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30/08/2023 | LUXEMBOURG | N°46527

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 30 août 2023, 46527


Tribunal administratif N° 46527 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:46527 4e chambre Inscrit le 5 octobre 2021 Audience publique du 30 août 2023 Recours formé par Monsieur …, … (Allemagne), contre deux décisions du directeur de l’Inspection du Travail et des Mines, en matière d’amende administrative

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46527 du rôle et déposée le 5 octobre 2021 au greffe du tribunal administratif par Maître Olivier Unsen, avoca

t à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …...

Tribunal administratif N° 46527 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:46527 4e chambre Inscrit le 5 octobre 2021 Audience publique du 30 août 2023 Recours formé par Monsieur …, … (Allemagne), contre deux décisions du directeur de l’Inspection du Travail et des Mines, en matière d’amende administrative

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46527 du rôle et déposée le 5 octobre 2021 au greffe du tribunal administratif par Maître Olivier Unsen, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, artisan, exerçant le commerce sous la dénomination …, établi à D-…, ayant élu domicile en l’étude de son litismandataire, établie à L-…, tendant principalement à la réformation, sinon subsidiairement à l’annulation, d’une part, d’une décision du directeur de l’Inspection du Travail et des Mines du 12 juillet 2021 prononçant une amende administrative « ITM Amende … » de 1.000,- euros à son encontre, et, d’autre part, d’une décision du directeur de l’Inspection du Travail et des Mines du 20 juillet 2021 réduisant, sur opposition, l’amende administrative prononcée à son encontre par sa décision du 9 juin 2021, à un montant de 1.000,- euros ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 15 décembre 2021 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul Reiter en sa plaidoirie à l’audience publique du 31 mars 2023, Maître Olivier Unsen s’étant excusé.

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A l’occasion d’un contrôle effectué le 5 mai 2021, sur un chantier sis à L-…, l’Inspection du Travail et des Mines, dénommée ci-après « l’ITM », constata que Monsieur …, artisan exerçant sous la dénomination …, établi à D-…, désignée ci-après par « l’Entreprise» a détaché des salariés en vue d’effectuer une prestation de service sur le territoire du Grand-

Duché de Luxembourg, tout en ayant omis d’effectuer la déclaration de détachement requise.

En date du 20 mai 2021, l’ITM adressa une injonction à l’Entreprise par courrier recommandé avec avis de réception, sur base des articles L.142-2 et L-142-3 du Code du travail, lui demandant conformément aux articles L.614-4, paragraphe (1), point a) et L.614-5 du même code, de régulariser sa situation par rapport auxdites dispositions légales endéans un délai de 15 jours par la communication via la plateforme électronique prévue à cet effet, de toutes les informations et de tous les documents requis, à savoir, le certificat de déclaration préalable délivré par la Direction générale PME et entrepreneuriat auprès du ministère de 1 l’Economie, ainsi qu’une copie du contrat d’entreprise avec le maître d’ouvrage ou le donneur d’ordre, tout en lui rappelant que « (…) Die Verstöße gegen die Bestimmungen der Artikel L.142-2, L.142-3 und L.281-1 werden mit einem Bußgeld zwischen 1.000 und 5.000 Euro pro entsandter Arbeitnehmer und zwischen 2.000 und 10.000 Euro im Wiederholungsfall binnen 2 Jahren ab dem Tag der Zustellung des ersten Bußgeldbescheids bestraft. Der Gesamtbetrag des Bußgeldes darf 50.000 Euro nicht überschreiten. Um den Betrag des Bußgeldes festzusetzen, berücksichtigt der Direktor des Gewerbe- und Grubenaufsichtsamtes die Umstände und die Schwere des Verstoßes sowie das Verhalten des Zuwiderhandelnden.

(…) ».

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 9 juin 2021, le directeur de l’ITM, dénommé ci-après « le directeur », infligea, une amende à l’Entreprise à hauteur de …,- euros, pour avoir omis de donner suite et de prendre les mesures requises endéans les délais impartis par l’injonction précitée du 20 mai 2021.

Par courriel du 15 juin 2021 adressé à l’ITM, l’Entreprise forma opposition contre la décision directoriale du 9 juin 2021.

En date du 16 juin 2021, l’ITM adressa une nouvelle injonction à l’Entreprise par courrier recommandé avec avis de réception, sur base des articles L.614-4, paragraphe (1), point a) et L.614-5 du Code du travail, de payer le salaire social minimum pour le mois de mai 2021 à son salarié détaché Monsieur … et de régulariser sa situation par rapport auxdites dispositions légales endéans un délai de 15 jours par la communication via la plateforme électronique prévue à cet effet, de toutes les informations et de tous les documents requis, à savoir, la fiche de salaire du mois de mai 2021 du salarié détaché Monsieur …, la preuve de paiement dudit salaire, ainsi que le pointage indiquant le début, la fin et la durée de travail journalier du salarié en question, tout en lui rappelant que « (…) Die Verstöße gegen die Bestimmungen der Artikel L.142-2, L.142-3 und L.281-1 werden mit einem Bußgeld zwischen 1.000 und 5.000 Euro pro entsandter Arbeitnehmer und zwischen 2.000 und 10.000 Euro im Wiederholungsfall binnen 2 Jahren ab dem Tag der Zustellung des ersten Bußgeldbescheids bestraft. Der Gesamtbetrag des Bußgeldes darf 50.000 Euro nicht überschreiten. Um den Betrag des Bußgeldes festzusetzen, berücksichtigt der Direktor des Gewerbe- und Grubenaufsichtsamtes die Umstände und die Schwere des Verstoßes sowie das Verhalten des Zuwiderhandelnden. (…) ».

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 juillet 2021, le directeur, infligea, une amende à l’Entreprise à hauteur de 1.000,- euros, pour avoir omis de donner suite et de prendre les mesures requises endéans les délais impartis par l’injonction précitée du 16 juin 2021, ladite décision étant libellée dans les termes suivants :

« (…) Der Direktor des Gewerbe- und Grubenaufsichtsamtes, Aufgrund von Artikel L143-2 des Arbeitsgesetzbuchs ;

Angesichts der Anordnung vom 16. Juni 2021, welches gemäß den Artikeln L.614-4 Absatz 1 Buchstabe a) zweiter Spiegelstrich und L614-5 des Arbeitsgesetzbuchs von …, inspecteur principal du travail des Gewerbe- und Grubenaufsichtsamtes, erstellt wurde ;

Angesichts des Artikels L614-13, Absatz 1, 2, 3 und 4 des Arbeitsgesetzbuchs ;

2 in Erwägung, dass die Gesellschaft …, mit Sitz in … D-…, in Ihrer Eigenschaft als Arbeitgeber, der ihr am 16. Juni 2021 von …, Inspecteur principal du travail des Gewerbe-

und Grubenaufsichtsamtes, zugestellten Anordnung nicht binnen der auferlegten Frist Folge geleistet hat ;

Dass der Lohnzettel für den Monat Mai 2021 des Arbeitnehmers …, geboren am …, angefordert durch die Anordnung vom 16. Juni 2021, nicht von der präqualifizierten Gesellschaft … innerhalb der auferlegten Frist beim Gewerbe- und Grubenaufsichtsamt eingereicht wurde und immer noch fehlt ;

Dass der Zahlungsbeleg des Lohnes für den Monat Mai 2021 des Arbeitnehmers …, geboren am …, angefordert durch die Anordnung vom 16. Juni 2021, nicht von der präqualifizierten Gesellschaft … innerhalb der auferlegten Frist beim Gewerbe- und Grubenaufsichtsamt eingereicht wurde und immer noch fehlt ;

Dass die Arbeitszeitnachweise mit Angabe des Beginns, des Endes und Dauer der täglichen Arbeitszeit für den Monat Mai 2021 des Arbeitnehmers …, geboren am …, angefordert durch die Anordnung vom 16. Juni 2021, nicht von der präqualifizierten Gesellschaft … innerhalb der auferlegten Frist beim Gewerbe- und Grubenaufsichtsamt eingereicht wurden und immer noch fehlen ;

Dass das Unterlassen der Übermittlung des Lohnzettels, des Zahlungsbelegs und der Arbeitszeitnachweise mit Angabe des Beginns, des Endes und Dauer der täglichen Arbeitszeit für den Monat Mai 2021, dem Gewerbe- und Grubenaufsichtsamt nicht erlaubt zu bestimmen, ob der vorgesehene soziale Mindestlohn für das Großherzogtum Luxemburg für den Arbeitnehmer …, geboren am …, eingehalten wurde ;

Dass die präqualifizierte Gesellschaft … es versäumt hat, die nötigen Maßnahmen zu ergreifen um den Anforderungen der Anordnung vom 16. Juni 2021 innerhalb der auferlegten Frist gerecht zu werden ;

beschließt:

Art. 1 Die Gesellschaft …, mit Sitz in … D-…, in ihrer Eigenschaft als Arbeitgeber, wegen Nichtfolgeleistung und Nichtergreifens der geforderten Maßnahmen innerhalb der Frist, die ihr mit der am 16. Juni 2021 von …, Inspecteur principal du travail des Gewerbe- und Grubenaufsichtsamtes, zugestellten Anordnung auferlegt wurde, mit einem Bußgeld von 1.000 Euro zu belegen. (…) ».

Par décision du 20 juillet 2021, le directeur déclara l’opposition du 15 juin 2021 précitée dirigée contre la décision précitée du 9 juin 2021 partiellement fondée en réduisant l’amende à un montant de 1.000,- euros, tout en constatant que le certificat de déclaration préalable délivré par la Direction générale PME et entrepreneuriat auprès du ministère de l’Economie ferait toujours défaut, la prédite décision étant libellée dans les termes suivants :

« (…) Der Direktor des Gewerbe- und Grubenaufsichtsamtes, Aufgrund der Artikel L.143-2 und L614-13 des Arbeitsgesetzbuchs ;

3 Angesichts der Anordnung vom 20. Mai 2021, welche gemäß den Artikeln L.614-4 Absatz 1 Buchstabe a) zweiter Spiegelstrich und L614-5 des Arbeitsgesetzbuchs von …, Inspecteur principal du travail des Gewerbe- und Grubenaufsichtsamtes, erstellt wurde ;

Angesichts des Beschlusses vom 9. Juni 2021 des Direktors des Gewerbe- und Grubenaufsichtsamtes, der Gesellschaft …, mit Sitz in … D-…, in ihrer Eigenschaft als Arbeitgeber, wegen Nichtfolgeleistung und Nichtergreifens der geforderten Maßnahmen innerhalb der Frist, die ihr mit der am 20. Mai 2021 von …, Inspecteur principal du travail des Gewerbe - und Grubenaufsichtsamtes, zugestellten Anordnung auferlegt wurde, laut Bußgeldbescheid « ITM Amende … » mit einem Bußgeld von 4.000 Euro zu belegen ;

Angesichts des Widerspruchs vom 15. Juni 2021 gegen den besagten Beschluss des Direktors des Gewerbe- und Grubenaufsichtsamtes, der von der präqualifizierten Gesellschaft …, per E-Mail eingelegt wurde und beim Gewerbe- und Grubenaufsichtsamt am 15. Juni 2021 eingegangen ist ;

In Erwägung, dass der Widerspruch vom 15. Juni 2021 gegen den Beschluss des Direktors des Gewerbe- und Grubenaufsichtsamtes ordnungsgemäß binnen einer Frist von fünfzehn Tagen ab Zustellung des Bußgeldbescheids eingelegt wurde ;

Dass die präqualifizierte Gesellschaft … in Ihrem Widerspruch vom 15. Juni 2021 erklärt, dass die angefragten Dokumente am 4. Juni 2021 per E-Mail an das Gewerbe- und Grubenaufsichtsamt gesendet worden wären und am gleichen Tag per Post verschickt worden wären ;

Dass die Vorabanzeige, ausgestellt von der Generaldirektion KMU und Unternehmertum beim Wirtschaftsministerium (Direction générale PME et entrepreneuriat auprès du Ministère de l'Économie), angefordert durch die Anordnung vom 20. Mai 2021, nicht von der präqualifizierten Gesellschaft … innerhalb der auferlegten Frist beim Gewerbe- und Grubenaufsichtsamt eingereicht wurde und immer noch fehlt ;

Dass die der präqualifizierten Gesellschaft … in ihrem Widerspruch geltend gemachten Gründe eine teilweise Aufhebung des Bußgeldes zu rechtfertigen vermögen ;

Aus diesen Gründen erklärt sich der Direktor des Gewerbe- und Grubenaufsichtsamtes für zuständig, um über den von der Gesellschaft …, mit Sitz in … D-…, in ihrer Eigenschaft als Arbeitgeber, eingelegten Widerspruch zu erkennen ;

erklärt er ihn für zulässig und teilweise begründet ;

setzt er den Betrag des durch den Beschluss vom 9. Juni 2021 des Direktors des Gewerbe- und Grubenaufsichtsamtes der Gesellschaft …, mit Sitz in … D-…, in ihrer Eigenschaft als Arbeitgeber, verhängten Bußgeldes auf den Betrag von 1.000 Euro herab, welcher binnen einer Frist von fünfzehn Tagen mit dem Überweisungszweck « ITM Amende … » auf das folgende Konto der Einregistrierungs-, Domänen- und Mehrwertsteuerverwaltung (Administration de l‘enregistrement, des domaines et de la TVA) zu überweisen ist: (…). ».

4 Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 5 octobre 2021, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation des décisions précitées du directeur du 12 juillet 2021 lui ayant infligée une amende administrative de 1.000.- euros, et celle du 20 juillet 2021 réduisant, sur opposition du 15 juin 2021, l’amende administrative prononcée à son encontre par sa décision du 9 juin 2021 à un montant de 1.000,-

euros.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours en annulation introduit à titre subsidiaire, tout en se rapportant à prudence de justice quant à la recevabilité du recours en réformation.

Monsieur … n’a pas pris position quant à ce moyen.

En ce qui concerne la compétence du tribunal pour statuer sur les actes litigieux, il convient de rappeler qu’en application de l’article L.614-14 du Code du travail, aux termes duquel « Toutes les décisions administratives prises sur base des dispositions de la présente loi sont soumises au recours en réformation visé à l’article 3 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif », de sorte que le tribunal administratif est compétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal contre les actes litigieux.

Il n’y a partant pas lieu de statuer sur le recours en annulation introduit à titre subsidiaire.

Dans son mémoire en réponse, la partie gouvernementale se rapporte encore à prudence de justice quant à la recevabilité du recours en réformation, moyen auquel le demandeur n’a pas pris position.

Force est au tribunal de préciser que s’il est exact que le fait, pour une partie, de se rapporter à prudence de justice équivaut à une contestation, il n’en reste pas moins qu’une contestation non autrement étayée est à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au juge administratif de suppléer la carence des parties au litige et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions.

Il s’ensuit que le moyen d’irrecevabilité afférent encourt le rejet, étant relevé que le tribunal n’entrevoit pas non plus de cause d’irrecevabilité d’ordre public qui serait à soulever d’office, le recours en réformation étant recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours, le demandeur rappelle certains rétroactes repris ci-avant, tout en relevant que par courriel du 15 juin 2021, il aurait protesté contre la décision du 9 juin 2021 précitée en précisant dans ladite opposition avoir transmis à l’ITM les documents demandés par courrier du 4 juin 2021 et donc dans le délai lui imparti. Il estime, dans ce contexte, que ces documents seraient arrivés à destination, ce qui pourrait être déduit du fait qu’en date du 16 juin 2021 une nouvelle injonction lui aurait été adressée par l’ITM, celle-ci faisant état de certains manquements dans son chef.

Il fait ensuite valoir que le directeur lui aurait infligé une amende de 1.000.- euros malgré le fait qu’il aurait payé le salaire social minimum à son salarié Monsieur ….

5 A cet égard, il relève que le contrat de travail de ce dernier, signé le 1er janvier 2015 prévoirait, certes, un salaire horaire de … euros, mais qu’il serait évident que ledit salaire ne serait plus d’actualité en 2021 où ledit salaire aurait été de … euros l’heure, de sorte que le salaire social minimum aurait dès lors été payé audit salarié.

Finalement, il estime que la décision précitée du 20 juillet 2021 violerait le principe non bis in idem, en ce que, sur base d’un contrôle sur un même chantier et sur base de prétendues violations des articles L. 142-2 et L.142-3 du Code du travail, plusieurs amendes lui auraient été infligés, l’ITM ne pouvant, selon lui, pas infliger deux amendes à la même personne juridique concernant les mêmes faits.

Il en conclut qu’il serait à décharger des deux amendes litigieuses, sinon, à titre subsidiaire qu’il y aurait lieu de réduire lesdites amendes à de plus justes proportions, alors qu’elles seraient manifestement disproportionnées par rapport aux violations alléguées.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours pour n’être fondé en aucun de ses moyens.

Aux termes de l’article L.614-4, paragraphe (1), point a) du Code du Travail :

« (1) Les membres de l’inspectorat du travail, sont autorisés en outre :

a) à procéder à tous les examens, contrôles ou enquêtes jugés nécessaires pour s’assurer que les dispositions légales, réglementaires, administratives et conventionnelles sont effectivement observées et notamment: (…) - à demander communication dans les meilleurs délais de tous livres, registres, fichiers, documents et informations relatifs aux conditions de travail, en vue d’en vérifier la conformité avec les dispositions légales, réglementaires, administratives et conventionnelles, de les reproduire ou d’en établir des extraits; (…) ».

Il résulte de la prédite disposition légale que les membres de l’ITM peuvent procéder aux contrôles et examens qu’ils estiment nécessaires en vue de garantir l’observation des dispositions légales et réglementaires, respectivement conventionnelles applicables, et, qu’ils peuvent à cette fin notamment demander communication de tous les documents et informations relatifs aux conditions de travail des salariés d’une entreprise endéans un certain délai.

Le tribunal est amené à examiner si le demandeur a fait parvenir à l’ITM, tel qu’il le prétend, tous les documents sollicités, preuve dont il a la charge, afin de vérifier si les amendes prononcées par les décisions déférées sont toujours justifiées au jour où il statue. En effet, dans le cadre d’un recours en réformation, le tribunal est amené à apprécier les faits commis par le demandeur en vue de déterminer si la sanction prononcée par l’autorité compétente a un caractère proportionné et juste, en prenant en considération la situation dans son ensemble, étant précisé que dans le cadre d’un recours en réformation, le juge est amené à apprécier la décision déférée quant à son bien-fondé et à son opportunité, avec le pouvoir d’y substituer sa propre décision, impliquant que cette analyse s’opère au moment où il est appelé à statuer.

a) Quant à la décision du 12 juillet 2021 infligeant une amende de 1.000 euros suite à l’injonction du 16 juin 2021 Force est de relever que l’injonction de l’ITM du 16 juin 2021 se fonde sur les articles L.142-2 et L.142-3 du Code du travail exigeant que les entreprises établies ou exerçant leur activité habituellement hors du territoire luxembourgeois qui y détachent leurs salariés pour 6 une période déterminée, communiquent, dès le jour du commencement du détachement, un certain nombre d’informations et de documents à l’ITM. En l’espèce, l’ITM sollicitait notamment une copie de la fiche de salaire du mois de mai 2021 de son salarié détaché …, la preuve de paiement dudit salaire, ainsi que le pointage indiquant le début, la fin et la durée de travail journalier pour le même salarié.

Il s’ensuit que l’ITM était fondée, sur base des articles L.614-4, paragraphe (1), point a), L.142-2 et L.142-3 du Code du Travail à demander la communication, endéans un certain délai, des documents relevés ci-avant.

Force est de constater que bien que le demandeur, en ce qu’il se borne à affirmer avoir payé le salaire social minimum au salarié en question, ne conteste pas ne pas avoir transmis lesdits documents dans le délai lui imparti par l’injonction précitée du 16 juin 2021, de sorte que c’est a priori à bon droit que le directeur de l’ITM a infligé une amende administrative à Monsieur …, faute pour lui d’avoir remis tous les documents sollicités par l’injonction du 16 juin 2021 dans le délai imparti.

Force est ensuite au tribunal de constater que si, dans le cadre du recours contentieux sous analyse, le demandeur verse une copie de la fiche de salaire du mois de mai 2021 de son salarié Monsieur …, une copie d’un « accusé de réception du salaire par … », ainsi qu’un « Arbeitsnachweis Mai 2021 … », au-delà du constat ci-avant que ces documents n’ont pas été communiqués à l’ITM dans le délai imparti par l’injonction du 16 juin 2021, ne répondent pas tous à ladite injonction.

En effet, le document intitulé « accusé de réception du salaire par …. » n’est pas une preuve de paiement du salaire du mois de mai 2021 de ce dernier, ledit salarié y attestant qu’il aurait reçu son salaire tous les mois en l’espèce de la part du demandeur1, sans préciser le montant de son salaire payé au mois de mai 2021, d’autant plus qu’il ressort du contrat de travail dudit salarié que « Die Lohnzahlung erfolgt bargeldlos. ». Il s’ensuit qu’à défaut d’autres documents versés par le demandeur, la preuve de paiement du salaire du mois de mai 2021 du salarié Monsieur … reste manquante à ce jour.

En ce qui concerne le document intitulé « Arbeitsnachweis Mai 2021 … », le tribunal constate, à l’instar du délégué du gouvernement, qu’à défaut de date et signature, ledit document ne permet pas de vérifier son origine, respectivement son authenticité et n’est partant pas à qualifier de fiche de pointage indiquant le début, la fin et la durée de travail journalier du salarié en question, étant encore relevé que ledit document n’indique ni le début, ni la fin du travail journalier, de sorte que le pointage indiquant le début, la fin et la durée de travail journalier du salarié en question reste manquant à ce jour.

En ce qui concerne enfin l’affirmation du demandeur selon laquelle l’amende en question serait disproportionnée et que le montant réclamé devrait être revu à la baisse, il convient de rappeler que l’article L.143-2 du Code du Travail, laisse une large marge d’appréciation en ce qui concerne le montant à prononcer à titre d’amende administrative en fonction des circonstances, de la gravité, des faits et du comportement de l’auteur, conformément à l’article L.143-2 du Code du travail aux termes duquel « Les infractions aux dispositions des articles L.142-2, L.142-3 et L.281-1 sont passibles d’une amende administrative entre 1.000 et 5.000 euros par salarié détaché et entre 2.000 et 10.000 euros en 1 « [s]einen Lohn jeden Monat in Bar ausgezahlt bekomme, von meinem Arbeitgeber … » 7 cas de récidive dans le délai de deux ans à compter du jour de la notification de la première amende.

Le montant totale de l’amende ne peut être supérieur à 50.000 euros.

Pour fixer le montant de l’amende, le directeur de l’Inspection du travail et des mines prend en compte les circonstances et la gravité du manquement ainsi que le comportement de son auteur. (…) ».

En l’espèce, force est de constater qu’il résulte des pièces versées en cause, ainsi que des explications du demandeur et de la partie étatique que si la fiche de salaire du mois de mai 2021 du salarié Monsieur … a certes entretemps été communiquée en phase contentieuse, la preuve de paiement dudit salaire, ainsi que le pointage indiquant le début, la fin et la durée de travail journalier du salarié en question sont toujours manquants, de sorte que le demandeur a non seulement versé des documents en retard, mais reste également toujours en défaut d’avoir donné des suites à ladite injonction en ce qui concerne la totalité des documents réclamés.

En effet, aux vœux de l’article L.614-13 du Code du travail, précité, non seulement le défaut de transmission des documents sollicités, mais également le simple retard dans les suites données à une injonction sont passibles d’une amende.

Ainsi, au regard du fait que le demandeur reste toujours en défaut d’avoir soumis à l’ITM, la preuve de paiement du salaire du mois de mai 2021 du salarié Monsieur …, ainsi que le pointage indiquant le début, la fin et la durée de travail journalier du salarié en question, il y a lieu de retenir que l’amende de 1.000,- euros, infligée à travers la décision déférée du 12 juillet 2021, reste justifiée tant dans son principe que dans son quantum au regard des faits de l’espèce et ne saurait être considérée comme étant disproportionnée.

Il s’ensuit que le moyen relatif à une disproportion de l’amende prononcée en date du 12 juillet 2021 est à rejeter pour manquer de fondement.

b) Quant à la décision du 20 juillet 2021 réduisant, sur opposition, l’amende administrative prononcée à son encontre par sa décision du 9 juin 2021, à un montant de 1.000,-

euros, suite à l’injonction du 20 mai 2021 Force est de relever que l’injonction de l’ITM du 20 mai 2021 se fonde également sur les articles L.142-2 et L.142-3 du Code du travail exigeant que les entreprises établies ou exerçant leur activité habituellement hors du territoire luxembourgeois qui y détachent leurs salariés pour une période déterminée, communiquent, dès le jour du commencement du détachement, un certain nombre d’informations et de documents à l’ITM. En l’espèce, l’ITM sollicitait un certificat de déclaration préalable délivré par la direction générale PME et entrepreneuriat auprès du ministère de l’Economie, ainsi qu’une copie du contrat d’entreprise avec le maître d’ouvrage ou le donneur d’ordre, demande fondée sur les articles L.614-4, paragraphe (1), point a), L.142-2 et L.142-3 du Code du travail lui permettant de solliciter la communication, endéans un certain délai, des documents relevés ci-avant.

Dans ce cadre, le tribunal relève que les documents sollicités par l’ITM, à travers l’injonction du 20 mai 2021, tels que repris ci-avant, constituent des documents a priori standard que l’employeur devrait avoir à sa disposition dès le commencement des travaux pour lesquels il détache des salariés au Grand-Duché de Luxembourg, de sorte que le délai de 15 8 jours calendrier imposé par l’injonction du 20 mai 2021 pour communiquer lesdits documents n’appelle aucune critique.

Force est ensuite de constater que bien que le demandeur a été enjoint, le 20 mai 2021, de communiquer à l’ITM les documents concernant le détachement de ses salariés, tels que relevés ci-avant, il n’a versé que certains des documents sollicités. En effet, il ressort du dossier administratif et notamment de la décision précitée du 20 juillet 2021 qu’au jour de ladite décision manquait toujours un certificat de déclaration préalable délivré par la direction générale PME et entrepreneuriat auprès du ministère de l’Economie. S’il ressort dès lors, certes, de ladite décision, réduisant l’amende administrative infligée par la décision précitée du 9 juin 2021, qu’une partie des documents faisant objet de l’injonction du 20 mai 2021 a été transmise à l’ITM, il ne ressort, contrairement aux développements du demandeur, pas du dossier administratif, et notamment de ses courriels des 4 et 15 juin 2021, qu’une copie du contrat d’entreprise avec le maître d’ouvrage ou le donneur d’ordre aurait été transmis à l’ITM dans le délai imparti par l’injonction précitée du 20 mai 2021.

En effet, s’il peut certes être déduit du fait que la décision du 12 juillet 2021 constate que l’unique certificat de déclaration préalable délivré par la direction générale PME et entrepreneuriat auprès du ministère de l’Economie était manquant au jour de ladite décision, le demandeur reste en défaut d’établir que l’ITM aurait reçu de sa part une copie du contrat d’entreprise avec le maître d’ouvrage ou le donneur d’ordre par le biais desdits courriels des 4 et 15 juin 2021 à l’adresse de l’ITM, dont le demandeur verse une copie en cause, alors que lesdites pièces ne permettent pas de vérifier les pièces jointes audit courriel, le demandeur restant par ailleurs, en défaut de verser, durant la phase contentieuse une copie des documents prétendument transmis par lesdits courriels.

Force est ainsi au tribunal de retenir qu’en tout état de cause, le certificat de déclaration préalable délivré par la direction générale PME et entrepreneuriat auprès du ministère de l’Economie sollicitée par l’ITM reste toujours en souffrance, de sorte que c’est a priori à bon droit que le directeur de l’ITM a infligé une amende administrative à Monsieur …, faute pour lui d’avoir remis tous les documents sollicités par l’injonction du 20 mai 2021.

Concernant ensuite le moyen relatif à une violation du principe non bis in idem, selon lequel une personne ne pourrait pas faire l’objet de deux sanctions distinctes pour le même fait, force est au tribunal de retenir que c’est à bon droit que le délégué du gouvernement a soulevé que les décisions déférées des 12 et 20 juillet 2021, telles que reprises in extenso ci-avant, sanctionnent la non-communication de documents différents, de sorte que ce moyen est à écarter pour manquer de fondement.

En ce qui concerne enfin l’affirmation du demandeur selon laquelle l’amende en question serait disproportionnée et que le montant réclamé devrait être revu à la baisse, il convient de rappeler que l’article L.143-2 du Code du travail, précité, laisse une large marge d’appréciation en ce qui concerne le montant à prononcer à titre d’amende administrative en fonction des circonstances, de la gravité, des faits et du comportement de l’auteur.

En l’espèce, force est de constater qu’il résulte des pièces versées en cause, ainsi que des explications du demandeur et de la partie étatique que si un des documents sollicités par l’injonction du 20 mai 2021 a certes été communiqué en phase précontentieuse, circonstance qui a d’ailleurs été prise en considération par le directeur du fait que l’amende a été réduite en conséquence, ce dernier a cependant, à bon droit, pu constater qu’un certificat de déclaration 9 préalable délivré par la direction générale PME et entrepreneuriat auprès du ministère de l’Economie manquait toujours, de sorte que le demandeur reste également en défaut d’avoir donné des suites à ladite injonction en ce qui concerne la totalité des documents réclamés, de sorte qu’il y a lieu de retenir que l’amende de 1.000 euros infligée le 20 juillet 2021 est justifiée tant dans son principe que dans son quantum au regard des faits de l’espèce et ne saurait être considérée comme étant disproportionnée.

Il s’ensuit que le moyen relatif à une disproportion de l’amende prononcée en date du 20 juillet 2021 est également à rejeter.

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, et à défaut de tout autre moyen, le recours en réformation sous analyse est à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit en la forme le recours principal en réformation ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaires en annulation ;

condamne le demandeur aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé par :

Paul Nourissier, vice-président, Olivier Poos, premier juge, Laura Urbany, juge, et lu à l’audience publique du 30 août 2023 par le vice-président, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Paul Nourissier Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 30 août0 2023 Le greffier du tribunal administratif 10


Synthèse
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 46527
Date de la décision : 30/08/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 19/09/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-08-30;46527 ?

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