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15/06/2023 | LUXEMBOURG | N°46046

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 15 juin 2023, 46046


Tribunal administratif N° 46046 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:46046 2e chambre Inscrit le 21 mai 2021 Audience publique du 15 juin 2023 Recours formé par la société anonyme …, …, contre le règlement grand-ducal du 10 février 2021 rendant obligatoire le plan directeur sectoriel « logement » en matière d’aménagement du territoire

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46046 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 21 mai 20

21 par la société à responsabilité limitée Elvinger Dessoy Marx SARL, inscrite sur la liste...

Tribunal administratif N° 46046 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:46046 2e chambre Inscrit le 21 mai 2021 Audience publique du 15 juin 2023 Recours formé par la société anonyme …, …, contre le règlement grand-ducal du 10 février 2021 rendant obligatoire le plan directeur sectoriel « logement » en matière d’aménagement du territoire

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46046 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 21 mai 2021 par la société à responsabilité limitée Elvinger Dessoy Marx SARL, inscrite sur la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-1461 Luxembourg, 31, rue d’Eich, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B251584, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Victor Elvinger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, au nom de la société anonyme …, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, tendant à l’annulation du règlement grand-ducal du 10 février 2021 rendant obligatoire le plan directeur sectoriel « logement » ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour de Maître Patrick Kinsch, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, déposée au greffe du tribunal administratif en date du 14 juillet 2021, pour compte de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse de Maître Patrick Kinsch déposé au greffe du tribunal administratif le 21 octobre 2021 pour compte de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réplique de la société à responsabilité limitée Elvinger Dessoy Marx SARL déposé au greffe du tribunal administratif le 22 novembre 2021 pour compte de la société anonyme …, préqualifiée ;

Vu le mémoire en duplique de Maître Patrick Kinsch déposé au greffe du tribunal administratif le 22 décembre 2021 pour compte de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu les pièces versées en cause et notamment l’acte attaqué ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Serge Marx, en remplacement de Maître Victor Elvinger, et Maître Patrick Kinsch en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 20 février 2023.

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Il est constant en cause que la société anonyme …, ci-après désignée par « la société … », est propriétaire d’une parcelle inscrite au cadastre de la commune d’Erpeldange-sur-Sûre, section …, sous le numéro ….

Suite à la décision du Gouvernement en conseil en date du 27 avril 2018, le département de l’Aménagement du territoire auprès du ministère du Développement durable et des Infrastructures, ci-après désigné par « le département de l’Aménagement du territoire », transmit en date du 14 mai 2018 par voie électronique les quatre projets de plans directeurs sectoriels « Transports », « Logement », « Zones d’activités économiques » et « Paysages », ensemble avec les rapports sur les incidences environnementales (« RIE ») y relatifs, aux collèges des bourgmestre et échevins des communes territorialement concernées.

Parallèlement à cette transmission par voie électronique, le département de l’Aménagement du territoire envoya en date du 14 mai 2018 aux collèges des bourgmestre et échevins des communes territorialement concernées une lettre recommandée avec accusé de réception afin de les informer de l’envoi du projet de plan directeur sectoriel par voie électronique.

Le 28 mai 2018, le rapport sur les incidences environnementales élaboré conformément à la loi modifiée du 22 mai 2008 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement, ci-après désignée par « la loi du 22 mai 2008 », fut publié sur support informatique par extrait dans quatre quotidiens publiés au Luxembourg.

Il se dégage encore du dossier administratif que le dépôt du projet de plan directeur sectoriel « Logement » à la maison communale fut publié le 28 mai 2018 par voie d’affiches apposées dans les communes de la manière usuelle ainsi que sur les sites internet respectifs des communes et du ministère du Développement durable et des Infrastructures, de sorte que le délai endéans lequel les personnes intéressées ont pu prendre connaissance des projets de plans directeur sectoriels a couru jusqu’au 27 juin 2018.

Il est ensuite constant en cause que par courrier de son litismandataire du 11 juillet 2018, soit endéans le délai de 45 jours à compter du dépôt public du projet de plan directeur sectoriel « Logement » à la maison communale, tel que fixé à l’article 2, paragraphe (4) de la loi modifiée du 17 avril 2018 concernant l’aménagement du territoire, ci-après désignée par « la loi du 17 avril 2018 », la société … présenta ses observations concernant le projet de plan directeur sectoriel « Logement » au collège des bourgmestres et échevins de la commune d’Erpeldange-sur-Sûre en ce que le projet en question prévoyait de superposer la parcelle, prévisée, lui appartenant, d’une zone prioritaire d’habitation (« ZPH »).

Le plan directeur sectoriel « Logement », ci-après désigné par le « PSL », tel que rendu obligatoire par le règlement grand-ducal du 10 février 2021, publié en date du 25 février 2021 au Mémorial n° 139, maintint le classement de la parcelle litigieuse en ZPH.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 21 mai 2021, la société … a fait introduire un recours tendant à l’annulation du règlement grand-ducal du 10 février 2021.

1.

Quant à la compétence du tribunal Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », seul un recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère réglementaire. Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours en annulation introduit à l’encontre du règlement grand-ducal déféré.

2.

Quant à la recevabilité du recours Moyens et arguments des parties Dans son mémoire en réponse, la partie étatique conclut que le recours sous analyse serait à déclarer irrecevable pour défaut d’intérêt à agir dans le chef de la société demanderesse faute pour celle-ci (i) d’être en mesure de démontrer qu’en raison de ses caractéristiques propres, sa parcelle tombe sous les obligations imposées par l’article 11, paragraphe (2), alinéa 9 de la loi du 17 avril 2018, en ce que les prescriptions en question ne seraient applicables qu’aux plans d’aménagement particuliers « nouveau quartier », ci-après désignés par les « PAP NQ », prévoyant un nombre de logements supérieur à 25 unités et (ii) de préciser si la procédure d’approbation d’un PAP NQ avait d’ores et déjà été entamée sur sa parcelle et ce, compte tenu du fait que si une telle procédure d’élaboration n’était lancée qu’après le 18 février 2022, ce seraient les dispositions de l’article 11, paragraphe (2), alinéa 9, littera b), de la loi du 17 avril 2018, tel que modifié suite à l’entrée en vigueur de la loi du 30 juillet 2021 relative au pacte logement avec les communes en vue d’augmenter l’offre de logements abordables, ci-après désignée par « la loi du 30 juillet 2021 », qui trouveraient à s’appliquer.

Dans son mémoire en réplique et après avoir constaté que la partie étatique ne contesterait pas le fait que le PSL recouvre sa parcelle d’une ZPH, la société demanderesse réfute la thèse étatique suivant laquelle, pour justifier d’un intérêt à agir contre le règlement grand-ducal litigieux, il lui appartiendrait de prouver qu’un PAP NQ pris en exécution du plan directeur sectoriel en question avait été mis sur orbite.

Elle conteste également la position étatique suivant laquelle il appartiendrait au tribunal d’examiner sa situation par rapport à une loi qui n’a été adoptée que postérieurement à l’adoption du règlement grand-ducal attaqué.

Elle ajoute que comme sa parcelle serait frappée par le PSL d’une ZPH, cela impliquerait, selon elle, une obligation dans son chef de consacrer au moins 30% de la surface construite brute destinée au logement à la réalisation de logements à coût modéré (« LACM »).

Dans la mesure où, de ce point de vue, le règlement grand-ducal affecterait directement sa situation de manière négative, elle est d’avis qu’il serait faux d’affirmer qu’un PAP NQ devrait avoir été mis sur orbite en exécution du PSL pour qu’elle puisse se prévaloir d’un intérêt à agir.

Dans son mémoire en duplique, la partie étatique prend tout d’abord acte du fait que la société demanderesse s’oppose à la suggestion de l’Etat de prendre en considération, selon la situation réelle de la parcelle en cause, soit le littera a) de l’article 11, paragraphe (2), alinéa 9 de la loi du 17 avril 2018, tel qu’il a été modifié, soit le littera b) du même texte, au motif qu’il conviendrait d’apprécier la légalité du règlement grand-ducal attaqué exclusivement au regard de la loi en vigueur au moment de sa publication.

Elle insiste toutefois sur le fait que l’examen à effectuer par le juge administratif ne devrait pas se résumer à un exercice purement abstrait, sans incidence sur la situation concrète du requérant. Comme il serait demandé au tribunal administratif uniquement d’examiner si le règlement, ainsi que la loi à sa base, telle qu’elle existait au moment de la publication de celui-

ci, sont conformes à la Constitution et à la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales (« CEDH »), la partie étatique est d’avis qu’il deviendrait « absolument essentiel » pour la société demanderesse de démontrer que sa parcelle relève bien du littera a), précité, ce qui ne serait le cas qu’à condition que la procédure d’adoption d’un PAP ait été lancée jusqu’au 18 février 2022 inclus. En effet, si tel n’était pas le cas, il devrait être admis que le littera a) n’aurait jamais l’occasion de s’appliquer à la parcelle de la société demanderesse ce qui impliquerait que la critique formulée dans le recours en annulation contre l’article 6 du règlement grand-ducal attaqué, lequel est relatif à la mise en œuvre de la zone prioritaire d’habitation par les PAP NQ, deviendrait sans objet pour autant qu’elle émane de la société demanderesse.

Enfin, la partie étatique relève que la société demanderesse ne se prononcerait toujours pas sur le nombre de logements susceptibles d’être construits sur sa parcelle, de sorte que, de ce point de vue, la recevabilité du recours contre l’article 6 du règlement grand-ducal attaqué serait contestable puisque le dispositif législatif et réglementaire critiqué ne serait applicable qu’aux lotissements faisant l’objet d’un PAP de plus de 25 logements.

Analyse du tribunal Aux termes de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996, « (1) Le tribunal administratif statue encore sur les recours dirigés pour incompétence, excès et détournement de pouvoir, violation de la loi ou des formes destinées à protéger les intérêts privés, contre les actes administratifs à caractère réglementaire, quelle que soit l’autorité dont ils émanent.

(2) Ce recours n’est ouvert qu’aux personnes justifiant d’une lésion ou d’un intérêt personnel, direct, actuel et certain. […] ».

Un demandeur doit justifier d’un intérêt personnel distinct de l’intérêt général pour pouvoir introduire un recours contre un acte administratif à caractère règlementaire. Par ailleurs, concernant le caractère direct de l’intérêt à agir, pour qu’il puisse être reçu à agir contre un acte administratif à caractère règlementaire, il ne suffit pas qu’un demandeur fasse état d’une affectation de sa situation, mais il doit établir l’existence d’un lien suffisamment direct entre l’acte querellé et sa situation personnelle. Finalement, la condition relative au caractère né et actuel, c’est-à-dire au caractère suffisamment certain, d’un intérêt invoqué implique qu’un intérêt simplement éventuel ne suffit pas pour que le recours contre un acte administratif à caractère règlementaire soit déclaré recevable1. Ainsi, le recours contentieux contre un acte administratif à caractère règlementaire n’est recevable que si l’annulation est susceptible de profiter personnellement et directement au demandeur en ce sens que sa situation, de fait ou de droit, doit s’en trouver améliorée2.

En l’espèce, il est constant en cause que la parcelle inscrite au cadastre de la commune d’Erpeldange-sur-Sûre, section …, sous le numéro … et appartenant à la société demanderesse 1 Trib. adm., 15 mai 2002, n° 14420 du rôle, confirmé par Cour adm., 22 janvier 2004, n° 16628C du rôle, Pas.

adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 39 et les autres références y citées.

2 Trib. adm., 25 juin 2008, n° 22066 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 39 et les autres références y citées.

a été frappée par le PSL d’une ZPH, ce qui impliquait potentiellement au moment de l’introduction du recours sous analyse, d’une part, conformément à l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018, dans sa version en vigueur tant au moment de l’entrée en vigueur du règlement grand-ducal litigieux qu’au moment du dépôt du recours, - article de loi auquel renvoie l’article 6 du règlement grand-ducal du 10 février 2021 -, l’obligation dans son chef de consacrer « au moins 30 % de la surface construite brute destinée au logement : a) à la réalisation de logements à coût modéré, destinés à des personnes répondant aux conditions des primes de construction ou d’acquisition prévues par la loi modifiée du 25 février 1979 concernant l’aide au logement, et b) à des logements locatifs visés par les articles 27 à 30ter de ladite loi précitée du 25 février 1979 », si elle venait à élaborer sur la parcelle en question un PAP NQ prévoyant un nombre de logements supérieur à 25 unités et, d’autre part, conformément à l’article 8 du même règlement grand-ducal de voir sa parcelle frappée d’un droit de préemption conféré à l’Etat et à la commune territorialement concernée pour l’acquisition de celle-ci, droit de préemption qui est également critiqué à travers le recours sous analyse.

Dans la mesure où au moment de l’introduction du recours sous analyse le règlement grand-ducal litigieux était susceptible d’affecter négativement la situation de la parcelle de la société demanderesse de ces deux points de vue, il doit être admis que cette dernière avait un intérêt à agir contre celui-ci.

Au vu de ces considérations, le recours en annulation, qui a, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi, est à déclarer recevable.

3.

Quant au fond 3.1.

En ce qui concerne la légalité externe de l’acte attaqué Moyens et arguments des parties La société demanderesse souligne que le règlement grand-ducal du 10 février 2021, se référerait « au 6ème « vu » » à une série d’avis émis lors du deuxième semestre 20163. Lesdits avis ministériels auraient été émis dans le cadre de l’élaboration de l’évaluation environnementale, désignée ci-après par la « EES », effectuée sur base de la loi modifiée du 22 mai 2008 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement, désignée ci-après « la loi du 22 mai 2008 ». L’exposé des motifs se trouvant à la base du règlement grand-ducal du 10 février 2021 renseignerait que « les plans directeurs sectoriels (PDS) sont des instruments d'exécution de la loi modifiée du 17 avril 2018 concernant l'aménagement du territoire qui ont pour objet de recouvrir la politique d'aménagement du territoire […] ». La procédure d’élaboration du PSL aurait toutefois été entamée avant l’entrée en vigueur de sa base légale.

3 « Vu l'avis du Ministère du Développement durable et des Infrastructures - Département de l'environnement datant du 7 octobre 2016 ainsi que les avis du Ministère du Développement durable et des Infrastructures -

Administration de la gestion de l'eau datant du 12 août 2016, du Ministère de l'Agriculture, de la Viticulture et de la Protection des consommateurs datant du 9 août 2016, du Ministère du Développement durable et des Infrastructures - Administration de la nature et des forêts datant du 9 août 2016 et du Ministère de la Culture -

Service des sites et monuments nationaux en date du 11 août 2016 rendus sur base de l'article 6, paragraphe 3, de la loi modifiée du 22 mai 2008 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement ».

Or, une EES devrait impérativement tenir compte de la législation qui sert de base au plan ou programme faisant l’objet de ladite évaluation. En l’espèce, des avis auraient été émis sans que la base légale du futur PSL n’aurait existé, ni - a fortiori - connue, de sorte que l’EES serait viciée et plus loin le règlement grand-ducal lui-même.

La société demanderesse fait valoir qu’il aurait été retenu par les juridictions administratives qu’en matière de PAG, la procédure d’élaboration d’une étude environnementale s’inscrirait nécessairement dans le cadre de la procédure d’adoption d’un PAG, de sorte qu’un vice constaté au niveau de la procédure d’élaboration de l’étude environnementale pourrait affecter la légalité de la procédure d’adoption du PAG. Cette jurisprudence s’appliquerait évidemment mutatis mutandis à la présente matière, de sorte que le règlement grand-ducal du 10 février 2021 serait à annuler pour ce motif.

La partie étatique répond que la société demanderesse ne contesterait ni qu’une EES aurait été effectuée ni que cette EES aurait été élaborée en conformité à la loi du 22 mai 2008, ni, enfin, qu’elle serait d’un quelconque point de vue irrégulière au regard de ladite loi. La société demanderesse prétendrait, en revanche, qu’il aurait été indispensable de ne commencer la procédure d’élaboration de l’EES qu’après l’entrée en vigueur de la loi du 17 avril 2018, qui en définitive aurait servi de base légale au plan directeur sectoriel litigieux. Aux yeux de la partie étatique, ce moyen confondrait la base légale de l’EES et la base légale du PSL. Cette dernière ne conditionnerait pas la régularité de l’EES et rien ne s’opposerait à ce qu’un plan sectoriel soit adopté après qu’une EES ait été menée pendant que la loi servant de base légale au plan directeur sectoriel était en cours d’élaboration. En effet, la loi du 22 mai 2008 ne subordonnerait en aucune de ses dispositions la régularité des EES à l’entrée en vigueur de la base légale de ce projet ou programme. Comme les conditions d’élaboration d’une EES seraient toutes entières définies dans la loi du 22 mai 2008, rien ne s’opposerait à ce qu’un plan directeur sectoriel soit adopté au vu d’une EES qui aurait été, ainsi, régulièrement effectuée, indépendamment de la date de l’entrée en vigueur de la base légale de ce plan.

La partie étatique ajoute qu’il serait inexact de penser qu’au moment où l’EES aurait été entamée, il y aurait eu une incertitude sur le contenu du plan directeur sectoriel litigieux projeté. L’EES aurait, au contraire, été élaborée au vu de toutes les données utiles à cet égard et le fait que sa base légale aurait été en cours de modification serait sans incidence à cet égard.

Il aurait, à cette époque, existé une législation sur les plans directeurs sectoriels qui aurait été en vigueur, à savoir, la loi entretemps abrogée du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire, désignée ci-après par « la loi du 30 juillet 2013 ». La raison de l’adoption d’une nouvelle loi, à savoir, de la loi actuelle, la loi du 17 avril 2018, aurait été une raison « de pur droit institutionnel (ou de « sécurité juridique ») », et non point une raison tenant au contenu des plans directeurs sectoriels en élaboration. La partie étatique renvoie à cet égard aux travaux parlementaires ayant abouti à la loi du 17 avril 2018. Elle conclut que le fait que l’EES aurait été en cours d’élaboration au moment de l’adoption du projet de loi serait sans incidence sur la régularité de l’EES, et partant sans incidence sur la légalité du règlement attaqué.

La société demanderesse réplique en précisant de prime abord que le projet de loi portant le numéro 70654, devenu plus tard la loi du 17 avril 2018, n’aurait été déposé que le 27 septembre 2016 tandis que la grande majorité des avis ministériels cités dans le préambule du 4 Projet de loi concernant l'aménagement du territoire et modifiant: 1. la loi modifiée du 16 août 1967 ayant pour objet la création d'une grande voirie de communication et d'un fonds des routes; 2. la loi modifiée du 15 mars 1979 sur l'expropriation pour cause d'utilité publique; 3. la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l'aménagement communal et le développement urbain.

règlement grand-ducal déféré seraient antérieurs à cette date. Selon la société demanderesse il relèverait d’une vue théorique et abstraite des choses que d'affirmer qu’une EES puisse être menée au sujet d’un plan dont la base légale est inexistante. L’article 5, alinéa 1er de la loi du 22 mai 2008 exigerait notamment que le rapport sur les incidences environnementales devrait tenir compte des « objectifs et du champ d'application géographique du plan ou du programme ». Pareillement, en vertu de l’article 7 de la loi du 22 mai 2008, l’objet du projet de plan ou de programme devrait être porté à la connaissance du public. Il serait impossible de tenir compte des objectifs et de l’objet d’un plan si sa base légale, qui définit ces objectifs et cet objet, est inexistante.

La société demanderesse conteste encore l’existence d’une base légale « au moment de l'EES », en l’occurrence la loi du 30 juillet 2013. D’une part, le PSL trouverait sa base légale dans la loi du 17 avril 2018 et non pas dans celle du 30 juillet 2013. D’autre part, les deux lois seraient fondamentalement différentes ce qui ressortirait bien d’une comparaison entre l’article 1er de la loi du 17 avril 2018, et l’article 1er de la loi du 30 juillet 2013 relatifs aux objectifs des lois respectives. Elle conclut qu’en lançant une EES sans que la base légale du futur PSL n’aurait existé, le public n’aurait pas été mis en mesure de vérifier, ni de se prononcer sur la question de savoir si les objectifs poursuivis par le PSL et son objet sont bien conformes à sa base légale.

La partie étatique rejette les reproches formulés par la société demanderesse en expliquant tout d’abord que la base légale de l’EES, à savoir la loi du 22 mai 2018, aurait bien existé, de même que le projet de plan directeur sectoriel, si bien qu’il aurait été possible de mener à son propos l’étude environnementale stratégique prescrite par la loi du 22 mai 2008.

Le fait « qu'au moment de l'EES », la base légale du plan directeur sectoriel en élaboration ait été la loi du 30 juillet 2013, alors que la base légale du plan directeur sectoriel définitif aurait été la loi du 17 avril 2018, ne saurait porter à conséquence. En effet, l’EES ne serait pas une évaluation de la qualité juridique de la loi sur l’aménagement du territoire, mais une évaluation des incidences d’un plan particulier sur l’environnement, en l’occurrence des incidences du plan directeur sectoriel. Que ce plan directeur sectoriel soit fondé sur l’une ou l’autre loi sur l’aménagement du territoire ne changerait évidemment rien en ce qui concerne ses incidences.

A cet égard, ce seraient les objectifs poursuivis par le plan directeur sectoriel et la réglementation qu’il institue qui seraient déterminants, et ces éléments résulteraient du plan directeur sectoriel lui-même. Enfin, la société demanderesse ne contesterait pas que les objectifs poursuivis par le PSL et la réglementation qu’il institue seraient conformes tant à la définition des buts de l’aménagement du territoire qui résultait de la loi du 30 juillet 2013 qu’à la définition qui résulte de la loi du 17 avril 2018. Il ressortirait des travaux parlementaires ayant abouti à la loi du 17 avril 2018, cités par la société demanderesse, que le remplacement de la loi du 30 juillet 2013 par la loi du 17 avril 2018 n’aurait pour objet que de remédier à un certain nombre de problèmes, réels ou supposés, de nature strictement juridique. Ces problèmes auraient été étrangers à l’EES en élaboration. Dès lors, rien ne se serait opposé à l'utilisation du résultat de l’EES après le vote de la loi du 17 avril 2018.

Enfin, la partie étatique conteste que la consultation du public aurait été lancée avant l'entrée en vigueur de la loi du 17 avril 2018 et se réfère à cet égard aux documents qu’elle a versés en cause, censés établir que les avis officiels lançant la procédure de consultation du public auraient été publiés au mois de mai 2018, soit postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 17 avril 2018. La lettre aux communes daterait du 14 mai 2018. La partie étatique conclut donc au rejet du moyen afférent.

Analyse du tribunal Le tribunal constate que le reproche formulé par la société demanderesse consiste en substance à affirmer que la procédure d’élaboration du PSL aurait été entamée avant l’entrée en vigueur de la loi constituant sa base légale, à savoir la loi du 17 avril 2018, au motif que les avis ministériels légalement requis dans le cadre de l’élaboration de l’EES auraient été émis avant l’entrée en vigueur de ladite loi.

A cet égard, c’est d’abord à juste titre que la partie étatique signale qu’il y a lieu d’opérer une distinction entre l’EES et le PSL ainsi que leurs deux bases légales respectives. En effet, l’EES est fondée sur la loi du 22 mai 2008 qui énonce les conditions dans lesquelles, et les modalités selon lesquelles, une EES est à élaborer, tandis que le PSL trouve son fondement légal dans la loi du 17 avril 2018, laquelle retient à son tour les objectifs, les conditions dans lesquelles et les modalités selon lesquelles, un PSL est à élaborer. Il s’agit donc bien de deux bases légales différentes et le fait qu’une EES ait été en cours d’élaboration avant l’entrée en vigueur de la base légale du PSL ne peut a priori pas affecter la légalité dudit PSL.

Il est toutefois vrai qu’il existe un certain lien entre une EES et la base légale du plan pour lequel elle est dressée. En effet, en vertu des dispositions de la loi du 22 mai 2008, et notamment de son article 2, une EES est mise en œuvre en vue de l’élaboration de certains « plans et programmes » pour en évaluer les incidences sur l’environnement. Une EES ne constitue donc pas une fin en soi mais est élaborée afin de pouvoir servir comme élément de renseignement à prendre en compte dans le cadre de l’élaboration d’un « plan ou programme », en l’occurrence du PSL, étant encore constaté à cet égard qu’il n’est pas contesté en cause que le PSL constitue un « plan ou programme » au sens de la loi du 22 mai 2008. Dès lors, une EES, afin de pouvoir utilement évaluer les incidences d’un « plan ou d’un programme » sur l’environnement, se doit de prendre en compte au moins dans les grandes lignes l’envergure et les objectifs dudit plan ou programme tels que fixés par sa base légale, en l’occurrence la base légale du PSL.

En l’espèce, il n’est pas contesté que l’élaboration de l’EES a été entamée avant même que la loi du 17 avril 2018, à la base du PSL, ne soit entrée en vigueur. Il ressort, en effet, du préambule même du règlement grand-ducal du 10 février 2021 que les avis des ministres légalement requis dans le cadre de l’élaboration d’une EES avaient d’ores et déjà été adoptés en 2016, soit bien avant l’entrée en vigueur de la loi du 17 avril 2018. Force est toutefois de constater qu’avant même l’entrée en vigueur de la loi du 17 avril 2018, la loi entretemps abrogée du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire prévoyait d’ores et déjà l’élaboration de plans directeurs sectoriels, et notamment d’un PSL, en tant que moyens à mettre en œuvre pour exécuter la politique d’aménagement du territoire. L’EES en cause a donc valablement été élaborée sur base de la loi du 22 mai 2008 en vue de l’adoption d’un PSL fondé, à son tour, sur la loi du 30 juillet 2013. Il n’est d’ailleurs pas contesté en cause que l’EES ait pris en compte du moins dans les grandes lignes l’envergure et les objectifs dudit PSL, tels que fixés par la loi du 30 juillet 2013. Si, par la suite, la base légale du PSL a été modifiée par l’entrée en vigueur de la loi du 17 avril 2018 et l’abrogation de la loi du 30 juillet 2013, cette modification n’affecte ni la légalité de l’EES - laquelle trouve sa base légale dans la loi du 22 mai 2008 - ni celle du PSL en lui-même, dans la mesure où il n’est ni concrètement et à suffisance invoqué ni a fortiori établi que l’envergure et les objectifs du PSL auraient changé à tel point sous l’égide de la nouvelle base légale que l’EES ne serait plus à considérer comme ayant pris en compte les objectifs et l’envergure du PSL projeté.

Il suit des considérations qui précèdent que le fait la loi du 17 avril 2018 soit entrée en vigueur à une époque où l’élaboration de l’EES était d’ores et déjà en cours n’affecte pas la légalité de la procédure d’élaboration du PSL.

Il s’y ajoute qu’en vertu de l’article 6, point 2 de la loi du 22 mai 2008 des « renseignements utiles concernant les incidences des plans et programmes sur l’environnement obtenus à d’autres niveaux de décision ou en vertu d’autres dispositions peuvent être utilisés pour fournir les informations énumérées à l’article 5. ». Dès lors, les renseignements obtenus dans le cadre de l’élaboration de l’EES sous l’égide de la loi du 30 juillet 2013 ont légalement pu continuer à être utilisés dans le cadre de l’EES suite à l’entrée en vigueur de la loi du 17 avril 2018.

Il n’est, ensuite, pas contesté en cause que, même si l’élaboration de l’EES a été entamée avant l’entrée en vigueur de la loi du 17 avril 2018 elle n’a été finalisée et adoptée qu’après l’entrée en vigueur de ladite loi, de sorte qu’au fur et à mesure de son élaboration les objectifs de la loi du 17 avril 2018 ont pu être pris en compte.

Enfin, la société demanderesse invoque encore, sans autre précision, l’article 7 de la loi du 22 mai 2008 aux termes duquel : « 1. Avant que le plan ou le programme ne soit adopté ou ne soit soumis à la procédure législative ou réglementaire le projet de plan ou de programme et le rapport sur les incidences environnementales sont mis à la disposition du public ». Force est au tribunal de constater, au vu des documents versés en cause par la partie étatique et plus particulièrement des extraits des publications effectuées dans certains journaux, et à défaut de plus amples précisions par la société demanderesse, que la publication requise par l’article 7 précité du PSL projeté ainsi que du rapport sur les incidences environnementales a bien été effectuée en l’espèce et ce, avant l’adoption du PSL.

Eu égard aux considérations qui précèdent, le moyen afférent de la société demanderesse est donc à rejeter pour ne pas être fondé.

3.2.

En ce qui concerne la légalité interne de l’acte attaqué La société demanderesse affirme contester plus particulièrement, d’une part, les contraintes découlant de l’obligation liée au statut de ZPH d’affecter au moins 30% de la surface construite brute à des LACM et, d’autre part, le droit de préemption découlant du règlement grand-ducal du 10 février 2021.

3.2.1. Quant au moyen visant à critiquer l’obligation légale d’affecter 30% de la surface construite brute à la réalisation de LACM Moyens et arguments des parties La société demanderesse estime que l’obligation - telle qu’elle découlerait de l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018, auquel il est renvoyé par l’article 6 du règlement grand-ducal du 10 février 2021 - pour chaque PAP NQ de consacrer au moins 30% de la surface construite brute à la réalisation de LACM, serait illégale et ce à plusieurs titres.

Ainsi, en premier lieu, elle fait valoir que l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018, dans sa version applicable tant au moment de l’entrée en vigueur du règlement grand-ducal du 10 février 2021 qu’au moment de l’introduction du recours sous analyse, violerait de façon disproportionnée le droit de propriété.

Afin de sous-tendre ce moyen et faute pour l’article 11, paragraphe (2), point 9 d’avoir fait l’objet de commentaires particuliers dans le cadre des travaux préparatoires de la loi du 17 avril 2018, elle renvoie aux critiques formulées par le Conseil d’Etat dans le cadre de l’adoption de la loi du 22 octobre 2008, dite « Pacte logement », plus particulièrement à l’encontre de l’article 29 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après désignée par « la loi du 19 juillet 2004 », qui a été introduit dans ladite loi par la loi « Pacte logement » et qui serait une disposition analogue à l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018. Il se dégagerait clairement des critiques en question que l’article 29 de la loi du 19 juillet 2004, sur lequel serait calqué l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018, aurait été très controversé lors de la procédure législative, la société demanderesse estimant que ces critiques resteraient pleinement applicables et vaudraient à plus forte raison à l’égard de la loi du 17 avril 2018 dans la mesure où celle-ci serait doublement plus sévère que l’article 29 de la loi du 19 juillet 2004 en ce que, d’une part, elle porterait le taux de réservation des LACM de 10% à 30% et, d’autre part, elle « semblerait » élargir la base de calcul en appliquant l’exigence des 30% à la surface construite brute totale du PAP NQ, tandis que l’article 29 de la loi du 19 juillet 2004 appliquerait l’exigence des 10% à la surface construite brute dédiée par le PAP NQ au logement.

Etant donné qu’un propriétaire dont les parcelles sont frappées par le PSL d’une ZPH serait dès lors obligé d’affecter 30% de la surface construite brute totale du PAP NQ à des LACM, lesquels viendraient s’ajouter aux 25% qu’il devrait déjà céder pour la voirie et les équipements publics, il devrait être admis qu’il s’agirait d’une « amputation » complètement disproportionnée qui interviendrait en violation du droit de propriété consacré aussi bien à l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, ci-après désigné par « le premier protocole additionnel à la CEDH », qu’à l’article 16 de la Constitution.

La société demanderesse insiste, à cet égard, sur le fait que l’article 16 de la Constitution ne serait pas limité à l’expropriation proprement dite mais qu’il s’appliquerait également aux limitations du droit de propriété résultant notamment de la réglementation de son usage. Après avoir relevé qu’en vertu de l’article 16 de la Constitution, nul ne pourrait être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique dans les cas et de la manière établis par la loi et moyennant une juste et préalable indemnité, elle réitère que le fait d’imposer à des propriétaires d’affecter 30% de la surface construite brute totale du PAP NQ à des LACM constituerait une atteinte disproportionnée au droit de propriété, tout en faisant valoir qu’une telle atteinte devrait impérativement être justifiée par l’utilité publique. Or, si certes suivant les auteurs de la loi du 17 avril 2018, cette utilité publique consistait prétendument à favoriser la mixité sociale et à permettre aux ménages les plus démunis d’accéder à la propriété d’un logement décent, il ne faudrait pas perdre de vue que faute pour la disposition figurant à l’article 29 de la loi du 19 juillet 2004, ensemble avec la loi modifiée du 25 février 1979 concernant l’aide au logement, ci-après désignée par « la loi du 25 février 1979 », d’avoir permis d’atteindre cet objectif - la pratique ayant, selon la société demanderesse, montré que l’article 29 n’aurait pas permis aux ménages économiquement les plus faibles d’accéder à la propriété -, la disposition figurant à l’article 11 paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018 ne le permettrait pas non plus.

La société demanderesse ajoute que le but d’utilité publique avancé par le législateur serait encore remis en cause par l’absence de toute disposition légale encadrant la mise en œuvre de la réalisation des LACM. En effet, alors même que l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018 ferait une distinction entre les LACM non-locatifs et locatifs, aucun texte légal ne définirait les modalités de mise en œuvre de ces logements, de sorte que faute de textes légaux, la réalisation des LACM non-locatifs et locatifs serait soumise à un régime « complètement arbitraire ». Il serait, par conséquent, impossible, sans violer la Constitution, de porter atteinte au droit de propriété sur base d’un régime « tellement flou et imprécis ».

Etant donné que l’utilité publique mise en avant par le législateur pour justifier l’atteinte critiquée au droit de propriété ne serait pas donnée, ladite atteinte, telle qu’elle serait aménagée par la disposition légale critiquée serait inconstitutionnelle, ce qui impliquerait que l’article 6 du règlement grand-ducal du 10 février 2021 serait dépourvu de base légale.

A toutes fins utiles, la société demanderesse formule au dispositif de son recours une question préjudicielle tendant à déterminer si l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018, dans sa version applicable tant au moment de l’entrée en vigueur du règlement grand-ducal du 10 février 2021 qu’au moment de l’introduction du recours sous analyse, est conforme ou non à l’article 16 de la Constitution, tout en se réservant le droit de saisir la Cour européenne des droits de l’Homme si ses moyens devaient être rejetés après épuisement de toutes les procédures nationales, de même qu’elle demande acte qu’elle se réserve expressément le droit de réclamer une indemnisation de la part de l’Etat pour le dommage subi « en raison des limitations » découlant du règlement grand-ducal entrepris.

En deuxième lieu, la société demanderesse soulève la contrariété de l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018 par rapport au principe de l’égalité devant la loi tel que découlant de l’article 10bis de la Constitution.

A l’appui de ce moyen, elle soutient que des propriétaires se trouvant dans des situations comparables, voire identiques, à savoir ceux réalisant des PAP NQ, se verraient traités de manière différente en ce sens qu’un propriétaire réalisant un PAP NQ dans une ZPH devrait réserver au moins 30% de la surface construite brute du PAP NQ à des LACM tandis que tout autre propriétaire pourrait se contenter de 10% de la surface construite brute dédiée par le PAP NQ au logement.

Comme l’article 11 de la loi du 17 avril 2018 admettrait lui-même que la disposition se trouvant en son point 9 constituerait une « exception » au principe ancré à l’article 29, paragraphe 2, alinéa 4 de la loi du 19 juillet 2004, il devrait être admis qu’il découlerait directement de la loi du 17 avril 2018 qu’elle réserve un traitement différent aux propriétaires que la loi du 19 juillet 2004.

Outre le fait que l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018 ne serait pas conciliable avec la protection du droit de propriété tel que découlant de l’article 16 de la Constitution - en ce qu’elle forcerait le propriétaire, à côté de la cession des 25% à affecter aux infrastructures publiques, à dédier au moins 30% de la surface construite brute du PAP NQ à des LACM, de sorte à lui faire perdre la libre disposition sur plus de 50% de sa propriété -, la disposition en question serait encore contraire au principe d’égalité de traitement dans la mesure où serait créée une inégalité entre les propriétaires dont les terrains se situent à l’intérieur du périmètre d’agglomération et qui sont recouverts d’une ZPH par le PSL et ceux dont les terrains sont situés en zone verte et qui sont recouverts d’une ZPH par le PSL. En effet, tandis que les premiers verraient leur propriété dévaluée de façon substantielle en raison de la disposition critiquée, les deuxièmes bénéficieraient d’une plus-value qui serait de loin supérieure aux obligations découlant de la disposition en cause.

Au vu de ces considérations, il devrait être conclu que l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018 violerait également l’article 10bis de la Constitution, privant ainsi l’article 6 du règlement grand-ducal du 10 février 2021 aussi de ce point de vue d’une base légale.

A toutes fins utiles, la société demanderesse formule encore au dispositif de son recours une question préjudicielle tendant à savoir si l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018 est conforme à l’article 10bis de la Constitution.

Dans son mémoire en réplique, la société demanderesse relève tout d’abord qu’une erreur se serait glissée dans la requête introductive d’instance en ce sens que l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018 avait été modifié par une loi du 1er février 2021 pour préciser dorénavant que « 30% de la surface construite brute dédiée au logement est à consacrer » à des LACM et non pas « 30% de la surface construite brute » du PAP NQ.

Elle souligne toutefois que « cette guérison partielle du texte » n’enlèverait, à ses yeux, rien au fait que le PSL et sa base légale porteraient une atteinte disproportionnée et inégalitaire au droit de propriété en obligeant les propriétaires concernés par une ZPH découlant du règlement grand-ducal du 10 février 2021 de consacrer au moins 30% de la surface construite brute destinée au logement à la réalisation de LACM.

Tout en admettant que l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018 aurait encore connu une évolution législative suite à l’entrée en vigueur de la loi du 30 juillet 2021, elle insiste sur le fait que le juge de l’annulation serait amené à analyser la situation de droit et de fait au moment de la prise de la décision déférée, de sorte que le tribunal de céans ne pourrait contrôler la légalité du règlement grand-ducal entrepris qu’au regard de la seule disposition légale en vigueur non seulement au moment où il a été adopté, mais également au moment du dépôt du recours sous analyse.

Il s’ensuivrait que la question de l’atteinte disproportionnée au droit de propriété telle que soulevée dans la requête introductive d’instance devrait être appréciée par rapport au seul texte légal en vigueur au moment de l’adoption du règlement grand-ducal entrepris.

Elle maintient ensuite que l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018, tel qu’en vigueur au moment du dépôt du recours sous analyse, porterait une atteinte disproportionnée au droit de propriété des propriétaires des parcelles frappées par une ZPH.

Elle s’appuie, à cet égard, sur les travaux parlementaires se trouvant à la base de la loi du 30 juillet 2021 qui seraient riches en enseignements pour confirmer que l’obligation de consacrer au moins 30% de la surface construite brute destinée au logement à la réalisation de LACM porterait une atteinte disproportionnée au droit de propriété.

La société demanderesse explique ensuite dans quelle mesure le système des LACM aurait concrètement un impact sur son droit de propriété en insistant plus particulièrement sur le fait qu’il se dégagerait des travaux parlementaires à la base de la loi du 30 juillet 2021 que le prix de vente des LACM se situerait généralement 20% en-dessous de la valeur du marché, mais qu’en réalité, de nombreuses communes imposeraient des prix de cession des LACM qui seraient défalqués de plus de 20% par rapport à la valeur du marché. Elle estime que, hormis le fait que « l’obligation litigieuse de 30% » impliquerait ainsi une atteinte disproportionnée au droit de propriété, elle conduirait également à un traitement inégalitaire entre le régime de droit commun et le « régime PSL ».

Elle réitère, à cet égard, que la réglementation critiquée ne pourrait pas être considérée comme étant d’utilité publique ni comme étant proportionnée en faisant valoir qu’un propriétaire dont les terrains sont frappés d’une ZPH n’aurait qu’un double choix, à savoir soit assumer les pertes financières découlant de la réalisation des 30% de LACM, ce qui porterait une atteinte excessive à son droit de propriété, soit répercuter cette perte sur les autres 70%, ce qui signifierait une augmentation substantielle du prix du marché à l’égard des personnes ne tombant pas sous les conditions de la loi du 25 février 1979. Or, dans le premier cas, il y aurait une atteinte disproportionnée au droit de propriété et violation de l’article 16 de la Constitution du fait que le propriétaire devrait faire face à une perte financière, tandis que, dans le deuxième cas, la situation sur le marché de l’immobilier s’aggraverait encore davantage. A tout cela s’ajouterait encore le constat suivant lequel, pour les raisons déjà plus amplement développées dans la requête introductive d’instance, les objectifs avancés par le législateur resteraient non-

atteints avec la réglementation critiquée, de sorte que l’utilité publique censée justifier l’atteinte au droit de propriété ne serait pas donnée. La société demanderesse insiste, à cet égard, sur le fait qu’en imposant aux propriétaires le taux litigieux de 30%, le règlement grand-ducal du 10 février 2021 s’attaquerait à un faux problème sans parvenir à atteindre l’objectif que le pouvoir réglementaire se serait donné, ce qui impliquerait qu’une charge disproportionnée serait imposée dans le chef des propriétaires afin de remédier à un problème trouvant sa source ailleurs.

Au vu de ces considérations, il y aurait lieu de conclure qu’en l’espèce, il y aurait une atteinte disproportionnée au droit de propriété qui ne serait pas justifiée par l’utilité publique, de sorte que le règlement grand-ducal attaqué serait à annuler pour ce motif.

La société demanderesse insiste ensuite sur le fait que le législateur aurait lui-même conçu les régimes découlant de l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018 comme un régime dérogatoire au régime de droit commun, de sorte que les propriétaires de parcelles frappées d’une ZPH seraient traités différemment que les autres propriétaires réalisant un PAP NQ, sans que ce traitement différencié ne soit rationnellement justifié, adéquat et proportionné à son but.

Elle relève, dans ce contexte, qu’il ne saurait être affirmé que la différenciation litigieuse serait justifiée par le fait que les terrains superposés d’une ZPH seraient particulièrement bien reliés aux transports en commun de haute qualité.

Elle fait, valoir que, de façon plus générale, il serait formellement contesté que les sites recouverts d’une ZPH bénéficieraient d’une offre de transports en commun exceptionnellement bonne et que, pour s’en convaincre, il suffirait de se référer notamment à la ZPH identifiée à … qui serait une localité purement rurale dont il ne saurait être raisonnablement affirmé qu’elle bénéficierait d’une offre exceptionnellement bonne en termes de transports en commun.

De façon plus concrète, la société demanderesse conteste formellement que sa propre parcelle sise à … bénéficierait d’une offre exceptionnellement bonne en termes de transports en commun.

Elle ajoute que même à admettre que la qualité des transports en commun était exceptionnellement bonne, cet état de fait ne suffirait pas pour justifier le traitement inégalitaire critiqué ni pour ne faire porter ce coût que par quelques rares propriétaires dont les terrains sont frappés par les ZPH alors que cette qualité bénéficierait à la généralité. Afin d’illustrer son argumentation, elle compare un extrait de la partie graphique du plan d’aménagement général de la commune de Erpeldange-sur-Sûre avec un extrait de la partie graphique de la ZPH couvrant cette même zone.

La société demanderesse conteste ensuite que le traitement inégalitaire critiqué puisse être justifié par une densification particulièrement élevée en relevant que tandis que d’autres terrains superposés de PAP NQ situés sur le même site que sa parcelle bénéficieraient d’un classement en zone de base [MIX-u] avec des coefficients CUS de 0,90 et de 1 et des coefficients DL allant jusqu’à 42 et 70, sa propre parcelle, frappée d’une ZPH et soumise à l’obligation de consacrer 30% de la surface construite brute destinée au logement à la réalisation de LACM, serait classée en zone de base [HAB-1] avec des coefficients tellement réduits « qu’on se croirait être en zone purement rurale et non pas dans une …». Il serait dès lors faux de prétendre que dans son cas la superposition de la ZPH serait justifiée par une densification particulièrement élevée et le traitement inégalitaire non justifié serait flagrant et patent.

Elle insiste, par ailleurs, sur le fait que dans le cadre de l’élaboration de la loi du 30 juillet 2021, le législateur aurait expressément reconnu que dans le système applicable postérieurement au 18 février 2022, il y aurait un traitement inégalitaire entre propriétaires réalisant un PAP NQ dans des circonstances normales et ceux réalisant un PAP NQ sur une parcelle frappée d’une ZPH si ces derniers ne bénéficiaient pas d’une compensation complémentaire. Or, comme le régime applicable au moment de l’adoption du règlement grand-ducal litigieux mettrait sur un pied d’égalité les propriétaires soumis au taux de 10% et ceux soumis au taux de 30%, il y aurait manifestement un traitement inégalitaire entre des personnes se trouvant dans la même situation.

Enfin, la société demanderesse réitère que pour les motifs déjà développés plus haut, l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018 serait contraire au principe d’égalité de traitement en ce qu’il créerait une inégalité entre propriétaires dont les terrains sont situés à l’intérieur du périmètre d’agglomération et qui sont recouverts d’une ZPH et ceux dont les terrains sont situés en zone verte et qui sont recouverts d’une ZPH.

Au vu de toutes ces considérations, il devrait être conclu que l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018, dans sa version en vigueur tant au moment de l’entrée en vigueur du règlement grand-ducal du 10 février 2021 qu’au moment du dépôt du recours sous analyse, violerait l’article 10bis de la Constitution.

La partie étatique conclut, quant à elle, au rejet du recours pour ne pas être fondé.

Analyse du tribunal Aux termes de l’article 6 du règlement grand-ducal du 10 février 2021, « A l’intérieur des zones prioritaires d’habitation qui sont énumérées à l’annexe 1 et représentées graphiquement à l’annexe 2, l’article 11, paragraphe 2, point 9, de la loi modifiée du 17 avril 2018 concernant l’aménagement du territoire est applicable ».

L’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018, dans sa version applicable au moment tant de l’entrée en vigueur du règlement grand-ducal du 10 février 2021 que du dépôt du recours sous analyse, disposait comme suit :

« (2) Le plan directeur sectoriel peut : […] 9° imposer que, par exception à l’article 29, paragraphe 2, alinéa 4 de la loi précitée du 19 juillet 2004, chaque plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » qui prévoit un nombre de logements supérieur à 25 unités et qui exécute une zone destinée à être urbanisée affectée principalement ou accessoirement au logement et mise en œuvre dans le cadre d’une zone superposée découlant d’un plan dans le cas prévu à l’article 1er, paragraphe 2, points 14° et 15°, consacre au moins 30 % de la surface construite brute destinée au logement :

a) à la réalisation de logements à coût modéré, destinés à des personnes répondant aux conditions d’octroi des primes de construction ou d’acquisition prévues par la loi modifiée du 25 février 1979 concernant l’aide au logement et, b) à des logements locatifs visés par les articles 27 à 30ter de ladite loi précitée du 25 février 1979. ».

Le tribunal relève ensuite que la loi du 30 juillet 2021, précitée, qui a produit ses effets au 1er janvier 2021, a, entre autres, modifié l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018 qui a pris la teneur suivante :

« (2) Le plan directeur sectoriel peut : […] 9° imposer que :

a) par exception à l’article 29, paragraphe 2, alinéa 4 de la loi précitée du 19 juillet 2004, chaque plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » qui prévoit un nombre de logements supérieur à 25 unités et qui exécute une zone destinée à être urbanisée affectée principalement ou accessoirement au logement et mise en œuvre dans le cadre d’une zone superposée découlant d’un plan dans le cas prévu à l’article 1er, paragraphe 2, points 14° et 15°, consacre au moins 30 pour cent de la surface construite brute destinée au logement :

- à la réalisation de logements à coût modéré, destinés à des personnes répondant aux conditions d’octroi des primes de construction ou d’acquisition prévues par la loi modifiée du 25 février 1979 concernant l’aide au logement et, - à des logements locatifs visés par les articles 27 à 30ter de ladite loi précitée du 25 février 1979 ;

b) par exception à l’article 29bis, paragraphe 2, de la loi précitée du 19 juillet 2004, pour chaque plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » tombant dans le champ d’application de l'article 108quinquies, alinéa 1er, de la loi précitée du 19 juillet 2004 qui prévoit un nombre de logements supérieur à 25 unités et qui exécute une zone destinée à être urbanisée affectée principalement ou accessoirement au logement et mise en œuvre dans le cadre d’une zone superposée découlant d’un plan dans le cas prévu à l’article 1er, paragraphe 2, points 14° et 15°, au moins 30 pour cent de la surface construite brute maximale à dédier au logement sont réservés à la réalisation de logements abordables tels que définis à l’article 29bis, paragraphe 1er de la loi précitée du 19 juillet 2004. Dans ce cas, et sans préjudice de l’article 29bis, paragraphe 5, de la loi précitée du 19 juillet 2004, la cession des fonds réservés au logement abordable peut donner lieu à une contrepartie complémentaire lorsque la part de la surface construite brute à réserver à la réalisation de logements abordables dépasse celles prévues à l’article 29bis, paragraphe 2, de la loi précitée du 19 juillet 2004. ».

Il convient de relever que l’applicabilité du littera a) ou du littera b) dépend d’une disposition transitoire insérée, par la loi du 30 juillet 2021, dans la loi du 19 juillet 2004.

Tel que l’a relevé à bon droit la partie étatique, cette disposition transitoire ne figure pas, comme indiqué, suite à une regrettable malfaçon législative, dans le texte de l’actuel article 11, paragraphe (2), point 9, l’article 108 quinquies, alinéa ler de la loi du 19 juillet 2004 - dont l’insertion dans la loi du 19 juillet 2004 avait certes été envisagée lors des travaux préparatoires de la loi du 30 juillet 2021, mais qui n’a au final pas eu lieu -, mais à l’article 14 de la loi du 30 juillet 2021 elle-même qui dispose comme suit :

« Art. 14. - Disposition transitoire L’article 29, paragraphe 2, alinéa 4, de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain est abrogé. Il continue à s’appliquer aux plans d’aménagement particulier « nouveau quartier » dont la procédure d’adoption est entamée au plus tard dans les six mois suivant la publication de la présente loi. Cette disposition s’applique également à la modification de ces plans d’aménagement particulier « nouveau quartier ».

L’article 29bis, paragraphe 2, alinéa 3, de la loi précitée du 19 juillet 2004 s'applique aux plans d’aménagement général dont la procédure de modification est entamée six mois après la publication de la présente loi. » Il n’est pas contesté que l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018 est dès lors à lire en ce sens que le littera a) de ce texte s’applique uniquement aux PAP NQ dont la procédure d’adoption est entamée au plus tard dans les six mois suivant la publication de la loi du 30 juillet 2021, ainsi que les modifications de ces PAP NQ, tandis que relèvent dorénavant du seul littera b) de ce texte, les PAP NQ dont la procédure d’adoption est entamée postérieurement à cette date. Etant donné que la publication de la loi du 30 juillet 2021 au Journal Officiel s’est faite en date du 18 août 2021, la date butoir à prendre en compte est le 18 février 2022, en ce sens que c’est après cette date que les nouveaux mécanismes institués par la loi du 30 juillet 2021 ont vocation à s’appliquer.

Or, en l’espèce, il est constant en cause, pour avoir été confirmé par le litismandataire de la société demanderesse à l’audience des plaidoiries, qu’à l’heure actuelle, aucune procédure d’adoption d’un PAP NQ n’a encore été entamée sur la parcelle litigieuse.

Donc, même à admettre que la parcelle de la société demanderesse puisse accueillir au moins 25 unités de logement, le PAP NQ qu’elle serait amenée à élaborer relèverait à l’heure actuelle nécessairement du littera b) de l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018 imposant de réserver « au moins 30 pour cent de la surface construite brute maximale à dédier au logement […] à la réalisation de logements abordables tels que définis à l’article 29bis, paragraphe 1er de la loi précitée du 19 juillet 2004 », tout en prévoyant que « dans ce cas, et sans préjudice de l’article 29bis, paragraphe 5, de la loi précitée du 19 juillet 2004, la cession des fonds réservés au logement abordable peut donner lieu à une contrepartie complémentaire lorsque la part de la surface construite brute à réserver à la réalisation de logements abordables dépasse celles prévues à l’article 29bis, paragraphe 2, de la loi précitée du 19 juillet 2004. ».

Il est certes vrai que dans le cadre d’un recours en annulation, le juge administratif est amené à apprécier la légalité de l’acte administratif lui soumis en considération de la situation de droit et de fait au jour où il a été pris.

Il n’en reste pas moins qu’il ne faut pas perdre de vue que le contentieux direct de l’annulation des actes réglementaires, introduit dans la législation luxembourgeoise seulement à travers la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, répond à des critères particuliers à analyser de manière stricte eu égard aux conséquences dirimantes de pareil recours, une fois définitivement accueilli par les juridictions administratives5.

En effet, le recours déclaré fondé emporte l’annulation d’une norme réglementaire ayant produit des effets juridiques erga omnes.

L’annulation d’une norme réglementaire comporte que celle-ci disparaît de l’ordonnancement juridique et devient ainsi inexistante juridiquement parlant.

L’importance de ces effets de l’annulation d’un acte réglementaire est reflétée par l’article 7 de la loi précitée du 7 novembre 1996 en ce qu’il prévoit, sur base de la règle du parallélisme des formes, la publication du jugement ou arrêt définitif d’annulation dans les mêmes formes que l’acte annulé. Pour les règlements grand-ducaux, le jugement ou arrêt définitif d’annulation doit être publié au Journal Officiel, Mémorial A, dans le mois de la décision juridictionnelle définitive.

Le corollaire des effets particulièrement dirimants du recours direct en annulation d’un acte réglementaire consiste en ce que la requête en annulation doit viser de manière précise les dispositions de l’acte réglementaire attaqué dont l’annulation est demandée6.

Au vu de toutes les considérations qui précèdent, le tribunal, encore que statuant dans le cadre d’un recours en annulation, ne saurait faire abstraction de la modification opérée par la loi du 30 juillet 2021 sur l’article 11, paragraphe (2), point 9 de la loi du 17 avril 2018, auquel renvoie l’article 6 du règlement grand-ducal du 10 février 2021, ni plus particulièrement du fait que l’obligation de dédier au moins 30% de la surface construite brute d’un PAP NQ destinée au logement à la réalisation de LACM, telle que découlant toujours du littera a) du nouvel article 11, paragraphe 2, point 9, ne s’applique plus aux PAP NQ dont la procédure d’élaboration a été entamée après le 18 février 2022.

Or, il y a lieu de relever qu’en l’espèce, c’est uniquement afin de s’opposer à se voir imposer, en sa qualité de propriétaire d’une parcelle frappée d’une ZPH, l’obligation de dédier au moins 30% de la surface construite brute du PAP NQ destinée au logement à la réalisation de LACM, telle qu’ayant découlé de l’article 11, paragraphe (2), point 9, dans sa version en vigueur avant la modification opérée à travers la loi du 30 juillet 2021 - et telle que maintenue dans le nouvel article 11, paragraphe (2), point 9 sous le littera a) pour les seuls PAP NQ dont la procédure d’élaboration a été entamée avant le 18 février 2022 - que la société demanderesse 5 Cour adm., 31 décembre 2020, nos 44698C, 44699C, 44700C, 44701C et 44702C, du rôle, Pas. adm. 2022, V° Actes réglementaires (recours contre les), n° 21.

6 idem a voulu, à travers le recours sous analyse, faire constater, sous divers aspects, l’illégalité, respectivement l’inconstitutionnalité, sinon l’« inconventionnalité » de l’article 11, paragraphe (2), point 9 dans sa version antérieure à sa modification par la loi du 31 juillet 2021, pour in fine voir annuler le règlement grand-ducal du 10 février 2021 pour défaut de base légale. Tel que cependant relevé ci-dessus, sous l’empire du nouvel article 11, paragraphe (2), point 9, et faute pour elle d’avoir entamé avant le 18 février 2022 une procédure d’adoption d’un PAP NQ, la parcelle de la société demanderesse relèvera nécessairement non pas du littera a), mais du littera b) dudit article, imposant de réserver « au moins 30 pour cent de la surface construite brute maximale à dédier au logement […] à la réalisation de logements abordables tels que définis à l’article 29bis, paragraphe 1er de la loi précitée du 19 juillet 2004 ».

Au vu des considérations qui précèdent, la mesure sollicitée par la société demanderesse à travers le moyen sous analyse, à savoir l’annulation du règlement grand-ducal du 10 février 2021 au motif qu’il serait basé sur une disposition illégale, voire inconstitutionnelle, sinon « inconventionnelle » en raison des contraintes qui découleraient pour elle, en tant que propriétaire d’une parcelle frappée par une ZPH, de l’obligation d’affecter au moins 30% de la surface construite brute du PAP NQ destinée au logement à la réalisation de LACM, n’a plus de raison d’être du fait que la disposition légale critiquée par la société demanderesse, n’aura jamais l’occasion de s’appliquer à sa parcelle. Le moyen afférent est dès lors à rejeter dans ses différentes branches.

Au vu de la conclusion qui précède, il n’y a pas lieu de saisir la Cour constitutionnelle, une décision sur la question soulevée par la société demanderesse n’étant pas nécessaire au tribunal pour rendre son jugement.

3.2.2. Quant aux critiques visant le droit de préemption découlant du règlement grand-ducal du 10 février 2021 Moyens et arguments des parties Après avoir relevé que le droit de préemption prévu par le PSL serait formulé à l’article 8 du règlement grand-ducal du 10 février 2021 et que la base légale du droit de préemption, tel qu’envisagé par le PSL, se trouverait à l’article 25 de la loi du 17 avril 2018, la société demanderesse critique le fait qu’en l’espèce, la loi aurait abandonné au règlement grand-ducal le soin de définir l’assiette du droit de préemption et ce, alors même qu’en compromettant plus particulièrement l’abusus, le droit de préemption porterait clairement atteinte au droit de propriété qui relèverait d’une matière réservée par la Constitution à la loi. Comme l’article 25 de la loi du 17 avril 2018 toucherait dès lors à une matière réservée à la loi, les mesures d’exécution qui seraient à prendre dans cette matière trouveraient leur base dans l’article 32 (3) de la Constitution lequel serait issu de la révision constitutionnelle résultant de la loi du 19 novembre 2004.

Elle insiste sur le fait que les matières réservées par la Constitution à la loi ne pourraient pas faire l’objet d’une exécution générale par voie de règlement grand-ducal et que dans ces mêmes matières, les habilitations générales seraient prohibées conformément à une jurisprudence bien constante de la Cour constitutionnelle, constat qui resterait pleinement valable aussi après la dernière modification de l’article 32 (3) de la Constitution par la loi du 18 octobre 2016.

En l’espèce, « la controverse » concernerait la question de savoir jusqu’où la loi devrait aller dans le détail « avant de passer le relais au règlement ».

La société demanderesse estime que malgré la modification constitutionnelle opérée par la loi du 18 octobre 2016, l’exigence posée de façon constante par la Cour constitutionnelle, à savoir que « l’essentiel du cadrage normatif doit résulter de la loi, y compris les fins, les conditions et les modalités suivant lesquelles les éléments moins essentiels peuvent être réglés par des règlements », continuerait à s’appliquer.

En l’espèce, il faudrait se poser concrètement la question de savoir si l’identification des parcelles auxquelles s’applique le droit de préemption prévu par l’article 25 de la loi du 17 avril 2018 ne faisait pas partie du cadrage normatif essentiel devant obligatoirement être réglé par le législateur ou bien s’il constituait un simple « élément moins essentiel ».

Pour sa part, la société demanderesse est d’avis que l’identification de l’assiette sur laquelle porte le droit de préemption ferait précisément partie du cadrage normatif essentiel relevant, dans les matières réservées à la loi, de la seule compétence du législateur, de sorte qu’il ne serait pas possible pour le règlement grand-ducal du 10 février 2021 d’identifier les parcelles auxquelles s’applique le droit de préemption litigieux et qu’en conséquence, ledit règlement grand-ducal serait à déclarer illégal.

A titre subsidiaire et même à admettre qu’un règlement grand-ducal puisse légalement définir l’assiette du droit de préemption, la société demanderesse est d’avis qu’il y aurait, en l’espèce, une disproportion entre la superficie de l’objet de la préemption, à savoir la totalité des parcelles frappées d’une ZPH, et la superficie nécessaire pour la réalisation des LACM avancés pour justifier la préemption, de sorte que le droit de préemption serait illégal en raison de son caractère disproportionné.

Après avoir relevé que la Cour administrative aurait récemment rappelé que le principe de proportionnalité devrait être considéré, en toute matière, comme étant un principe essentiel en ce qu’il tend vers l’équilibre nécessaire entre les moyens à mettre en œuvre et le but à atteindre dans un contexte précis donné, la société demanderesse conclut qu’en raison de son caractère manifestement disproportionné, le droit de préemption devrait être déclaré illégal.

Dans son mémoire en réplique, la société demanderesse réitère tout d’abord que le droit de préemption emporterait une limitation du droit du propriétaire de disposer librement de sa chose, tout en précisant que ce principe serait systématiquement rappelé par le Conseil d’Etat et ce, notamment dans son avis complémentaire du 17 juillet 2015 émis dans le cadre de l’élaboration de la loi dite « Omnibus ».

Elle ajoute que cette analyse serait confirmée par les auteurs français qui mettraient en exergue, au sujet du droit de préemption urbain, que « la liberté de l’abusus se trouve compromise, en droit de l’urbanisme (mais aussi en droit rural), par la multiplication des droits de préemption de la puissance publique » et suivant lesquels, encore que la préemption ne serait pas une expropriation, elle constituerait néanmoins indubitablement « une restriction du droit de propriété en ce qu’elle en affecte l'une des composantes (abusus) ».

La société demanderesse relève ensuite qu’une analyse des avis exprimés par le Conseil d’Etat au sujet de différents projets de loi et de règlements grand-ducaux ferait apparaître que celui-ci ne semblerait pas estimer que le droit de propriété ne relève pas d’une matière réservée à la loi.

Comme le droit de préemption affecterait dès lors de façon substantielle l'exercice du droit de propriété et comme le droit de propriété relèverait d’une matière réservée à la loi, la société demanderesse maintient qu’il appartiendrait au seul législateur d’identifier l’assiette sur laquelle porte ce droit de préemption, tout en renvoyant pour le surplus à ses développements antérieurs.

Enfin, la société demanderesse réitère sa position quant au caractère disproportionné du droit de préemption, tout en insistant sur le fait que même à supposer que le taux de 30% à réserver à la réalisation de LACM, tel que critiqué par elle, était à considérer comme étant conforme aux articles 16 et 10bis de la Constitution, il n’en resterait pas moins que le droit de préemption recouvrant l’intégralité d’une parcelle frappée d’une ZPH serait déséquilibré par rapport au but à atteindre, à savoir la réalisation de LACM à concurrence de 30% de la surface construite brute destinée au logement.

Analyse du tribunal Aux termes de l’article 8 du règlement grand-ducal du 10 février 2021 : « Un droit de préemption suivant l’article 25 de la loi du 17 avril 2018 concernant l’aménagement du territoire est conféré à l’Etat et aux communes territorialement concernées pour l’acquisition des terrains ou ensembles de terrains regroupés tels qu’indiqués dans l’annexe 3. ».

La base légale du droit de préemption, tel qu’envisagé par le règlement grand-ducal du 10 février 2021, se trouve à l’article 25 de la loi du 17 avril 2018 qui dispose comme suit :

« (1) Le règlement grand-ducal rendant obligatoire un plan directeur sectoriel ou un plan d'occupation du sol peut conférer un droit de préemption au profit de l'État, des syndicats de communes en charge de la gestion d'une zone découlant d'un plan directeur sectoriel et des communes, ci-après désignés « les pouvoirs préemptant », en vue de la réalisation des objectifs de l'article 1er, paragraphes 2 et 3.

La partie écrite et la partie graphique des plans en question doivent indiquer dans une zone définie à l'échelle cadastrale, les terrains ou ensembles de terrains regroupés auxquels s'applique le droit de préemption.

(2) Le droit de préemption s’applique à toute aliénation à titre onéreux, en ce compris tout apport en société, des biens visés au paragraphe précédent. Est assimilée à l’aliénation d’un bien susvisé toute convention à titre onéreux opérant une mise à disposition et un transfert de propriété différé. […] ».

Il se dégage de la disposition légale en question que le législateur a délégué au pouvoir réglementaire la compétence pour désigner les terrains ou ensembles de terrains regroupés auxquels s’applique le droit de préemption.

De l’entendement du tribunal, la société demanderesse critique le fait que l’identification des parcelles précises sur lesquelles le droit de préemption s’applique est entièrement laissée à l’appréciation du pouvoir réglementaire au motif que, selon elle, cette façon de faire serait contraire à l’article 32 (3) de la Constitution en vertu duquel « Dans les matières réservées à la loi par la Constitution, le Grand-Duc ne peut prendre des règlements et arrêtés qu’aux fins, dans les conditions et suivant les modalités spécifiées par la loi. ». En effet, comme le droit de préemption porterait atteinte au droit de propriété, consacré à l’article 16 de la Constitution, lequel relèverait d’une matière réservée à la loi, l’identification des parcelles auxquelles il s’applique, en ce qu’elle ferait partie du cadrage normatif essentiel, ne pourrait elle-aussi se faire qu’à travers la loi et non pas par voie de règlement grand-ducal, ce qui serait toutefois le cas en l’espèce.

Aux termes de l’article 16 de la Constitution : « Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et moyennant juste indemnité, dans les cas et de la manière établis par la loi. ». Ledit article se limite, par conséquent, à protéger le droit de propriété. Il n’érige toutefois pas par principe la réglementation du droit de propriété en matière réservée à la loi par la Constitution, mais se limite à interdire l’expropriation autrement que pour cause d’utilité publique, moyennant juste indemnité et dans les cas et de la manière établis par la loi, de sorte que seule l’expropriation, respectivement une atteinte au droit de propriété équivalent à une expropriation7, constitue une matière réservée à la loi, étant précisé, dans ce contexte, qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour constitutionnelle qu’un changement dans les attributs de la propriété qui est à tel point essentiel qu’il prive le propriétaire de ses aspects essentiels peut constituer une expropriation8. Le tribunal relève, à cet égard, que la société demanderesse n’allègue pas que le droit de préemption emporterait une privation du droit de propriété, mais elle critique uniquement le fait que le droit de préemption emporterait une limitation du droit du propriétaire concerné de disposer librement de sa chose, tout en restant cependant en défaut d’expliquer concrètement dans quelle mesure l’exercice du droit de préemption est de nature à entraver les attributs de la propriété d’une manière telle que la limitation opérée puisse être qualifiée d’équivalente à une expropriation.

Comme le moyen sous analyse est fondé sur la prémisse erronée que le droit de propriété relèverait par principe d’une matière réservée à la loi et que de ce fait l’identification des parcelles précises auxquelles s’applique le droit de préemption devrait elle-aussi être réglée par le législateur, il est à rejeter pour ne pas être fondé.

A titre subsidiaire, la société demanderesse critique encore le fait que le droit de préemption, tel que découlant de l’article 25 de loi du 17 avril 2018 et de l’article 8 du règlement grand-ducal du 10 février 2021, aurait un caractère manifestement disproportionné ce qui le rendrait illégal.

Le tribunal relève, à cet égard, que la société demanderesse se borne à soutenir que ce qui serait disproportionné serait le fait de soumettre 100% de la surface d’une ZPH au droit de préemption, alors que seuls 30% d’une telle zone seraient soumis à l’obligation d’y réaliser des LACM, respectivement à partir du 18 février 2022, d’y réaliser des logements abordables.

Or, si certes la Cour administrative a rappelé dans un arrêt du 6 mai 2021, inscrit sous le numéro 44748C du rôle, que le principe de proportionnalité doit être considéré, en toute matière, comme étant un principe essentiel en ce qu’il tend vers l’équilibre nécessaire entre les moyens à mettre en œuvre et le but à atteindre dans un contexte précis et si la Cour constitutionnelle a décidé dans un arrêt du 22 janvier 2021, inscrit sous le numéro … du registre, que le principe de proportionnalité est à regarder comme un principe à essence constitutionnelle, il n’en reste pas moins que la société demanderesse reste en défaut d’expliquer en quoi le droit de préemption découlant de l’article 25 de la loi du 17 avril 2018 7 En ce sens : Cour adm., 13 juillet 2017, n° 39294C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Lois et règlements, n° 37.

8 Cour const., 26 septembre 2008, n° 00046 du registre et Cour const., 4 octobre 2013, numéro … du registre et de l’article 8 du règlement grand-ducal attaqué, contrevient concrètement au principe de proportionnalité.

Il se dégage, à cet égard, des développements non autrement énervés de la partie étatique que le fait que seuls 30% de la surface construite brute d’un PAP NQ destinée au logement sont soumis à un régime rendant obligatoire la réalisation de LACM, respectivement, pour les PAP NQ élaborés à partir du 18 février 2022, de logements abordables, s’explique par la volonté d’assurer dans le chef des promoteurs le respect d’une marge bénéficiaire raisonnable, ceux-ci restant, de cette manière, en effet, libres de vendre ou de louer la surface restante au prix déterminé par les lois du marché, sans limitation tenant à l’intérêt général. Or, une telle considération tenant à assurer une marge bénéficiaire suffisante en modérant l’étendue des surfaces concernées par l’obligation de réaliser des LACM respectivement des logements abordables ne jouerait pas en ce qui concerne le droit de préemption puisque celui-ci est exercé, conformément à l’article 25, paragraphe (9) de la loi du 17 avril 2018, « aux prix et conditions mentionnés dans le dossier de notification », donc au prix même qui a été librement convenu entre le vendeur et l’acquéreur dans leur contrat, respectivement à défaut de prix, à la valeur conventionnelle de la contre-prestation stipulée à charge de l’acquéreur.

Au vu des considérations qui précèdent, il n’apparaît pas que l’exercice du droit de préemption, tel que découlant de l’article 25 de la loi du 17 avril 2018 et de l’article 8 du règlement grand-ducal du 10 février 2021 et dont il vient d’être retenu ci-avant qu’il n’est pas établi que son incidence sur la propriété privée est telle qu’elle puisse être qualifiée d’équivalente à une expropriation, serait disproportionné par rapport au but d’intérêt général recherché qui est de permettre aux pouvoirs publics d’exercer, en cas de besoin, leur droit de préemption sur tous les terrains situés dans une ZPH, donc une zone réservée pour la réalisation de projets destinés à titre principal aux habitations, afin d’acheter des terrains fonciers en vue de la création de nouveaux logements, partiellement ou entièrement réalisés par des promoteurs publics9, le tout dans l’optique d’agrandir si nécessaire le parc locatif public dans l’intérêt du logement abordable.

Le moyen afférent est dès lors également à rejeter pour ne pas être fondé.

A défaut d’autres moyens, le recours sous analyse est à rejeter.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le dit non justifié et en déboute ;

met les frais et dépens à charge de la partie demanderesse.

9 Plan directeur sectoriel « logement », exposé des motifs, page 6, sous « Zones prioritaires d’habitation ».

Ainsi jugé par :

Françoise Eberhard, premier vice-président, Alexandra Castegnaro, vice-président, Alexandra Bochet, premier juge, et lu à l’audience publique du 15 juin 2023 par le premier vice-président, en présence du greffier Lejila Adrovic.

s.Lejila Adrovic s.Françoise Eberhard Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 15 juin 2023 Le greffier du tribunal administratif 23


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 46046
Date de la décision : 15/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-06-15;46046 ?

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