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22/09/2023 | LUXEMBOURG | N°46219

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 22 septembre 2023, 46219


Tribunal administratif N° 46219 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:46219 4e chambre Inscrit le 9 juillet 2021 Audience publique du 22 septembre 2023 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’appel en garantie

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46219 du rôle et déposée le 9 juillet 2021 au greffe du tribunal administratif par Maître Claude Geiben, avocat à la

Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeu...

Tribunal administratif N° 46219 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:46219 4e chambre Inscrit le 9 juillet 2021 Audience publique du 22 septembre 2023 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’appel en garantie

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46219 du rôle et déposée le 9 juillet 2021 au greffe du tribunal administratif par Maître Claude Geiben, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à F-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’un bulletin d’appel en garantie émis à son encontre en date du 7 juillet 2014 par le bureau d’imposition RTS Luxembourg 1, d’un bulletin d’appel en garantie émis à son encontre en date du 30 juin 2020 par le bureau d’imposition RTS Luxembourg 1 et d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 14 avril 2021 portant rejet d’une réclamation introduite par lui en date du 1er octobre 2020 à l’encontre des bulletins d’appel en garantie précités ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 1er décembre 2021 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 3 janvier 2022 par Maître Claude Geiben, pour compte de son mandant, préqualifié ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 2 février 2022 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision directoriale critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Claude Geiben, et Monsieur le délégué du gouvernement Steve Collart en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 10 février 2023.

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En date du 7 juillet 2014, le bureau d’imposition RTS Luxembourg 1 de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par le « bureau d’imposition », émit à l’égard de Monsieur … un bulletin d’appel en garantie (« Haftungsbescheid ») en vertu du paragraphe 118 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », en sa qualité de représentant de la société anonyme … SA, ci-après désignée par « la Société », ledit bulletin déclarant Monsieur … codébiteur solidaire d’un montant de … euros, en principal et intérêts, au titre de l’impôt sur les traitements et salaires pour les années d’imposition 2010, 2011, 2012, 2013 et 2014. Ce bulletin est rédigé comme suit :

« (…) Il est dû à l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg par la société … S.A. ayant son siège social à L-…, immatriculée sous le dossier fiscal …, à titre de :

l’impôt sur les traitements et salaires Année 2010 Principal … € Année 2010 Intérêts au 07.07.2014 … € Année 2011 Principal … € Année 2011 Intérêts au 07.07.2014 … € Année 2012 Principal … € Année 2012 Intérêts au 07.07.2014 … € Année 2013 Principal … € Année 2013 Intérêts au 07.07.2014 … € Année 2014 Principal … € Année 2014 Intérêts au 07.07.2014 … € Total … € Il résulte de la publication au Mémorial C numéro … du … mai 2009 que vous avez été nommé administrateur de la société … S.A. lors de l’assemblée générale du 21 avril 2009.

En cette qualité vous disposez du pouvoir d’engager la société … S.A. sous votre signature conjointe du 21 avril 2009 jusqu’à présent.

En votre qualité de représentant vous êtes en charge de la gestion journalière de la société … S.A..

Par conséquent et conformément aux termes du § 103 AO, vous êtes personnellement tenu à l’accomplissement de toutes les obligations fiscales incombant à la société … S.A., dont notamment le paiement des impôts dus par la société à l’aide des fonds administrés.

En vertu de l’article 136 alinéa 2 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, l’employeur est tenu de retenir l’impôt qui est dû sur les traitements et salaires de son personnel.

En vertu de l'article 136 alinéa 6 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu, l'employeur est tenu à déclarer et à verser l'impôt retenu à l'Administration des contributions directes.

En vertu de l'article 136 alinéa 6 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu et du règlement grand-ducal modifié du 27 décembre 1974 concernant la procédure de la retenue d'impôt sur les salaires et les pensions, l'employeur est tenu de présenter au bureau RTS compétent les comptes de salaires ainsi que tous autres documents comptables.

Dans le cas d'une société, conformément aux termes du § 103 AO, ces obligations incombant aux employeurs sont transmises à celui qui a le pouvoir de représenter la société à l'égard des tiers.

2 En votre qualité de représentant de la société … S.A. il vous appartient de veiller à la tenue, à la déclaration et au versement de la retenue d’impôt due sur les traitements et les salaires du personnel de la Société … S.A..

Or, depuis 2010, le paiement des salaires a été fait sans que les montants à retenir aient été continués entièrement au receveur.

L’omission de retenir, de déclarer et de payer les sommes dues à titre de retenue d’impôt est à qualifier d’inexécution fautive de vos obligations en tant que représentant de la société … S.A..

Suite à l’inexécution fautive de vos obligations, le receveur de l’Administration des contributions directes n’a pas perçu les retenues d’impôt d’un montant de … euros.

Ce montant de … euros se compose comme suit :

Année 2010 Principal … € Année 2010 Intérêts au 07.07.2014 … € Année 2011 Principal … € Année 2011 Intérêts au 07.07.2014 … € Année 2012 Principal … € Année 2012 Intérêts au 07.07.2014 … € Année 2013 Principal … € Année 2013 Intérêts au 07.07.2014 … € Année 2014 Principal … € Année 2014 Intérêts au 07.07.2014 … € Total … € Considérant qu’en vertu du § 103 AO vous êtes tenu de remplir les obligations fiscales incombant à la société … S.A..

Considérant que l’inexécution de ces obligations est à qualifier de fautive.

Considérant que l’inexécution fautive de vos obligations a empêché la perception sur les traitements et salaires d’un montant de … euros.

Considérant que dans la mesure où, par l’inexécution fautive de vos obligations, vous avez empêché la perception de l’impôt légalement dû, vous êtes constitué codébiteur solidaire de ce montant conformément au § 109 AO.

Considérant que le § 118 AO m’autorise à engager votre responsabilité.

Considérant le fait qu’en votre qualité de représentant vous êtes chargé de la gestion journalière de la société … S.A., j’engage votre responsabilité, l’appel en garantie s’élève au montant de … euros, sans préjudice des intérêts de retard ultérieurs.

Par conséquent, vous êtes invité à payer sans délai le montant de … euros, sans préjudice des intérêts de retard ultérieurs, au receveur de l’Administration des contributions directes à Luxembourg (…) ».

3 En date du 30 juin 2020, le bureau d’imposition émit un second bulletin d’appel en garantie (« Haftungsbescheid ») en vertu du paragraphe 118 AO, à l'encontre de Monsieur … en sa qualité de représentant de la Société, ledit bulletin déclarant Monsieur … codébiteur solidaire d’un montant de … euros, en principal et intérêts, au titre de l’impôt sur les traitements et salaires pour les années d’imposition 2014 et 2015. Ce bulletin est rédigé comme suit :

« (…) Il est dû à l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg par la société … S.A. en faillite ayant son siège social à L-…, immatriculée sous le dossier fiscal … et enregistrée au Luxembourg Business Registers sous le numéro B … à titre de l’impôt sur les traitements et salaires :

Année Principal Intérêts Total 2014 … € … € … € 2015 … € … € … € TOTAL … € … € … € Il résulte de la publication au Mémorial Numéro … du …2010 que vous avez été nommé administrateur de la société … S.A. en faillite.

En cette qualité vous avez eu le pouvoir d’engager la société sous signature conjointe depuis le 09.12.2009.

En votre qualité d’administrateur vous étiez en charge de la gestion de la société … S.A. en faillite.

Par conséquent et conformément aux termes des §§ 108 et § 103 AO, vous étiez personnellement tenu à l’accomplissement de toutes les obligations fiscales incombant à la société … S.A. en faillite, dont notamment le paiement des impôts dus par la société … S.A. en faillite à l’aide des fonds administrés.

En vertu de l’article 136 alinéa 2 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, l’employeur est tenu de retenir l’impôt qui est dû sur les traitements et salaires de son personnel.

En vertu de l'article 136 alinéa 6 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu, l'employeur est tenu à déclarer et à verser l'impôt retenu à l'Administration des contributions directes.

En vertu de l'article 136 alinéa 6 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu et du règlement grand-ducal modifié du 27 décembre 1974 concernant la procédure de la retenue d'impôt sur les salaires et les pensions, l'employeur est tenu de présenter au bureau RTS compétent les comptes de salaires ainsi que tous autres documents comptables.

Dans le cas d'une société, conformément aux termes du § 103 AO, ces obligations incombant aux employeurs sont transmises à celui qui a le pouvoir de représenter la société à l'égard des tiers.

4 En votre qualité de représentant de la société … S.A. en faillite il vous appartenait de déclarer et de verser/de veiller à la retenue, à la déclaration et au versement de la retenue d’impôt due sur les traitements et les salaires du personnel.

Or pour les années 2014 à 2015 le paiement des salaires a été fait sans que les montants à retenir aient été continués entièrement au receveur.

L’omission de retenir, de déclarer et de payer les sommes dues à titre de retenue d’impôt est à qualifier d’inexécution fautive de vos obligations en tant que représentant de la société … S.A. en faillite.

L’omission de payer sur les fonds disponibles de la société … S.A. en faillite les retenues échues avant votre entrée en fonction est à qualifier d’inexécution de vos obligations.

Suite à l’inexécution fautive de vos obligations, le receveur de l’Administration des contributions directes n’a pas reçu les retenues d’impôt d’un montant de … €.

Ce montant de … € se compose comme suit :

Année Principal Intérêts Total 2014 … € … € … € 2015 … € … € … € TOTAL … € … € …. € En vertu du § 110 AO votre responsabilité pour les actes accomplis pendant la période de vos fonctions survit à l’extinction de votre pouvoir de représentation.

Considérant qu’en vertu du § 103 AO vous êtes tenu de remplir les obligations fiscales incombant à la société … S.A. en faillite.

Considérant que l’inexécution de ces obligations est à qualifier de fautive.

Considérant que l’inexécution fautive de vos obligations a empêché la perception sur les traitements et salaires d’un montant de … €.

Considérant que dans la mesure où, par l’inexécution fautive de vos obligations, vous avez empêché la perception de l’impôt légalement dû, vous êtes constitué codébiteur solidaire de ce montant conformément au §109 AO.

Considérant que le §118 AO m’autorise à engager votre responsabilité.

Considérant le fait qu’en votre qualité de représentant vous êtes chargé de la gestion de la société … S.A. en faillite j’engage votre responsabilité, l’appel en garantie s’élève au montant de … €, sans préjudice des intérêts de retard ultérieurs.

5 Par conséquent, vous êtes invité à payer sans délai le montant de … €, sans préjudice des intérêts de retard ultérieurs, au receveur de l’Administration des contributions directes à Luxembourg (…) ».

Par courrier de son litismandataire du 1er octobre 2020, Monsieur … fit introduire une réclamation auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après dénommé « le directeur », à l’encontre des prédits bulletins d’appel en garantie du 7 juillet 2014 et du 30 juin 2020.

Par une décision du 14 avril 2021, inscrite sous le numéro C 28501, le directeur déclara non fondée la réclamation introduite par Monsieur … dans les termes suivants :

« (…) Vu la requête introduite le 5 octobre 2020 par Me Claude Geiben, au nom du sieur …, demeurant à F-…, pour réclamer contre les bulletins d’appel en garantie émis en vertu du § 118 de la loi générale des impôts (AO) par le bureau d’imposition RTS Luxembourg 1 en date du 7 juillet 2014, respectivement du 30 juin 2020 ;

Vu le dossier fiscal ;

Vu le §119, alinéa 1er AO, ensemble les §§ 228 et 301 AO ;

Considérant que si l’introduction de plusieurs instances par une seule et même requête n’est incompatible, en l’espèce, ni avec le secret fiscal, ni avec les règles de compétence et de procédure, elle ne dispense pas d’examiner chaque acte attaqué en lui-même et selon ses propres mérites et ne saurait imposer une jonction qu’il est loisible au directeur des contributions de prononcer lorsque les instances lui paraissent suffisamment connexes ; qu’il n’y a pas lieu de la refuser en la forme ;

En ce qui concerne le bulletin d’appel en garantie émis en date du 7 juillet 2014 Considérant qu’en ce qui concerne la notification d’un bulletin émis en 2014, les dispositions des §§ 88 et 89 AO sont applicables au cas où le contribuable réside à l’étranger ;

que le principe se dégage du § 89 AO qui oblige le contribuable non résident, au cas où l’administration fiscale l’y invite, à désigner un mandataire fiscal qui est habilité à réceptionner en son nom les écrits qui lui sont destinés ; que dans ce cas, les significations au mandataire fiscal sont opérées selon les règles énoncées au § 88 AO, englobant la dispense de recourir à la lettre recommandée au cas où l’administration choisit la voie postale telle qu’elle ressort du règlement grand-ducal du 24 octobre 1978, dans sa version applicable à l’année 2014 ; qu’au cas où l’administration n’invite pas le contribuable résidant à l’étranger à désigner un mandataire fiscal, le § 89 AO n’est pas applicable, mais le § 88 AO, qui constitue le droit commun en matière de signification des bulletins d’impôt ; que cette disposition prévoit, dans son alinéa 3, pour les envois par voie postale, le recours à la lettre recommandée, qu’il est vrai que le règlement grand-ducal du 24 octobre 1978 prévoit une dispense de recourir aux envois recommandés, mais celle-ci ne vise, de manière expresse et dans sa version applicable à l’année d’imposition 2014 notamment, que les destinataires résidant au Grand-

Duché ; qu’il s’ensuit qu’au cas où l’Administration des contributions directes entend communiquer par voie postale un bulletin à un contribuable qui ne réside pas au Luxembourg et qu’elle ne l’a pas invité à désigner un mandataire fiscal résident, elle doit l’opérer moyennant un envoi recommandé (Cour administrative du 3 mai 2012, n°29711C du rôle) ;

6 Considérant, que si faute de notification ou autrement, un bulletin n’est pas exécutoire (§91 AO), la réclamation est sans objet (déc. C 7194 du 30.6.1988 ; cf. C 6686 du 28.11.1983, C 8152 du 16.2.1994, C 8288 du 5.7.1994, etc.) ;

Considérant qu’en l’espèce, le bulletin d’appel en garantie a été remis à la poste par le bureau d’imposition RTS Luxembourg 1 en date du 7 juillet 2014 sous forme de simple pli fermé expédié au réclamant à une adresse en France ; qu’il ne ressort pas du dossier fiscal que le réclamant aurait été demandé à désigner un mandataire fiscal, de sorte que le § 88 AO est applicable ; que le bulletin litigieux, envoyé par simple pli fermé, n’étant pas exécutoire, la réclamation est sans objet ;

En ce qui concerne le bulletin d’appel en garantie émis en date du 30 juin 2020 Considérant que la réclamation a été introduite par qui de droit (§ 238 AO) dans les forme (§ 249 AO) et délai (§245 AO) de la loi, qu’elle est partant recevable ;

Considérant que le bulletin attaqué a déclaré le réclamant codébiteur solidaire de l’impôt sur les traitements et salaires des années 2014 (à partir du 8 juillet 2014) et 2015, y compris les intérêts accumulés depuis lors, au motif qu’il aurait en sa qualité de représentant légal de la société anonyme … (ci-après « … »), en faillite, commis une faute en ne veillant pas à ce que soient payées au receveur des Contributions, sur les fonds administrés, les sommes qui ont été retenues ou qui auraient dû être retenues à titre d’impôt sur les salaires, et dont la société était (et est toujours) redevable ;

Considérant, à titre liminaire tout comme en matière de principe, que le représentant d’une personne morale est responsable du paiement des dettes d’impôt de la personne morale qu’il représente dans les conditions prévues aux §§ 103 et 109 AO ; qu’aux termes du § 103 AO il est tenu de remplir les obligations fiscales incombant à la société, notamment de remettre les déclarations fiscales dans les délais légaux et de payer sur les fonds qu’il gère les impôts dont la société est redevable (CE du 20 octobre 1981, n°6902) ;

Considérant dès lors que dans la mesure où le représentant, par l’inexécution fautive de ces obligations, a empêché la perception de l’impôt légalement dû, il est, en principe, constitué codébiteur solidaire des arriérés d’impôt de la société, conformément au § 109 AO ;

que la responsabilité du représentant est à qualifier de fautive du moment que les impôts échus, même avant son entrée en fonction, ne sont pas payés sur les fonds disponibles de la société à l’administration ;

Considérant qu’il s’avère nécessaire dans ce contexte de mettre en exergue qu’en matière de responsabilité du fait personnel (article 1382 du code civil), l’auteur du dommage ne peut pas s’exonérer en invoquant une prétendue faute d’un tiers, lequel n’entrera en ligne de compte qu’au stade du recours entre les coresponsables ; que le représentant responsable sur le fondement du § 109 AO ne peut s’opposer à une poursuite au motif qu’elle n’a pas été engagée contre une autre, quod non en l’espèce, étant donné que cinq autres bulletins d’appel en garantie ont été émis à l’encontre des sieurs …, … et …, ainsi qu’à l’encontre de la société anonyme … ;

Considérant, matériellement, qu’en vertu de l’article 136, alinéa 4 de la loi concernant l’impôt sur le revenu (L.I.R.) l’employeur est tenu de retenir, de déclarer et de verser l’impôt qui est dû sur les traitements et salaires de son personnel ; que dans le cas d’une société, cette 7 obligation incombant aux employeurs est transmise à celui qui a le pouvoir de représenter la société à l’égard des tiers (§ 103 AO) ; que la responsabilité de l’administrateur, voire du gérant, selon le cas, est à qualifier de fautive du moment que des paiements de salaires sont effectués sans retenue d’impôt et sans continuation des montants à retenir à l’administration (Cour administrative du 6 mai 2003, n° 15989C du rôle) ; qu’il en est de même en ce qui concerne les retenues échues avant son entrée en fonction, si, par sa faute, elles ne sont pas payées sur les fonds disponibles de la société ;

Considérant que sous l’empire du § 118 AO la poursuite du tiers responsable, à la différence de l’imposition du contribuable, est toujours discrétionnaire et exige de ce fait et en vertu du § 2 de la loi d’adaptation fiscale (StAnpG) une appréciation effective et explicite des circonstances qui justifient la décision en raison et en équité (BFH du 19 février 1965 StRK § 44 EStG R.13 ; jurisprudence constante pour RTS, notamment BFH du 24 novembre 1961, BStBI. 1962.37 ; 3 février 1981, BStBI. 1981 II 493 ;

cf Becker-Riewald-Koch § 2 StAnpG Anm. 5 Abs. 3); que l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire implique une motivation quant au principe même de la mise en œuvre de la responsabilité d’un ou de plusieurs représentants, quant à la désignation du représentant dont la responsabilité est engagée et quant au quantum de sa responsabilité ;

Considérant qu’un manquement à une obligation fiscale découlant du § 103 AO dans le chef du représentant (« Vertreter ») d’une société n’est pas suffisant pour engager sa responsabilité en application du § 109, alinéa 1er AO et pour voir émettre à son encontre un bulletin d’appel en garantie, le législateur ayant posé à cet égard l’exigence supplémentaire d’une inexécution fautive - « schuldhafte Verletzung » - des obligations du représentant de la société envers le fisc (Cour administrative du 22 février 2000, n° 11694C du rôle) ;

Considérant que la responsabilité du représentant est cependant à qualifier de fautive du moment qu’il n’accomplit pas ses obligations fiscales, dont notamment celle de veiller à ce que les impôts dus soient payés, même ceux datant d’avant son entrée en fonction, à l’aide des fonds administrés; que cette dernière prémisse l’emporte, le cas échéant, ainsi de plein droit sur la situation telle qu’elle s’est présentée durant les années antérieures ;

Considérant dans ce contexte, et notamment d’après une jurisprudence constante, que le paiement de salaires sans retenue d’impôt et sans continuation des montants à retenir à l’administration des contributions directes est à qualifier de fautif per se (Cour administrative du 6 mai 2003, n° 15989C du rôle ; Cour administrative du 6 janvier 2011, n° 27126C du rôle ; Tribunal administratif du 15 janvier 2009, n° 24145 du rôle) ;

Considérant encore qu’en ce qui concerne la notion de l’inexécution fautive, à savoir de la « schuldhafte Verletzung seiner steuerlichen Pflichten durch den Vertreter des Steuerpflichtigen » au sens du § 109, alinéa 1er AO, que la Cour administrative a consigné que :

1) « Dans la mesure où il n’est pas contesté que les bilans pour les années litigieuses n’ont pas été déposés dans les délais au RCS et que les déclarations fiscales n’ont pas non plus été déposées, ce qui a contraint le bureau d’imposition à procéder par la voie de la taxation d’office pour les années 2008 à 2010 et par la fixation d’avances pour les années 2012 à 2014, le bureau d’imposition a en principe valablement pu retenir une inexécution fautive dans le chef de l’appelant, étant donné qu’en sa qualité de gérant unique, il était conformément au paragraphe 103 AO personnellement tenu à l’accomplissement de toutes les obligations fiscales incombant à la société (…), de sorte qu’il était tenu de veiller au dépôt des déclarations fiscales et au paiement des créances d’impôt et que l’omission de ce faire est à qualifier de comportement fautif.

8 (…) Or, le fait pour l’appelant de ne pas avoir veillé, en tant que gérant unique de la société (…), à ce que les déclarations d’impôt soient déposées en temps utile auprès de l’administration des Contributions directes, est à qualifier d’inexécution fautive des obligations du représentant d’une société envers les autorités fiscales, de sorte que les conditions pour la mise en œuvre de sa responsabilité personnelle à l’égard des créances d’impôt visées dans le bulletin d’appel en garantie litigieux se trouvent réunies en cause.

Cette conclusion ne saurait être invalidée par l’argumentation de l’appelant selon laquelle il serait inéquitable de le poursuivre personnellement après tous les efforts entrepris pour régulariser les affaires de la société, étant donné qu’il est resté trop longtemps inactif et qu’il semblerait, d’après les éléments du dossier, qu’il n’est devenu actif que lorsque le Parquet a décidé de demander la dissolution judiciaire de la société. » (CA du 23 août 2016, n° 38378C), et que :

2) « Les premiers juges ont essentiellement retenu que le « § 103 AO soumet les dirigeants d’une société à l’obligation de veiller à ce que les impôts dus soient payés au trésor public », pointant de la sorte essentiellement l’obligation des représentants d’une société de veiller au paiement des impôts dus (…).

La Cour ne saurait entériner cette vision des choses.

En premier lieu, il est erroné de limiter l’analyse sur l’obligation de paiement des impôts dus, mais il convient d’avoir égard à l’ensemble des obligations incombant au contribuable en vue de la fixation et du paiement de l’impôt dû.

(…) Cette façon de procéder au cours de la procédure d’imposition est aux antipodes de l’attitude que l’on peut attendre d’une société raisonnablement prudente et diligente et elle caractérise manifestement une violation des obligations incombant aux organes d’administration de la société (…). Le manquement ainsi dépeint est encore de toute évidence grave.

(…) (…), il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que Monsieur (…) a de façon prolongée rendu impossible la détermination exacte des bases d ’imposition et qu’il a singulièrement et fautivement manqué de remplir les obligations fiscales qui lui incombaient en tant que représentant de la société (…), de sorte que les conditions pour la mise en œuvre de sa responsabilité personnelle pour les impôts visés par le bulletin d’appel en garantie litigieux se trouvent réunies en cause. » (CA du 31 janvier 2017, n°38343C) ;

Considérant qu’il ressort du Registre de commerce et des sociétés (RCS) que le réclamant a été nommé administrateur de la société … lors d’une assemblée générale extraordinaire tenue en date du 21 avril 2009 et était depuis lors habilité à engager ladite société vis-à-vis de tiers avec la signature conjointe d’un autre administrateur ;

Considérant que le réclamant argue ne pas avoir été l’administrateur exécutif ou le directeur de la société … ;

9 Considérant que le représentant qui, tel que le réclamant, a accepté sa fonction ne peut, en matière d’appel en garantie, se contenter de contester son pouvoir ; qu’en n’exécutant pas les obligations légales de la société ou en ne veillant pas à leur accomplissement, le représentant manque à son premier devoir, celui d’administrer (Tribunal administratif du 19 mars 2014, n° 32140 du rôle) ;

Considérant par ailleurs, que les membres du conseil d’administration n’échappent pas à leurs responsabilités parce qu’ils délèguent en tout ou partie de celles-ci à d’autres ; qu’ils doivent, au contraire, assumer une surveillance constante de ceux à qui ils donnent pareille délégation ;

que la faute n’implique pas seulement de la part de l’administrateur un agissement actif, mais qu’il peut engager sa responsabilité par son attitude passive, sa négligence ou son incurie, le fait de ne pas exercer ses fonctions dans la société étant considéré en soi comme une faute de gestion (Cour administrative du 23 mai 2017, n° 39050C du rôle) ;

Considérant ensuite que le réclamant fait grief au bureau de recette Luxembourg de ne pas avoir correctement imputé onze paiements faits au cours des années 2010 à 2014 et demande la vérification desdites imputations ; qu’il ressort néanmoins du dossier fiscal que ces onze paiements ne concernent pas les retenues d’impôt sur les traitements et salaires échues après le 7 juillet 2014, de sorte qu’il y a lieu d’écarter ce moyen ;

Considérant qu’il découle de tout ce qui précède que c’est à tort que le réclamant estime sa responsabilité personnelle ne pas devoir être engagée ; que la mise à charge des arriérés de la société anonyme …, en faillite, au titre de la retenue d’impôt sur les traitements et salaires des années 2014 (à partir du 8 juillet 2014) et 2015, ainsi que les intérêts de retard y relatifs, est donc parfaitement justifiée en ce qui le concerne ;

PAR CES MOTIFS dit la réclamation contre le bulletin d’appel en garantie émis en date du 7 juillet 2014 sans objet, reçoit la réclamation contre le bulletin d’appel en garantie émis en date du 30 juin 2020 en la forme, la rejette comme non fondée.(…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 9 juillet 2021 Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation des bulletins d’appel en garantie précités du 7 juillet 2014 et du 30 juin 2020, et de la décision directoriale précitée du 14 avril 2021.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement conclut en premier lieu à l’irrecevabilité du recours subsidiaire en annulation, dans la mesure où l’article 8, paragraphe (3), point 1. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », prévoirait expressément un recours en réformation en la matière.

Dans son mémoire en réplique, le demandeur ne prend pas position quant à ce moyen d’irrecevabilité.

Conformément aux dispositions du paragraphe 119 AO, les personnes à l’encontre desquelles un bulletin d’appel en garantie a été émis bénéficient des mêmes voies de recours que celles ouvertes au contribuable. Conformément aux dispositions combinées du paragraphe 228 AO et de l’article 8, paragraphe (3), point 1. de la loi du 7 novembre 1996, le tribunal administratif est appelé à statuer comme juge du fond sur un recours introduit contre une décision du directeur ayant statué sur les mérites d’une réclamation contre un bulletin de retenue d’impôt sur les salaires et traitements.

Il s’ensuit que le tribunal administratif est compétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal par Monsieur … à l’encontre de la décision directoriale du 14 avril 2021 précitée ayant statué sur les mérites d’une réclamation introduite contre les bulletins d’appel en garantie du 7 juillet 2014 et du 30 juin 2020 dont il a fait l’objet et ayant trait au paiement des types d’impôts relevés ci-avant.

Il n’y a partant pas lieu de statuer sur le recours en annulation.

Le délégué du gouvernement conclut encore à l’irrecevabilité du recours en réformation en ce qu’il est dirigé à l’encontre du volet de la décision directoriale du 14 avril 2021 précitée concernant le bulletin d’appel en garantie du 7 juillet 2014 précité pour défaut d’intérêt à agir dans le chef du demandeur, le directeur ayant retenu un défaut de notification valable, rendant ledit bulletin non exécutoire.

Dans son mémoire en réplique, le demandeur ne prend pas position quant à ce moyen d’irrecevabilité.

Le volet de la réclamation dirigé contre le bulletin d’appel en garantie du 7 juillet 2014 a été déclaré sans objet et donc rejeté par le directeur, de sorte que le demandeur dispose d’un intérêt à faire vérifier la légalité, respectivement le bien-fondé de ladite décision par le juge administratif.

Il s’ensuit que le recours en réformation introduit par le demandeur en ce qu’il est dirigé à l’encontre du volet de la décision directoriale du 14 avril 2021 précitée concernant le premier bulletin d’appel en garantie du 7 juillet 2014 est à déclarer recevable et que le recours en réformation en ce qu’il est dirigé contre la décision directoriale du 14 avril 2021 précitée est recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi.

En ce qui concerne la recevabilité du recours en ce qu’il est dirigé directement à l’encontre du bulletin d’appel en garantie du 30 juin 2020, le tribunal relève qu’en vertu des dispositions de l’article 8, paragraphe (3), point 3. de la loi du 7 novembre 1996, un bulletin d’impôt peut uniquement être directement déféré au tribunal lorsqu’une réclamation au sens du paragraphe 228 AO a été introduite et qu’aucune décision directoriale définitive n’est intervenue dans le délai de six mois à partir de la demande. Par contre, lorsque le directeur a statué sur la réclamation par une décision définitive, le recours est irrecevable pour autant qu’introduit directement contre le bulletin.

Dans la mesure où, en l’espèce, le directeur a statué sur la réclamation du demandeur par une décision du 14 avril 2021, il y a lieu de conclure à l’irrecevabilité du recours en réformation sous analyse pour autant qu’il est dirigé directement contre les bulletins d’appel en garantie des 7 juillet 2014 et 30 juin 2020.

A l’appui de son recours et en fait, le demandeur explique qu’il aurait eu un premier mandat d’administrateur pour la Société, lequel aurait pris fin, selon lui, le 9 décembre 2019, alors qu’il n’aurait ni marqué son accord au renouvellement dudit mandat, ni été informé de sa publication au Mémorial.

Il insiste sur le fait qu’il n’aurait pas été actionnaire de la Société, et n’aurait eu qu’un rôle subalterne dans cette dernière, à savoir celui d’un simple salarié, de sorte qu’il n’aurait pris part à aucun acte de constitution de cette Société, ou assemblée générale.

Dans ce cadre, le demandeur souligne qu’un contrat de mandat, en l’occurrence celui d’administrateur, serait une convention synallagmatique, qui supposerait l’accord des volontés des deux parties pour la former, alors que dans son cas, un tel mandat, respectivement renouvellement de mandat, n’existerait pas. Il n’aurait jamais posé le moindre acte d’administration au nom et pour le compte de la Société depuis la fin de son mandat initial.

Il considère qu’une acceptation implicite d’un renouvellement ne pourrait se déduire que de l’exercice de la fonction par le biais d’un acte d’administration, ce qui ne serait pas le cas dans la présente affaire.

Le demandeur conteste l’analyse du bureau d’imposition en ce qu’il mettrait en cause sa responsabilité par le biais des bulletins d’appel en garantie émis à son égard, et considère qu’il appartiendrait audit bureau de prouver qu’il aurait accepté le mandat d’administrateur de la Société, qu’il l’aurait géré fautivement, en ne versant pas les impôts litigieux, alors que les arguments juridiques développés par l’administration ne lui seraient pas opposables, et qu’il y aurait dès lors lieu d’annuler, sinon réformer, la décision directoriale critiquée.

En droit, tout en contestant une quelconque responsabilité dans la gestion de la Société dans son chef, il fait valoir que l’administration serait restée en défaut d’expliquer comment elle aurait procédé à un certain nombre d’imputations de paiements faits par la Société, notamment pendant les années 2010 à 2014. Ainsi, les 14 paiements du 29 juin 2010, 2 et 11 mars 2011, 17 et 24 août 2012, 1er août et 21 novembre (deux paiements à cette date) 2013, 24 janvier, 11 et 13 février, 30 avril, 4 juin, et 4 décembre 2014, d’un total de … euros auraient été faits à l’administration des Contributions directes et ce en partie à une époque où la Société aurait eu des difficultés financières, le demandeur précisant qu’il n’aurait fait état dans sa réclamation devant le directeur de seulement 11 paiements.

Dans ce cadre, il explique que plusieurs demandes circonstanciées auprès de l’administration auraient été introduites par l’un des autres anciens administrateurs, en l’occurrence Monsieur … , et s’offusque du fait que l’administration le rendrait néanmoins responsable de l’ensemble des impôts sur les salaires qui seraient restés ouverts sur les années 2012, 2013, 2014 et 2015, par voie de bulletins d’appel en garantie personnelle.

Il donne à considérer que l’hésitation de l’administration serait démontrée par le fait que cette dernière aurait transmis dans une première communication du directeur par courriel adressé à son litismandataire au courant du mois de septembre 2019 une liste informatique avec certaines imputations, laquelle serait complètement différente de celle qui aurait été présentée dans un courriel du directeur à son litismandataire le 11 novembre 2019. Il insiste sur le fait que cette seconde liste susciterait plusieurs questions quant au solde des impôts dus sur les salaires pour les années litigieuses, ainsi que concernant l’imputation des 14 paiements, quin’auraient pas été correctement pris en compte dans le glissement mensuel et annuel par l’administration, c’est-à-dire à décharge des impôts sur salaires redus par la Société.

Le demandeur en conclut qu’il souffrirait d’un préjudice évident, en étant exposé à une charge personnelle du fait de deux appels en garantie à son encontre, lesquels se seraient matérialisés depuis environ une année et demie par des sommations à tiers détenteurs notifiés par l’administration auprès de son employeur actuel, le privant ainsi d’une bonne partie de son salaire net dont il aurait besoin pour vivre.

Le demandeur conteste ensuite avoir été administrateur, et a fortiori administrateur exécutif, directeur ou fondé de pouvoir de la Société, et plus généralement d’avoir porté une quelconque responsabilité pendant toute l’époque à laquelle se seraient référés les bulletins d’appel en garantie. A cet égard, il estime que les deux bulletins litigieux auraient contenu une motivation plutôt stéréotypée et n’auraient démontré concrètement aucune faute dans son chef.

Il considère que ni les bulletins litigieux ni la décision directoriale précitée n’auraient pris en considération le fait que premièrement, il n’aurait autorisé le renouvellement de son mandat comme administrateur de la Société, ni au préalable ni ex post, et deuxièmement, qu’il n’aurait jamais exercé cette fonction de fait à la période visée par les bulletins litigieux.

Ainsi, il n’aurait jamais fait d’acte conservatoire, d’administration ou de disposition pour la Société, y compris avant l’assemblée générale au cours de laquelle il aurait été nommé une nouvelle fois à cette fonction.

En se référant aux dispositions spécifiques à ce sujet dans la loi coordonnée sur les sociétés commerciales, il estime encore qu’une personne agissant en sa qualité d’administrateur serait obligée de préciser cette qualité sur tout document qu’elle signe, tout en précisant qu’il n’existerait pas un tel document signé de sa part et dans lequel il se présenterait en sa qualité d’administrateur de la Société.

Le demandeur reproche à l’administration l’absence de motivation des bulletins d’appel en garantie, alors que ces derniers auraient été établis sur base de la seule considération des publications au Mémorial C, lesquels ne lui seraient d’ailleurs pas opposables.

Dans la mesure où sa responsabilité pour le paiement des soldes des impôts sur le revenu ne serait pas démontrée, le demandeur conclut dès lors qu’il y aurait lieu de les rabattre, sinon de les annuler ou de les réformer en ce sens.

Le demandeur réitère encore que les bulletins d’appel en garantie litigieux seraient assis sur des chiffres douteux et pas clairs, alors qu’il aurait noté des erreurs dans les imputations des paiements effectués par la Société avant la faillite de cette dernière.

Dans ce contexte, il donne à considérer que pendant les trois années précédant les difficultés financières de la Société desquelles aurait découlé sa faillite, la Société aurait déjà connu de nombreux problèmes de rentrées d’argent dus à des retards importants dans la réception de travaux effectués pour l’Etat luxembourgeois.

Alors qu’il aurait manqué plus d’un million d’euros facturés dans les caisses de la Société, somme qui lui aurait permis de payer l’ensemble de ses impôts dus, le demandeur relève que l’ensemble des paiements périodiques par la Société aurait été effectué pour régleren premier lieu les impôts sur salaires. Il précise à cet égard que ces informations lui auraient été transmises par les dirigeants de la Société après sa mise en faillite, la connaissance de cette information ne devant dès lors pas être interprétée comme une participation de sa part à l’administration de la Société.

Le demandeur fait valoir que l’administration aurait imputé une partie desdits paiements sur d’autres impôts, sans préciser ou en expliquer la méthode, ou encore la base légale, mais seulement par référence à l’AO et au Code civil, de sorte qu’il en résulterait que les bulletins d’appel en garantie déférés, en ce qui concerne le solde des impôts sur salaires pour les années 2012, 2013, et 2014, serait basé sur des chiffres erronés. Il en conclut qu’il y aurait lieu de vérifier de manière transparente si sa responsabilité personnelle devrait être engagée et motiver la décision corolaire.

Il fait encore plaider qu’une personne appelée en garantie personnelle aurait le droit de questionner les imputations de paiements qui auraient été faites par le débiteur principal en l’occurrence la Société, de faire ses observations, de vérifier les imputations de paiements, sinon de les faire vérifier d’office, et finalement de savoir comment elles auraient été faites par l’administration. Cela n’aurait pas été le cas le concernant, alors que les deux bulletins d’appel en garantie personnelle déférés se contrediraient eux-mêmes par leurs chiffres, raison pour laquelle il demande la vérification de l’imputation de l’ensemble des montants payés, respectivement mentionnés sur lesdits bulletins, et le cas échéant, à ce qu’ils soient rectifiés, redressés, rabattus, sinon annulés.

A titre subsidiaire, dans l’hypothèse où il serait reconnu comme étant en droit, sinon en fait, administrateur depuis le 9 décembre 2009, et ainsi tenu pour responsable, le demandeur estime que les deux bulletins d’appel en garantie devraient être ramenés à de plus justes proportions, en ce qu’après vérifications des imputations sur la dette d’impôts sur salaires de tous les paiements que la Société aurait effectués auprès de l’administration, uniquement le solde devrait être reporté.

En s’appuyant sur les articles 1254 à 1256 du Code civil, et sur un jugement du tribunal administratif du 14 juillet 2016, inscrit sous le numéro 36450 du rôle, le demandeur fait valoir que pour les paiements qui ne porteraient pas la mention « impôts sur salaires », il faudrait appliquer le droit spécifique des imputations. Il souligne, d’une part, que les dispositions de l’article §123 AO ne seraient pas contraires auxdites dispositions du Code civil, mais seraient complémentaires, et d’autre part, que l’article 1254 du Code civil primerait sur l’article §123 AO, qui ne viserait explicitement ni les impôts sur salaires, ni le cas où des impôts sur salaires auraient été redus en même temps que d’autres impôts redus par la Société.

Le demandeur souligne qu’il ne serait pas en mesure de connaître les faits concrets, dans la mesure où l’administration ne lui aurait jamais clairement expliqué la façon dont elle aurait imputé les quatorze paiements discutés.

Selon lui, ces principes d’ordre public seraient une protection de « l’administration appelée en garantie » contre l’arbitraire. Il ajoute que le directeur aurait répondu dans sa décision du 14 avril 2021 à cette question en « une seule phrase opaque », et ne révélant pas au lecteur la raison concrète pour laquelle les paiements litigieux ne concerneraient pas des retenues d’impôt sur les traitements et salaires échues. Le demandeur s’étonne de l’analyse du directeur en ce qu’il aurait indiqué dans la décision déférée qu’il aurait fallu vérifier l’imputation sur des retenues échues depuis le 7 juillet 2014, alors qu’il serait question de paiements se situant entre le 29 juin 2010 et le 4 juin 2014 et que le premier bulletin d’appelen garantie émis à son encontre daterait justement du 7 juillet 2014. Il en conclut qu’il y aurait dès lors un défaut de motivation de la part du directeur dans la décision déférée, ce qui impliquerait la nécessité de vérifier des dettes échues à charge de la Société, respectivement de la sienne.

Le demandeur en conclut qu’il y aurait lieu de réformer la décision directoriale du 14 avril 2021 précitée.

Dans son mémoire en réplique, le demandeur fait valoir, que contrairement aux développements du délégué du gouvernement, il aurait expressément mentionné dans sa réclamation du 1er octobre 2020, ne pas avoir été administrateur exécutif ou directeur de la Société à l’époque concernée.

En se référant au jugement du tribunal administratif du 12 mars 2019, inscrit sous le numéro 39933 du rôle, et à l’arrêt de la Cour administrative du 2 octobre 2018, inscrit sous le numéro 41058C du rôle, le demandeur conteste l’appréciation du délégué du gouvernement quant aux faits à l’origine de la présente affaire, et souligne particulièrement qu’il n’aurait été que l’un des membres d’un conseil d’administration composé d’un organe de trois personnes, dans lequel les deux autres auraient dû gérer en fait la Société.

Il fait valoir qu’il serait déjà arrivé en pratique que l’un des membres d’un conseil d’administration aurait été nommé à son insu, et sans son accord, ni préalable, ni postérieur.

En s’appuyant sur les lois civiles relatives au mandat et la loi coordonnée sur les sociétés commerciales, il conclut que la conséquence serait qu’une personne nommée administrateur à son insu, et sans son accord postérieur, ne pourrait pas devenir mandataire, alors qu’il estime que selon les mécanismes du droit civil des obligations, un contrat de mandat ne pourrait se former que par une offre et une acceptation. Dans ce cadre, il s’étonne que le délégué du gouvernement ne prendrait pas position sur ce point.

Il fait ensuite plaider que les juges pourraient voir dans le dossier un faisceau d’indices laissant conclure qu’il aurait été placé dans une telle fonction sans le savoir au début, aucun élément n’établissant qu’il aurait été, ne serait-ce que, tacitement d’accord avec un tel mandat.

Dans la mesure où un contrat de mandat ne pourrait pas exister sans l’accord du mandaté, l’Etat ne pourrait faire valoir une responsabilité personnelle de sa part.

Le demandeur conteste encore l’applicabilité des jurisprudences opposées par le délégué du gouvernement dans son mémoire en réponse, alors que, d’une part, il aurait démontré avoir expressément contesté avoir la qualité de dirigeant social, et d’autre part, ces jurisprudences n’auraient pas trait à la question de savoir qui aurait été à l’origine de la publication de sa nomination au registre de commerce et des sociétés ainsi que dans le Mémorial C. A cet égard, il conteste avoir été à l’origine de ces publications, et souligne que le délégué du gouvernement ne rapporterait pas la preuve contraire, ce qui selon lui, renforcerait davantage sa crédibilité et établirait qu’il n’aurait « pas vraiment » été au courant de sa nomination, en dehors du fait qu’elle n’aurait été suivie d’aucun commencement d’exercice de la fonction.

Il donne encore à considérer que le droit luxembourgeois ne prévoirait pas la formalité obligatoire de l’accord donné par écrit par un mandataire social avant sa nomination, même si certains le pratiqueraient parfois ainsi, y compris certaines études notariales. Il souligne qu’iln’appartiendrait pas à celui qui aurait été nommé à son insu de prendre l’initiative de donner son accord, faute d’avoir été informé.

Le demandeur fait encore valoir que le fait de nommer quelqu’un à son insu, sans le contacter par la suite pour l’en informer, serait une parfaite indélicatesse de la part d’une société, ce qui serait par ailleurs un fait sans qualification pénale. Dans ce cadre, il ajoute que la question de savoir si le motif de l’absence d’une plainte devrait en pareille matière être déterminant, devrait dépendre de l’appréciation de la question considérée dans sa globalité, sinon la question se réduirait à savoir si une nomination non désirée ne serait pas quand même publiée au Mémorial C, ou au registre de commerce et des sociétés.

Il considère que cela ne serait pas un motif déterminant, ce qui résulterait in concreto de l’analyse des juges dans le jugement du tribunal administratif du 12 mars 2019, inscrit sous le numéro 39933 du rôle, et l’arrêt de la Cour administrative du 2 octobre 2018, inscrit sous le numéro 41058C du rôle. Le demandeur insiste sur le fait qu’en tant que simple employé de la Société sans faire partie de la direction, et sans fonction supérieure, rien dans le dossier ne démontrerait qu’il aurait été informé de sa nomination, ou qu’il l’aurait acceptée. A cet égard, il souligne ne pas savoir comment rapporter une preuve négative, alors qu’il n’aurait pas été au courant de sa nomination en tant qu’administrateur de la Société, tout en précisant qu’en tant que simple citoyen résidant français, il ne vérifierait pas tous les jours s’il a été nommé administrateur d’une société au Mémorial C ou au Registre de commerce et des sociétés. Il estime qu’il appartiendrait aux personnes qui occuperaient régulièrement des postes d’administrateurs dans des sociétés de faire ce genre de vérifications.

En s’appuyant sur le paragraphe (2) de la loi d’adaptation fiscale du 16 octobre 1934, dite « Steueranpassungsgesetz », en abrégé « StAnpG », tel que mentionné dans le jugement du tribunal administratif du 12 mars 2019 précité, le demandeur donne à considérer que le fait de rechercher la responsabilité personnelle d’un salarié d’une entreprise, qui aurait été nommé administrateur à son insu, sur la seule base du fait qu’il aurait dû lire le Mémorial C pour réclamer contre sa nomination, paraîtrait dépasser les critères légaux d’équité et d’opportunité qui seraient appliqués par la jurisprudence.

Le demandeur réfute encore, dans ce contexte, les affirmations du délégué du gouvernement selon lesquelles il chercherait à contourner les dispositions du paragraphe 119 AO, alors même que cette disposition lui permettrait de faire valoir ses droits aux vues des circonstances, de sorte que ce moyen de la partie étatique serait à rejeter. Dans ce cadre, il soutient qu’il ne saurait lui être opposé que la Société n’aurait jamais contesté un décompte, et que cela ne serait pas un motif valable pour le priver du droit de faire valoir son argumentation, alors même qu’il n’aurait pas été dans ses attributions de vérifier les décomptes fiscaux de l’administration à la Société.

Il conteste aussi l’argumentation du délégué du gouvernement selon laquelle les imputations ne seraient pas à vérifier, car elles dateraient d’avant le 7 juillet 2014, alors qu’il serait constant en cause que l’administration lui réclamerait des impôts concernant les salaires des années 2012, 2013, 2014 et 2015, et que les paiements concerneraient les années 2010, 2011, 2012, 2013 et 2014, de sorte que ce reproche serait à écarter.

Enfin, le demandeur s’interroge sur les raisons pour lesquelles l’administration n’aurait pas vérifié le montant desdites imputations, et les conséquences des paiements effectués par laSociété sur le montant de l’impôt sur les salaires qui sont réclamés dans le bulletin d’appel en garantie, alors que celui-ci devrait diminuer suite auxdits paiements.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours pour ne pas être fondé.

A titre tout à fait liminaire, il échet de rappeler que le tribunal vient de déclarer le recours irrecevable dans la mesure où il est dirigé directement contre les bulletins d’un appel en garantie des 7 juillet 2014 et 30 juin 2020, de sorte que les moyens tendant à l’annulation desdits bulletins sont d’ores et déjà à écarter.

Le tribunal constate ensuite que suivant une bonne administration de la justice et l’effet utile s’en dégageant, il appartient d’abord au tribunal de vérifier d’abord la légalité extrinsèque de l’acte lui déféré, avant de se livrer, par le biais de l’examen de la légalité des motifs, au contrôle de la légalité intrinsèque.

Si, en l’espèce, le demandeur critique la légalité externe de la décision directoriale déférée, en soutenant, comme relevé ci-dessus, que la motivation à la base de ladite décision serait insuffisante afin de lui permettre de comprendre la raison justifiant qu’il devrait procéder au règlement de la dette fiscale en question, le tribunal, pour sa part, constate que la décision sur réclamation du 14 avril 2021, telle que citée in extenso ci-avant, mentionne de manière circonstanciée les éléments de fait et de droit justifiant aux yeux du directeur que Monsieur … soit déclaré codébiteur solidaire de la dette fiscale de la Société, la question du bien-fondé de ces motifs relevant de l’examen au fond du recours. Le directeur a, en substance, retenu qu’il se dégageait d’une publication au Mémorial C numéro 354 du 17 février 2010 que le demandeur a été nommé administrateur de la Société et qu’en cette qualité, il aurait commis une faute en omettant sciemment de verser l’impôt dû par la Société sur les traitements et salaires de son personnel pour les années 2014 et 2015 et en empêchant de ce fait la perception de l’impôt légalement dû. Le directeur a encore mis en exergue qu’une prétendue faute d’un tiers n’entrerait en ligne de compte qu’au stade du recours entre les coresponsables, tout en précisant que l’administrateur responsable sur le fondement du paragraphe 109 AO ne pourrait s’opposer à une poursuite au motif qu’elle n’aurait pas été engagée contre d’autres personnes solidairement responsables des mêmes dettes.

Le tribunal relève, par ailleurs, que les motifs gisant à la base des appels en garantie émis à l’encontre du demandeur figurent encore dans le bulletin d’appel en garantie du 30 juin 2020, lequel précise également qu’il aurait été nommé administrateur de la Société, tel que ceci résulte d’une part, d’une publication au Mémorial C numéro 995 du 13 mai 2009, et d’autre part, d’une seconde publication au Mémorial C numéro 354 du 17 février 2010 et que par conséquent, il aurait disposé du pouvoir d’engager la Société sous sa signature conjointe à partir du 21 avril 2009, respectivement du 9 décembre 2009. Le bulletin précise encore qu’aux termes du paragraphe 103 AO, le demandeur aurait été, en sa qualité d’administrateur, personnellement tenu de l’accomplissement de toutes les obligations fiscales incombant à la Société, dont notamment le paiement des impôts dus par la Société à l’aide des fonds administrés. Par ailleurs, conformément aux paragraphes 103 et 108 AO, le demandeur aurait été personnellement responsable de l’accomplissement de toutes les obligations fiscales incombant à la Société en faillite, dont notamment le paiement des impôts dus par la Société en faillite à l’aide des fonds administrés. Selon le bulletin d’appel en garantie litigieux du 30 juin 2020, le demandeur aurait omis pendant la période couvrant les années 2014 et 2015 de retenir, de déclarer et de verser la retenue d’impôt due sur les traitements et les salaires du personnel, de sorte que des retenues d’impôts d’un montant de … euros, y inclus les intérêts,seraient restées en souffrance, le bulletin d’appel en garantie précisant, d’ailleurs, encore qu’en sa qualité de codébiteur solidaire, un appel en garantie aurait également été adressé à Monsieur …. . Le tribunal souligne à cet égard que ces motifs, figurant dans le bulletin d’appel en garantie en question, participent à la motivation de la décision du directeur du 14 avril 2021, dans la mesure où ce dernier, à travers sa décision, a expressément confirmé ledit bulletin d’appel en garantie.

Le moyen de Monsieur …, basé sur un défaut de motivation suffisante de la décision directoriale déférée, ainsi que des bulletins d’appel en garantie, est dès lors à rejeter.

Quant à la légalité interne de la décision litigieuse, il convient d’abord de relever que le tribunal n’est pas lié par l’ordre des moyens dans lequel ils lui ont été soumis et il détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et l’effet utile s’en dégageant.

Concernant de prime abord le premier volet de la décision déférée, ayant déclaré la réclamation sans objet dans la mesure où elle visait le bulletin d’appel en garantie du 7 juillet 2014, et plus particulièrement la régularité d’une notification et ses effets, il y a lieu de se référer au paragraphe 91 AO qui prévoit ce qui suit: « Verfügungen (Entscheidungen, Beschlüsse, Anordnungen) der Behörden für einzelne Personen werden dadurch wirksam, dass sie demjenigen zugehen, für den sie ihrem Inhalt nach bestimmt sind (Bekanntgabe).

Öffentliche Bekanntmachung oder Auslegung von Listen genügt, wo sie nach den Steuergesetzen zugelassen ist. Zustellung ist nur erforderlich, wo sie ausdrücklich vorgesehen ist ».

Il se dégage de cette disposition que les effets d’une décision administrative en matière fiscale sont limités à la situation juridique à laquelle la décision se rapporte. En outre, pour que la décision puisse prendre effet (« wirksam werden »), elle doit être portée régulièrement à la connaissance (« bekanntgeben ») de la personne à laquelle elle est destinée (« demjenigen für den sie bestimmt ist; an den sie gerichtet ist »). En d’autres termes, la décision administrative en matière fiscale ne devient opposable à son destinataire que lorsqu’elle est régulièrement notifiée, une prise de connaissance du contenu de la décision par son destinataire par une autre voie ne pouvant pas être assimilée à une notification d’après les termes exprès du paragraphe 91 AO.

La notification régulière implique que la décision en cause soit non seulement communiquée dans l’une des formes admises par la loi, mais également que l’administration prenne les dispositions administratives nécessaires pour que la communication de la décision en question parvienne directement dans le ressort du destinataire pour que celui-ci soit utilement mis en mesure d’en prendre connaissance.

S’agissant des modalités de notification d’un bulletin, il convient de relever qu’en vertu de l’article 1er du règlement grand-ducal du 24 octobre 1978, en sa version applicable au moment de l’établissement du bulletin litigieux : « Les bulletins qui fixent une cote d´impôt, ceux qui établissent séparément une valeur unitaire ou des revenus d´une certaine catégorie, ceux qui fixent la base d´assiette d´un impôt réel et ceux qui appellent en garantie un tiers responsable du paiement de l´impôt peuvent être notifiés aux destinataires qui demeurent au Grand-Duché par simple pli fermé à la poste. Il en est de même des bulletins qui ventilent une cote d´impôt ou une base d´assiette entre plusieurs communes ».

Il se dégage de l’article 2 du même règlement grand-ducal que la « notification par simple lettre est présumée accomplie le troisième jour ouvrable qui suit la remise de l’envoi à la poste à moins qu’il ne résulte des circonstances de l’espèce que l’envoi n’a pas atteint le destinataire dans le délai prévu ».

La jurisprudence des juridictions administratives a encore retenu, s’agissant des dispositions du règlement grand-ducal du 24 octobre 1978 en sa version applicable au moment de l’établissement du bulletin litigieux, qu’au cas où l’administration des Contributions directes entend communiquer par la voie postale un bulletin de l’impôt à un contribuable qui ne réside pas au Luxembourg et qu’elle ne l’a pas invité à désigner un mandataire fiscal résident conformément au paragraphe 89 AO, elle doit l’opérer moyennant un envoi recommandé1.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que faute de notification régulière d’un bulletin d’appel en garantie, en l’occurrence moyennant l’envoi d’un recommandé, au sens du paragraphe 91 AO, ledit bulletin ne sera pas exécutoire.

Or, en l’espèce, le tribunal constate qu’il se dégage des éléments à sa disposition que le bulletin d’appel en garantie du 7 juillet 2014 précité a été envoyé par le bureau d’imposition moyennant l’envoi d’une simple lettre, et non au moyen d’un envoi recommandé, comme ce fut le cas pour le bulletin d’appel en garantie du 30 juin 2020.

Le tribunal relève encore que le directeur constate à juste titre, d’une part, que le bulletin d’appel en garantie du 7 juillet 2014 a été envoyé sous forme de simple pli fermé expédié au demandeur à une adresse en France, et d’autre part, qu’il ne ressort pas du dossier fiscal que le demandeur aurait été sollicité afin de désigner un mandataire fiscal, de sorte que le paragraphe 88 AO est applicable, et que, le bulletin litigieux n’étant pas exécutoire, c’est à bon droit que le directeur a déclaré la réclamation à son encontre comme étant sans objet.

En ce qui concerne ensuite le bien-fondé du volet de la décision directoriale litigieuse visant la réclamation contre le bulletin d’appel en garantie du 30 juin 2020, il convient de rappeler qu’en vertu des dispositions de l’article 136, paragraphe (4) de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, ci-après désignée par « LIR », l’employeur est tenu de retenir et de verser l’impôt qui est dû sur les salaires et traitements de son personnel.

Dans le cas d’une société, cette obligation incombant aux employeurs est transmise aux représentants de celle-ci, conformément au paragraphe 103 AO, qui dispose que « die gesetzlichen Vertreter juristischer Personen und solcher Personen, die geschäftsunfähig oder in der Geschäftsfähigkeit beschränkt sind, haben alle Pflichten zu erfüllen, die den Personen, die sie vertreten, obliegen ; insbesondere haben sie dafür zu sorgen, dass die Steuern aus den Mitteln die sie verwalten, entrichtet werden. Für Zwangsgeldstrafen und Sicherungsgelder, die gegen sie erkannt, und für Kosten von Zwangsmitteln, die gegen sie festgesetzt werden, haften neben ihnen die von ihnen vertretenen Personen ».

Dès lors, le représentant d’une société commerciale est tenu de remplir les obligations fiscales incombant à la société et notamment de payer sur les fonds qu’il gère les impôts dont la société est redevable directement, respectivement ceux dont elle est redevable pour compte d’autrui2.

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1 Cour administrative 3 mai 2012, n° 29711C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Impôts n°1066.

2 Trib. adm., 14 mars 2018, n° 38410 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Impôts, n° 566 et les autres références y citées.En l’espèce, force est au tribunal de constater qu’il ressort d’une publication au Mémorial C, n° … du … 2009, que lors de l’assemblée générale extraordinaire des actionnaires du 21 avril 2009, Monsieur … a été nommé aux fonctions d’administrateur de la Société. Il ressort ensuite des extraits du Mémorial C, n° … du … 2010, que le mandat de Monsieur … a été renouvelé, mandat qu’il a exercé, faute de publication contraire, pendant toute la période fiscale litigieuse et jusqu’au jour du prononcé de la faillite de la Société le 23 septembre 2015.

Il ressort, par ailleurs, du dossier fiscal que selon les statuts de la Société, celle-ci est « (…) engagée en toutes circonstances par les signatures conjointes de deux administrateurs, sans préjudice des décisions à prendre quant à la signature sociale en cas de délégation de pouvoirs et mandats conférés par le conseil d’administration ».

Le tribunal relève par ailleurs que Monsieur … a affirmé dans sa réclamation à l’encontre du bulletin d’appel en garantie déféré devant le directeur « (…) avoir fait partie du conseil d’administration de la société (…) comme simple membre, sans toutefois y figurer comme administratif exécutif, ni comme directeur de l’entreprise (…) », tandis que dans le cadre de son recours, il conteste pour la première fois avoir été au courant du renouvellement de son mandat lors de l’assemblée générale du 9 décembre 2009.

Il s’ensuit tout d’abord que Monsieur … ne peut valablement contester qu’il aurait eu connaissance de sa première nomination en tant qu’administrateur de la Société.

En ce qui concerne le renouvellement de son mandat, c’est à bon droit que le délégué du gouvernement a relevé que le demandeur est en défaut d’établir que ce renouvellement aurait eu lieu à son insu et sans qu’il n’en aurait eu connaissance avant l’émission du bulletin d’appel en garantie litigieux, alors qu’en effet après une première nomination en tant qu’administrateur de la Société, il lui aurait appartenu de vérifier les publications au Mémorial C et celles au registre de commerce et des sociétés afin de s’assurer du sort réservé à son premier mandat, le défaut d’une plainte pénale de sa part dès la prétendue découverte de renouvellement de son mandat renforçant davantage l’absence de crédibilité des développements y afférents du demandeur.

Indépendamment de toute considération quant au rôle et aux pouvoirs exacts du demandeur, il convient dès lors de retenir qu’il a été et n’a pas ignoré avoir été un des représentants de la Société.

Par voie de conséquence, le tribunal est amené à conclure, que Monsieur … avait un droit de signature conjoint avec un autre administrateur, de sorte qu’il avait un droit de contrôle certain sur les activités de la Société.

En tant que personne étant de jure en charge de l’administration de la Société, Monsieur …, conformément au paragraphe 103 AO, était en effet personnellement tenu pendant les périodes correspondant à l’exercice de cette fonction, à l’accomplissement de toutes les obligations fiscales incombant à la Société, de sorte qu’il était obligé de retenir, lors du paiement des salaires, l’impôt sur les salaires, ainsi que de le verser au trésor public.

Quant à la mise en œuvre de la responsabilité personnelle du représentant d’une personne morale du fait du défaut de paiement des impôts dont est redevable cette personne morale, le paragraphe 109, alinéa (1) AO précise que : « Die Vertreter und die übrigen in den §§ 103 bis 108 bezeichneten Personen haften insoweit persönlich neben dem Steuerpflichtigen, 20 als durch schuldhafte Verletzung der ihnen in den §§ 103 bis 108 auferlegten Pflichten Steueransprüche verkürzt oder Erstattung oder Vergütung zu Unrecht gewährt worden sind. ».

Ces dispositions légales mettent ainsi une obligation personnelle à charge des représentants légaux de la société, en ce compris, conformément au paragraphe 108 AO, les dirigeants de fait ou dirigeants apparents, c’est-à-dire ceux qui se comportent, à l’égard des tiers, comme s’ils avaient le pouvoir de disposer. A contrario, les personnes non visées par ces dispositions ne sont pas soumises à cette responsabilité personnelle.

Il se dégage encore de ces dispositions légales que le simple constat d’un manquement à une obligation fiscale découlant du paragraphe 103 AO précité n’est pas suffisant pour engager la responsabilité personnelle des dirigeants d’une société en application du paragraphe 109, alinéa (1) AO et pour voir émettre à leur encontre un bulletin d’appel en garantie, le législateur ayant en effet posé à cet égard l’exigence supplémentaire d’une inexécution fautive (« schuldhafte Verletzung ») des obligations du représentant de la société envers l’administration fiscale3.

Ces dispositions légales mettent ainsi une obligation personnelle à charge des représentants légaux de la société et a fortiori à charge de l’administrateur d’une société anonyme.

Le paragraphe (7), alinéa 3) de la loi d’adaptation fiscale modifiée du 16 octobre 1934, maintenue en vigueur par StAnpG, disposant par ailleurs que « Jeder Gesamtschuldner schuldet die ganze Leistung. Dem Finanzamt steht es frei an welchen Gesamtschuldner es sich halten will. Es kann die geschuldete Leistung von jedem Gesamtschuldner ganz oder zu einem Teil fordern », le pouvoir du bureau d’imposition d’engager une poursuite contre un tiers responsable, et, plus particulièrement, contre le représentant d’une société, ne relève pas d’une compétence liée, mais constitue un pouvoir d’appréciation dans son chef et ce à un double titre, d’abord en ce qui concerne l’appréciation du degré fautif du comportement de la personne visée, et, ensuite, en ce qui concerne le choix du ou des codébiteurs contre lesquels l’émission d’un bulletin d’appel en garantie est décidée, chaque fois compte tenu des circonstances particulières de l’espèce.

En cas de pluralité de responsables, la possibilité de poursuivre simultanément tous les responsables résulte implicitement du paragraphe 7 StAnpG qui dispose que ceux qui sont poursuivis en qualité de responsables sont tenus solidairement. Le bureau d’imposition n’est, par contre, pas obligé de poursuivre tous les co-responsables et peut limiter son recours contre un ou plusieurs d’entre eux. En toute hypothèse, il appartient au bureau d’imposition de relever les circonstances particulières qui ont déterminé son choix4.

Conformément au paragraphe (2) StAnpG disposant que « Entscheidungen, die die Behörden nach ihrem Ermessen zu treffen haben (Ermessens-Entscheidungen) müssen sich in den Grenzen halten, die das Gesetz dem Ermessen zieht. (2) Innerhalb dieser Grenzen sind Ermessens-Entscheidungen nach Billigkeit und Zweckmässigkeit zu treffen », l’administration investie d’un pouvoir d’appréciation doit procéder selon des considérations d’équité et d’opportunité et partant se livrer à une appréciation effective et explicite des circonstances particulières susceptibles, en raison et en équité, de fonder sa décision.

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3 Cour adm., 23 mai 2017, n° 39050C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Impôts, n° 565 et 566 et les autres références y citées.

4 Trib. adm., 14 juin 2010 n° 26277 du rôle, confirmé par arrêt du 6 janvier 2011, n° 27126C du rôle, Pas. adm.

2022, V° Impôts, n° 541 et 546.

En l’espèce, Monsieur … entend s’exonérer de toute responsabilité éventuelle, en excipant du fait qu’il n’aurait eu aucun pouvoir décisionnel au sein de la Société, alors même que son mandat d’administrateur aurait été renouvelé à son insu, et que la Société aurait été exclusivement gérée par les autres administrateurs, lesquels auraient été chargé de veiller au respect des obligations dont la violation lui est actuellement personnellement reprochée, le demandeur donnant à considérer qu’il n’aurait jamais, d’une part, autorisé ladite nomination, et d’autre part, exercé cette fonction y compris en accomplissant un quelconque acte conservatoire, d’administration ou de disposition pour le compte de la Société. A l’appui de son argumentation, le demandeur fait valoir n’avoir jamais signé la moindre lettre en qualité d’administrateur, ou encore fait une communication en se présentant sous ce titre.

Or, il ne ressort pas des pièces et éléments soumis à l’examen du tribunal et notamment des publications au registre de commerce et des sociétés, une quelconque restriction de pouvoir à l’égard du demandeur, mais il ressort au contraire, du dossier fiscal, et comme constaté ci-

avant, qu’il était un des représentants légaux de la Société, et, ensemble avec les autres administrateurs désignés, en charge de son administration, dont fait partie l’accomplissement des obligations fiscales incombant à la Société et notamment le paiement, sur les fonds de la société, des impôts dont elle est redevable directement, respectivement de ceux dont elle est redevable pour compte d’autrui.

A cet égard, il convient de relever qu’alors même que le demandeur conteste avoir accepté sa fonction, il ne peut pas se contenter de contester son pouvoir de signature conjointe avec un autre administrateur, respectivement sa nomination même au poste d’administrateur, et ce, notamment comme le souligne le délégué du gouvernement, en l’absence d’une plainte dirigée par lui contre les deux autres administrateurs qu’il accuse d’avoir renouvelé son mandat d’administrateur sans son accord, étant relevé qu’il n’est pas censé ignorer les conséquences légales découlant de sa fonction d’administrateur de la Société telle que sa nomination ressort du registre de commerce et des sociétés dont les publications sont opposables erga omnes. En effet, en n’exécutant pas les obligations légales de la société, il manque à son premier devoir, celui d’administrer5.

Il convient toutefois de rappeler, que les administrateurs sont en tout état de cause responsables d’un défaut de surveillance du délégué à la gestion journalière6. Par ailleurs, il est admis que les administrateurs sont nommés parce que l’on attend d’eux la compétence nécessaire pour l’accomplissement de leurs fonctions, de sorte qu’actifs et non-actifs répondent de leurs actes de la même façon. Ni une éventuelle incompétence technique, ni le motif philanthropique pour lequel il aurait accepté sa mission, ni d’éventuelles absences au sein du conseil ne pourraient limiter la responsabilité d’un administrateur7, le fait de ne pas exercer ses fonctions dans la société étant en soi une faute de gestion8. En effet, la faute n’implique pas seulement de la part de l’administrateur un agissement actif. La responsabilité de l’administrateur peut être engagée par son attitude passive, sa négligence, son incurie9; aussi,

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5 en ce sens trib. adm. 19 mars 2014, n° 32140 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Impôts n°577 et les autres références y citées.

6 Voir notamment P. Berna, Le statut des administrateurs de sociétés anonymes, Bulletin du Cercle François Laurent, 1987, II, p.36 7 D. Matray, Observations sur la responsabilité dans la constitution et la gestion des sociétés, notes n° 211, 212 et 213, dans : Chroniques de droit à l’usage du Palais, Tome VII, Le droit des sociétés, 1989.

8 Ibidem, note n° 214.

9 P.Thielen et J. Delvaux, La responsabilité civile des administrateurs de sociétés anonymes en droit luxembourgeois - situation actuelle et tendance future, Bulletin Droit et banque, 4/1948, p.6, et N. Schaeffer,le comportement du demandeur, consistant en une légèreté ou une insouciance particulière doit être considéré comme faute grave, à savoir une faute qu’un dirigeant raisonnablement diligent et prudent n’aurait pas commise et qui heurte les normes essentielles de la vie en société, ou du moins les normes importantes10.

Il s’ensuit que le demandeur ne saurait valablement minimiser voire rejeter sa responsabilité en se retranchant derrière le fait que la gestion journalière de la société aurait prétendument été exercée par les deux autres administrateurs et qu’il n’aurait été que l’un des membres d’un conseil d’administration composé, donc d’un organe de trois personnes, dans lequel les deux autres membres géraient en fait la Société, alors qu’il est rappelé que les statuts prévoient en leur article 11 que « La société est engagée en toutes circonstances par les signatures conjointes de deux administrateurs, sans préjudice des décisions à prendre quant à la signature sociale en cas de délégation de pouvoirs et mandats conférés par le conseil d’administration en vertu de l’article 10 des statuts. », de sorte que le demandeur disposait en tant qu’administrateur d’un pouvoir de signature plus ou moins étendu vis-à-vis des tiers.

Il s’ensuit qu’il y a lieu d’admettre, à l’instar de ce qui a été retenu par le directeur, que Monsieur …, en sa qualité d’administrateur de la Société, est personnellement responsable des insuffisances dans le règlement de l’impôt qui sont la conséquence de son comportement fautif, à savoir son défaut caractérisé d’avoir veillé à continuer pendant la période en question l’impôt retenu sur les salaires au trésor public.

Force est encore de constater que le demandeur n’a, de son côté, pas utilement renversé les conclusions du directeur à cet égard, et qu’il est resté en défaut d’énerver concrètement les faits relevés par le directeur visant à conclure au caractère fautif de son comportement en tant qu’administrateur ayant effectivement été nommé au conseil d’administration de la société en question.

Le tribunal est dès lors amené à retenir que les explications fournies en l’espèce par la partie gouvernementale permettent à suffisance, au regard des exigences posées par le paragraphe 109 AO et par le paragraphe 2 StAnpG, de justifier le constat d’un comportement fautif dans le chef du demandeur. C’est dès lors à bon droit que le bureau d’imposition a retenu une faute à charge de ce dernier.

Quant aux contestations du demandeur relatives au quantum de la dette fiscale mise à sa charge à travers le bulletin d’appel en garantie litigieux, tel que confirmé par la décision directoriale litigieuse du 14 avril 2021, par l’intermédiaire de l’imputation des paiements, il y a lieu de constater que la responsabilité de Monsieur … a été engagée au titre de l’impôt sur le traitement des salaires des années 2014 et 2015.

A cet égard, il échet de relever que, le paragraphe 119 AO pose le principe que le tiers appelé en garantie peut introduire les mêmes voies de recours et faire valoir les mêmes moyens contre le bulletin d’appel en garantie que ceux dont dispose le débiteur principal de l’impôt, tout en exceptant l’hypothèse où le bulletin émis à l’égard du débiteur principal a autorité de chose décidée et où le tiers appelé en garantie aurait eu la possibilité de réclamer contre ce

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Réflexions sur la responsabilité des administrateurs et dirigeants de sociétés commerciales de capitaux, Bulletin de la Conférence St Yves, n° 77, novembre 1990, p.18.

10 D. Matray, Observations sur la responsabilité dans la constitution et la gestion des sociétés, notes n° 67, 68, 69 et 70, dans : Chroniques de droit à l’usage du Palais, Tome VII, Le droit des sociétés, 1989.bulletin en tant que représentant légal du contribuable principal, cas dans lequel ce bulletin est définitif également à l’égard de la personne appelée en garantie.

Cette faculté de faire valoir les mêmes moyens contre le bulletin d’appel en garantie que ceux à disposition du débiteur principal de l’impôt implique que la personne appelée en garantie est en droit de soulever tant des moyens dirigés contre la décision de l’appeler en garantie, en ce que les conditions afférentes ne se trouveraient pas réunies dans son chef, que des moyens tendant à contester la soumission du débiteur principal à l’impôt ou la cote d’impôt fixée à son égard. Le paragraphe 119 AO est sous cet aspect une application de l’assimilation de la personne appelée en garantie au débiteur même de l’impôt posée par le paragraphe 97, alinéa (2) AO11.

La portée du recours introduit par une personne appelée en garantie d’impôts redus par un autre débiteur principal et partant l’étendue des moyens qu’il peut soulever contre le bulletin d’appel en garantie émis à son égard se trouvent régies par le paragraphe 119 AO qui dispose comme suit :

« (1) Wer neben dem Steuerpflichtigen oder an dessen Stelle persönlich auf Zahlung einer Steuer in Anspruch genommen wird (§ 97 Absatz 2), kann gegen seine Heranziehung die Rechtsmittel geltend machen, die dem Steuerpflichtigen zustehen. Die Frist zur Einlegung des Rechtsmittels beginnt mit Ablauf des Tags, an dem Ihm der Beschluss über seine Heranziehung zugestellt oder, wenn keine Zustellung vorgeschrieben ist, bekannt gemacht worden ist.

(2) Ist die Steuerschuld dem Steuerpflichtigen gegenüber unanfechtbar festgestellt, so hat dies gegen sich gelten zu lassen, wer als Rechtsnachfolger des Steuerpflichtigen haftet oder wer in der Lage gewesen wäre, den gegen den Steuerpflichtigen erlassenen Bescheid als dessen Vertreter, Bevollmächtigter oder kraft eigenen Rechts anzufechten ».

Il n’est dérogé à cette étendue des voies de recours à disposition de la personne appelée en garantie que dans les hypothèses prévues par le paragraphe 119 alinéa (2) AO, dont notamment celle où la personne appelée en garantie était représentant du débiteur principal en temps utile, de manière à avoir été en mesure d’introduire en cette qualité une voie de recours contre le bulletin d’impôt émis à l’égard du débiteur principal, mais que l’absence de recours a emporté l’autorité de chose décidée dans le chef dudit bulletin. Ainsi, si un représentant d’une société omet d’introduire une telle voie de recours en temps utile, il ne saurait conclure par après à une violation de ses droits de la défense.

En l’espèce, la particularité de la situation réside dans le fait que, bien que les impôts en souffrance concernent des retenues d’impôt sur traitements et salaires que l’employeur est tenu, de par la loi, de retenir lors de chaque allocation des rémunérations au personnel, l’impôt y relatif est à verser au trésor public sans l’accomplissement d’une procédure préalable par l’administration compétente, de sorte à ne pas être a priori fixé par voie d’assiette à travers des bulletins d’impôt formels. Il a été jugé que le fait pour l’administration d’accepter le paiement d’un montant déterminé du chef de retenue d’impôts sur revenus de capitaux prélevée sur les revenus distribués et la déclaration afférente de la part du débiteur de revenus de capitaux étant considérée comme constitutive d’un bulletin d’impôt non écrit pris à l’égard du débiteur des revenus de capitaux lui imposant l’obligation de prélever des revenus distribués le montant

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11 Cour adm. 10 mai 2016, n°37313C du rôle, Pas adm. 2022, V° Impôts, n° 536 et les autres références y citées.retenu et de verser ce dernier au Trésor12, ce principe s’appliquant pour toutes les autres retenues à la source en matière d’impôt sur le revenu et plus particulièrement en matière de retenues d’impôt sur les traitements et salaires13.

Pour les bulletins d’impôts informels, comme en l’espèce, le délai de recours de trois mois pour introduire un recours tel que prévu au paragraphe 228 AO commence à courir, dans l’hypothèse où les paiements n’ont pas été effectués en temps utile, à la date de réception de la déclaration des retenues qui doit être considérée comme ayant chiffré pour la première fois la créance d’impôt du trésor public.

En l’espèce, il ressort du dossier administratif que Monsieur … a été nommé aux fonctions d’administrateur de la Société en date du 21 avril 2009, mandat qu’il a exercé, faute de publication contraire, jusqu’au jour du prononcé de la faillite de la Société, le 23 septembre 2015.

Au regard de ces éléments, force est au tribunal de constater que, d’une part, il ressort des éléments soumis à son appréciation qu’aucune contestation à l’égard des décomptes périodiques concernés n’a été portée à sa connaissance, et que, d’autre part, le mandat d’administrateur du demandeur l’a a priori mis en mesure d’exercer les voies de recours légalement prévues contre ledit bulletin.

Les contestations du demandeur quant au quantum de la dette fiscale mise à sa charge à travers le bulletin d’appel en garantie du 30 juin 2020, tel que confirmé par la décision déférée, sont partant à rejeter pour ne pas être fondées.

Au regard de l’ensemble de ces considérations, il y a lieu de rejeter le recours de Monsieur … pour ne pas être fondé dans un quelconque de ses moyens.

Le demandeur sollicite encore l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 1.500,- euros sur le fondement de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999, demande qui est cependant à rejeter vu l’issue du litige.

Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare compétent pour connaître du recours principal en réformation ;

déclare le recours principal en réformation irrecevable dans la mesure où il est dirigé contre les bulletins d’appel en garantie des 7 juillet 2014 et 30 juin 2020 ;

le déclare recevable pour le surplus ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

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12 Tipke-Kruse : Reichsabgabenordnung, 1ère éd. 1961, ad § 212 A 2 ; Jean Olinger : La procédure contentieuse en matière d’impôts directs, Etudes Fiscales nos 81/82/83/84/85, n° 117, p. 73.

13 Cour adm. 27 juillet 2016, n°37634C du rôle, Pas adm. 2022, V° Impôts, n° 536 et les autres références y citées.rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 1.500,- euros sollicitée par le demandeur ;

condamne le demandeur aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 22 septembre 2023 par :

Françoise Eberhard, premier vice-président, Emilie Da Cruz De Sousa, premier juge, Laura Urbany, premier juge, en présence du greffier Marc Warken.

s.Marc Warken s.Françoise Eberhard Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 22 septembre 2023 Le greffier du tribunal administratif 26


Synthèse
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 46219
Date de la décision : 22/09/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 23/09/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-09-22;46219 ?

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