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30/08/2023 | LUXEMBOURG | N°49352

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 30 août 2023, 49352


Tribunal administratif N° 49352 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:49352 chambre de vacation Inscrit le 25 août 2023 Audience publique de vacation du 30 août 2023 Recours formé par Monsieur …, Findel contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de rétention administrative (art. 120, L. 29.08.2008)

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 49352 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 25 août 2023 par Maître Philippe Stroesser, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre de

s avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, déclarant être né le … à … (Cap-Vert) ...

Tribunal administratif N° 49352 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:49352 chambre de vacation Inscrit le 25 août 2023 Audience publique de vacation du 30 août 2023 Recours formé par Monsieur …, Findel contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de rétention administrative (art. 120, L. 29.08.2008)

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 49352 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 25 août 2023 par Maître Philippe Stroesser, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, déclarant être né le … à … (Cap-Vert) et être de nationalité capverdienne, actuellement retenu au Centre de rétention au Findel, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 11 août 2023 ordonnant la prorogation de son placement au Centre de rétention pour une durée d’un mois avec effet au 15 août 2023 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 28 août 2023 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jeff Reckinger en sa plaidoirie à l’audience publique de vacation de ce jour, Maître Philippe Stroesser s’étant excusé.

Il ressort du dossier administratif que Monsieur … se trouve sur le territoire du Grand-

Duché de Luxembourg depuis 1987 et qu’il était titulaire de divers titres de séjour des catégories travailleur salarié et raisons privées, la dernière autorisation de séjour ayant été valable jusqu’au 16 janvier 2015.

La demande en renouvellement de son autorisation de séjour, introduite par Monsieur … fut refusée par décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après désigné par « le ministre », du 24 avril 2017. Par la même décision, le ministre ordonna à l’intéressé de quitter le territoire dans un délai de trente jours.

Suivant un jugement du Tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg du 7 janvier 2013, Monsieur … fut condamné à une peine d’emprisonnement de six mois avec sursis pour infraction à la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie.

1Le 6 novembre 2017, le ministre chargea le commissariat de Cents de vérifier si le concerné résidait effectivement à l’adresse indiquée comme étant son domicile. Il ressort d’un rapport de police numéro … du 6 décembre 2017 que Monsieur … n’a pas pu être trouvé à cette même adresse.

Suivant un rapport de la police grand-ducale, Région Capitale, commissariat de Luxembourg - Groupe Gare, du 10 octobre 2020, portant le numéro de référence …, Monsieur … fit, à cette même date, l’objet d’un contrôle policier devant le centre d’aide pour personnes toxicomanes, « … », lors duquel il ne fut pas en mesure de présenter des documents d’identité.

Le 25 novembre 2020, le ministre demanda à la police grand-ducale de procéder au signalement national de Monsieur … aux fins de découvrir sa résidence.

Suivant un rapport de la police grand-ducale, Région Capitale, commissariat de Luxembourg, Groupe Gare, portant la référence …, du 13 mai 2021, Monsieur … fut appréhendé le même jour par les forces de l’ordre lors d’un contrôle d’identité dans le quartier de la gare de Luxembourg.

Il ressort d’un rapport de la police grand-ducale, Région Capitale, commissariat de Luxembourg, portant la référence … du 19 juillet 2021, que le demi-frère de Monsieur … avait déclaré héberger ce dernier. D’après un rapport de la police grand-ducale, Région Sud-Ouest, commissariat de Differdange, du 10 mars 2022, portant la référence …, Monsieur … n’a toutefois pas pu être trouvé à l’adresse de son frère.

Il ressort de deux autres rapports de police datés respectivement du 29 mars 2023 et du 15 juin 2023, portant les références … et …, que Monsieur … fut de nouveau appréhendé, à ces mêmes dates, par les forces de l’ordre.

Par arrêté du 15 juin 2023, notifié à l’intéressé le même jour, le ministre ordonna le placement de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée d’un mois à partir de sa notification. Ledit arrêté est basé sur les motifs et considérants suivants :

« […] Vu les articles 100, 111, 120 à 123 et 125 (1) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration ;

Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;

Vu le rapport no … du 15 juin 2023 établi par la Police grand-ducale, Région Capitale, Commissariat C2R Gare/Hollerich ;

Vu ma décision de retour du 24 avril 2017, lui notifiée par courrier recommandé le 27 avril 2017 ;

Vu ma décision du 24 avril 2017, lui refusant une autorisation de séjour ;

Considérant que l’intéressé est démuni de tout document d’identité et de voyage valable ;

Considérant que l’intéressé s’est présenté au Ministère des Affaires étrangères et européennes en vue de l’organisation de son retour volontaire dans son pays d’origine en date du 22 octobre 2020 ;

Considérant que l’intéressé a été signalé pour découvrir sa résidence le 25 novembre 2020 ;

Considérant que l’intéressé n’est pas disposé à retourner volontairement dans son pays d’origine ;

2 Considérant que l’intéressé n’a jusqu’à présent pas fait des démarches pour un retour volontaire dans son pays d’origine ;

Considérant qu’il existe un risque de fuite dans le chef de l’intéressé, alors qu’il ne dispose pas d’une adresse officielle au Grand-Duché de Luxembourg ;

Considérant que l’intéressé évite ou empêche la préparation du retour et de la procédure d’éloignement ;

Considérant par conséquent que les mesures moins coercitives telles qu’elles sont prévues par l’article 125, paragraphe (1), points a), b) et c) de la loi modifiée du 29 août 2008 précitée ne sauraient être efficacement appliquées ;

Considérant que les démarches nécessaires en vue de l’éloignement de l’intéressé seront engagées dans les plus brefs délais ;

Considérant que l’exécution de la mesure d’éloignement est subordonnée au résultat de ces démarches ; […] ».

Le recours contentieux introduit contre ledit arrêté de placement en rétention fut rejeté par jugement du tribunal administratif du 4 juillet 2023, inscrit sous le numéro 49082 du rôle.

Par un arrêté du 13 juillet 2023, notifié à l’intéressé le 14 juillet 2023, le ministre décida de prolonger la mesure de placement prise à l’égard de Monsieur … pour une durée d’un mois avec effet au 15 juillet 2023. Le recours contentieux dirigé contre ledit arrêté de prorogation de la mesure de placement initiale fut rejeté par jugement du tribunal administratif du 26 juillet 2023, inscrit sous le numéro 49190 du rôle.

Par arrêté du 11 août 2023, notifié à l’intéressé le 14 août 2023, le ministre prorogea pour une nouvelle durée d’un mois la mesure de placement initiale prise à l’égard de Monsieur … et ce, avec effet à partir du 15 août 2023.

Ledit arrêté est fondé sur les motifs et considérations suivants :

« […] Vu les articles 111 et 120 à 123 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration ;

Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;

Vu mes arrêtés des 15 juin 2023, notifié le même jour et 13 juillet 2023, notifié le 14 juillet 2023 avec effet au 15 août 2023, décidant de soumettre l'intéressé à une mesure de placement ;

Considérant que les motifs à la base de la mesure de placement du 15 juin 2023 subsistent dans le chef de l’intéressé ;

Considérant que les démarches en vue de l'éloignement ont été engagées ;

Considérant que toutes les diligences en vue de l'identification de l'intéressé afin de permettre son éloignement ont été entreprises auprès des autorités compétentes ;

Considérant qu'il y a lieu de maintenir la mesure de placement afin de garantir l'exécution de la mesure de l'éloignement ; […] ».

Par arrêté du 22 août 2023, notifié à l’intéressé le 25 août 2023, le ministre prononça à l’encontre de Monsieur …, sur le fondement de l’article 112 de la loi modifiée du 29 août 2008 portant sur la libre circulation des personnes et l’immigration, ci-après désignée par « la loi du 29 août 2008 », une interdiction d’entrée sur le territoire luxembourgeois d’une durée de trois ans à partir de la sortie du territoire.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 25 août 2023, Monsieur … a fait introduire un recours en réformation, sinon en annulation contre la décision ministérielle, précitée du 11 août 2023.

Etant donné que l’article 123, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008 institue un recours de pleine juridiction contre une décision de rétention administrative, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal, recours qui est encore recevable pour avoir été introduit selon les formes et délai prévus par la loi.

Il n’y a partant pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

A l’appui de son recours, Monsieur …, après avoir exposé les faits et rétroactes à la base de la décision déférée et après avoir cité l’article 120, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008, souligne, de manière générale, que le placement au Centre de rétention devrait être considéré comme un ultime remède et ne constituerait qu’une simple faculté pour le ministre et non pas une obligation systématique. Cette faculté accordée au ministre devrait se baser sur des motifs sérieux et être proportionnée par rapport à la situation donnée, alors que le placement en rétention d’une personne constituerait une atteinte à la liberté de mouvement qui devrait être motivée à suffisance, ce qui ne serait pas le cas en espèce.

Il indique également qu’en vertu de l’article 120, paragraphe (3) de la loi du 29 août 2008, le maintien de la rétention serait conditionné par le fait que le dispositif d’éloignement soit en cours et exécuté avec toute la diligence nécessaire, impliquant que le ministre serait dans l’obligation d’entreprendre toutes les démarches requises pour exécuter son éloignement dans les meilleurs délais.

Or, il n’existerait à l’heure actuelle aucune perspective d’éloignement dans son chef, de sorte que se poserait la question de l’exécution de la mesure d’éloignement dans un délai raisonnable et « avant la durée maximale de la mesure de rétention ». Le demandeur souligne, dans ce contexte, que le maintien au Centre de rétention constituerait une mesure privative de liberté qui devrait être réduite au strict minimum, pour conclure qu’il devrait être mis en liberté en attendant l’exécution de la mesure d’éloignement.

En se référant à un jugement du tribunal administratif du 19 février 2009, inscrit sous le numéro 25374 du rôle, le demandeur fait finalement valoir que le placement dans une structure fermée serait disproportionné au regard des circonstances de l’espèce et de son comportement, de sorte que, sur le fondement de l’article 125 de la loi du 29 août 2008, il estime pouvoir être assigné à résidence dans un lieu à fixer par le ministre, avec l’obligation de se présenter régulièrement auprès des services ministériels ou de toute autre autorité désignée.

Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet du recours pour n’être fondé en aucun des moyens.

En présence de plusieurs moyens invoqués, le tribunal n’est pas lié par l’ordre dans lequel ils lui ont été soumis et détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et l’effet utile s’en dégageant, de manière que les moyens tenant à la validité formelle d’une décision doivent être examinés, dans une bonne logique juridique, avant ceux portant sur son caractère justifié au fond.

En ce qui concerne tout d’abord la légalité externe de l’arrêté ministériel litigieux, et plus particulièrement le reproche non autrement circonstancié d’une insuffisance de la motivation fournie par le ministre, il convient de souligner que ces développements sont à rejeter pour ne pas être fondés, étant donné qu’aucun texte légal ou réglementaire n’exige l’indication formelle des motifs se trouvant à la base d’une décision de placement en rétention, sans demande expresse de l’intéressé - l’article 6, alinéa 2 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, en vertu duquel certaines catégories de décisions doivent formellement indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui leur sert de fondement et des circonstances de fait à leur base, n’étant pas applicable à une telle décision -, de sorte que le ministre n’avait pas à motiver spécialement la décision litigieuse.

Le moyen afférent est partant à rejeter pour ne pas être fondé.

Quant à la légalité interne de la décision déférée, le tribunal relève qu’aux termes de l’article 120, paragraphe (1), de la loi du 29 août 2008 : « Afin de préparer l’éloignement en application des articles 27, 30, 100, 111, 116 à 118 […], l’étranger peut, sur décision du ministre, être placé en rétention dans une structure fermée, à moins que d’autres mesures moins coercitives telles que prévues à l’article 125, paragraphe (1), ne puissent être efficacement appliquées.

Une décision de placement en rétention est prise contre l’étranger en particulier s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement […] ».

Par ailleurs, en vertu de l’article 120, paragraphe (3), de la même loi : « La durée de la rétention est fixée à un mois. La rétention ne peut être maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. Elle peut être reconduite par le ministre à trois reprises, chaque fois pour la durée d’un mois si les conditions énoncées au paragraphe (1) qui précède sont réunies et qu’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien.

Si, malgré les efforts employés, il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération de l’étranger ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires, la durée de la rétention peut être prolongée à deux reprises, à chaque fois pour un mois supplémentaire ».

L’article 120, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008 permet ainsi au ministre, afin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement, de placer l’étranger concerné en rétention dans une structure fermée pour une durée maximale d’un mois, ceci plus particulièrement s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. En effet, la préparation de l’exécution d’une mesure d’éloignement nécessite en premier lieu l’identification de l’intéressé et la mise à la disposition de documents d’identité et de voyage valables, lorsque l’intéressé ne dispose pas des documents requis pour permettre son éloignement et que des démarches doivent être entamées auprès d’autorités étrangères en vue de l’obtention d’un accord de reprise en charge ou de réadmission de l’intéressé. Elle nécessite encore l’organisation matérielle du retour, en ce sens qu’un moyen de transport doit être choisi et que, le cas échéant, une escorte doit être organisée.

C’est précisément afin de permettre à l’autorité compétente d’accomplir ces formalités que lelégislateur a prévu la possibilité de placer un étranger en situation irrégulière en rétention pour une durée maximale d’un mois, mesure qui peut être prorogée par la suite.

En vertu de l’article 120, paragraphe (3) de la même loi, le maintien de la rétention est cependant conditionné par le fait que le dispositif d’éloignement soit en cours et soit exécuté avec toute la diligence requise, impliquant plus particulièrement que le ministre est dans l’obligation d’entreprendre toutes les démarches requises pour exécuter l’éloignement dans les meilleurs délais.

Une mesure de placement peut être reconduite à trois reprises, chaque fois pour une durée d’un mois, si les conditions énoncées au paragraphe (1) de l’article 120, précité, sont réunies et s’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien.

Une décision de prorogation d’un placement en rétention est partant en principe soumise à la réunion de quatre conditions, à savoir que les conditions ayant justifié la décision de rétention initiale soient encore données, que le dispositif d’éloignement soit toujours en cours, que celui-ci soit toujours poursuivi avec la diligence requise et qu’il y ait des chances raisonnables de croire que l’éloignement en question puisse être « mené à bien ».

En l’espèce, force est d’abord de relever, à l’instar de ce qui avait été retenu dans les jugements précités des 4 et 26 juillet 2023, que le demandeur se trouve en séjour irrégulier au Luxembourg dans la mesure où il a fait l’objet d’une décision de retour le 24 avril 2017, laquelle est entretemps coulée en force de chose décidée et qu’il ne dispose ni d’un document de voyage valable ni d’une autorisation de séjour valable pour une durée supérieure à trois mois, ni d’une autorisation de travail, de sorte qu’en vertu de l’article 111, paragraphe (3), point c) de la loi du 29 août 2008, aux termes duquel « […] Le risque de fuite est présumé dans le chef du ressortissant de pays tiers […] s’il ne remplit pas ou plus les conditions de l’article 34 […] », un risque de fuite est présumé dans son chef. Il aurait dès lors appartenu au demandeur de soumettre au tribunal des éléments permettant de renverser cette présomption, en fournissant des éléments susceptibles d’être qualifiés de garanties de représentation effectives de nature à prévenir le risque de fuite.

A l’instar de ce qui a été retenu dans les jugements précités des 4 et 26 juillet 2023, le tribunal constate cependant que le demandeur reste à l’heure actuelle toujours en défaut de soumettre des éléments qui permettraient de renverser la présomption du risque de fuite existant dans son chef.

Il s’ensuit que le ministre pouvait a priori valablement, sur base de l’article 120 paragraphe (1), précité, de la loi du 29 août 2008, placer et maintenir le demandeur en rétention afin d’organiser son éloignement.

Le demandeur fait encore valoir que le ministre aurait dû choisir une option moins coercitive que son placement en rétention telle qu’une assignation à résidence avec obligation dans son chef de se présenter régulièrement à des intervalles à fixer auprès des services ministériels ou de toute autre autorité désignée.

A cet égard, il échet de relever qu’aux termes de l’article 125, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008 : « Dans les cas prévus à l’article 120, le ministre peut également prendre la décision d’appliquer une autre mesure moins coercitive à l’égard de l’étranger pour lequel l’exécution de l’obligation de quitter le territoire, tout en demeurant une perspective 6 raisonnable, n’est reportée que pour des motifs techniques et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite tel que prévu à l’article 111, paragraphe (3) [de la loi du 29 août 2008].

On entend par mesures moins coercitives :

a) l’obligation pour l’étranger de se présenter régulièrement, à intervalles à fixer par le ministre, auprès des services de ce dernier ou d’une autre autorité désignée par lui, après remise de l’original du passeport et de tout document justificatif de son identité en échange d’un récépissé valant justification de l’identité ;

b) l’assignation à résidence pour une durée maximale de six mois dans les lieux fixés par le ministre ; l’assignation peut être assortie, si nécessaire, d’une mesure de surveillance électronique qui emporte pour l’étranger l’interdiction de quitter le périmètre fixé par le ministre. Le contrôle de l’exécution de la mesure est assuré au moyen d’un procédé permettant de détecter à distance la présence ou l’absence de l’étranger dans le prédit périmètre. La mise en œuvre de ce procédé peut conduire à imposer à l’étranger, pendant toute la durée du placement sous surveillance électronique, un dispositif intégrant un émetteur. Le procédé utilisé est homologué à cet effet par le ministre. Sa mise en œuvre doit garantir le respect de la dignité, de l’intégrité et de la vie privée de la personne.

La mise en œuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance et le contrôle à distance proprement dit, peuvent être confiés à une personne de droit privé ;

c) l’obligation pour l’étranger de déposer une garantie financière d’un montant de cinq mille euros à virer ou à verser soit par lui-même, soit par un tiers à la Caisse de consignation, conformément aux dispositions y relatives de la loi du 29 avril 1999 sur les consignations auprès de l’Etat. Cette somme est acquise à l’Etat en cas de fuite ou d’éloignement par la contrainte de la personne au profit de laquelle la consignation a été opérée. La garantie est restituée par décision écrite du ministre enjoignant à la Caisse de consignation d’y procéder en cas de retour volontaire.

Les décisions ordonnant des mesures moins coercitives sont prises et notifiées dans les formes prévues aux articles 109 et 110. L’article 123 est applicable. Les mesures prévues peuvent être appliquées conjointement. En cas de défaut de respect des obligations imposées par le ministre ou en cas de risque de fuite, la mesure est révoquée et le placement en rétention est ordonné. ».

Les dispositions des articles 120 et 125 de la loi du 29 août 2008, précités, sont à interpréter en ce sens que les trois mesures moins coercitives énumérées à l’article 125, paragraphe (1) sont à considérer comme bénéficiant d’une priorité sur le placement en rétention, à condition que l’exécution d’une mesure d’éloignement, qui doit rester une perspective raisonnable, soit reportée uniquement pour des motifs techniques et que l’étranger présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite tel que prévu à l’article 111, paragraphe (3) de la même loi. Ainsi, s’il existe une présomption légale de risque de fuite de l’étranger se trouvant en situation irrégulière sur le territoire national, celui-ci doit la renverser en justifiant notamment de garanties de représentation suffisantes1.

1 Trib. adm., 9 mai 2016, n° 37854 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Etrangers, n° 947 et les autres références y citées.En l’espèce, tel que relevé ci-avant, le demandeur n’a pas soumis au tribunal d’éléments de nature à renverser la présomption d’un risque de fuite existant dans son chef. Il est, par ailleurs, constant qu’il ne dispose d’aucun domicile fixe déclaré au Luxembourg ni d’une quelconque autre attache, et il n’a présenté aucun autre élément permettant de retenir l’existence, dans son chef, de garanties de représentation suffisantes au sens de l’article 125, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008 nécessaires pour que le recours aux mesures moins contraignantes visées aux points a), b) et c) dudit article s’impose.

Il suit des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que le ministre a retenu que les mesures moins coercitives prévues par l’article 125, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008, et plus particulièrement celle visée au point b) dudit article dont l’application est plus particulièrement sollicitée par le demandeur, ne sauraient être efficacement appliquées en l’espèce, de sorte que les contestations afférentes du demandeur, et notamment celle tenant au caractère prétendument disproportionné de la mesure de placement dans une structure fermée, sont à écarter.

En ce qui concerne ensuite les contestations du demandeur quant aux démarches entreprises pour procéder à son éloignement rapide, il convient de prime abord de constater que dans le cadre des jugements précités des 4 et 26 juillet 2023, inscrits sous les numéros 49082 et 49190 du rôle, le tribunal administratif a retenu que les démarches accomplies par les autorités luxembourgeoises à cette date devaient être considérées comme étant suffisantes au regard des exigences de l’article 120 de la loi du 29 août 2008.

En ce qui concerne les diligences accomplies depuis lors, il ressort du dossier administratif qu’en date du 21 août 2023, suite à la réception du plan de vol renseignant que le rapatriement du demandeur en avion est prévu pour le 30 août 2023 à 17:50 heures, le ministre a contacté une agence de voyage en vue de l’émission d’un billet d’avion. Il apparaît ensuite que le 23 août 2023, l’agent en charge du dossier du demandeur auprès de la direction de l’Immigration a réceptionné à cette même date le laissez-passer et le passeport du demandeur.

Au vu de ce qui précède et plus particulièrement compte tenu du fait que le vol retour du demandeur est prévu en ce jour, le tribunal est amené à constater qu’au moment où il statue, le ministre a à suffisance documenté les démarches entreprises qui doivent, par ailleurs, être considérées comme étant suffisantes et concluantes. Le moyen relatif à une prétendue absence de diligences suffisantes du ministre en vue d’organiser l’éloignement rapide du demandeur, ainsi que celui tenant à une prétendue impossibilité de procéder à son éloignement sont dès lors à écarter pour ne pas être fondés.

Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, et en l’absence d’autres moyens, en ce compris des moyens à soulever d’office, le tribunal ne saurait utilement remettre en cause ni la légalité, ni le bien-fondé de la décision déférée. Il s’ensuit que le recours sous analyse est à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours principal en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

condamne le demandeur aux frais et dépens.

Ainsi jugé par :

Alexandra Castegnaro, vice-président, Benoît Hupperich, juge, Sibylle Schmitz, attaché de justice délégué, et lu à l’audience publique de vacation du 30 août 2023 par le vice-président, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Alexandra Castegnaro Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 30 août 2023 Le greffier du tribunal administratif 9


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 49352
Date de la décision : 30/08/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 19/09/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-08-30;49352 ?

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