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20/03/2023 | LUXEMBOURG | N°46021

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 20 mars 2023, 46021


Tribunal administratif N° 46021 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:46021 2e chambre Inscrit le 14 mai 2021 Audience publique du 20 mars 2023 Recours formé par la société anonyme “A” SA, …, contre des bulletins émis par l’administration des Contributions directes, en matière d’impôts

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46021 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 14 mai 2021 par Maître Claude Collarini, avocat à la Cour,

inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme “A” SA, ...

Tribunal administratif N° 46021 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:46021 2e chambre Inscrit le 14 mai 2021 Audience publique du 20 mars 2023 Recours formé par la société anonyme “A” SA, …, contre des bulletins émis par l’administration des Contributions directes, en matière d’impôts

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 46021 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 14 mai 2021 par Maître Claude Collarini, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme “A” SA, établie et ayant son siège social à L-…, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, tendant à la réformation, sinon à l’annulation des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités, de l’impôt commercial communal et de l’impôt sur la fortune des années 2013, 2014 et 2015, tous émis le 26 juillet 2017 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 11 octobre 2021 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 11 novembre 2021 par Maître Claude Collarini, au nom de la société demanderesse, préqualifiée ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les bulletins déférés ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Anne-Claire Blondin, en remplacement de Maître Claude Collarini, et Monsieur le délégué du gouvernement Tom Kerschenmeyer en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 16 janvier 2023.

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Par courrier du 3 février 2015, le bureau d’imposition Diekirch de l’administration des Contributions directes, dénommé ci-après le « bureau d’imposition », informa la société anonyme “A” SA, ci-après désignée par « la société “A” », de ce qu’en application du paragraphe 205 (3) de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », il envisageait de s’écarter de la déclaration fiscale de l’année 2013, en ce que l’exonération partielle prévue à l’article 50bis de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, ci-après désignée par « LIR », telle que sollicitée, ne lui serait pas accordée. Ledit courrier est libellé comme suit :

« […] L’exonération partielle (80%) prévue par l’article 50 bis de la loi concernant l’impôt sur le revenu (L.I.R.) n’est pas à accorder à votre égard pour ce qui est de l’ année 2013.

1En effet, s’il est certes vrai que juridiquement, la demande d’enregistrement de la marque » … « a été déposée le 15/04/2008, il n’en reste pas moins que la S.A. “B” a déjà commercialisé les produits couverts par cette marque bien avant les dates de dépôt officiel en matière de propriété intellectuelle, de sorte qu’il s’impose de conclure qu’en l’occurrence la date effective (non seulement juridique) de constitution de la marque en question ne se confond aucunement avec les dates de dépôt des demandes respectives d’enregistrement , la date de dépôt du Brevet était le 24/05/2006.

Il s’ensuit que la condition renfermée au numéro 1 de l’alinéa (4) de l’article 50 bis de la loi concernant l’impôt sur le revenu (L.I.R.) , à savoir que le droit doit avoir été constitué ou acquis après le 31/12/2007 ne se trouve pas remplie en l’espèce.

S’y ajoute que même s’il est admis en droit fiscal que le contribuable demeure à lui seul juge de l’opportunité de ses démarches commerciales et qu’il est , en général, entièrement libre de choisir pour l’exploitation de son entreprise la forme qui lui semble la plus appropriée, il est néanmoins de principe (cf. paragraphes 5,6 et 11 de la loi d’adaptation fiscale (St.AnpG)) et de jurisprudence constante que les faits et actes juridiques doivent fiscalement être interprétés et appréciés d’après des critères économiques.

En matière des impôts il s’agit de prendre en compte la réalité des faits et de négliger les apparences juridiques ayant pour seul effet de masquer la réalité des faits . […] ».

Dans le même courrier, le bureau d’imposition invita encore la société “A” à lui soumettre sa prise de position pour le 20 février 2015 au plus tard.

Par courrier de sa fiduciaire du 17 mars 2015, la société “A” prit position quant à ce courrier du bureau d’imposition du 3 février 2015.

Le 26 juillet 2017, le bureau d’imposition émit à l’égard de la société “A” les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités, les bulletins de l’impôt commercial communal et les bulletins de l’impôt sur la fortune des années 2013, 2014 et 2015, de même que les bulletins d’établissement de la valeur unitaire aux 1er janvier 2013, 2014 et 2015.

Par courrier du 4 octobre 2017, réceptionné le lendemain, la société “A” introduisit auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le directeur », une réclamation à l’encontre de ces bulletins d’imposition.

A défaut de réponse du directeur, la société “A” a, par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 14 mai 2021, fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités, de l’impôt commercial communal et de l’impôt sur la fortune des années 2013, 2014 et 2015.

I) Quant à la compétence du tribunal Conformément aux dispositions combinées du paragraphe 228 AO et de l’article 8, paragraphe (3), point 3. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, le tribunal est compétent pour statuer comme juge du fond sur le recours dirigé par un contribuable contre la décision qui a fait l’objet d’une réclamation de sa part dans l’hypothèse où aucune décision définitive du directeur n’est intervenue dans un délai de six mois à partir de la réclamation.

2 Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours principal en réformation dirigé contre les bulletins déférés.

Un recours en réformation étant prévu, il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

II) Quant à la recevabilité du recours A) Quant au moyen ayant trait à l’irrecevabilité du recours, en ce qu’il vise les bulletins de l’impôt sur la fortune des années 2013 à 2015 Arguments des parties Dans son mémoire en réponse et en ce qui concerne le volet du recours visant les bulletins de l’impôt sur la fortune des années 2013 à 2015, le délégué du gouvernement fait valoir qu’une imposition qui est assise en tout ou en partie sur des bases fixées par établissement séparé ne pourrait être attaquée pour le motif que ces bases d’imposition seraient inexactes, une telle réclamation ne pouvant être formée que contre le bulletin portant établissement séparé, en l’espèce les bulletins de l’établissement séparé de la valeur unitaire de la fortune d’exploitation aux 1er janvier 2013, 2014 et 2015, le représentant étatique relevant encore que l’éventuelle réformation du bulletin d’établissement séparé entraînerait d’office un redressement du bulletin d’impôt établi sur base dudit bulletin d’établissement séparé, conformément au paragraphe 218 (4) AO.

En effet, suivant les dispositions du paragraphe 213 (1) AO, l’établissement de la fortune constituerait la base indissociable de la liquidation de l’impôt sur la fortune qui ne serait pas susceptible en elle-même de faire l’objet d’une voie de recours.

Dès lors, l’établissement de la fortune ne serait pas attaquable comme chef distinct du bulletin de l’impôt sur la fortune, mais devrait être attaqué dans le cadre d’un recours dirigé contre le bulletin d’établissement proprement dit.

Le délégué du gouvernement en déduit que le recours serait à déclarer irrecevable, en ce qu’il vise les bulletins de l’impôt sur la fortune des années 2013 à 2015.

La société demanderesse se rapporte à prudence de justice quant à ce moyen d’irrecevabilité.

Appréciation du tribunal Aux termes du paragraphe 232 AO, invoqué par le délégué du gouvernement :

« (1) Einen Steuerbescheid kann der Steuerpflichtige nur deshalb anfechten, weil er sich durch die Höhe der festgesetzten Steuern oder dadurch beschwert fühlt, dass die Steuerpflicht bejaht worden ist.

(2) Liegen einem Steuerbescheid Entscheidungen zugrunde, die in einem Feststellungsbescheid oder in einem Steuermessbescheid getroffen worden sind, so kann der Steuerbescheid nicht mit der Begründung angefochten werden, dass die in dem 3Feststellungsbescheid oder in dem Steuermessbescheid getroffenen Entscheidungen unzutreffend seien. Dieser Einwand kann nur gegen den Feststellungsbescheid oder gegen den Steuermessbescheid erhoben werden. ».

Aux termes du paragraphe 213 AO :

« (1) Die Feststellung der Besteuerungsgrundlagen bildet regelmässig einen unselbständigen (mit Rechtsmitteln nicht selbständig anfechtbaren) Teil des Steuerbescheids.

(2) In den Fällen der §§ 214 und 215 (nach näherer Massgabe des § 220 Ziffer 2 auch in anderen Fällen) werden die Besteuerungsgrundlagen gesondert festgestellt. Hierüber wird ein schriftlicher Feststellungsbescheid erteilt. Die gesonderte Feststellung bildet, auch wenn sie mit der Steuerfestsetzung in einem Bescheid vereinigt ist, eine selbständige (mit Rechtsmitteln selbständig) anfechtbare Entscheidung. » Etant donné (i) que la société demanderesse critique en l’espèce les bulletins de l’impôt sur la fortune des années 2013 à 2015 en réalité uniquement en ce qui concerne la détermination de la fortune d’exploitation aux 1er janvier 2013, 2014 et 2015, sans formuler des critiques quant à la cote d’impôt en tant que telle, (ii) que la fortune d’exploitation n’a pas été fixée dans les bulletins de l’impôt sur la fortune, mais à travers les bulletins d’établissement de la valeur unitaire aux 1er janvier 2013, 2014 et 2015, formant en application du paragraphe 213 AO des bulletins autonomes susceptibles de voies de recours, et (iii) qu’en application du paragraphe 232 (2) AO, précité, si une imposition est assise en tout ou partie sur des bases fixées par établissement séparé, celle-ci ne peut être attaquée pour le motif que ces bases seraient inexactes, une telle réclamation ne pouvant être formée que contre le bulletin portant établissement séparé, le recours en réformation encourt l’irrecevabilité en ce qu’il vise les bulletins de l’impôt sur la fortune des années 2013, 2014 et 2015.

B) Quant au moyen ayant trait à l’irrecevabilité du recours, en ce qu’il vise le bulletin de l’impôt commercial communal de l’année 2013 Arguments des parties Le délégué du gouvernement soulève encore l’irrecevabilité du recours, en ce qu’il vise le bulletin de l’impôt commercial communal de l’année 2013.

A cet égard, il soutient (i) qu’en vertu du paragraphe 232 (1) AO, un bulletin d’impôt ne pourrait être attaqué qu’au cas où le contribuable se sent lésé par le montant de l’impôt fixé ou conteste son assujettissement à l’impôt, (ii) qu’en l’espèce, le montant de l’impôt commercial communal de l’année 2013 aurait été fixé à … euro et (iii) que la société demanderesse ne prétendrait pas à la fixation d’une cote d’impôt positive.

Ainsi, le volet du recours visant le bulletin de l’impôt commercial communal de l’année 2013 devrait être déclaré irrecevable pour défaut d’intérêt à agir dans le chef de la société demanderesse.

La société demanderesse se rapporte à prudence de justice quant à ce moyen d’irrecevabilité.

4Analyse du tribunal Le tribunal rappelle qu’aux termes du paragraphe 210 (1) AO « Nach Abschluss seiner Ermittlungen setzt das Finanzamt durch Steuerbescheid die Steuer fest ».

D’après le paragraphe 213 (1) AO, « Die Feststellung der Besteuerungsgrundlagen bildet regelmäßig einen unselbstständigen (mit Rechtsmitteln nicht selbständig anfechtbaren) Teil des Steuerbescheids » et au vœu du paragraphe 232 (1) AO, un contribuable ne peut réclamer contre un bulletin que pour autant que la cote d’impôt ou l’affirmation de l’imposabilité y contenue lui causent grief.

Il découle de ces dispositions combinées que l’élément décisionnel d’un bulletin d’impôt stricto sensu consiste dans la fixation d’une cote d’impôt à charge du contribuable et que les bases d’imposition constatées dans ce bulletin sous-tendent certes la fixation de la cote d’impôt pour en constituer en quelque sorte la motivation, mais ne constituent en elles-mêmes pas un élément décisionnel propre. C’est dans cette logique que le seul élément décisionnel de la cote d’impôt est susceptible d’acquérir force de chose décidée et que le paragraphe 232 (1) AO n’admet un recours que contre un bulletin d’impôt mettant à la charge du contribuable visé une obligation positive de payer une certaine cote d’impôt, entraînant qu’un bulletin ne fixant pas de cote d’impôt positive ne saurait partant en principe ouvrir le droit à réclamation, faute de charge fiscale imposée au contribuable lui causant grief.

Il n’est pas dérogé à ce principe dans l’hypothèse d’un bulletin fixant une cote d’impôt égale à zéro et qui reconnaît en plus une perte dans le chef du contribuable au titre de l’exercice en question. La perte retenue dans un tel bulletin n’a pas la valeur d’une décision définitive et irrévocable pour les années d’imposition ultérieures au cours desquelles la perte donnera lieu à un report de perte. La détermination définitive et irrévocable de cette perte n’aura lieu que dans le bulletin relatif à l’année d’imposition pendant laquelle le report de perte sera pris en considération pour se répercuter sur la cote d’impôt.1 Etant donné qu’en l’espèce, le bulletin de l’impôt commercial communal de l’année 2013 fait état d’une cote d’impôt nulle, il n’est pas de nature à faire grief, de sorte que le recours est irrecevable dans la mesure où il est dirigé contre le bulletin en question.

A défaut d’autres moyens d’irrecevabilité, le recours principal en réformation, en ce qu’il vise les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités des années 2013 à 2015, ainsi que les bulletins de l’impôt commercial communal des années 2014 et 2015, est à déclarer recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi.

III) Quant au fond Moyens et arguments des parties A l’appui de son recours, la société demanderesse expose les faits et rétroactes gisant à la base des bulletins déférés.

Plus particulièrement, elle explique que le 13 juin 2005, la société anonyme “B” SA, ci-après désignée par « la société “B” », constituée le 4 octobre 2005 et liquidée volontairement 1 Trib. adm., 4 février 1998, n° 9850 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Impôts, n° 1163 et les autres références y citées.

5en 2019, aurait fait déposer une demande auprès du ministère de l’Economie et du Commerce extérieur, direction de la Propriété intellectuelle, visant à l’obtention d’un brevet d’invention pour un « […] procédé et système d’économie d’énergie dans un bâtiment avec ascenseur […] ». Cette invention, qui porterait plus précisément sur un procédé de gestion d’énergie dans un bâtiment comprenant une installation de levage avec une cabine mobile dans une gaine et un passage de ventilation entre la gaine et l’atmosphère, aurait fait l’objet d’un brevet enregistré sous le numéro …, délivré par arrêté du ministre de l’Economie et du Commerce extérieur du 14 décembre 2006, ci-après désigné par « le Brevet ».

Le 24 mai 2006, la société “B” aurait déposé auprès de l’Office européen des brevets un brevet pour son « […] procédé et système de gestion d’énergie thermique dans un bâtiment avec gaine pour installations de levage […] ». La demande d’obtention d’un brevet européen aurait été publiée le 27 février 2008 et le brevet européen aurait été délivré le 3 septembre 2008 sous le numéro …, ce dernier étant ci-après désigné par « le Brevet Européen ».

La société demanderesse continue, en expliquant qu’elle-même aurait été constituée le 26 février 2008, afin d’assurer le développement et la commercialisation des brevets déposés par la société “B”, et qu’ainsi, cette dernière lui aurait, par convention du 27 février 2008, cédé et transféré « […] la propriété pleine et entière, sans aucune restriction ni réserve, de ses droits à l’obtention de titres de propriété industrielle pour la protection de l’invention, pour l’ensemble des pays du monde […] », moyennant paiement de la somme de … euros, avec la précisions que « […] Lesdits titres pourront notamment consister en des demandes de brevets, des brevets, des continuations, des demandes divisionnaires ou tout autre moyen de protection des inventions […] ».

Après avoir cité le préambule de cette convention, la société “A” précise que la preuve du transfert de propriété du Brevet à son profit se dégagerait du « Procès-verbal de transfert » dressé le 28 mai 2008 par le ministère de l’Economie et du Commerce extérieur.

Par courrier du 16 avril 2008, la société anonyme “C” SA, ci-après désignée par « la société “C” », aurait transmis une copie de ladite convention à l’Office européen des brevets en vue de procéder au transfert du Brevet européen déposé par la société “B” au profit de la société demanderesse.

Par ailleurs, la société “A” explique que le 15 avril 2008, elle aurait déposé la marque « ”M” » auprès de l’Office Benelux de la propriété intellectuelle (« OBPI »), cette marque ayant été enregistrée le 16 avril 2008 sous le numéro …. Ladite marque aurait encore été enregistrée par la société demanderesse auprès de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle en date du 29 septembre 2008, sous le numéro ….

Dans ce contexte, la société “A” insiste sur le fait qu’il n’y aurait aucun lien entre la marque « ”M” », d’une part, et le Brevet, ainsi que le Brevet européen, d’autre part, tout en soulignant qu’au jour de la signature de la convention, précitée, du 27 février 2008, la société “B” n’aurait à aucun moment commercialisé le Brevet, de sorte à ne jamais avoir perçu un quelconque revenu à ce titre.

Elle ajoute qu’elle aurait acquis le Brevet « […] dans un état « vierge » […] », dans l’optique de le développer et de le commercialiser, et ce sur base d’un « business plan » mûrement réfléchi.

6Ce ne serait ainsi qu’à partir de l’année 2012 qu’elle aurait commencé à générer des revenus liés au développement et à la commercialisation du Brevet européen.

Dans sa déclaration fiscale pour l’année 2013, elle aurait sollicité l’application de l’exonération fiscale de 80 % des revenus d’exploitation de son brevet, sur base des dispositions de l’article 50bis LIR, tel qu’introduit par la loi du 21 décembre 2007 portant notamment modification de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu et de la loi modifiée du 1er mars 1952 modifiant certaines dispositions relatives aux impôts directs, ci-après désignée par « la loi du 21 décembre 2007 », ce qui lui aurait cependant été refusé à travers les bulletins déférés.

En droit, la société “B” soutient que ledit article 50bis LIR soumettrait le bénéfice de l’exonération y prévue aux conditions cumulatives suivantes : (i) le droit de propriété intellectuelle concerné devrait avoir été constitué ou acquis après le 31 décembre 2007, (ii) les dépenses, amortissements et déductions pour dépréciation en rapport avec ce droit seraient à porter à l’actif du bilan du contribuable et à intégrer dans le résultat au titre du premier exercice pour lequel l’application des dispositions des alinéas 1er à 3 dudit article entre en ligne de compte pour autant que pour un exercice donné ces frais auraient dépassé les revenus en rapport avec ce même droit et (iii) le droit concerné ne devrait pas avoir été acquis d’une personne ayant la qualité de société associée.

Ces conditions seraient remplies, en l’espèce.

Quant à la première de ces trois conditions, qui, selon les travaux parlementaires relatifs à la loi du 21 décembre 2007, viserait avant tout à exclure des mesures favorables de l’article 50bis LIR tous les droits non récemment constitués ou acquis notamment afin de cultiver de nouvelles idées et de promouvoir des concepts innovateurs, la société demanderesse soutient qu’elle serait remplie, étant donné qu’elle aurait acquis de la part de la société “B” les « […] droits à l’obtention de titres de propriété industrielle pour la protection de l’invention […] » par convention du 27 février 2008, de sorte à avoir acquis la propriété des droits de propriété intellectuels litigieux après le 31 décembre 2007, la société “A” rappelant, dans ce contexte, que la preuve du transfert du Brevet serait rapportée au vu du susdit « Procès-verbal de transfert » et que celle de la propriété du Brevet européen se dégagerait de la pièce intitulée « Fascicule de brevet européen », telle que versée par elle.

Quant à la deuxième des trois conditions susmentionnées, la société “A” explique que les dépenses, amortissements et déductions pour dépréciation en rapport avec les droits en cause auraient été portés à l’actif de son bilan et auraient été intégrés dans son résultat, dans le strict respect des dispositions de l’article 50bis (4) LIR, la société demanderesse ajoutant qu’aucune remarque n’aurait été faite à cet égard par le bureau d’imposition.

S’agissant de la troisième desdites conditions, la société demanderesse, après avoir cité les travaux parlementaires relatifs à la loi du 21 décembre 2007, ainsi que la circulaire du directeur des contributions L.I.R. n° 50bis/1 du 5 mars 2009, ci-après désignée par « la Circulaire », insiste sur le fait qu’elle-même et la société “B” constitueraient deux entités distinctes et indépendantes d’un point de vue tant économique que juridique. Plus particulièrement, la société “B” n’aurait jamais eu la qualité de société associée de la société “A”.

La société demanderesse conclut que dans la mesure où elle remplirait l’ensemble des conditions posées par l’article 50bis LIR pour les années d’imposition litigieuses, 7l’administration des Contributions directes aurait dû lui accorder le bénéfice de l’exonération partielle sollicitée.

Par ailleurs, la société “A” réfute l’argumentation développée par le bureau d’imposition dans son courrier, précité, du 3 février 2015.

A cet égard, elle explique que l’objectif initial de la société “B” aurait été de rendre ses droits de propriété intellectuelle économiquement attrayants à travers le développement et la documentation d’un « business plan » sur l’application desdits droits dans l’industrie de l’ascenseur et dans l’industrie de la climatisation. Il se serait toutefois rapidement avéré que ladite société n’aurait pas disposé des ressources financières suffisantes pour lui permettre de développer et d’exploiter ses brevets. La société “B” aurait ainsi eu le choix de rester propriétaire d’un brevet avec un certain potentiel de mise en application mais sans pouvoir le monnayer ou de mettre ce brevet à disposition de tous les acteurs du marché et de réaliser des bénéfices commerciaux en leur faisant concurrence avec des produits et systèmes innovants.

Ce serait ainsi que la société “B” aurait décidé de céder son brevet luxembourgeois à la société “A” ayant comme but la commercialisation internationale dudit brevet.

La constitution de la société “A” en vue du développement et de la commercialisation des droits de propriété intellectuelle en cause aurait donc été motivée par des considérations économiques valables et réelles et non pas par une soi-disant volonté d’optimisation fiscale, contrairement à l’argumentation du bureau d’imposition.

La société demanderesse donne encore à considérer que la volonté du législateur, en introduisant l’article 50bis dans la LIR, aurait été de faire bénéficier d’un régime fiscal favorable le contribuable qui supporterait effectivement des dépenses de recherche et de développement et qui en tirerait certains revenus. Dans ce contexte, la société “A” réitère ses développements selon lesquels le Brevet lui aurait été transmis « […] dans un état vierge […] » par la société “B”, qui ne l’aurait jamais commercialisé auparavant et qui n’en aurait tiré aucun revenu, de même que ses explications ayant trait à l’absence de liens entre la marque « ”M” » – qui n’aurait jamais été commercialisée, que ce soit par elle-même ou par la société “B” –, d’une part, et le Brevet, ainsi que le Brevet européen, d’autre part.

La société “A” reproche à cet égard au bureau d’imposition d’avoir confondu cette marque et ces brevets.

Elle continue, en expliquant qu’immédiatement après l’acquisition des droits litigieux en février 2008, elle aurait supporté d’importantes dépenses de recherche et de développement en vue de les commercialiser. Les dépenses exposées par elle pour générer, à partir de l’année 2012, des revenus en relation avec le développement et la commercialisation des brevets ne seraient nullement fictives, mais auraient été dûment documentées auprès de l’administration fiscale.

Elle insiste sur le fait que contrairement à ce que soutiendrait le bureau d’imposition, la marque « ”M” » n’aurait jamais été commercialisée, que ce soit par elle-même ou par la société “B”.

En citant un extrait des travaux parlementaires relatifs à la loi du 21 décembre 2007, la société demanderesse précise encore que sa constitution aurait permis d’assurer le développement et la commercialisation des brevets litigieux et de satisfaire par la même 8occasion aux objectifs prônés par le législateur, qui, aux termes desdits travaux parlementaires, seraient ceux « […] d’accroître la visibilité du Luxembourg en tant que centre de compétence en matière de propriété intellectuelle […] », de « […] renforcer l’éventail de dispositifs existants en la matière en vue de stimuler les activités de recherche et de développement, ainsi que les activités innovantes au Luxembourg […] » et « […] d’inciter les entreprises à acquérir de la propriété intellectuelle afin de valoriser leurs activités […] ».

Dans ce contexte, la société demanderesse précise qu’il serait de jurisprudence que dans la mesure où l’article 50bis LIR consacrerait une exemption partielle, seuls pourraient bénéficier de cette disposition les revenus nets répondant à la finalité mise en avant par le législateur d’une « stratégie cohérente et concertée visant à créer à terme une chaîne de valeur pour l’ensemble des activités liées à la propriété intellectuelle : création, protection et exploitation » et qui seraient le produit d’une exploitation effective des droits de propriété intellectuelle visés.

Or, les activités de la société “A” tendraient légitiment à la poursuite de tels objectifs, et partant à la création de la « chaîne de valeur » souhaitée par le législateur.

La société demanderesse donne encore à considérer qu’il ne serait nullement exigé qu’afin de pouvoir invoquer l’application des dispositions de l’article 50bis (1) LIR, le propriétaire du droit de propriété intellectuelle concerné en soit également le créateur, l’inventeur ou le déposant initial. Elle en déduit que sa création pour assurer le développement et la commercialisation des droits de propriété intellectuelle en cause serait parfaitement valable et ne se heurterait à aucun obstacle juridique. Ainsi, l’acquisition, par elle, des droits litigieux ne saurait être assimilée à une utilisation inadéquate de formes et d’institutions de droit privé ayant comme seul but une économie d’impôt.

En conclusion, la société “A” soutient qu’elle remplirait, d’un point de vue tant formel qu’économique, les conditions posées par l’article 50bis LIR pour pouvoir bénéficier, par rapport aux années d’imposition litigieuses, de l’exonération partielle revendiquée, de sorte que les bulletins déférés, à travers lesquels cette exonération lui aurait été refusée, devraient encourir la réformation.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours.

Quant à la condition prévue par l’article 50bis (4), point 1. LIR, ayant trait à la date de constitution ou d’acquisition du droit concerné, le représentant étatique réfute l’argumentation de la société demanderesse selon laquelle il n’y aurait pas de lien entre la marque « ”M” », d’une part, et le Brevet, ainsi que le Brevet européen, d’autre part.

A cet égard, il se prévaut des modèles 750 annexés aux déclarations fiscales de la société “A” des années d’imposition litigieuses, en précisant que si, certes, cette dernière y avait, à chaque fois, coché la case « brevet (demande de brevet) ou modèle d’utilité », il n’en resterait pas moins qu’elle y aurait indiqué que les demandes d’enregistrement auraient été déposées les 24 mai 2006 et 15 avril 2008, respectivement que les numéros de dépôt d’enregistrement seraient le …, le … et le ….

Or, une recherche sur internet aurait révélé que le dépôt de l’enregistrement du droit de propriété intellectuel effectué le 15 avril 2008 sous le numéro … correspondrait à la marque « “M” ». La date du 24 mai 2006 et le numéro … seraient en relation avec la demande 9d’enregistrement du Brevet européen. Ainsi, la société demanderesse aurait, par ses propres soins, déclaré que les redevances perçues au cours des années litigieuses seraient en relation avec le brevet d’invention et la marque « “M” », contrairement à ses affirmations faites à l’appui de sa réclamation introduite le 5 octobre 2017 et du présent recours.

Par ailleurs, il se dégagerait d’une pièce justificative communiquée à l’administration des Contributions directes par la société demanderesse en date du 7 juillet 2009 que le numéro … correspondrait à la marque « ”B” » enregistrée auprès de l’OBPI le 29 novembre 2007 au nom de la société “A”. La même pièce ferait encore état d’une marque « ”M1” » enregistrée à la même date auprès de l’OBPI sous le numéro …. Cette dernière marque aurait encore été enregistrée le 29 avril 2008 au nom de la société demanderesse auprès de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (« EUIPO ») et de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (« WIPO »), sous le numéro ….

Le délégué du gouvernement précise encore qu’il ressortirait d’un article de presse publié sur le site internet « … », qu’un produit dénommé « ”M1”-”B” » serait proposé en location et en leasing par la société “B”. En citant des extraits du site internet « www.”M1”.de », le représentant étatique soutient « […] qu’à chaque fois où il [serait] question du brevet d’invention n° … [seraient] cités dans un même souffle les noms « “M1” » et « “B” », en l’occurrence ceux enregistrés au nom de [la société “A”] […] ».

Dans ce contexte, le délégué du gouvernement donne à considérer que les factures en relation avec le contrat de licence conclu le 21 juin 2012 entre les sociétés “A” et “B” concernant l’usage du Brevet européen contiendraient toutes la mention « […] Licence “M1” […] », de sorte qu’il serait manifeste que le Brevet européen aurait été commercialisé sous le nom « “M1” », respectivement sous le nom « “M1”-”B” ».

Il en déduit que les noms et marques « ”M1” » et « ”B” » constitueraient des parties indissociables de ce brevet. Etant donné que ces marques n’auraient pas été enregistrées après le 31 décembre 2007, la condition inscrite à l’article 50bis (4), point 1. LIR ne serait pas remplie en l’espèce.

Quant à la condition inscrite à l’article 50bis (5) LIR, selon laquelle le droit en question ne devrait pas avoir été acquis d’une personne ayant la qualité de société associée, le délégué du gouvernement soutient qu’il se dégagerait des statuts respectifs des sociétés “A” et “B” que ces dernières seraient bien à considérer comme étant des sociétés associées, contrairement à l’argumentation de la société demanderesse.

A cet égard, il souligne qu’il se dégagerait de l’acte constitutif de la société “B”, ayant cédé le droit litigieux à la société “A” par convention du 27 février 2008, que le capital social de la société cédante aurait été détenu à parts égales par les sociétés anonymes “D” SA et “E” SA, ci-après désignées respectivement par « la société “D” » et « la société “E” ». L’acte constitutif de la société “A” renseignerait que le capital de celle-ci serait détenu à parts égales par ces deux dernières sociétés, ainsi que par la société à responsabilité limitée “F” SARL, ci-

après dénommée « la société “F” ».

En rappelant qu’en vertu des dispositions combinées des paragraphes 170 AO et suivants, ainsi que de l’article 59 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, la charge de la preuve des faits libérant de l’obligation fiscale ou réduisant la cote d’impôt appartiendrait au contribuable, le délégué du 10gouvernement soutient qu’il appartiendrait à la société demanderesse de prouver que la condition inscrite à l’article 50bis (5) LIR, précité, est remplie en l’espèce, en versant les contrats de cession de ses actions par les sociétés “D” et “E” au profit des sieurs …, ainsi que … et … à une date antérieure à celle de la cession du Brevet européen.

A défaut de cette preuve, il y aurait lieu de conclure que le droit litigieux aurait été acquis d’une personne ayant la qualité de société associée, au sens de l’article 50bis (5) LIR, de sorte que la société demanderesse ne saurait valablement prétendre à l’octroi de l’exonération sollicitée par elle.

La conclusion selon laquelle les sociétés “A” et “B” seraient à qualifier de sociétés associées serait corroborée par une demande de décision anticipée adressée au bureau d’imposition, dans le cadre de laquelle les sociétés “D” et “E” figureraient comme actionnaires tant de la société demanderesse que de la société “B”.

Le délégué du gouvernement expose encore qu’il se dégagerait du préambule du susdit contrat de licence que la société demanderesse serait le propriétaire, non seulement du Brevet européen, mais aussi du savoir-faire y relatif. Après avoir cité les articles 2 et 4 de ce contrat, le représentant étatique souligne qu’à travers le contrat en question, la société demanderesse mettrait à disposition de la société “B” non seulement la concession de l’usage du Brevet européen, mais aussi son savoir-faire.

Il s’ensuivrait que la société “A” percevrait non seulement des revenus pour l’usage ou la concession de l’usage du susdit brevet, qui tomberaient dans le champ d’application de l’article 50bis (1) LIR, mais encore des revenus ordinaires, pleinement imposables.

Or, dans l’hypothèse où les conditions de l’article 50bis LIR auraient été remplies, il aurait appartenu à la société demanderesse de ventiler les recettes perçues, d’une part, en redevances éligibles au régime de faveur et, d’autre part, en revenus pleinement imposables.

A défaut d’une telle ventilation et de preuve de revenus qualifiables de redevances, il y aurait lieu de conclure que les conditions de l’article 50bis LIR ne seraient pas remplies.

Par ailleurs, le délégué du gouvernement soutient que le 15 octobre 2015, le Bundespatentgericht allemand aurait retenu dans le cadre d’une demande en nullité du Brevet européen que ce dernier serait à invalider sur le territoire allemand. Or, il se dégagerait de l’annexe 2 du contrat de licence du 21 juin 2012 que depuis le 1er décembre 2013, la société “B” aurait été autorisée à accorder une sous-licence à la société de droit allemand “M1” Factory, de sorte que les redevances perçues par la société “A” trouveraient in fine leur origine en Allemagne. Ainsi, à défaut d’enregistrement en bonne et due forme du Brevet européen dans ce dernier pays, la déduction antérieurement opérée devrait, en application des dispositions du dernier alinéa de l’article 50bis (2), alinéa 2 LIR, être ajoutée au bénéfice imposable de l’exercice d’exploitation au cours duquel le refus a été notifié au contribuable, en l’occurrence le revenu imposable de l’année 2015.

En conclusion, le délégué du gouvernement soutient que les bulletins déférés seraient à confirmer dans leur intégralité.

11Dans son mémoire en réplique, la société “A” rappelle qu’elle aurait déposé la marque « ”M” » auprès de l’OBPI le 15 avril 2008, soit après le 31 décembre 2007, sous le numéro … et que cette marque aurait été enregistrée le 16 avril 2008 sous le numéro ….

Quant à la marque « ”M1” », elle aurait été déposée auprès de l’OBPI le 7 novembre 2007.

Or, ces deux marques ne seraient pas à confondre.

La marque « ”M” » aurait dû servir d’outil marketing et aurait été déposée dans l’optique de pouvoir la céder à un « ascensoriste » qui aurait alors pu « […] vendre des ascenseurs avec cette marque […] », une telle vente ne s’étant toutefois jamais produite. Ainsi, ladite marque n’aurait jamais été commercialisée, que ce soit par la société “A” ou par la société “B”. Les revenus indiqués dans les déclarations fiscales des années litigieuses résulteraient, d’ailleurs, de la commercialisation du Brevet européen, et non pas de l’utilisation de la marque « ”M” ».

La marque « ”M1” » aurait été développée par la société “B” et déposée pour désigner certains produits et services. Cette dernière société aurait, par la suite, autorisé la société de droit allemand “G” GmbH à utiliser la marque en question. Le groupe allemand “G” aurait fait usage de cette marque et aurait conçu après quelques années un système dénommé « ”M1” “B” », lequel consisterait en un clapet de ventilation à placer devant l’ouverture extérieure de la gaine d’un ascenseur ou de la gaine technique. La dénomination « ”M1” “B” » désignerait ainsi le produit développé par le groupe “G”, à l’époque en collaboration avec la société “B”, et non pas une marque.

Ce serait, dès lors, à tort que le délégué du gouvernement soutiendrait que le Brevet européen aurait été commercialisé sous le nom « ”M1” », respectivement sous le nom « ”M1”-

”B” » et que ledit brevet serait indissociable de la marque « ”M1” ».

Les droits concédés par la société “A” à des tiers en relation avec le Brevet européen, d’une part, et cette dernière marque, d’autre part, seraient parfaitement dissociables. La société demanderesse en veut pour preuve le fait que par le biais d’un contrat intitulé « Trademarks sub-license agreement », elle aurait accordé à la société de droit allemand “H” GmbH un droit d’usage de la marque « ”M1” », indépendamment de toute référence au Brevet européen et de tout droit sur celui-ci.

Par ailleurs, la société demanderesse réfute l’argumentation du délégué du gouvernement ayant trait à l’absence de ventilation entre les redevances susceptibles de tomber dans le champ d’application de l’article 50bis LIR et des revenus pleinement imposables.

A cet égard, elle fait valoir que si l’article 4, alinéa 1er du susdit contrat de licence du 21 juin 2012, qui aurait été préparé par la société “C”, indique certes que « […] der Lizenznehmer erhält eine einfache Lizenz zur Benutzung der Vertragsschutzrechte und des Know-How des Lizenzgebers zur Herstellung und zum Verkauf von Systemen sowie im Vertragsgegenstand (3) erwähnt […] », il n’en resterait pas moins qu’elle n’aurait jamais développé de tels systèmes, ni même participé à leur conception, ce d’autant plus qu’elle n’aurait commencé à commercialiser le Brevet européen qu’à partir de l’année 2012, de sorte qu’elle n’aurait eu aucun savoir-faire à apporter à la société “B”.

12La société demanderesse estime que dans ces circonstances, il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir « […] scindé le contrat de licence en question […] » pour déterminer la quote-part du revenu susceptible de tomber dans le champ d’application de l’article 50bis LIR.

Elle ajoute qu’au stade précontentieux, l’administration des Contributions directes ne lui aurait jamais demandé de procéder à une telle ventilation de ses revenus, de sorte que le fait de l’empêcher de bénéficier de l’exonération fiscale prévue par cette dernière disposition légale serait constitutif d’une rigueur excessive.

Par ailleurs, elle réfute l’argumentation du délégué du gouvernement selon laquelle elle aurait acquis le droit litigieux d’une société associée.

A cet égard, elle fait valoir que la société “B” n’aurait jamais détenu de participation dans son capital social et qu’elle-même n’aurait jamais détenu de participation dans le capital social de la société “B”, de sorte que les hypothèses visées aux points a. et b. de l’article 50bis (5) LIR2 ne seraient pas vérifiées en l’espèce.

Quant à l’hypothèse visée au point c. de cette disposition légale, à savoir celle où le capital social de la personne de laquelle le droit concerné a été acquis « […] est détenu directement à raison d’au moins 10% par une troisième société et que celle-ci détient une participation directe d’au moins 10% dans le capital de la société bénéficiaire du revenu […] », celle-ci ne serait pas non plus remplie.

Sur ce point, la société demanderesse dresse l’historique des différentes cessions d’actions de la société “B” intervenues depuis sa création, pour soutenir qu’au jour de la signature de la convention de cession du droit litigieux, le capital social de cette dernière société aurait été détenu par Monsieur …, Monsieur … et Monsieur …, à parts égales de 110 actions.

Quant à la demande de décision anticipée dont se prévaut le délégué du gouvernement dans ce contexte et qui aurait été formulée par la société “I” à travers un courrier du 18 octobre 2007, la société “A” fait valoir que celle-ci aurait porté sur la faisabilité d’une restructuration éventuelle de la société “B”, mais que le projet en question aurait été rapidement abandonné.

La société demanderesse ajoute qu’au jour de la rédaction du susdit courrier, l’actionnariat de la société “B” aurait d’ores et déjà été composé de Monsieur …, Monsieur … et Monsieur ….

Par ailleurs, la société demanderesse réfute l’argumentation du délégué du gouvernement ayant trait à la susdite décision du Bundespatentgericht allemand du 15 octobre 2015.

A cet égard, et en se prévalant de la Circulaire, elle fait valoir que le dernier alinéa de l’article 50bis (2) LIR, tel qu’invoqué par le délégué du gouvernement à l’appui de cette argumentation, ne serait pas applicable au présent litige, étant donné que cette disposition légale viserait l’hypothèse dans laquelle le propriétaire d’un droit de propriété intellectuelle aurait décidé d’exploiter lui-même ce droit, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce.

2 Art. 50bis (5) LIR : « L’application des alinéas 1 et 3 est soumise à la condition additionnelle que le droit n’ait pas été acquis d’une personne qui a la qualité de société associée.

Une société est à considérer comme société associée au sens du présent alinéa a. si elle détient une participation directe d’au moins 10% dans le capital de la société bénéficiaire du revenu, ou b. si son capital est détenu directement à raison d’au moins 10% par la société bénéficiaire du revenu […] ».

13 A titre subsidiaire, elle fait plaider que le dernier alinéa de l’article 50bis (2) LIR n’aurait vocation à s’appliquer qu’en cas de refus de la demande de brevet. En se prévalant des travaux parlementaires relatifs à la loi du 21 décembre 2007 et de l’article 97 de la Convention sur le brevet européen du 5 octobre 1973, elle soutient qu’en l’espèce, il ne saurait être question d’un rejet ou d’un refus de la demande de brevet, étant donné que le brevet litigieux aurait bien été délivré le 3 septembre 2008 sous le numéro …, la société demanderesse reprochant au délégué du gouvernement de tenter d’assimiler l’hypothèse d’un refus de la demande de brevet avec celle d’une décision d’invalidation d’un brevet, assimilation qui ne serait cependant pas prévue par la loi.

A titre encore plus subsidiaire, la société “A” renvoie à un courrier de son conseil allemand du 28 octobre 2021, aux termes duquel la susdite décision du Bundespatentgericht allemand du 15 octobre 2015 aurait été « […] aufgehoben […] » par un arrêt du Bundesgerichtshof du 9 janvier 2018 ayant rejeté la demande de nullité du Brevet européen.

Elle en déduit que la décision d’invalidation de ce dernier n’aurait pu produire d’effet juridique avant 2018.

Analyse du tribunal A titre liminaire, le tribunal constate qu’il se dégage sans équivoque des développements faits par la société demanderesse tant dans sa requête introductive d’instance que dans son mémoire en réplique qu’elle prétend à l’octroi de l’avantage fiscal prévu par l’article 50bis LIR en se prévalant des seules dispositions du paragraphe (1) de cet article, aux termes duquel « Les revenus perçus à titre de rémunération pour l’usage ou la concession de l’usage d’un droit d’auteur sur des logiciels informatiques, d’un brevet, d’une marque de fabrique ou de commerce d’un nom de domaine, d’un dessin ou d’un modèle sont exonérés à hauteur de 80% de leur montant net positif. Est à considérer comme revenu net, le revenu brut diminué des dépenses en relation économique directe avec ce revenu, y compris l’amortissement annuel ainsi que, le cas échéant, une déduction opérée pour dépréciation. ».

Dans ce contexte, le tribunal retient qu’il y a d’ores et déjà lieu de rejeter l’argumentation du délégué du gouvernement aux termes duquel le Bundespatentgericht allemand aurait, par décision du 15 octobre 2015, retenu dans le cadre d’une demande en nullité du Brevet européen que ce dernier serait à invalider sur le territoire allemand, de sorte qu’à défaut d’enregistrement en bonne et due forme du Brevet européen en Allemagne, où les redevances perçues par la société demanderesse trouveraient in fine leur origine, la déduction antérieurement opérée devrait, en application des dispositions du dernier alinéa de l’article 50bis (2) LIR, être ajoutée au bénéfice imposable de l’exercice d’exploitation au cours duquel le refus a été notifié au contribuable, en l’occurrence le revenu imposable de l’année 2015.

En effet, outre le fait que la société demanderesse ne prétend pas à l’application de l’article 50bis (2) LIR, tel que relevé ci-avant, cette disposition légale, qui précise, en son dernier alinéa tel qu’invoqué par le délégué du gouvernement, qu’« En cas de refus de la demande de brevet, la déduction antérieurement opérée doit être ajoutée au bénéfice imposable de l’exercice d’exploitation au cours duquel le refus a été notifié au contribuable […] », vise, aux termes de son alinéa 1er, l’hypothèse où le « […] contribuable a lui-même constitué un brevet et qui est utilisé dans le cadre de son activité […] ». Cette hypothèse n’est cependant pas vérifiée en l’espèce, alors que le droit de propriété intellectuelle litigieux, à savoir le Brevet, respectivement le Brevet européen, n’a pas été constitué par la société “A”, mais par la société 14“B”, qui l’a, par la suite, cédé à la société demanderesse par le biais de la susdite convention du 27 février 2008. A cela s’ajoute qu’il se dégage du courrier de l’avocat allemand Dr. … du 28 octobre 2021, dont la société demanderesse se prévaut dans son mémoire en réplique et par rapport auquel le délégué du gouvernement, qui n’a pas déposé de mémoire en duplique, n’a pas pris position, que la susdite décision du Bundespatentgericht allemand a été « […] aufgehoben […] » par un arrêt du Bundesgerichtshof allemand du 9 janvier 2018 et que compte tenu du fait, d’une part, que ladite décision du 15 octobre 2015 n’était pas exécutoire par provision et, d’autre part, que l’introduction de la voie de recours ayant abouti à ce dernier arrêt avait un effet suspensif, la décision, précitée, du 15 octobre 2015 n’a jamais déployé d’effets juridiques. Le délégué du gouvernement ne saurait, dès lors, valablement se prévaloir de cette décision à l’appui de son argumentaire.

Le représentant étatique argumente encore, en substance et de l’entendement du tribunal, qu’à défaut de ventilation entre les revenus pour l’usage ou la concession de l’usage du Brevet et du Brevet européen, qui tomberaient dans le champ d’application de l’article 50bis (1) LIR, et les revenus ordinaires – pleinement imposables – que la société demanderesse percevrait selon le susdit contrat de licence du 21 juin 2012, la preuve de revenus qualifiables de redevances ne serait pas remplie, de sorte que la société demanderesse ne saurait bénéficier de l’exonération partielle prévue par cette dernière disposition légale.

Or, outre le fait que le délégué du gouvernement n’a pas indiqué une quelconque base légale qui imposerait une telle ventilation et qu’il n’explique pas pour quelles raisons le constat de l’absence de pareille ventilation, à la supposer requise, justifierait le refus pur et simple de l’exonération sollicitée, au lieu d’une détermination, par voie de taxation d’office, de la part des revenus perçus susceptibles de bénéficier de ladite exonération, le tribunal constate que si, certes, le susdit contrat de licence prévoit, en son article 4 que « Der Lizenznehmer erhält eine einfache Lizenz zur Benutzung der Vertragsschutzrechte und des Know-how des Lizenzgebers zur Herstellung und zum Verkauf von Systemen sowie im Vertragsgegenstand (3) erwähnt […] », il n’en reste pas moins, d’une part, que dans son mémoire en réplique, la société demanderesse explique que nonobstant la formulation de cette clause contractuelle, elle n’aurait jamais développé des systèmes visés par cette clause, ni même participé à leur conception, de sorte qu’elle n’aurait eu aucun savoir-faire à apporter à la société “B”, et, d’autre part, que la partie étatique, qui, tel que relevé ci-avant, n’a pas déposé de mémoire en duplique, n’a pas formulé la moindre contestation quant à ces explications.

Dans ces circonstances, le tribunal conclut que l’argumentation sous analyse encourt le rejet.

Le tribunal relève ensuite que les conditions devant être remplies pour bénéficier de l’avantage fiscal de l’article 50bis (1) LIR sont inscrites aux paragraphes (4) et (5) du même article, aux termes desquels « (4) L’application des alinéas 1 à 3 du présent article est soumise aux conditions suivantes :

1. le droit doit avoir été constitué ou acquis après le 31 décembre 2007 ;

2. les dépenses, amortissements et déductions pour dépréciation en rapport avec le droit sont à porter à l’actif du bilan du contribuable et à intégrer dans le résultat au titre du premier exercice pour lequel l’application des dispositions des alinéas susvisés entre en ligne de compte pour autant que pour un exercice donné ces frais ont dépassé les revenus en rapport avec ce même droit.

15(5) L’application des alinéas 1 et 3 est soumise à la condition additionnelle que le droit n’ait pas été acquis d’une personne qui à la qualité de société associée. Une société est considérée comme société associée au sens du présent alinéa a. si elle détient une participation directe d’au moins 10% dans le capital de la société bénéficiaire du revenu, ou b. si son capital est détenu directement à raison d’au moins 10% par la société bénéficiaire du revenu, ou c. si son capital est détenu directement à raison d’au moins 10% par une troisième société et que celle-ci détient une participation directe d’au moins 10% dans le capital de la société bénéficiaire du revenu. ».

Il s’ensuit que l’application de l’avantage fiscal inscrit à l’article 50 bis (1) LIR est soumise aux conditions cumulatives (i) que le droit doit avoir été constitué ou acquis après le 31 décembre 2007, (ii) que les dépenses, amortissements et déductions pour dépréciation en rapport avec le droit sont à porter à l’actif du bilan du contribuable et à intégrer dans le résultat au titre du premier exercice pour lequel l’application des dispositions des alinéas susvisés entre en ligne de compte pour autant que pour un exercice donné ces frais ont dépassé les revenus en rapport avec ce même droit et (iii) que le droit n’ait pas été acquis d’une personne qui a la qualité de société associée telle que définie au paragraphe (5) du même article.

En l’espèce, seules la première et la troisième de ces trois conditions sont litigieuses.

Quant à la première condition, le tribunal rappelle que dans son courrier, précité, du 3 février 2015, le bureau d’imposition a retenu que celle-ci ne serait pas remplie, au motif que la société “B” aurait commercialisé les produits couverts par la marque « ”M” » « […] bien avant les dates de dépôt officiel en matière de propriété intellectuelle, de sorte qu’il s’impose[rait] de conclure qu’en l’occurrence la date effective (non seulement juridique) de constitution de la marque en question ne se confond[rait] aucunement avec les dates de dépôt des demandes respectives d’enregistrement […] ».

Or, au-delà de toute autre considération, le tribunal constate que ni le bureau d’imposition dans son courrier susmentionné, ni le délégué du gouvernement dans son mémoire en réponse ne précisent sur quels éléments factuels concrets reposerait ce constat d’une commercialisation des produits couverts par la susdite marque par la société “B” « […] bien avant les dates de dépôt officiel en matière de propriété intellectuelle […] », étant encore relevé que la partie étatique n’a pas expliqué quels seraient les produits couverts par ladite marque.

Dans ce contexte, le tribunal constate encore que le représentant étatique, qui n’a pas déposé de mémoire en duplique, n’a pas pris position quant aux explications fournies par la société demanderesse dans son mémoire en réplique, selon lesquelles, d’une part, la marque « ”M” » aurait dû servir d’outil marketing et aurait été déposée dans l’optique de pouvoir la céder à un « ascensoriste » qui aurait alors pu « […] vendre des ascenseurs avec cette marque […] » et, d’autre part, une telle vente ne se serait toutefois jamais produite.

Dès lors, et à défaut d’autres éléments, l’argumentation sous analyse est à rejeter.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement se prévaut de diverses publications sur internet, ainsi que du libellé des factures émises dans le cadre du susdit contrat de licence, pour soutenir (i) que le Brevet européen aurait été commercialisé sous le nom « ”M1” », respectivement sous le nom « “M1”-”B” », (ii) que, dès lors, les noms et marques « ”M1” » et « ”B” » constitueraient des parties indissociables de ce brevet et (iii) que dans la 16mesure où ces marques n’auraient pas été enregistrées après le 31 décembre 2007, la condition inscrite à l’article 50bis (4), point 1. LIR ne serait pas remplie en l’espèce.

A cet égard, le tribunal relève, d’une part, que la société demanderesse conteste que les noms et marques « ”M1” » et « ”B” » constitueraient des parties indissociables du Brevet européen, en fournissant une explication détaillée quant à l’historique de la marque « ”M1” » et quant à l’objet de la dénomination « ”M1” “B” », qui désignerait un produit, et non pas une marque, et d’autre part, que le délégué du gouvernement, qui n’a pas déposé de mémoire en duplique, tel que relevé ci-avant, n’a pas pris position quant à ces explications.

Par ailleurs, même à admettre que lesdits noms et marques constitueraient des parties indissociables du Brevet européen, le tribunal relève qu’à côté de la constitution du droit de propriété intellectuelle concerné, qui, de manière non contestée, s’est, en l’espèce, opérée avant le 31 décembre 2007 et qui semble être l’hypothèse visée par l’argumentation étatique, l’article 50bis (1) LIR prévoit expressément l’hypothèse de l’acquisition de ce droit après cette date.

Or, en l’espèce, tout comme le Brevet, le Brevet européen, qui, selon le délégué du gouvernement, serait indissociable des noms et marques « ”M1” » et « ”B” », a justement été acquis par la société demanderesse à une date postérieure au 31 décembre 2007, en l’occurrence le 27 février 2008.

Le tribunal en déduit que la condition selon laquelle le droit doit avoir été constitué ou acquis après le 31 décembre 2007 est remplie en l’espèce.

Cette conclusion n’est pas énervée par la référence faite par le bureau d’imposition dans son courrier, précité, du 3 février 2015 au principe selon lequel les faits et les actes juridiques doivent être interprétés et appréciés d’après des critères économiques, ainsi qu’aux paragraphes 5, 6 et 11 de la loi d’adaptation fiscale modifiée du 16 octobre 1934 maintenue en vigueur par l’arrêté grand-ducal du 26 octobre 1944, appelée « Steueranpassungsgesetz », dénommée ci-après « StAnpG ». En effet, outre cette référence vague à ces principe et dispositions légales, la partie étatique n’a pas fourni d’argumentation juridique précise et circonstanciée à cet égard, que ce soit au stade précontentieux ou dans le cadre du présent recours. Plus particulièrement, elle n’a pas expliqué en quoi, concrètement, les dispositions des paragraphes 5, 6 et 11 StAnpG auraient vocation à s’appliquer et en quoi les différentes conditions posées par ces dispositions légales, telles que précisées par la jurisprudence des juridictions administratives, seraient remplies en l’espèce. Par ailleurs, le délégué du gouvernement n’a pas formulé la moindre contestation quant aux explications de la société demanderesse ayant trait aux raisons économiques ayant, d’après elle, justifié sa constitution et la cession à son profit du Brevet et du Brevet européen par la société “B”. La référence faite par la partie étatique aux principe et dispositions légales susmentionnés est, dès lors, à écarter.

Quant à la condition selon laquelle le droit de propriété intellectuelle ne doit pas avoir été acquis d’une personne qui a la qualité de société associée telle que définie au paragraphe (5) de l’article 50bis LIR, le tribunal relève qu’il ressort des explications fournies par la société demanderesse, corroborées par les pièces versées en cause, qu’à la suite de cessions d’actions successives intervenues les 21 décembre 2005 et 29 juin 2007, les 330 actions formant le capital social de la société “B” et qui étaient initialement détenues à part égales par les sociétés “D” et “E” étaient, depuis cette dernière date et donc antérieurement à la cession du Brevet et du Brevet européen à la société “A” en date du 27 février 2008, détenues à parts égales par Messieurs …, … et ….

17 Dès lors, et dans la mesure où il ressort de l’acte constitutif de la société demanderesse que les 105 actions formant le capital social de cette dernière sont détenues à parts égales par les sociétés “F”, “D” et “E”, le tribunal arrive à la conclusion qu’au jour de la cession du droit de propriété intellectuelle litigieux, (i) le cédant, à savoir la société “B”, ne détenait pas de participation directe d’au moins 10 % dans le capital de la société bénéficiaire du revenu, en l’occurrence la société “A”, (ii) le capital de la société “B” n’était pas directement détenu à raison d’au moins 10 % par la société demanderesse et (iii) le capital de la société “B” n’était pas directement détenu à raison d’au moins 10 % par une troisième société qui aurait, quant à elle, détenu une participation directe d’au moins 10 % dans le capital de la société “A”.

Aucune des hypothèses visées aux points a. à c. de l’article 50bis (5) LIR n’étant ainsi vérifiée, le droit litigieux n’a pas été acquis par la société demanderesse d’une société ayant la qualité de société associée, au sens de cette dernière disposition légale.

Il suit des considérations qui précèdent que c’est à tort que le bureau d’imposition a refusé d’accorder à la société demanderesse le bénéfice de l’exonération prévue à l’article 50bis (1) LIR par rapport aux revenus de propriété intellectuelle déclarés par elle pour les années d’imposition litigieuses.

Les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités des années 2013 à 2015, ainsi que les bulletins de l’impôt commercial communal des années 2014 et 2015 encourent, dès lors, la réformation en ce sens.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours principal en réformation irrecevable, dans la mesure où il vise les bulletins de l’impôt sur la fortune des années 2013, 2014 et 2015, ainsi que le bulletin de l’impôt commercial communal de l’année 2013 ;

pour le surplus, reçoit le recours principal en réformation en la forme ;

au fond, le déclare justifié, partant, par réformation des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités des années 2013 à 2015, ainsi que des bulletins de l’impôt commercial communal des années 2014 et 2015, dit que c’est à tort que le bureau d’imposition Diekirch a refusé d’accorder à la société anonyme “A” SA le bénéfice de l’exonération partielle prévue à l’article 50bis (1) LIR par rapport aux revenus de propriété intellectuelle déclarés par elle pour les années d’imposition en cause ;

renvoie le dossier devant l’autorité compétente pour exécution ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

condamne l’Etat aux frais et dépens.

Ainsi jugé par :

Alexandra Castegnaro, vice-président, 18Daniel Weber, premier juge, Annemarie Theis, juge, et lu à l’audience publique du 20 mars 2023 par le vice-président, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Alexandra Castegnaro Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 21 mars 2023 Le greffier du tribunal administratif 19


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 46021
Date de la décision : 20/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-03-20;46021 ?

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