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14/09/2023 | LUXEMBOURG | N°49370

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 14 septembre 2023, 49370


Tribunal administratif N° 49370 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:49370 Chambre de vacation Inscrit le 31 août 2023 Audience publique extraordinaire du 14 septembre 2023 Recours formé par Monsieur … et consorts, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 35 (4), L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 49370 du rôle et déposée le 31 août 2023 au greffe du tribunal

administratif par Maître Michel Karp, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des...

Tribunal administratif N° 49370 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:49370 Chambre de vacation Inscrit le 31 août 2023 Audience publique extraordinaire du 14 septembre 2023 Recours formé par Monsieur … et consorts, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 35 (4), L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 49370 du rôle et déposée le 31 août 2023 au greffe du tribunal administratif par Maître Michel Karp, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à … (Tunisie), agissant en son nom personnel et au nom et pour le compte de son fils mineur …, né le … à Tunis (Tunisie), et de Monsieur …, né le … à …, tous les trois de nationalité tunisienne et demeurant ensemble à L-

…, tendant à la réformation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 25 août 2023 de les transférer vers l’Espagne comme étant l’Etat responsable pour connaître de leurs demandes de protection internationale ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 8 septembre 2023 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision déférée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Elena Frolova, en remplacement de Maître Michel Karp, et Monsieur le délégué du gouvernement Felipe Lorenzo en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique de vacation du 13 septembre 2023.

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Le 2 juin 2023, Monsieur …, accompagné de son fils mineur …, et son fils majeur Monsieur …, ci-après désignés ensemble par « les consorts … », introduisirent auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, ci-après désigné par le « ministère », des demandes de protection internationale au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, désignée ci-après par la « loi du 18 décembre 2015 ».

Le même jour, Monsieur … et Monsieur … furent chacun entendu par un agent du service de police judiciaire, section criminalité organisée - police des étrangers, de la police grand-ducale, sur leur identité et celle du mineur … et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Une recherche effectuée à la même date dans la base de données EURODAC révéla que le fils majeur, Monsieur …, avait franchi irrégulièrement la frontière espagnole le 27 mai 2023.

1Le 5 juin 2023, Monsieur … et Monsieur … furent entendus séparément par un agent du ministère en vue de déterminer l’Etat responsable de l’examen de leur demande de protection internationale en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ci-après désigné par le « règlement Dublin III ».

Le 10 juillet 2023, les autorités luxembourgeoises adressèrent à leurs homologues espagnoles une demande de prise en charge des consorts … sur base de l’article 13, paragraphe (1), du règlement Dublin III, demande qui fut refusée par lesdites autorités espagnoles en date du 17 juillet 2023 au motif qu’il ne ressortirait pas de la « sentencia n° 132/2023 » émise par le juge d’instruction d’… en date du 29 mai 2023 à l’encontre de Monsieur … que ce dernier avait franchi illégalement la frontière espagnole ou qu’il était accompagné de ses enfants lors de son entrée en Espagne, mais qu’il en ressortirait uniquement qu’il avait commis une infraction « against workers ». Il semblerait, par ailleurs, que ses enfants aient déjà été présents sur le territoire espagnol avant son arrivée. Dans un courrier séparé du 17 juillet 2023, les autorités espagnoles informèrent encore les autorités luxembourgeoises que la demande de prise en charge de Monsieur … avait été refusée afin d’éviter la séparation de la famille.

Par courrier du 25 juillet 2023, les autorités luxembourgeoises répondirent aux autorités espagnoles (i) qu’il ressort de la « sentencia n°132/2023 » du 29 mai 2023 que Monsieur … avait été appréhendé par la … dans un bateau proche de la côte de …, à … en Espagne, le 27 mai 2023, (ii) qu’il ressort des recherches effectuées dans la base de données EURODAC que le fils majeur de Monsieur …, Monsieur …, avait également été appréhendé à la même date à … et (iii) que Monsieur … avait déclaré lors de son entretien Dublin III du 5 juin 2023 auprès du ministère avoir quitté le Maroc avec ses deux fils à bord d’une embarcation clandestine afin de rejoindre l’Espagne. Par un courrier séparé du 25 juillet 2023, les autorités luxembourgeoises affirmèrent encore que leur demande de prise en charge de Monsieur … devrait être acceptée et que le principe du respect de l’unité familiale serait respecté, alors qu’en vertu des raisons susmentionnées, les autorités espagnoles seraient également responsables de la prise en charge de Monsieur … et de son fils mineur, ….

Par deux courriers séparés du 25 juillet 2023, les demandes de prise en charge des consorts … furent acceptées par les autorités espagnoles sur base de l’article 13, paragraphe (1), du règlement Dublin III.

Par décision du 25 août 2023, notifiée aux intéressés par lettre recommandée expédiée le 28 août 2023, le ministre informa les consorts … que le Grand-Duché de Luxembourg avait pris la décision de ne pas examiner leurs demandes de protection internationale et de les transférer dans les meilleurs délais vers l’Espagne sur base de l’article 28, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015 et des dispositions de l’article 13, paragraphe (1), du règlement Dublin III, ladite décision étant libellée comme suit :

« […] Vous avez introduit une demande de protection internationale au Luxembourg en date du 2 juin 2023 au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire (ci-après « la loi modifiée du 18 décembre 2015 »). En vertu des dispositions de l’article 28(1) de la loi précitée et des dispositions de l’article 13(1) du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 (ci-après « le règlement DIII »), le Grand-Duché de Luxembourg n’examinera pas votre 2demande de protection internationale et vous serez transférés vers l’Espagne qui est l’Etat membre responsable pour traiter cette demande.

Les faits concernant votre demande, la motivation à la base de la présente décision, les bases légales sur lesquelles elle s’appuie, de même que les informations quant aux voies de recours ouvertes sont précisés ci-après.

En mains le rapport de Police Judiciaire du 2 juin 2023 et les rapports d’entretien Dublin III sur votre demande de protection internationale du 5 juin 2023. En mains également le jugement du tribunal de … n° 132/2023 que vous avez fourni lors de l’introduction de votre demande au Luxembourg.

1. Quant aux faits à la base de votre demande de protection internationale En date du 2 juin 2023, vous avez introduit une demande de protection internationale auprès du service compétent de la Direction de l’immigration.

La comparaison de vos empreintes dactyloscopiques avec la base de données Eurodac ainsi que le jugement du tribunal de … n°132/2023 ont révélé que vous avez franchi irrégulièrement la frontière espagnole en date du 27 mai 2023.

Afin de faciliter le processus de détermination de l’Etat responsable, un entretien Dublin III a été mené en date du 5 juin 2023.

Sur cette base, la Direction de l’immigration a adressé en date du 10 juillet 2023 une demande de prise en charge aux autorités espagnoles sur base de l’article 13(1) du règlement DIII, demande qui fut acceptée par lesdites autorités espagnoles en date du 25 juillet 2023.

2. Quant aux bases légales En tant qu’Etat membre de l’Union européenne, l’Etat luxembourgeois est tenu de mener un examen aux fins de déterminer l’Etat responsable conformément aux dispositions du règlement DIII établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride.

S’il ressort de cet examen qu’un autre Etat est responsable du traitement de la demande de protection internationale, la Direction de l’immigration rend une décision de transfert après que l’Etat requis a accepté la prise ou la reprise en charge du demandeur.

Aux termes de l’article 28(1) de la loi modifiée du 18 décembre 2015, le Luxembourg n’est pas responsable pour le traitement d’une demande de protection internationale si cette responsabilité revient à un autre Etat.

Lorsqu’il est établi, sur la base de preuves ou d’indices tels qu’ils figurent dans les deux listes mentionnées à l’article 22, paragraphe 3, du règlement DIII, notamment des données visées au règlement (UE) n° 603/2013, que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d’un Etat membre dans lequel il est entré en venant d’un Etat tiers, cet Etat membre est responsable de l’examen de la demande de protection internationale, conformément à l’article 13(1) du règlement DIII.

3 Un Etat n’est pas autorisé à transférer un demandeur vers l’Etat normalement responsable lorsqu’il existe des preuves ou indices avérés qu’un demandeur risquerait dans son cas particulier d’être soumis dans cet Etat à un traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 3 de la Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (ci-après la « CEDH ») ou 4 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après « la Charte UE »).

3. Quant à la motivation de la présente décision de transfert En l’espèce, il ressort des résultats du 2 juin 2023 de la comparaison de vos données dactyloscopiques avec celles enregistrées dans la base de données Eurodac que Monsieur … a franchi irrégulièrement la frontière espagnole en date du 27 mai 2023.

Par ailleurs, il ressort du jugement du tribunal de … n°132/2023 que Monsieur … a également été intercepté en entrant illégalement en Espagne en date du 27 mai 2023.

Selon vos déclarations, vous auriez quitté la Tunisie en 2016 pour aller vivre au Maroc.

En date du 27 mai 2023, vous vous seriez rendus ensemble dans un bateau pneumatique en Espagne. Vous y seriez restés pendant seulement trois jours avant de quitter l’Espagne et de partir au Luxembourg en passant par la France. Selon vos dires, vous seriez arrivés au Luxembourg en date du 1er juin 2023.

Lors de vos entretiens Dublin III en date du 5 juin 2023, Monsieur …, vous avez fait mention d’être stressé et mentalement malade. Monsieur …, vous avez déclaré souffrir d’un trouble obsessionnel compulsif.

Cependant vous n’avez fourni aucun élément concret sur votre état de santé ou fait état d’autres problèmes susceptibles d’empêcher un transfert vers l’Espagne qui est l’Etat responsable pour traiter votre demande de protection internationale. Rappelons à cet égard que l’Espagne est liée à la Charte UE et est partie à la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (ci-après « la Convention de Genève »), à la CEDH et à la Convention du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (« Conv. torture »).

Il y a également lieu de soulever que l’Espagne est liée par la Directive (UE) n° 2013/32 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale [refonte] (« directive Procédure ») et par la Directive (UE) n° 2013/33 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale [refonte] (« directive Accueil »).

Soulignons en outre que l’Espagne profite, comme tout autre Etat membre, de la confiance mutuelle qu’elle respecte ses obligations découlant du droit international et européen en la matière.

Par conséquent, l’Espagne est présumée respecter ses obligations tirées du droit international public, en particulier le principe de non-refoulement énoncé expressément à l’article 33 de la Convention de Genève, ainsi que l’interdiction des mauvais traitements ancrée à l’article 3 CEDH et à l’article 3 Conv. torture.

4 Par ailleurs, il n’existe en particulier aucune jurisprudence de la Cour EDH ou de la CJUE, de même qu’il n’existe aucune recommandation de l’UNHCR visant de façon générale à suspendre les transferts vers l’Espagne sur base du règlement (UE) n° 604/2013.

Messieurs, vous n’avez pas non plus démontré que, dans votre cas concret, vos conditions d’existence en Espagne revêtiraient un tel degré de pénibilité et de gravité qu’elles seraient constitutives d’un traitement contraire à l’article 3 CEDH ou encore à l’article 3 Conv. torture.

Relevons dans ce contexte que vous avez la possibilité, dès votre arrivée en Espagne, d’introduire une demande de protection internationale et si vous deviez estimer que les autorités espagnoles ne respectent pas vos droits élémentaires, il vous appartient de saisir les autorités compétentes espagnoles, notamment judiciaires.

Les informations à ma disposition ne sauraient donner lieu à l’application des articles 8, 9, 10 et 11 du règlement DIII.

Il n’existe en outre pas non plus de raisons pour une application de l’article 16(1) du règlement DIII pouvant amener le Luxembourg à assumer la responsabilité de l’examen au fond de votre demande de protection internationale.

Il convient encore de souligner qu’en vertu de l’article 17(1) du règlement DIII (clause de souveraineté), chaque Etat membre peut décider d’examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par le ressortissant d’un pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le règlement, pour des raisons humanitaires ou exceptionnelles. Les autorités luxembourgeoises disposent d’un pouvoir discrétionnaire à cet égard, et l’application de la clause de souveraineté ne constitue pas une obligation.

Il ne ressort pas de l’ensemble des éléments de votre dossier que les autorités luxembourgeoises auraient dû faire application de la clause de souveraineté prévue à l’article 17(1) du règlement DIII. En effet, vous ne faites valoir aucun élément humanitaire ou exceptionnel qui ne serait pas couvert par les dispositions du règlement DIII et qui devrait amener les autorités luxembourgeoises à se déclarer responsables pour le traitement de votre demande de protection internationale.

Pour l’exécution du transfert vers l’Espagne, seule votre capacité de voyager est déterminante et fera l’objet d’une détermination définitive dans un délai raisonnable avant le transfert.

5Si votre état de santé devait temporairement constituer un obstacle à l’exécution de votre renvoi vers l’Espagne, l’exécution du transfert serait suspendue jusqu’à ce que vous seriez à nouveau aptes à être transférés. Par ailleurs, si cela s’avère nécessaire, la Direction de l’immigration prendra en compte votre état de santé lors de l’organisation du transfert vers l’Espagne en informant les autorités espagnoles conformément aux articles 31 et 32 du règlement DIII à condition que vous exprimiez votre consentement explicite à cette fin.

D’autres raisons individuelles pouvant éventuellement entraver la remise aux autorités espagnoles n’ont pas été constatées. […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 31 août 2023, les consorts … ont fait introduire un recours tendant à la réformation de la décision ministérielle, précitée, du 25 août 2023.

Etant donné que l’article 35, paragraphe (4) de la loi du 18 décembre 2015 prévoit un recours en réformation contre les décisions visées à l’article 28, paragraphe (1) de la même loi, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation sous analyse, lequel est encore recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de leur recours, les demandeurs exposent les faits et rétroactes gisant à la base de la décision déférée et notamment les étapes de leur périple les ayant finalement amenés au Grand-Duché de Luxemburg, en expliquant qu’avec ses deux fils dont il aurait la garde, Monsieur … aurait quitté la Tunisie par avion le 11 septembre 2016 pour aller au Maroc, où il aurait d’abord ouvert une petite boutique et ensuite travaillé comme … et où il se serait remarié et aurait eu une fille. Après avoir divorcé en septembre 2022, Monsieur … aurait dû payer une pension alimentaire pour laquelle il n’aurait pas eu les moyens, de sorte qu’il aurait fui le Maroc en bateau avec ses deux fils pour arriver en Espagne le 27 mai 2023, où il aurait été arrêté par les autorités espagnoles et où ses fils auraient été mis dans des foyers. Après son jugement et sa libération de la prison le 30 juin 2023, il aurait quitté l’Espagne avec ses deux fils, via la France jusqu’au Luxembourg, où ils seraient arrivés le 1er juin 2023. Ils ajoutent avoir déclaré lors de leurs entretiens Dublin III du 5 juin 2023 que Monsieur … souffrirait de stress et serait mentalement malade, tandis que son fils majeur, Monsieur …, souffrirait d’un trouble obsessionnel compulsif.

En droit, les demandeurs reprochent d’abord au ministre d’avoir tiré des conclusions hâtives concernant leur situation, et ce alors que le ministre aurait pris sa décision avec précipitation sans avoir procédé à l’évaluation individuelle de leurs demandes de protection internationale telle qu’exigée par l’article 37, paragraphe (5) de la loi du 18 décembre 2015.

Ils reprochent plus particulièrement au ministre de ne pas avoir pris en considération que l’Espagne serait l’une des principales portes d’entrée de l’immigration clandestine en Europe et qu’elle aurait besoin du soutien des autres Etats membres, alors que le nombre de migrants clandestins arrivés sur les côtes de l’Espagne continentale et de l’archipel des Baléares aurait augmenté de 29,22% au premier semestre 2023 par rapport à la même période de l’an dernier. Ils estiment que le ministre se serait « engagé dans un bras de fer avec les autorités espagnoles » lorsque celles-ci avaient refusé le 17 juillet 2023 leur prise en charge sur base de l’article 13, paragraphe (1), du règlement Dublin III, tout en mettant en avant que le jugement n° 132/2023 du Tribunal d’… du 29 mai 2023 ne prouverait pas que Monsieur … serait entré illégalement en Espagne en provenance d’un pays tiers, mais seulement qu’il aurait commis un délit contre les droits des citoyens étrangers pour trafic illégal ou immigration clandestine de personnes en provenance de pays tiers au sens de l’article 318 bis, paragraphe (1), du Code 6pénal espagnol. Ce ne serait dès lors que suite à la pression et à l’insistance des services du ministre, que les autorités espagnoles auraient accepté leur prise en charge en date du 25 juillet 2023.

En se basant sur un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (« CJUE ») du 19 mars 2019, les demandeurs reprochent ensuite au ministre d’avoir violé les articles 4 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, ci-après désignée par « la Charte », et 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, ci-après désignée par « la CEDH », dans la mesure où les autorités espagnoles ne procéderaient pas à l’examen de leurs demandes de protection internationale alors qu’en mai 2023, lors de l’interpellation de Monsieur …, aucune procédure ni aucune aide ne lui aurait été proposées. Ils ajoutent qu’en cas de transfert vers l’Espagne, le ministre devrait garantir qu’ils ne seraient pas renvoyés par les autorités espagnoles vers leur pays d’origine, respectivement qu’ils ne se retrouveraient pas à la rue et sans ressources.

Pour ces mêmes raisons, les demandeurs sont d’avis que le ministre aurait dû faire application de la clause de souveraineté prévue à l’article 17, paragraphe (1), du règlement Dublin III.

Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet du recours pour ne pas être fondé.

Le tribunal relève d’abord qu’il n’est pas tenu de suivre l’ordre dans lequel les moyens sont présentés par une partie demanderesse mais, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, sinon de la logique inhérente aux éléments de fait et de droit touchés par les moyens soulevés, peut les traiter suivant un ordre différent1.

En ce qui concerne d’abord le moyen fondé sur la prétendue non-application par le ministre de l’article 37, paragraphe (5) de la loi du 18 décembre 2015, celui-ci étant invoqué à tort par les demandeurs puisqu’il n’a vocation à s’appliquer que lorsque le ministre procède à l’évaluation individuelle d’une demande de protection internationale, mais non pas lorsque le ministre décide de ne pas examiner une demande de protection internationale dont il estime qu’en application du règlement Dublin III, l’examen revient à un autre Etat membre, alors qu’il résulte de l’article 15, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015, que les dispositions de l’article 37 ne trouvent application que « lors de l’entretien personnel sur le fond d’une demande de protection internationale ».

Le moyen afférent est dès lors rejeté.

En ce qui concerne ensuite la mise en cause de la compétence de l’Espagne, il convient de rappeler qu’aux termes de l’article 28, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015 : « Si, en application du règlement (UE) n°604/2013, le ministre estime qu’un autre Etat membre est responsable de la demande, il sursoit à statuer sur la demande jusqu’à la décision du pays responsable sur la requête de prise ou de reprise en charge. Lorsque l’Etat membre requis accepte la prise en charge ou la reprise en charge du demandeur, le ministre notifie à la personne concernée la décision de la transférer vers l’Etat membre responsable et de ne pas examiner sa demande de protection internationale ».

1 Trib. adm., 21 novembre 2001, n° 12921 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 515 et les autres références y citées.

7Il s’ensuit que si le ministre estime qu’en application du règlement Dublin III, un autre pays est responsable de l’examen de la demande de protection internationale et si ce pays accepte la prise, respectivement la reprise en charge de l’intéressé, le ministre décide de transférer la personne concernée vers l’Etat membre responsable et de ne pas examiner la demande de protection internationale introduite au Luxembourg.

L’article 13, paragraphe (1), du règlement Dublin III, sur lequel le ministre s’est basé pour conclure à la responsabilité des autorités espagnoles pour procéder à l’examen des demandes de protection internationale des consorts …, prévoit que « Lorsqu’il est établi, sur la base de preuves ou d’indices tels qu’ils figurent dans les deux listes mentionnées à l’article 22, paragraphe 3, du présent règlement, notamment des données visées au règlement (UE) n° 603/2013, que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d’un État membre dans lequel il est entré en venant d’un État tiers, cet État membre est responsable de l’examen de la demande de protection internationale. Cette responsabilité prend fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière. ».

Il suit de cette disposition que l’Etat responsable du traitement de la demande de protection internationale est celui dont le demandeur a franchi irrégulièrement la frontière en provenance d’un pays tiers, cette responsabilité prenant fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière.

En l’espèce, il est constant que la décision ministérielle déférée est motivée, d’une part, par le fait que les demandeurs ont franchi illégalement la frontière espagnole le 27 mai 2023, et, d’autre part, par le fait que les autorités espagnoles ont expressément accepté, en date du 25 juillet 2023, de les prendre en charge sur base de l’article 13, paragraphe (1), du règlement Dublin III, de sorte que c’est a priori à bon droit que le ministre a décidé de transférer les demandeurs vers l’Espagne et de ne pas examiner leurs demandes de protection internationale déposée au Luxembourg.

Dans ce contexte, il échet de rejeter les contestations des demandeurs quant à la compétence de l’Espagne pour examiner leurs demandes de protection internationale, alors que si, dans un premier temps, les autorités espagnoles ont effectivement rejeté la demande de prise en charge des autorités luxembourgeoises en date du 17 juillet 2023, elles y ont finalement fait droit sur base des informations communiquées par les autorités luxembourgeoises à travers leur courrier du 25 juillet 2023, à savoir (i) qu’il ressort de la « sentencia n°132/2023 » du 29 mai 2023 que Monsieur … avait été appréhendé par la … dans un bateau proche de la côte …, à …, le 27 mai 2023, (ii) qu’il ressort des recherches effectuées dans la base de données EURODAC que le fils majeur de Monsieur …, Monsieur …, avait également été appréhendé à la même date à … et (iii) que Monsieur … avait déclaré lors de son entretien Dublin III du 5 juin 2023 avoir quitté le Maroc avec ses deux fils à bord d’une embarcation clandestine afin de rejoindre l’Espagne le 27 mai 20232. Dans la mesure où les informations ainsi communiquées n’ont pas valablement été remises en cause par les demandeurs, - étant, au contraire, relevé que tant Monsieur … que Monsieur … ont expressément confirmé lors de leur audition3 devant la police grand-ducale, respectivement lors de leurs entretiens devant le ministère, de même que dans leur recours sous analyse, qu’ils sont entrés tous ensemble clandestinement en Espagne le 27 2 Rapport d’entretien de Monsieur … du 5 juin 2023, page 4/8.

3 Rapport d’audition de police de Monsieur … du 2 juin 2023, page 2/2 : « Nous sommes arrivés en Espagne le 27 mai 2023 » ; « […] Nous sommes ensuite montés à bord d’un zodiac à … pour nous rendre à …[…]. Après avoir été libéré, j’ai quitté l’Espagne avec mes deux fils. […] ».

8mai 20234 -, les contestations afférentes sont à rejeter.

Ensuite, il y a lieu de rappeler que les possibilités légales pour le ministre de ne pas procéder au transfert d’un demandeur de protection internationale, malgré la compétence de principe d’un autre Etat membre, et d’examiner, le cas échéant, sa demande sont prévues, d’une part, par l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2, du règlement Dublin III, non expressément invoqué par les demandeurs, lequel présuppose l’existence de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la Charte auquel cas le ministre ne peut pas transférer l’intéressé dans cet Etat tout en poursuivant la procédure de détermination de l’Etat membre responsable, ainsi que, d’autre part, par l’article 17, paragraphe (1), du même règlement, accordant au ministre la simple faculté d’examiner la demande de protection internationale nonobstant la compétence de principe d’un autre Etat membre pour ce faire.

En l’espèce, les demandeurs considèrent que leur transfert vers l’Espagne serait contraire aux articles 4 de la Charte et 3 de la CEDH au motif qu’ils y risqueraient de subir des traitements inhumains et dégradants, et notamment de s’y retrouver sans ressources et à la rue et d’y être refoulé vers leur pays d’origine, raisons pour lesquelles ils reprochent également au ministre de ne pas avoir fait application de l’article 17 du règlement Dublin III.

S’agissant d’abord de l’existence de défaillances systémiques au sein du système d’accueil espagnol et d’une possible violation de l’article 4 de la Charte - similaire à l’article 3 de la CEDH -, le tribunal est amené à rappeler que l’Espagne est tenue au respect, en tant que membre de l’Union européenne et signataire de ces conventions, des droits et libertés prévus par la CEDH, le Pacte international des droits civils et politiques ou la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi que du principe de non-refoulement prévu par la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, ci-après désignée par « la Convention de Genève », et dispose a priori d’un système de recours efficace contre les violations de ces droits et libertés. Il y a encore lieu de souligner, dans ce contexte, que le système européen commun d’asile a été conçu dans un contexte permettant de supposer que l’ensemble des Etats y participant qu’ils soient Etats membres ou Etats tiers, respectent les droits fondamentaux, en ce compris les droits trouvant leur fondement dans la Convention de Genève, ainsi que dans la CEDH, et que les Etats membres peuvent s’accorder une confiance mutuelle à cet égard5.

Il doit dès lors être présumé que le traitement réservé aux demandeurs de protection internationale dans cet Etat membre est conforme aux exigences de la Convention de Genève ainsi qu’à la CEDH. Cette présomption peut toutefois être renversée lorsqu’il y a lieu de craindre qu’il existe des défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs d’asile dans l’Etat membre responsable, impliquant un traitement inhumain ou dégradant. Dans cette hypothèse, il appartient d’apprécier dans chaque cas, au vu des pièces communiquées, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités répondent à l’ensemble des garanties exigées par le respect du droit d’asile.

Les demandeurs remettant en question la présomption du respect par l’Espagne de ses droits fondamentaux, il leur incombe dès lors de fournir des éléments concrets permettant de la renverser.

4 Rapport d’entretien de Monsieur … du 5 juin 2023, page 4/7 : « Le 27 mai 2023 je me suis rendu dans un bateau pneumatique de 4m avec mon père et mon petit frère et 3 autres personnes en embarcation clandestine en Espagne. ».

5 CJUE, 21 décembre 2011, N.S. c. Secretary of State for the Home Department, C-411/10, pt. 78.

9 En l’espèce, les consorts … se prévalent, mise à part d’un risque de refoulement indirect vers leur pays d’origine, de leur crainte de devoir vivre à la rue en Espagne, sans disposer de ressources.

Il convient toutefois de constater qu’outre le fait que lors de leurs entretiens Dublin III, les demandeurs n’ont pas affirmé que, personnellement et concrètement, leurs droits n’auraient pas été respectés en Espagne lors de leur arrivée sur le territoire espagnol, - étant relevé que la seule déclaration de Monsieur … suivant laquelle il serait « choqué du traitement de la police en Espagne et aussi parce qu’ils nous ont séparés de mon petit frère »6, ou encore celles non autrement sous-tendues de Monsieur … suivant lesquelles les autorités espagnoles l’auraient faussement accusé d’avoir été le conducteur du bateau et qu’il n’aurait pas pu s’expliquer alors qu’il n’aurait pas eu un interprète arabe7, ou encore que leurs demandes de protection internationale ne seraient pas examinées en Espagne alors qu’en mai 2023, lors de son interpellation, aucune procédure ni aucune aide ne lui aurait été proposées, ne sont pas suffisantes à cet égard, - ils n’apportent pas non plus la preuve que, personnellement, leurs droits ne seraient pas garantis en Espagne, que, de manière générale, les droits des demandeurs de protection internationale en Espagne ne seraient automatiquement et systématiquement pas respectés, ou encore qu’ils n’y auraient aucun droit ou aucune possibilité de les faire valoir.

Le tribunal se doit encore de relever qu’il se dégage de toute façon des déclarations de Monsieur … faites lors de son entretien Dublin III, qu’il a quitté l’Espagne non pas en raison de problèmes qu’il y aurait rencontrés dans le système d’accueil, respectivement dans la procédure d’asile mais parce qu’il « ne voulai[t] pas demander l’asile dans un pays où les autorités ne parlaient pas français. Pour moi, l’Espagne n’était qu’un pays de transit. »8 et « […] parce que si je fais un problème [en Espagne], j’irai en prison. »9.

S’agissant de leur crainte de devoir vivre sans ressources et dans la rue en cas de transfert en Espagne, celle-ci reste également à l’état de pure allégation pour n’être sous-tendue par aucun élément probant, voire seulement un indice, susceptible de l’étayer, ce d’autant plus qu’il se dégage des propres déclarations des demandeurs faites aussi bien auprès de la police grand-ducale, que lors de leurs entretiens Dublin III que les deux frères ont dormi dans des centres pour réfugiés pendant leur séjour en Espagne.

Ensuite, les demandeurs ne fournissent pas non plus d’éléments susceptibles de démontrer que l’Espagne ne respecterait pas le principe de non-refoulement, tel qu’ancré à l’article 33 de la Convention de Genève ou découlant de l’article 4 de la Charte ou encore de l’article 3 de la CEDH, et faillirait dès lors à ses obligations internationales en les renvoyant dans un pays où leur vie ou leur liberté seraient sérieusement en danger ou encore qu’ils risqueraient d’être forcé de se rendre dans un tel pays.

Par ailleurs, il ne se dégage pas des éléments produits par les demandeurs que si les autorités espagnoles devaient néanmoins décider de les rapatrier en violation des articles 3 de la CEDH, 4 de la Charte et 33 de la Convention de Genève, alors même qu’ils seraient exposés dans leur pays d’origine à un risque concret et grave pour leur vie, il ne leur serait pas possible de faire valoir leurs droits directement auprès des autorités espagnoles en usant des voies de droit adéquates.

6 Rapport d’entretien de Monsieur … du 5 juin 2023, page 4/7.

7 Rapport d’entretien de Monsieur …du 5 juin 2023, page 5/8.

8 Rapport d’entretien de Monsieur …du 5 juin 2023, page 5/8.

9 Rapport d’entretien de Monsieur …du 5 juin 2023, page 6/8.

10 Au vu des considérations qui précèdent, le tribunal se doit de retenir que les demandeurs restent en défaut d’apporter des éléments concrets permettant de renverser la présomption du respect, par l’Espagne, de ses droits fondamentaux, de sorte que le moyen fondé sur une violation des articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte est à rejeter pour ne pas être fondé.

En ce qui concerne ensuite l’état de santé des demandeurs, force est de constater que tant Monsieur … que Monsieur … ont affirmé lors de leur entretien auprès du ministère être en bonne santé10. S’ils ont certes encore déclaré qu’ils seraient stressés et qu’ils auraient des problèmes mentaux à cause du voyage11, respectivement un trouble obsessionnel compulsif12, force est de constater qu’aucune pièce relative à leur état de santé n’a été versée au dossier, ni en phase précontentieuse, ni en phase contentieuse, étant encore relevé que les demandeurs restent de toute façon en défaut d’apporter le moindre élément tangible suivant lequel ils ne pourraient pas bénéficier en Espagne de soins médicaux dont ils seraient susceptibles d’avoir besoin.

A toutes fins utiles, il convient encore de souligner que le règlement Dublin III ne s’oppose pas au transfert des personnes vulnérables, à savoir les personnes handicapées, les personnes âgées, les femmes enceintes, les mineurs et les personnes ayant été victimes d’actes de torture, de viol ou d’autres formes graves de violence psychologique, physique ou sexuelle, mais prévoit dans son article 32, paragraphe (1), premier alinéa une obligation à charge de l’Etat membre procédant au transfert de transmettre à l’Etat membre responsable des informations relatives aux besoins particuliers de la personne à transférer aux seules fins de l’administration de soins ou de traitements médicaux, et avec le consentement explicite de la personne concernée, de sorte qu’en cas de besoin, il pourra être tenu compte de l’état de santé des demandeurs lors de l’organisation du transfert vers l’Espagne par le biais de la communication aux autorités espagnoles des informations adéquates, pertinentes et raisonnables les concernant conformément aux articles 31 et 32 du règlement Dublin III, à condition que les intéressés expriment leur consentement explicite à cet égard13.

En ce qui concerne finalement le moyen des demandeurs selon lequel il aurait appartenu au ministre de faire usage de la clause discrétionnaire inscrite à l’article 17, paragraphe (1), du règlement Dublin III, aux termes duquel : « Par dérogation à l’article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d’examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement.[…] », le tribunal précise que la possibilité, pour le ministre, d’appliquer cette disposition du règlement Dublin III relève de son pouvoir discrétionnaire, s’agissant d’une disposition facultative qui accorde un pouvoir d’appréciation étendu aux Etats membres, le caractère facultatif du recours à la disposition en question ayant encore été souligné dans un arrêt de la CJUE du 16 février 201714. Un pouvoir discrétionnaire des autorités administratives ne s’entend toutefois pas comme un pouvoir absolu, inconditionné ou à tout égard arbitraire, mais comme la faculté qu’elles ont de choisir, dans le cadre des lois, la solution qui leur paraît préférable pour la satisfaction des intérêts publics dont elles ont la charge15, le juge administratif étant appelé, en matière de recours en 10 Rapport d’entretien de Monsieur …du 5 juin 2023, page 2/8 et rapport d’entretien de Monsieur … du 5 juin 2023, page 2/7.

11 Rapport d’entretien de Monsieur … du 5 juin 2023, page 2/8.

12 Rapport d’entretien de Monsieur … du 5 juin 2023, page 2/7.

13 En ce sens : Trib. adm., 30 mars 2022, n° 47115 du rôle, disponible sur le site www.justice.public.lu.

14 CJUE, 16 février 2017, C.K., H.F., A.S. c. Republika Slovenija, C-578/16, pts 88 et 97.

15 Trib. adm., 10 octobre 2007, n° 22641 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Recours en annulation, n° 58 et les autres 11réformation, non pas à examiner si l’administration est restée à l’intérieur de sa marge d’appréciation, une telle démarche s’imposant en matière de recours en annulation, mais à vérifier si son appréciation se couvre avec celle de l’administration et, dans la négative, à substituer sa propre décision à celle de l’administration16.

Dans la mesure où le tribunal vient de retenir ci-avant dans le cadre de l’examen de la légalité de la décision entreprise par rapport aux articles 4 de la Charte et 3 de la CEDH, que les prétentions des demandeurs ne sont pas fondées, et que c’est sur base de cette même argumentation que les demandeurs estiment que le ministre aurait dû appliquer la clause de souveraineté discrétionnaire, il y a lieu de conclure que les problèmes mis en avant ne sauraient pas davantage s’analyser en des raisons humanitaires ou exceptionnelles justifiant le recours à la clause discrétionnaire prévue à l’article 17, paragraphe (1), du règlement Dublin III, de sorte que le moyen afférent est à rejeter pour ne pas être fondé.

En l’absence d’autres moyens, le tribunal est amené à conclure que le recours en réformation est à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

condamne les demandeurs aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé par :

Alexandra Bochet, premier juge, Annemarie Theis, juge, Caroline Weyland, attaché de justice délégué, et lu à l’audience publique extraordinaire du 14 septembre 2023 par le premier juge, en présence du greffier Lejila Adrovic.

s.Lejila Adrovic s.Alexandra Bochet Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 14 septembre 2023 Le greffier du tribunal administratif références y citées.

16 Cour adm., 23 novembre 2010, n° 26851C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Recours en réformation, n° 12 et les autres références y citées.


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 49370
Date de la décision : 14/09/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 23/09/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-09-14;49370 ?

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