»», de sorte que la « provision [Société E] » n’aurait plus eu lieu d’exister. Le « Traité de Fusion » dont les conditions auraient été établies sur la base d’états comptables préparés selon les normes comptables françaises, confirmerait ainsi la comptabilisation de la « provision [Société E] » 30jusqu’à la fusion, la société demanderesse se référant au « Traité de Fusion » joint à son recours.

Par rapport à la reprise de la provision dans la déclaration fiscale de la société B en 2019, la société demanderesse entend rappeler que lorsqu’un organisme à caractère collectif résident transférerait son siège social et son administration centrale à l’étranger, il cesserait de ce fait d’être un contribuable résident et que le transfert de siège serait assimilé à la dissolution-

liquidation de la société concernée. En l’espèce, dans la mesure où les indemnités n’auraient plus eu vocation à être supportées par la société B, en tant que contribuable luxembourgeois, la provision destinée à les couvrir aurait uniquement fait l’objet d’une reprise dans les déclarations fiscales de la société B et aurait été taxée à cette occasion.

Cette circonstance ne permettrait cependant aucunement de conclure que cette provision n’aurait pas été justifiée. La société demanderesse estime, au contraire, que le fait que la provision aurait été maintenue dans les comptes commerciaux de la société B après son transfert de résidence du Luxembourg vers la France corroborerait la nécessité de comptabiliser cette provision. Elle se réfère à l’« avis comptable » du 25 novembre 2020 joint à son recours qui confirmerait que le droit comptable français aurait toujours une influence importante sur la pratique comptable luxembourgeoises.

Elle considère que l’affirmation selon laquelle le « LNG Sale and Purchase Agreement » aurait été renégocié plus favorablement au bénéfice de la société E relèverait de la pure spéculation, à défaut de fondement ou d’éléments concrets venant étayer cette affirmation. Il y aurait, au contraire, lieu de rappeler que la novation aurait permis de renégocier avec la société E certains termes du « LNG Sale and Purchase Agreement » qui auraient permis de réduire le montant des indemnités sous le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » et donc, par conséquent, le montant de la provision y relative.

Pour le surplus, la société demanderesse prend position par rapport aux arguments et moyens avancés par le délégué du gouvernement au sujet des décisions fiscales anticipées et des emprunts sans intérêts obligatoirement convertibles en actions.

Dans son mémoire en duplique, le délégué du gouvernement entend prendre position ponctuellement sur certains points soulevés par la société demanderesse et se rapporter à son mémoire en réponse pour le surplus.

Par rapport à la déductibilité des « provisions déficitaires » et au principe de l’accrochement du bilan fiscal au bilan commercial, il donne à considérer que l’administration ne se prononcerait pas sur la validité comptable, même avalisée par un réviseur d’entreprises.

Il ne serait pas acceptable, ni fiscalement ni juridiquement, qu’une société requérante prenne pour base le « simple aval » donné par un réviseur d’entreprises afin de justifier la véracité de ses propos, d’autant plus que les réviseurs d’entreprises n’agiraient pas contradictoirement et exerceraient leur mandat rémunéré pour compte exclusif de leur mandant. Cette assertion trouverait toute sa justification dans un arrêt de la Cour administrative du 11 mars 2021, inscrit sous le numéro 44078C du rôle, dont il ressortirait encore que l’article 45 LIR exigerait que les dépenses soient économiquement justifiées conformément au « principe du réalisme économique ».

Le délégué du gouvernement reproche à la société demanderesse de ne fournir aucune 31explication sur la circonstance que les provisions en cause se rattacheraient à des prestations de services non encore réalisées à la clôture de l’exercice. Il maintient que ces provisions ne pourraient être considérées comme des faits ou opérations à l’origine de la perte au motif que ces contrats contiendraient des obligations futures, à échéance successives, marquées par un aléa « évident » et ce, au fur et à mesure de l’utilisation des navires de transport, de sorte qu’ils seraient dépourvues de toute obligation actuelle et certaine.

Par rapport aux contrats ayant fait l’objet d’une novation, le délégué du gouvernement prend position par rapport aux « Fiches techniques "Novation" » et plus particulièrement par rapport au tableau y fourni, pour soutenir que les explications de la société demanderesse selon lesquelles le montant des provisions refléterait la différence moyenne entre le prix du contrat défini dans le « LNG Sale and Purchase Agreement » et le prix de référence du marché aboutirait à une indemnité à payer qui serait égale à « 2,31 USD / MMBtu (en moyenne sur 9 ans) » qui serait inférieure au montant fixe maximum de 2,5 USD/MMBtu prévu à l’article 5.3.5 du « LNG Sale and Purchase Agreement », ne seraient pas exactes.

Tout en admettant que la moyenne de la colonne intitulée, « $/mmbtu DES » serait de 2,31/MMBtu, tel que l’affirme la société demanderesse, il n’en resterait pas moins que ledit article 5.3.5 ne parlerait pas d’une moyenne, mais d’une limite absolue de 2,5USD/MMBtu à ne pas dépasser, de sorte que c’est à raison que la partie étatique aurait indiqué que l’indemnisation due au titre du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » irait bien au-delà de l’indemnisation maximum qui serait confirmé dans le tableau dont question.

Par rapport à la reprise de la provision concernant le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement », le délégué du gouvernement insiste sur les développements de la société demanderesse selon lesquels, suite au transfert de la société B, cette dernière n’aurait plus eu à supporter les indemnités litigieuses en tant que contribuable luxembourgeois, de sorte que les provisions y afférentes auraient fait l’objet d’une reprise uniquement dans les déclarations fiscales de la société B et été taxées à cette occasion.

Une telle affirmation serait contraire à ce que la société demanderesse aurait indiqué dans sa requête au sujet du principe de l’accrochement du bilan fiscal au bilan commercial prévu à l’article 40 LIR.

A cet égard, le délégué du gouvernement indique s’interroger sur l’opération réalisée par la société B, qui aurait consisté à procéder à une extourne fiscale et non comptable de l’intégralité de la provision litigieuse dans sa déclaration finale pour l’exercice 2019, tout en faisant valoir que l’application d’une telle extourne fiscale confirmerait que lesdites provisions n’auraient eu aucune valeur économique.

De la même manière, le délégué du gouvernement s’interroge quant à la question de savoir si le recours à ce « mécanisme » aurait permis à la société B de bénéficier fiscalement de cette même opération en France, et donne à considérer qu’elle n’aurait versé aucune pièce concernant ses déclarations auprès des autorités fiscales françaises.

Le délégué du gouvernement ajoute que ledit transfert de siège serait considéré en vertu de l’article 172 LIR comme une dissolution, entraînant une imposition du bénéfice net réalisé, et qu’en procédant à l’extourne fiscale des provisions effectuées, la société demanderesse confirmerait que celles-ci n’auraient eu aucune valeur économique.

32 Analyse du tribunal Force est au tribunal de constater qu’il ressort des explications non contestées de la société demanderesse, d’une part, que la société B2 a conclu, dans le cadre de son activité de négoce de GNL, plusieurs contrats d’affrètement à long terme de navires avec leurs propriétaires respectifs, moyennant le paiement d’un prix fixe journalier pour la disponibilité de ces navires, indépendamment de leur utilisation effective, en vue d’assurer le transport et la regazéification de GNL, ci-après désignés par les « contrats d’affrètement », et, d’autre part, que la société B a conclu divers contrats d’approvisionnement en GNL, dont le principal a été conclu avec la société C, ci-après désigné par le « contrat d’approvisionnement », l’activité de la société B ayant essentiellement consisté à transporter et livrer le GNL reçu de ses fournisseurs, dont la société C, en utilisant les navires mis à sa disposition aux termes des contrats d’affrètement, à divers clients.

Le tribunal constate, ensuite, que la société B et la société E3 ont conclu un « LNG Sale and Purchase Agreement » le 4 août 2011, aux termes duquel la société B s’est engagée, à compter du 1er octobre 2012 jusqu’en 2026, à vendre, transporter et livrer, annuellement et moyennant le versement d’un prix, des quantités de GNL à la société E.

Il n’est pas non plus contesté par la partie étatique qu’en avril 2015, la société C a invoqué la clause de force majeure prévue dans le contrat d’approvisionnement due à la guerre civile au Yemen et que la société B s’est trouvée, en conséquence, dans l’impossibilité d’honorer certains de ses contrats dont le « LNG Sale and Purchase Agreement ».

Aux termes d’un « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » daté du 19 octobre 2017, la société B a décidé de transférer tous ses droits et obligations tirés de sa qualité de vendeur en vertu du « LNG Sale and Purchase Agreement », à un nouveau fournisseur, la société E – qui est également la société mère du « groupe E » auquel la société B appartient –, afin de sécuriser un approvisionnement en GNL à la société E.

Le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » prévoit, par ailleurs, que la société E sera le bénéficiaire d’une compensation financière (« Compensation Amount ») versée par la société B visant à l’indemniser pour la totalité de la valeur négative du « LNG Sale and Purchase Agreement » pour la durée de ce dernier, soit jusqu’au 31 décembre 20264.

La société B a comptabilisé des provisions en lien avec le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » dans ses comptes annuels concernant les exercices 2016, 2017 et 2018, ainsi que dans ses déclarations fiscales au titre des mêmes années d’imposition, ci-après désignées par les « Provisions de novation ».

2 anciennement dénommée « société B ».

3 anciennement dénommée « D».

4 « […] Novator [société B] acknowledges and consents to compensate Novatee [société E] for the full negative value of the SPA over the Contract Term […] » ; article 3 du « LNG Sale and Purchase Agreement » : « This Agreement shall become effective on the Execution Date and remain in full force and effect until December 31, 2026, unless earlier terminated in accordance with the terms of this Agreement (the “Contract Term”) ».

33Afin de tenter de réduire les pertes engendrées par la perte de sa principale source d’approvisionnement en GNL liée au cas de force majeure invoqué par la société C l’ayant mise dans l’impossibilité de lui livrer du GNL au titre du contrat d’approvisionnement, la société B a conclu parallèlement, soit des contrats visant à suspendre l’exécution des différents contrats d’affrètements moyennant le paiement d’une indemnité journalière, soit une série de contrats de sous-affrètement visant à mettre à disposition, moyennant versement d’un prix, ses navires de transports de GNL à diverses sociétés, ci-après désignés par les « contrats de sous-

affrètement ».

Au cours des exercices 2016, 2017 et 2018 et des années d’imposition correspondantes, la société B a comptabilisé des provisions en lien avec les contrats d’affrètement ayant bénéficié d’une suspension, ci-après désignées par les « Provision de suspension d’affrètement », ainsi que des provisions en lien avec les contrats de sous-affrètement, ci-après désignées par les « Provisions de sous-affrètement ».

Le bureau d’imposition a refusé de considérer comme dépenses fiscalement déductibles l’intégralité du montant des Provisions de novation, des Provisions de sous-affrètement et des Provisions de suspension d’affrètement.

De son côté, le directeur a réformé la décision du bureau d’imposition en admettant la déduction des Provisions de suspension d’affrètement, et a confirmé, pour le surplus, le refus de déduction des Provisions de novation et des Provisions de sous-affrètement.

Dans le cadre du présent recours, la société demanderesse sollicite la réformation de la décision directoriale au motif que l’intégralité des Provisions de novation et des Provisions de sous-affrètement comptabilisées au titre des années 2016, 2017 et 2018 seraient à porter en déduction de son résultat imposable tant pour les besoins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal, que pour les besoins de l’impôt sur la fortune, la société demanderesse ayant expressément indiqué ne pas contester la décision directoriale par rapport à l’admission des Provisions de suspension d’affrètement en déduction de son résultat imposable.

C’est sur cette toile de fond que le litige sera examiné.

Le tribunal relève de prime abord que dans la mesure où l’article 59 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par la « loi du 21 juin 1999 », dispose que « La preuve des faits déclanchant l’obligation fiscale appartient à l’administration, la preuve des faits libérant de l’obligation fiscale ou réduisant la cote d’impôt appartient au contribuable. La charge de la régularité de la procédure fiscale appartient à l’administration. La preuve peut être rapportée par tous les moyens, hormis le serment. », il appartient à la société demanderesse de rapporter la preuve qu’elle est fondée à réclamer la déduction des Provisions de novation et des Provisions de sous-

affrètement.

Les provisions ne font pas l’objet de dispositions générales dans la LIR, de sorte que conformément au principe de l’accrochement du bilan fiscal au bilan commercial posé par l’article 40, alinéa (1) LIR, aux termes duquel « Lorsque les prescriptions régissant l’évaluation au point de vue fiscal n’exigent pas une évaluation à un montant déterminé, les valeurs à retenir au bilan fiscal doivent être celles du bilan commercial ou s’en rapprocher le 34plus possible dans le cadre des prescriptions prévisées, suivant que les valeurs du bilan commercial répondent ou ne répondent pas aux mêmes prescriptions », les règles du droit comptable sont à respecter5.

Il y a, dès lors, lieu de se référer à la définition générale découlant de l’article 44 de la loi du 19 décembre 2002 qui disposait, dans sa teneur applicable aux années 2016, 2017 et 2018, comme suit :

« (1) Les provisions ont pour objet de couvrir des pertes ou dettes qui sont nettement circonscrites quant à leur nature et qui, à la date de clôture du bilan, sont ou probables ou certaines, mais indéterminées quant à leur montant ou quant à la date de leur survenance.

(2) Est également autorisée la constitution de provisions ayant pour objet de couvrir des charges qui trouvent leur origine dans l’exercice ou un exercice antérieur et qui sont nettement circonscrites quant à leur nature et qui, à la date de clôture du bilan, sont ou probables ou certaines mais indéterminées quant à leur montant ou quant à la date de leur survenance.

(3) Les provisions ne peuvent pas avoir pour objet de corriger les valeurs des éléments de l’actif. ».

Il résulte de cette disposition que l’élément déterminant pour la constitution d’une provision est la probabilité ou certitude de la charge et non pas son origine dans l’exercice en cours, dans la mesure où l’alinéa (2) de l’article 44 admet expressément la constitution de provisions du chef de charges probables qui trouvent leur origine dans un exercice antérieur et non pas nécessairement durant l’exercice au titre duquel la provision est constituée6.

En revanche, dès lors que la charge est connue et dans son principe et dans son montant, et n’est affectée d’aucune incertitude quant à sa réalisation, elle doit être comptabilisée en tant que dette en étant portée au compte du tiers intéressé7.

C’est en vertu du principe de prudence, se retrouvant à l’article 51, paragraphe (1), point c) de la prédite loi du 19 décembre 2002 d’après lequel « seuls les bénéfices réalisés à la date de clôture du bilan peuvent y être inscrits », et qui impose qu’il soit « tenu compte de tous les passifs qui ont pris naissance au cours de l’exercice ou d’un exercice antérieur, même si ces passifs sont connus qu’entre la date de clôture du bilan et la date à laquelle il est établi » ainsi que « des dépréciations, que l’exercice se solde par une perte ou par un bénéfice », qu’il y a lieu de constater une telle provision pour risques et charges.

La fixation du montant de la provision est, quant à elle, à opérer en conformité avec l’article 64 de la loi du 19 décembre 2002 qui dispose que « A la date de clôture du bilan, une provision représente la meilleure estimation des charges probables ou, dans le cas d’une perte ou d’une dette, du montant nécessaire pour l’honorer. ».

En ce qui concerne plus particulièrement la déduction de « provisions pour contrats déficitaires » dont la société demanderesse affirme que les Provisions de novation et les Provisions de sous-affrètement devraient suivre le régime et à propos desquelles elle allègue 5 Cour adm., 14 juillet 2020, no 43978C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Impôts, n° 183.

6 Cour adm., 14 juillet 2020, no 43978C du rôle , Pas. adm. 2022, V° Impôts, n° 182 (2e volet).

7 Alain Steichen, Manuel de droit fiscal, Legitech, Edition 2023, p. 649, n° 730.

35que les conditions de déduction seraient remplies en l’espèce, le tribunal relève tout d’abord que la société demanderesse et la partie étatique s’accordent pour dire que la déduction d’une telle provision n’est pas prévue, en tant que telle, par les règles de droit comptable luxembourgeois, dites « … », mais par les International Accounting Standards (IAS) et plus particulièrement par la norme comptable internationale 37 (IAS 37), intitulée « Provisions, passifs éventuels et actifs éventuels », à laquelle tant la société demanderesse, le directeur et le délégué du gouvernement se sont référés.

En effet, s’il ressort des trois courriers du 6 août 2020 émis dans le cadre du § 205, alinéa (3) AO, que le bureau d’imposition a fondé sa décision sur le motif que la « provision pour contrats déficitaires [ne serait] pas reconnue par la législation fiscale et comptable en vigueur », il n’en reste pas moins que dans sa décision déférée, le directeur s’est expressément référé, entre autres, aux normes comptables IAS pour justifier son refus d’admettre les Provisions de novation et les Provisions de sous-affrètement en déduction du résultat imposable de la société B. Le délégué du gouvernement a, quant à lui, retracé le raisonnement du bureau d’imposition pour ensuite affirmer que « l’Etat confirme et réitère les développements repris à l’instance directoriale […] » et se référer également aux normes comptables IAS, en ce compris la norme IAS 37.

Dans ces conditions, il y a lieu d’admettre que la question de savoir si les normes comptables IAS sont, en l’espèce, applicables pour les besoins de l’impôt sur le revenu des collectivités, l’impôt commercial communal et l’impôt sur la fortune, telle que débattue par la société demanderesse et le bureau d’imposition en phase précontentieuse, n’est plus litigieuse, et que l’analyse de la question de l’admissibilité des provisions litigieuses se fera également, le cas échéant, à la lumière des normes comptables IAS invoquées de part et d’autre.

A cet égard, le tribunal relève qu’aux termes de la norme IAS 37, telle que reprise dans le règlement (CE) n° 1126/2008 de la Commission du 3 novembre 2008 portant adoption de certaines normes comptables internationales conformément au règlement (CE) n° 1606/2002 du Parlement européen et du Conseil, dans sa version applicable aux années litigieuses, auquel les parties se sont également référées :

« […] APPLICATION DES REGLES DE COMPTABILISATION ET D’EVALUATION Pertes opérationnelles futures 63 Des provisions ne doivent pas être comptabilisées au titre de pertes opérationnelles futures.

64 Les pertes opérationnelles futures ne répondent ni à la définition d’un passif selon le paragraphe 10 ni aux critères généraux de comptabilisation énoncés pour les provisions au paragraphe 14. […] Contrats déficitaires 66 Si une entité a un contrat déficitaire, l’obligation actuelle résultant de ce contrat doit être comptabilisée et évaluée comme une provision.

67 De nombreux contrats (par exemple, certains bons de commande courants) 36peuvent être annulés sans que l’autre partie soit dédommagée; ces contrats n’impliquent donc aucune obligation. D’autres contrats établissent à la fois des droits et des obligations pour chacune des parties contractantes. Lorsque des événements font qu’un tel contrat est un contrat déficitaire, ce contrat entre dans le champ d’application de la présente norme et il existe un passif qui est comptabilisé. Les « contrats non (entièrement) exécutés » qui ne sont pas des contrats déficitaires n’entrent pas dans le champ d’application de la présente norme.

68 La présente norme définit un contrat déficitaire comme un contrat pour lequel les coûts inévitables pour satisfaire aux obligations contractuelles sont supérieurs aux avantages économiques à recevoir attendus du contrat. Les coûts inévitables d’un contrat reflètent le coût net de sortie du contrat, c’est-à-dire le plus faible du coût d’exécution du contrat ou de toute indemnisation ou pénalité découlant du défaut d’exécution.

69 Avant d’établir une provision séparée pour un contrat déficitaire, une entité comptabilise toute perte de valeur survenue sur les actifs dédiés à ce contrat (voir IAS 36).

[…] ».

Il résulte d’une lecture combinée des dispositions précitées de la loi du 19 décembre 2002 et des normes IAS 37 que la comptabilisation d’une « provision pour contrat déficitaire » est soumise aux conditions suivantes :

(i) elle doit couvrir une perte, dette ou charge nettement circonscrite quant à sa nature ;

(ii) cette perte, dette ou charge doit être probable ou certaine à la date de clôture du bilan, bien qu’indéterminée quant à son montant ou quant à la date de sa survenance ;

(iii) cette perte, dette ou charge doit être évaluée à la date de clôture à la meilleure estimation des charges possibles, ou, dans le cas d’une perte ou d’une dette, du montant nécessaire pour l’honorer ; et (iv) cette perte, dette ou charge doit tirer son origine d’une obligation actuelle d’un contrat déficitaire, autrement dit d’un contrat dont les coûts d’exécution ou de toute indemnisation ou pénalité découlant du défaut d’exécution sont supérieurs aux avantages économiques à recevoir attendus du contrat.

En l’espèce, la société demanderesse se prévaut d’abord d’un « avis comptable » du 25 novembre 2020 pour tenter de justifier l’admission des Provisions de novation et des Provisions de sous-affrètement en tant que « provisions pour contrats déficitaires » dans les comptes annuels de la société B.

Or, dans la mesure où il résulte expressément de cet avis qu’il vise « à déterminer in abstracto la compatibilité d’une provision pour contrats déficitaires avec le droit comptable luxembourgeois (…) » et qu’il « n’a donc pas pour objet de se prononcer in concreto quant au fait de savoir si, eu égard aux circonstances auxquelles il était confronté, le conseil d’administration de [la société B] pouvait ou devait comptabiliser des provisions pour contrats déficitaires, ni a fortiori sur le montant de celle-ci. », le constat s’impose que ledit avis n’est pas pertinent en l’espèce, étant rappelé que ce n’est pas la comptabilisation, dans son principe, d’une provision pour contrats déficitaires qui est remise en cause par la partie étatique dans le cadre du présent recours, mais bien leur comptabilisation dans les circonstances de l’espèce.

En revanche, il y a lieu de relever que les comptes annuels de la société B concernant les exercices 2016, 2017 et 2018 auxquels se réfère la société demanderesse pour tenter de 37rapporter la preuve du caractère justifié de la comptabilisation des Provisions de novation et des Provisions de sous-affrètement, comprennent tous une inscription comptable et des explications à ce sujet.

Il en ressort plus particulièrement que la société B a constitué des provisions pour risques et charges relatives à des « onerous contracts » pour un montant de … USD dans ses comptes annuels concernant l’exercice 2016, tandis que les notes auxdits comptes indiquent que « These provisions have been booked for two contracts of sub chartering vessels », lesquels doivent être compris comme visant des contrats de sous-affrètement.

Les comptes annuels de la société B concernant l’exercice 2017 contiennent une « Provision for onerous contracts (note 8) » à hauteur de … USD avec l’explication suivante :

« These provisions have been booked for different dedicated contracts of sub chartering and an agreement of compensation for the novation of a SPA », étant relevé que ce montant comprend, d’un côté, un montant de … USD au titre de la « LNG compensation novation », autrement dit les Provisions de novation, et, d’un autre côté, un montant de … USD correspondant aux « Shipping onerous contracts », à savoir les Provisions de sous-affrètement.

Si les comptes annuels de la société B concernant l’exercice 2018 ne mentionnent pas de « Provision for onerous contracts (note 8) », alors que le montant figurant aux notes aux comptes s’élève à 0 USD, il en ressort néanmoins, d’un côté, qu’un montant de … USD au titre de la « LNG compensation novation » a fait l’objet d’un « Reversal », de sorte à s’élever à … USD au 31 décembre 2018, et, d’un autre côté, que les provisions pour « Shipping onerous contracts » ont aussi fait l’objet d’un « Reversal », de sorte à laisser un solde … USD au 31 décembre 2018.

Le tribunal relève ensuite que les comptes annuels de la société B ont tous fait l’objet d’une vérification (« audit ») de la part d’un réviseur d’entreprises agréé au sens de la loi du 23 décembre 2016, qui n’a émis aucune réserve lors de leur approbation, tel que le fait plaider la société demanderesse, étant donné qu’il ressort du rapport dudit réviseur concernant les exercices 2016, 2017 et 2018 que les comptes de la société B donnaient une image fidèle de sa situation financière et que le résultat de ses opérations était conforme aux prescription légales et réglementaires luxembourgeois relatives à l’établissement et à la présentation des comptes annuels.

Par ailleurs, les comptes annuels concernant les exercices 2016 et 2017 comprennent des développements, sous l’intitulé « Emphasis of Matter », qui attirent l’attention sur les notes aux comptes 2.2. (Going concern) et qui révèlent tant « the existence of a material uncertainty that may cast significant doubt about the Company’s ability to continue as a going concern » due à la situation politique au …, que la clause de force majeure invoquée par la société C – fournisseur principal de la société B au titre du contrat d’approvisionnement, tel que relevé ci-

avant –, les comptes concernant l’exercice 2017 précisant encore que « Our opinion is not modified in respect of this matter ».

Dans ces conditions, le tribunal relève qu’il ne saurait suivre le délégué du gouvernement dans ses explications, en partie réitérées en substance à l’audience des plaidoiries, selon lesquelles, d’une part, il ne serait pas fiscalement et juridiquement acceptable que la société demanderesse se fonde sur un « simple aval » donné par un réviseur d’entreprises pour justifier la véracité de ses propos, d’autant plus aux motifs qu’un réviseur d’entreprises 38n’agirait pas contradictoirement et exécuterait son mandat de manière rémunérée et pour le compte exclusif de son mandant, et, d’autre part, l’administration ne se prononcerait pas sur la validité comptable de la provision litigieuse, même avalisée par un réviseur d’entreprises.

Le tribunal ayant retenu ci-avant qu’en l’absence de dispositions fiscales dérogatoires, l’admission des provisions d’un point de vue fiscal dépendait de leur admission d’un point de vue comptable, il incombe justement de vérifier en l’espèce, dans la limite des moyens avancés par les parties de part et d’autre, si les provisions litigieuses sont admissibles d’après le droit comptable luxembourgeois et doivent, en conséquence, être admises, conformément à l’article 40 LIR, en déduction du résultat imposable de la société B.

Aucun reproche ne saurait dès lors être fait à la société demanderesse de fonder la justification, sur le plan comptable, de l’inscription des provisions litigieuses dans les comptes annuels de la société B sur base des conclusions d’un réviseur d’entreprises agréé, alors que les réviseurs d’entreprises lequel sont, par ailleurs, légalement tenus d’exécuter leurs missions, conformément à l’article 18 de la loi du 23 décembre 2016, « (1) […] [en étant] tenus au respect de principes déontologiques, lesquels régissent leur fonction d’intérêt public, leur intégrité et leur objectivité, ainsi que leur compétence et leur diligence professionnelle », « (2) […] [en faisant] preuve constamment de scepticisme professionnel8 tout au long de l’audit, en reconnaissant la possibilité d’anomalies significatives dues à des faits ou des comportements entachés d’irrégularités, notamment une fraude ou une erreur, quelle qu’ait pu être leur expérience antérieure de l’honnêteté et de l’intégrité de la direction de l’entité contrôlée et des personnes responsables de sa gouvernance », et en respectant l’indépendance de la profession conformément aux articles 22 et 23 de la loi du 23 décembre 2016, tel que relevé à juste titre par la société demanderesse.

Ce constat n’est pas remis en question par la circonstance que le réviseur d’entreprises perçoit une rémunération pour le travail de contrôle légal des comptes, dans la mesure où il résulte expressément de l’article 27 de la loi du 23 décembre 2016 que « Les honoraires fixés pour la réalisation du contrôle légal des comptes ne peuvent être ni déterminés ni influencés par la fourniture de services complémentaires à l’entité contrôlée et ne peuvent revêtir aucun caractère conditionnel. », de sorte que le seul fait que le mandat soit rémunéré ne porte aucunement préjudice aux obligations professionnelles mises légalement à la charge des réviseurs d’entreprises lors du contrôle des comptes.

Il s’ensuit que les conclusions du réviseur d’entreprises agréé ayant procédé à la vérification des comptes annuels de la société B ne sauraient être ipso facto écartées comme élément de preuve de nature à justifier la comptabilisation des provisions litigieuses au seul motif que le réviseur aurait agi pour le contribuable contre rémunération, respectivement qu’il n’aurait pas agi de manière contradictoire, étant, d’une part, rappelé que la preuve est libre en matière fiscale conformément à l’article 59 de la loi du 21 juin 1999, précité, et, d’autre part, relevé qu’aussi bien le bureau d’imposition et le directeur, que le délégué du gouvernement ont eu la possibilité de prendre position par rapport au contenu des comptes annuels de la société B, sans que la régularité de la comptabilité de cette dernière quant au fond ait, par ailleurs, été remise en cause.

8 Article 1er, paragraphe (35) de la loi du 23 décembre 2016 : « une attitude caractérisée par un esprit critique, attentif aux éléments qui pourraient indiquer une éventuelle anomalie due à une erreur ou une fraude, et par une évaluation critique des éléments probants pour l’audit. ».

39La référence faite par le délégué du gouvernement à un arrêt de la Cour administrative du 21 mars 2021, inscrit sous le numéro 44078C du rôle, est, quant à elle, inopérante, alors que la circonstance que la Cour ait réitéré l’obligation pour le contribuable de rapporter la preuve de l’existence matérielle des dépenses litigieuses n’est, en tout état de cause, pas de nature à empêcher le contribuable de se prévaloir, dans son principe, de ses comptes annuels pour ce faire.

En ce qui concerne les Provisions de sous-affrètement, le tribunal relève que fondamentalement, les parties sont en désaccord quant à la question de savoir si les Provisions de sous-affrètement se rattachent aux contrats de sous-affrètement, partant à des prestations de services futures de la société B non encore réalisées à la clôture des exercices concernés, de sorte que leur comptabilisation en tant que provisions ne serait, eu égard aux principes dégagés ci-avant, pas justifiée, tel que l’affirme la partie étatique, ou si elles trouvent leur origine dans la signature des contrats d’affrètement sous-jacents qui, du fait de l’impossibilité pour la société B d’avoir pu en suspendre l’exécution, l’aurait conduite à devoir conclure les contrats de sous-

affrètement et en conséquence à devoir comptabiliser des provisions, comme l’affirme en substance la société demanderesse.

Sur base des « Fiches Techniques "Affrètement / Sous-Affrètement" » auxquelles s’est référée la société demanderesse et qui sont jointes à son recours, ainsi que des calculs y explicités, ensemble les références y faites aux stipulations des contrats litigieux, le tribunal constate que le montant des provisions comptabilisées par la société B au titre des Provisions de sous-affrètement a été déterminé en prenant, comme base, le montant des coûts liés aux contrats d’affrètement – à savoir le prix fixe journalier pour la disponibilité des navires à payer par la société B indépendamment de l’utilisation effective des navires –, duquel ont été déduits les montants perçus par la société B au titre des contrats de sous-affrètement qu’elle a conclus.

Il s’ensuit que les montants comptabilisés en tant que Provisions de sous-affrètement correspondent au reliquat du prix fixe que la société B est restée tenue de verser au titre des contrats d’affrètement et qu’elle n’a pas été en mesure de compenser intégralement grâce aux indemnités perçues au titre des contrats de sous-affrètement.

Dans ces conditions, la conclusion s’impose que la condition tenant à l’existence d’une perte certaine, à tout le moins probable, et nettement circonscrite quant à sa nature, doit être considérée comme étant remplie en l’espèce eu égard à l’absence d’aléa au niveau du principe même d’une perte dans le chef de la société B, en l’occurrence le montant des coûts fixes dus au titre des contrats d’affrètement qui resterait définitivement à sa charge et qui ne pourrait pas être intégralement compensé par les loyers perçus au titre des contrats de sous-affrètement, lesquels sont en tout état de cause et indépendamment de l’utilisation concrète des navires, inférieurs à ces coûts fixes.

Le tribunal ne saurait, dès lors, partager la conclusion du directeur et du délégué du gouvernement selon laquelle le montant des Provisions de sous-affrètement viserait à anticiper des pertes opérationnelles futures, qu’il se rapporterait à des actions, respectivement des obligations futures de la société B ou qu’il viserait à couvrir des revenus opérationnels futurs trouvant leur origine dans la conclusion des contrats de sous-affrètement.

Ces provisions doivent, au contraire, être considérées comme ayant pour objet de couvrir des pertes certaines, à tout le moins probables, qui trouvent leur origine dans la conclusion des contrats d’affrètement, dont les dates de signature respectives sont, d’après les 40explications non contestées de la société demanderesse, antérieures aux années d’imposition litigieuses au cours desquelles elles ont été comptabilisées, et dont le montant doit être considéré comme correspondant à la somme nécessaire pour les honorer, respectivement à la meilleure estimation du montant de ces pertes resté à la charge de la société B.

L’admission des Provisions de sous-affrètement s’impose également au regard de la norme IAS 37 à laquelle se sont référées les parties. D’une part, les montants comptabilisés portent, non pas sur des obligations futures à échéances successives tirées des contrats de sous-

affrètement, tel que l’affirme le délégué du gouvernement, mais sur des obligations actuelles de la société B tirées des d’un évènement passé, en l’occurrence la signature des contrats d’affrètement qui constitue le fait générateur de ses obligations. D’autre part, il n’est pas contesté que la société B n’a pas été en mesure de suspendre l’exécution de certains de ses contrats d’affrètement – en l’occurrence ceux relatifs aux navires « … », « … », « … » et «»… » –, de sorte qu’elle doit être considérée comme étant tenue de supporter des « coûts inévitables pour satisfaire à ses obligations contractuelles », tels que le paiement d’une « indemnité ou pénalité découlant du défaut d’exécution » lié à son impossibilité de fournir du GNL à ses clients en raison du cas de force majeure invoquée par la société C sur base du contrat d’approvisionnement.

Si le délégué du gouvernement estime que les contrats de sous-affrètement seraient marqués par l’existence d’un aléa « évident » tirant, de l’entendement du tribunal, son origine du fait que les indemnités versées à la société B au titre de ces contrats de sous-affrètement dépendraient de l’utilisation effective des navires concernés, le tribunal est amené à retenir qu’un tel constat ne serait, en tout état de cause, pas de nature à remettre en question l’existence du principe même de la perte constatée au niveau de la société B et plus particulièrement le caractère certain, sinon probable de cette perte, mais aurait, tout au plus, un impact au niveau du montant de la perte et in fine de la provision, dont l’indétermination quant au montant fait justement partie, en application des principes dégagés ci-avant sur base des dispositions précitées de la loi du 19 décembre 2002, de la définition des provisions.

Par ailleurs, le tribunal ne décèle pas, à l’instar de la société demanderesse, ce qui distingue fondamentalement les Provisions de suspension d’affrètement qui ont été admises en déduction par le directeur, des Provisions de sous-affrètement. Si le délégué du gouvernement affirme que l’indemnité due au titre des contrats de suspension aurait été nettement circonscrite quant à sa nature, et probable voire certaine, en substance, au motif que les parties seraient restées liées aux contrats litigieux pendant la durée de la période de leur suspension, sans autre formalité requise ou action possible, force est de constater que la société B est également restée liée aux contrats d’affrètement sous analyse, à savoir ceux dont elle n’a justement pas pu obtenir la suspension, après de la conclusion des contrats de sous-affrètement.

En conséquence, eu égard à la comptabilisation des Provisions de sous-affrètement dans les comptes annuels de la société B au titre des exercices 2016, 2017 et 2018 le tribunal retient, en application de l’article 40 LIR, précité, et par réformation de la décision directoriale, que le montant des Provisions de sous-affrètement liées aux contrats d’affrètement « … », « … », « … » et «»… » est à porter en déduction du résultat imposable de la société B au titre de années d’imposition litigieuses pour les besoins de l’impôt sur le revenu des collectivités, de l’impôt commercial communal et de l’impôt sur la fortune.

En ce qui concerne les Provisions de novation, le tribunal constate que si le directeur 41s’est référé, de manière générale aux dispositions des articles 44, 51, paragraphe (1), point c) et 64 de la loi du 19 décembre 2002 en préambule de son analyse in concreto de la réclamation de la société B, il n’en reste pas moins que le refus de déduction des Provisions de novation n’est pas spécialement motivé par la circonstance que les conditions de déduction prévues aux articles 44, 51, paragraphe (1), point c) et 64 de la loi du 19 décembre 2002, ainsi que dans la norme IAS 37 ne seraient pas remplies, mais par la considération que le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement»» présenterait des « anormalités », voire serait « particulièrement artificiel », aux motifs - que leur montant correspondrait à l’indemnité due au titre du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement », qui serait toutefois largement supérieure à l’indemnité qu’aurait dû payer la société B à la société E si elle ne s’était pas désengagée du « LNG Sale and Purchase Agreement », - que l’indemnité que serait tenue de verser la société B au titre du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » serait basée sur le prix historique fixé dans le « LNG Sale and Purchase Agreement », mais ne prendrait pas en compte un éventuel ajustement de prix opéré au titre de ce dernier contrat, alors qu’il aurait été « particulièrement probable » que la société E profite justement, de son côté, d’un ajustement de ce prix suite à la reprise du « LNG Sale and Purchase Agreement », et - que la conclusion de ce contrat n’aurait pas été faite dans des conditions de pleine concurrence, dès lors que (i) la société B aurait été, dès la conclusion du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement », dans l’impossibilité financière d’honorer le paiement de l’indemnité à la société E au titre de ce contrat, étant donné qu’elle aurait perdu sa principale source de revenu, à savoir le contrat « LNG Sale and Purchase Agreement » nové, et (ii) la société E aurait accepté de conclure le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement », pourtant déficitaire, sans se ménager aucune garantie, la partie étatique déduisant de ces éléments qu’il n’aurait nullement été dans l’intention des parties que la société B s’acquitte de l’indemnité en question, ce qui serait, par ailleurs, corroboré par la circonstance que l’intégralité des provisions aurait fait l’objet d’une extourne au cours de l’exercice 2019.

Force est de constater que les reproches de la partie étatique reviennent in fine à refuser la déduction des Provisions de novation en remettant en cause le caractère économiquement justifié de la conclusion du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » sous-jacent, sans pour autant invoquer une quelconque disposition légale à l’appui de son argumentation, mise à part la référence générale faite au principe de pleine concurrence et à la réalité économique, ni fournir des explications circonstanciées quant aux raisons pour lesquelles ledit contrat serait « particulièrement artificiel ».

Tout d’abord, le tribunal n’entrevoit pas, à défaut d’explications circonstanciées de la partie étatique, dans quelle mesure il y aurait lieu de considérer que les conditions de déduction des Provisions de novation prévues aux susdites dispositions de la loi du 19 décembre 2002, ainsi que dans la norme IAS 37 ne seraient pas remplies au motif que l’indemnité que la société B serait tenue de verser au titre du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG 42Sale and Purchase Agreement » serait supérieure à celle qu’elle aurait été tenue de verser si elle était restée engagée dans le « LNG Sale and Purchase Agreement ».

En effet, le tribunal relève, d’abord, sur base des « Fiches Techniques "Novation" »» jointes au recours de la société demanderesse et plus particulièrement sur base du tableau confectionné par ses soins et par rapport auquel le délégué du gouvernement a pu prendre position, que le montant maximum de l’indemnité qu’aurait été tenue de verser la société B à la société E au titre du « LNG Sale and Purchase Agreement » se serait élevé, conformément à son article 5.3.5, à 2,50 USD/MMBtu9.

Or, dans la mesure où la partie étatique remet en cause la réalité économique de l’opération, c’est l’ensemble de l’économie du contrat qui doit être pris en considération.

A cet égard, il échet de relever que, globalement, l’indemnité prévue d’être versée par la société B à la société E, au titre du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » à compter de l’année 2018 jusqu’à l’année 2026, ne dépasse pas la prédite limite de 2,50 USD/MMBtu, encore que ce soit le cas pour les premières années suivant la conclusion dudit contrat.

Il ressort, en effet, de ladite fiche technique que les années 2019 à 2021 prévoient le versement d’une indemnité largement inférieure à la limite contractuelle posée par l’article 5.3.5, prémentionné, en l’occurrence 1,44, 2,64, 1,17 et 1,83/MMBtu, de sorte à compenser les montants de 2,80, 2,86, 2,85, 2,84 et 2,83/MMBtu prévues de devoir être versées au cours des années 2022 jusqu’en 2026. Le tribunal rejoint ainsi la société demanderesse dans son explication selon laquelle l’indemnité prévue d’être versée au titre du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » s’élève, en moyenne, sur une période de 9 ans, à 2,32 USD/MMBtu, de sorte à être globalement inférieure à l’indemnité qu’aurait dû payer la société B à la société E si elle ne s’était pas désengagée du « LNG Sale and Purchase Agreement ».

De la même manière, il ne se dégage pas des éléments soumis à l’appréciation du tribunal que le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » serait dépourvu d’une réalité économique au motif que la société B n’aurait pas négocié un ajustement de prix, alors qu’il serait « particulièrement probable » que la société E profiterait d’un tel ajustement de prix lors de la reprise du « LNG Sale and Purchase Agreement ». D’une part, le seul fait que la société E ait, à l’époque de la conclusion du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement », indiqué vouloir renégocier tous ses contrats d’achats et de vente de GNL, et que la société B n’ait pas profité de cette volonté pour négocier un tel ajustement de prix dans son propre contrat, n’est pas de nature à entacher ipso facto la conclusion du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » d’une « anormalité », étant rappelé que la société B se trouvait, de façon non contestée, dans une situation financière désavantageuse, partant peu propice à imposer ses conditions. D’autre part, le montant de l’indemnité prévue dans ledit contrat n’est pas seulement calculé par rapport au prix de vente fixé dans le « LNG Sale and Purchase Agreement », dès lors que le montant résulte de la différence entre ce prix et le prix de marché des cargaisons au fur et à mesure des livraisons, ce qui tend a priori à exclure le caractère artificiel du « Compensation Agreement […] for the 9 « Seller’s liability to Buyer with respect to any Seller Cargo Deficiency shall not exceed two decimal give USD (USD 2,50) per MMBtu ».

43Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » sous ce rapport.

Ensuite, le tribunal n’entrevoit pas, en l’état actuel du dossier soumis à son appréciation, d’« anormalité » dans la conclusion du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » au motif que le chiffre d’affaires de la société B aurait substantiellement décru de … d’USD en 2016 à … d’USD en 2019, alors que la société demanderesse se prévaut justement de la détérioration de sa situation financière consécutive à l’impossibilité de son fournisseur principal de GNL, la société C, d’honorer les termes du contrat d’approvisionnement qui lui aurait permis d’honorer les livraisons de GNL à ses propres clients, pour justifier la conclusion dudit contrat. Dans ces conditions, le tribunal ne saurait conclure que la société B se serait engagée à conclure le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » en sachant pertinemment qu’elle serait dans l’impossibilité de verser l’indemnité y prévue à la société E, la partie étatique n’ayant d’ailleurs pas contesté que la société B ait effectivement procédé au versement des indemnités au titre de années d’impositions litigieuses.

Le délégué du gouvernement est encore resté en défaut de prendre position par rapport aux avantages économiques pour la société B, avancés par la société demanderesse et auxquels le tribunal peut souscrire, dans la conclusion du « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement », à savoir (i) protéger sa réputation dans le secteur du GNL, (ii) éviter une procédure d’arbitrage qu’aurait initiée la société E et qui lui aurait fait encourir le risque de devoir verser des indemnités à hauteur des dommages subis par la société E, (iii) cesser d’être exposée au risque d’une évolution négative des prix de marché du GNL, (iv) conserver son accès, ainsi que celui du « groupe E » au marché chilien de GNL et (v) protéger leur réputation de fournisseurs fiables de GNL. Si la partie étatique fait valoir que l’avantage tenant au maintien de l’accès au marché chilien de GNL ne concorderait pas avec les informations publiquement disponibles selon lesquelles la société E aurait envisagé, à la même époque, de céder ses activités liées au GNL au « groupe … », le délégué du gouvernement ne conteste pas que le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » a été signé le 19 octobre 2017, tandis que l’offre conditionnelle de vente des activités de GNL proposée à « … » serait datée du 8 novembre 2017.

Par ailleurs, aucune « anormalité » ne saurait être retenue au motif que le « Compensation Agreement […] for the Novation of the LNG Sale and Purchase Agreement » aurait été conclu entre parties liées ou intéressées, alors que le seul fait que la société E soit la société mère du « groupe E » auquel appartient la société B ne signifie pas ipso facto que la transaction soit dépourvue d’une réalité économique.

Le tribunal est, enfin, amené à rejeter l’argumentation de la partie étatique consistant, en substance, à remettre en cause le caractère justifié des Provisions de novation au motif qu’elles auraient fait l’objet d’une reprise au cours de l’exercice 2019, alors qu’il est de l’essence même d’une provision qu’elle revêt un caractère provisoire, cette dernière devant nécessairement faire l’objet d’une reprise, que la perte qu’elle est censée couvrir devienne définitive ou qu’elle ne se réalise pas du tout.

Dans ces conditions, en l’absence d’autres contestations circonstanciées de la partie étatique quant à la déductibilité des Provisions de novation et compte tenu, par ailleurs, du fait que les comptes annuels de la société B concernant les exercices 2016, 2017 et 2018 révèlent que les Provisions de novation ont été comptabilisées comme telles et que le réviseur 44d’entreprises agréé n’a émis aucune réserve à cet égard lors de sa mission de contrôle de vérification desdits comptes, tel que relevé ci-avant, le tribunal est amené à retenir, qu’en l’état actuel du dossier, en application de l’article 40 LIR et par réformation de la décision directoriale déférée, l’intégralité des Provisions de novation est à porter en déduction du résultat imposable de la société B au titre de années d’imposition litigieuses pour les besoins de l’impôt sur le revenu des collectivités, de l’impôt commercial communal et de l’impôt sur la fortune.

Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours sous examen est justifié, sans qu’il n’y ait lieu de statuer sur la question de l’applicabilité des décisions fiscales anticipées et sur la question des emprunts sans intérêts obligatoirement convertibles en actions, ces questions devenant, eu égard à l’issue du litige, surabondantes.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare compétent pour connaître du recours principal en réformation ;

au fond, le déclare justifié ;

partant, par réformation de la décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 3 août 2021 (C 28744), dit que l’intégralité des provisions litigieuses sont à porter en déduction du résultat de la société B pour les besoins de l’impôt sur le revenu des collectivités, de l’impôt commercial communal et de l’impôt sur la fortune au titre des années d’imposition litigieuses ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

condamne l’Etat aux frais et dépens.

Ainsi jugé et lu à l’audience publique extraordinaire du 29 septembre 2023 par :

Daniel Weber, vice-président, Michèle Stoffel, vice-président, Benoît Hupperich, juge, en présence du greffier Luana Poiani.

s. Luana Poiani s. Daniel Weber Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 29 septembre 2023 Le greffier du tribunal administratif 45


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 46638
Date de la décision : 29/09/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 07/10/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-09-29;46638 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award