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26/05/2023 | LUXEMBOURG | N°44088

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 26 mai 2023, 44088


Tribunal administratif N° 44088 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI: LU:TADM:2023:44088 4e chambre Inscrit le 31 janvier 2020 Audience publique du 26 mai 2023 Recours formé par Monsieur …, …, contre deux décisions de la Commission de Surveillance du Secteur Financier en matière de résiliation de stage

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 44088 du rôle et déposée le 31 janvier 2020 au greffe du tribunal administratif par Maître Virginie Brouns, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, de

meurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annu...

Tribunal administratif N° 44088 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI: LU:TADM:2023:44088 4e chambre Inscrit le 31 janvier 2020 Audience publique du 26 mai 2023 Recours formé par Monsieur …, …, contre deux décisions de la Commission de Surveillance du Secteur Financier en matière de résiliation de stage

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 44088 du rôle et déposée le 31 janvier 2020 au greffe du tribunal administratif par Maître Virginie Brouns, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision de la Commission de Surveillance du Secteur financier, établissement public, du 31 octobre 2019 portant résiliation de son stage, ainsi que de la décision confirmative rendue sur recours gracieux en date du 19 décembre 2019 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Tom Nilles, demeurant à Esch-sur-Alzette, du 7 février 2020, portant signification de la requête introductive d’instance à la Commission de Surveillance du Secteur Financier, établissement public, inscrit au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro J26, représentée par ses directeurs actuellement en fonctions, établie et ayant son siège à L-1150 Luxembourg, 283, route d’Arlon ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 8 juillet 2020 par Maître Albert Rodesch, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom et pour le compte de la Commission de surveillance du secteur financier, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 7 octobre 2020 par Maître Virginie Brouns au nom et pour le compte de Monsieur … ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 29 octobre 2020 par Maître Albert Rodesch au nom et pour le compte de la Commission de surveillance du secteur financier, préqualifiée ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Vu l’article 1er de la loi du 19 décembre 2020 portant adaptation temporaire de certaines modalités procédurales en matière civile et commerciale1 ;

1 « Les affaires pendantes devant les juridictions administratives, soumises aux règles de la procédure écrite et en état d’être jugées, pourront être prises en délibéré sans comparution des mandataires avec l’accord de ces derniers. ».

Vu les communications respectives de Maître Virginie Brouns et de Maître Albert Rodesch du 13 novembre 2021 suivant lesquelles ils marquent leur accord à ce que l’affaire soit prise en délibéré sans leur présence ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport à l’audience publique du 16 novembre 2021, les parties étant excusées.

Monsieur … entra, en tant qu’employé de l’Etat, au service de la Commission de Surveillance du Secteur financier, ci-après désignée par la « CSSF », en date du 1er mai 2018 au sein du service … et y occupa un poste … dans la catégorie d'indemnité D.

Sur base des résultats obtenus à son examen, la CSSF admit Monsieur … au stage … à la CSSF, dans la carrière de fonctionnaire d'État, à partir du 1er novembre 2018, tout en le faisant bénéficier d'une décision de réduction du stage de la part de la direction de la CSSF prise en date du 4 décembre 2018.

Suite à une réunion du 8 octobre 2019 entre Monsieur … et ses supérieurs hiérarchiques, la CSSF lui envoya le 11 octobre 2019 un courrier de la teneur suivante :

« (…) Par la présente, la direction de la CSSF se réfère à votre occupation professionnelle à la CSSF depuis votre engagement à partir du 1er mai 2018. La direction de la CSSF estime que vos agissements dans le cadre de la rédaction de vos deux travaux pratiques intitulés respectivement « … » et « … », lesquels vous ont été attribués au mois d'août 2019 et que vous avez rendu fin septembre 2019, sans préjudice quant aux dates exactes (ci-après les « Travaux Pratiques») sont inacceptables, de sorte qu'elle a l'intention de résilier votre stage, conformément à l'article 2, paragraphe 3, alinéa 5 de la Loi du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat (ci-après « Loi sur le statut ») et aux NDS CSSF 18/445, 19/471 et 19/482 concernant l'organisation des stages auprès de la CSSF prise en exécution de l'article 14, paragraphe 3 de la Loi du 23 décembre 1998 portant création d'une commission de surveillance du secteur financier.

La conséquence de cette résiliation serait une cessation immédiate et définitive de votre occupation professionnelle à la CSSF.

* * * Concernant votre carrière à la CSSF, vous avez été engagé le 1er mai 2018 suite à une annonce visant le recrutement d'un « … » et vous êtes affecté au service « … », ci-après « … », sous la hiérarchie de Monsieur …, chef de service. Vos missions ont principalement trait, sans que cette liste ne soit exhaustive, à la distribution du courrier interne (entre les deux bâtiments), à la gestion de la distribution du matériel du bureau, aux interventions et dépannages techniques de base selon les demandes du Helpdesk, à la préparation et gestion des commandes et à la réception de la marchandise des fournisseurs.

* * * Vous avez été engagé comme employé de l'Etat et votre contrat prévoyait une période d’essai de 3 mois. Suite à la réussite de l'examen d'entrée au stage du groupe de traitement D2, la direction a décidé le 17 octobre 2018 sur base des résultats obtenus à l'examen de vous admettre au stage … à la CSSF à partir du 1er novembre 2018. Cette admission a lieu pour un an suivant la décision d'une réduction de stage prise par la direction le 4 décembre 2018, conformément à la NDS CSSF 18/445 susmentionnée.

Dans ce contexte, la direction de la CSSF tient à rappeler que la finalité première du stage ainsi que de la période d'essai de l'employé est de permettre, outre l'intégration administrative et sociale de l'agent dans sa nouvelle administration, une évaluation de celui-ci destinée à vérifier ses compétences et aptitudes à l'emploi, s'agissant en quelque sorte d'une période d'épreuve. Le choix par la direction de la CSSF de ses agents tient non seulement compte des aspects techniques et objectifs de l'exercice de l'activité professionnelle, mais également d'un élément d'intuitu personae, qui se traduit notamment dans les capacités d'intégration sociales et humaines de l'agent dans le service auquel il est affecté. Le stage permet également à la direction de la CSSF de vérifier et d'établir la relation de confiance nécessaire avec un agent. Ainsi, la confiance, l'honnêteté et la loyauté sont évidemment des éléments essentiels de l'intuitu personae.

Conformément à l'article 2, paragraphe 3, alinéa 5 de la loi du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat, telle qu'elle a été modifiée : « Le stage est résiliable. La résiliation du stage est prononcée soit pour motifs graves, soit lorsque le stagiaire s'est vu attribuer une appréciation professionnelle insuffisante par application des dispositions de l'article 4bis. Sauf dans le cas d'une résiliation pour motifs graves, le stagiaire a droit à un préavis d'un mois à compter du premier jour du mois qui suit celui de la constatation de l'insuffisance professionnelle. ».

* * * Les faits qui vous sont reprochés et qui sont susceptibles de fonder la résiliation de votre stage, concernent le plagiat d'une partie de vos Travaux Pratiques à partir de plusieurs sources externes de sites interne mais surtout, en sus, la confiance rompue qui doit exister entre les agents en poste et la direction de la CSSF.

Vos supérieurs hiérarchiques ont en effet dû constater, dans le cadre de l'appréciation de vos Travaux Pratiques qu'une grande partie des deux Travaux Pratiques ont été copiés de sites internet (par exemple le site de …) sans en citer la source et l'origine. A titre d'exemple, il est à noter que dans le travail pratique intitulé « … », 6 pages sur 22 ont été entièrement reprises stricto sensu du site internet précité. Quant à l'autre travail pratique, intitulé « … », 2 pages entières des 25 remises ont été intégralement recopiées du site internet de la société ….

Il est à noter que le fait de plagier une partie de vos Travaux Pratiques constitue un fait inadmissible pour la CSSF et est de nature à ébranler la confiance de la CSSF en vous, en votre sincérité et en votre bonne foi. En effet, vous vous êtes illégitimement et délibérément accaparé le travail d'auteurs sans les citer et/ou sans indiquer la source dans le corps de votre texte.

Il est à préciser, de plus, que la NDS 19/482 dispose en son point 2.3 (« Travaux pratiques ») que « Pour éviter des plagiats et afin de faciliter une prise de conscience, il est demandé aux stagiaires d'insérer en début de chaque travail pratique le texte suivant : "Je certifie sur l'honneur que le présent travail pratique est le fruit d'un travail personnel et que toute référence directe ou indirecte aux travaux de tiers est expressément indiquée. Tout texte cité ou copié est mis entre guillemets avec indication de la source. Je demeure seul(e) responsable des analyses et opinions exprimées dans ce document." Cette mention particulière figure dans la NDS qui est applicable à votre groupe de traitement, tel que susmentionnée, et vise à attirer l'attention des stagiaires sur l'importance de la réflexion personnelle dans le cadre des travaux réalisés au cours du stage mais également insiste sur l'interdiction formelle, respectivement la conscientisation et responsabilisation des stagiaires. Il échet de constater que vous avez failli à l'obligation qui incombe aux stagiaires dans la rédaction de leurs travaux pratiques et que cette mention ne figure dans aucun de vos Travaux Pratiques.

De même, et en sus de ce qui précède, il est à noter, qu'en date du 8 octobre 2019, votre chef de service, Monsieur …, ainsi que Messieurs … et … ont souhaité vous rencontrer afin de discuter de ces Travaux Pratiques.

A 9.15, à la date précitée, une réunion a ainsi eu lieu, en votre présence et celle des trois agents susmentionnés (ci-après la « Réunion »). Lors de cette réunion, Monsieur … vous a posé les trois questions, reprises ci-dessous :

 « as-tu fait les TP seul ? » (1),  « tout vient de toi ? » (2),  « tu n’as rien copié ? » (3).

Vous avez apporté les réponses suivantes (1) OUI, (2) OUI, (3) NON.

Suite aux réponses obtenues, Monsieur … a ponctué et clôturé le questionnement en donnant la parole à Monsieur … afin de citer la note de service qui vise le plagiat. C'est alors que vous êtes revenu sur vos propos, avançant alors que si par "copié", Monsieur … entendait copier sur un collègue, la réponse était non mais s'il s'agissait de copier d'internet alors oui, vous aviez bien utilisé internet.

La suite de la discussion a été faite de nombreux aller-retour et d'adaptations de votre discours.

Il est à noter que l'opportunité vous a été laissée, à trois reprises, lors de la Réunion de faire amende honorable, d'avouer avoir recopié intégralement des pages internet pour la rédaction de vos Travaux Pratiques. Il est également à noter que vous n'avez saisi aucune de ces opportunités.

La direction tend à considérer que de tels comportements, à savoir plagiat et non reconnaissance de celui-ci par l'agent concernée, dans une épreuve officielle du stage, sont totalement inacceptables et doivent être qualifiés de manquements graves. Ces comportements non professionnels et de mauvaise foi sont de nature à rompre le lien de confiance de manière totale, définitive et immédiate.

Ces comportements sont également en violation avec l'article 10 de la Loi sur le statut disposant que « Le fonctionnaire doit, dans l'exercice comme en dehors de l'exercice de ses fonctions, éviter tout ce qui pourrait porter atteinte à la dignité de ces fonctions ou à sa capacité de les exercer, donner lieu à scandale ou compromettre les intérêts du service public ».

* * * Nous devons constater qu'il découle de tous ces faits que la relation de confiance nécessaire de la direction en votre personne et en votre travail est totalement, irrémédiablement et immédiatement rompue. Partant, la direction tend à considérer qu'il est définitivement impossible de maintenir une relation de travail pour l'avenir avec vous.

Partant, elle a l'intention de procéder à la résiliation de votre stage pour motifs graves conformément à l'article 2, paragraphe 3, alinéa 5 et à l'article 10.1 de la Loi sur le statut et aux NDS CSSF 18/445, 19/471 et 19/482 susmentionnées.

Avant toute décision définitive relative à la résiliation de votre stage, la direction vous invite à un entretien préalable qui aura lieu le 21 octobre 2019 à 9.00 heures dans la salle de réunion D'Blees au RDC du bâtiment Moonlight. Lors de cet entretien, vous avez la possibilité de vous faire assister par un membre du personnel de la CSSF. La CSSF sera représentée lors de cet entretien par Monsieur …, directeur, Monsieur …, chef du service … et Madame …. Un représentant de la délégation du personnel sera présent.

La direction de la CSSF vous informe qu'elle vous dispense temporairement de vos fonctions avec effet à ce jour, jusqu'à ce qu'elle a pris sa décision définitive.

Conformément au Règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l'Etat et des communes, la CSSF vous invite à soumettre vos observations écrites pour le 23 octobre 2019 à midi au plus tard. (…) ».

Monsieur … prit position par rapport au courrier précité du 11 octobre 2019 par un courrier du 17 octobre 2019, ainsi que, suite à son entretien préalable du 21 octobre 2019, par un courrier du 22 octobre 2019.

En date du 31 octobre 2019, la CSSF envoya à Monsieur … la décision de la teneur suivante :

« (…) Nous faisons référence à notre lettre du 11 octobre 2019 (réf. …) (« Notre Lettre»), ainsi qu'a :

- votre lettre recommandée avec accusé de réception du 16 octobre 2019, entrée à la CSSF le 18 octobre 2019 (ci-après « Votre Lettre »), - l'entretien préalable qui a eu lieu, le 21 octobre 2019, en salle D'Blees au RDC du bâtiment Moonlight à 9h00, en votre présence mais également celle de Messieurs …, …, …, … et de Madame … (ci-après l'« Entretien »), et - votre prise de position par lettre recommandée du 22 octobre 2019 (ci-après « Votre Deuxième Lettre » - Votre Lettre et Votre Deuxième Lettre prises ensemble « Vos Lettres »).

* * * La direction de la CSSF tient tout d'abord à rappeler que la finalité première du stage est de permettre, outre l'intégration administrative et sociale de l'agent dans sa nouvelle administration, une évaluation de l'agent destinée à vérifier ses compétences et son aptitude à l'emploi, s'agissant en quelque sorte d'une période d'épreuve. Le choix par la direction de la CSSF de ses agents tient non seulement compte des aspects techniques et objectifs de l'exercice de l'activité professionnelle, mais également d'un élément d'intuitu personae, qui se traduit notamment dans les capacités d'intégration sociales et humaines de l'agent dans le service auquel il est affecté. Le stage permet donc à la direction de vérifier et d'établir la relation de confiance nécessaire avec un agent.

Ainsi, malgré les observations formulées par oral, par vos soins, lors de l'Entretien, ainsi que par écrit dans Vos Lettres, la direction persiste à considérer qu'il existe un problème au niveau de la fiabilité et du sérieux de la relation de travail et notamment de la confiance qu'elle peut vous porter en tant qu'agent en poste en son sein.

* * * Nous constatons que, de manière générale, vous n'avez pas apporté d'éléments pertinents, convaincants et nouveaux lors de l'Entretien ou dans Vos Lettres pour reconsidérer notre appréciation des faits et les griefs formulés à votre encontre.

En effet, s'il vous est reproché de ne pas vous être conformé à la NDS 19/482 et notamment à son point 2.3 « Travaux pratiques », il vous est surtout reproché de ne pas avoir été transparent et honnête lors de la réunion qui a eu lieu le 8 octobre 2019 en présence de votre chef de service, Monsieur …, ainsi que Messieurs … et …. La direction tient à souligner, à nouveau ici, que l'opportunité vous a été laissée de faire amende honorable, au travers de trois questions ouvertes, lors de la réunion susmentionnée, opportunité que vous n'avez pas saisie. La direction constate que vous n'apportez aucun élément de réponse ni explication sur ce point.

Partant, la direction retient que les observations orales et écrites formulées par vos soins ne sont pas de nature à l'amener à une appréciation différente des faits. De même, la direction reste d'avis que la relation de confiance nécessaire en votre personne et en votre travail est totalement et irrémédiablement rompue.

Il s'ensuit donc, au vu des éléments repris dans Notre Lettre, que votre intégration professionnelle, administrative et sociale est insuffisante.

* * * Partant, compte tenu de tous ces éléments, la direction a pris la décision de procéder à la résiliation de votre stage pour faute grave.

La direction vous informe ainsi que votre relation de travail avec la CSSF prend fin ce jour avec effet immédiat.. (…) ».

Par courrier électronique de son litismandataire du 21 novembre 2019, Monsieur … fit introduire un recours gracieux à l’encontre de la décision précitée du 31 octobre 2010, recours qui fut toutefois rejeté par une décision de la CSSF du 19 décembre 2019, confirmant la décision précitée du 31 octobre 2019.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 31 janvier 2020, Monsieur … a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision précitée du 31 octobre 2019 de la CSSF ainsi que de la décision confirmative du 19 décembre 2019.

Il est constant en cause pour ressortir des déclarations concordantes des parties que Monsieur … suite à son engagement par la CSSF en tant qu’employé de l’Etat avec effet au 1er mai 2018 pour un poste …, fut admis au stage … à partir du 1er novembre 2018, de sorte à être entré dans la carrière d’agent assimilé au fonctionnaire d’Etat, et à être soumis, à partir de cette date, aux lois et règlements « (…) régissant les fonctionnaires de l’Etat, sous réserve des dispositions de la [loi modifiée du 23 décembre 1998 portant création d’une commission de surveillance du secteur financier, ci-après désignée par « la loi du 23 décembre 1998 »] », conformément à l’article 13, paragraphe (1) de ladite loi.

Aucune disposition légale ne conférant compétence à la juridiction administrative pour statuer comme juge du fond en la présente matière, le tribunal est incompétent pour connaître de la demande principale en réformation introduite à l’encontre des décisions déférées des 31 octobre et 19 décembre 2019. Partant, seul un recours en annulation a pu être introduit contre les décisions de la CSSF, lequel est encore recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Cette conclusion n’est pas remise en cause par le moyen d’irrecevabilité soulevé par la CSSF, dans son mémoire en réponse, selon lequel le recours en annulation serait irrecevable au motif que l’article 10 de la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l'État prévoirait un recours en réformation, étant donné que ledit article n’est pas applicable en l’espèce, alors que, tel que retenu ci-avant, Monsieur …, bien qu’initialement engagé en tant qu’employé de l’Etat, devait être considéré comme agent assimilé au fonctionnaire d'État en stage, à partir du 1er novembre 2018.

Par ailleurs, la circonstance que la CSSF, dans son mémoire en réponse, se rapporte à prudence de justice quant à la recevabilité en la forme du recours, reste sans incidence en l’espèce, étant précisé que s’il est exact que le fait, pour une partie, de se rapporter à prudence de justice équivaut à une contestation, il n’en reste pas moins qu’une contestation non autrement étayée est à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au juge administratif de suppléer la carence des parties au litige et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions.

Dès lors, étant donné que la CSSF est restée en défaut de préciser dans quelle mesure la forme pour introduire le recours litigieux n’aurait pas été respectée en l’espèce, le moyen d’irrecevabilité afférent encourt le rejet, étant relevé que le tribunal n’entrevoit pas non plus de cause d’irrecevabilité d’ordre public qui serait à soulever d’office.

A l’appui de son recours, Monsieur … expose, tout d’abord, les faits et rétroactes à la base du litige sous examen, en précisant avoir été engagé en date du 1er mai 2018 auprès de la CSSF en qualité … et, après avoir réussi ses examens, être entré en stage en date du 1er novembre 2018, stage étant prévue pour une durée d’une année, alors qu’il aurait bénéficié d'une réduction de stage. Il fait encore valoir avoir été stagiaire fonctionnaire au sein du service « … » avec comme missions principales la distribution de courrier interne, la gestion de la distribution du matériel de bureau, les interventions et dépannages techniques de base selon les demandes du Helpdesk, la préparation et la gestion des commandes, ainsi que la réception de la marchandise des fournisseurs.

Dans le cadre de ce stage, ses supérieurs hiérarchiques lui auraient reproché d’avoir repris, sans en citer les sources, des passages d’internet pour les intégrer dans ses deux travaux pratiques à rendre lors de son stage. Suite à une réunion du 8 octobre 2019, dans le cadre de laquelle Monsieur … se serait vu poser des questions quant à la réalisation de ses deux travaux pratiques, la CSSF l’aurait informé, par courrier recommandé du 11 octobre 2019, de son intention de procéder à la résiliation de son stage pour motifs graves, tout en l’invitant à un entretien préalable avant qu'une décision définitive ne soit prise.

Après avoir pris position, par courrier recommandé du 16 décembre 2019, par rapport aux reproches lui adressés, Monsieur … aurait été entendu dans ses explications lors d’une réunion du 21 octobre 2019, suite à laquelle il adressa, par courrier du 22 octobre 2019, sa prise de position écrite à la CSSF, laquelle procéda néanmoins, par courrier recommandé du 31 octobre 2019, à la résiliation de son stage pour faute grave.

Suite à un courrier électronique du 21 novembre 2019 de la part de son litismandataire, véhiculant un recours gracieux à l’encontre de la décision de résiliation de la CSSF du 31 octobre 2019, et suite à une réunion dans les locaux de la CSSF en date du 3 décembre 2019, la CSSF aurait confirmé, par décision du 19 décembre 2019, sa décision antérieure du 31 octobre 2019.

Monsieur … conteste tant les termes que la portée des prédites décisions de la CSSF, alors qu’il aurait été en poste depuis plus d'une année au moment des décisions litigieuses et aurait toujours jusqu'alors effectué ses tâches à la pleine satisfaction de ses supérieurs hiérarchiques. Il fait encore valoir que la sanction lui infligée aurait été inappropriée et disproportionnée par rapport aux circonstances de l’espèce, tout en relevant que les décisions déférées n’expliciteraient pas suffisamment les reproches lui adressés, alors qu’elles feraient uniquement référence à des écrits, de sorte à ne pas lui avoir permis de connaître précisément les motifs à la base desdites décisions justifiant la gravité de la sanction retenue à son encontre.

Dans son mémoire en réplique, le demandeur insiste encore sur la circonstance que la réduction de la durée de son stage serait due au fait que la CSSF aurait été satisfaite de l’exercice de son travail.

Monsieur … précise encore qu’il ne contesterait pas que la note de service 19/482 de la CSSF, ci-après désignée par « la note de service », portant sur la rédaction de travaux pratiques et l’indication de sources, lui aurait été adressée par la voie d’un courrier électronique, respectivement qu’il l’aurait effectivement reçu, tout en maintenant sa position qu’il n’aurait pas eu connaissance du contenu de ladite note de service au moment de la rédaction des deux travaux pratiques litigieux, ignorance expliquant ses défauts de citations de sources, ainsi que ses questions posées et réponses données lors de la réunion du 8 octobre 2019 avec ses supérieurs hiérarchiques.

Dans ce contexte, il relève l’ambiguïté des questions lui posées lors de la prédite réunion et sa mauvaise compréhension desdites questions, tout en contestant tout manque d’honnêteté et de transparence, alors qu’il aurait, une fois saisi le véritable sens des questions lui posées, toujours admis avoir repris certains passages de ses travaux pratiques de sites internet et ne pas avoir intentionnellement commis du plagiat.

Par ailleurs, le demandeur fait valoir, sur base de l’attestation testimoniale d’un de ses supérieurs hiérarchiques, que le problème de reprendre certains passages à partir de sites internet afin de les intégrer dans des travaux pratiques serait récurrent, dans la mesure où plusieurs de ses collègues auraient interrogé l’auteur de l’attestation sur l’admissibilité d’une telle pratique, ce qui démontrerait, selon Monsieur …, les problèmes de compréhension y relatifs, malgré l’émission de la note de service.

Il réfute encore la pertinence des affirmations de la CSSF selon lesquelles son travail n’aurait pas toujours donné entière satisfaction à cette dernière, en relevant qu’un tel reproche, d’une part, n’aurait pas été mis en avant dans les décisions déférées, et, d’autre part, serait en contradiction avec la circonstance qu’il se serait vu accorder une réduction de son stage d’une année. Il conteste, dans ce cadre, l’admissibilité des attestations testimoniales versées par la CSSF dans le cadre du présent litige, respectivement sollicite que lesdites attestations soient considérées avec la plus grande circonspection, au regard de leur contenu similaire, circonstance qui permettrait d’émettre des doutes quant à la spontanéité et quant à l’absence de concertation des auteurs desdites attestations.

A titre liminaire, il y a lieu de rappeler que le tribunal n’est pas tenu par l’ordre des moyens, tel que présenté par le demandeur, mais détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et l’effet utile s’en dégageant, de sorte que le tribunal toisera, tout d’abord, les moyens d’illégalité externes avant d’analyser le fond.

En droit, le demandeur se rapporte, tout d’abord, à prudence de justice quant à la compétence de l’auteur des décisions déférées de prendre de tels actes.

La CSSF n’a pas pris position par rapport à ce moyen dans ses mémoires en réponse et en duplique.

Le tribunal relève que c’est de prime abord à tort que le demandeur conteste, par le fait de s’être rapporté à prudence de justice, la compétence de la direction de la CSSF de pouvoir procéder à la résiliation de son stage.

Ainsi, en vertu de l’article 13, paragraphe (1) de la loi du 23 décembre 1998, le personnel de la CSSF faisant l’objet d’une assimilation aux fonctionnaires de l’Etat, tel que cela fut le cas du demandeur, est soumis aux lois et règlements régissant lesdits fonctionnaires, de sorte qu’il y a lieu de se référer à l’article 2, paragraphe (3) de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, ci-après désignée par « le statut général », selon lequel la compétence pour procéder à la résiliation du stage d’un fonctionnaire étatique revient à l’autorité de nomination de ce dernier, donc au ministre du ressort concerné, respectivement au ministre ayant l’administration gouvernementale dans ses attributions.

Cette compétence dans le chef du ministre du ressort concerné, respectivement du ministre ayant l’administration gouvernementale dans ses attributions, équivaut, au niveau de la CSSF, à un domaine de compétence de la direction de cette dernière, conformément à l’article 14, paragraphe (2) de la loi du 23 décembre 1998 aux termes duquel « Les attributions dévolues au Grand-Duc, au Gouvernement, au Conseil de Gouvernement, à un ministre ou à l'autorité investie du pouvoir de nomination par les lois et règlements grand-

ducaux applicables aux fonctionnaires, employés et salariés de l’Etat sont exercées, pour le personnel de la CSSF, par la direction de la CSSF ; celles qui sont dévolues au chef d’administration, par le directeur général ou par un directeur par lui délégué. », laquelle a effectivement, en l’espèce, pris les décisions déférées des 31 octobre et 19 décembre 2019.

Il s’ensuit que le moyen de légalité externe tiré d’une incompétence de l’auteur des actes déférés est dès lors à rejeter pour ne pas être fondé.

Il y a encore lieu de rejeter le moyen tiré du fait que le demandeur s’est rapporté à prudence de justice quant aux autres causes d’illégalité externe pouvant affecter les décisions déférées, étant donné que bien qu’il est exact que le fait, pour une partie, de se rapporter à prudence de justice équivaut à une contestation, il n’en reste pas moins, tel que relevé ci-avant, qu’une contestation non autrement étayée est à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au juge administratif de suppléer la carence des parties au litige et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions. Dès lors, étant donné que Monsieur … est resté en défaut de préciser dans quelle mesure les décisions litigieuses seraient affectées d’une illégalité externe susceptible de conduire à leur annulation, le moyen afférent ainsi soulevé encourt le rejet, étant relevé que le tribunal n’entrevoit pas non plus de cause d’illégalité externe d’ordre public qui serait à soulever d’office.

Le demandeur conclut ensuite à l’annulation des décisions déférées en raison d’une indication insuffisante des motifs factuels et légaux à la base des décisions déférées, en violation des articles 1er et 2 de la loi du 1er décembre 1978 réglant la procédure administrative non contentieuse, ci-après désignée par « la loi du 1er décembre 1978 », ainsi que de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, ci-après désigné par « le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 ».

Dans ce contexte, Monsieur … argumente que la CSSF se serait principalement limitée à rappeler les finalités du stage, en citant le point 2.3. de la note de service, pour ensuite se référer, sans autres précisions, aux courriers échangés entre parties et aux entretiens ayant eu lieu avant la prise des décisions déférées, pour retenir, sans autre explication, un prétendu manque d'honnêteté dans son chef.

Sur base de l’article L.124-10, paragraphes (2) et (6) du Code du travail définissant la notion de faute grave en matière de licenciement avec effet immédiat, le demandeur fait encore valoir que dans l'appréciation des faits ou fautes procédant de la conduite professionnelle du salarié, il y aurait lieu de tenir compte du degré d'instruction, des antécédents professionnels, de sa situation sociale et de tous les éléments pouvant influer sur la responsabilité du salarié et des conséquences du licenciement, tout en précisant que les faits ou fautes susceptibles de justifier une résiliation pour motif grave devraient être invoqués dans un délai d'un mois à compter du jour où l’employeur en aurait eu connaissance.

En invoquant des jugements du tribunal administratif des 25 novembre et 16 décembre 2015, ainsi que des 10 août 2016 et 2 juin 2017, inscrits sous les numéros 32915, 34225, 36975 et 37233, respectivement 38423 du rôle, le demandeur soutient que les prédites dispositions du Code du travail lui seraient applicables.

Or, la motivation fournie par la CSSF manquerait de la précision la plus élémentaire et ne permettrait en aucun cas de retenir des faits et fautes à ce point graves qu'ils rendraient immédiatement et définitivement impossible le maintien de la relation de travail.

Monsieur … relève, par ailleurs, tel que cela ressortirait du compte rendu de la réunion du 21 octobre 2019, qu'une option lui aurait été proposée comme alternative à la résiliation avec effet immédiat et consistant à démissionner de ses fonctions, ce qui aurait pu lui permettre de repostuler dans la fonction publique, alternative démontrant, selon le demandeur, l'incohérence de la sanction lui infligée et surtout l'incohérence du prétendue motif de perte de confiance invoquée par la CSSF, confiance considérée par cette dernière comme le pilier et la valeur commune à toutes les relations de travail dans la fonction publique en général, dont la perte rendrait irrémédiablement impossible la poursuite des relations de travail concernées. Du fait d’avoir proposé une telle alternative, la CSSF aurait explicitement, sinon à tout le moins implicitement, admis qu’il n’aurait pas commis de faute grave rendant impossible et de manière définitive toute relation de travail avec la fonction publique.

Le demandeur en conclut que les faits reprochés dans la décision du 31 octobre 2019 et confirmés par la décision du 19 décembre 2019 ne sauraient être qualifiées de « motifs graves qui rendent un maintien des relations de travail impossible ».

Au vu de l'ensemble de ces motifs, le demandeur considère que les décisions attaquées seraient dépourvues d'une motivation en fait et en droit et devraient partant être annulées pour violation des articles 1 et 2 de la loi du 1er décembre 1978 et de l'article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979.

La CSSF conclut au rejet du moyen fondé sur un défaut d’indication des motifs factuels et juridiques justifiant la résiliation du stage de Monsieur … pour motifs graves pour ne pas être fondé Force est, tout d’abord, au tribunal de relever que la référence, par le demandeur, à l’article 2 de la loi du 1er décembre 1978, aux termes duquel « Des règlements grand-ducaux peuvent modifier et compléter les règles générales établies par le règlement visé à l'article premier pour les adapter aux différentes procédures particulières.

Des règlements grand-ducaux peuvent également modifier les lois et règlements existants dans la mesure requise pour les adapter aux règles générales établies par le règlement grand-ducal visé à l'article premier. », n’a pas trait à une quelconque obligation de motivation pesant sur une autorité publique, de sorte à ce que le moyen du demandeur, pour autant qu’il est fondé sur la prédite disposition légale, est à rejeter pour manquer de pertinence.

L’article 1er de la loi du 1er décembre 1978, invoqué par le demandeur, dispose que « Le Grand-Duc est habilité à édicter un corps de règles générales destinées à réglementer la procédure administrative non contentieuse.

Ces règles doivent notamment assurer le respect des droits de la défense de l'administré en aménageant dans la mesure la plus large possible la participation de l'administré à la prise de la décision administrative.

Dans ce cadre, elles assurent la collaboration procédurale de l'administration, consacrent le droit de l'administré d'être entendu et d'obtenir communication du dossier administratif, imposent la motivation des actes administratifs et indiquent le mode de procéder des organismes consultatifs. » Il convient de rappeler qu’un recours contentieux basé sur la seule violation de cet article 1er de la loi du 1er décembre 1978, à défaut d’établir la violation de l’une quelconque des dispositions de son règlement d’exécution, à savoir le règlement grand-ducal du 8 juin 1979, n’est pas de nature à conduire à l’annulation de la décision litigieuse, alors qu’il se dégage du libellé de la loi du 1er décembre 1978 en général et de son article 1er en particulier que le législateur n’a pas entendu disposer lui-même des intérêts qu’il entend régler, mais qu’il a uniquement tracé les règles de base et le cadre tout en investissant le pouvoir réglementaire de fixer le détail.

Quant à l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, ce dernier dispose que :

« Toute décision administrative doit baser sur des motifs légaux.

La décision doit formellement indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui lui sert de fondement et des circonstances de fait à sa base, lorsqu’elle :

- refuse de faire droit à la demande de l’intéressé ;

- révoque ou modifie une décision antérieure, sauf si elle intervient à la demande de l’intéressé et qu’elle y fait droit ;

- intervient sur recours gracieux, hiérarchique ou de tutelle ;

- intervient après procédure consultative, lorsqu’elle diffère de l’avis émis par l’organisme consultatif ou lorsqu’elle accorde une dérogation à une règle générale.

Dans les cas où la motivation expresse n’est pas imposée, l’administré concerné par la décision a le droit d’exiger la communication des motifs. (…) ».

En l’espèce, dans la mesure où les décisions déférées portent résiliation pour des motifs graves du stage du demandeur, de sorte à mettre fin à la relation de travail entre ce dernier et la CSSF, elles sont soumises à l’obligation de motivation inscrite à l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, de sorte qu’il incombait à l’auteur desdites décisions d’indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui leur servent de fondement et des circonstances de faits sur lesquels elles se basent.

Il convient cependant d’ajouter que la sanction de l’obligation de motiver une décision administrative ne consiste pas dans l’annulation pure et simple de la décision litigieuse, mais dans la suspension des délais de recours et que celle-ci reste a priori valable, l’administration pouvant produire ou compléter les motifs postérieurement et même pour la première fois au cours de la phase contentieuse2.

2 Cour adm. 20 octobre 2009, n° 25738C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 90 et les autres références y citées.

Il y a également lieu de souligner que l’article 6 précité n’impose pas une motivation exhaustive et précise, étant donné que seule une motivation « sommaire » est expressément exigée.

Par ailleurs, le reproche tiré d'une absence de motivation d'un acte administratif est à abjuger, dès lors que la décision attaquée ensemble avec les lettres antérieures adressées au même destinataire indiquent de manière détaillée et circonstanciée les motifs en droit et en fait sur lesquels l'administration s'est basée pour justifier sa décision, ces motifs ayant ainsi été portés à suffisance de droit à la connaissance de l'administré3.

En l’espèce, force est de constater que dans sa décision, précitée, du 31 octobre 2019, la CSSF se réfère expressément à son courrier du 11 octobre 2019 ayant informé Monsieur … de son intention de résilier le stage de ce dernier pour motif grave, d’une part, en lui indiquant la base légale sur laquelle elle s’est fondée, en l’occurrence l'article 2, paragraphe (3), alinéa 5 du statut général en vertu duquel le stage d’un fonctionnaire d’Etat, auquel Monsieur … était assimilé, est résiliable pour motifs graves avec effet immédiat, et, d’autre part, en précisant les faits reprochés au demandeur, lesquels, aux yeux de la CSSF, justifiaient la résiliation du stage de ce dernier pour motifs graves, lesdits faits concernant le reproche d’avoir fait un plagiat dans le cadre d'une partie de ses travaux pratiques à partir de plusieurs sources externes de sites internet et une rupture de la confiance devant exister entre les agents et la direction de la CSSF en raison, du fait d’avoir, selon la CSSF, menti lors qu’il avait été confronté avec les problèmes de plagiat affectant ses travaux pratiques.

Force est, par ailleurs, de constater que ces motivations ont encore été complétées en cours d’instance par la CSSF, qui a pris position de façon détaillée à travers ses mémoires en réponse et en duplique quant aux contestations du demandeur.

En l’espèce, force est encore au tribunal de constater que la décision du 19 décembre 2019 ne constitue que la confirmation pure et simple de la première décision du 31 octobre de la même année, de manière à ce que les deux actes forment un seul tout et que la deuxième décision ne fait que reprendre, en la confirmant, la motivation factuelle et juridique à la base de la première décision.

Le tribunal est dès lors amené à conclure que la motivation ainsi fournie par la CSSF est suffisante pour satisfaire aux obligations de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, étant précisé que le bien-fondé de cette motivation fera l’objet d’une analyse au fond.

Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argumentation du demandeur fondé sur les dispositions du Code du travail relatif à la gravité des motifs en cas de licenciement avec effet immédiat, dans la mesure où, mis à part la circonstance que le litige sous examen a trait à des décisions de la CSSF ayant pour objet la résiliation pour motif grave d’un stage d’un agent assimilé à un fonctionnaire étatique et non pas à un licenciement avec effet immédiat, bien que la conséquence de la résiliation de stage emporte également la fin sans préavis de la relation de travail entre l’autorité publique et l’agent concerné, les dispositions du statut général consacrent un régime spécial des agents publics, par rapport au droit du travail applicable dans le secteur privé, de sorte que, sauf renvoi légal exprès à des dispositions du Code du travail, ce qui n’est pas le cas en matière de résiliation de stage pour 3 Trib. adm. 13 novembre 1997, n° 10268 du rôle, conf. par Cour adm. 24 mars 1998, n° 10458C du rôle, Pas.

adm. 2022, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 65 et les autres références y citées.

motifs graves, les articles du Code du travail invoqués par le demandeur ne sont pas applicables dans le domaine de la fonction publique4.

Force est encore de relever que les jugements du tribunal administratif des 25 novembre et 16 décembre 2015, ainsi que des 10 août 2016 et 2 juin 2017, inscrits sous les numéros 32915, 34225, 36975 et 37233, respectivement 38423 du rôle, invoqués par le demandeur dans le cadre du moyen sous examen, et retenant une application du Code du travail, sont sans pertinence en l’espèce, dans la mesure où lesdits jugements visent exclusivement les employés de l’Etat, statut dont ne disposait pas le demandeur, alors qu’il avait été engagé auprès de la CSSF, au moment de la résiliation litigieuse de son stage, en tant qu’agent assimilé aux fonctionnaires de l’Etat, tel que retenu ci-avant.

Le tribunal doit cependant encore préciser, dans ce contexte, que la gravité des faits reprochés au demandeur fera l’objet ci-après d’une analyse dans le cadre du moyen tiré d’une erreur manifeste d’appréciation des faits et d’une violation du principe de proportionnalité.

Partant, le moyen tiré d’un défaut de motivation des décisions entreprises laisse d’être fondé dans tous ses volets et est dès lors à rejeter.

Le demandeur conclut finalement à l’annulation des décisions déférées, en ce que la CSSF aurait commis une erreur manifeste d’appréciation des faits et violé le principe de proportionnalité.

Dans ce cadre, le demandeur précise, en ce qui concerne le reproche du plagiat dans le cadre de la rédaction des deux travaux pratiques rédigés pendant sa période de stage, que lesdits travaux n’auraient eu comme objectif que de lui permettre d’accéder à une évolution de sa carrière professionnelle et n’auraient pas dû aboutir à la fin définitive de toute collaboration avec la CSSF.

Tout en admettant que la sanction d’un plagiat serait l’attribution d’une note de 0 sur 60 points, tel que cela ressortirait de la note de service 19/482 de la CSSF, ci-après désignée par « la note de service », le demandeur affirme ne pas avoir eu connaissance de ladite note, laquelle ne lui aurait pas été communiquée, voire reprécisée à l’occasion de la préparation de ses travaux pratiques, ce qui serait encore établi par la circonstance, d’une part, qu’il n’aurait pas signé les deux travaux pratiques litigieux, et, d’autre part, que lesdits travaux n’auraient pas repris la formule requise quant à la certification de son travail et quant à la citation de ses sources, éléments confirmés par la CSSF dans son courrier du 11 octobre 2019.

Le demandeur relève encore, dans ce contexte, avoir eu un parcours professionnel en tant que travailleur essentiellement manuel, sans parcours académique à l'occasion duquel son attention aurait pu être portée sur des problématiques de propriété et d’honnêteté intellectuelles, voire de citation des sources, ce qui expliquerait encore ses réponses données aux questions lui posées par des supérieurs hiérarchiques, ainsi que ses propres interrogations formulées lors de la réunion du 8 octobre 2019, son comportement étant, selon lui, le reflet de sa totale bonne foi.

Le demandeur conteste encore le reproche de la CSSF consistant à lui imputer un manque d’honnêteté et de transparence lors de la réunion du 8 octobre 2019 quant au 4 Par analogie : Trib. adm. 14 juillet 2010, n° 26495 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Fonction publique, n° 323.

problème de plagiat y soulevé, Monsieur … estimant que la CSSF accorderait une importance moindre au plagiat allégué et souhaiterait sanctionner davantage son prétendu manque d'honnêteté et de transparence dans le cadre de la réunion du 8 octobre 2019, notamment en ce qu'il n'y aurait pas saisi l'opportunité de faire amende honorable et d'avouer qu'il aurait recopié des parties de son travail d'internet.

Or, de par ses propres interrogations exprimées au sujet des trois questions lui posées lors de la prédite réunion, lesquelles auraient été ambiguës, le demandeur soutient avoir prouvé sa bonne foi en l’espèce. En effet, une fois qu’il aurait saisi le sens réel des questions lui posées, il n’aurait eu de cesse de reconnaître avoir eu recours à internet dans le cadre de la rédaction de ses travaux pratiques pour y avoir sélectionné certains passages afin de les intégrer dans ses propres écrits, sans que le défaut d’indication de ses sources aurait été fait de manière intentionnelle. Monsieur … conteste encore avoir, lors de la prédite réunion du 8 octobre 2019, modifié ses réponses au fur et à mesure des questions lui posées, alors que le contraire ressortirait du compte-rendu de ladite réunion.

Selon le demandeur, la CSSF aurait dû recourir à une sanction moins importante en l’espèce, au regard du fait, d’une part, qu’elle ne lui aurait pas rappelé le contenu de la note de service, et, d’autre part, que les questions lui posées lors de la réunion du 8 octobre 2019 n’auraient pas été formulées de manière suffisamment claire.

Le demandeur relève encore le comportement incohérent de la CSSF, dans la mesure où, dans une réunion du 21 octobre 2019, elle lui aurait proposé, comme alternative à la résiliation avec effet immédiat, de démissionner de ses fonctions, de sorte à pouvoir repostuler dans la fonction publique. Une telle proposition serait incohérente par rapport au motif tiré d’une prétendue perte de confiance invoquée par la CSSF, confiance que cette dernière affirme considérer comme le pilier et la valeur commune à toute relation au sein de la fonction publique en général et dont la perte rendrait irrémédiablement impossible la poursuite des relations de travail en question. Monsieur … analyse ladite proposition de la CSSF comme un aveu explicite, ou du moins implicite, qu’il n'aurait en l’occurence commis aucune faute grave rendant impossible, de manière définitive, toute relation de travail au sein de la fonction publique.

De plus, la CSSF aurait également dû tenir compte de son absence d'antécédents disciplinaires, de la circonstance qu’il aurait été âgé de … ans et serait le père de trois enfants à charge, ainsi que du fait que la résiliation de son stage pour motifs graves l’aurait mis, avec effet immédiat, dans un situation financière précaire, dans la mesure où il aurait été privé de tout droit aux indemnités de chômage, ainsi que de toute perspective de pouvoir intégrer à nouveau la fonction publique.

Ainsi, la CSSF aurait fait preuve d'une erreur manifeste d'appréciation à tous les égards ayant engendré la prise d'une sanction totalement disproportionnée à son encontre, de sorte que les décisions déférées devraient encourir l’annulation de ce chef.

La CSSF, dans ses mémoires en réponse et en duplique, soutient que le motif grave de la révocation du stage de Monsieur … aurait été le manque d'honnêteté, respectivement les mensonges dont ce dernier aurait fait preuve lors de son entretien du 8 octobre 2019 avec ses supérieurs hiérarchiques. À aucun moment, il n'aurait été question de résilier le stage du demandeur exclusivement sur base du plagiat commis par celui-ci. Ainsi, le demandeur aurait eu la possibilité à trois reprises, lors de l’entretien du 8 octobre 2019, d’avouer son plagiat, en l’occurrence en répondant honnêtement aux trois questions lui posées, suite au rappel de son supérieur hiérarchique quant aux conséquences d'un plagiat et suite à sa propre question concernant l’utilisation d’internet dans le cadre des travaux pratiques. Or, au lieu d’avouer les faits, Monsieur … aurait toujours cherché à adapter son discours en fonction de la tournure que prenait la discussion, ce qui aurait conduit ses supérieurs hiérarchiques à mettre en doute son honnêteté et finalement à leur faire perdre, de manière totale et irrévocable, leur confiance à l’égard du demandeur.

La CSSF insiste encore sur le fait que la note de service aurait été dûment communiquée à Monsieur …, ainsi qu’à tout le personnel de la CSSF, par courrier électronique, de sorte qu’il ne saurait nier en avoir eu connaissance.

La CSSF conteste, par ailleurs, que le demandeur aurait réalisé son travail à sa pleine satisfaction, circonstance qui ressortirait de son entretien d’appréciation pour la période allant du 1er novembre 2018 au 30 octobre 2019, selon lequel le demandeur aurait, à plusieurs reprises, été enjoint d'être plus proactif, flexible et disponible. Par ailleurs, la réduction de son stage aurait été accordée d’office à Monsieur …, alors qu’il en aurait respecté les critères, sans que cela permettrait de tirer une conclusion quant à sa performance professionnelle.

Après avoir réfuté l’argument du demandeur selon lequel il n’aurait pas tout de suite compris le sens réel des questions lui posées lors de son entretien du 8 octobre 2019, en soulignant que l'entretien se serait tenu en luxembourgeois, langue parfaitement maîtrisée par Monsieur …, que les questions posées auraient été simples, courtes et n’auraient pas prêté à aucune confusion, et que l'entretien aurait eu lieu en présence des supérieurs hiérarchiques du demandeur, la CSSF soutient avoir respecté strictement l'obligation de formuler avec précision les griefs à l’encontre de Monsieur …, de sorte que le recours sous examen serait à rejeter pour manquer de tout fondement.

Quant au fond, le tribunal est saisi, en l’espèce, d’un recours ayant pour objet une décision révoquant le stage du demandeur pour motifs graves.

Dans ce cadre, il y a lieu de préciser que la disposition légale applicable, du fait que Monsieur … a la qualité d’agent assimilé à un fonctionnaire de l’Etat, est, conformément à l’article 13, paragraphe (1) de la loi du 23 décembre 1998, celle de l’article 2, paragraphe (3), 5. du statut général aux termes duquel « Le stage est résiliable. La résiliation du stage est prononcée soit pour motifs graves, soit lorsque le stagiaire s’est vu attribuer une appréciation professionnelle insuffisante par application des dispositions de l’article 4bis.

Sauf dans le cas d’une résiliation pour motifs graves, le stagiaire a droit à un préavis d’un mois à compter du premier jour du mois qui suit celui de la constatation de l’insuffisance professionnelle. ».

Il convient à cet égard de rappeler la finalité première du stage, qui est de permettre, outre l’intégration administrative et sociale du stagiaire dans sa nouvelle administration, l’évaluation du stagiaire destinée à vérifier ses compétences et son aptitude à l’emploi : il s’agit d’une période d’épreuve.

La notion d’aptitude à l’emploi relève en principe de la seule appréciation discrétionnaire de l’autorité publique, seule qualifiée pour apprécier le résultat du stage probatoire, et doit être largement entendue et ne pas se limiter à son aspect technique, objectif, étant donné que l’engagement d’un fonctionnaire, respectivement d’un agent y assimilé, tel que le demandeur, ne saurait être détaché d’un élément d’intuitu personae, qui se traduit notamment dans les capacités d’intégration sociales et humaines du stagiaire5. Cette discrétion est nécessaire en vue d’assurer à l’autorité publique la liberté de choisir son personnel en toute indépendance, sans en exclure l’appréciation des qualités personnelles du stagiaire concerné, lesquelles doivent permettre de sauvegarder l’harmonie des rapports de service au sein de ladite autorité.

En revanche, si cette appréciation est discrétionnaire, elle ne saurait être arbitraire, en ce sens que les motifs ayant poussé l’autorité publique à ne pas nommer un stagiaire à l’issue de son stage, respectivement, comme en l’espèce, à révoquer le stage, doivent exister et se rapporter au comportement de ce dernier ou encore à l’insuffisance professionnelle ou à l’inadaptation aux fonctions du stagiaire. Aussi, si en cours de service provisoire, l’autorité publique concernée, sur base de faits matériellement établis, arrive à la conclusion que le maintien de la relation de travail est impossible, celle-ci doit d’après la jurisprudence avoir la possibilité de se séparer du stagiaire à tout moment de la période de stage, le tout sous le contrôle du juge administratif6.

Par ailleurs, si comme retenu ci-dessus, le droit de l’administration d’apprécier l’existence et l’étendue des besoins de service ainsi que de choisir le personnel qui, à ses yeux, remplit le mieux ces besoins, et, a fortiori, de ne pas retenir le personnel qu’il estime inadapté est discrétionnaire, il n’en est pas pour autant soustrait à tout contrôle juridictionnel sous peine de consacrer un pouvoir arbitraire.

Ainsi, lorsque le tribunal est saisi d’un recours en annulation, il a le droit et l’obligation d’examiner l’existence et l’exactitude des faits matériels qui sont à la base de la décision attaquée, de vérifier si les motifs dûment établis sont de nature à motiver légalement la décision attaquée et de contrôler si cette décision n’est pas entachée de nullité pour incompétence, excès ou détournement de pouvoir, ou pour violation de la loi ou des formes destinés à protéger des intérêts privés. Confronté à une décision relevant d’un pouvoir d’appréciation étendu, tel que cela est le cas en l’espèce, le juge administratif, saisi d’un recours en annulation, peut examiner si la mesure prise n’est pas manifestement disproportionnée par rapport aux faits établis, en ce sens que cette disproportion laisse entrevoir un usage excessif du pouvoir par l’autorité qui a pris la décision, voire un détournement du même pouvoir par cette autorité, étant relevé que la sanction d’une disproportion est limitée au cas exceptionnel où une flagrante disproportion des moyens laisse entrevoir un usage excessif du pouvoir par cette autorité. Par ailleurs, il ne saurait annuler la décision prise qu’au cas où l’erreur d’appréciation reprochée à l’autorité ayant pris l’acte, qu’il aurait commise dans le cadre de la marge d’appréciation qui lui est laissée plus particulièrement en l’espèce à travers l’article 2, paragraphe (3), 5. du statut général, est manifeste. C’est de la sorte que le contrôle de la légalité à exercer par le juge de l’annulation est compatible avec le pouvoir d’appréciation de l’auteur de la décision et ce n’est que si la marge d’appréciation de l’auteur de la décision a été dépassée, notamment du chef d’une disproportion dans l’application de la règle de droit aux éléments de fait, que la décision déférée est critiquable et encourt l’annulation pour erreur d’appréciation7.

5 Cyr Cambier, Droit administratif, Larcier, 1968, p.297, cité dans trib..adm., 20 février 2006, n° 20326, confirmé par arrêt du 27 juin 2006, n° 21129C, Pas. adm. 2019, V° Fonction publique, n° 29 et les autres références y citées.

6 Cour adm., 5 juillet 2016, n° 37691C, Pas. adm. 2019, V° Fonction publique, n° 32.

7 Cour adm. 14 juillet 2011, nos 28611C et 28617C du rôle, Pas. adm. 2020, V° Recours en annulation, n° 35 et les autres références y citées.

Force est de prime abord au tribunal de constater que Monsieur … ne conteste pas la réalité des faits lui reprochés, en ce qui concerne le fait d’avoir, dans le cadre de ses travaux pratiques ayant pour sujet « le courrier », respectivement « les fournitures de bureau », repris des passages à partir de sites internet, sans en indiquer les sources.

Dans ce cadre, le tribunal doit cependant relever que les travaux pratiques litigieux ne comportaient pas la mention exigée par l’article 2.3 de la note de service aux termes duquel « Pour éviter des plagiats et afin de faciliter une prise de conscience, il est demandé aux stagiaires d'insérer en début de chaque travail pratique le texte suivant : «Je certifie sur l'honneur que le présent travail pratique est le fruit d'un travail personnel et que toute référence directe ou indirecte aux travaux de tiers est expressément indiquée Tout texte cité ou copié est mis entre guillemets avec indication de la source. Je demeure seul(e) responsable des analyses et opinion exprimées dans ce document ». », de sorte que Monsieur … doit être considéré comme n’ayant pas eu connaissance, au moment de la rédaction de ses travaux pratiques de ladite note de service. En tout état de cause, du fait qu’il n’a justement pas cité ledit passage dans ses travaux, la CSSF ne saurait lui reprocher d’avoir consciemment voulu la tromper sur l’origine de l’ensemble de ses écrits.

Force est encore au tribunal de relever que, contrairement aux affirmations de la CSSF, il ne ressort pas du compte rendu de la réunion du 8 octobre 2019, établi par les supérieurs hiérarchiques de Monsieur …, que ce dernier aurait eu un comportement malhonnête, de nature à ébranler définitivement et irrémédiablement la confiance de son employeur à son égard, lorsqu’il avait été confronté par ses supérieurs hiérarchiques au problème d’indication de sources affectant ses travaux pratiques.

Il échet en effet de constater que les trois questions formulées de manière très vague lui posées lors dudit entretien, à savoir « As-tu fait les travaux pratiques seul ? », « Tout vient de toi ? » et « Tu n’as rien copié ?», par rapport auxquelles Monsieur … a répondu par l’affirmative, sauf en ce qui concerne la dernière question, ont pu, tel que le fait valoir à juste titre le demandeur, être compris comme visant la question de l’assistance d’une tierce personne pour réaliser les travaux pratiques litigieux.

Monsieur … est, par ailleurs, lorsque la notion de plagiat lui avait été expliqué sur base de la note de service, directement revenu sur ses réponses, lorsqu’il avait compris le sens des questions lui posées, tel qu’entendu par ses supérieurs hiérarchiques, en expliquant que « (…) si par « copie » [son supérieur hiérarchique] entendait copier sur un collègue, la réponse était « non », mais s’il s’agissait de copier d’internet alors « oui », qu’il avait bien utilisé internet (…) », sans avoir été conscient de la nécessité d’en indiquer les références.

Au regard des considérations qui précèdent, il y a lieu de retenir que, contrairement à la position défendue par la CSSF, Monsieur … ne peut pas être considéré comme ayant intentionnellement et de mauvaise foi nié la commission de plagiats dans le cadre de ses travaux pratiques.

Le tribunal doit encore plus particulièrement relever dans ce contexte que le travail de Monsieur … auprès de la CSSF est quasi-exclusivement de nature manuelle, alors que son affectation au sein du service « … » de la CSSF comporte comme missions principales d’effectuer la distribution de courrier interne, la gestion de la distribution du matériel de bureau, les interventions et dépannages techniques de base selon les demandes du Helpdesk, la préparation et la gestion des commandes, ainsi que la réception de la marchandise des fournisseurs, de sorte qu’ensemble avec son parcours scolaire et la méconnaissance manifeste de la note de service, celui-ci peut légitimement ne pas avoir conscience de l’importance d’indiquer les sources de passages repris à partir de sites internet. En effet, il ne saurait pas non plus être attendu d’un candidat à un poste … d’avoir la même rigueur dans l’élaboration de ses travaux intellectuels que les candidats pour des postes des carrières moyennes et supérieures.

Le comportement adéquat de ses supérieurs hiérarchiques, lorsqu’ils se sont aperçus du défaut d’indication de sources dans les travaux pratiques de Monsieur …, au lieu d’essayer de lui sous-entendre quasi-directement un comportement malhonnête à cet égard, aurait dû être celui de lui soumettre officiellement la note de service et de lui permettre de revoir ses travaux pratiques en lui laissant la possibilité d’indiquer, en connaissance de cause, les sources des citations utilisées, ainsi que de mentionner le passage exigé à l’article 2.3 de la note de service.

Sur base de l’ensemble des considérations qui précèdent les motifs à la base de la résiliation du stage du demandeur doivent être considérés comme n’étant pas d’une gravité certaine et comme n’ayant pas été de nature à ébranler irrémédiablement la confiance de ses supérieurs hiérarchiques, de sorte à ne pas pouvoir être considérés comme des motifs graves permettant de motiver la résiliation litigieuse.

Il s’ensuit que la décision de prononcer la résiliation du stage de Monsieur … pour motif grave est à considérer comme disproportionnée par rapport à l’ensemble des éléments de la cause, lesquelles n’étaient pas de nature à pouvoir valablement justifier un tel acte, de sorte que les décisions déférées doivent encourir l’annulation de ce chef.

Au vu de l’issue du litige, il est inéquitable de laisser à la seule charge du demandeur l’ensemble des frais non compris dans les dépens, de sorte qu’il y a lieu de faire droit à la demande de cette dernière en allocation d’une indemnité de procédure, laquelle est fixée ex aequo et bono au montant de 1.500 euros.

Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation dirigé contre les décisions de la CSSF des 31 octobre et 19 décembre 2019 ;

reçoit le recours subsidiaire en annulation en la forme ;

au fond, le déclare justifié, partant annule la décision de la Commission de Surveillance du Secteur financier, établissement public, du 31 octobre 2019 portant résiliation du stage de Monsieur … pour motifs graves, ainsi que la décision confirmative rendue sur recours gracieux en date du 19 décembre 2019;

condamne la Commission de Surveillance du Secteur financier à payer à Monsieur … une indemnité de procédure d’un montant de 1.500 euros ;

condamne la Commission de Surveillance du Secteur financier aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 26 mai 2023 par :

Paul Nourissier, vice-président, Olivier Poos, premier juge, Emilie Da Cruz De Sousa, juge, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Paul Nourissier Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 30 mai 2023 Le greffier du tribunal administratif 20


Synthèse
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 44088
Date de la décision : 26/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 10/06/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-05-26;44088 ?

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