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30/08/2023 | LUXEMBOURG | N°49360

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 30 août 2023, 49360


Tribunal administratif N° 49360 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:49360 chambre de vacation Inscrit le 25 août 2023 Audience publique de vacation du 30 août 2023 Recours formé par Monsieur …, Findel, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de rétention administrative (art. 120, L.29.08.2008)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 49360 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 25 août 2023 par M

aître Naïma El Handouz, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Lu...

Tribunal administratif N° 49360 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:49360 chambre de vacation Inscrit le 25 août 2023 Audience publique de vacation du 30 août 2023 Recours formé par Monsieur …, Findel, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de rétention administrative (art. 120, L.29.08.2008)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 49360 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 25 août 2023 par Maître Naïma El Handouz, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, déclarant être né le … à … (Algérie) et être de nationalité algérienne, actuellement retenu au Centre de rétention au Findel, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 10 août 2023 ordonnant la prorogation de son placement au Centre de rétention pour une durée d’un mois avec effet au 12 août 2023 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 29 août 2023 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision déférée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jeff Reckinger en sa plaidoirie à l’audience publique de vacation de ce jour, Maître Naïma El Handouz s’étant excusée.

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Il se dégage d’un rapport de police dit « Fremdennotiz », portant le numéro …, daté du 12 juillet 2023, émanant du commissariat … - Région Sud-Ouest, que Monsieur … fit l’objet d’un contrôle par les agents de la police grand-ducale lors duquel il ne fut pas en mesure de présenter des documents d’identité.

Par arrêté du 12 juillet 2023, notifié à l’intéressé en mains propres le même jour, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après désigné par « le ministre », constata le séjour irrégulier de Monsieur … au Luxembourg, lui ordonna de quitter le territoire sans délai à destination du pays dont il a la nationalité, à savoir l’Algérie, ou à destination du pays qui lui aura délivré un document de voyage en cours de validité ou à destination d’un autre pays dans lequel il est autorisé à séjourner et lui interdit l’entrée sur le territoire luxembourgeois pour une durée de cinq ans.

Par arrêté séparé du même jour, notifié à l’intéressé en mains propres le même jour, le ministre décida de placer Monsieur … au Centre de rétention pour une durée d’un mois à partir de la notification de la décision. Cette décision repose sur les considérations et motifs suivants :

« […] Vu les articles 111, 120 à 123 et 125 (1) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l'immigration ;

Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;

Vu ma décision de retour du 12 juillet 2023 comportant une interdiction d’entrée sur le territoire de cinq ans ;

Considérant qu'il existe un risque de fuite dans le chef de l'intéressé, alors qu'il ne dispose pas d'une adresse officielle au Grand-Duché de Luxembourg ;

Considérant par conséquent que les mesures moins coercitives telles qu'elles sont prévues par l'article 125, paragraphe (1), points a), b) et c) de la loi modifiée du 29 août 2008 précitée ne sauraient être efficacement appliquées ;

Considérant que les démarches nécessaires en vue de l'éloignement de l'intéressé seront engagées dans les plus brefs délais ;

Considérant que l'exécution de la mesure d'éloignement est subordonnée au résultat de ces démarches ; […] ».

Le recours contentieux dirigé par Monsieur … contre l’arrêté ministériel susmentionné du 12 juillet 2023, précité, fut rejeté par jugement du tribunal administratif du 19 juillet 2023, inscrit sous le numéro 49175 du rôle.

Par arrêté du 10 août 2023, notifié à l’intéressé le lendemain, le ministre prorogea la mesure de placement initiale prise à l’égard de Monsieur … pour une durée d’un mois avec effet au 12 août 2023. Ledit arrêté est fondé sur les motifs et considérations suivants :

« […] Vu les articles 111 et 120 à 123 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration ;

Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;

Vu mon arrêté du 12 juillet 2023, notifié le même jour, décidant de soumettre l'intéressé à une mesure de placement ;

Considérant que les motifs à la base de la mesure de placement du 12 juillet 2023 subsistent dans le chef de l’intéressé ;

Considérant que toutes les diligences en vue de l'identification de l'intéressé afin de permettre son éloignement ont été entreprises auprès des autorités compétentes ;

Considérant que ces démarches n’ont pas encore abouti ;

Considérant qu'il y a lieu de maintenir la mesure de placement afin de garantir l'exécution de la mesure de l'éloignement ; […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 25 août 2023, Monsieur … a fait introduire un recours en réformation, sinon en annulation contre la décision ministérielle, précitée du 10 août 2023.

Etant donné que l’article 123, paragraphe (1) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration, ci-après désignée par « la loi du 29 août 2008 », institue un recours de pleine juridiction contre une décision de rétention administrative, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal, lequel est encore recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Il n’y a partant pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

A l’appui de son recours, après avoir rappelé les rétroactes relevés ci-avant, Monsieur … reproche, tout d’abord, au ministre d’avoir apprécié sa situation de manière erronée et estime que la décision litigieuse devrait être réformée pour vices d’excès et de détournement de pouvoir, pour violation de la loi ou des formes destinées à protéger les intérêts privés, tels qu’ils seraient énumérés à l’article 2, paragraphe (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, et pour violation de l’article 121 de la loi du 29 août 2008.

Il reproche ensuite au ministre de ne pas avoir agi avec toute la diligence requise pour écourter son placement en rétention. A cet égard, il insiste sur le fait que l’arrêté ministériel litigieux ne contiendrait aucune précision quant aux démarches qui ont été entreprises, leur date et leur chance d’aboutir et ce, alors même que le ministre serait légalement tenu « d’engager des démarches, de faire état et de documenter les démarches qu’il estime requises » pour écourter au maximum la privation de liberté. Or, le simple fait d’indiquer sans autres précisions que toutes les diligences en vue de son identification auraient été entreprises auprès des autorités compétentes serait insuffisant pour justifier la décision de prorogation de son placement en rétention. Il estime qu’en tout état de cause, les démarches prétendument entreprises par le ministre ne permettraient aucunement d’envisager un éloignement rapide dans son chef.

Ensuite et pour le cas où il devait être admis que le ministre avait renseigné à suffisance les diligences entreprises pour permettre son éloignement rapide, respectivement que les diligences en question étaient considérées comme étant suffisantes, l’intéressé fait valoir que comme le placement en rétention porterait atteinte à sa liberté de mouvement, il devrait être considéré comme étant un ultime remède en ce sens qu’il ne constituerait pour le ministre qu’une simple faculté dont l’usage ne serait pas discrétionnaire, mais devrait être motivé à suffisance, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce.

Tout en admettant que l’article 5 de la Convention européenne des droits de l’Homme et des libertés fondamentales prévoirait expressément la possibilité du placement en rétention d’un étranger en situation irrégulière, le demandeur insiste sur le fait que cette mesure, qui équivaudrait à une détention, devrait rester exceptionnelle.

Or, il reproche au ministre d’avoir immédiatement ordonné le 12 juillet 2023 son placement en rétention sur base du seul postulat qu’il serait une personne en situation irrégulière et donc sans même avoir envisagé le recours à d’autres solutions plus adaptées et moins dommageables en termes de privation de liberté, tel que le paiement d’une caution ou une assignation à résidence, voire un placement dans un centre ouvert.

Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet du recours pour ne pas être fondé.

En présence de plusieurs moyens invoqués, le tribunal n’est pas lié par l’ordre dans lequel ils lui ont été soumis et détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et l’effet utile s’en dégageant, de manière que les moyens tenant à la validité formelle d’une décision doivent être examinés, dans une bonne logique juridique, avant ceux portant sur son caractère justifié au fond.

S’agissant d’abord de la légalité externe de la décision déférée et, plus particulièrement, du moyen tiré d’une insuffisance de motivation de ladite décision, le tribunal relève qu’aucun texte légal ou réglementaire n’exige l’indication formelle des motifs se trouvant à la base d’une décision de placement en rétention - l’article 6, alinéa 2 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, en vertu duquel certaines catégories de décisions doivent formellement indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui leur sert de fondement et des circonstances de fait à leur base, n’étant pas applicable à une telle décision. Le ministre n’avait, dès lors, pas à motiver spécialement la décision litigieuse, de sorte que le moyen sous analyse est à rejeter.

Par ailleurs, quant à l’argumentation du demandeur selon laquelle la décision déférée serait à réformer pour violation des formes destinées à protéger les intérêts privés et pour méconnaissance de l’article 121 de la loi du 29 août 2008, régissant la notification d’une décision de placement en rétention, le tribunal retient que ladite argumentation est à rejeter pour ne pas être autrement étayée en fait et en droit, étant précisé qu’il n’appartient pas au tribunal de suppléer à la carence de la partie demanderesse et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de ses conclusions.

Quant à la légalité interne de la décision déférée, le tribunal relève qu’aux termes de l’article 120, paragraphe (1), de la loi du 29 août 2008 : « Afin de préparer l’éloignement en application des articles 27, 30, 100, 111, 116 à 118 […], l’étranger peut, sur décision du ministre, être placé en rétention dans une structure fermée, à moins que d’autres mesures moins coercitives telles que prévues à l’article 125, paragraphe (1), ne puissent être efficacement appliquées.

Une décision de placement en rétention est prise contre l’étranger en particulier s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. […] ».

Par ailleurs, en vertu de l’article 120, paragraphe (3) de la même loi : « La durée de la rétention est fixée à un mois. La rétention ne peut être maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. Elle peut être reconduite par le ministre à trois reprises, chaque fois pour la durée d’un mois si les conditions énoncées au paragraphe (1) qui précède sont réunies et qu’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien.

Si, malgré les efforts employés, il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération de l’étranger ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires, la durée de rétention peut être prolongée à deux reprises, à chaque fois pour un mois supplémentaire. ».

L’article 120, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008 permet ainsi au ministre, afin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement, de placer l’étranger concerné en rétention dans une structure fermée pour une durée maximale d’un mois, ceci plus particulièrement s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. En effet, la préparation de l’exécution d’une mesure d’éloignement nécessite notamment la mise à disposition de documents de voyage valables, lorsque l’intéressé ne dispose pas des documents requis pour permettre son éloignement et que des démarches doivent être entamées auprès d’autorités étrangères, notamment en vue de l’obtention d’un accord de reprise en charge ou de réadmission de l’intéressé. Elle nécessite encore l’organisation matérielle du retour, en ce sens qu’un moyen de transport doit être choisi et que, le cas échéant, une escorte doit être organisée. C’est précisément afin de permettre à l’autorité compétente d’accomplir ces formalités que le législateur a prévu la possibilité de placer un étranger en situation irrégulière en rétention pour une durée maximale d’un mois, mesure qui peut être prorogée par la suite.

En vertu de l’article 120, paragraphe (3) de la même loi, le maintien de la rétention est cependant conditionné par le fait que le dispositif d’éloignement soit en cours et soit exécuté avec toute la diligence requise, impliquant plus particulièrement que le ministre est dans l’obligation d’entreprendre toutes les démarches requises pour exécuter l’éloignement dans les meilleurs délais.

Une mesure de placement peut être reconduite à trois reprises, chaque fois pour une durée d’un mois, si les conditions énoncées au paragraphe (1) de l’article 120, précité, sont réunies et s’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien.

Une décision de prorogation d’un placement en rétention est partant en principe soumise à la réunion de quatre conditions, à savoir que les conditions ayant justifié la décision de rétention initiale soient encore données, que le dispositif d’éloignement soit toujours en cours, que celui-ci soit toujours poursuivi avec la diligence requise et qu’il y ait des chances raisonnables de croire que l’éloignement en question puisse être « mené à bien ».

En l’espèce, force est d’abord de relever, à l’instar de ce qui avait été retenu dans le jugement précité du 19 juillet 2023, que le demandeur est en séjour irrégulier au Luxembourg, étant rappelé à cet égard que ce dernier a fait l’objet d’une décision ministérielle séparée du 12 juillet 2023, qui est assortie d’un ordre de quitter le territoire et d’une interdiction d’entrée sur le territoire d’une durée de cinq ans, - décisions qui ne font pas l’objet de la présente instance contentieuse -, et qu’il ne dispose pas de documents d’identité valables. En effet, il ressort du dossier administratif, et plus particulièrement d’un courrier électronique du 17 juillet 2023 adressé aux services ministériels par le commissaire adjoint au commissariat de police de Pétange qu’il a été informé par le service expertise de la police que la carte d’identité et le permis de conduire italiens remis par le demandeur étaient des « faux documents (faux total) », ce que le demandeur n’a d’ailleurs pas contesté.

A cela s’ajoute que le demandeur ne dispose pas non plus d’un visa, d’une autorisation de séjour valable pour une durée supérieure à trois mois ou d’une autorisation de travail.

Il s’ensuit qu’il existe, dans le chef du demandeur, un risque de fuite qui est présumé en vertu de l’article 111, paragraphe (3), point c), numéro 1. de la loi du 29 août 2008, aux termes duquel « […] Le risque de fuite dans le chef du ressortissant de pays tiers est présumé […] s’il ne remplit pas ou plus les conditions de l’article 34 […] », étant relevé que parmi les conditions posées par ledit article 34 de la loi du 29 août 2008, figure justement celle de ne pas faire l’objet d’une décision d’interdiction de territoire, telle que prévue au paragraphe (2), point 3 de la disposition légale en question. Il aurait dès lors appartenu au demandeur de soumettre au tribunal des éléments permettant de renverser cette présomption, en fournissant des éléments susceptibles d’être qualifiés de garanties de représentation effectives de nature à prévenir le risque de fuite.

A l’instar de ce qui a été retenu dans le jugement précité du 19 juillet 2023, le tribunal constate cependant que le demandeur reste à l’heure actuelle toujours en défaut de soumettre des éléments qui permettraient de renverser la présomption du risque de fuite existant dans son chef.

Il s’ensuit que le ministre pouvait a priori valablement, sur base de l’article 120 paragraphe (1), précité, de la loi du 29 août 2008, placer et maintenir le demandeur en rétention afin d’organiser son éloignement.

Concernant les mesures moins coercitives, telles que visées à l’article 125, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008, il y a lieu de rappeler que cette disposition légale dispose que : « Dans les cas prévus à l’article 120, le ministre peut également prendre la décision d’appliquer une autre mesure moins coercitive à l’égard de l’étranger pour lequel l’exécution de l’obligation de quitter le territoire, tout en demeurant une perspective raisonnable, n’est reportée que pour des motifs techniques et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite tel que prévu à l’article 111, paragraphe (3).

On entend par mesures moins coercitives :

a) l’obligation pour l’étranger de se présenter régulièrement, à intervalles à fixer par le ministre, auprès des services de ce dernier ou d’une autre autorité désignée par lui, après remise de l’original du passeport et de tout document justificatif de son identité en échange d’un récépissé valant justification de l’identité ;

b) l’assignation à résidence pour une durée maximale de six mois dans les lieux fixés par le ministre ; l’assignation peut être assortie, si nécessaire, d’une mesure de surveillance électronique qui emporte pour l’étranger l’interdiction de quitter le périmètre fixé par le ministre. Le contrôle de l’exécution de la mesure est assuré au moyen d’un procédé permettant de détecter à distance la présence ou l’absence de l’étranger dans le prédit périmètre. La mise en œuvre de ce procédé peut conduire à imposer à l’étranger, pendant toute la durée du placement sous surveillance électronique, un dispositif intégrant un émetteur. Le procédé utilisé est homologué à cet effet par le ministre. Sa mise en œuvre doit garantir le respect de la dignité, de l’intégrité et de la vie privée de la personne.

La mise en œuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance et le contrôle à distance proprement dit, peuvent être confiés à une personne de droit privé ;

c) l’obligation pour l’étranger de déposer une garantie financière d’un montant de cinq mille euros à virer ou à verser soit par lui-même, soit par un tiers à la Caisse de consignation, conformément aux dispositions y relatives de la loi du 29 avril 1999 sur les consignations auprès de l’Etat. Cette somme est acquise à l’Etat en cas de fuite ou d’éloignement par la contrainte de la personne au profit de laquelle la consignation a été opérée. La garantie est restituée par décision écrite du ministre enjoignant à la Caisse de consignation d’y procéder en cas de retour volontaire.

Les décisions ordonnant des mesures moins coercitives sont prises et notifiées dans les formes prévues aux articles 109 et 110. L’article 123 est applicable. Les mesures prévues peuvent être appliquées conjointement. En cas de défaut de respect des obligations imposées par le ministre ou en cas de risque de fuite, la mesure est révoquée et le placement en rétention est ordonné ».

Les dispositions des articles 120 et 125 de la loi du 29 août 2008, précités, sont à interpréter en ce sens que les trois mesures moins coercitives énumérées à l’article 125, paragraphe (1) sont à considérer comme bénéficiant d’une priorité sur le placement en rétention, à condition que l’exécution d’une mesure d’éloignement, qui doit rester une perspective raisonnable, soit reportée uniquement pour des motifs techniques et que l’étranger présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite tel que prévu à l’article 111, paragraphe (3) de la même loi. Ainsi, s’il existe une présomption légale de risque de fuite de l’étranger se trouvant en situation irrégulière sur le territoire national, celui-ci doit la renverser en justifiant notamment de garanties de représentation suffisantes1.

En l’espèce, tel que relevé ci-dessus, le demandeur n’a pas soumis au tribunal 1 Trib. adm., 9 mai 2016, n° 37854 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Etrangers, n° 947 et les autres références y citées.

d’éléments de nature à renverser la présomption du risque de fuite qui existe dans son chef, tel que retenu ci-avant. Il est, en effet, constant qu’il ne dispose d’aucun domicile fixe déclaré ni d’attaches au Luxembourg et qu’il n’a présenté aucun autre élément permettant de retenir l’existence, dans son chef, de garanties de représentation suffisantes, au sens de l’article 125, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008, nécessaires pour que le recours aux mesures moins contraignantes, et notamment celle visée au point b) dudit article, s’impose, étant encore précisé que la SHUK ou tout autre foyer pour demandeurs de protection internationale ne sauraient être considérés comme domiciles stables ni comme fournissant à eux seuls une garantie de représentation suffisante, de sorte qu’une assignation à résidence n’y est pas concevable.

C’est, dès lors, à juste titre que le ministre a retenu que les mesures moins coercitives prévues par l’article 125, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008, en ce compris l’assignation à résidence ou bien le dépôt d’une garantie financière, ne sont pas envisageables en l’espèce, de sorte que les contestations afférentes du demandeur et notamment celle tenant au caractère prétendument disproportionné de la mesure de placement dans une structure fermée, sont à rejeter.

En ce qui concerne ensuite les contestations du demandeur quant aux démarches entreprises, il convient de prime abord de constater que dans le cadre du jugement précité du 19 juillet 2023, inscrit sous le numéro 49175 du rôle, le tribunal administratif a retenu que les démarches accomplies par les autorités luxembourgeoises à cette date devaient être considérées comme étant suffisantes au regard des exigences de l’article 120 de la loi du 29 août 2008.

En ce qui concerne les diligences accomplies depuis lors, il ressort du dossier administratif que par courrier électronique du 21 juillet 2023, l’agent en charge du dossier du demandeur auprès de la direction de l’Immigration a adressé aux autorités consulaires algériennes une demande en vue de l’identification de l’intéressé et que par courrier électronique du 10 août 2023, les autorités consulaires algériennes ont été priées de renseigner les autorités luxembourgeoises sur l’état d’avancement du dossier suite à quoi les autorités consulaires algériennes ont répondu le 11 août 2023, que la demande d’identification du demandeur avait été introduite auprès des autorités algériennes compétentes et qu’elles les tiendraient informées des suites réservées à cette demande.

Par courrier électronique du 25 août 2023, l’agent en charge du dossier du demandeur auprès de la direction de l’Immigration a demandé une nouvelle fois aux autorités consulaires algériennes de bien vouloir le renseigner sur l’état d’avancement du dossier.

Compte tenu des démarches déployées concrètement par l’autorité ministérielle luxembourgeoise, actuellement tributaire de la collaboration des autorités algériennes, le tribunal retient que la procédure d’éloignement du demandeur est toujours en cours, mais qu’elle n’a pas encore abouti, et que les démarches ainsi entreprises en l’espèce par les autorités luxembourgeoises doivent être considérées comme suffisantes, de sorte qu’il y a lieu de conclure que l’organisation de l’éloignement est exécutée avec toute la diligence requise et que les contestations afférentes du demandeur sont à rejeter. De même, il ne se dégage d’aucun élément du dossier que l’éloignement du demandeur ne puisse pas être mené à bien endéans les délais légalement requis, de sorte que l’argumentation afférente du demandeur est également à rejeter pour ne pas être fondée.

Au vu des développements faits ci-avant, le tribunal conclut que la mesure de placement en rétention litigieuse n’est pas disproportionnée et qu’aucun excès ou détournement de pouvoir n’est vérifié en l’espèce, contrairement à l’argumentation du demandeur.

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, et en l’absence d’autres moyens, en ce compris des moyens à soulever d’office, le tribunal ne saurait utilement remettre en cause ni la légalité, ni le bien-fondé de la décision déférée. Il s’ensuit que le recours sous analyse est à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant contradictoirement ;

reçoit en la forme le recours principal en réformation ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

condamne le demandeur aux frais et dépens.

Ainsi jugé par :

Alexandra Castegnaro, vice-président, Benoît Hupperich, juge, Sibylle Schmitz, attaché de justice délégué, et lu à l’audience publique de vacation du 30 août 2023 par le vice-président en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Alexandra Castegnaro Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 30 août 2023 Le greffier du tribunal administratif 8


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 49360
Date de la décision : 30/08/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 19/09/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-08-30;49360 ?

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