La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/03/2023 | LUXEMBOURG | N°45500

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 21 mars 2023, 45500


Tribunal administratif N° 45500 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:45500 3e chambre Inscrit le 12 janvier 2021 Audience publique du 21 mars 2023 Recours formé par Madame … et Monsieur …, …, contre une délibération du conseil communal de Schengen, et contre une décision du ministre de l’Intérieur, en matière de plan d’aménagement général

___________________________________________________________________________


JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 45500 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 1

2 janvier 2021 par Maître Diana R. FERREIRA, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre d...

Tribunal administratif N° 45500 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:45500 3e chambre Inscrit le 12 janvier 2021 Audience publique du 21 mars 2023 Recours formé par Madame … et Monsieur …, …, contre une délibération du conseil communal de Schengen, et contre une décision du ministre de l’Intérieur, en matière de plan d’aménagement général

___________________________________________________________________________

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 45500 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 12 janvier 2021 par Maître Diana R. FERREIRA, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, au nom de Madame … et de Monsieur …, demeurant à L-…, tendant à l’annulation de :

« 1) La délibération du conseil communal de Schengen du 30 janvier 2020 portant adoption du Projet de modification et harmonisation de la partie écrite du plan d’aménagement général, partie écrite et graphique, 2) La décision d’approbation ministérielle du 30 septembre 2020 de la Ministre de l’Intérieur » ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Michèle BAUSTERT, en remplacement de l’huissier de justice Cathérine NILLES, demeurant à Luxembourg, du 21 janvier 2021, portant signification de ce recours à l’administration communale de Schengen, établie à L-5540 Remerschen, 75, Wäistrooss, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 21 janvier 2021 par Maître Steve HELMINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la commune de Schengen, préqualifiée ;

Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 2 février 2021 par la société anonyme ARENDT & MEDERNACH SA, inscrite sur la liste V du tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2082 Luxembourg, 41A, avenue J.F. Kennedy, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B186371, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Christian POINT, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 12 avril 2021 par la société anonyme ARENDT & MEDERNACH SA, au nom de l’Etat du Grand-Duché 1de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 21 avril 2021 par Maître Steve HELMINGER, au nom de la commune de Schengen, préqualifiée ;

Vu la constitution de nouvel avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 26 avril 2021 par Maître Franca ALLEGRA, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame … et de Monsieur …, en remplacement de Maître Diana R. FERREIRA ;

Vu le mémoire en réplique, déposé au greffe du tribunal administratif le 21 mai 2021 par Maître Franca ALLEGRA, au nom de Madame … et de Monsieur …, préqualifiés ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 14 juin 2021 par la société anonyme ARENDT & MEDERNACH SA, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 21 juin 2021 par Maître Steve HELMINGER, au nom de la commune de Schengen, préqualifée ;

Vu les pièces versées en cause ainsi que les décisions attaquées ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Alexia NOWOWIEJSKI, en remplacement de Maître Franca ALLEGRA, Maître Steve HELMINGER, et Maître Martial BARBIAN, en remplacement de Maître Christian POINT, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 15 novembre 2022.

___________________________________________________________________________

Lors de sa séance publique du 21 mars 2019, le conseil communal de Schengen, ci-après dénommé le « conseil communal », fut saisi par le collège des bourgmestre et échevins de la même commune, ci-après dénommé le « collège échevinal », en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après désignée par la « loi du 19 juillet 2004 », d’un projet d’aménagement général pour la commune de Schengen qu’il mit sur orbite en conséquence à travers un vote positif, de sorte que le collège échevinal put procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi du 19 juillet 2004.

Par courrier du 24 avril 2019, Madame … et Monsieur …, propriétaires de deux parcelles inscrites au cadastre de la commune de Schengen, section WB de Bech, sous les numéros …et …, suivant relevé parcellaire versé en cause, firent valoir leurs objections à l’encontre dudit projet d’aménagement général.

Lors de sa séance publique du 30 janvier 2020, le conseil communal décida « à l’unanimité :

d’adopter le projet d’aménagement général de la commune de Schengen, comprenant parties graphique et écrite, l’étude préparatoire, le rapport et les fiches de présentation s’y rapportant et le cadastre des biotopes, mis en procédure par délibération du conseil communal du 21 mars 2019, tel qu’il a été modifié et adapté suite aux réclamations et avis 2ministériels reçus, conformément à l’article 14 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain […] ».

En ce qui concerne les objections introduites par Madame … et … le conseil communal retint ce qui suit : « N° Parcelle(s) Objet réclamation réclamation Réclamant(s) concernée(s) … … BK1 et BK9 Reclassement de la zone soumise à un PAP en zone HAB-1, risque d’inondations, violation des principes de la loi concernant la protection des eaux par le classement en HAB-1 QE […] décide à l’unanimité de réserver une suite favorable à la demande du réclamants (…) :

La commune juge la réclamation recevable.

 La commune constate que le projet de PAG respecte la loi sur l’eau puisque la partie graphique reprend la limite de la crue extrême de la zone inondable, dont l’application prime sur le projet de PAG. Elle suit ainsi les recommandations de la SUP. Par ailleurs, elle constate que le projet ne présente pas d’extension de la zone urbanisable par rapport au PAG avant refonte. Il se limite à requalifier en quartier existant la zone d’aménagement particulier qui se superpose à la zone de base, la zone périphérique, les terrains étant effectivement viabilités côté route du Vin et la rue Furwee.

Cette disposition ne dispense nullement d’une demande d’autorisation auprès de l’Administration de la Gestion de l’Eau pour l’établissement de tout projet ainsi que de l’obligation de respecter les dispositions de la loi sur l’eau dans le PAP-QE.

 Néanmoins, afin de mieux encadrer l’urbanisation éventuelle de ces terrains, la commune décide de tenir compte de l’avis du réclamant en recouvrant les terrains non bâtis d’une zone soumise à un PAP NQ, comme dans le PAG avant refonte. Cette décision est accompagnée de l’établissement de 2 schémas directeurs (BK1 et BK9) qui préciseront que tout établissement de projet doit être soumis à l’avis de l’Administration de la Gestion de l’Eau et respecter les dispositions de la loi sur l’eau.

 L’article 14.1 de la partie écrite du PAG est complété dans l’esprit de l’article 15 du PAG en vigueur. ».

Par courrier du 19 février 2020, Madame … et Monsieur … introduisirent auprès du ministre de l’Intérieur, ci-après désigné par le « ministre », une réclamation à l’encontre de la décision du conseil communal du 30 janvier 2020 portant adoption définitive du projet d’aménagement général.

3Par décision du 30 septembre 2020, le ministre approuva la prédite délibération du conseil communal du 30 janvier 2020 et déclara la réclamation de Madame … et de Monsieur … non fondée.

Ladite décision ministérielle est libellée comme suit :

« […] Par la présente, j’ai l’honneur de vous informer que j’approuve la délibération du conseil communal du 30 janvier 2020 portant adoption du projet de la refonte du plan d’aménagement général (dénommé ci-après « PAG ») de la commune de Schengen, présenté par les autorités communales.

La procédure d’adoption du projet d’aménagement général s’est déroulée conformément aux exigences des articles 10 et suivants de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain.

La Commission d’aménagement a donné son avis sur les réclamations introduites auprès du ministre de l’Intérieur en date du 14 août 2020.

Le conseil communal a donné son avis sur les réclamations introduites auprès du ministre de l’Intérieur en date du 14 mai 2020.

Conformément à l’article 18 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, j’ai fait droit à certaines objections et observations formulées par les réclamants à l’encontre du projet d’aménagement général.

Les modifications ainsi apportées à la partie graphique sont illustrées dans la présente décision et en font partie intégrante. Les autorités communales sont tenues de me faire parvenir les plans et documents modifiés, suite aux réclamations déclarées fondées par la présente décision, pour signature.

Il est statué sur les réclamations émanant […] de Monsieur et Madame … et … […] Ad réclamation … et … Les réclamants présentent leurs inquiétudes par rapport au caractère inondable des parcelles cadastrales faisant l’objet des schémas directeurs BK1 et BK9 et sollicitent une modification de l’article 24.1 de la partie écrite du PAG.

Or, la réclamation n’est pas fondée.

Les prescriptions permettant de réagir aux contraintes en matière d’inondations doivent être réglées au niveau du « plan d’aménagement particulier ʺnouveau quartierʺ [PAP NQ] » et non pas au niveau du plan d’aménagement général. Dans ce contexte, il importe de souligner également que le « plan d’aménagement particulier ʺnouveau quartierʺ [PAP NQ] » serai aussi soumis à l’autorisation de l’administration de la gestion de l’eau afin d’éviter toute aggravation de la situation en matière d’inondation. Il est dès lors prématuré de définir à ce stade des règles relatives notamment aux dimensions et à la structure des piliers. […] ».

4Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 12 janvier 2021, Madame … et Monsieur … ont fait introduire un recours tendant à l’annulation de la décision du conseil communal portant adoption définitive du projet d’aménagement particulier de la commune de Schengen du 30 janvier 2020, ainsi que de la décision précitée du ministre du 30 septembre 2020 portant approbation de la décision du conseil communal du 30 janvier 2020.

I. Quant à la compétence du tribunal Les décisions sur les projets d’aménagement, lesquelles ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’ils concernent et le régime des constructions à y ériger, ont un caractère réglementaire. La décision d’approbation du ministre, intervenue après réclamation de particuliers, comme c’est le cas en l’espèce, participe au caractère réglementaire de l’acte approuvé1, étant entendu que le caractère réglementaire ainsi retenu s’étend également au volet de la décision litigieuse ayant statué sur la réclamation introduite par le demandeur, intervenue dans le processus général de l’élaboration de l’acte approuvé.

Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, seul un recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère réglementaire. Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours en annulation introduit à l’encontre de la décision du conseil communal portant adoption du projet d’aménagement général de la commune de Schengen du 30 janvier 2020, ainsi que de la décision d’approbation du ministre du 30 septembre 2020.

II. Quant à la recevabilité La partie étatique invoque l’irrecevabilité du recours pour défaut d’intérêt à agir dans le chef des demandeurs ainsi que pour défaut d’objet. Elle estime à cet égard, d’un côté, que les demandeurs ne seraient pas les propriétaires des parcelles indiquées dans leur recours, et, de l’autre côté, que le PAG serait conforme aux attentes des demandeurs qui seraient de « limiter la possibilité de construire à la partie de la zone longeant la rue du Vin formant la crête supérieure du bassin de rétention local ».

Les demandeurs n’ont pas pris position quant au moyen de défaut d’objet du recours leur reproché et ont, par ailleurs, versé un relevé parcellaire en cause en affirmant d’un côté, qu’ils seraient propriétaires des parcelles cadastrales …, … et …, et de l’autre côté que les numérotations actuelles de la parcelle cadastrale … seraient … et …qui feraient partie du patrimoine communal.

En ce qui concerne tout d’abord l’objet du recours, celui-ci est constitué par le résultat que la partie demanderesse entend obtenir2.

En l’espèce, il se dégage de la lecture des moyens et considérations des demandeurs que l’objet de leur recours consiste dans l’instauration, par le PAG litigieux, des interdictions, 1 Cour adm., 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Actes réglementaires, n° 78 et les autres références y citées.

2 Trib. adm., 27, octobre 2004, n° 17634 du rôle, Pas. adm., 2022, V° Procédure contentieuse, n° 372 et les autres références y citées.

5voire limitations de construire sur les parcelles classées en zone inondable, objet auquel les autorités communale et étatique n’ont pas fait droit à leur intégrale satisfaction, de sorte qu’aucun défaut d’objet de leur recours ne saurait être constaté en l’espèce.

Le moyen est partant rejeté pour ne pas être fondé.

Concernant ensuite la question de l’intérêt à agir en matière de PAG, le tribunal rappelle qu’il ressort d’une jurisprudence constante des juridictions administratives3 que le recours introduit devant le juge administratif contre un projet d’aménagement général communal n’est recevable qu’à condition de l’épuisement de la procédure non contentieuse de réclamation, entraînant qu’en particulier l’omission d’emprunter la voie de la réclamation à adresser au gouvernement à l’encontre de la délibération portant adoption d’un projet entraîne l’irrecevabilité omisso medio du recours devant le juge administratif. Il ressort de cette même jurisprudence qu’en contrepartie, peu importe que cette réclamation ait été déclarée irrecevable ou non fondée par le ministre, le réclamant en question dispose d’un intérêt à voir vérifier la légalité de la décision ministérielle prise à son encontre et, plus loin, de la délibération communale ainsi approuvée, de sorte que son recours en annulation est recevable sous l’aspect de l’intérêt à agir au-delà de toutes autres considérations fussent-elles du domaine politique.

En l’espèce, il est constant qu’en date du 24 avril 2019, les demandeurs ont adressé leurs objections contre le projet d’aménagement général au collège échevinal et qu’en date du 19 février 2020, ils ont encore introduit une réclamation contre le projet d’aménagement général au ministre, lequel a approuvé, par sa décision déférée du 30 septembre 2020, la délibération du conseil communal du 30 janvier 2020 portant adoption du projet d’aménagement général, tout en déclarant recevable mais non fondée leur réclamation en ce qui concerne les parcelles portant les numéros cadastraux …, …4 et …5. Il s’ensuit que les demandeurs justifient en l’espèce d’un intérêt à agir suffisant.

Le moyen tendant à un défaut d’intérêt à agir dans le chef des demandeurs est rejeté.

Il s’ensuit que le recours est à déclarer recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les forme et délai de la loi.

III. Quant à la loi applicable La procédure d’adoption d’un plan d’aménagement général, ci-après désigné « PAG », est prévue par la loi du 19 juillet 2004. Or, celle-ci a été modifiée à plusieurs reprises et dernièrement (i) par une loi du 28 juillet 2011 entrée en vigueur, en application de son article 45, en date du 1er août 2011, (ii) par la loi du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire, publiée au Mémorial A, n° 160 du 6 septembre 2013, (iii) par la loi du 14 juin 2015 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, publiée au Mémorial A, n° 3 Cour adm., 17 avril 2008, n° 23846C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Urbanisme, n° 345 et les autres références y citées, ainsi que trib. adm., 24 mars 2004, n° 16556 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 123 et les autres références y citées, de même que trib. adm., 8 décembre 2014, n° 33918 du rôle, confirmé par Cour.

adm., 12 mai 2015, n° 35730C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 121 et les autres références y citées.

4 Anciennement n° 732/4817.

5 Anciennement n° 732/4817.

6113 du 17 juin 2015, (iv) par la loi du 3 mars 2017 dite « Omnibus », entrée en vigueur, en application de son article 76, le 1er avril 2017, (v) par la loi du 17 avril 2018 concernant l’aménagement du territoire, (vi) par la loi du 18 juillet 2018 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain et (vii) par la loi du 30 juillet 2021 relative au Pacte logement avec les communes en vue d’augmenter l’offre de logements abordables et durables.

Etant donné, d’une part, que le tribunal vient de retenir que seul un recours en annulation a pu être introduit à l’encontre des décisions déférées et, d’autre part, que dans le cadre d’un tel recours, le juge administratif est amené à en apprécier la légalité en considération de la situation de droit et de fait ayant prévalu au jour où elles ont été prises, les modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par la loi précitée du 30 juillet 2021, entrée en vigueur postérieurement à la décision d’approbation du conseil communal du 30 janvier 2020, ne sont pas à prendre en considération en l’espèce, étant plus particulièrement précisé à cet égard que les actes de tutelle administrative, telles que la décision ministérielle litigieuse, rétroagissent à la date de la décision approuvée et tombent dès lors sous le champ d’application des lois en vigueur à la date de la prise de décision de l’acte initial.

Il s’ensuit que la version de la loi du 19 juillet 2004 applicable au présent litige est celle résultant des modifications opérées par les lois des 28 juillet 2011, 30 juillet 2013, 14 juin 2015, 3 mars 2017, 17 avril 2018 et 18 juillet 2018.

IV. Quant au fond Arguments des parties A l’appui de leurs recours, et après avoir cité l’article 14.1 de la partie écrite du PAG relatif aux zones soumises à un plan d’aménagement particulier « nouveau quartier », ci-après désigné par PAP NQ, les demandeurs soulignent que dans le PAG litigieux, toute disposition quant aux marquages et définitions des servitudes grevant les terrains situés en zone inondable ferait défaut. Ils précisent dans ce contexte que la zone d’habitation 1, ci-après zone [HAB-1], dans laquelle leurs parcelles auraient été classées, ferait partie d’une zone d’inondations, dont 90% des terrains seraient situés en zone HQ10 à forte probabilité d’inondation, et 10% seraient situés en zone HQ100 à faible probabilité d’inondation, de sorte qu’afin de conserver la capacité de rétention de la zone et pour garantir tant la sécurité des futurs habitants que leur investissements, ils auraient demandé à la commune de limiter la constructibilité dans cette zone aux terrains présentant un faible risque d’inondation et d’interdire encore toute construction en deuxième ligne tout comme la construction de voies publiques nouvelles.

Les demandeurs expliquent ensuite que suite à la réunion d’aplanissement des différents et malgré l’engagement communal de revoir l’article 14.1 dans l’esprit de l’article 15 de l’ancien PAG, lequel aurait été, suivant les demandeurs, le garant du maintien du niveau du terrain naturel, la commune aurait maintenu la rédaction originale de l’article 24.1 de la partie écrite du PAG et aurait ajouté un paragraphe à l’article 14.1 de la même partie écrite imposant une autorisation ministérielle pour tous travaux, aménagements, ouvrages et installations dans les zones inondables visées aux articles 38 et 39 de la loi modifiée du 19 décembre 2008 relative à l’eau, ci-après désignée par la « loi du 19 décembre 2008 », obligation qui existerait cependant d’office en vertu de l’article 23, paragraphe (2) f de la 7même loi.

Les demandeurs s’adonnent ensuite à une description du contexte local pour illustrer la réalité du risque d’inondation sur le site et se basent sur des documents publiés par le ministère de l’Intérieur, qui démontreraient que le seul moyen de remédier au risque d’inondation serait de remblayer et de fortifier massivement les lieux pour « sortir » les futures constructions, tout en soulignant que pour la mise en sécurité des futures constructions, des remblais allant de 2,90 à 6 mètres seraient requis suivant l’implantation sur l’axe route du Vin - rue de la Moselle. Cette circonstance aurait cependant été ignorée par les autorités communale et ministérielle, alors que toute disposition limitant les remblais dans les zones inondables aurait été supprimée de l’article 14.1 de la partie écrite du PAG, ce qui rendrait le site théoriquement constructible. Ils indiquent encore dans ce contexte qu’à 200 mètres des parcelles litigieuses, une station d’évacuation d’eau, dépassant le terrain naturel de plus de 6 mètres aurait été installée pour échapper au risque d’inondation. Or, la circonstance que sous le nouveau PAG des remblais sans limites seraient possibles, constituerait une atteinte illégale au principe de la conservation de la capacité de rétention d’eau local dans les zones d’inondation.

Ils indiquent encore que l’évaluation environnementale de l’étude préparatoire, dite « strategische Umweltprüfung », en abrégé « SUP », indiquerait à cet égard que les lieux sont classés HQ10, sans mentionner que cette même zone serait classée en son intégralité HQ100 voir HQ extrême, et en indiquant que l’administration de la gestion de l’eau devrait être consultée lors de l’établissement du plan d’aménagement et qu’il serait nécessaire de répondre aux objectifs de la loi du 19 décembre 2008 prévoyant l’interdiction de construire de nouveaux bâtiments dans une zone inondable, les demandeurs en concluant qu’à défaut de dispositions protectrices contre le risque d’inondation, tant dans la partie graphique que dans la partie écrite du PAG, celui-ci ne respecterait pas la SUP.

Les demandeurs citent ensuite, toujours dans le même contexte, l’avis de l’administration de la gestion de l’eau du 1er août 2014 pris dans le cadre de l’évaluation des incidences du nouveau PAG de la commune de Schengen dans le cadre de la loi du 22 mai 2008 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement, lequel conclurait également à un risque d’inondation élevé tant en importance qu’en fréquence. Dans la mesure où la partie graphique du PAG, outre de signaler la limite des crues, ne porterait pas de « zone risque naturel superposé » et ne comporterait pas de disposition quant au mode et degré d’utilisation de cette zone inondable, leurs réclamations seraient fondées.

Les demandeurs s’adonnent encore à une description du « contexte légal » en se référant aux principes politiques définis par le Conseil de Gouvernement en date du 10 mai 1996, et à une brochure intitulée « Cartes des zones inondables pour le Luxembourg et la Rhénanie-Palatinat », dite « TIMIS flood », émis par l’administration de la gestion de l’eau sur la mise en œuvre desdits principes, pour souligner que les objectifs politiques au Luxembourg viseraient à prohiber toute construction à usage d’habitation dans les zones dites « rouges et bleues », les demandeurs estimant que les principes ainsi retenus n’auraient pas été respectés en l’espèce, dans la mesure où les zones inondables seraient librement constructibles.

Ils citent ensuite l’article 39, paragraphe (4) de la loi du 19 décembre 2008 suivant 8lequel le changement d’affectation d’une zone existante serait conditionné par la preuve que le volume de rétention ferait défaut sinon pourrait être compensé et qu’il n’existerait aucune augmentation du risque de dommages par inondation pour des personnes et des biens, l’article 6 du règlement grand-ducal modifié du 8 mars 2017 concernant le contenu du plan d’aménagement général, ci-après désigné par « règlement grand-ducal du 8 mars 2017 », suivant lequel la partie écrite du PAG définirait les diverses zones arrêtées par la partie graphique du PAG en fixant le mode et, le cas échéant, le degré d’utilisation du sol, ainsi que l’article 33 du même règlement grand-ducal suivant lequel tout PAG devrait d’office définir les servitudes spéciales auxquelles sont soumises les zones de risques naturels prévisibles notamment les zones inondables avec une surimpression « I ».

Ils réfutent ainsi d’abord la constatation ministérielle suivant laquelle leur réclamation serait prématurée au niveau du PAG, au motif que leurs contestations auraient trait à la constructibilité des terrains situés dans la zone HAB-1 et porteraient sur les modalités et le degré d’utilisation de cette zone. Etant donné que le PAG aurait classé une partie de la zone HAB-1 en zone inondable, l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 serait d’application, de sorte que la partie écrite dudit PAG aurait d’office dû définir les modalités et le degré d’utilisation, voire, de constructibilité de cette zone inondable. La motivation de la décision ministérielle suivant laquelle leur réclamation serait prématurée, serait dès lors erronée pour être contraire à l’article 6 du règlement grand-ducal en question, les demandeurs estimant que l’argumentation suivant lequel le PAP NQ serait, pour les terrains situés en zone inondable, soumis à une autorisation préalable des services de la gestion de l’eau, ne saurait valoir « définition des modalités et surtout du degré de constructibilité » tels que requis par l’article 6 en question, les demandeurs renvoyant également à un jugement du tribunal administratif du 23 août 2006, inscrit sou le n° 20975 du rôle.

Ils invoquent ensuite une violation de l’article 33 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 retenant que les zones de risques naturels seraient soumises à des servitudes spéciales définies dans le PAG, pour conclure que leurs considérations ayant trait au défaut de servitudes spéciales ne seraient pas non plus prématurées. Le PAG litigieux aurait ainsi dû indiquer, pour les lieux susceptibles d’être inondés, des risques naturels prévisibles suivant la légende et le marquage de la zone d’inondations par une surimpression « I » dans sa partie graphique, et les définitions des servitudes spéciales grevant les zones d’inondation, dans sa partie écrite, ce qui ne serait toutefois pas le cas en l’espèce. Le PAG, en tant que document de consultation publique, devrait mentionner expressément le principe de non-constructibilité dans une zone d’inondation ainsi que les exceptions à ce principe, de sorte qu’un renvoi à une procédure d’autorisation auprès de l’administration de la gestion de l’eau serait contraire à l’obligation d’information publique prévue par l’article 33 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017.

Finalement, les demandeurs se prévalent encore d’une violation de l’article 39 de la loi du 19 décembre 2008 en ce que la lecture de la partie écrite du PAG laisserait conclure à une constructibilité des terrains y situés en faisant abstraction de la restriction légale suivant laquelle seuls les terrains à qualifier de lacune dans le tissu construit existant « Baulücke » pourraient faire l’objet d’une construction, les demandeurs énumérant encore les conditions à répondre pour qu’un terrain puisse être considéré comme constituant une lacune dans le tissu construit existant. Ils indiquent à cet égard que toute « Baulücke » ferait défaut en l’espèce, alors que tous les terrains inondables resteraient soumis à l’élaboration d’un PAP NQ pour ne pas être directement constructibles et seraient situés entre deux terrains construits. La 9constructibilité des terrains en question serait donc factice pour se heurter à la prohibition de construire en zone inondable édictée par l’article 39, paragraphe (2) de la loi du 19 décembre 2008.

Les décisions litigieuses seraient dès lors à annuler.

Dans leur mémoire en réplique, les demandeurs reprennent en substance leurs moyens invoqués dans la requête introductive d’instance, en ajoutant que l’esprit de l’article 15 de la partie écrite de l’ancien PAG ne serait pas traduit par le rajout, à l’article 14 de la partie écrite du nouveau PAG, de l’obligation de requérir l’autorisation de l’administration de la gestion de l’eau en cas de construction en zone inondable, alors que l’intégralité des dispositions de l’article 15.1., posant le principe du maintien du niveau naturel dans ce bassin de rétention, aurait été omise. Suivant l’article 15.1. de la partie écrite de l’ancien PAG, seule la route du Vin située en crête du bassin de rétention serait à qualifier de voie publique viabilisée existante, alors que la rue de la Moselle ne serait pas viabilisée « pour raccorder des constructions à se faire sur ses abords ». Sous l’empire dudit ancien article 15.1., le remblai maximal aurait été de 0,50 mètres en référence du niveau de la rue du Vin pour une profondeur constructible de 16 mètres, de sorte que l ’actuel article 14 de la partie écrite du PAG n’aurait pas repris l’esprit de l’ancien article 15.1..

Concernant le contexte local, ils s’appuient encore sur le plan de gestion de risques d’inondation de l’administration de la gestion de l’eau du 22 décembre 2015, suivant lequel la surface d’inondations serait de 200 à 300 mètres du bord de la Moselle, en soulignant que les terrains litigieux se trouveraient à 50 et 150 mètres dudit bord.

Ils contestent encore l’argumentation des parties défenderesses suivant laquelle les terrains litigieux n’auraient pas été réaffectés sous l’actuel PAG.

Les demandeurs réfutent ensuite les considérations des parties défenderesses suivant lesquelles la brochure « TIMIS flood » n’aurait aucune valeur légale en matière de PAG, en arguant qu’elle aurait été réalisée sur base de la directive 2007/60/CE du Parlement européenne et du Conseil du 23 octobre 2007 relative à l’évaluation et à la gestion des risques d’inondation, laquelle aurait été transposée en droit interne par la loi du 19 décembre 2008, qui aurait débouché dans la définition du plan de gestion des risques d’inondation et qui serait un document légalement contraignant. La brochure « TIMIS flood » aurait ainsi été déclaré comme « norme applicable », alors qu’il constituerait l’évaluation provisoire du risque d’inondation et aurait été déclaré obligatoire dans le cadre du règlement grand-ducal du 26 décembre 2012 déclarant obligatoire le plan de gestion des districts hydrographiques du Rhin et de la Meuse du Grand-Duché de Luxembourg. La brochure « TIMIS flood » serait encore « d’application d’office » pour faire partie du plan de gestion des risques d’inondation, qui à son tour, ferait l’objet de l’article 4 d’un règlement grand-ducal du 30 septembre 2010 non autrement qualifié. A cela s’ajouterait que les cartes des risques d’inondation pour la Moselle auraient été déclarées obligatoires et seraient donc d’application d’office, tant par l’administré que par l’administration par le règlement grand-ducal du 5 février 2015, déclarant obligatoires les cartes des zones inondables et les cartes des risques d’inondation pour les cours d’eau de la Moselle et de la Syre, les demandeurs étant d’avis que la brochure « TIMIS flood » serait d’ordre supranational.

Ils estiment encore que l’affirmation des parties défenderesses suivant laquelle le 10respect de la loi du 19 décembre 2008 ne serait pas à analyser dans le cadre d’un recours contre le PAG, mais seulement au moment de l’approbation d’un PAP NQ et qu’il n’appartiendrait pas à un PAG de fixer des prescriptions urbanistiques, seraient contredites par les articles 6 et 33 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, ainsi que par l’article 50 de la loi du 19 décembre 2008. Ils estiment à cet égard que le ministre aurait indéniablement l’obligation de fixer le degré d’utilisation pour l’intégralité de la zone HAB-1 et que comme cette zone serait classée dans sa majeure partie en zone inondable, il y aurait, suivant l’article 33 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, également obligation d’appliquer, dès l’élaboration du PAG, la loi et la réglementation « sur la protection de l’eau » ainsi que les restrictions de constructibilité telles que retenues par la brochure « TIMIS flood ».

Ils réfutent également l’argumentation communale et étatique suivant laquelle la jurisprudence citée par eux ne serait plus d’actualité pour avoir eu comme objet un PAG établi sous l’empire de la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes, entretemps abrogée, et estiment que cette argumentation serait contredite par les articles 6 et 33 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017. Suivant les demandeurs, un administré devrait avoir la possibilité de faire vérifier « dès à présent » la légalité des dispositions d’un PAG, de sorte que la jurisprudence dont question resterait actuelle et leurs contestations ne seraient pas à qualifier de prématurées au niveau du PAG.

En ce qui concerne leur moyen ayant trait à une violation de l’article 33 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, les demandeurs estiment que l’indication d’une ligne pointillée bleue dans la partie graphique du PAG ne suffirait pas à la prescription légale de marquer les zones inondables par une surimpression « I », tout en rappelant qu’un PAG serait un document de consultation publique. Aussi, le renvoi dans la partie écrite du PAG à une procédure d’autorisation par l’administration de gestion de l’eau ne remplirait pas l’obligation d’information publique de l’article 33 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017.

Finalement, les demandeurs réfutent encore l’affirmation communale suivant laquelle leur moyen ayant trait à une violation de l’article 39 de la loi du 19 décembre 2008 serait prématuré, en se référant aux articles 6 et 33 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017.

Aussi, l’argumentaire selon laquelle la constructibilité des terrains ferait l’objet des exceptions autorisées par l’article 39 de la loi sur la protection de l’eau, serait contredite tant par la partie graphique du PAG, que par le fait que la zone HAB-1 constituerait manifestement une réaffectation et un agrandissement d’une zone existante, dans le sens de l’article 39, paragraphe (4).

Au vu de ces considérations, les décisions litigieuses devraient encourir l’annulation.

Tant la commune que la partie étatique concluent, quant à elles, au rejet du recours pour n’être fondé en aucun de ses moyens.

Appréciation du tribunal Saisi d’un recours en annulation, la mission de juge de la légalité exclut le contrôle des considérations d’opportunité et notamment d’ordre politique, à la base de l’acte administratif attaqué et inclut la vérification, d’après les pièces et éléments du dossier administratif, de ce que les faits et considérations sur lesquels s’est fondée l’administration 11sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute. Dans cette démarche de vérification des faits et des motifs à la base de l’acte déféré, le tribunal est encore amené à analyser si la mesure prise est proportionnelle par rapport aux faits dont l’existence est vérifiée, le tribunal étant ainsi appelé à opérer une balance valable et équilibrée des éléments en cause et à vérifier plus particulièrement si l’acte posé est proportionné à son but6.

Aux termes de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004 « Les communes ont pour mission de garantir le respect de l’intérêt général en assurant à la population de la commune des conditions de vie optimales par une mise en valeur harmonieuse et un développement durable de toutes les parties du territoire communal par:

(a) une utilisation rationnelle du sol et de l’espace tant urbain que rural en garantissant la complémentarité entre les objectifs économiques, écologiques et sociaux;

(b) un développement harmonieux des structures urbaines et rurales, y compris les réseaux de communication et d’approvisionnement compte tenu des spécificités respectives de ces structures, et en exécution des objectifs de l’aménagement général du territoire;

(c) une utilisation rationnelle de l’énergie, des économies d’énergie et une utilisation des énergies renouvelables;

(d) le développement, dans le cadre des structures urbaines et rurales, d’une mixité et d’une densification permettant d’améliorer à la fois la qualité de vie de la population et la qualité urbanistique des localités;

(e) le respect du patrimoine culturel et un niveau élevé de protection de l’environnement naturel et du paysage lors de la poursuite des objectifs définis ci-

dessus;

(f) la garantie de la sécurité, la salubrité et l’hygiène publiques. ».

L’article 6 de la loi du 19 juillet 2004 prévoit, quant à lui, que « Le plan d’aménagement général a pour objectif la répartition et l’implantation judicieuse des activités humaines dans les diverses zones qu’il arrête aux fins de garantir le développement durable de la commune sur base des objectifs définis par l’article 2 de la loi. ».

Il s’ensuit que les autorités communales, lorsqu’elles initient des modifications de leurs plans d’aménagement, doivent être mues par des considérations légales d’ordre urbanistique ayant trait à l’aménagement des agglomérations et d’ordre politique tirées de l’organisation de la vie en commun sur le territoire donné, tendant les unes et les autres à une finalité d’intérêt général et dans ce contexte, lesdites autorités doivent veiller tant à la conservation de l’esthétique urbaine qu’au développement rationnel des agglomérations.

Il échet encore de noter que la modification d’un PAG est, dans son essence même, prise dans l’intérêt général, cette caractéristique étant présumée jusqu’à preuve du contraire7.

Force est ensuite de rappeler que le tribunal n’est pas tenu par l’ordre des moyens, tel que présenté par le demandeur, mais détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et l’effet utile s’en dégageant.

6 Cour adm., 12 janvier 2021, n°44684C du rôle, disponible sur www.ja.etat.lu.

7 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Recours en annulation, n° 10 et les autres références y citées.

12 En l’espèce, il échet en premier lieu de constater que les parcelles des demandeurs portant les numéros cadastraux …et … ont été classées par le PAG en zone [HAB-1] ensemble avec un bon nombre d’autres parcelles longeant la route du Vin de ses deux côtés, ainsi que celle portant le numéro cadastral …, la parcelle non-construite portant le numéro cadastral … faisant encore partie d’un groupe de parcelles superposées d’une zone soumise à un PAP NQ dénommée BK9-« Houlechergaarden ». Sous l’ancien PAG de la commune, les parcelles litigieuses des demandeurs avaient été classées en « zone périphérique », à savoir en zone constructible, et avaient ainsi été maintenues en zone constructible par leur classement de base en zone [HAB-1].

Il échet ensuite de constater que les demandeurs avancent en substance une série de considérations et craintes liées au caractère inondable de leurs parcelles, pour justifier l’instauration d’éventuelles interdictions, voire limitations de construire.

A cet égard, force est de constater que l’article 5 de la loi du 19 juillet 2004 définit le PAG comme « […] un ensemble de prescriptions graphiques et écrites à caractère réglementaire qui se complètent réciproquement et qui couvrent l’ensemble du territoire communal qu’elles divisent en diverses zones dont elles arrêtent l’utilisation du sol. […] », étant rappelé que l’article 6 de la même loi précise que : « Le plan d’aménagement général a pour objectif la répartition et l’implantation judicieuse des activités humaines dans les diverses zones qu’il arrête aux fins de garantir le développement durable de la commune sur base des objectifs définis par l’article 2 de la loi. ».

L’article 25 de la loi du 19 juillet 2004 indique que le plan d’aménagement particulier, ci-après « PAP » « […] précise et exécute les dispositions réglementaires du plan d’aménagement général concernant une zone ou partie de zone. Il revêt la forme d’un plan d’aménagement particulier « nouveau quartier ». Les communes peuvent toutefois définir dans leur plan d’aménagement général des terrains ou ensembles de terrains constituant une zone urbanisée pour lesquels un plan d’aménagement particulier « quartier existant » est à élaborer. […] ».

Dans la mesure où un PAG divise le territoire communal en diverses zones en arrêtant leur utilisation du sol, un PAP précise et exécute les dispositions du PAG concernant une telle zone, et où les considérations des demandeurs ont essentiellement trait aux modalités, voire interdictions de construire, à savoir aux modalités d’exécution du PAG litigieux par le PAP, c’est a priori à juste titre que le ministre a déclaré lesdites considérations des demandeurs à cet égard comme étant prématurées pour devoir être dirigées contre le PAP.

Force est ensuite de constater que les demandeurs contestent le caractère prématuré de leurs considérations en invoquant différents moyens.

1. Quant au « cadre légal » invoqué par les demandeurs Les demandeurs avancent qu’il y aurait lieu d’appliquer dans le cadre d’un PAG l’intégralité de la réglementation en matière de « protection de l’eau », ainsi que les principes politiques définis par le Conseil de Gouvernement en date du 10 mai 1996, la brochure dite « TIMIS flood », l’avis de l’administration de la gestion de l’eau du 1er août 2014 pris dans le cadre de l’évaluation des incidences du nouveau PAG de la commune de Schengen dans le cadre de la loi du 22 mai 2008 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et 13programmes sur l’environnement et le plan de gestion de risques d’inondation de l’administration de la gestion de l’eau du 22 décembre 2015, ce qui justifierait l’instauration d’éventuelles interdictions, voire limitations de construire sur les parcelles en question.

A cet égard, il échet de retenir que ces principes politiques, brochures, avis, et plan de gestion n’ont pas la moindre valeur légale pour ne pas constituer ni des actes normatifs d’ordre national ni encore des actes normatifs d’ordre supranational, tel qu’allégué par les demandeurs, et pour ne pas non plus imposer une quelconque règle contraignante concernant le contenu d’un PAG, les demandeurs restant, par ailleurs, en défaut d’invoquer une quelconque disposition normative résultant des principes politiques, brochures, avis, et plan de gestion précités, qui aurait été violée en l’espèce, ainsi que la manière dont elle aurait été violée. De, plus, il ne ressort d’aucune disposition légale que la brochure « TIMIS flood » serait d’application d’office ou aurait été déclarée obligatoire d’une quelconque manière, tel qu’alléguée par les demandeurs.

A cela s’ajoute que l’article 508 de la loi du 19 décembre 2008 invoqué par les demandeurs pour soutenir qu’il y aurait lieu d’appliquer dans le cadre de l’élaboration d’un PAG l’intégralité de la réglementation en matière de « protection de l’eau », et mis à part la circonstance que ledit article se limiterait à imposer les mentions obligatoires à indiquer dans les parties graphies et écrites d’un PAG d’une commune, tels que notamment les cours d’eau et les zones inondables, n’est pas applicable en l’espèce pour avoir été abrogé par la loi du 20 juillet 2017 modifiant la loi modifiée du 19 décembre 2008 relative à l’eau, à savoir, avant la prise des décisions litigieuses.

Force est encore de constater que de manière générale, et tel que soutenu à juste titre par les parties défenderesses, aucune disposition légale n’interdit le classement, par un PAG, des parcelles situées en zone inondable, en zone constructible, étant à cet égard souligné, tel que constaté ci-avant, que les parcelles litigieuses avaient été classées en zone constructible sous l’ancien PAG de la commune et ont été maintenues en zone constructible sous l’égide du PAG litigieux, de sorte que l’affectation principale des parcelles litigieuse est restée inchangée.

Il s’ensuit que les considérations des demandeurs relatives au « cadre légal » en matière de PAG sont non fondées.

8 L’article 50 de la loi du 19 décembre 2008, entretemps abrogé, disposait que : « (1) Chaque commune établit un plan général communal du cycle urbain de l’eau. Ce plan fait partie intégrante de son plan d’aménagement général et de l’étude préparatoire afférente et doit être réexaminé lors de la révision du plan d’aménagement général. (2) Le plan général communal comprend une partie écrite et une partie graphique. L’étude préparatoire contient au moins: a) un inventaire des eaux souterraines; b) un inventaire des infrastructures d’approvisionnement en eau destinée à la consommation humaine existantes, ainsi que des infrastructures projetées dressé conformément aux dispositions de l’article 42, paragraphe (3); c) les délimitations des différentes zones de qualité définie d’approvisionnement en eau destinée à la consommation humaine; d) un inventaire des infrastructures d’assainissement existantes, ainsi que des infrastructures projetées dressé conformément aux dispositions de l’article 46, paragraphe (3); e) les délimitations des différentes zones d’assainissement. Le plan d’aménagement général contient, au moins, a) les cours d’eau conformément aux dispositions de l’article 19 de la présente loi; b) un inventaire des zones inondables dressé conformément aux dispositions de l’article 38 de la présente loi; c) un inventaire des zones protégées actuelles et de celles destinées à être déclarées zones protégées conformément aux dispositions de l’article 20. […] ».

14 2. Quant à une violation de la SUP Les demandeurs allèguent qu’à défaut de dispositions protectrices visant le risque d’inondation sur les parcelles litigieuses, le PAG ne respecterait pas la SUP, qui indiquerait la nécessité de prévoir une interdiction de construire en zone inondable.

Or, à cet égard, il échet tout d’abord de souligner qu’aucune disposition légale n’impose à la commune de reprendre à la lettre les recommandations de la SUP, étant précisé que l’objet de la SUP consiste d’identifier, voire de résoudre en amont les problèmes environnementaux susceptibles de se présenter lors de la mise en œuvre du plan ou programme.

Ensuite, il ressort de l’extrait de la SUP versé en cause par les demandeurs concernant la zone BK9 « Houlechergaarden » dont fait partie la parcelle portant le numéro cadastral … que : « Intégralement en zone inondable ʺHQ Extrêmeʺ Zone dans le village Bech-Kleinmacher, une autorisation sera à solliciter et l’AGE devra être consultée pour mettre en place un projet évitant les incidences. ».

Dans la mesure où la partie écrite du PAG indique en son article 14.1 que « Tout projet de PAP NQ concernant des terrains situés en zone inondable est soumis à une autorisation préalable des services de l’Etat ayant dans leurs compétences la gestion de l’eau, afin d’en respecter scrupuleusement les conditions émises dans le cadre de l’élaboration dudit PAP et lors de la délivrance d’une l’autorisation à bâtir sur les fonds concernés. », il échet de retenir que ledit article 14.1 va dans le sens des recommandations de la SUP, de sorte que les considérations des demandeurs relatifs à une violation de la SUP sont en tout état de cause à rejeter pour ne pas être fondées.

3. Quant à une violation de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 Les demandeurs soutiennent que la partie écrite du PAG litigieux aurait omis d’arrêter le mode et le degré d’utilisation du sol de ses parcelles classées en zone inondable en violation de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017.

L’article 6 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 concernant le contenu de la partie écrite du PAG dispose que : « La partie écrite définit les diverses zones arrêtées par la partie graphique du plan d’aménagement général en fixant le mode et, le cas échéant, le degré d’utilisation du sol. […] ».

Concernant tout d’abord le mode d’utilisation du sol, il échet de constater que celui-ci se définit par les zones énumérées aux articles 8 à 23 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, parmi lesquelles figure, dans l’article 8, la zone [HAB-1] dans laquelle les parcelles des demandeurs ont été classées et qui dispose à cet égard que : « (1) Les zones d’habitation englobent les terrains réservés à titre principal aux habitations. Y sont également admis des activités de commerce, des activités artisanales et de loisirs, des services administratifs ou professionnels, des activités culturelles, des activités de culte, ainsi que des équipements de service public.

De manière générale, y sont interdits les constructions et les établissements qui par leur nature et leur importance seraient incompatibles avec la sécurité, la salubrité, la 15commodité et la tranquillité d’un quartier d’habitation.

Les zones d’habitation sont subdivisées en fonction du type d’habitation en :

1. zones d’habitation 1 [HAB-1] ;

2. zones d’habitation 2 [HAB-2].

(2) La zone d’habitation 1 est principalement destinée aux logements de type maison unifamiliale. Pour tout plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » exécutant une zone d’habitation 1, au moins la moitié des logements est de type maison unifamiliale. La surface construite brute à dédier à des fins de logement est de 90 pour cent au minimum. La commune peut déroger au principe des 90 pour cent si les caractéristiques ou les particularités du site l’exigent. […] ».

En l’espèce, il résulte de la partie graphique du PAG litigieux que les deux parcelles des demandeurs ont été classées en zone [HAB-1] et il ressort encore de l’article 1er de la partie écrite du PAG que ladite zone y a été définie, tout comme son mode d’utilisation du sol, par des termes quasi identiques à ceux employés à l’article 8 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, précité, de sorte que l’affirmation des demandeurs suivant laquelle le mode d’utilisation du sol n’aurait pas été arrêté par le PAG litigieux tombe à faux.

En ce qui concernant ensuite le degré d’utilisation du sol, l’article 24 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 dispose que : « Pour les zones définies aux articles 8 à 22 et soumises à un plan d’aménagement particulier « nouveau quartier », la détermination du degré d’utilisation du sol est exigée.

Le degré d’utilisation du sol des zones soumises à un plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » est exprimé par le coefficient d’utilisation du sol (CUS), par le coefficient d’occupation du sol (COS) et par le coefficient de scellement du sol (CSS). La densité de logement (DL) doit être fixée pour les zones ou partie de zones telles que définies aux articles 8 et 9. […] ».

En l’espèce, il résulte de la partie graphique du PAG litigieux que la parcelle des demandeurs portant le numéro cadastral … a été superposée d’une zone soumise à un PAP NQ dénommé BK9-« Houlechergaarden », pour laquelle un CUS de 0.38, un COS de 0.25, un CSS de 0.36 et une DL de 14 ont été fixés, de sorte que l’affirmation des demandeurs suivant laquelle le degré d’utilisation du sol n’aurait pas été fixé par le PAG litigieux tombe également à faux.

A cela s’ajoute qu’il ne ressort pas de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 dont la violation est reprochée aux autorités communale et ministérielle ni d’une autre disposition légale, que le PAG devrait fixer le mode et le degré d’utilisation du sol des zones inondables, de sorte que les allégations afférentes des demandeurs sont à rejeter pour ne pas ressortir.

Cette constatation n’est pas énervée par le jugement du tribunal administratif du 23 août 2006, inscrit sous le n° 20975 du rôle, cité par les demandeurs, alors qu’aucun enseignement ne saurait être tiré dudit jugement, dont la jurisprudence n’est plus d’actualité pour se fonder sur un PAG établi sous l’empire de la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes, abrogée par la loi du 19 16juillet 2004 et dont le contenu d’un PAG était fondamentalement différent de celui prévu par la loi du 19 juillet 2004.

Le moyen tendant à une violation de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 est dès lors à rejeter pour ne pas être fondé.

4. Quant à une violation de l’article 33 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 Les demandeurs estiment que la partie graphique du PAG litigieux devrait indiquer la servitude spéciale prévue par l’article 33 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017.

L’article 33 intitulé « Zones de risques naturels prévisibles » du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 dispose que : « Au-delà des zones définies à l’article 38, les zones de risques naturels prévisibles comprennent des fonds ou d’anciens travaux miniers dont l’utilisation du sol peut être soumise à des restrictions, soit du fait de leur configuration géologique alors qu’ils sont soumis à des risques d’éboulement ou de glissements de terrains, soit du fait qu’ils sont susceptibles d’être inondés en cas de crue.

Ces zones sont soumises à des servitudes spéciales définies dans le plan d’aménagement général. Les zones de risques d’éboulement naturel ou de glissements de terrain sont marquées de la surimpression « G ». Les zones de risques d’éboulement miniers sont marquées de la surimpression « M ». Les zones inondables sont marquées de la surimpression « I ». ».

En l’espèce, il se dégage de la partie graphique du PAG litigieux, que celui-ci n’indique effectivement pas de zone de risque naturel prévisible sur les parcelles litigieuses conformément à l’article 33 précité, mais renseigne, en revanche, par une ligne pointillée bleu dénommée « zone inondable » la présence d’une zone inondable sur les parcelles des demandeurs, laquelle est définie par la légende figurant dans cette même partie graphique comme « Zones ou espaces définis en exécution de dispositions spécifiques relatives : […] à la gestion de l’eau Zone inondable (source : crue extrême, Administration de la gestion de l’eau, 2013) ». L’article 24.1 de la partie écrite du PAG litigieux, intitulé « Zones inondables » dispose à cet égard encore que : « Les cartes des zones inondables et les cartes des risques d’inondation pour le cours d’eau de la Moselle ont été déclarées obligatoires par Règlement grand-ducal du 5 février 2015. Le territoire communal est en partie couvert par les zones de protection suivantes, établies en 2013 en application de la loi modifiée du 19 décembre 2008 relative à l’eau :

- zone inondable (10 ans), représentant la zone inondable lors d’une crue modélisée d’un temps de retour de 10 ans telle que demandée par la Directive Inondation 2007/60/CE ;

- zone inondable (100 ans), représentant la zone inondable lors d’une crue modélisée d’un temps de retour de 100 ans telle que demandée par la Directive Inondation 2007/60/CE ;

- zone inondable (extrême), représentant la zone inondable lors d’une crue extrême modélisée telle que demandée par la Directive Inondation 2007/60/CE ».

Force est encore de constater que cette indication résulte d’une application de l’article 38 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 suivant lequel : « Les dispositions légales et réglementaires découlant de la législation concernant l’aménagement général du territoire, la protection de la nature et des ressources naturelles, la protection des sites et monuments 17nationaux, les réseaux d’infrastructures de transport national et la gestion de l’eau sont repris dans la partie graphique et la partie écrite du plan d’aménagement général. ».

Il résulte des articles précités que les dispositions découlant de la législation concernant la gestion de l’eau sont reprises dans la partie graphique et la partie écrite d’un PAG, et qu’au-delà desdites zones, les zones de risques naturels prévisibles comprenant des fonds susceptibles d’être inondés en cas de crue sont soumises à des servitudes spéciales définies dans un PAG et marquées de la surimpression « I ».

Dans la mesure où la zone inondable correspondant à la crue extrême des cartes d’inondations de l’administration de la gestion de l’eau est délimitée dans la partie graphique du PAG sur les fonds litigieux, c’est à juste titre que les parties étatique et communale font valoir qu’une indication supplémentaire sur ce même endroit des zones inondables prévues par l’article 33 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 n’aurait pas présenté la moindre utilité, ledit article 33 ne prévoyant en effet la définition des zones inondables qu’au-delà9 des zones définies à l’article 38.

Cette constatation n’est pas énervée par l’affirmation des demandeurs suivant laquelle un principe de non-constructibilité dans une zone d’inondation devrait être expressément mentionné par le PAG, alors qu’un tel principe de non-constructibilité dans une zone d’inondation ne ressort pas du libellé de l’article 33 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 précité.

Aucune violation de l’article 33 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 ne saurait dès lors être retenue en l’espèce.

5. Quant à une violation de l’article 39 de la loi du 19 décembre 2008 Les demandeurs soutiennent que la partie écrite du PAG laisserait conclure à une constructibilité des terrains classés en zone inondable en violation de l’article 39, paragraphes (2) et (4) de la loi du 19 décembre 2008.

L’article 39, intitulé « Conditions applicables aux installations, ouvrages, travaux ou activités dans les zones inondables » dispose dans son paragraphe (2) que : « Dans une zone urbanisée ou destinée à être urbanisée existante, une construction nouvelle peut être autorisée par le ministre au titre des dispositions des articles 23 à 25 dans la mesure où elle ne fait que combler une lacune dans le tissu construit existant et à condition que toutes les mesures appropriées soient prises pour compenser la perte de volume de rétention ou pour prévenir les dommages pour les personnes, les biens ou l’environnement. », tandis qu’il dispose dans son paragraphe (4) que : « Par dérogation aux dispositions du paragraphe (1), point a), une nouvelle zone urbanisée ou destinée à être urbanisée peut être désignée ou une zone urbanisée ou destinée à être urbanisée existante peut être agrandie ou changée d’affectation, si le volume de rétention perdu peut être compensé et s’il n’en résulte aucune augmentation du risque de dommages pour les personnes, les biens ou l’environnement liés à des inondations, ni à l’intérieur de la zone en question, ni dans des zones inondables situées en amont ou en aval. Ces mesures sont subordonnées à une autorisation du ministre. ».

9 Souligné par le tribunal.

18 Il se dégage de la lecture de l’article 39, paragraphe (2) précité, que celui-ci concerne l’hypothèse où le propriétaire d’une parcelle classée en zone urbanisée ou destinée à être urbanisée et située en zone d’inondation souhaite réaliser une construction, tandis que le paragraphe (4) du même article concerne l’hypothèse d’une désignation d’une nouvelle zone urbanisée ou destinée à être urbanisée, voire d’un agrandissement ou changement d’affectation d’une zone urbanisée ou destinée à être urbanisée existante.

En l’espèce, et en ce qui concerne plus particulièrement le paragraphe (2) de l’article 39 précité, force est de retenir qu’il n’est pas applicable en l’espèce, dans la mesure où il concerne l’hypothèse où le propriétaire d’une parcelle située en zone d’inondation souhaite réaliser une construction et non pas le contenu d’un PAG.

Concernant le paragraphe (4) de l’article 39 précité, celui-ci n’est pas non plus applicable en l’espèce, dans la mesure où, tel que retenu ci-avant, aucune désignation d’une nouvelle zone urbanisée ou destinée à être urbanisée, voire aucun agrandissement ou changement d’affectation d’une telle zone n’est intervenue en l’espèce, les parcelles des demandeurs étaient classées en zone constructible sous l’égide de l’ancien PAG de la commune, et ayant été maintenues en zone constructible par le PAG litigieux. A cela s’ajoute que le classement d’une ancienne « zone périphérique » définie par la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes, en une zone [HAB-1] définie par la loi du 19 juillet 2004 ne saurait être considéré comme création d’une nouvelle zone urbanisée ou destinée à être urbanisée, voire comme changement d’affectation d’une telle zone, alors que les parcelles litigieuses ont tout simplement été classées dans leur corollaire actuel.

Il échet ensuite de constater qu’aucune obligation quelconque ne se dégage de la lecture de l’article 39 en question, d’indiquer, dans un PAG, des éventuelles limites de construction, voire des éventuelles interdictions de construire, en ce qui concerne des parcelles classées en zone inondable. Tel que soutenu à juste titre par la partie communale, l’article en question n’interdit pas non plus le maintien d’une parcelle située en zone inondable dans une zone urbanisée ou destinée à être urbanisée.

Le moyen afférent encourt dès lors le rejet.

6. Quant à la violation du principe de la conservation de la capacité de rétention d’eau local dans les zones d’inondation Les demandeurs affirment que la circonstance que sous le nouveau PAG des remblais sans limites seraient possibles, constituerait une atteinte illégale au principe de la conservation de la capacité de rétention d’eau local dans les zones d’inondation.

Ce moyen est à rejeter pour être simplement suggéré, les demandeurs restant en effet en défaut d’invoquer une quelconque base légale à l’appui de leur affirmation, voire d’établir l’existence d’un principe juridique appelé « principe de la conservation de la capacité de rétention d’eau local dans les zones d’inondation », étant rappelé à cet égard qu’il n’appartient pas au tribunal de suppléer à la carence des parties en prenant position par rapport à un tel moyen simplement suggéré, sans être soutenu effectivement et de rechercher 19lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de ses conclusions10.

Il s’ensuit que les développements afférents des demandeurs sont également à rejeter pour ne pas être fondés.

7. Quant à une violation de l’engagement communal Finalement les demandeurs reprochent encore à la commune de ne pas avoir respecté l’engagement pris dans la délibération du 30 janvier 2020, à savoir celui de compléter l’article 14.1 de la partie écrite du PAG dans l’esprit de l’article 15 de l’ancien PAG.

L’article 15 de l’ancien PAG relatif aux zones inondables disposait que : « […] 15.1.

En cas de construction d’un immeuble sur un terrain intégralement viabilisé longeant directement la voie desservante publique existante en zone inondable, les articles suivants modifient ou complètent les articles relatifs aux différentes zones d’habitation, en vue de prévenir certains dommages pouvant résulter des inondations :

Tout aménagement à usage d’habitation ainsi que toute localisation d’installations techniques et de chaudières sont interdits en sous-sol.

En règle générale, le niveau du terrain naturel est à sauvegarder.

Néanmoins, une modification du niveau naturel du terrain peut être autorisée dans la limite où le remblai ne dépasse pas de plus de 0,5 mètre l’axe de la voie desservante publique existante. Le niveau naturel du terrain servira également de niveau de référence pour les travaux de remblai à autoriser.

Tout changement de terrain supérieur à 0,50 m par rapport au niveau du terrain, doit être défini par un plan d’aménagement particulier.

Toute modification apportée au niveau naturel du terrain doit figurer de manière précise dans les plans de construction avec les indications des levés et doit être expressément approuvée dans le cadre de l’autorisation du projet.

15.2. En cas de construction d’un immeuble sur un terrain non intégralement viabilité et/ou ne longeant pas directement une voie desservante publique existante en zone inondable, de même qu’en cas de lotissement sur des terrains situés en zone inondable tout projet est soumis à l’autorisation préalable de l’Administration de la Gestion de l’Eau, dont les conditions sont à respecter et doivent être scrupuleusement reprises dans le cadre de la demande en autorisation de construire, respectivement dans le cadre du PAP à élaborer. » L’article 14.1 de la partie écrite du PAG concernant les zones soumises à PAP NQ a été complété par le paragraphe suivant : « Tout projet de PAP NQ concernant des terrains situés en zone inondable est soumis à une autorisation préalable des services de l’Etat ayant dans leurs compétences la gestion de l’eau, afin d’en respecter scrupuleusement les conditions émises dans le cadre de l’élaboration dudit PAP et lors de la délivrance d’une 10 Trib. adm., 23 janvier 2013, n° 30455 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 883 et les autres références y citées.

20l’autorisation à bâtir sur les fonds concernés. ».

En l’espèce, force est de constater que c’est à tort que les demandeurs reprochent à la commune une violation de leur engagement de compléter l’article 14.1 de la partie écrite du PAG dans l’esprit de l’article 15 de la partie écrite de l’ancien PAG.

En effet, d’un côté, il ne se dégage pas de la lecture de la délibération du conseil communal du 30 janvier 2020, que celui-ci se serait engagé à reprendre à la lettre le libellé de l’article 15 de la partie écrite de l’ancien PAG, tel que soutenu par les demandeurs, le conseil communal s’étant uniquement engagé à compléter l’article 14.1 de la partie écrite du PAG litigieux dans l’esprit11 de l’article 15 de la partie écrite de l’ancien PAG. De l’autre côté, il échet de constater que l’esprit du paragraphe rajouté à l’article 14.1 de la partie écrite du PAG litigieux est comparable à celui de l’article 15.2. de la partie écrite de l’ancien PAG, précité, en disposant que tout projet de PAP concernant des terrains situés en zone inondable est soumis à une autorisation préalable des services de l’Etat ayant dans leurs compétences la gestion de l’eau.

Cette constatation n’est pas énervée par l’affirmation des demandeurs suivant laquelle l’article 15.1. de la partie écrite de l’ancien PAG, qui aurait été le garant du maintien du niveau du terrain naturel en imposant un remblai maximal de 0,50, mètres n’aurait pas été repris dans l’actuel article 14 de la partie écrite du PAG litigieux.

En effet, et mis à part la circonstance qu’il ressort de la lecture de l’article 15.1. de la partie écrite de l’ancien PAG, qu’un remblai supérieur à 0,50 mètres était admis sous certaines conditions, de sorte que ledit article ne saurait être qualifié de « garant du maintien du niveau du terrain naturel », force est de constater que l’article 15.1. de la partie écrite de l’ancien PAG n’était applicable qu’en cas de construction d’un immeuble sur un terrain intégralement viabilisé longeant directement la voie desservante publique, de sorte qu’une transposition dudit article à l’article 14.1 de la partie écrite du PAG litigieux, uniquement applicable aux terrains situées dans une zone soumise à PAP NQ, aurait été dépourvue de sens.

De l’autre côté et en tout état de cause, il échet de souligner que des dispositions relatives à un éventuel remblai maximal en zone inondable sont, tel que souligné à juste titre par la partie étatique, et tel que retenu déjà ci-avant, à prévoir, le cas échéant, dans le PAP afférent et non pas dans un PAG pris en vertu de la loi du 19 juillet 2004, qui ne fixe plus les prescriptions urbanistiques mais se limite, suivant l’article 5 de ladite loi, à diviser le territoire communal en diverses zones et à définir les règles d’affectation des parcelles.

Le moyen est partant à rejeter pour ne pas être fondé.

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le recours en annulation sous analyse pour n’être fondé en aucun de ses moyens.

Par ces motifs, 11 souligné par le tribunal 21le tribunal administratif, troisième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié partant en déboute ;

condamne les demandeurs aux frais et dépens.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 21 mars 2023 par :

Thessy Kuborn, vice-président, Géraldine Anelli, premier juge, Benoît Hupperich, juge, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 21 mars 2023 Le greffier du tribunal administratif 22


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 45500
Date de la décision : 21/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-03-21;45500 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award