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26/07/2023 | LUXEMBOURG | N°45706,46555

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 26 juillet 2023, 45706,46555


Tribunal administratif Nos 45706 et 46555 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:45706+46555 4e chambre Inscrits les 26 février et 11 octobre 2021 Audience publique de vacation du 26 juillet 2023 Recours formés par la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 SARL, …, contre trois décisions du directeur de l’administration des Contributions directes, en matière d’impôts

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JUGEMENT

I.

Vu la requête inscrite sous le numéro 45706 du rôle et déposée au

greffe du tribunal administratif le 26 février 2021 par la société à responsabilité limitée Loyen...

Tribunal administratif Nos 45706 et 46555 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:45706+46555 4e chambre Inscrits les 26 février et 11 octobre 2021 Audience publique de vacation du 26 juillet 2023 Recours formés par la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 SARL, …, contre trois décisions du directeur de l’administration des Contributions directes, en matière d’impôts

___________________________________________________________________________

JUGEMENT

I.

Vu la requête inscrite sous le numéro 45706 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 26 février 2021 par la société à responsabilité limitée Loyens & Loeff Luxembourg SARL, inscrite sur la liste V du tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2540 Luxembourg, 18-20, rue Edward Steichen, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B174.248, représentée aux fins des présentes par Maître Petrus Moons, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 SARL, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par ses organes sociaux actuellement en fonction, et au nom de la société SOCIETE 2, agissant par sa succursale de droit luxembourgeois SOCIETE 3, ayant son siège social au …, L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son représentant permanent unique, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 26 novembre 2020, référencée sous le numéro de rôle C 26686, portant rejet de leur réclamation introduite le 5 juillet 2019 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 25 mai 2021 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 25 juin 2021 par la société à responsabilité limitée Loyens & Loeff, préqualifiée, au nom et pour le compte des sociétés SOCIETE 1 SARL et SOCIETE 2, préqualifiées ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 14 septembre 2021 ;

II.

Vu la requête inscrite sous le numéro 46555 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 11 octobre 2021 par la société à responsabilité limitée Loyens & Loeff Luxembourg SARL, inscrite sur la liste V du tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2540 Luxembourg, 18-20, rue Edward Steichen, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B 174.248, représentée aux fins des présentes par Maître Petrus Moons, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 SARL, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par ses organes sociaux actuellement en fonction, et au nom de la société SOCIETE 2, agissant par sa succursale de droit luxembourgeois SOCIETE 3, ayant son siège social au …, L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son représentant permanent unique, tendant à la réformation sinon à l’annulation de deux décisions du directeur de l’administration des Contributions directes du 16 juillet 2021, référencée sous les numéros de rôle C 29101 et C 29102, portant rejet de leur réclamation introduite le 25 février 2021 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 11 janvier 2022 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 10 février 2022 par la société à responsabilité limitée Loyens & Loeff, préqualifiée, au nom et pour le compte des sociétés SOCIETE 1 SARL et SOCIETE 2, préqualifiées ;

I. + II.

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions directoriales déférées ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Pierre-Antoine Klethi, en remplacement de Maître Petrus Moons, et Monsieur le délégué du gouvernement Tom Kerschenmeyer en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 20 septembre 2022.

Suite au dépôt de sa déclaration pour l’impôt sur le revenu des collectivités, pour l’impôt commercial communal et pour l’impôt sur la fortune de l’année 2016, le bureau d’imposition Sociétés 6 de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par le « bureau d’imposition », informa la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 SARL, ci-

après désignés par la « société SOCIETE 1 », par courrier du 7 juin 2018 et sur le fondement du paragraphe 205 (3) de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégée « AO », qu’il envisageait de s’écarter de ladite déclaration fiscale aux motifs suivants :

« (…) En vertu du §205 (3) de la loi générale des impôts, je vous informe que le bureau d'imposition Sociétés VI envisage de s'écarter sur différents points de la déclaration fiscale de l'année 2016.

Après contrôle des pièces et renseignements mis à notre disposition, l'application de l'article 50bis LIR et §60bis BewG est partiellement refusée.

Notre décision se base sur le fait que suivant le contrat de licence avec LICENCE 1, vous n'est pas propriétaire de la licence mais seulement bailleur de la licence en question pour une durée déterminée de 25 ans.

Je vous prie de formuler vos objections éventuelles pour le 22 juin 2018 au plus tard.

Ce délai dépassé, l'imposition sera établie en tenant compte du point ci-avant signalé. (…) ».

Par courrier du 5 juillet 2018, la société SOCIETE 1 formula ses objections à l’égard de l’imposition envisagée par le bureau d’imposition, courrier suite auquel le bureau d’imposition réitéra sa position, par courrier du 23 juillet 2018, dans les termes suivants :

« (…) En vertu du §205 (3) de la loi générale des impôts, je vous informe, que le bureau d'imposition Sociétés 6 envisage de s'écarter sur différents points de la déclaration fiscale de l'année 2016.

Après analyse de votre lettre du 5 juillet 2018, le bureau d'imposition ne change en rien sa position initiale comme mentionnée dans le courrier du 7 juin 2018. Dès lors, la somme de … $ payée à titre de droit exclusif d'utilisation de la marque MARQUE 1 est à activer au bilan et à amortir sur la durée du contrat (i.e. 25 ans).

Je vous prie de formuler vos objections éventuelles pour le 6 août 2018 au plus tard.

Ce délai dépassé, l'imposition sera établie en tenant compte du point ci-avant signalé. (…) ».

Par courrier du 6 août 2018, la société SOCIETE 1 formula ses objections à l’égard de l’imposition envisagée par le bureau d’imposition et sollicita la tenue d’une réunion, laquelle eut lieu le 20 septembre 2018.

En date du 3 avril 2019, le bureau d’imposition émit à l’égard de la société SOCIETE 1 les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l'impôt commercial communal de l’année 2016, le bulletin de l’établissement de la valeur unitaire de la fortune d’exploitation, ainsi que le bulletin de l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2017, et, à l’égard de la société SOCIETE 2, ci-après désignée par « la SOCIETE 2 », les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l'impôt commercial communal de l’année 2016.

Par courrier du 10 avril 2019, la société SOCIETE 1 transmit ses observations au bureau d’imposition suite à la réunion du 20 septembre 2018 afin de confirmer sa position quant à l’application de l’article 50bis de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, dénommée ci-après « LIR », concernant le contrat de licence conclu avec la société de droit américain LICENCE 1, ci-après désignée par « la société MARQUE 1 ».

Par courrier du 21 mai 2019, le bureau d’imposition informa la société SOCIETE 1 du maintien de sa position exprimée à travers ses courriers des 11 avril et 7 juin 2018, courrier libellé comme suit :

« (…) Après réception de votre lettre du 10 avril concernant vos observations au sujet de l'application de l'article 50bis L.I.R., je vous prie de bien vouloir noter que le bureau d'imposition ne compte pas différer de sa position motivée dans les courriers du 11 avril 2018 et du 7 juin 2018.

Il vous est encore possible d'introduire une réclamation auprès du directeur des contributions directes. (…) ».

Par courrier du 5 juillet 2019, la société SOCIETE 1, ainsi que la SOCIETE 2 introduisirent une réclamation auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le directeur », contre les bulletins émis à leur encontre le 3 avril 2019.

La société SOCIETE 1 introduisit encore le 23 août 2019 auprès du directeur une réclamation à l’encontre du prédit courrier du bureau d’imposition du 21 mai 2019, laquelle fut portée au rôle du contentieux sous le numéro C 26909.

Suite au dépôt de leurs déclarations pour l’impôt sur le revenu des collectivités, pour l’impôt commercial communal et pour l’impôt sur la fortune des années 2017 à 2018 par la société SOCIETE 1, respectivement des années 2016 à 2018, en ce qui concerne la SOCIETE 2, le bureau d’imposition informa lesdites sociétés par courriers du 16 octobre 2020, sur le fondement du paragraphe 205 (3) AO, qu’il envisageait de s’écarter desdites déclarations fiscales. Il informa plus précisément la société SOCIETE 1 qu’il considéra celle-ci comme n’étant pas le propriétaire économique de la marque MARQUE 1, de sorte à lui refuser les déductions prévue par l'article 50bis LIR et 60bis de la loi modifiée concernant l’évaluation des biens et valeurs du 16 octobre 1934, appelée « Bewertungsgesetz », ci-après désignée par « BewG », et fixa le résultat transférable pour l’année 2017 à … euros et pour l’année 2018 à … euros, tout en l’invitant à fournir ses observations pour le 13 novembre 2020 au plus tard.

Sur base de la même considération quant à la marque MARQUE 1, le bureau d’imposition informa la SOCIETE 2 par ledit courrier du 16 octobre 2020 que la redevance unique payée à titre de location pour ladite marque n'était pas à considérer comme un bien de l'actif net investi mais constituait une charge d'exploitation, emportant comme conséquence que le résultat transférable pour l'année 2016 de la société SOCIETE 1, estimé par ledit bureau à -… euros, affecta les résultats de la SOCIETE 2 fixés à -… euros pour l’année 2016, à … euros pour l’année 2017 et à … euros pour l’année 2018, la SOCIETE 2 ayant encore été invitée à fournir ses observations pour le 13 novembre 2020 au plus tard. Les sociétés SOCIETE 1 et Société 2 ne prirent pas position par rapport aux courriers respectifs leurs adressés par le bureau d’imposition.

En date du 25 novembre 2020, le bureau d’imposition émit à l’égard des sociétés SOCIETE 1 et Société 2 les bulletins respectifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l'impôt commercial communal des années 2017 et 2018.

Par une décision du 26 novembre 2020, répertoriée sous le numéro C 26909 du rôle, le directeur requalifia la réclamation précitée de la société SOCIETE 1 du 23 août 2019 en recours hiérarchique formel qu’il déclara irrecevable. Le recours introduit par la société SOCIETE 1 à l’encontre de la décision directoriale, précitée, du 26 novembre 2020 ayant déclaré irrecevable son recours hiérarchique formel a été rejeté par un jugement du 30 juin 2023 du tribunal administratif, inscrit sous le numéro 45692 du rôle.

Par une deuxième décision du 26 novembre 2020, répertoriée sous le numéro C 26686 du rôle, le directeur déclara la réclamation de la société SOCIETE 1 du 5 juillet 2019 irrecevable pour défaut d’intérêt à agir dans le chef de ladite société en ce qu’elle était dirigée contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2016, la reçut en la forme pour le surplus, établit la valeur unitaire de la fortune d’exploitation au 1er janvier 2017 à -… euros, fixa l’impôt sur la fortune dû pour l’année 2017 à … euros et renvoya le dossier au bureau d’imposition pour exécution dans les termes suivants :

« (…) Vu la requête introduite le 5 juillet 2019 par Me Nadège Le Gouellec, de la société à responsabilité limitée Loyens & Loeff Luxembourg, d'une part, au nom de la société à responsabilité limitée SOCIETE 1, avec siège social à L-…, pour réclamer contre :

- les bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal de l'année 2016, - le bulletin de l'établissement séparé de la valeur unitaire de la fortune d'exploitation au 1er janvier 2017 - le bulletin de l'impôt sur la fortune au 1er janvier 2017, tous émis en date du 3 avril 2019, et, d'autre part, au nom de la succursale luxembourgeoise d'une personne morale de droit canadien SOCIETE 2, avec siège social à L-…, pour réclamer contre :

- les bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal de l'année 2016, tous les deux émis en date du 3 avril 2019 ;

Vu le dossier fiscal ;

Vu les §§ 102, 107, 228, 238, 254, alinéa 2 et 301 de la loi générale des impôts (AO) ;

Considérant de prime abord, qu'il importe de noter que depuis l'année d'imposition 2016, les réclamantes font partie d'un groupe de sociétés ayant opté pour le régime d'intégration fiscale tel qu'instauré par l'article 164bis de la loi concernant l'impôt sur le revenu (L.I.R.) ; que la société mère constitue la société intégrante, en l'occurrence, la succursale luxembourgeoise, alors que la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 constitue la société intégrée ; que le résultat de la société intégrée est à intégrer dans celui de la société intégrante pour une période couvrant au moins 5 exercices d'exploitation ;

Considérant que, bien qu'intégrées fiscalement, les réclamantes sont à considérer comme des sociétés ayant des personnalités juridiques distinctes ; que les réclamations introduites par la succursale luxembourgeoise et la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 sont réunies en un seul écrit ;

Considérant néanmoins que chaque acte attaqué fera l'objet d'une décision directoriale distincte, la présente décision ne portant que sur les réclamations introduites par la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 (ci-après : la réclamante), celles introduites par la succursale luxembourgeoise étant disjointes pour être vidées séparément sous le n° du rôle C 26685 ;

Considérant que si l'introduction de plusieurs instances par une seule et même requête n'est incompatible, en l'espèce, ni avec le secret fiscal, ni avec les règles de compétence et de procédure, elle ne dispense pas d'examiner chaque acte attaqué en lui-même et selon ses propres mérites et ne saurait imposer une jonction qu'il est loisible au directeur des contributions de prononcer lorsque les instances lui paraissent suffisamment connexes ; qu'il n'y a pas lieu de la refuser en la forme ;

Considérant que la réclamante fait grief au bureau d'imposition d'avoir refusé l'application du régime de la propriété intellectuelle tel qu'ancré à l'article 50bis L.I.R. et au § 60bis de la loi sur l'évaluation des biens et valeurs (BewG) ;

Considérant que les réclamations ont été introduites par qui de droit (§ 238 AO), dans les forme (§ 249 AO) et délai (§ 228 AO) de la loi, qu'elles sont partant recevables ;

Considérant qu'en vertu du § 243 AO, une réclamation régulièrement introduite déclenche d'office un réexamen intégral de la cause, la loi d'impôt étant d'ordre public ; qu'à cet égard le contrôle de la légalité externe de l'acte doit précéder celui du bien-fondé ;

En ce qui concerne les bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal de l'année 2016 Considérant qu'aux termes de l'article 164bis L.I.R., les sociétés de capitaux résidentes pleinement imposables, dont 95 pour cent au moins du capital est détenu directement ou indirectement par une autre société de capitaux résidente pleinement imposable ou par un établissement stable indigène d'une société de capitaux non résidente pleinement imposable à un impôt correspondant à l'impôt sur le revenu des collectivités, peuvent, sur demande, être intégrées fiscalement dans la société mère ou dans l'établissement stable indigène, de façon à faire masse de leurs résultats fiscaux respectifs avec celui de la société mère ou de l'établissement stable indigène ;

Considérant que la circulaire L.I.R. n° 164bis/1 du 27 septembre 2004 retient que le régime d'intégration fiscale ne vise pas à instaurer une base légale pour l'imposition du résultat consolidé au sens propre d'un groupe de sociétés, mais se limite à permettre aux sociétés intéressées de regrouper ou de compenser leurs résultats fiscaux pendant la période d'application du régime d'intégration fiscale ; que le résultat fiscal de la société filiale admise au régime d'intégration fiscale est ajouté à celui de la société intégrante, en l'occurrence de la succursale luxembourgeoise ;

Considérant qu'aux termes de l'alinéa 4 de l'article 1er du règlement grand-ducal du 18 décembre 2015 portant exécution de l'article 164bis LIR., la société intégrante est passible de l'impôt sur le revenu des collectivités correspondant au revenu imposable du groupe établi, le revenu imposable de la requérante se chiffrant dorénavant et en toute logique à 0 (zéro) euro ;

Considérant qu'aux termes du § 232, alinéa 1er AO, un bulletin d'impôt ne peut être attaqué qu'au cas où le contribuable se sent lésé par le montant de l'impôt fixé ou conteste son assujettissement à l'impôt ;

Considérant que les montants de l'impôt sur le revenu des collectivités et de l'impôt commercial communal de l'année 2016 ont été fixés à 0 (zéro) euro et que la réclamante ne prétend pas à la fixation de cotes d'impôt positives ;

Considérant qu'il découle de ce qui précède que les réclamations contre les bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal de l'année 2016 doivent être déclarées irrecevables pour défaut d'intérêt ;

En ce qui concerne le bulletin de l'établissement séparé de la valeur unitaire de la fortune d'exploitation au 1er janvier 2017 Considérant qu'en date du 9 décembre 2015, la réclamante a conclu un contrat de licence avec la société de droit américain LICENCE 1 (ci-après : la société MARQUE 1) aux termes duquel elle a obtenu le droit d'exploitation exclusif des marques « MARQUE 1 » (ci-

après : les marques) en contrepartie d'un montant de … dollars américains ; que par la suite, elle a accordé des sous-licences en relation avec les marques à des sociétés appartenant au même groupe de sociétés dont fait partie la réclamante (ci-après le groupe MARQUE 1) ;

Considérant qu'en exécution du § 205, alinéa 3 AO, le bureau d'imposition a informé la réclamante en date du 7 juin 2018, que l'application de l'article 50bis et du § 60bis BewG lui serait refusée au motif qu'elle ne serait pas propriétaire des marques « mais seulement bailleur de la licence en question pour une durée déterminée de 25 ans » ;

Considérant qu'aux termes du § 205, alinéa 3 AO des divergences notables par rapport à la déclaration du contribuable doivent, pour autant qu'elles soient en sa défaveur, lui être communiquées pour observation préalablement à l'émission du bulletin ; que le but du § 205, alinéa 3 AO, en tant que principe de bonne administration, consiste à vérifier les conclusions auxquelles tend une instruction en défaveur du contribuable et partant à éviter d'éventuels malentendus ;

Considérant que suite au prédit courrier, la réclamante s'est montrée insatisfaite quant aux divergences en sa défaveur, tandis qu'elle n'a pas apporté des éléments nouveaux et révélateurs au bureau d'imposition ; qu'il s'ensuit que le bureau d'imposition a procédé à l'imposition des années 2016 et 2017 en se référant aux redressements communiqués dans son courrier du 7 juin 2018 ; qu'in concreto la réclamante avait sollicité l'exonération des droits de propriété intellectuelle en vertu du § 60bis BewG pour un montant de … dollars américains ; que le bureau d'imposition a refusé l'exonération des marques à hauteur de … dollars américains de sorte que le bulletin d'impôt litigieux ne renseigne qu'une exonération à hauteur de (0,9487 x (… - …) i.e.) … euros ; qu'il découle de ce qui précède, qu'en l'espèce la forme suivie par le bureau d'imposition ne prête pas à critique ;

Considérant que le bureau d'imposition et la réclamante sont en désaccord en ce qui concerne la notion de propriété des marques ; que la question pertinente en l'espèce est celle de savoir si la réclamante est à déclarer comme propriétaire économique des biens incorporels en question ;

Considérant que le § 60bis BewG stipule que sont exonérées de l'impôt sur la fortune les marques de fabrique ou de commerce lorsqu'au cours de l'exercice d'exploitation qui précède la date-clé de fixation de la valeur unitaire, les conditions fixées par l'article 50bis, alinéas 4 et 5 L.I.R. sont remplies ;

Considérant qu'aux termes de l'alinéa 4 : « L'application des alinéas 1 à 3 du présent article est soumise aux conditions suivantes :

1. Le droit doit avoir été constitué ou acquis après le 31 décembre 2007 ;

2. Les dépenses, amortissements et déductions pour dépréciation en rapport avec le droit sont à porter à l'actif du bilan du contribuable et à intégrer dans le résultat au titre du premier exercice pour lequel l'application des dispositions des alinéas susvisés entre en ligne de compte pour autant que pour un exercice donné ces frais ont dépassé les revenus en rapport avec ce même droit. » ;

que l'alinéa 5 retient que « L'application des alinéas 1 et 3 est soumise à la condition additionnelle que le droit n'ait pas été acquis d'une personne qui a la qualité de société associée. Une société est à considérer comme société associée au sens du présent alinéa :

a. si elle détient une participation directe d'au moins 10% dans le capital de la société bénéficiaire du revenu, ou b. si son capital est détenu directement à raison d'au moins 10% par la société bénéficiaire du revenu, ou c. si son capital est détenu directement à raison d'au moins 10% par une troisième société et que celle-ci détient une participation directe d'au moins 10% dans le capital de la société bénéficiaire du revenu. » ;

Considérant que le régime de faveur instauré par l'article 50bis L.I.R. a été abrogé avec effet au 1er juillet 2016 par l'article 5 de la loi du 18 décembre 2015 concernant le budget des recettes et des dépenses de l'Etat pour l'exercice 2016, étant précisé que la loi précitée prévoit une applicabilité transitoire aux revenus et plus-values, pendant une période commençant le 1er juillet 2016 et expirant le 30 juin 2021, sur les droits qui ont été constitués ou acquis avant le 1er juillet 2016 ;

Considérant que le régime de faveur instauré par l'article 50bis L.I.R. présuppose que le contribuable percevant des revenus à titre de rémunération pour l'usage ou la concession de l'usage des droits de propriété intellectuelle soit le propriétaire de ces droits ; en découle, en matière de principe tout comme en l'espèce, que seul le propriétaire des marques de fabrique ou de commerce peut bénéficier de l'exonération partielle prévue à l'endroit de l'alinéa 1er de l'article 50bis L.I.R. respectivement du § 60bis BewG ;

Considérant que la circulaire L.I.R. n° 50bis/1 du 5 mars 2009 dispose qu' « En principe, la propriété juridique et la propriété économique d'un bien sont réunis dans la même main. Si tel n'est pas le cas, le paragraphe 11, n° 4 de la loi d'adaptation fiscale (StAnpG) prévoit que si une personne autre que le propriétaire juridique d'un bien (c'est-à-

dire le propriétaire de droit au nom duquel le bien est officiellement acté) se comporte de manière telle qu'il enlève au propriétaire juridique toute possibilité de disposer dudit bien, ce bien lui est à attribuer aux fins de l'imposition. Partant, lorsque la propriété économique et la propriété juridique d'un bien incorporel ne se confondent pas, c'est le propriétaire économique qui est à considérer comme propriétaire dudit bien pour l'application de l'article 50bis L.I.R. » ;

Considérant que le § 11, n° 4 StAnpG dispose que les « Wirtschaftsgüter, die jemand in Eigenbesitz hat, werden dem Eigenbesitzer zugerechnet. Eigenbesitzer ist, wer ein Wirtschaftsgut als ihm gehörig besitzt. » ; que le § 11, n° 4 StAnpG, ayant trait à l'approche économique, l'emporte de plein droit sur l'approche purement juridique ;

Considérant que le Tribunal administratif a retenu encore à ce sujet qu'il « ne saurait s'arrêter aux seules formes juridiques choisies par les parties pour réaliser une opération déterminée, mais il est appelé, au-delà de l'apparence juridique, de rechercher et d'analyser la réalité économique recouverte par lesdites formes juridiques. En effet, il est de principe en droit fiscal que les faits et les actes juridiques doivent être interprétés et appréciés d'après les critères économiques. — La définition « Eigenbesitzer » du par. 11, pt. 4 StAnpG constitue un concept sui generis de nature fiscale, qui ne se couvre pas avec les catégories du droit civil et il se dégage du terme en question que la loi envisage la situation d'un possesseur plutôt que d'un propriétaire juridique, de sorte qu'elle n'exige pas que tous les attributs du propriétaire soient réunis dons la personne de ce possesseur spécial » ; qu'il s'ensuit qu'au cas où un propriétaire, juridique ou économique, ne peut être déterminé avec certitude, le § 11, n° 4 StAnpG sort ses effets en disposant que c'est la propriété économique qui l'emporte ;

Considérant qu'en l'espèce, il s'impose d'analyser le contrat de licence du 9 décembre 2015 afin de déterminer si la réclamante est à déclarer comme propriétaire économique des marques ; que le préambule dudit contrat expose que la société MARQUE 1 est le propriétaire des marques (« the Licensor [la société MARQUE 1] is the owner of the MARQUE 1 Marks ») ; que la société MARQUE 1 a conféré un droit d'exploitation exclusif, principalement sur le territoire de l'Europe, pour une durée de 25 ans à la réclamante en contrepartie d'un montant de … dollars américains; qu'en ce qui concerne la commercialisation et la publicité des marques, la société MARQUE 1 a un droit d'intervention de sorte qu'elle peut refuser toute sorte de commercialisation et de publicité en relation avec les marques (« Licensor has the right to approve or disapprove the content and media of all advertising and marketing programs and materials Licensee [la réclamante] proposes to use to promote the Marks and/or the business of its MARQUE 1 Stores. Licensor has the right to refuse the content and media of all advertising (…) » (point 4.2.) ; que pour ce qui est des opérations commerciales en relation avec les magasins « MARQUE 1 » de la réclamante, le point 5.1. retient que « Licensee further agrees that such MARQUE 1 Stores will not, without Licensor's approval, offer any merchandise, products or services not then authorized by Licensor. » ; que le point 7 prescrit des engagements supplémentaires à la réclamante (« acceptable to Licensor », « Licensee shall have obtained Licensor's prior consent ») ;

Considérant que le point 8.2. retient que la réclamante doit s'assurer que les sous-

licenciés acceptent d'utiliser les marques pour identifier les magasins MARQUE 1 uniquement de la manière prescrite par la société MARQUE 1 (« Licensee shall, and shall ensure that its sublicensees agree to, use the Marks to identify MARQUE 1 Stores only in a manner prescribed by Licensor from time to time. ») ;

Considérant qu'il découle de ce qui précède que la réclamante doit demander le consentement de la société MARQUE 1 à chaque fois qu'elle entend faire usage des marques dans le cadre de ses démarches commerciales ;

Considérant que même les contrats de sous-licence que la réclamante a conclus avec ses clientes renvoient au fait que la société MARQUE 1 est le seul propriétaire exclusif des marques ; que la réclamante a accordé des sous-licences à des sociétés du groupe MARQUE 1 en mettant en exergue ce qui suit : « Licensee recoqnizes and admits that all rights to the Marks shall be solely and exclusively the property of LICENCE 1 Licensee shall claim no legal or equitable ownership interest, right, privilege or title to the Marks (…) » ; que cette stipulation renforce d'autant plus le fait que la société MARQUE 1 est à considérer comme vrai propriétaire des marques ;

Considérant en outre que la réclamante ne s'est vu conférer le droit d'exploitation exclusif des marques sur certains territoires de l'Europe que pour une durée de 25 ans ; qu'en principe, le possesseur d'un bien est à considérer comme propriétaire (économique) s'il peut jouir du bien en question sans limitation du droit d'exploitation et sans limitation dans le temps ;

Considérant, en ce qui concerne la notion de propriété économique, que la réclamante se prévaut d'un arrêt de la Cour administrative retenant que quatre critères doivent être remplis cumulativement afin qu'une personne puisse être qualifiée de propriétaire économique :

« (i) La personne doit pouvoir bénéficier d'une augmentation de valeur du bien sous-

jacent au contrat ;

(ii) La personne doit supporter les risques de dépréciation du bien sous-jacent au contrat;

(iii) La personne doit détenir les intérêts bénéficiaires/droits réels de l'actif sous-

jacent au contrat ; et (iv) L'acquisition de l'actif sous-jacent doit être irréversible » ;

Considérant que le point 9.2. stipule que la réclamante a le droit de transférer ou de céder tout ou partie de ses droits ou obligations en vertu du contrat de licence en question à toute personne ou entité juridique, à condition toutefois que le transfert ait lieu avec l'approbation écrite préalable de la société MARQUE 1, sous réserve de ne pas le refuser pour des raisons commerciales raisonnables (« Licensee has the right to transfer or assign all or any part of its rights or obligations under this Agreement to any person or legal entity, provided that any transfer by Licensee takes place with Licensor's prior written approval, not to be withheld with reasonable commercial reason. ») ;

Considérant qu'à défaut d'approbation écrite de la part de la société MARQUE 1, la réclamante, d'une part, ne bénéficie pas de l'augmentation de valeur des marques, et d'autre part, ne supporte pas les risques de dépréciation des marques ; que la réserve suivant laquelle un refus pour des raisons commerciales raisonnables de la part de la société MARQUE 1 ne saurait faire obstacle à une cession par la réclamante ne semble pas pertinente, étant donné qu'il s'agit de toute façon d'un groupe d'entreprises toutes apparentées et liées l'une à l'autre ; que cette conclusion est corroborée par le fait que les droits d'exploitation ont été cédés à la société de droit irlandais MARQUE 4 en date du 21 juillet 2017 pour un montant de … dollars américains ; que toute personne moyennement diligente et consciencieuse aurait refusé une telle vente pour des raisons commerciales raisonnables afin de réaliser elle-même une plus-value à hauteur de (… - … i.e.) … dollars américains ; qu'il doit être admis que la clause de refus susmentionnée n'est qu'une formulation creuse étant donné qu'elle n'a pas été exercée par la société MARQUE 1 ; qu'il suit de ce qui précède que les deux premiers critères mis en avant par la Cour administrative ne s'avèrent pas remplis en l'espèce ;

Considérant que pour ce qui est du dernier critère, la réclamante estime que celui-ci serait « rempli puisque LICENCE 1 ne peut mettre fin au Contrat de Licence unilatéralement avant l'échéance de 25 ans, sauf si SOCIETE 1 [la réclamante] viole une obligation contractuelle substantielle ou est en faillite ou liquidation. En outre, la durée de l'exclusivité accordée à SOCIETE 1 est supérieure à la durée de vie normale d'une marque. » ; qu'elle est d'avis qu'elle aurait acquis irréversiblement les marques et serait partant à considérer comme propriétaire économique de ces dernières ;

Considérant que dans son placet, la réclamante n'a pas explicitement renseigné sur la « durée de vie » d'une marque ; qu'il doit être admis qu'elle fait référence à la durée de protection d'une marque ; qu'en l'espèce, elle a accordé des sous-licences à des sociétés du groupe MARQUE 1 qui commercialisent les marques sur le territoire européen ; qu'en Europe, une marque est généralement protégée pour une durée de dix ans à partir de son dépôt auprès de l'Office de l'Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) ; que cette protection est renouvelable au terme de 10 ans de sorte que son propriétaire peut, en principe, éternellement tirer profit d'une marque, c'est-à-dire aussi longtemps qu'il décide de prolonger cette protection ;

Considérant que l'affirmation selon laquelle « La période d'exclusivité de 25 ans en vertu du Contrat de Licence est supérieure à la durée de vie d'une marque » laisse d'être fondée dans la mesure où elle est contredite par le fait qu'il existe dans le monde une multitude de marques dont la « durée de vie » a dépassé de loin le quart de siècle ;

Considérant que la réclamante argue que « le transfert de la propriété juridique n'était pas possible pour différentes raisons juridiques et commerciales » ; que l'instruction menée par la présente instance a toutefois révélé que figurent au bilan au 31 décembre 2016 encore deux autres marques dénommées « Marque 2 » et « Marque 3 » et acquises en pleine propriété pour les montants respectifs de … dollars américains et … dollars américains ; qu'il est pour le moins étonnant que d'un côté, la propriété juridique des marques n'a pas pu être transférée, alors que d'un autre côté, la pleine propriété des marques « Marque 2 » et « Marque 3 » a pu être transférée sans difficultés à la réclamante ;

Considérant finalement que le point 5.4. du contrat de licence du 9 décembre 2015 stipule de manière irrévocable que la société MARQUE 1 est le seul propriétaire exclusif de tous les droits afférents aux marques : « Licensee recoqnizes and admits that all rights to the Marks shall be solely and exclusively the property of the Licensor. Licensee shall claim no legal or equitable ownership interest, right, privilege or title to the Marks (…) » ; qu’il s'ensuit qu'il est sans équivoque que ce n'est pas la réclamante mais la société MARQUE 1 qui est à considérer comme véritable possesseur des marques ;

Considérant, en guise de conclusion, qu'il découle du contrat de licence du 9 décembre 2015 que la réclamante ne peut pas disposer librement des marques étant donné que la société MARQUE 1 dispose de plusieurs droits d'intervention en ce qui concerne l'usage des marques ; que la réclamante n'a pas définitivement acquis la propriété économique des marques au motif que le contrat sus-énoncé n'a été conclu que pour une durée de 25 ans, en d'autres termes, qu'il a un caractère limité dans le temps ; que d'après le principe de l'appréciation suivant les critères économiques, tel que prôné par le § 11, n° 4 StAnpG, la réclamante ne peut pas être considérée comme propriétaire économique des marques ;

Considérant qu'en principe il y a lieu de respecter le principe de l'accrochement du bilan fiscal au bilan comptable, conformément à l'article 40 L.I.R. ; que celui-ci confère en effet une sorte de fonction de point de départ à la comptabilité en général, aux comptes consolidés et, partant, au bilan comptable afin de dresser le bilan fiscal, sauf à détecter dans le bilan comptable des valeurs et positions qui dévient des dispositions régissant en matière fiscale, auquel cas il échoit de procéder à des redressements extra-bilantaires ; qu'en l'espèce, il a été retenu supra que la réclamante n'est pas à considérer comme propriétaire économique des marques ; qu'à défaut d'une propriété quelconque des marques dans le chef de la réclamante, le montant déboursé, i.e. … dollars américains, n'aurait pas dû être activé au bilan au 24 avril 2016 mais est à assimiler à une redevance unique payée en contrepartie du droit d'exploitation sur une durée de 25 années ; que ladite redevance aurait dû être comptabilisée par le biais du compte de profits et pertes, notamment en tant que charge ;

Considérant qu'en ce qui concerne les entreprises qui arrêtent leurs comptes à la fin de l'année du calendrier, la situation de l'entreprise au 31 décembre sert de base à l'évaluation unitaire de la fortune d'exploitation (§ 63, alinéa 2 BewG) ; qu'en ce qui concerne les entreprises clôturant à une date autre que le 31 décembre, celles-ci peuvent, sur demande, être autorisées à prendre comme base d'évaluation le bilan du dernier exercice clos précédant la date-clé de fixation (§ 63, alinéa 3 BewG), en l'occurrence le 24 avril 2016 ;

Considérant qu'il suit de ce qui précède que les marques sont à écarter de l'actif du bilan fiscal au 24 avril 2016 ; que la non prise en compte des marques aux fins de l'établissement de la valeur unitaire de la fortune d'exploitation au 1er janvier 2017 revient finalement à la même situation dans laquelle la réclamante se serait vu accorder le bénéfice des dispositions du § 60bis BewG, à la seule différence près que les dettes afférentes aux marques sont déductibles ;

En ce qui concerne le bulletin de l'impôt sur la fortune au 1er janvier 2017 Considérant qu'aux termes du § 8, alinéa 1er de la loi sur l'impôt sur la fortune (VStG) « L'impôt sur la fortune dû au titre d'une année s'élève a) au cas où la fortune imposable est inférieure ou égale à 500.000.000 euros à 5 pour mille ;

b) au cas où la fortune imposable est supérieure à 500.000.000 euros à la somme de 2.500.000 euros augmentée de la différence entre la fortune imposable et 500.000.000 euros multipliée par 0,5 pour mille. » ;

Considérant qu'en vertu du § 8, alinéa 2, lettre a VStG, l'impôt sur la fortune est fixé, par dérogation au § 8, alinéa 1er VStG, à … euros au minimum pour les organismes à caractère collectif ayant leur siège social ou leur administration centrale au Luxembourg dans le chef desquels la somme des immobilisations financières, des créances sur des entreprises liées et sur des entreprises avec lesquelles l'organisme à caractère collectif a un lien de participation, des valeurs mobilières et des avoirs en banques, avoirs en comptes de chèques postaux, chèques et encaisse dépasse 90% du total du bilan et 350.000 euros ;

que par immobilisations financières, créances sur des entreprises liées et sur des entreprises avec lesquelles l'organisme à caractère collectif a un lien de participation, valeurs mobilières et avoirs en banque, avoirs en comptes de chèques postaux, chèques et encaisse, il y a lieu d'entendre les biens qui sont ou seraient à comptabiliser aux comptes 23, 41, 50 et 51 du plan comptable normalisé ;

que pour l'application de la présente lettre, les parts détenues dans des entreprises communes en général sont supposées être comptabilisées aux comptes 231 et 233 du plan comptable normalisé ;

Considérant que s'y juxtapose la lettre b de l'alinéa 2 du même § 8 VStG, retenant notamment que l'impôt sur la fortune est fixé :

- à 535 euros au minimum lorsque le total du bilan est inférieur ou égal à 350.000 euros, - à 1.605 euros au minimum lorsque le total du bilan est supérieur à 350.000 euros et inférieur ou égal à 2.000.000 euros, - à 5.350 euros au minimum lorsque le total du bilan est supérieur à 2.000.000 euros et inférieur ou égal à 10.000.000 euros, - à 10.700 euros au minimum lorsque le total du bilan est supérieur à 10.000.000 euros et inférieur ou égal à 15.000.000 euros, - à 16.050 euros au minimum lorsque le total du bilan est supérieur à 15.000.000 euros et inférieur ou égal à 20.000.000 euros, - à 21.400 euros au minimum lorsque le total du bilan est supérieur à 20.000.000 euros et inférieur ou égal à 30.000.000 euros, - à 32.100 euros au minimum lorsque le total du bilan est supérieur à 30.000.000 euros, pour les autres organismes à caractère collectif ayant leur siège social ou leur administration centrale au Luxembourg ;

Considérant, en ce qui concerne tout aussi bien l'alinéa 1er du § 8 VStG que l'alinéa 2e du même paragraphe, que par bilan, il y a lieu d'entendre le bilan établi conformément aux dispositions de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu ; que par total du bilan on entend le total du dernier bilan de clôture de l'année d'imposition ;

Considérant qu'en l'espèce, la somme des comptes d'actifs visés par le § 8, alinéa 2, lettre a VStG, i.e. la somme des actifs éligibles ne dépasse pas le seuil requis de 90 pour cent du total du bilan ; que l'I.F. minimum est fixé en vertu du § 8 VStG, alinéa 2, lettre b ;

Considérant que l'actif du bilan au 24 avril 2016 est composé comme suit :

Immobilisations incorporelles …. dollars américains Immobilisations corporelles … dollars américains Créances dont la durée résiduelle est inférieure ou … dollars américains égale à 1 an Créances dont la durée résiduelle est supérieure ou … dollars américains égale à 1 an Avoirs en banque … dollars américains Total … dollars américains Taux de conversion USD/EUR au 31 décembre 2016 0,9487 Total converti (0,9487 x …) …euros que le total du bilan de la réclamante est donc supérieur à 30.000.000 euros, de sorte que l'I.F. minimum s'élèverait, en principe, à 32.100 euros pour l'année 2017 ;

Considérant que l'impôt minimum fixé est réduit de l'impôt sur le revenu des collectivités, majoré de la contribution au fonds pour l'emploi, dû après d'éventuelles imputations de bonifications d'impôt sur le revenu au titre de l'année d'imposition qui précède immédiatement ; que dans les cas où, après réduction, l'impôt minimum est inférieur ou égal à l'impôt dû en vertu de l'alinéa 1er, l'impôt sur la fortune est fixé conformément à cet alinéa ;

Considérant qu' « En cas d'application du régime d'intégration fiscale visé à l'article 164bis de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu, les dispositions en rapport avec la réduction de l'impôt minimum s'appliquent par analogie. Le montant déductible déterminé sur base de l'impôt sur le revenu des collectivités à charge du groupe intégré réduit en dernier lieu l'impôt minimum dont est passible la société mère intégrante ou la société filiale intégrante et prioritairement l'impôt minimum dont sont passibles les autres contribuables du groupe intégré par ordre décroissant de leur fortune imposable. Toutefois, l'impôt minimum total dont sont passibles les sociétés du groupe intégré ne peut pas dépasser le montant de 32.100 euros. La différence entre le montant de l'impôt minimum total dont sont passibles les sociétés du groupe intégré et le montant de 32.100 euros réduit en dernier lieu l'impôt minimum dont est passible la société mère intégrante ou la société filiale intégrante et prioritairement l'impôt minimum dont sont passibles les autres contribuables du groupe intégré par ordre décroissant de leur fortune imposable. » ;

Considérant que l'instruction menée par la présente instance a révélé que l'impôt sur le revenu des collectivités fixé dans le chef de la succursale luxembourgeoise, i.e. la société intégrante, correspond à 0 (zéro) euro ; qu'il s'ensuit qu'une réduction de l'impôt sur la fortune dans le chef de la réclamante ne peut avoir lieu ;

Considérant que l'impôt minimum total dont sont passibles les sociétés du groupe intégré ne peut cependant pas dépasser le montant de 32.100 euros ; que l'impôt minimum théorique dû au titre de l'année 2017 se chiffre à … euros dans le chef de la société intégrante, de sorte que l'impôt minimum total théorique dont sont passibles les sociétés du groupe intégré se chiffre à … + 32.100 i.e.) … euros, donc, à un montant supérieur à 32.100 euros ; que la réduction de l'impôt sur la fortune au titre de l'année 2017 à accorder à la réclamante s'élève dès lors à ((… + 32.100) - 32.100 i.e.) … euros ; qu'in fine l'impôt minimum dont est redevable la réclamante au titre de l'année d'imposition 2017 s'élève à (32.100 - … i.e.) … euros ;

Considérant que le redressement de l'établissement séparé de la valeur unitaire de la fortune d'exploitation au 1er janvier 2017 fait l'objet de l'annexe qui constitue une partie intégrante de la présente décision ;

PAR CES MOTIFS dit les réclamations contre les bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal de l'année 2015 irrecevables pour défaut d'intérêt, reçoit les autres réclamations en la forme, établit la valeur unitaire de la fortune d'exploitation au 1er janvier de l'année 2017 à -… euros, fixe l'impôt sur la fortune dû pour l'année 2017 à … euros, renvoie au bureau d'imposition pour exécution. (…) C 26686 Annexe Etablissement de la valeur unitaire de la fortune d’exploitation au 1er janvier 2017 Immobilisé Immobilisations incorporelles … USD Exonération svt. § 60bis BewG … USD Immobilisations corporelles … USD Immobilisations financières … USD = Sous-total … USD … USD + Réalisable et disponible Créances … USD Avoirs en banque … USD = Sous-total … USD … USD Fortune brute totale … USD - Dettes et autres déductions MRPS … USD Dettes non déductibles … USD Dettes non subordonnées … USD Total des déductions … USD … USD = Sous-total -

… USD Taux de conversion USD/EUR au 31 décembre 2016 0,9487 (cf. point 5.3.1. de la circulaire L.G. - A n° 60 du 6 juillet 2018) Sous-total … EUR Reste fortune nette (arr. … EUR) = valeur unitaire … Par courrier du 25 février 2021, les sociétés SOCIETE 1 et Société 2 introduisirent une réclamation auprès du directeur contre les bulletins les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l'impôt commercial communal des années 2017 et 2018 émis à leur encontre le 25 novembre 2020.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 26 février 2021, les sociétés SOCIETE 1 et Société 2 ont fait introduire un recours inscrit sous le numéro 45706 du rôle et tendant à la réformation sinon à l’annulation de la décision précitée du directeur du 26 novembre 2020, portant le numéro du rôle C 26686, ayant déclaré la réclamation de la société SOCIETE 1 du 5 juillet 2019 irrecevable en ce qu’elle était dirigée contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2016 pour défaut d’intérêt à agir dans le chef de ladite société, ayant établit la valeur unitaire de la fortune d’exploitation au 1er janvier 2017 à …euros, ayant fixé l’impôt sur la fortune dû pour l’année 2017 à … euros et ayant renvoyé le dossier au bureau d’imposition pour exécution.

Par une première décision du 16 juillet 2021, répertoriée sous le numéro C 29101 du rôle, le directeur déclara la réclamation de la société SOCIETE 1 du 25 février 2021 dirigée contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2017 et 2018 irrecevable pour défaut d’intérêt à agir dans le chef de ladite société, la décision étant libellée comme suit :

« (…) Vu la requête introduite le 25 février 2021 par Me Petrus Moons, de la société à responsabilité limitée Loyens & Loeff Luxembourg, d'une part, au nom de la société à responsabilité limitée SOCIETE 1, avec siège social à L-…, pour réclamer contre :

- les bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal des années 2017 et 2018, tous les deux émis en date du 25 novembre 2020, et, d'autre part, au nom de la succursale luxembourgeoise d'une personne morale de droit canadien SOCIETE 2, avec siège social à L-…, pour réclamer contre :

- les bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal des années 2017 et 2018, tous les deux émis en date du 25 novembre 2020 ;

Vu le dossier fiscal ;

Vu les §§ 102, 107, 228, 238, 254, alinéa 2 et 301 de la loi générale des impôts (AO) ;

Considérant de prime abord, qu'il importe de noter que depuis l'année d'imposition 2016, les réclamantes font partie d'un groupe de sociétés ayant opté pour le régime d'intégration fiscale tel qu'instauré par l'article 164bis de la loi concernant l'impôt sur le revenu (L.I.R.) ; que la société mère constitue la société intégrante, en l'occurrence, la succursale luxembourgeoise, alors que la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 constitue la société intégrée ; que le résultat de la société intégrée est à intégrer dans celui de la société intégrante pour une période couvrant au moins 5 exercices d'exploitation ;

Considérant que, bien qu'intégrées fiscalement, les réclamantes sont à considérer comme des sociétés ayant des personnalités juridiques distinctes ; que les réclamations introduites par la succursale luxembourgeoise et la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 sont réunies en un seul écrit ;

Considérant néanmoins que chaque acte attaqué fera l'objet d'une décision directoriale distincte, la présente décision ne portant que sur les réclamations introduites par la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 (ci-après : la réclamante), celles introduites par la succursale luxembourgeoise étant disjointes pour être vidées séparément sous le n° du rôle C 29102 ;

Considérant que si l'introduction de plusieurs instances par une seule et même requête n'est incompatible, en l'espèce, ni avec le secret fiscal, ni avec les règles de compétence et de procédure, elle ne dispense pas d'examiner chaque acte attaqué en lui-même et selon ses propres mérites et ne saurait imposer une jonction qu'il est loisible au directeur des contributions de prononcer lorsque les instances lui paraissent suffisamment connexes ; qu'il n'y a pas lieu de la refuser en la forme ;

Considérant que la réclamante fait grief au bureau d'imposition d'avoir refusé l'application du régime de la propriété intellectuelle tel qu'ancré à l'article 50bis L.I.R. ;

Considérant que les réclamations ont été introduites par qui de droit (§ 238 AO), dans les forme (§ 249 AO) et délai (§ 228 AO) de la loi, qu'elles sont partant recevables ;

Considérant qu'en vertu du § 243 AO, une réclamation régulièrement introduite déclenche d'office un réexamen intégral de la cause, la loi d'impôt étant d'ordre public ; qu'à cet égard le contrôle de la légalité externe de l'acte doit précéder celui du bien-fondé ; qu'en l'espèce la forme suivie par le bureau d'imposition ne prête pas à critique ;

Considérant qu'aux termes de l'article 164bis L.I.R., les sociétés de capitaux résidentes pleinement imposables, dont 95 pour cent au moins du capital est détenu directement ou indirectement par une autre société de capitaux résidente pleinement imposable ou par un établissement stable indigène d'une société de capitaux non résidente pleinement imposable à un impôt correspondant à l'impôt sur le revenu des collectivités, peuvent, sur demande, être intégrées fiscalement dans la société mère ou dans l'établissement stable indigène, de façon à faire masse de leurs résultats fiscaux respectifs avec celui de la société mère ou de l'établissement stable indigène ;

Considérant que la circulaire L.I.R. n° 164bis/1 du 27 septembre 2004 retient que le régime d'intégration fiscale ne vise pas à instaurer une base légale pour l'imposition du résultat consolidé au sens propre d'un groupe de sociétés, mais se limite à permettre aux sociétés intéressées de regrouper ou de compenser leurs résultats fiscaux pendant la période d'application du régime d'intégration fiscale ; que le résultat fiscal de la société filiale admise au régime d'intégration fiscale est ajouté à celui de la société intégrante, en l'occurrence de la succursale luxembourgeoise ;

Considérant qu'aux termes de l'alinéa 4 de l'article 1er du règlement grand-ducal du 18 décembre 2015 portant exécution de l'article 164bis L.I.R., la société intégrante est passible de l'impôt sur le revenu des collectivités correspondant au revenu imposable du groupe établi, le revenu imposable de la requérante se chiffrant dorénavant et en toute logique à 0 (zéro) euro ;

Considérant qu'aux termes du § 232, alinéa 1er AO, un bulletin d'impôt ne peut être attaqué qu'au cas où le contribuable se sent lésé par le montant de l'impôt fixé ou conteste son assujettissement à l'impôt ;

Considérant que les montants de l'impôt sur le revenu des collectivités et de l'impôt commercial communal des années 2017 et 2018 ont été fixés à 0 (zéro) euro et que la réclamante ne prétend pas à la fixation de cotes d'impôt positives ;

Considérant qu'il découle de ce qui précède que les réclamations contre les bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal des années 2017 et 2018 doivent être déclarées irrecevables pour défaut d'intérêt ;

PAR CES MOTIFS dit les réclamations irrecevables pour défaut d'intérêt. (…) ».

Par une deuxième décision du 16 juillet 2021, répertoriée sous le numéro C 29102 du rôle, le directeur déclara la réclamation de la SOCIETE 2 du 25 février 2021 dirigée contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2017 non fondée, procéda à une réformation in pejus des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2018 en fixant l’impôt sur le revenu des collectivités à … euros et l'impôt commercial communal à … euros, après avoir établi la base d'assiette dudit impôt à … euros, et renvoya le dossier au bureau d’imposition pour exécution, ladite décision étant libellée comme suit :

« (…) Vu la requête introduite le 25 février 2021 par Me Petrus Moons, de la société à responsabilité limitée Loyens & Loeff Luxembourg, d'une part, au nom de la succursale luxembourgeoise d'une personne morale de droit canadien SOCIETE 2, avec siège social à L-…, pour réclamer contre :

- les bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal des années 2017 et 2018, tous les deux émis en date du 25 novembre 2020, et, d'autre part, au nom de la société à responsabilité limitée SOCIETE 1, avec siège social à L-…, pour réclamer contre :

- les bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal des années 2017 et 2018, tous les deux émis en date du 25 novembre 2020 ;

Vu le dossier fiscal ;

Vu les §§ 102, 107, 228, 238, 254, alinéa 2 et 301 de la loi générale des impôts (AO) ;

Considérant de prime abord, qu'il importe de noter que depuis l'année d'imposition 2016, les réclamantes font partie d'un groupe de sociétés ayant opté pour le régime d'intégration fiscale tel qu'instauré par l'article 164bis de la loi concernant l'impôt sur le revenu (L.I.R.) ; que la société mère constitue la société intégrante, en l'occurrence, la succursale luxembourgeoise, alors que la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 constitue la société intégrée ; que le résultat de la société intégrée est à intégrer dans celui de la société intégrante pour une période couvrant au moins 5 exercices d'exploitation ;

Considérant que, bien qu'intégrées fiscalement, les requérantes sont à considérer comme des sociétés ayant des personnalités juridiques distinctes ; que les réclamations introduites par la succursale luxembourgeoise et la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 sont réunies en un seul écrit ;

Considérant néanmoins que chaque acte attaqué fera l'objet d'une décision directoriale distincte, la présente décision ne portant que sur les réclamations introduites par la succursale luxembourgeoise (ci-après : la réclamante), celles introduites par la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 étant disjointes pour être vidées séparément sous le n° du rôle C 29101 ;

Considérant que si l'introduction de plusieurs instances par une seule et même requête n'est incompatible, en l'espèce, ni avec le secret fiscal, ni avec les règles de compétence et de procédure, elle ne dispense pas d'examiner chaque acte attaqué en lui-même et selon ses propres mérites et ne saurait imposer une jonction qu'il est loisible au directeur des contributions de prononcer lorsque les instances lui paraissent suffisamment connexes ; qu'il n'y a pas lieu de la refuser en la forme ;

Considérant que la réclamante fait grief au bureau d'imposition de lui avoir refusé l'application des dispositions prévues à l'endroit de l'article 50bis L.I.R., i.e. l'exonération partielle de 80 pour cent, d'une part, du montant net positif des revenus perçus à titre de rémunération pour l'usage ou la concession de l'usage de marques dénommées « MARQUE 1 », et d'autre part, des plus-values découvertes lors de la cession du droit d'exploitation exclusif des mêmes marques ;

Considérant que les réclamations ont été introduites par qui de droit (§ 238 AO), dans les forme (§ 249 AO) et délai (§ 228 AO) de la loi, qu'elles sont partant recevables ;

Considérant qu'en vertu du § 243 AO, une réclamation régulièrement introduite déclenche d'office un réexamen intégral de la cause, la loi d'impôt étant d'ordre public ; qu'à cet égard le contrôle de la légalité externe de l'acte doit précéder celui du bien-fondé ;

Considérant qu'aux termes de l'article 164bis L.I.R., les sociétés de capitaux résidentes pleinement imposables, dont 95 pour cent au moins du capital est détenu directement ou indirectement par une autre société de capitaux résidente pleinement imposable ou par un établissement stable indigène d'une société de capitaux non résidente pleinement imposable à un impôt correspondant à l'impôt sur le revenu des collectivités, peuvent, sur demande, être intégrées fiscalement dans la société mère ou dans l'établissement stable indigène, de façon à faire masse de leurs résultats fiscaux respectifs avec celui de la société mère ou de l'établissement stable indigène ;

Considérant que la circulaire L.I.R. n° 164bis/1 du 27 septembre 2004 retient que le régime d'intégration fiscale ne vise pas à instaurer une base légale pour l'imposition du résultat consolidé au sens propre d'un groupe de sociétés, mais se limite à permettre aux sociétés intéressées de regrouper ou de compenser leurs résultats fiscaux pendant la période d'application du régime d'intégration fiscale ; que le résultat fiscal de la société filiale admise au régime d'intégration fiscale est ajouté à celui de la société intégrante, en l'occurrence de la réclamante ;

Considérant qu'aux termes de l'alinéa 4 de l'article 1er du règlement grand-ducal du 18 décembre 2015 portant exécution de l'article 164bis L.I.R., la société intégrante est passible de l'impôt sur le revenu des collectivités correspondant au revenu imposable du groupe établi, les revenus imposables des sociétés intégrées se chiffrant dorénavant et en toute logique à 0 (zéro) euro ;

Considérant, à titre liminaire, que la réclamante a déposé son bilan en monnaie étrangère ; qu'elle tient sa comptabilité et établit ses comptes annuels dans une monnaie autre que l'euro, en l'occurrence le dollar américain ; qu'il ressort du dossier fiscal que la réclamante a demandé au bureau d'imposition l'autorisation de tenir son bilan en monnaie étrangère (communément appelé « devise fonctionnelle »), accord obtenu en date du 29 décembre 2014 ; qu'à cet égard il a été convenu que la réclamante peut tenir ses comptes annuels en dollars américains et ce à partir du 1er janvier 2014 ;

Considérant qu'au niveau de la réclamante, le bureau d'imposition a émis les bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal des années 2017 et 2018 en intégrant les résultats fiscaux de la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 ; qu'en ce qui concerne les résultats de la réclamante-

même, il y a lieu de noter que le bureau d'imposition n'a pas effectué de quelconques redressements de sorte que les résultats correspondent au centime près à ceux déclarés par la réclamante ;

Considérant qu'en exécution du § 205, alinéa 3 AO, le bureau d'imposition a informé la réclamante en date du 16 octobre 2020, que les résultats du groupe intégré seraient déterminés comme suit :

Année d'imposition Résultat déclaré Résultat retenu 2016 … euros … euros 2017 … euros … euros 2018 … euros … euros qu'aux termes du § 205, alinéa 3 AO des divergences notables par rapport à la déclaration du contribuable doivent, pour autant qu'elles soient en sa défaveur, lui être communiquées pour observation préalablement à l'émission du bulletin ; que le but du § 205, alinéa 3 AO, en tant que principe de bonne administration, consiste à vérifier les conclusions auxquelles tend une instruction en défaveur du contribuable et partant à éviter d'éventuels malentendus ;

Considérant que la réclamante n'a pas fait suite à la prédite lettre ; qu'il s'ensuit que le bureau d'imposition a procédé à l'imposition des années 2017 et 2018 en se référant aux redressements communiqués dans son courrier du 16 octobre 2020 ; qu'il découle de ce qui précède, qu'en l'espèce la forme suivie par le bureau d'imposition ne prête pas à critique ;

Considérant que les redressements litigieux trouvent leur origine dans la détermination des résultats des années 2017 et 2018 de la société intégrée ; qu'il y a donc lieu d'analyser les impositions de la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 ;

En ce qui concerne les résultats des années 2017 et 2018 de la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 Considérant qu'en exécution du § 205, alinéa 3 AO, que par courrier daté au 16 octobre 2020, le bureau d'imposition a informé la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 que l'application de l'article 50bis L.I.R. lui serait refusée au motif qu'elle « n'est pas propriétaire économique de la marque MARQUE 1 » ; qu’il a détaillé les résultats à intégrer dans ceux de la réclamante comme suit :

Année d'imposition Résultat transférable déclaré Résultat transférable retenu 2017 … euros … euros 2018 … euros … euros qu'à l'instar de la réclamante, la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 n'a pas non plus réagi suite au prédit courrier ; qu'il s'ensuit que le bureau d'imposition a procédé à l'imposition des années 2017 et 2018 en se référant aux redressements communiqués dans son courrier du 16 octobre 2020 ;

Considérant qu'in concreto la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 avait sollicité l'exonération des droits de propriété intellectuelle en vertu de l'article 50bis L.I.R.

pour un montant de … dollars américains en ce qui concerne l'année d'imposition 2017 ; que le bureau d'imposition a refusé l'exonération partielle à hauteur de … dollars américains de sorte que le bulletin de l'impôt sur le revenu des collectivités de l'année 2017 ne renseigne qu'une exonération à hauteur de (0,8338 x (… – …) i.e.) … euros ;

Considérant que pour ce qui est de l'année d'imposition 2018, la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 avait demandé l'exonération partielle pour un montant de … dollars américains alors que le bureau d'imposition l'a refusée à hauteur de … dollars américains ; que le bulletin de l'impôt sur le revenu des collectivités de l'année 2018 ne renseigne qu'une exonération à hauteur de (0,8734 x (… – …) i.e.) … euros ;

Considérant qu'aux termes de l'article 50bis, alinéa 1er L.I.R. « Les revenus perçus à titre de rémunération pour l'usage ou la concession de l'usage d'un droit d'auteur sur les logiciels informatiques, d'un brevet, d'une marque de fabrique ou de commerce, d'un nom de domaine, d'un dessin ou d'un modèle sont exonérés à hauteur de 80% de leur montant net positif. Est à considérer comme revenu net, le revenu brut diminué des dépenses en relation économique directe avec ce revenu, y compris l'amortissement annuel ainsi que, le cas échéant, une déduction opérée pour dépréciation. » ;

Considérant qu'aux termes de l'alinéa 3 de l'article 50bis L.I.R. « La plus-value dégagée lors de la cession d'un droit d'auteur sur des logiciels informatiques, d'un brevet, d'une marque de fabrique ou de commerce, d'un nom de domaine, d'un dessin ou d'un modèle est exonérée à hauteur de 80%. Le montant exonéré en vertu de la phrase précédente est à diminuer à raison de la somme algébrique de 80% des revenus nets négatifs dégagés par ledit droit au cours de l'exercice de la cession ou des exercices antérieurs pour autant que ces revenus nets négatifs n'ont pas été compensés en vertu des dispositions de l'alinéa 4, numéro 2. » ;

Considérant que certaines conditions sont à respecter cumulativement afin que l'article 50bis L.I.R. sorte ses effets ; qu'aux termes de l'alinéa 4 : « L'application des alinéas 1 à 3 du présent article est soumise aux conditions suivantes :

1. Le droit doit avoir été constitué ou acquis après le 31 décembre 2007 ;

2. Les dépenses, amortissements et déductions pour dépréciation en rapport avec le droit sont à porter à l'actif du bilan du contribuable et à intégrer dans le résultat au titre du premier exercice pour lequel l'application des dispositions des alinéas susvisés entre en ligne de compte pour autant que pour un exercice donné ces frais ont dépassé les revenus en rapport avec ce même droit. » ;

que l'alinéa 5 retient que « L'application des alinéas 1 et 3 est soumise à la condition additionnelle que le droit n'ait pas été acquis d'une personne qui a la qualité de société associée. Une société est à considérer comme société associée au sens du présent alinéa :

a. si elle détient une participation directe d'au moins 10% dans le capital de la société bénéficiaire du revenu, ou b. si son capital est détenu directement à raison d'au moins 10% par la société bénéficiaire du revenu, ou c. si son capital est détenu directement à raison d'au moins 10% par une troisième société et que celle-ci détient une participation directe d'au moins 10% dans le capital de la société bénéficiaire du revenu. » ;

Quant aux marques MARQUE 1 Considérant que le bureau d'imposition et la réclamante sont en désaccord en ce qui concerne la notion de propriété des marques MARQUE 1 ; que la question pertinente en l'espèce est celle de savoir si la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 est à déclarer comme propriétaire économique des biens incorporels en question ;

Considérant qu'en date du 9 décembre 2015, la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 a conclu un contrat de licence (« LICENSE AGREEMENT ») avec la société de droit américain LICENCE 1 aux termes duquel elle a obtenu le droit d'exploitation exclusif des marques MARQUE 1 pour une durée de 25 ans sur le territoire européen en contrepartie d'un montant de … dollars américains ; que par la suite, elle a accordé des sous-licences en relation avec les marques MARQUE 1 à des sociétés appartenant au même groupe de sociétés dont elle fait partie (ci-après : le groupe MARQUE 1);

Considérant qu'en vertu d'un contrat de vente (« PURCHASE AND SALE OF INTEREST IN LICENSE AGREEMENTS ») la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 a cédé le droit d'exploitation exclusif des marques MARQUE 1 à la société de droit irlandais MARQUE 4 avec effet au 21 juillet 2017, ceci pour un montant de … dollars américains ;

Considérant que le régime de faveur instauré par l'article 50bis L.I.R. présuppose que le contribuable percevant des revenus à titre de rémunération pour l'usage ou la concession de l'usage des droits de propriété intellectuelle soit le propriétaire de ces droits ; qu'il en découle, en matière de principe tout comme en l'espèce, que seul le propriétaire des droits de propriété intellectuelle peut bénéficier de l'exonération partielle prévue à l'endroit des alinéas 1 et 3 de l'article 50bis L.I.R. ;

Considérant que si rien n'empêche, en principe, un preneur de licence de librement disposer du droit en question, il n'en reste pas moins que les rémunérations perçues au titre d'une sous- licence ne rentrent pas dans le champ d'application de l'article 50bis L.I.R. ; que le preneur de licence qui, à son tour, octroie des sous-licences, est exclu des dispositions de l'article 50bis L.I.R. ; qu'il en est de même en ce qui concerne la cession du droit d'exploitation des biens incorporels ;

Considérant qu'avant d'entrer dans le vif du sujet, il importe de mettre en exergue que le groupe MARQUE 1 a jadis introduit une réclamation, entre autres, contre le bulletin de l'établissement séparé de la valeur unitaire de la fortune d'exploitation au 1er janvier 2017 de la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 étant donné que le bureau d'imposition n'avait pas exonéré de l'impôt sur la fortune les marques MARQUE 1 ; que cette réclamation a été vidée par décision directoriale sous le n° du rôle C 26686 et se lit, par extraits, comme suit :

« Considérant que le § 60bis BewG [loi sur l'évaluation des biens et valeurs] stipule que sont exonérées de l'impôt sur la fortune les marques de fabrique ou de commerce lorsqu'au cours de l'exercice d'exploitation qui précède la date-clé de fixation de la valeur unitaire, les conditions fixées par l'article 50bis, alinéas 4 et 5 sont remplies ;

(…) Considérant que le régime de faveur instauré par l'article 50bis L.I.R. a été abrogé avec effet au 1er juillet 2016 par l'article 5 de la loi du 18 décembre 2015 concernant le budget des recettes et des dépenses de l'Etat pour l'exercice 2016, étant précisé que la loi précitée prévoit une applicabilité transitoire aux revenus et plus-values, pendant une période commençant le 1er juillet 2016 et expirant le 30 juin 2021, sur les droits qui ont été constitués ou acquis avant le 1er juillet 2016 ;

Considérant que le régime de faveur instauré par l'article 50bis L.I.R. présuppose que le contribuable percevant des revenus à titre de rémunération pour l'usage ou la concession de l'usage des droits de propriété intellectuelle soit le propriétaire de ces droits ; qu'il en découle, en matière de principe tout comme en l'espèce, que seul le propriétaire des marques de fabrique ou de commerce peut bénéficier de l'exonération partielle prévue à l'endroit de l'alinéa 1er de l'article 50bis L.I.R. respectivement du § 60bis BewG ;

Considérant que la circulaire n° 50bis/1 du 5 mars 2009 dispose qu' « En principe, la propriété juridique et la propriété économique d'un bien sont réunis dans la même main. Si tel n'est pas le cas, le paragraphe 11, n° 4 de la loi d'adaptation fiscale (StAnpG) prévoit que si une personne autre que le propriétaire juridique d'un bien (c'est-à-dire le propriétaire de droit au nom duquel le bien est officiellement acté) se comporte de manière telle qu'il enlève au propriétaire juridique toute possibilité de disposer dudit bien, ce bien lui est à attribuer aux fins de l'imposition. Partant, lorsque la propriété économique et la propriété juridique d'un bien incorporel ne se confondent pas, c'est le propriétaire économique qui est à considérer comme propriétaire dudit bien pour l'application de l'article 50bis » ;

Considérant que le § 11, n° 4 StAnpG dispose que les « Wirtschaftsgüter, die jemand in Eigenbesitz hat, werden dem Eigenbesitzer zugerechnet. Eigenbesitzer ist, wer ein Wirtschaftsgut als ihm gehörig besitzt. » ; que le § 11, n° 4 StAnpG, ayant trait à l'approche économique, l'emporte de plein droit sur l'approche purement juridique ;

Considérant que le Tribunal administratif a retenu encore à ce sujet qu'il « ne saurait s'arrêter aux seules formes juridiques choisies par les parties pour réaliser une opération déterminée, mais il est appelé, au-delà de l'apparence juridique, de rechercher et d'analyser la réalité économique recouverte par lesdites formes juridiques. En effet, il est de principe en droit fiscal que les faits et les actes juridiques doivent être interprétés et appréciés d'après les critères économiques. - La définition « Eigenbesitzer » du par. 11, pt. 4 StAnpG constitue un concept sui generis de nature fiscale, qui ne se couvre pas avec les catégories du droit civil et il se dégage du terme en question que la loi envisage la situation d'un possesseur plutôt que d'un propriétaire juridique, de sorte qu'elle n'exige pas que tous les attributs du propriétaire soient réunis dans la personne de ce possesseur spécial » ; qu'il s'ensuit qu'au cas où un propriétaire, juridique ou économique, ne peut être déterminé avec certitude, le § 11, n° 4 StAnpG sort ses effets en disposant que c'est la propriété économique qui l'emporte ;

Considérant qu'en l'espèce, il s'impose d'analyser le contrat de licence du 9 décembre 2015 afin de déterminer si la réclamante est à déclarer comme propriétaire économique des marques ; que le préambule dudit contrat expose que la société MARQUE 1 est le propriétaire des marques (« the Licensor [la société MARQUE 1] is the owner of the MARQUE 1 Marks ») ; que la société MARQUE 1 a conféré un droit d'exploitation exclusif, principalement sur le territoire de l'Europe, pour une durée de 25 ans à la réclamante en contrepartie d'un montant de … dollars américains ; qu'en ce qui concerne la commercialisation et la publicité des marques, la société MARQUE 1 a un droit d'intervention de sorte qu'elle peut refuser toute sorte de commercialisation et de publicité en relation avec les marques (« Licensor has the right to approve or disapprove the content and media of all advertising and marketing programs and materials Licensee [la réclamante] proposes to use to promote the Marks and/or the business of its MARQUE 1 Stores. Licensor has the right to refuse the content and media of all advertising » (point 4.2.) ; que pour ce qui est des opérations commerciales en relation avec les magasins « MARQUE 1 » de la réclamante, le point 5.1. retient que « Licensee further agrees that such MARQUE 1 Stores will not, without Licensor's approval, offer any merchandise, products or services not then authorized by Licensor. » ; que le point 7 prescrit des engagements supplémentaires à la réclamante (« acceptable to Licensor », « Licensee shall have obtained Licensor's prior consent ») ;

Considérant que le point 8.2. retient que la réclamante doit s'assurer que les sous-

licenciés acceptent d'utiliser les marques pour identifier les magasins MARQUE 1 uniquement de la manière prescrite par la société MARQUE 1 (« Licensee shall, and shall ensure that its sublicensees agree to, use the Marks to identify MARQUE 1 Stores only in a manner prescribed by Licensor from time to time. ») ;

Considérant qu'il découle de ce qui précède que la réclamante doit demander le consentement de la société MARQUE 1 à chaque fois qu'elle entend faire usage des marques dans le cadre de ses démarches commerciales ;

Considérant que même les contrats de sous-licence que la réclamante a conclus avec ses clientes renvoient au fait que la société MARQUE 1 est le seul propriétaire exclusif des marques ; que la réclamante a accordé des sous-licences à des sociétés du groupe MARQUE 1 en mettant en exergue ce qui suit : « Licensee recognizes and admits that all rights to the Marks shall be solelv and exclusively the property of LICENCE 1 Licensee shall claim no legal or equitable ownership interest, right, privilege or title to the Marks (…) » ; que cette stipulation renforce d'autant plus le fait que la société MARQUE 1 est à considérer comme vrai propriétaire des marques ;

Considérant en outre que la réclamante ne s'est vu conférer le droit d'exploitation exclusif des marques sur certains territoires de l'Europe que pour une durée de 25 ans ; qu'en principe, le possesseur d'un bien est à considérer comme propriétaire (économique) s'il peut jouir du bien en question sans limitation du droit d'exploitation et sans limitation dans le temps ;

Considérant, en ce qui concerne la notion de propriété économique, que la réclamante se prévaut d'un arrêt de la Cour administrative retenant que quatre critères doivent être remplis cumulativement afin qu'une personne puisse être qualifiée de propriétaire économique :

« (i) La personne doit pouvoir bénéficier d'une augmentation de valeur du bien sous-

jacent au contrat ;

(ii) La personne doit supporter les risques de dépréciation du bien sous-jacent ou contrat ;

(iii) La personne doit détenir les intérêts bénéficiaires/droits réels de l'actif sous-

jacent au contrat; et (iv) L'acquisition de l'actif sous-jacent doit être irréversible » ;

Considérant que le point 9.2. stipule que la réclamante a le droit de transférer ou de céder tout ou partie de ses droits ou obligations en vertu du contrat de licence en question à toute personne ou entité juridique, à condition toutefois que le transfert ait lieu avec l'approbation écrite préalable de la société MARQUE 1, sous réserve de ne pas le refuser pour des raisons commerciales raisonnables (« Licensee has the right to transfer or assign all or any part of its rights or obligations under this Agreement to any person or legal entity, provided that any transfer by Licensee takes place with Licensor's prior written approval, not to be withheld with reasonable commercial reason. ») ;

Considérant qu'à défaut d'approbation écrite de la part de la société MARQUE 1, la réclamante, d'une part, ne bénéficie pas de l'augmentation de valeur des marques, et d'autre part, ne supporte pas les risques de dépréciation des marques ; que la réserve suivant laquelle un refus pour des raisons commerciales raisonnables de la part de la société MARQUE 1 ne saurait faire obstacle à une cession par la réclamante ne semble pas pertinente, étant donné qu'il s'agit de toute façon d'un groupe d'entreprises toutes apparentées et liées l'une à l'autre ; que cette conclusion est corroborée par le fait que les droits d'exploitation ont été cédés à la société de droit irlandais MARQUE 4 en date du 21 juillet 2017 pour un montant de … dollars américains ; que toute personne moyennement diligente et consciencieuse aurait refusé une telle vente pour des raisons commerciales raisonnables afin de réaliser elle-même une plus-value à hauteur de (… - … i.e.) … dollars américains ; qu'il doit être admis que la clause de refus susmentionnée n'est qu'une formulation creuse étant donné qu'elle n'a pas été exercée par la société MARQUE 1; qu'il suit de ce qui précède que les deux premiers critères mis en avant par la Cour administrative ne s'avèrent pas remplis en l'espèce ;

Considérant que pour ce qui est du dernier critère, la réclamante estime que celui-ci serait « rempli puisque LICENCE 1 ne peut mettre fin au Contrat de Licence unilatéralement avant l'échéance de 25 ans, sauf si SOCIETE 1 [la réclamante] viole une obligation contractuelle substantielle ou est en faillite ou liquidation. En outre, la durée de l'exclusivité accordée à SOCIETE 1 est supérieure à la durée de vie normale d'une marque. » ; qu'elle est d'avis qu'elle aurait acquis irréversiblement les marques et serait partant à considérer comme propriétaire économique de ces dernières ;

Considérant que dans son placet, la réclamante n'a pas explicitement renseigné sur la « durée de vie » d'une marque ; qu'il doit être admis qu'elle fait référence à la durée de protection d'une marque ; qu'en l'espèce, elle a accordé des sous-licences à des sociétés du groupe MARQUE 1 qui commercialisent les marques sur le territoire européen ; qu'en Europe, une marque est généralement protégée pour une durée de dix ans à partir de son dépôt auprès de l'Office de l'Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO); que cette protection est renouvelable au terme de 10 ans de sorte que son propriétaire peut, en principe, éternellement tirer profit d'une marque, c'est-à-dire aussi longtemps qu'il décide de prolonger cette protection ;

Considérant que l'affirmation selon laquelle « La période d'exclusivité de 25 ans en vertu du Contrat de Licence est supérieure à la durée de vie d'une marque » laisse d'être fondée dans la mesure où elle est contredite par le fait qu'il existe dans le monde une multitude de marques dont la « durée de vie » a dépassé de loin le quart de siècle ;

Considérant que la réclamante argue que « le transfert de la propriété juridique n'était pas possible pour différentes raisons juridiques et commerciales »; que l'instruction menée par la présente instance a toutefois révélé que figurent au bilan au 31 décembre 2016 encore deux autres marques dénommées « Marque 2 » et « Marque 3 » et acquises en pleine propriété pour les montants respectifs de … dollars américains et … dollars américains ; qu'il est pour le moins étonnant que d'un côté, la propriété juridique des marques n'a pas pu être transférée, alors que d'un autre côté, la pleine propriété des marques « Marque 2 » et « Marque 3 » a pu être transférée sans difficultés à la réclamante ;

Considérant finalement que le point 5.4. du contrat de licence du 9 décembre 2015 stipule de manière irrévocable que la société MARQUE 1 est le seul propriétaire exclusif de tous les droits afférents aux marques : « Licensee recognizes and admits that all rights to the Marks shall be solely and exclusively the propertv of the Licensor. Licensee shall claim no legal or equitable ownership interest, right, privilege or title to the Marks (…) » ; qu'il s'ensuit qu'il est sans équivoque que ce n'est pas la réclamante mais la société MARQUE 1 qui est à considérer comme véritable possesseur des marques ;

Considérant, en guise de conclusion, qu'il découle du contrat de licence du 9 décembre 2015 que la réclamante ne peut pas disposer librement des marques étant donné que la société MARQUE 1 dispose de plusieurs droits d'intervention en ce qui concerne l'usage des marques ; que la réclamante n'a pas définitivement acquis la propriété économique des marques au motif que le contrat sus-énoncé n'a été conclu que pour une durée de 25 ans, en d'autres termes, qu'il a un caractère limité dans le temps ; que d'après le principe de l'appréciation suivant les critères économiques, tel que prôné par le § 11, n° 4 StAnpG la réclamante ne peut pas être considérée comme propriétaire économique des marques ; » ;

Considérant qu'il convient de cimenter davantage le bien-fondé de l'argumentation contenue dans la décision directoriale susmentionnée afin de corroborer la conclusion que la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 n'est pas à considérer comme véritable possesseur des marques MARQUE 1 ; qu'en l'espèce, le contrat de licence du 9 décembre 2015 stipule aux points 8.1 et 10.2 ce qui suit :

- « 8.1 Ownership and Goodwill of the Marks. Licensee [la société à responsabilité limitée SOCIETE 1] acknowledges and agrees that (i) Licensor [la société de droit américain LICENCE 1] owns all rights to the Marks, (ii) other than as set out by the terms and provisions of this Agreement, Licensee has no interest whatsoever to the Marks and (iii) Licensee's right to use the Marks is limited to conducting business in accordance with this Agreement. Any unauthorized use of any of the Marks by the Licensee constitutes a breach of this Agreement and an infringement of Licensor's rights in and to the Marks. » ; qu'il a été retenu que la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 ne peut pas librement disposer des marques MARQUE 1 c'est-à-dire qu'elle ne peut pas agir de façon comme si elle était le véritable propriétaire des marques en question, son rôle étant limité à recueillir les recettes en relation avec les marques MARQUE 1 qui, in fine, sont destinées à remonter vers la société-mère du groupe MARQUE 1, en l'occurrence la société de droit canadien MARQUE 5 ;

- « 10.2 Termination of Agreement Upon Notice. In addition to any right to terminate this Agreement (and the right to terminate any of Licensee's rights under this Agreement) under other Sections hereof or under applicable law, Licensee acknowledges and accepts that Licensor may terminate this Agreement, without the need of obtaining any judicial, arbitration or administrative judgement, ruling, award or resolution of any kind, and without incurring therefor any responsability whatsoever, effective upon delivery of notice of termination to Licensee if Licensee fails to comply with any material provision of this Agreement or any other material mandatory specification, standard or operating procedure prescribed by Licensor, that Licensor in good faith believes is not an isolated incident, and does not correct such failure within 30 days after notice of default is delivered to Licensee. » ; qu'en résumé, il suffit donc que la société de droit américain LICENCE 1 décide unilatéralement la résiliation du contrat de licence du 9 décembre 2015 sans devoir se justifier devant quiconque au cas où elle jugerait que des obligations prescrites par elle n'auraient pas été remplies par la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 ; que dans l'hypothèse de l'exercice de la clause 10.2 précitée, le droit d'exploitation exclusif des marques MARQUE 1 serait revenu vers la société de droit américain LICENCE 1 ;

Considérant que pour le surplus, cette dernière se réserve même le droit de résilier les contrats de sous-licence conclus par la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 avec ses clients (« 11.2. Sublicense Rights. Upon expiration of the Term of this Agreement or upon termination by Licensor or Licensee, Licensor may also terminate the rights granted to sublicensees of Licensee pursuant to any Sublicense Agreements. ») ;

Considérant que dans son placet, la réclamante invoque que « si LICENCE 1 [la société de droit américain LICENCE 1] avait décidé de ne pas renouveler le Contrat de licence, elle aurait dû s'accorder avec SOCIETE 1 [la société à responsabilité limitée SOCIETE 1] sur une compensation raisonnable et lui accorder une phase de transition » ;

qu'elle renvoie à la clause 11.4 du contrat de licence en question retenant notamment ce qui suit :

« 11.4. Non-renewal by Licensor. Should the Licensor decide not to renew this Agreement at any renewal period as set out by the provisions of section 9.3, Licensor and Licensee shall consult each other within three months from the receipt by Licensee of the expiry notice of Licensor to jointly determine a reasonable compensation [and phase out period] for the Licensee's deployment of the Marks within the Territory. » ; que s'il est vrai que le point 11.4 prévoit une telle « compensation raisonnable », d'ailleurs non autrement spécifiée, il faut se garder à l'esprit que la durée du contrat a été fixée à 25 ans de sorte que cette clause restera lettre morte et ne sortira de toute façon pas ses effets ;

Considérant que la réclamante renvoie de nouveau à la jurisprudence disposant qu'afin d'être considéré comme propriétaire économique d'un bien l'on doit pouvoir bénéficier d'une augmentation de la valeur de celui-ci voire supporter les risques de dépréciation y afférents ; qu'il y a lieu de renvoyer encore une fois à la clause 10.2 du contrat de licence du 9 décembre 2015 ; qu'en résiliant ledit contrat, pour quelque raison que ce soit, la société de droit américain LICENCE 1 aurait effectivement pu (et même dû) bénéficier d'une augmentation de valeur des marques MARQUE 1, ce qu'elle n'a pourtant pas fait étant donné que suite à la cession du droit d'exploitation exclusif à la société de droit irlandais MARQUE 4, ce dernier est de toute façon resté dans le groupe MARQUE 1 ;

Considérant qu'il est manifeste que la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 n'est pas à considérer comme propriétaire économique des marques MARQUE 1 tel que cela est retenu à plusieurs endroits du contrat de licence du 9 décembre 2015 notamment à la clause 5.4 ; que l'argumentation de la réclamante selon laquelle « d'éventuelles maladresses dans la rédaction du Contrat de licence ne sauraient invalider la conclusion que le Contrat de licence est à assimiler à une vente et a opéré le transfert de la propriété économique » et que des « imperfections rédactionnelles [ne sauraient] invalider la substance de l'opération » est un brin simpliste ; que la jurisprudence avancée par la réclamante constitue un cas d'espèce et ne saurait servir à invalider le principe général que les contrats sont à appliquer à la lettre ; qu'admettre le contraire équivaudrait à les priver de leur finalité la plus élémentaire et inhérente ;

Considérant qu'en l'espèce, les sociétés en cause font partie du groupe MARQUE 1 ;

que bien qu'étant étroitement liées, elles constituent des entités indépendantes et, de ce fait, ne peuvent agir comme bon leur semble ; qu'il est impératif que les relations entre les sociétés soient documentées par des dispositions contractuelles ; que cette obligation de documentation s'applique également au cas d'espèce, notamment pour déterminer le véritable propriétaire (économique) ;

Considérant qu' « En droit, un contrat est un accord de volontés concordantes entre une ou plusieurs personnes (les parties) en vue de créer une ou des obligations juridiques.

C'est aussi la relation juridique qui découle de cet accord » ; que la réclamante expose que « la clause 5.4 du Contrat de licence ne peut donc à lui seul justifier le refus de reconnaître que SOCIETE 1 est le propriétaire économique des Marques », alors qu'il est patent que non seulement la clause invoquée, mais également toutes celles citées dans la présente décision et dans celle référenciée sous le n° C 26686 du rôle démontrent que la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 ne peut être considérée comme véritable possesseur des marques MARQUE 1 ;

Considération que la réclamante a annexé à sa requête sept contrats de sous-licence que la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 a conclus avec ses clients estonien, letton, lituanien, norvégien, danois, suédois et polonais ; que force est de constater que ces contrats ne se différencient pas fondamentalement du contrat de licence du 9 décembre 2015 ; que tous les contrats de sous-licence prévoient également un transfert du droit d'exploitation exclusif des marques MARQUE 1 vers les clients de la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 en fonction de leur situation géographique ; qu'en l'occurrence, les préambules de ces contrats renseignent à chaque fois que « the Licensee desires to obtain the exclusive right to use the Marks in the Territory » ; que la clause 2.1 (« Grant of Exclusive License ») de chaque contrat stipule que les clients de la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 se voient conférer un droit d'exploitation exclusif des marques MARQUE 1 dans leur pays respectif; que la clause 2.2 (« Right to Sublicense ») retient même que tous les clients ont le droit de sous-licencier eux aussi les marques MARQUE 1 ; que dans la logique de la réclamante suivant laquelle la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 serait à considérer comme propriétaire économique des marques MARQUE 1, cette dernière aurait donc continué la prétendue propriété économique à ses clients estonien, letton, lituanien, norvégien, danois, suédois et polonais, de sorte qu'elle ne serait à nouveau pas à considérer comme propriétaire économique ; que la seule conclusion logique à tirer de l'ensemble de ces prémisses est que le véritable possesseur des marques MARQUE 1 reste donc la société de droit américain LICENCE 1 tel que cela figure d'ailleurs aux points 6.4 et 9.1 de tous les contrats de sous-licence :

- « 9.1 Ownership and Goodwill of the Marks. Licensee acknowledges and agrees that (i) Licensor owns all rights to the Marks, (ii) other than as set out by the terms and provisions of this Agreement, Licensee has no interest whatsoever to the Marks and (iii) Licensee's right to use the Marks is limited to conducting business in association with the Goods and/or Services and in accordance with this Agreement. Any unauthorized use of any of the Marks by the Licensee constitutes a breach of this Agreement and an infringement of MARQUE 1 Stores rights in and to the Marks. » ;

que partant tous les contrats de sous-licence renvoient irrévocablement au fait que la société de droit américain LICENCE 1 est le propriétaire (économique) des marques MARQUE 1 ;

Considérant finalement que la réclamante affirme que « LICENCE 1 à indiqué dans sa déclaration fiscale américaine avoir vendu les Marques » alors qu'elle n'a rapporté aucun moyen de preuve, en l'occurrence, d'une part, la déclaration d'impôt afférente à l'exercice 2016 accompagnée des comptes annuels de la société de droit américain LICENCE 1 renseignant de manière indubitable la prétendue cession de la propriété économique des marques MARQUE 1 au profit de la société à responsabilité limitée SOCIETE 1, et d'autre part, le bulletin d'impôt y afférent émis par les autorités fiscales américaines à savoir le « Internal Revenue Service » ; que la présente instance n'est pas en mesure de prendre position par rapport à des moyens simplement suggérés sans être soutenus effectivement, en d'autres mots, à défaut d'éléments de preuve concluants ;

Considérant qu'à titre subsidiaire, la réclamante souligne que « si SOCIETE 1 n'est pas le propriétaire économique des Marques, étant donné que SOCIETE 1 n'est pas non plus propriétaire juridique des Marques, alors SOCIETE 1 ne saurait être imposée sur les revenus découlant du Contrat de licence, et en particulier sur la plus-value générée par la Cession » ;

que cette affirmation est dénuée de tout sens étant donné qu'une personne physique ou morale ne doit pas forcément être le propriétaire d'un bien afin d'être imposée sur les revenus en découlant ; qu'à titre d'exemple, d'un côté, les loyers en relation avec un bien immobilier sont imposables dans le chef du bailleur, alors que de l'autre côté, les recettes provenant de la sous-location du même bien sont également imposables dans le chef du locataire (à la seule différence près que le locataire peut faire valoir en tant que frais d'obtention ou dépenses d'exploitation les loyers qu'il a versés au bailleur) ; qu'en guise de rappel, la société de droit américain LICENCE 1 a conféré une licence d'exploitation des marques MARQUE 1 à la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 qui, à son tour, a accordé des sous-licences à sept autres sociétés appartenant au groupe MARQUE 1 (qui, à leur tour, ont également accordé des sous-licences à leurs clients respectifs) ; que cette situation correspond donc exactement à l'exemple mentionné ci-haut ; que le paiement unique de … dollars américains a été traité comme suit dans la décision directoriale C 26686 :

« Considérant qu'en principe il y a lieu de respecter le principe de l'accrochement du bilan fiscal au bilan comptable, conformément à l'article 40 L.I.R. ; que celui-ci confère en effet une sorte de fonction de point de départ à la comptabilité en général, aux comptes consolidés et, partant, au bilan comptable afin de dresser le bilan fiscal, sauf à détecter dans le bilan comptable des valeurs et positions qui dévient des dispositions régissant en matière fiscale, auquel cas il échoit de procéder à des redressements extra-bilantaires ; qu'en l'espèce, il a été retenu supra que la réclamante n'est pas à considérer comme propriétaire économique des marques ; qu'à défaut d'une propriété quelconque des marques dans le chef de la réclamante, le montant déboursé, i.e. … dollars américains, n'aurait pas dû être activé au bilan au 24 avril 2016 mais est à assimiler à une redevance unique payée en contrepartie du droit d'exploitation sur une durée de 25 années ; que ladite redevance aurait dû être comptabilisée par le biais du compte de profits et pertes, notamment en tant que charge » ;

Considérant que par voie de conséquence, le bureau d'imposition n'a pas pris en compte le résultat déclaré par la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 au titre de l'année 2016, i.e. … dollars américains, mais a déduit de ce bénéfice le montant intégral de … dollars américains en tant que dépenses d'exploitation ; que dès lors le bureau d'imposition a déterminé un résultat à intégrer dans celui de la réclamante se chiffrant désormais à (… - … i.e.) … dollars américains ;

Considérant qu'initialement, la réclamante a déclaré un bénéfice au titre de l'année 2016 qu'elle a déterminé comme suit :

Montants en dollars américains Montants en euros Bénéfice commercial … … Ajustement en vertu de ….

… l'article 56 L.I.R.

Revenus exonérés en … … vertu de l'article 166 L.I.R.

Résultat de la société … … intégrante Résultat de la société … … intégrée Revenu imposable … … Considérant que sur fond des éléments ci-avant relatés, le bureau d'imposition a mis en compte une perte au titre de l'année 2016 qu'il a déterminée comme suit :

Montants en dollars américains Montants en euros Bénéfice commercial … … Ajustement en vertu de … … l'article 56 L.I.R.

Revenus exonérés en … … vertu de l'article 166 L.I.R.

Résultat de la société … … intégrante Résultat de la société … … intégrée Revenu imposable … … que les montants de l'impôt sur le revenu des collectivités et de l'impôt commercial communal ont dès lors été fixés à … (zéro) euro ;

Quant aux marques Marque 3 et Marque 2 Considérant que le directeur des contributions n'est pas lié par les moyens invoqués par le réclamant (§ 243, alinéa 2 AO), mais a le devoir de procéder d'office à un réexamen intégral de la cause (§ 243, alinéa 1er AO), tant en faveur qu'en défaveur du réclamant ;

Considérant qu'il se dégage de l'annexe 5 jointe à la déclaration d'impôt de l'année 2018, que la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 a cédé les marques Marque 3 et Marque 2 pour … dollars américains respectivement … dollars américains, alors que d'après les modèles 750 (« Les droits de propriété intellectuelle visés à l'article 50bis L.I.R. »), ces dernières auraient été vendues pour … dollars américains et … dollars américains ; que cet inversement des prix de cession reste toutefois sans impact étant donné que les sommes des plus-values réalisées sont identiques dans les deux cas ;

Considérant tel que relevé supra que la plus-value dégagée lors de la cession d'une marque de fabrique ou de commerce est exonérée à hauteur de 80 pour cent (voir alinéa 3 de l'article 50bis ; qu'en l'espèce, la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 avait acquis jadis la pleine propriété des marques Marque 3 et Marque 2 de sorte que les dispositions de l'alinéa 3 de l'article 50bis sont applicables (a contrario du droit d'exploitation exclusif des marques MARQUE 1) ;

Considérant que la société à responsabilité limitée SOCIETE 1 a déclaré des plus-

values exonérées en relation avec les marques en question pour respectivement (80% x (… -

…) i.e.) … dollars américains et (80% x … - …) i.e.) … dollars américains, alors que le bureau d'imposition a mis en compte des plus-values exonérées de respectivement … dollars américains et … dollars américains ; que ce dernier a déterminé les plus-values exonérées comme suit :

Marque Marque 3 Marque Marque 2 Prix de vente … USD … USD Valeur comptable -… USD -… USD Plus-value … USD … USD Exonération suivant article … USD … USD 50bis LIR qu'il en découle, en ce qui concerne la marque Marque 2, que le bureau d'imposition a erronément mis en compte une exonération à hauteur de … dollars américains, alors qu'en réalité elle ne s'élève qu'à (80% x … i.e.) … dollars américains ;

Considérant qu'il est pour le moins étonnant que la réclamante n'ait pas remarqué cette erreur de calcul et est restée complètement muette dans sa requête quant au sujet de cette différence de (… - … i.e.) … dollars américains jouant en sa faveur ;

Considérant qu'il suit de ce qui précède que les revenus à exonérer en vertu de l'article 50bis L.I.R. se chiffrent à (… (redevances Marque 3) + … + … (redevances Marque 2) + … i.e.) … dollars américains respectivement (0,8734 x … i.e.) … euros ; que dès lors le résultat afférent à l'année 2018 et transférable à la réclamante se chiffre à (… (résultat initialement déterminé) + … (exonération initialement admise) - … i.e.) … euros ;

Considérant que pour le surplus, les impositions sont conformes à la loi et aux faits de la cause et ne sont d'ailleurs pas autrement contestées ;

Considérant que le redressement des bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal de l'année 2018 fait l'objet de l'annexe qui constitue une partie intégrante de la présente décision ;

PAR CES MOTIFS reçoit les réclamations en la forme, rejette les réclamations contre les bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal de l'année 2017 comme non fondées, réformant en ce qui concerne les bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal de l'année 2018 in pejus, fixe l'impôt sur le revenu des collectivités de l'année 2018, y compris la contribution au fonds pour l'emploi, à … euros, établit la base d'assiette de l'impôt commercial communal de l'année 2018 à … euros, fixe l'impôt commercial communal de l'année 2018 à … euros, renvoie au bureau d'imposition pour exécution. (…) C 29102 Annexe 1. Impôt sur le revenu des collectivités 2018 Bénéfice commercial suivant bilan commercial … € + Impôt sur le revenu des collectivités … € + Ajustements en vertu de l'article 56 L.I.R.

… € + Revenus exonérés de participations importantes … € Sous-total - report sur le bulletin de l'impôt … € commercial + Ajustements effectués dans le cadre du régime d'intégration fiscale … € Revenu imposable … € Revenu imposable arrondi …€ Impôt dû conformément à l'article 174, alinéa 1 L.I.R.

… € Contribution au fonds pour l'emploi … € Montant total dû … € 2. Impôt commercial communal 2018 Bénéfice commercial soumis à l'ICC …1€ Bénéfice d'exploitation … € + Ajustements effectués dans le cadre du régime d'intégration fiscale … € Bénéfice d'exploitation restant … € Abattement …€ Bénéfice d'exploitation imposable arrondi …€ Base d'assiette d'après bénéfice d'exploitation (3%) …€ Taux communal (225%) … € Impôt commercial … € Impôt commercial dû … € (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 11 octobre 2021, les sociétés SOCIETE 1 et Société 2 ont fait introduire un recours, inscrit sous le numéro 46555 du rôle, tendant à la réformation sinon à l’annulation des décisions précitées du directeur du 16 juillet 2021, portant les numéros du rôle C 29101 et C 29102.

Il y a tout d’abord lieu de prononcer la jonction des deux recours, inscrits sous les numéros du rôle 45706 et 46555. Il est en effet dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice de prononcer ces deux affaires par un seul et même jugement, dans la mesure où il y a identité de parties et qu’elles sont intimement liées alors que les décisions visées par les deux recours sous examen ont comme toile de fond le refus d’application de l’article 50bis LIR dans le chef de la société SOCIETE 1, même s’ils portent sur des années d’imposition différents, à savoir 2016, respectivement 2017 et 2018.

Conformément aux dispositions combinées du paragraphe 228 AO et de l’article 8, paragraphe (3), point 1. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, dénommée ci-après « la loi du 7 novembre 1996 », le tribunal administratif est appelé à statuer comme juge du fond sur un recours dirigé par un contribuable contre une décision du directeur ayant statué sur les mérites d’une réclamation introduite contre un bulletin d’impôt.

Il s’ensuit que le tribunal administratif est compétent pour connaître des recours principaux en réformation inscrit sous les numéros 45706, respectivement 46555 du rôle, recours qui sont, par ailleurs, recevables pour avoir été introduits dans les formes et délai de la loi.

Cette conclusion n’est pas remise en cause par la circonstance que la partie étatique, dans ses mémoires en réponse, se rapporte à prudence de justice quant à la recevabilité en la pure forme desdits recours, étant précisé que s’il est exact que le fait, pour une partie, de se rapporter à prudence de justice équivaut à une contestation, il n’en reste pas moins qu’une contestation non autrement étayée est à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au juge administratif de suppléer la carence des parties au litige et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions.

Dès lors, étant donné que la partie étatique est restée en défaut de préciser dans quelle mesure la forme pour introduire les recours litigieux n’aurait pas été respectée en l’espèce, le moyen d’irrecevabilité soulevé dans les deux recours encourt le rejet, étant relevé que le tribunal n’entrevoit pas non plus de cause d’irrecevabilité d’ordre public qui serait à soulever d’office.

Il n’y a dès lors pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation introduit contre les décisions précitées du directeur du 26 novembre 2020, respectivement du 16 juillet 2021.

A titre liminaire, il y a lieu de rappeler que le tribunal n’est pas tenu par l’ordre des moyens, tel que présenté par la demanderesse, mais détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et l’effet utile s’en dégageant, de sorte à analyser, dans un premier temps l’argumentation juridique des parties demanderesses quant aux conclusions directoriales relatives à l’irrecevabilité des réclamations visant les bulletins d’impôt fixant une cote d’impôt de … euros, avant de statuer sur le fond du litige sous examen.

Dans leurs mémoires en réplique respectifs, les parties demanderesses contestent, tout d’abord, la conclusion directoriale, telle que véhiculée dans les décisions du 26 novembre 2020, référencée sous le numéro de rôle C 26686, respectivement du 16 juillet 2021, référencée sous le numéro de rôle C 29101, ayant retenu l'irrecevabilité des réclamations dirigées à l'encontre des bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base de l'assiette de l'impôt commercial communal des années 2016, 2017 et 2018, émis à l’égard de la SOCIETE 1, en ce que lesdits bulletins comporteraient tous une cote d'impôt fixée à zéro euros. Elles argumentent, dans ce cadre, qu’en vertu du paragraphe 235 (5) AO, pris ensemble avec le paragraphe 228 AO, une réclamation pourrait être introduite contre les bulletins « concernant d'autres avantages fiscaux pour l'octroi ou le maintien desquels il existe un droit », ce qui serait le cas, en l’espèce, en raison du refus d’application de l'article 50bis LIR, lequel constituerait un avantage fiscal, tel que retenu par un jugement du tribunal administratif du 21 septembre 2018, inscrit sous le numéro 39693 du rôle. Ainsi, bien que les bulletins en question des années 2016, 2017 et 2018 auraient fixé une cote d'impôt nulle, ils auraient pu faire l’objet d’une réclamation sur base du paragraphe 235 (5) AO, pour contenir une décision refusant l'application du régime de la propriété intellectuelle de l'article 50bis LIR, réclamation que le directeur aurait, à tort, déclarée irrecevable, par le biais des décisions précitées des 26 novembre 2020 et 16 juillet 2021.

Le délégué du gouvernement, dans ses mémoires en réponse, conclut à la confirmation des décisions directoriales précitées.

Au vœu du paragraphe 232, alinéa (1) AO: « Einen Steuerbescheid kann der Steuerpflichtige nur deshalb anfechten, weil er sich durch die Höhe der festgesetzten Steuer oder dadurch beschwert fühlt, dass die Steuerpflicht bejaht worden ist ».

Il découle de ces dispositions combinées que l’élément décisionnel d’un bulletin d’impôt stricto sensu consiste dans la fixation d’une cote d’impôt à charge du contribuable, lequel est le seul élément décisionnel susceptible d’acquérir force de chose décidée et de faire l’objet d’une réclamation, conformément au paragraphe 232, alinéa (1) AO, lequel n’admet un recours que contre un bulletin d’impôt mettant à la charge du contribuable visé une obligation positive de payer une certaine cote d’impôt, entraînant qu’un bulletin ne fixant pas de cote d’impôt positive ne saurait partant en principe ouvrir le droit à réclamation, faute de charge fiscale imposée au contribuable lui causant grief.

Par voie de conséquence, la loi dénie à la société SOCIETE 1 un intérêt pour agir pour introduire une réclamation à l’encontre des bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base de l'assiette de l'impôt commercial communal des années 2016, 2017 et 2018, émis à son égard, en ce que lesdits bulletins fixent pour les années en question une cote d’impôt égale à zéro, de sorte que les décisions directoriales sont à confirmer sur ce point et que le moyen afférent des parties demanderesses est à rejeter.

Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argumentation des parties demanderesses relative à la circonstance que l’application de l’article 50bis LIR constituerait un avantage dont le refus devrait pouvoir faire l’objet d’une réclamation, dans la mesure où il est constant en cause que les sociétés demanderesses font partie d’un groupe de sociétés ayant opté pour le régime de l’intégration fiscale, tel que prévu par l’article 164bis LIR, la société SOCIETE 1 étant la société intégrée par la SOCIETE 2, société intégrante. Cette intégration fiscale a pour conséquence que pour une période déterminée, et plus particulièrement pendant les années fiscales litigieuses, les résultats fiscaux de la société intégrée, en l’occurrence la société SOCIETE 1, sont ajoutés au résultat fiscal de la société intégrante, de sorte qu’il appartient à cette dernière de contester, dans le cadre de sa propre imposition, la conclusion des autorités fiscales quant au refus de ces dernières d’appliquer les dispositions de l’article 50bis LIR aux revenus imposables litigieux.

A l’appui de leurs recours dirigés contre les décisions directoriales ayant statué sur le fond de leurs réclamations, et en fait, les parties demanderesses exposent, tout d’abord, les faits et rétroactes à la base des litiges sous examen, en relevant plus particulièrement former un groupe intégré au sens de l’article 164bis LIR, depuis le 27 avril 2015. Le 9 décembre 2015, SOCIETE 1 aurait conclu un contrat de licence avec une société de droit américain, la société LICENCE 1, ci-après désignée par « la société LICENCE 1 », en vertu duquel SOCIETE 1 se serait vu accorder un droit d’usage exclusif des marques MARQUE 1 sur le territoire européen pour une durée de 25 ans renouvelable, en contrepartie d'un paiement forfaitaire unique de … dollars. Les parties demanderesses précisent encore, dans ce cadre, que la société faîtière du groupe dont feraient partie les sociétés LICENCE 1 et SOCIETE 1, en l’occurrence la société de droit canadien MARQUE 5, ci-après désignée par « le groupe GROUPE », aurait acquis en 2012 une société norvégienne à la pointe sur le marché scandinave dans le domaine des magasins d'accommodation et de la vente en détail de carburant, laquelle aurait obtenu, suite à cette acquisition, le droit d'utiliser la marque MARQUE 6 pour ses opérations européennes de vente de détail de carburant et d'exploitation de magasins d'accommodation, mais uniquement jusqu'au 31 décembre 2019, de sorte que le groupe GROUPE aurait été obligé d’adapter sa politique de marques pour le marché européen avant cette date, d’où la conclusion du contrat de licence concernant les marques MARQUE 1, lesquelles auraient connu un développement satisfaisant aux Etats-Unis et en Asie, afin de remplacer, sur le marché européen, la marque MARQUE 6.

Dans un souci d’harmoniser ses opérations américaines et européennes, de réduire ses coûts et de rationaliser ses procédures internes, le groupe GROUPE aurait ainsi opté pour la centralisation, au sein de SOCIETE 1, de certaines responsabilités, dont notamment le développement et la promotion des marques MARQUE 1 pour les adapter au marché européen et pour augmenter leur valeur, ce qui aurait été fait, de manière significative, entre les exercices sociaux 2016 et 2017, la conclusion du contrat de licence litigieux ayant été effectuée juste avant la « conversion » des magasins en Europe laquelle aurait concerné, de janvier 2016 jusqu’à la cession du contrat de licence en juillet 2017, … magasins.

Les parties demanderesses expliquent encore que, malgré la conclusion du contrat de licence litigieux, la société LICENCE 1 serait restée le propriétaire juridique des marques en raison, d'une part, de la nécessité pour ladite société, selon le droit américain des marques, de retenir un contrôle minimal en tant que donneur de licence exclusive afin d'éviter la perte de tous les droits dans les marques MARQUE 1, et, d'autre part, d’un objectif de suivi desdites marques et de simplification des procédures d'enregistrement, avec plusieurs classes de produits auprès de Office de l'Union européenne pour la propriété intellectuelle et de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, fonction assumée par la société LICENCE 1 depuis 1997.

Cependant, d’un point de vue économique, les demanderesses font valoir qu’eu égard aux caractéristiques du contrat de licence litigieux, ce dernier devrait s’analyser comme une cession, approche que la société LICENCE 1 aurait, par ailleurs, adopté dans sa déclaration fiscale américaine, alors qu’elle y aurait indiqué un gain de … dollars, correspondant au montant du paiement unique effectué par SOCIETE 1 à LICENCE 1.

Cette qualification du contrat de licence litigieux en cession serait encore confirmée par le rapport de prix de transfert relatif audit contrat, lequel l’aurait analysé à l'aune des règles américaines en matière de prix de transfert, des principes de l'Organisation de coopération et de développement économiques applicables en matière de prix de transfert à l'intention des entreprises multinationales et des administrations fiscales, ainsi que par l’avis d’expert IP. Le rapport précité préciserait notamment que la société SOCIETE 1 supporterait les risques liés à l'absence de notoriété ou à la perte de bonne réputation des marques concernées, à des poursuites judiciaires en cas de mauvaise utilisation desdites marques, au marché, tel que compétition, baisse de la demande, ralentissement économique, le risque de défaut. Les parties demanderesses relèvent encore, dans ce contexte, que la société LICENCE 1 aurait abandonné le droit de donner en licence à un tiers ou d'exercer elle-même les mêmes droits que ceux accordés à SOCIETE 1, tout en précisant que la société SOCIETE 1 aurait conclu, au cours des mois suivants la conclusion du contrat de licence litigieux, sept contrats de sous-licence couvrant les territoires de l'Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Norvège, le Danemark, la Suède et la Pologne, pour une période renouvelable de cinq ans, dans le cadre desquels SOCIETE 1 aurait perçu des redevances annuelles de … dollars en 2016, … dollars en 2017 et … dollars en 2018, tout en continuant à assumer les risques susmentionnés même après la conclusion desdits contrats de sous-licence.

L’avis d’expert IP baserait, quant à lui, sa conclusion selon laquelle la société LICENCE 1 ne conserverait que la propriété juridique des marques concernées dont la propriété économique aurait cependant été transférée à la société SOCIETE 1, sur la durée de base de la licence, à savoir 25 ans, une très longue durée reflétant l'intention des sociétés SOCIETE 1 et LICENCE 1 de s'engager de manière définitive, les parties demanderesses soulignent que la prévision d’un terme n’aurait été qu’une simple précaution afin d’éviter d’éventuelles complications juridiques pouvant se présenter du fait de l'absence de terme, tel que notamment, en droit civil luxembourgeois, la possibilité de résiliation à tout moment.

Par ailleurs, l'auteur du rapport de prix de transfert relatif au contrat de licence litigieux et aux contrats de sous-Licence, rappellerait dans un rapport complémentaire intitulé « Supplemental assessment of economic sale treatment for transfer of European rights of MARQUE 1 … » que l'intention des parties au contrat de licence aurait été d'assimiler ce dernier à une vente, au motif que les marques concernées n'auraient, lors de la conclusion dudit contrat, jamais été exploitées sur le marché européen, de sorte à avoir été relativement inconnues et de nécessiter leur développement adéquat par la société SOCIETE 1, laquelle aurait dû procéder à des investissements significatifs, tout en supportant également des risques conséquents, tandis que la société LICENCE 1 n'aurait eu aucune obligation d'investir.

De plus, si la société LICENCE 1 avait décidé de ne pas renouveler le contrat de licence litigieux, les deux sociétés auraient dû s'accorder non seulement sur une compensation raisonnable reflétant l’accroissement de valeur des marques concernées, ce qui correspondrait à une compensation équivalant au prix de rachat de la propriété économique desdites marques, mais aussi sur une phase de transition.

Cette intention des parties de procéder à une cession des marques litigieuses ressortirait également clairement du traitement comptable et fiscal appliqué par tant par la société SOCIETE 1 au Luxembourg, laquelle aurait enregistré lesdites marques comme actifs à son bilan, que par la société LICENCE 1 aux Etats-Unis, laquelle aurait indiqué, dans sa déclaration fiscale américaine, les avoir vendues. Les parties fournissent encore des précisions comptables expliquant le défaut, pour la société SOCIETE 1, d’avoir procédé à l’amortissement du prix unique versé à la société LICENCE 1 pour l’acquisition des marques litigieuses, d’autant plus que leur valeur se serait accrue chaque année du fait de leur diffusion croissante en Europe.

Elles précisent encore que la société SOCIETE 1 aurait vendu, le 21 juillet 2017, soit au cours de l'exercice 2018, tous ses droits du contrat de licence litigieux, ainsi que des contrats de sous-licence afférents à la société de droit irlandais MARQUE 4, ci-après désignée par « la société MARQUE 4», pour … dollars, réalisant ainsi une plus-value en relation avec les marques MARQUE 1 de … dollars.

En droit, les parties demanderesses soutiennent que les décisions directoriales des 26 novembre 2020 et 16 juillet 2021 seraient, à titre principal, à réformer pour avoir refusé de reconnaître que la société SOCIETE 1 aurait été le propriétaire économique des marques litigieuses, au sens paragraphe 11 de la loi d'adaptation fiscale, appelée « Steuranpassungsgesetz », en abrégée « StAnpG », et ce suite à la conclusion du contrat de licence le 27 avril 2015 jusqu’au 21 juillet 2017, jour où elle aurait cédé ses droits découlant du prédit contrat de licence, ainsi que des contrats de sous-licence à la société LICENCE 1.

En effet, la société SOCIETE 1 aurait, durant cette période, disposé d’un droit d’exploitation exclusif desdites marques sur le territoire européen pour une période de 25 ans renouvelable par tacite reconduction. Les décisions déférées lui auraient partant, à tort, refusé l’application de l’article 50bis LIR.

Dans ce cadre, les parties demanderesses, sur base d’un arrêt de la Cour administrative du 26 juin 2008, inscrit sous le numéro 24061C du rôle, ainsi que de la circulaire LIR 50bis/1 du 5 mars 2009, insistent sur l’importance de l’appréciation économique quant à la notion de « Eigenbesitzer » et critiquent le directeur pour n’avoir effectué, en l’espèce, qu’une application littérale des clauses du contrat de licence litigieux pour retenir que la société SOCIETE 1 ne pourrait pas être considérée comme le véritable possesseur des marques MARQUE 1. Or, les clauses des contrats, par définition, ne se prononceraient que sur les aspects juridiques, tandis que le principe fondamental de l'appréciation économique des opérations juridiques impliquerait précisément de ne pas s'y arrêter. Ainsi, le fait que les contrats en cause prévoiraient que la société LICENCE 1 demeurerait le propriétaire juridique des marques ne ferait pas obstacle à ce que la société SOCIETE 1 en aurait été le propriétaire économique jusqu'à la cession du 21 juillet 2017.

Les parties demanderesses expliquent encore, dans ce contexte, à titre complémentaire, que la séparation opérée, en vertu du contrat de licence litigieux, entre propriété juridique et économique aurait été parfaitement justifiée par des considérations pratiques, commerciales et de droit des marques américain en mettant en exergue i) que la rétention d'un contrôle minimal par la société LICENCE 1 en tant que donneur de licence exclusive aurait été nécessaire afin d'éviter la perte de tous les droits sur les marques, ii) que par le biais du contrat en question la société LICENCE 1 aurait abandonné le droit de donner lesdites marques en licence à un tiers ou d'exercer elle-même les mêmes droits que ceux accordés à la société SOCIETE 1, iii) que la prévision d’une durée de 25 ans, renouvelable par tacite reconduction aurait été effectuée dans le souci d’éviter la possibilité d’une résiliation à tout moment et iv) que l’objectif du contrat n’aurait été que de transférer la propriété économique à la société SOCIETE 1. Les parties demanderesses réfutent encore, dans ce cadre, l’exemple mis en avant par la partie étatique relatif à d’autres marques ayant fait l’objet d’une cession à la société SOCIETE 1, en l’occurrence les marques « Marque 2 » et « Marque 3 », alors que ces dernières ne seraient utilisées que sur le territoire européen, contrairement aux marques MARQUE 1 exploitées de part et d’autre de l’Atlantique.

En ce qui concerne la propriété économique des marques litigieuses, les parties demanderesses, en soutenant que la propriété économique devrait être appréciée sur la base d'une analyse factuelle et non contractuelle, relèvent plusieurs éléments de nature à corroborer leur argumentation selon laquelle la société SOCIETE 1 devrait être considérée comme ayant été, au courant des années fiscales litigieuses, le propriétaire économique desdites marques.

Ainsi, la société SOCIETE 1 n’aurait versé qu’un paiement forfaitaire unique pour l'acquisition du droit exclusif d'exploiter les marques litigieuses sur le territoire européen, modalité qui se rapprocherait davantage du paiement d’un prix de vente. De plus, aucune compensation supplémentaire n’aurait été prévue pour le cas du renouvellement du contrat.

Par ailleurs, seul un propriétaire juridique ou économique aurait pu réaliser une plus-value, telle que celle réalisée lors de la cession du 21 juillet 2017. La société SOCIETE 1 aurait également disposé de droits exclusifs étendus ayant une valeur économique importante, tels que les droits d'exploiter, de sous-licencier les marques litigieuses et de conserver l'intégralité des revenus générés par les contrats de sous-licence, tandis que les droits de la société LICENCE 1 se seraient limités à des droits de veto. Les parties demanderesses insistent encore sur la durée contractuellement prévue de 25 ans qui aurait de facto était illimitée pour avoir été renouvelable par tacite reconduction, tout en relevant que le défaut de renouvellement aurait exposé la société LICENCE 1 à devoir payer une compensation de pleine concurrence. Par ailleurs, la société SOCIETE 1 se serait comportée comme le propriétaire économique des marques pour avoir dû effectuer, à ses propres frais et risques, des investissements significatifs afin de développer les marques litigieuses sur le territoire européen, tout en rappelant que la société LICENCE 1, dans sa déclaration fiscale américaine, aurait indiqué que le contrat de licence litigieux aurait constitué une cession des marques concernées.

Les parties demanderesses rappellent ensuite les quatre critères cumulatifs retenus par la jurisprudence des juridictions administratives en vertu desquels une personne serait à considérer comme étant le propriétaire économique d’un bien, à savoir que (i) la personne devrait pouvoir bénéficier d'une augmentation de la valeur du bien, (ii) elle devrait supporter les risques de dépréciation du bien, (iii) elle devrait détenir des droits économiques effectifs relatifs au bien et (iv) l'acquisition du bien devrait être quasiment irréversible.

En l’espèce, les parties demanderesses font, tout d’abord, valoir que la société SOCIETE 1 pourrait et aurait pu bénéficier d'un accroissement de la valeur des marques litigieuses et aurait supporté les risques inhérents à leur dépréciation en expliquant que ladite société aurait dû verser un paiement forfaitaire unique pour acquérir le droit exclusif et cessible d'exploiter lesdites marques sur le territoire européen pendant une période de 25 ans renouvelable, de sorte à avoir, d’une part, supporté le risque de ne pas réaliser de revenus suffisants pour au moins compenser le paiement forfaitaire versé à la société LICENCE 1, et, d’autre part, joui de l'opportunité de réaliser des revenus supérieurs audit paiement forfaitaire, ce qui aurait été le cas à travers la plus-value réalisée dans le cadre de la cession du 21 juillet 2017, circonstance démontrant d'ailleurs clairement le bénéfice, par la société SOCIETE 1, de l'augmentation de la valeur des marques litigieuses.

Dans ce contexte, les parties demanderesses insistent encore sur le rôle actif de la société SOCIETE 1 dans l’exploitation des marques, rôle dont aurait dépendu l’augmentation ou la diminution de valeur desdites marques.

Il ressortirait ainsi des rapports de prix de transfert relatifs au contrat de licence litigieux, respectivement aux contrats de sous-licence, que la société SOCIETE 1 aurait été responsable de la promotion des marques litigieuses et de leur déploiement dans les magasins MARQUE 1 sur le territoire européen et aurait dû supporter toutes les dépenses afférentes au marketing, à la publicité et à la promotion de ces marques et activités commerciales, tout en ayant également été responsable de l'entretien de l'image et de la réputation des produits et services offerts par les preneurs d'une sous-licence desdites marques, de sorte à avoir contribué, dans ce cadre, à l’élaboration des standards de qualité à respecter. Par ailleurs, pour assumer ses responsabilités dans le cadre du contrat de licence litigieux et des contrats de sous-licence, l’effectif de la société SOCIETE 1 aurait été augmenté d’une personne travaillant à temps plein en 2015 à 12,4, voire 14,6 en 2016, respectivement 2017, pour retomber à une seule personne suite à la cession du 21 juillet 2017.

Quant à la possibilité pour la société SOCIETE 1 de réaliser effectivement une plus-

value en relation avec les marques litigieuses, les parties demanderesses expliquent, en réfutant l’analyse directoriale à ce sujet, que quand bien même l’approbation écrite préalable de la société LICENCE 1 aurait été nécessaire pour que la société SOCIETE 1 puisse transférer ses droits d’exploitation, ledit accord n’aurait pu être refusé que pour des raisons commerciales valables, de sorte qu’il y aurait lieu de retenir que cette dernière aurait pu bénéficier de l’augmentation de valeur des marques au regard de la conclusion, en l’espèce, de contrats de sous-licence. Les parties demanderesses font encore valoir, dans ce contexte, que l’argumentation directoriale consistant à soutenir que la société LICENCE 1 aurait dû résilier le contrat de licence litigieux afin de pouvoir profiter de la plus-value réalisée par la société SOCIETE 1 lors de la cession du 21 juillet 2017 serait à rejeter, alors que, mis à part la circonstance que le directeur n’aurait pas à s’immiscer dans la gestion du groupe de société concerné, une telle affirmation n’aurait comme conséquence que l’allocation du droit d’imposition à l’Etat d’établissement de la société LICENCE 1, à savoir les Etats-Unis d’Amérique, au détriment du Luxembourg.

En ce qui concerne le critère jurisprudentiel de la jouissance effective des droits économiques des marques concernées, les parties demanderesses argumentent que préalablement à la cession du 21 juillet 2017, la société SOCIETE 1 aurait disposé de l'exclusivité des droits d'exploitation des marques litigieuses sur le territoire européen, tel que notamment le droit de sous-licencier lesdites marques, ainsi que de conserver l'intégralité des redevances et autres revenus générés par ces contrats de sous-licence, tandis que la société LICENCE 1 ne se serait attribuée que quelques droits limités pour des raisons juridiques et commerciales, de sorte que la société SOCIETE 1 serait à qualifier de propriétaire économiques desdits marques, ce qui serait confirmé par un rapport complémentaire de la société Deloitte relatif au Contrat de licence intitulé « Supplemental assessment of economic sale treatment for transfer of European rights of MARQUE 1 … », ainsi que par des rapports d’experts indépendants.

Les demanderesses contestent, dans ce cadre, les conclusions directoriales fondées sur les clauses 8.1 et 10.2 du contrat de licence litigieux en vertu desquelles la société LICENCE 1 se serait octroyé un certain nombre de droits d'intervention concernant l'usage des marques MARQUE 1, de sorte à en déduire que la société SOCIETE 1 ne serait pas le véritable possesseur desdites marques, mais se serait limitée à recueillir les recettes en relation avec celles-ci afin de les faire remonter vers la société mère du groupe MARQUE 1. Or, cette conclusion serait contredite par la circonstance que la société SOCIETE 1 aurait augmenté son personnel, aurait supporté les risques économiques liés à l'exploitation des marques concernées en Europe et aurait développé l'usage et la notoriété de celles-ci en Europe en engageant des frais de marketing et développement. Par ailleurs, les conclusions directoriales auraient encore dû avoir pour effet que l’imposition de la plus-value réalisée aurait dû être effectuée dans le chef de la société LICENCE 1, de sorte à échapper aux autorités fiscales luxembourgeoises, lesquelles n’auraient ainsi que pu imposer la société SOCIETE 1 que sur une petite marge rémunérant son rôle d'intermédiaire dans la remontée des fonds vers la société LICENCE 1.

Tout en rappelant la justification des restrictions prévues dans le contrat de licence au profit de la société LICENCE 1, les parties demanderesses font encore valoir que dans un groupe de sociétés, les revenus seraient toujours destinés in fine à remonter vers la société mère, de sorte qu’à suivre le raisonnement directorial, aucune filiale ne pourrait jamais être qualifiée de propriétaire économique d’une marque. Dans ce contexte, les parties demanderesses invoquent encore la circonstance que la société SOCIETE 1, du fait d’avoir pu contracter des sous-licences, respectivement procéder à la cession du 21 juillet 2017, aurait disposé de l’ensemble des prérogatives d’un propriétaire, de sorte qu’elle devrait être considérée comme ayant joui, pendant les années fiscales litigieuses, des droits économiques effectifs concernant les marques MARQUE 1.

Les parties demanderesses contestent finalement l’analyse directoriale concernant la clause 11.2 du contrat de licence réservant à la société LICENCE 1 le droit de résilier les contrats de sous-licence, alors que ledit droit est limité à l’hypothèse de l’extinction du contrat de licence. Par ailleurs, les parties demanderesses donnent encore à considérer, dans ce contexte, que les contrats de sous-licence ne reprendraient pas de manière appropriée ladite clause du contrat de licence, sans que la société LICENCE 1 ne s’en serait plainte, ce qui prouverait que les parties au contrat de licence auraient entendu traiter ce dernier comme une cession de la propriété économique des marques MARQUE 1.

Quant au critère de l’acquisition de manière irréversible, respectivement quasi-

irréversible des droits d’exploitation des marques concernées, les parties demanderesses se prévalent, dans un premier temps, des conditions du contrat de licence, telles que le paiement d’un montant forfaitaire, ainsi que la durée du contrat de licence, pour en conclure que l’opération en question serait à assimiler à une vente, conclusion qui serait confirmée par l’analyse économique opérée par le rapport de prix de transfert relatif au contrat de licence, ainsi que les principes de l’OCDE.

Les parties demanderesses invoquent ensuite plusieurs éléments censés démontrer que l’intention commune des sociétés LICENCE 1 et SOCIETE 1 aurait été d’assimiler le contrat de licence litigieux à une vente, tel que cela ressortirait notamment du mémo complémentaire de la société Deloitte du 9 février 2021, lequel relèverait expressément l’obligation pour la société SOCIETE 1 de procéder à des investissements significatifs, tout en devant en assumer les risques, ainsi que l’obligation pour la société LICENCE 1 de devoir compenser financièrement la société SOCIETE 1 en cas de refus de renouveler le contrat de licence litigieux.

Par ailleurs, la durée de 25 ans du contrat de licence, renouvelable automatiquement, et la complexité des conditions pour mettre en œuvre le droit de résiliation, témoigneraient de la volonté des parties de s’engager de facto de manière définitive. Les parties demanderesses expliquent encore, dans ce contexte, que la durée du contrat de licence dépendrait de la protection des marques concernées, ainsi que de l’effort fourni, respectivement à devoir être fourni pour l’entretien, le conservation et l’accroissement de valeur desdites marques, de sorte qu’il devrait être retenu, en l’espèce, que du fait que les marques auraient été quasiment inconnues en Europe en 2015, leur durée de vie, sans action de la part de la société SOCIETE 1 pour les promouvoir, n’aurait pas été supérieure à 20 ans, de sorte qu’en prévoyant une durée contractuelle de 25 ans, l’intention des parties aurait été de transférer la propriété économique desdites marques à la société SOCIETE 1.

En outre, l'absence de compensation supplémentaire payable par SOCIETE 1 à LICENCE 1 en cas de renouvellement du contrat confirmerait l'intention des parties de traiter le paiement forfaitaire unique initial comme un prix de vente pour un transfert définitif de la propriété économique des marques.

Par ailleurs, le fait de recourir à un contrat de licence plutôt qu'à une simple vente aurait été une pratique tout à fait commune pour des entreprises nord-américaines, les parties demanderesses citant, dans ce cadre, l’exemple d’un autre groupe de société actif dans le commerce sur internet, tout en insistant sur la circonstance que l'insertion d'un terme dans le contrat de licence litigieux aurait été justifiée par des considérations de droit des marques américain et par la prohibition des engagements perpétuels en droit civil luxembourgeois imposant un droit de résiliation de tels engagements à tout moment.

L'intention des parties ressortirait également du traitement fiscal auquel la société LICENCE 1 aurait été soumise aux Etats-Unis, alors qu’elle aurait indiqué dans sa déclaration fiscale américaine avoir vendu les marques litigieuses.

Les parties demanderesses se prévalent ensuite de la cession du 21 juillet 2017 pour soutenir, d’une part, que le préambule de contrat relatif à ladite cession aurait déjà mentionné que la société SOCIETE 1 aurait signé le 9 décembre 2015 un contrat de licence exclusive perpétuelle, et, d’autre part, que la conclusion du contrat de cession démontrerait que la société SOCIETE 1 aurait joui de la libre disposition des droits acquis en vertu du contrat de licence litigieux.

En ce qui concerne la clause 5.4 du contrat de licence aux termes de laquelle « Licensee shall claim no legal or equitable ownership interest, right, privilege or title to the Marks », les parties demanderesses argumentent que d'éventuelles maladresses dans la rédaction du contrat de licence ne sauraient invalider la conclusion que ledit contrat serait à assimiler à une vente opérant le transfert de la propriété économique des marques MARQUE 1 à la société SOCIETE 1, alors qu’il y aurait lieu de prendre en considération, au-delà des formulations juridiques, la réalité économique de l’opération litigieuse, approche qui aurait été confirmée tant par un arrêt de la Cour administrative du 26 juin 2008, inscrit sous le numéro 24061C du rôle que par un jugement du tribunal administratif du 4 octobre 2016, inscrit sous le numéro 36590 du rôle.

Finalement, les parties demanderesses invoquent, sur le plan comptable, l'absence d'amortissement du prix d'acquisition inscrit à l'actif de leur bilan afin de démontrer l’intention de la société SOCIETE 1 de traiter le contrat de licence litigieux comme l’acquisition de la propriété économique des marques MARQUE 1. Dans la mesure où le traitement fiscal devrait suivre le traitement comptable, conformément à l'article 40 LIR, et dans la mesure où les marques MARQUE 1 seraient qualifiées au bilan fiscal de la société SOCIETE 1 comme étant des actifs immobilisés, le contrat de licence litigieux serait également à traiter fiscalement comme un transfert de la propriété économique.

Les parties demanderesses concluent de l’ensemble de ces éléments que la société SOCIETE 1 aurait rempli toutes les conditions pour être reconnue comme le propriétaire économique des marques MARQUE 1, ce que tous les rapports préparés par des experts externes et indépendants auraient d’ailleurs également retenu, de sorte que ladite société aurait dû bénéficier du régime de l'article 50bis de la LIR pour l'imposition des redevances et de la plus-value relative auxdites marques. Les décisions directoriales déférées devraient partant être réformées en ce sens.

En dernier lieu, les parties demanderesses réfutent encore l’analyse directoriale ayant consisté à tirer un parallèle entre le contrat de licence et les contrats de sous-licence pour faire valoir que, si la société SOCIETE 1 s’était vu attribuer la propriété économique des marques MARQUE 1, elle aurait transféré celle-ci aux sous-licenciés, alors que les contrats de licence et de sous-licence se différencieraient notamment par leur durée, leur zone géographique d’application, le mode de paiement des redevances, ainsi que par la répartition de certains frais de marketing et de développement.

Les parties demanderesses considèrent, sur base de ces différences, que bien que la propriété économique des marques MARQUE 1 aurait été transférée à la société SOCIETE 1 par le biais du contrat de licence litigieux, ladite propriété n’aurait pas été transférée dans le cadre des contrats de sous-licence.

S'il devait, néanmoins, être considéré que la société SOCIETE 1 aurait transféré la propriété économique des marques MARQUE 1 aux sociétés preneuses des sous-licences, les paiements effectués par ces dernières à la société SOCIETE 1 devraient, en conséquence, être considérés comme paiement étalé du prix de cession de la propriété économique des marques, paiement qui aurait contribué à leur plus-value, de sorte à constituer un revenu de remplacement devant également bénéficier du régime de l'article 50bis de la LIR. Par ailleurs, la plus-value réalisée lors de la cession du 21 juillet 2017 ne saurait être imposable dans le chef de la société SOCIETE 1, dans la mesure où ladite société n’aurait été ni propriétaire juridique, ni économique des marques MARQUE 1. Alternativement, les redevances payées par les preneurs de sous-licence seraient à qualifier de distribution cachée de bénéfices en faveur de la société SOCIETE 1, de sorte à devoir être exonérées en application de l'article 166 LIR.

Dans leurs mémoires en réplique déposés dans les rôles inscrits sous les numéros 45706, respectivement 46555, les parties demanderesses, tout en réitérant leur argumentation relative au transfert de la propriété économique des marques MARQUE 1 à la société SOCIETE 1 et donc au bénéfice de l’article 50bis LIR par cette dernière et en contestant les conclusions étatiques contraires, insistent sur le caractère probant des rapports sur le prix de transfert des licences et sous-licences, alors que lesdits rapports auraient été établis avant la réalisation des opérations litigieuses et auraient permis de déterminer le montant à payer le jour des opérations en question. Quant à l’avis de d’expert en matière de propriété intellectuelle et le mémo complémentaire de la société Deloitte, bien qu’établis ex post, ces documents conserveraient néanmoins leur validité, alors que, d’une part, il existerait une éthique professionnelle empêchant les conseillers de se laisser dicter le contenu de leurs écrits par leurs mandants, surtout que les autorités fiscales seraient restées en défaut de fournir des éléments mettant en cause les conclusions desdits conseillers, et, d’autre part, les documents en question fourniraient un faisceau d'indices concordants visant à démontrer l'intention des parties au contrat de licence d'assimiler ce dernier à une vente ayant opéré le transfert de la propriété économique des marques MARQUE 1 à la société SOCIETE 1.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet du moyen des parties demanderesses basé sur une violation de l’article 50bis LIR pour ne pas être fondé.

Il échet de relever que la question principale du présent litige est de savoir si la société SOCIETE 1 peut être considérée comme propriétaire des droits intellectuels litigieux, question dont dépend l’application des dispositions de l’article 50bis LIR aux termes desquels, tel qu’en vigueur pour les années d’imposition concernées, « 1 Les revenus perçus à titre de rémunération pour l’usage ou la concession de l’usage d’un droit d’auteur sur des logiciels informatiques, d’un brevet, d’une marque de fabrique ou de commerce d’un nom de domaine, d’un dessin ou d’un modèle sont exonérés à hauteur de 80% de leur montant net positif. Est à considérer comme revenu net, le revenu brut diminué des dépenses en relation économique directe avec ce revenu, y compris l’amortissement annuel ainsi que, le cas échéant, une déduction opérée pour dépréciation.

2 Lorsqu’un contribuable a lui-même constitué un brevet et qui est utilisé dans le cadre de son activité, il a droit à une déduction correspondant à 80% du revenu net positif qu’il aurait réalisé s’il avait concédé l’usage de ce droit à un tiers. Est à considérer comme revenu net au sens du présent alinéa, la rémunération fictive diminuée des dépenses en relation économique directe avec ce revenu, y compris l’amortissement annuel ainsi que le cas échéant une déduction opérée pour dépréciation.

La déduction est accordée à partir de la date de dépôt de la demande de brevet.

En cas de refus de la demande de brevet, la déduction antérieurement opérée doit être ajoutée au bénéfice imposable de l’exercice d’exploitation au cours duquel le refus a été notifié au contribuable.

3 La plus-value dégagée lors de la cession d’un droit d’auteur sur des logiciels informatiques, d’un brevet, d’une marque de fabrique ou de commerce d’un nom de domaine, d’un dessin ou d’un modèle est exonérée à hauteur de 80%. (…) 4 L’application des alinéas 1 à 3 du présent article est soumise aux conditions suivantes:

1. le droit doit avoir été constitué ou acquis après le 31 décembre 2007;

2. les dépenses, amortissements et déductions pour dépréciation en rapport avec le droit sont à porter à l’actif du bilan du contribuable et à intégrer dans le résultat au titre du premier exercice pour lequel l’application des dispositions des alinéas susvisés entre en ligne de compte pour autant que pour un exercice donné ces frais ont dépassé les revenus en rapport avec ce même droit.

5 L’application des alinéas 1 et 3 est soumise à la condition additionnelle que le droit n’ait pas été acquis d’une personne qui a la qualité de société associée. (…) 6 Le contribuable peut recourir à toute méthode d’évaluation généralement utilisée pour l’évaluation des propriétés intellectuelles. Aux fins d’application de l’alinéa 3, la valeur estimée de réalisation du droit cédé doit être établie conformément à l’article 27, alinéa 2. (…) ».

Ainsi, il est constant, tant au vœux de l’alinéa 4 de l’article 50bis LIR précité que de par l’économie générale de cet article, qu’afin de se voir appliquer le régime dudit article, le contribuable doit avoir la qualité de propriétaire des droits intellectuels concernés.

Concernant l’interprétation de la condition de l’article 50bis, alinéa 4.1 LIR, la circulaire prévoit, sous son titre 4, que : « Les droits de propriété intellectuelle visés par l’article 50bis L.I.R. ont pour point commun qu’ils confèrent à leur propriétaire un droit exclusif d’exploitation, un monopole, qui lui permet d’interdire toute exploitation du droit par un tiers sur le territoire protégé. Le propriétaire du droit peut décider d’exploiter lui-même le droit (que ce soit à titre exclusif ou non) ou de le commercialiser soit en le cédant à un tiers, soit en concédant des licences d’exploitation (exclusives ou non) à une ou, le cas échéant, à plusieurs autres personnes.

En droit fiscal, l’appréciation des faits et circonstances se fait sur la base de critères économiques sous réserve d’un texte légal positif ne laissant aucune marge d’interprétation.

L’idée à la base étant que des actions ou situations identiques du point de vue économique soient soumises au même traitement fiscal. En principe, la propriété juridique et la propriété économique d’un bien sont réunies dans la même main. Si tel n’est pas le cas, le paragraphe 11, numéro 4 de la loi d’adaptation fiscale (StAnpG) prévoit que si une personne autre que le propriétaire juridique d’un bien (c’est-à-dire le propriétaire de droit au nom duquel le bien est officiellement acté) se comporte de manière telle qu’il enlève au propriétaire juridique toute possibilité de disposer dudit bien, ce bien lui est à attribuer aux fins de l’imposition.

Partant, lorsque la propriété économique et la propriété juridique d’un bien incorporel ne se confondent pas, c’est le propriétaire économique qui est à considérer comme propriétaire dudit bien pour l’application de l’article 50bis L.I.R. (…) ».

Ainsi, la circulaire base son interprétation relative à la propriété du bien sur le principe découlant du paragraphe 11 StAnpG concernant l’imputation personnelle de revenus et de biens, aux termes duquel « Für die Zurechnung bei der Besteuerung gelten, soweit nichts anderes bestimmt ist, die folgenden Vorschriften : (…) 4. Wirtschaftsgüter, die jemand in Eigenbesitz hat, werden dem Eigenbesitzer zugerechnet. Eigenbesitzer ist, wer ein Wirtschaftsgut als ihm gehörig besitzt. ».

Dans cet ordre d’idées, il a également été retenu en jurisprudence que la juridiction saisie ne saurait s'arrêter aux seules formes juridiques choisies par les parties pour réaliser une opération déterminée, mais elle est appelée, au-delà de l'apparence juridique, de rechercher et d'analyser la réalité économique recouverte par lesdites formes juridiques. En effet, il est de principe en droit fiscal que les faits et les actes juridiques doivent être interprétés et appréciés d'après des critères économiques. La définition du « Eigenbesitzer » du § 11 StAnpG constitue un concept sui generis de nature fiscale, qui ne se couvre pas avec les catégories du droit civil et il se dégage du terme en question que la loi envisage la situation d'un possesseur plutôt que d'un propriétaire juridique, de sorte qu'elle n'exige pas que tous les attributs du propriétaire soient réunis dans la personne de ce possesseur spécial. Pour le surplus, les qualifications juridiques avancées par les parties ne sont retenues par le juge de l'impôt que dans la mesure où elles correspondent à l'intention réelle des parties1.

Il s’ensuit que la notion de « Eigenbesitzer » vise en principe le propriétaire juridique d’un bien, à moins qu’il ne se dégage de la réalité économique que la propriété économique a été transférée à un tiers, hypothèse dans laquelle celui-ci est à considérer comme possesseur au sens du paragraphe 11 StAnpG.

Dans ce contexte, il est encore relevé que l'article 59 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de la procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », attribue la charge de la preuve des faits libérant de l'obligation fiscale ou réduisant la cote d'impôt au contribuable, de sorte qu’en vue de pouvoir profiter des conditions d’imposition favorables prévues à l’article 50bis LIR, il appartient à la partie demanderesse, qui s’en prévaut, d'établir qu'elle remplit les conditions d'application y prévues, et notamment la qualité de propriétaire des droits intellectuels litigieux.

Or, en l’espèce, il résulte du dossier administratif, ensemble les pièces versées au débat, que les parties demanderesses ne rapportent pas la preuve que la propriété des droits intellectuels concernés aurait été acquise par la société SOCIETE 1.

En effet, il ressort expressément du préambule du contrat de licence litigieux que la société LICENCE 1 est le propriétaire des marques MARQUE 1, ledit préambule précisant en effet que « the Licensor [la société MARQUE 1] is the owner of the MARQUE 1 Marks », et que l’objet du contrat en question n’est que de transférer un droit d’exploitation exclusif des marques MARQUE 1 sur le territoire européen à la société SOCIETE 1 pour une durée, automatiquement renouvelable, de 25 ans, moyennant un paiement forfaitaire unique de … dollars.

1 Voir en ce sens : Cour adm. 26 juin 2008, n° 24061C du rôle, Pas. Adm. 2022, V° Impôts, n° 80 et les autres références y citées.

De plus, conformément à l’article 5.4. du contrat de licence du 9 décembre 2015, il est expressément rappelé entre les parties audit contrat que la société LICENCE 1 est le seul propriétaire exclusif de tous les droits afférents aux marques2.

Par ailleurs, la société SOCIETE 1 ne peut pas librement disposer des marques MARQUE 1, dans la mesure où l’article 8.1 dudit contrat intitulé « Ownership and Goodwill of the Marks » précise expressément que « Licensee [la société SOCIETE 1] acknowledges and agrees that (i) Licensor [la société LICENCE 1] owns all rights to the Marks, (ii) other than as set out by the terms and provisions of this Agreement, Licensee has no interest whatsoever to the Marks and (iii) Licensee's right to use the Marks is limited to conducting business in accordance with this Agreement. Any unauthorized use of any of the Marks by the Licensee constitutes a breach of this Agreement and an infringement of Licensor's rights in and to the Marks. ».

Dans ce contexte, il y a encore lieu de relever que la société SOCIETE 1 est soumis au contrôle, respectivement à l’approbation préalable de la société LICENCE 1 en ce qui concerne la publicité et le marketing des marques MARQUE 13, quant au choix des produits à commercialiser sous lesdites marques MARQUE 14, voire même en ce qui concerne le transfert ou la cession des droits d’exploitation5 des marques en question, étant encore précisé que même dans l’hypothèse où la société SOCIETE 1 accorde des sous-licences relatives aux prédites marques, la société LICENCE 1 exerce son contrôle quant à l’utilisation des prédites marques6 et quant à la durée du contrat de sous-licence7.

Il suit des éléments qui précèdent que la société SOCIETE 1 ne revêt pas la qualité de propriétaire, respectivement de possesseur des marques MARQUE 1.

Cette conclusion est encore corroborée par les différents contrats de sous-licence conclus par la société SOCIETE 1 pour l’exploitation des marques litigieux sur le territoire de la Norvège, du Danemark, de la Suède, de l’Estonie, de la Pologne, de la Lettonie, ainsi que de la Lituanie et versés en cause par les parties demanderesses, alors que lesdits contrats stipulent tous également, de manière expresse, à l’article 6.4 intitulé « Adaptations », que « (…) Licensee [le bénéficiaire de la sous-licence] recognizes and admits that all rights to the Marks shall be solely and exclusively the property of LICENCE 1 Licensee shall claim no legal or equitable ownership interest, right, privilege or title to the Marks (…) », étant encore relevé que la société SOCIETE 1, dans le cadre desdits contrats ne se désigne pas comme 2 Aux termes de l’article 5.4 du contrat de licence : « Licensee recognizes and admits that all rights to the Marks shall be solely and exclusively the property of the Licensor. Licensee shall claim no legal or equitable ownership interest, right, privilege or title to the Marks (…) ».

3 Conformément à l’articlt 4.2 du contrat de licence : « Licensor has the right to approve or disapprove the content and media of all advertising and marketing programs and materials Licensee [la Requérante] proposes to use to promote the Marks and/or the business of its … Stores. Licensor has the right to refuse the content and media of all advertising. (…) ».

4 En vertu de l’article 5.1 du contrat de licence : « Licensee further agrees that such … Stores will not, without Licensor's approval, offer any merchandise, products or services not then authorized by Licensor. ».

5 L’article 9.2 du contrat de licence stipule que « Licensee has the right to transfer or assign all or any part of its rights or obligations under this Agreement to any person or legal entity, provided that any transfer by Licensee takes place with Licensor's prior written approval, not to be withheld with reasonable commercial reason. ».

6 L’article 8.2 du contrat de licence stipule que « Licensee shall, and shall ensure that its sublicensees agree to, use the Marks to identify … Stores only in a manner prescribed by Licensor from time to time. ».

7 Aux termes de l’article 11.2 du contrat de licence : « Upon expiration of the Term of this Agreement or upon termination by Licensor or Licensee, Licensor may also terminate the rights granted to sublicensees of Licensee pursuant to any Sublicense Agreements. ».

propriétaire des droits intellectuels donnés en licence à cette dernière, mais seulement comme le détenteur de droits exclusifs sur les marques litigieuses lesquels sont définis à l’article 1er des contrats de sous-licence sous examen comme étant les marques de la société LICENCE 1 pour lesquels la société SOCIETE 1 a acquis des droits exclusifs d’utiliser et d’accorder des sous-licences en Europe8.

L’intention des parties au contrat de licence doit partant être considérée comme ayant été tout à fait claire, à savoir que la société LICENCE 1 n’a pas entendu perdre le contrôle sur les droits intellectuels litigieux et n’a pas entendu transférer une quelconque partie de ses droits de propriété à la société SOCIETE 1, pour laquelle le droit d’exploitation des marques concernées est strictement limité par le contrat de licence litigieux, ainsi que par les contrats de sous-licence, la société LICENCE 1 gardant le contrôle sur ladite exploitation.

Il suit de cette considération que le prétendu transfert de la propriété des droits intellectuels litigieux ne ressort d’ores et déjà pas des clauses du contrat, de même qu’il n’en ressort pas un démembrement du droit de propriété afférent, sans que cette conclusion ne soit énervée par l’argumentation des parties demanderesses selon laquelle la durée de 25 ans du contrat de licence, renouvelable automatiquement, équivaudrait à une transmission définitive des marques litigieuses au motif que leur durée de vie n’excèderait pas une telle durée, alors que, d’une part, le contrat de licence prévoit expressément des modalités de résiliation9 qui ne sont, de manière générale, pas stipulées dans le cas d’une vente, et, d’autre part, il ne ressort d’aucun élément soumis à l’analyse du tribunal que la durée de vie des marques MARQUE 1 serait inférieure à une période de 25 ans, les parties demanderesses se limitant, sur ce point, à faire des affirmations non autrement corroborées par un élément concret soumis à l’analyse du tribunal.

Force est finalement au tribunal de relever, en ce qui concerne les développements de la partie demanderesse selon lesquels la réalité économique serait tout autre que celle ressortant des contrats de licence et de sous-licence, et plus particulièrement son argumentation sur base des critères jurisprudentiels consacrés à partir de l’article 11 StAnpG, que ladite argumentation est à rejeter dans son intégralité pour défaut de pertinence, alors qu’il ne saurait être permis à un contribuable de se servir du principe de la réalité économique pour contredire ses propres pièces non équivoques, alors qu’il est rappelé que le principe, dégagé du paragraphe 11 StAnpG, vise uniquement à permettre, en matière fiscale, aux autorités fiscales et au juge administratif de rechercher et d’analyser, au-delà de l’apparence 8 Aux termes de l’article 1.1 des contrats de sous-licence « (…) "Marks" – LICENSE 1 trademarks, trade names and trade dress, including all future adaptations thereof, as well as brand and deployment strategies relating thereto, including the registered and/or applied for marks and associated logos displayed in Exhibit A, to which Licensor has acquired exclusive rights to use and sublicense in Europe, including the Territory. ».

9 En vertu de l’article 10.2 du contrat de licence « Termination of Agreement Upon Notice. ln addition to any right to terminate this Agreement (and the right to terminate any of Licensee's rights under this Agreement) under other Sections hereof or under applicable law, Licensee acknowledges and accepts that Licensor may terminate this Agreement, without the need of obtaining any judicial, arbitration or administrative judgement, ruling, award or resolution of any kind, and without incurring therefor any responsability whatsoever, effective upon delivery of notice of termination to Licensee if Licensee fouis to comply with any material provision of this Agreement or any other material mandatory specification, standard or operating procedure prescribed by Licensor, that Licensor in good faith believes is not an isolated incident, and does not correct such failure within 30 days after notice of default is delivered to Licensee. ». Aux termes de l’article 11.4 du contrat de licence « Non-renewal by Licensor. Should the Licensor decide not to renew this Agreement at any renewal period as set out by the provisions of section 9.3, Licensor and Licensee shall consult each other within three months from the receipt by Licensee of the expiry notice of Licensor to jointly determine a reasonable compensation [and phase out period] for the Licensee's deployment of the Marks within the Territory. ».

juridique, la réalité économique recouverte par les formes juridiques choisies par les parties pour réaliser une opération déterminée, en vue de vérifier si ces dernières correspondent à l’intention réelle des parties10.

Or, dans une situation où, comme en l’espèce, l’intention réelle des parties n’est pas équivoque du fait de se dégager clairement des stipulations contractuelles, il n’y a en l’espèce pas lieu de requalifier le contrat de licence litigieux au nom du réalisme économique.

Il s’ensuit que la partie demanderesse n’est pas à considérer comme propriétaire ni juridique ni économique des droits de propriété intellectuelle litigieux, de sorte que c’est à bon droit que le directeur a refusé l’application du régime de l’article 50bis LIR à cet égard à la société SOCIETE 1.

A titre subsidiaire, les parties demanderesses font valoir, au cas où le tribunal devrait arriver à la conclusion que la société SOCIETE 1 ne disposerait pas de la propriété juridique, voire économique sur les marques MARQUE 1, il y aurait lieu de retenir que cette dernière ne saurait être imposée sur les revenus découlant du contrat de licence litigieux et, en particulier, sur la plus-value générée par la cession du 21 juillet 2017, alors que son rôle se serait limité, dans un tel cas de figure à celui d’un agent intermédiaire dont les revenus seraient à imposer en fonction de ladite activité, de sorte que ce serait la société LICENCE 1 qui serait à imposer en tant que propriétaire juridique et économique des marques. Les parties demanderesses fondent leur argumentation sur un arrêt de la Cour administrative du 2 juillet 2020, inscrit sous le numéro 43931C, lequel aurait retenu, au sujet du paragraphe 11 StAnpG que celui-ci fixerait des règles spécifiques concernant l'imputation personnelle des revenus et des biens.

Les parties demanderesses critiquent, dans ce cadre, les décisions directoriales déférées, en ce que ces dernières auraient, de manière erronée, cité comme exemple justifiant l’imposition des revenus découlant du contrat de licence litigieux, ainsi que de la plus-value générée par la cession du 21 juillet 2017, le cas d’une sous-location. Une telle comparaison ne serait cependant pas appropriée en l’espèce, selon les parties demanderesses, alors qu’un locataire ne réaliserait pas de marge substantielle sur la sous-location sur le marché libre, contrairement à la société SOCIETE 1, dans la mesure où il ne jouerait qu'un rôle mineur dans la valorisation du bien immobilier sous-loué.

Par ailleurs, la majeure partie du revenu erronément imposé en l’espèce, selon les parties demanderesses, serait la plus-value réalisée dans le cadre de la cession d'un droit d'exploitation exclusif des marques MARQUE 1, partant la vente d’un bien, opération qui ne serait pas possible en matière de sous-location laquelle ne saurait impliquer la vente du bien immobilier y afférent, ce qui exclurait de pouvoir réaliser une plus-value de cession.

Les parties demanderesses concluent des considérations qui précèdent que si la société SOCIETE 1 ne devait pas être considérée comme étant le propriétaire des marques MARQUE 1, les revenus générés par l’exploitation et la cession desdits droits de propriété intellectuelle devraient être imposés dans le chef de la société LICENCE 1, établie aux Etats-Unis, de sorte à échapper nécessairement au pouvoir d’imposition des autorités fiscales luxembourgeoises dont l’imposition serait partant à réformer.

10 Trib. adm. 3 février 2016, n° 35671 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Impôts, n° 30 et les deux autres références y citées.

Dans leurs mémoires en réplique, les parties demanderesses, tout en réitérant leur argumentation relative à l’impossibilité d’imposer la société SOCIETE 1 au cas où cette dernière devrait être considérée comme n’étant pas le propriétaire des marques MARQUE 1, font encore valoir que s’il devait être retenu que les revenus tirés des marques MARQUE 1 étaient réalisés par la société LICENCE 1 et non pas par la société SOCIETE 1 et que cette dernière ne serait qu’un agent intermédiaire, la conclusion devrait s’imposer que la société LICENCE 1 n'aurait pas conclu une transaction de pleine concurrence avec la société SOCIETE 1 dans le cadre du contrat de licence litigieux, et que la cession du 21 juillet 2017 aurait été conclue par la société LICENCE 1 et non pas par la société SOCIETE 1, laquelle se serait ainsi vu attribuer, du fait d’avoir profité de la plus-value y réalisée, un avantage indue de la part d’une société liée, lequel devrait être analysé comme un apport caché non imposable en vertu de l'article 18 LIR.

Les parties demanderesses concluent des éléments qui précèdent que les décisions directoriales, en ce qu’elles ont procédé à l’imposition des revenus réalisés dans le cadre de l’exploitation et de la cession des droits d’exploitation des marques MARQUE 1 dans le chef de la société SOCIETE 1 et, en conséquence, du fait de l’intégration fiscale, dans le chef de la SOCIETE 2, seraient à réformer.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet de l’argumentation subsidiaire des parties demanderesses pour manquer de fondement.

Force est, tout d’abord, au tribunal de relever que l’argumentation subsidiaire des parties demanderesses ne constitue qu’une contestation générale du principe d’imposition de la société SOCIETE 1 en ce qui concerne les revenus réalisés par cette dernière dans le cadre de son droit d’exploitation exclusif des marques MARQUE 1, lui accordé par le contrat de licence conclu avec la société LICENCE 1, et de la cession dudit droit, sans que les parties demanderesses ne formulent des critiques spécifiques et précises quant à l’imposition opérée desdits revenus pendant les années fiscales litigieuses, de sorte que l’analyse du tribunal devra nécessairement également se limiter sur cette question de principe.

Contrairement à l’argumentation des parties demanderesses, il y a lieu de retenir qu’un contribuable est, de manière générale, à imposer sur l’ensemble de ses revenus, conformément aux articles 10 et suivants LIR, sans que n’entre en ligne de compte, dans ce cadre, la question de la propriété du bien créateur de revenus, tel qu’en l’espèce les marques MARQUE 1, alors qu’il est constant en cause que la société SOCIETE 1, du fait du contrat de licence litigieux, s’était vu attribuer le droit d’exploiter les marques MARQUE 1 sur le territoire européen, soit directement, soit en accordant des sous-licences, de sorte à avoir généré, tant des revenus que des charges, lesquels devaient nécessairement faire l’objet d’une imposition, en tant que bénéfice commercial, respectivement, dans l’hypothèse de sous-licences, en tant que bénéfice provenant de la location de biens, la même conclusion devant prévaloir pour la plus-value réalisée dans le cadre de la cession de son droit d’exploitation exclusif à une société de droit irlandais le 21 juillet 2017, étant encore précisé qu’il ne ressort d’aucun élément soumis à l’analyse du tribunal que ladite opération n’aurait pas été réalisée dans des conditions de pleine concurrence, respectivement aurait constitué un apport caché.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent et en l’absence d’autres moyens que les recours sous examen sont à rejeter pour ne pas être fondés.

Les parties demanderesses sollicitent encore l’allocation d’une indemnité de procédure de 2.500 euros, dans le rôle inscrit sous le numéro 45706, respectivement de 5.000 euros, dans le rôle inscrit sous le numéro 46555, sur le fondement de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, demandes qu’il y a cependant lieu de rejeter au regard de l’issue des litiges sous examen.

Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant contradictoirement ;

ordonne la jonction des deux affaires inscrites sous les numéros de rôle 45706, respectivement 46555 pour y être statué par un seul et même jugement ;

reçoit les recours principaux en réformation introduits sous les numéros de rôle 45706, respectivement 46555 en la forme ;

au fond, les déclare non fondés ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur les recours en annulation introduits à titre subsidiaire sous les numéros de rôle 45706, respectivement 46555 ;

rejette les demandes des sociétés SOCIETE 1 SARL et SOCIETE 2 en allocation d’une indemnité de procédure formulées dans les numéros de rôle 45706, respectivement 46555 ;

condamne les parties demanderesses aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique de vacation du 26 juillet 2023 par :

Paul Nourissier, vice-président, Olivier Poos, premier juge, Laura Urbany, juge, en présence du greffier Marc Warken.

s.Marc Warken s.Paul Nourissier Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 26 juillet 2023 Le greffier du tribunal administratif 51


Synthèse
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 45706,46555
Date de la décision : 26/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 15/08/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-07-26;45706.46555 ?

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