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28/03/2023 | LUXEMBOURG | N°47811

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 28 mars 2023, 47811


Tribunal administratif N° 47811 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:47811 3e chambre Inscrit le 12 août 2022 Audience publique du 28 mars 2023 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de la Mobilité et des Travaux publics en matière de permis de conduire

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 47811 du rôle et déposée le 12 août 2022 au greffe du tribunal administratif par Maître Trixi LANNERS, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’ordre des avocats à Diekirch, assistée de Maître Julien NEUBAUER, avo

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Tribunal administratif N° 47811 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:47811 3e chambre Inscrit le 12 août 2022 Audience publique du 28 mars 2023 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre de la Mobilité et des Travaux publics en matière de permis de conduire

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 47811 du rôle et déposée le 12 août 2022 au greffe du tribunal administratif par Maître Trixi LANNERS, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’ordre des avocats à Diekirch, assistée de Maître Julien NEUBAUER, avocat inscrit à la liste IV du tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à …, tendant à l’annulation 1) d’une décision du ministre de la Mobilité et des Travaux publics du 28 août 2019 portant retrait de deux points du capital dont est doté son permis de conduire et 2) d’un arrêté du même ministre du 8 avril 2022 portant suspension de son droit de conduire un véhicule automoteur pour une période de douze mois ;

Vu l’ordonnance du président du tribunal administratif du 19 août 2022, inscrite sous le numéro 47812 du rôle, ayant débouté Monsieur … de sa demande tendant à voir prononcer le sursis à exécution ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 29 novembre 2022 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Madame le délégué du gouvernement Hélène MASSARD en sa plaidoirie à l’audience publique du 7 mars 2023.

___________________________________________________________________________

Par courrier recommandé du 10 juillet 2015, le ministre du Développement durable et des Infrastructures constata, d’une part, le retrait de deux points du capital de points dont est doté le permis de conduire de Monsieur … suite à une « Inobservation d’un signal de limitation de vitesse en agglomération : - le dépassement étant supérieur à 15 km/h » en date du 23 janvier 2014 et, d’autre part, que le capital de points est réduit à dix.

Par courrier recommandé du 21 février 2018, le ministre du Développement durable et des Infrastructures constata, d’une part, le retrait de deux points supplémentaires du capital de points dont est doté le permis de conduire de Monsieur … suite à une « Conduite ou fait de tolérer, comme propriétaire, détenteur ou gardien, la conduite d’un véhicule, par une personne qui a consommé des boissons alcooliques en quantité telle que le taux d’alcool est d’au moins 0,5 g d’alcool par litre de sang ou d’au moins 0,25 mg d’alcool par litre d’air expiré, sans atteindre respectivement 0,8g d’alcool par litre de sang ou 0,35 mg d’alcool par litre d’air expiré pour les personnes dont question au point 4 du paragraphe 2 de l’article 12 , ces taux sont ramenés respectivement de 0.5 g à 0,2 g d’alcool par litre de sang et de 0,25 mg à 0,10 mg d’alcool par litre d’air expiré. » en date du 15 décembre 2017 et, d’autre part, que le capital de points est réduit à huit.

Par courrier recommandé du 21 mai 2019, le ministre de la Mobilité et des travaux publics entretemps en charge du dossier, ci-après désigné par le « ministre », constata de nouveau le retrait de deux points du capital de points dont est doté le permis de conduire de Monsieur … suite à une « Inobservation d’un signal de limitation de vitesse en dehors d’une agglomération : - le dépassement étant supérieur à 20 km/h » en date du 7 janvier 2019 et que le capital de points est réduit à six.

Par courrier recommandé du 28 août 2019, le ministre constata le retrait de deux points supplémentaires du capital de points dont est doté le permis de conduire de Monsieur … et que le capital de points est réduit à quatre.

Cette décision est libellée comme suit : « […] Conformément aux dispositions légales régissant le permis à points, je tiens à vous informer que 2 points ont été retirés du capital dont est doté votre permis de conduire pour les infractions suivantes au Code de la Route :

Libellé de l’infraction :

Défaut de certificat d’immatriculation luxembourgeois pour un véhicule routier soumis à l’immatriculation au Luxembourg Nombre de points déduits :

2 Date du fait : 11 avril 2019 16:17 Lieu du fait : SIMMERN – HP70, N8 Date du paiement : 13 avril 2019 […] Nombre de points restants : 4 La présente est susceptible d’un recours en annulation devant le Tribunal administratif, à exercer par ministère d’avocat à la Cour endéans les trois mois à partir du jour de la notification de la présente. […] ».

Par courrier recommandé du 7 avril 2022, le ministre constata le retrait de quatre points supplémentaires du capital de points dont est doté le permis de conduire de Monsieur … suite à un « Dépassement de la limitation réglementaire de la vitesse de plus de 50% du maximum réglementaire de la vitesse autorisée, la vitesse constatée étant d’au moins 40 km/h supérieur à ce maximum » en date du 23 août 2021 et que le capital de points est réduit à zéro.

Par un arrêté du 8 avril 2022, le ministre constata l’épuisement du capital de points affecté au permis de conduire de Monsieur … et suspendit pour douze mois son droit de conduire un véhicule automoteur. Ledit arrêté est fondé sur les motifs et considérations suivants :

« […] Vu les articles 2bis et 13 de la loi modifiée du 14 février 1955 concernant la réglementation de la circulation sur toutes les voies publiques ;

Vu l’article 90 de l’arrêté grand-ducal modifié du 23 novembre 1955 portant règlement de la circulation sur toutes les voies publiques ;

Considérant que Monsieur …, né le … à … et demeurant à …, a commis plusieurs infractions à la législation routière sanctionnées par une réduction du nombre de points dont son permis de conduire est doté en vertu de l’article 2bis de la loi modifiée du 14 février 1955 précitée ;

Considérant qu’à chaque infraction ayant donné lieu à une réduction de points, l’intéressé a été informé du nombre de points retirés et du solde résiduel de points ;

Considérant que le capital de points affecté au permis de conduire de l’intéressé est épuisé et qu’il y a donc lieu à application des dispositions du paragraphe 3 de l’article 2bis de la loi modifiée du 14 février 1955 précitée ; […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 12 août 2022, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à l’annulation de la décision du ministre du 28 août 2019 portant retrait de deux points du capital dont est doté son permis de conduire, et de l’arrêté du même ministre du 8 avril 2022 portant suspension de son droit de conduire un véhicule automoteur pour une période de douze mois.

Par requête séparée déposée au greffe du tribunal administratif le même jour, inscrite sous le numéro 47812 du rôle, il fit encore introduire un recours tendant à voir ordonner le sursis à exécution par rapport aux décisions en question, lequel le président du tribunal administratif rejeta par ordonnance du 19 août 2022 comme étant non fondé.

Par courriels déposés au greffe du tribunal administratif le 20 février 2023, Maître Julien NEUBAUER et Maître Trixi LANNERS informèrent le tribunal administratif qu’ils n’avaient plus mandat dans l’affaire introduite par leurs soins.

Par courrier du 21 février 2023, Monsieur … fut informé par le greffe du tribunal administratif avec copie au délégué du gouvernement que ses avocats avaient déposé leur mandat et qu’il était en conséquence invité à confier la défense de ses intérêts à un autre avocat à la Cour. Par le même courrier, Monsieur … fut encore informé que l’affaire paraîtrait à l’audience publique du 7 mars 2023 pour plaidoiries.

A l’audience publique du 7 mars 2023, le tribunal a soulevé d’office la question de la recevabilité du recours au regard de la question du maintien de l’intérêt à agir de Monsieur … et ce, conformément à l’article 30 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, l’intérêt à agir conditionnant la recevabilité d’une demande s’analysant en effet en question d’ordre public1.

En effet, si stricto sensu l’intérêt à agir est à apprécier au moment de l’introduction du recours, il n’en reste pas moins que le maintien d’un intérêt à agir, ou plus précisément d’un intérêt à poursuivre une action doit être vérifié au jour du jugement2 sous peine de vider ce dernier de tout effet utile, d’encombrer le rôle des juridictions administratives et d’entraver la bonne marche des services publics en imposant à l’autorité compétente de devoir se justifier inutilement devant les juridictions administratives, exposant, le cas échéant, ses décisions à la sanction de l’annulation ou de la réformation, sans que l’administré ayant initialement introduit le recours ne soit encore intéressé par l’issue de ce dernier.

1 Cour adm., 29 mai 2008, n° 23728C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 5, et les autres références y citées.

2 Michel Leroy, Contentieux administratif, 3e édition, p.494.

Or, la première personne à pouvoir justifier s’il existe effectivement dans son chef un intérêt concret et personnel suffisant pour intenter un procès et pour le poursuivre ensuite, est le justiciable lui-même qui a saisi le tribunal administratif d’une demande, et ce, en établissant qu’il a été porté atteinte à ses droits ou que ses intérêts ont été lésés et que le redressement obtenu au moyen d’une décision juridictionnelle apportera à sa situation une amélioration qui compense les frais qu’entraîne et les désagréments que comporte un procès3. La volonté du justiciable, manifestée par l’introduction d’une demande en justice, de défendre ce qu’il considère comme un intérêt le concernant est donc le premier élément qui est nécessaire pour rendre possible la constatation que ce justiciable justifie effectivement de l’intérêt concret et personnel requis en droit pour être recevable à intenter un procès4.

Si cette volonté venait à disparaître en cours de procès, il ne serait potentiellement plus satisfait à la condition que la partie litigante conserve effectivement un intérêt concret et personnel à faire statuer sur la demande qu’elle a introduite5. Dans l’hypothèse où cette condition n’est plus remplie, il y a alors lieu d’en conclure que le recours n’est plus recevable en raison de la disparition de l’intérêt requis en droit.

Ainsi, le défaut de volonté de maintenir une demande peut résulter de la persistance avec laquelle le justiciable s’abstient de toute marque d’intérêt pour le déroulement du procès qu’il a engagé6. Une telle absence de toute marque d’intérêt constitue dès lors un motif suffisant pour retenir que l’intérêt requis en droit pour obtenir une décision sur la demande n’existe plus et qu’à défaut de cet intérêt, le recours doit être rejeté comme n’étant plus recevable.

En l’espèce, force est au tribunal de constater que le demandeur n’a pas donné suite au dépôt de mandat de ses litismandataires, qu’il ne s’est pas présenté ou fait représenter à l’audience publique du 7 mars 2023 et qu’il n’a pas répondu au courrier lui adressé par le greffe du tribunal administratif en date du 21 février 2023. L’ensemble de ces éléments est à interpréter en ce sens que le demandeur n’a pas témoigné le moindre intérêt pour le déroulement et le maintien de l’instance qu’il a mue par sa requête du 12 août 2022.

Il convient dès lors de déclarer son recours irrecevable pour défaut d’intérêt à agir.

Encore que les avocats constitués ont en l’espèce déposé leur mandat après avoir déposé une requête introductive d’instance7, le présent jugement est néanmoins rendu contradictoirement entre parties.

Le demandeur sollicite encore la condamnation du ministre au paiement d’une indemnité de procédure de 1.000.-€.

Outre la circonstance que la partie défenderesse est l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, de sorte que la demande en paiement d’une indemnité de procédure aurait dû être 3 Trib. adm., 11 mai 2016, n° 35579 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 34, et les autres références y citées.

4 Ibidem.

5 Ibidem.

6 Voir notamment Conseil d’Etat belge, 6 avril 1982, n° 22183.

7 Trib. adm., 24 janvier 2000, n° 11558 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 973, et les autres références y citées.

dirigée contre l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg et non pas contre le ministre, elle est à rejeter au vu de l’issue du litige.

Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours irrecevable, partant le rejette ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure telle que formulée par le demandeur ;

condamne le demandeur aux frais et dépens.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 28 mars 2023 par :

Thessy Kuborn, vice-président, Géraldine Anelli, premier juge, Sibylle Schmitz, attaché de justice délégué, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 28 mars 2023 Le greffier du tribunal administratif 5


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 47811
Date de la décision : 28/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 22/04/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-03-28;47811 ?

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