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10/02/2023 | LUXEMBOURG | N°45499

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 10 février 2023, 45499


Tribunal administratif N° 45499 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:45499 3e chambre Inscrit le 11 janvier 2021 Audience publique extraordinaire du 10 février 2023 Recours formé par la société anonyme … SA, …, contre une délibération du conseil communal de Hesperange et contre une décision du ministre de l’Intérieur, en matière de plan d’aménagement général

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 45499 du rôle et déposée au greffe du tribun

al administratif le 11 janvier 2021 par Maître Laurent NIEDNER, avocat à la Cour, inscrit au tab...

Tribunal administratif N° 45499 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:45499 3e chambre Inscrit le 11 janvier 2021 Audience publique extraordinaire du 10 février 2023 Recours formé par la société anonyme … SA, …, contre une délibération du conseil communal de Hesperange et contre une décision du ministre de l’Intérieur, en matière de plan d’aménagement général

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 45499 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 11 janvier 2021 par Maître Laurent NIEDNER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, au nom de la société anonyme … SA, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de :

« 1) la décision du Ministre de l’Intérieur du 15 septembre 2020 par laquelle ce dernier a rejeté la réclamation de la requérante du 9 décembre 2019 contre le rejet le 18 novembre 2019 par le conseil communal de la commune de Hesperange des objections présentées par la requérante contre le PAG voté le 25 février 2019 et publié le 10 mars 2019 et a approuvé le nouveau PAG ;

2) la délibération du conseil communal de la commune de Hesperange du 18 novembre 2019 par lequel ce dernier rejeta les objections de la requérante et approuva le PAG ;

3) la délibération du conseil communal de la commune de Hesperange du 25 février 2019 par laquelle le nouveau PAG fut voté. » ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Patrick KURDYBAN, demeurant à Luxembourg, du 14 janvier 2021, portant signification de ce recours à l’administration communale de Hesperange, établie à L-5886 Hesperange, 474, route de Thionville, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 18 janvier 2021 par Maître Steve HELMINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la commune de Hesperange, préqualifiée ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 27 janvier 2021 par Maître Albert RODESCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 12 avril 2021 par Maître Albert RODESCH, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 14 avril 2021 par Maître Steve HELMINGER, au nom de la commune de Hesperange, préqualifiée ;

Vu la constitution de nouvel avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 6 octobre 2022 par la société à responsabilité limitée RODESCH Avocats à la Cour SARL, établie et ayant son siège social à L-1470 Luxembourg, 7-11, route d’Esch, représentée par ses gérants actuellement en fonctions, inscrite au registre de commerce et des sociétés du Luxembourg sous le numéro B265322, inscrite au Barreau de Luxembourg, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Albert RODESCH, préqualifié, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, en remplacement de Maître Albert RODESCH, préqualifié ;

Vu les pièces versées en cause ainsi que les actes attaqués ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Laurent NIEDNER, Maître Steve HELMINGER et Maître Stéphane SUNNEN, en remplacement de Maître Albert RODESCH, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 11 octobre 2022.

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Lors de sa séance publique du 25 février 2019, le conseil communal de Hesperange, ci-après dénommé le « conseil communal », fut saisi par le collège des bourgmestre et échevins de la même commune, ci-après dénommé le « collège échevinal », en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après désignée par la « loi du 19 juillet 2004 », d’un projet d’aménagement général pour la commune de Hesperange qu’il mit sur orbite en conséquence à travers un vote positif, de sorte que le collège échevinal put procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi du 19 juillet 2004.

Par courrier de son mandataire du 9 avril 2019, la société anonyme … SA, ci-après désignée la « société … » fit valoir ses objections à l’encontre du projet d’aménagement général de ladite commune, en sa qualité de propriétaire de deux parcelles inscrites au cadastre de la commune de Hesperange, sous les numéros … et ….

Lors de sa séance publique du 18 novembre 2019, le conseil communal décida « avec huit voix pour et deux abstentions » :

« d’approuver le projet d’aménagement général de la commune de Hesperange, mis en procédure par délibération du conseil communal du 25 février 2019, tel qu’il a été modifié conformément à l’article 14 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain […] ».

En ce qui concerne les objections introduites par la société … le conseil communal décida de suivre la prise de position du collège échevinal formulée comme suit :

« […] Zusammenfassung der Reklamation 1. Ablehnung Verbot von Tankstellen (Bezug Art. 9).

2 2. Ablehnung degre d’utilisation du sol – Forderung höhere Dicht , Angleichung an CUS 1.95.

Stellungnahme von … 1.1 Die Parzelle war bisher als AetC ausgewiesen und liegt im Gewerbegebiet Howald-gare. Das über 50ha groβe Quartier soll das Pendant zum gegenüberliegenden Ban de Gasprich (Luxembourg) bilden. In diesem Zusammenhang ist Howald-gare als Siedlungsschwerpunkt ausgewiesen.

Die Transformation der monostrukturellen Gewerbeflächen zu einem gemischten Dienstleistungs-/ und Wohnquartier leistet einen Beitrag zu einem konzentriertem Wachstum im Rahmen einer Innenentwicklungsmaβnahme.

Dem entspricht auch die Ausweisung als zone mixte urbaine [Mix-u] mit Dienstleistung und Wohnen. Ohne die Festsetzung zu den minimal Werten an Wohnen im PAP QE kann die Wohnnutzung nicht gewährleistet werden. Gleichzeitig wiederspricht die Forderung des Eigentümers der gesamten Entwicklungsstrategie und der DICI Convention. Das Ziel ein Mischgebiet zu generieren ist den Akteuren seit Beginn der Gespräche bekannt und wurde im PD bereits festgehalten.

Zum jetzigen Planungszeitpunkt wurde eine gleichmäβige prozentuale Verteilung des Wohnanteils angestrebt. Im fortlaufenden Planungsprozess sind Synergien zwischen den Eigentümern erwünscht. Eine ausgeglichene und städtebauliche vertretbare Umverteilung des Wohn- und Gewebeanteils ist möglich und erwünscht. Diese Umverteilung müssen in Form einer convention cadre zwischen den Eigentümern und der Gemeinde festgehalten werden. Anschlieβend können die Werte im PAG bzw. PAP QE angepasst werden. Dies ist auch nach Aufstellung des PAGs möglich, da der PAG Plan kein unveränderbares Dokument ist.

1.2 Der Abschnitt PAG PE zu zone mixte urbaine Bruyères et Joncs [Mix-u-BJ] entspricht der Festsetzung nach RGD 2017. Zudem kann die Gemeinde nach Art. 7 für eine Zone gemäβ der Charakteristik oder Merkmalen des Standorts das Maβ der baulichen Nutzung präzisieren oder sogar eine zone SPEC ausweisen. In diesem Zusammenhang ist der Verbot von Tankstelle durch die Entwicklungsstrategie begründet und zulässig.

Siehe Reklamation R091.

2.2 Zur Berechnung des minimalen und maximal Wohnungsanteil ist eine durchschnittliche Wohnungsgröβe von 100 qm angenommen worden. Diese ist bereits kleiner als die durchschnittliche Whg. gröβe 120 qm im Gemeindegebiet. Um ein durchmischtes Wohnungsangebot zu erhalten ist die Grundlage der Berechnung angemessen.

2.3 Gemäβ den Aussagen zu R092 und R093 entsprechen die Dichtewerte den städtebaulichen Absichten. Die Hintergründe sind die prioritäre Zone an der Tramstation mit der günstigen ÖV Verbindung, Nutzungsanforderungen (z.B. Schallschutz, Freiräume), die Belichtung und die Belüftung. Die Hintergründe sind die prioritäre Zone an der Tramstation mit der günstigen ÖV Verbindung, Nutzungsanforderungen (z.B. Schallschutz, Freiräume), die Belichtung und die Belüftung. Um dem Eigentümer nicht zu Schaden sind die Dichtekoeffizienten im PAG bereits aufgrund der hohen cessionen (N3, Tram, BI. Raiffeisen, Verbesserte Fuβ- und Radwege) und der Umklassierung in ein Mischgebiet nach oben angepasst. Eine Erhöhung ist aufgrund städtebaulichen Verträglichkeit nicht empehlenswert.

3 Änderungsvorschlag des Schöffenrats (CBE) für den Gemeinderat (CC)  Keine Änderung. ».

Par courrier de son litismandataire daté au 9 décembre 2019, la société … introduisit auprès du ministre de l’Intérieur, ci-après désigné par le « ministre », une réclamation à l’encontre de la décision du conseil communal du 18 novembre 2019 portant adoption définitive du projet d’aménagement général.

Par décision du 15 septembre 2020, le ministre approuva la délibération du conseil communal du 18 novembre 2019 portant adoption du projet d’aménagement général et déclara la réclamation de la société … irrecevable et non fondée.

Ladite décision ministérielle est libellée comme suit :

« […] Par la présente, j’ai l’honneur de vous informer que j’approuve la délibération du conseil communal du 18 novembre 2019 portant adoption du projet de la refonte du plan d’aménagement général (dénommé ci-après « PAG ») de la commune d’Hesperange, présenté par les autorités communales.

La procédure d’adoption du projet d’aménagement général s’est déroulée conformément aux exigences des articles 10 et suivants de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain.

La Commission d’aménagement a donné son avis sur les réclamations introduites auprès du ministre de l’Intérieur en date du 24 juin 2020.

Le conseil communal a donné son avis sur les réclamations introduites auprès du ministre de l’Intérieur en date du 3 avril 2020.

Conformément à l’article 18 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, j’ai fait droit à certaines objections et observations formulées par les réclamants à l’encontre du projet d’aménagement général.

Les modifications ainsi apportées à la partie graphique sont illustrées dans la présente décision et en font partie intégrante. Les autorités communales sont tenues de me faire parvenir les plans et documents modifiés, suite aux réclamations déclarées fondées par la présente décision, pour signature.

Il est statué sur les réclamations émanant de […] de Maître Laurent Niedner au nom et pour le compte de la société … S.A. […] Ad réclamation […] … S.A. […] Les réclamantes s’opposent au classement des parcelles cadastrales […] …, sises à Hesperange, actuellement classées en « zone mixte urbaine "Bruyères et Joncs" [MIX-u-BJ] » du plan d’aménagement général (PAG) et en secteur HW-11 « Bruyères et Joncs » du « plan d’aménagement particulier "quartier existant" [PAP QE] » [PAP QE HW-11]. […] La réclamante … S.A. conteste l’interdiction d’exploiter des stations de service. Elle considère encore que le CUS devrait être augmenté à 1,95 et que le nombre d’étages admissibles devrait être porté à 12 tel que pour les terrains en face, classés dans le [PAP NQ HW-05c].

Par ailleurs, elle demande à ce que le nombre de logements à réaliser soit augmenté et que le nombre minimal à réaliser soit supprimé. […] A cet égard, il convient de rappeler que la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain ne prévoit pas de possibilité de réclamation devant le ministre en matière de PAP QE, de manière à ce qu’il ne saurait connaître des réclamations soumises à ce sujet.

Les réclamations sont partant irrecevables en ce qu’elles ont trait au PAP QE.

A titre subsidiaire, en termes généraux, il y a lieu de constater que le classement actuel est cohérent, mais qu’une densification et la création de nouvelles fonctions peuvent s’avérer opportunes à terme.

Or, une densification conséquente nécessite le recours à un « plan d’aménagement particulier "nouveau quartier" [PAP NQ] » avec un concept global, que le ministre ne saurait imposer à ce niveau aux autorités communales sous peine d’affecter la logique intrinsèque du plan (Cour administrative, 9 octobre 2014, 33257CA). […] En ce qui concerne plus particulièrement le volet de la réclamation … S.A. visant la possibilité d’exploiter des stations de service sur le site, force est de constater qu’une telle affectation au sein d’un quartier mixte ne s’avère pas appropriée, alors qu’elle est susceptible de créer des nuisances et des conflits entre différentes fonctions urbaines. […] Les réclamations sont partant non fondées. […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 11 janvier 2021, la société … fit introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de :

« 1) la décision du Ministre de l’Intérieur du 15 septembre 2020 par laquelle ce dernier a rejeté la réclamation de la requérante du 9 décembre 2019 contre le rejet le 18 novembre 2019 par le conseil communal de la commune de Hesperange des objections présentées par la requérante contre le PAG voté le 25 février 2019 et publié le 10 mars 2019 et a approuvé le nouveau PAG ;

2) la délibération du conseil communal de la commune de Hesperange du 18 novembre 2019 par lequel ce dernier rejeta les objections de la requérante et approuva le PAG ;

3) la délibération du conseil communal de la commune de Hesperange du 25 février 2019 par laquelle le nouveau PAG fut voté. ».

I. Quant à la compétence du tribunal 5 Les décisions sur les projets d’aménagement, lesquels ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’ils concernent et le régime des constructions à y ériger, ont un caractère réglementaire. La décision d’approbation du ministre participe au caractère réglementaire de l’acte approuvé1, étant précisé que le caractère réglementaire ainsi retenu s’étend également au volet de la décision ministérielle du 15 septembre 2020 ayant statué sur la réclamation introduite par le demandeur, intervenue dans le processus général de l’élaboration de l’acte approuvé.

Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, seul un recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère réglementaire.

Le tribunal est partant incompétent pour statuer sur le recours en réformation introduit à titre principal. Il est en revanche compétent pour statuer sur le recours en annulation introduit à titre subsidiaire.

II. Quant à la recevabilité La commune de Hesperange et la partie étatique soulèvent l’irrecevabilité du recours en ce qu’il vise la délibération du conseil communal du 25 février 2019, en soutenant, en substance, qu’il ne s’agirait que d’un simple acte préparatoire ne pouvant faire l’objet d’un recours contentieux, tel que cela se dégagerait de la jurisprudence des juridictions administratives.

La société … n’a pas pris position quant au moyen d’irrecevabilité lui ainsi opposé.

L’acte administratif susceptible de faire l’objet d’un recours contentieux doit constituer une véritable décision de nature à faire grief, c’est-à-dire un acte susceptible de produire par lui-même des effets juridiques affectant la situation personnelle et patrimoniale de celui qui réclame. N’ont pas cette qualité de décision faisant grief, comme n’étant pas destinées à produire, par elles-mêmes, des effets juridiques, les informations données par l’administration, tout comme les déclarations d’intention ou les actes préparatoires d’une décision2.

Dans un arrêt du 15 décembre 2016, portant le numéro 38139C du rôle, la Cour administrative a précisé la nature juridique du vote du conseil communal prévu par l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004. Dans l’arrêt en question, la Cour administrative, après avoir relevé qu’avant la prise d’effet des modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par celle du 28 juillet 2011, les plans d’aménagement généraux étaient soumis à la « […] procédure classique d’adoption et d’approbation […] en deux temps [qui] comprenait d’abord un vote provisoire par le conseil communal contre lequel des objections étaient ouvertes, elles-mêmes vidées par le même conseil communal à travers le vote définitif, contre lequel des réclamations pouvaient être introduites devant le ministre de l’Intérieur qui, dans le cadre de ses attributions de tutelle d’approbation, était amené à vider les réclamations ainsi portées devant lui, et à approuver ou non le PAG, de sorte à revêtir une double 1 Cour adm., 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Actes réglementaires, n° 55 et les autres références y citées.

2 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, confirmé sur ce point par Cour adm., 19 février 1998, n° 10263C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Actes administratifs, n° 68 et les autres références y citées.casquette à ce sujet. […] », et après avoir précisé que dans le cadre de cette procédure classique « […] le conseil communal, en adoptant provisoirement un projet de PAG, avait en quelque sorte fait sien le projet d’une manière effective en l’adoptant à un premier stade, quitte à ce que des objections puissent être formulées relativement à cette première adoption communale […] », a constaté que cette procédure avait été modifiée par ladite loi du 28 juillet 2011. Ainsi, l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004 prévoit, dans sa version modifiée, que le conseil communal délibère sur le projet d’aménagement général, tel qu’il lui est présenté par le collège échevinal, ensemble avec l’étude préparatoire, le rapport de présentation ainsi que, le cas échéant, le rapport sur les incidences environnementales, et qu’en cas de vote positif, le collège échevinal peut lancer les différentes procédures de consultation. L’article 14 de la même loi, quant à lui, prévoit, dans sa version modifiée, que le projet d’aménagement général ensemble avec toutes les pièces mentionnées à l’article 10 est soumis au conseil communal avec l’avis de la commission d’aménagement et, le cas échéant, avec l’avis du ministre ayant dans ses attributions l’environnement, le rapport sur les incidences environnementales, les réclamations et les propositions de modifications du collège échevinal. Le conseil communal peut ensuite approuver le projet tel que présenté ou y apporter des modifications issues des propositions de la commission d’aménagement, de l’avis émis par le ministre de l’Environnement ou encore des observations et objections présentées. Enfin, le conseil communal peut renvoyer le dossier devant le collège des bourgmestre et échevins – qui est tenu de recommencer la procédure prévue aux articles 10 et suivants – lorsqu’il entend apporter d’autres modifications au projet d’aménagement général.

A partir d’une lecture combinée des articles 10 à 14 de la loi du 19 juillet 2004, tels que résultant de la modification du 28 juillet 2011, la Cour administrative est arrivée à la conclusion que le vote du conseil communal prévu à l’article 10, alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004, dans sa version applicable depuis la modification par la loi du 28 juillet 2011, n’est plus comparable à l’adoption provisoire du plan d’aménagement général – prévue par l’ancienne version dudit article – et ne peut dès lors plus être analysé en adoption du projet de plan, mais en une sorte de « mise sur orbite » dudit projet, respectivement en un « feu vert » donné au collège échevinal pour procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la même loi. La Cour administrative a encore retenu que l’opération visée à l’article 14 consiste en règle générale dans l’adoption unique et définitive par le conseil communal du projet d’aménagement général qui devient le plan d’aménagement général adopté par l’organe compétent de la commune. Cette adoption peut se faire soit sous la forme originale, soit, dans la majorité des cas, sur les modifications opérées par le conseil communal compte tenu des consultations menées.

Ainsi, le vote positif émis par le conseil communal, en application de l’article 10, alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004, ne constitue qu’une « […] mise sur orbite [du] projet […] », respectivement un « feu vert » que le conseil communal donne au collège échevinal pour continuer la procédure et pour procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi du 19 juillet 2004, après avoir constaté que le projet est suffisamment élaboré à cette fin.

Or, une telle « mise sur orbite », respectivement un tel « feu vert », qui n’emporte aucune adoption ou approbation du projet d’aménagement général, mais qui traduit le seul constat du conseil communal que le projet est suffisamment élaboré pour que le collège échevinal puisse continuer la procédure, ne fait que préparer l’adoption ultérieure de ce projet, sans être susceptible de produire par elle-même, respectivement par lui-même des effets juridiques sur la situation personnelle ou patrimoniale des administrés, de sorte àconstituer, non pas un acte administratif de nature à faire grief, mais un simple acte préparatoire ne pouvant, en tant que tel, faire l’objet d’un recours contentieux3.

Il s’ensuit que le recours en annulation est à déclarer irrecevable pour autant qu’il vise la délibération du conseil communal du 25 février 2019.

La partie étatique invoque encore l’irrecevabilité du recours en ce que les moyens de la société … relatifs à la définition des coefficients d’utilisation du sol, à la densité et le nombre d’étages et au nombre maximal de logements seraient dirigés contre des dispositions du plan d’aménagement particulier, ci-après « PAP » et non pas contre le plan d’aménagement général, ci-après « PAG », déféré.

La société … n’a pas pris position quant au moyen d’irrecevabilité lui ainsi opposé.

Or, à cet égard il échet de retenir qu’une éventuelle invocation des moyens dirigés contre un acte non attaqué devant le tribunal de céans, entraîne non pas l’irrecevabilité du recours tel que sollicité par la partie étatique, mais, le cas échéant, le rejet des moyens en question lors de l’analyse du fond du litige.

Le moyen afférent est dès lors à rejeter pour ne pas être fondé.

Il s’ensuit que le recours est à déclarer recevable en ce qu’il vise la délibération du conseil communal du 18 novembre 2019 et la décision du ministre du 15 septembre 2020.

III. Quant à la loi applicable La procédure d’adoption d’un PAG, est prévue par la loi du 19 juillet 2004. Or, celle-ci a été modifiée à plusieurs reprises et dernièrement (i) par une loi du 28 juillet 2011 entrée en vigueur, en application de son article 45, en date du 1er août 2011, (ii) par la loi du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire, publiée au Mémorial A, n° 160 du 6 septembre 2013, (iii) par la loi du 14 juin 2015 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, publiée au Mémorial A, n° 113 du 17 juin 2015, (iv) par la loi du 3 mars 2017 dite « Omnibus », entrée en vigueur, en application de son article 76, le 1er avril 2017, (v) par la loi du 17 avril 2018 concernant l’aménagement du territoire, (vi) par la loi du 18 juillet 2018 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain et (vii) par la loi du 30 juillet 2021 relative au Pacte logement avec les communes en vue d’augmenter l’offre de logements abordables et durables.

Etant donné, d’une part, que le tribunal vient de retenir que seul un recours en annulation a pu être introduit à l’encontre des décisions déférées et, d’autre part, que dans le cadre d’un tel recours, le juge administratif est amené à en apprécier la légalité en considération de la situation de droit et de fait ayant prévalu au jour où elles ont été prises, les modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par la loi précitée du 30 juillet 2021, entrée en vigueur postérieurement à la décision d’approbation du conseil communal du 18 novembre 2019, ne sont pas à prendre en considération en l’espèce, étant plus particulièrement précisé à cet égard que les actes de tutelle administrative, telles que la décision ministérielle litigieuse, 3 Trib. adm., 25 septembre 2017, n° 37637 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Actes règlementaires, n° 62 et les autres références y citées.rétroagissent à la date de la décision approuvée et tombent dès lors sous le champ d’application des lois en vigueur à la date de la prise de décision de l’acte initial.

Il s’ensuit que la version de la loi du 19 juillet 2004 applicable au présent litige est celle résultant des modifications opérées par les lois des 28 juillet 2011, 30 juillet 2013, 14 juin 2015, 3 mars 2017, 17 avril 2018 et 18 juillet 2018.

IV. Quant au fond Moyens des parties A l’appui de son recours, la société … explique qu’elle serait propriétaire de deux parcelles sises à Howald d’une contenance de .. a et … ca. Respectivment, … a et … ca et portant les numéros cadastraux … et …, lesquelles auraient été classées par le PAG litigieux en zone mixte urbaine « Bruyères et Joncs », ci-après désignée par « zone [MIX-u-BJ] », tout en soutenant que ce serait à tort que sa réclamation portant sur l’interdiction de stations-

service dans la zone en question, ainsi que sur la densité de construction sur ses parcelles a été rejetée par le ministre.

A cet égard, elle se prévaut en premier lieu d’une violation de l’article 9, paragraphe (2) du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 concernant le contenu du plan d’aménagement général d’une commune, ci-après désigné par le « règlement grand-ducal du 8 mars 2017 », pris en exécution de l’article 9 de la loi du 19 juillet 2004, en ce que l’article 4 de la partie écrite du PAG interdirait l’implantation de stations-service dans la zone en question. Elle précise que suivant ledit article 9 de la loi du 19 juillet 2004, l’échelle d’un PAG, tout comme le contenu de ses parties graphique et écrite devraient être arrêtés par un règlement grand-ducal, et que le règlement grand-ducal du 8 mars 2017 ne prévoirait aucune restriction pour les stations-service dans les zones mixtes urbaines, mais autoriserait, au contraire, les activités de commerce et les établissements de petite et moyenne envergure, ce qui inclurait les stations-service.

Elle soutient dans ce contexte qu’une telle interdiction d’aménagement d’une station-service ne serait plus légitime, alors que ses parcelles seraient situées le long du tracé futur de la route nationale N3, une voie à grande circulation, toute en renvoyant à cet égard à un jugement du tribunal administratif du 17 décembre 2019, n° 42185 du rôle, ayant annulé un refus d’autorisation d’une station-service à l’endroit en question sous l’ancien PAG. Elle estime, par ailleurs, que l’argumentation du conseil communal suivant laquelle la commune « kann nach ART. 7 für die Zone gemäβ der Charakteristik oder den Merkmalen des Standorts das Maβ der Baulichen Nutzung präzisieren oder sogar eine zone SPEC ausweisen. In diesem Zusammenhang ist der Verbot von Tankstelle durch die Entwicklungsstrategie begründet und zulässig. » ne serait pas fondée, dans la mesure où en l’espèce, il serait question d’une interdiction et non pas d’une précision, voire d’une zone spéciale.

Il y aurait dès lors lieu d’annuler les décisions litigieuses.

En deuxième lieu, la société … explique que le coefficient d’utilisation du sol serait de 1,85 de l’autre côté de la rue des Scillas, alors que celui retenu pour ses parcelles ne serait que de 1,606, ce qui serait incohérent et créerait une inégalité à laquelle il y aurait lieu de remédier, de sorte que le coefficient d’utilisation du sol devrait donc également être de 1,95pour ses propres parcelles. Elle ajoute que suivant une publication sur le site de la commune de Hesperange en 2019, la construction de 12 étages serait admise sur une bonne partie de la zone NQ-HW-05, augmentant considérablement la densité de construction, alors que sur ses propres parcelles même pas la moitié aurait été accordée. Elle souligne que le terrain en question se trouverait pratiquement en face de ses propres parcelles de l’autre côté de la rue des Scillas, et indique qu’il serait d’usage et normal de construire le même nombre d’étages le long d’une voie publique.

Les terrains de l’autre côté de la rue des Scillas auraient, de plus, été classés en zone soumise à un PAP « nouveau quartier », ci-après désigné « PAP NQ », de sorte à pouvoir faire l’objet d’un PAP à l’initiative privée, possibilité qui n’existerait pas de son côté de la rue, alors que ses parcelles auraient été classées en PAP « quartier existant », ci-après désigné « PAP QE », ce qui serait arbitraire et inégalitaire, de sorte qu’il y aurait lieu de retenir une erreur d’appréciation manifeste et une violation du principe d’égalité dans le chef des autorités communal et ministérielle.

La société demanderesse fait encore valoir dans ce contexte que la commune aurait, en échange de terrains cédés gratuitement à elle, accordé au propriétaire concerné le droit de construire davantage, ce qui serait, suivant elle, inadmissible et susceptible de « tomber sous le coup de la loi pénale ».

Elle ajoute que le propriétaire en question pourrait construire jusqu’à 184 unités de logements, d’une moyenne de 65m2, alors qu’elle-même serait contrainte de construire des logements « démesurément grands » de 200 m2 qui « n’intéresseraient personne ». Comme il lui serait ainsi refusé « d’en faire de même », il y aurait violation du principe d’égalité et erreur d’appréciation manifeste. La société … précise à cet égard que le tableau de représentation schématique du degré d’utilisation du sol pour ses parcelles renseignerait un nombre maximal de 14 logements, ce qui serait très peu pour une surface constructible brute de 3.185 m2, et qu’il serait incohérent d’imposer un minimum de 5 logements « car la partie écrite du PAP - quartier existant indique comme fonctions autorisées « toutes les fonctions autorisées par le PAG » ». Elle estime qu’en partant d’une moyenne de 60 à 70 m2 par logement sur son Lot, le nombre de logements devrait être de 45 au minimum, de sorte qu’il y aurait lieu de revoir le nombre de logements réalisables sur ses parcelles vers la hausse. Il n’y aurait pas non plus lieu d’imposer un minimum de logements sur ses parcelles, alors que cela empêcherait « un certain nombre d’autres usages », étant donné que, tel que le PAP QE se présenterait actuellement, un projet destiné à une fonction unique serait impossible, de sorte qu’il existerait un risque de se retrouver avec une construction à usage mixte « insusceptible de satisfaire les besoins d’aucune des fonctions de manière adéquate », la société demanderesse soulignant que ces contraintes seraient particulièrement handicapantes pour un petit Lot comme le sien.

Elle estime également que l’argumentation du conseil communal suivant laquelle :

« Zum jetzigen Zeitpunkt wurde eine gleichmäβige prozentuale Verteilung des Wohnanteils angestrebt. Im fortlaufenden Planungsprozess sind Synergien zwischen den Eigentümem erwünscht. Eine ausgeglichene und städtebauliche vertretbare Umverteilung des Wohn -und Gewerbeanteils ist, möglich und erwünscht », serait inexacte, alors que tel ne serait possible que dans le cadre d’une modification du PAP, ce qui soulignerait encore l’absurdité des contraintes préconisées.

Il en serait de même en ce qui concerne l’affirmation du conseil communal « d’avoir tablé » sur une surface moyenne des logements de 100 m2, la demanderesse soulignant à cet égard que ses parcelles auraient une surface réalisable de 3.185 m2, permettant la constructionde 14 logements au maximum, ce qui amènerait à une surface de plus de 200 m2 par chaque logement, tout en donnant à considérer que les appartements d’une surface supérieure à 100 m2 seraient rares, et qu’au-delà de cette surface, les gens préféreraient de se loger dans des maisons.

Au vu de ce qui précède, les décisions litigieuses seraient à annuler.

Tant la commune, que la partie étatique, concluent que le recours en annulation sous analyse serait à rejeter pour n’être fondé dans aucun de ses moyens.

Appréciation du tribunal Saisi d’un recours en annulation, la mission de juge de la légalité exclut le contrôle des considérations d’opportunité et notamment d’ordre politique, à la base de l’acte administratif attaqué et inclut la vérification, d’après les pièces et éléments du dossier administratif, de ce que les faits et considérations sur lesquels s’est fondée l’administration sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute. Dans cette démarche de vérification des faits et des motifs à la base de l’acte déféré, le tribunal est encore amené à analyser si la mesure prise est proportionnelle par rapport aux faits dont l’existence est vérifiée, le tribunal étant ainsi appelé à opérer une balance valable et équilibrée des éléments en cause et à vérifier plus particulièrement si l’acte posé est proportionné à son but4.

Aux termes de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004 « Les communes ont pour mission de garantir le respect de l’intérêt général en assurant à la population de la commune des conditions de vie optimales par une mise en valeur harmonieuse et un développement durable de toutes les parties du territoire communal par:

(a) une utilisation rationnelle du sol et de l’espace tant urbain que rural en garantissant la complémentarité entre les objectifs économiques, écologiques et sociaux;

(b) un développement harmonieux des structures urbaines et rurales, y compris les réseaux de communication et d’approvisionnement compte tenu des spécificités respectives de ces structures, et en exécution des objectifs de l’aménagement général du territoire;

(c) une utilisation rationnelle de l’énergie, des économies d’énergie et une utilisation des énergies renouvelables;

(d) le développement, dans le cadre des structures urbaines et rurales, d’une mixité et d’une densification permettant d’améliorer à la fois la qualité de vie de la population et la qualité urbanistique des localités;

(e) le respect du patrimoine culturel et un niveau élevé de protection de l’environnement naturel et du paysage lors de la poursuite des objectifs définis ci-

dessus;

(f) la garantie de la sécurité, la salubrité et l’hygiène publiques. ».

L’article 6 de la loi du 19 juillet 2004 prévoit, quant à lui, que « Le plan d’aménagement général a pour objectif la répartition et l’implantation judicieuse des activités humaines dans les diverses zones qu’il arrête aux fins de garantir le développement durable de la commune sur base des objectifs définis par l’article 2 de la loi. ».

4 Cour adm., 12 janvier 2021, n°44684C du rôle, disponible sur www.ja.etat.lu. Il s’ensuit que les autorités communales, lorsqu’elles initient des modifications de leurs plans d’aménagement, doivent être mues par des considérations légales d’ordre urbanistique ayant trait à l’aménagement des agglomérations et d’ordre politique tirées de l’organisation de la vie en commun sur le territoire donné, tendant les unes et les autres à une finalité d’intérêt général et dans ce contexte, lesdites autorités doivent veiller tant à la conservation de l’esthétique urbaine qu’au développement rationnel des agglomérations.

Il échet encore de noter que la modification d’un PAG est, dans son essence même, prise dans l’intérêt général, cette caractéristique étant présumée jusqu’à preuve du contraire5.

En l’espèce, il échet en premier lieu de constater que les parcelles de la société … portant les numéro cadastraux … et … ont été classées par le PAG en zone [MIX-u-BJ] ensemble avec quelques parcelles situées au nord-est de celles-ci, longeant la rue des Scillas du côté est, et avec un grand nombre de parcelles situées au sud-est de celles de la société demanderesse. Cette zone [MIX-u-BJ] fait partie d’un ensemble de zones mixes urbaine d’une certaine envergure situé à Howald-Gare. Les parcelles à l’ouest des parcelles litigieuses, et situées de l’autre côté de la rue des Scillas, ont été classées en zone mixte urbaine « Scillas » superposées d’une zone soumise à un PAP NQ, tandis que les parcelles à l’est des parcelles litigieuses ont été classées en zone forestière. Les parcelles de la société … sont encore soumises à un PAP QE.

1. Quant au moyen relatif à une illégalité de l’article 4 de la partie écrite du PAG La zone [MIX-u-BJ] est définie par l’article 4 de la partie écrite du PAG comme suit :

« La zone mixte urbaine « Bruyère et Joncs » couvre la partie de la localité Howald à caractère urbain portant le sigle [MIX-u-BJ].

Elle est destinée à accueillir :

• Des habitations ;

• Des activités artisanales de petite et moyenne envergure ;

• Des activités de commerce dont la surface brute* est limitée à 5.000 m2 par immeuble ;

• Des services administratifs ou professionnels ;

• Des équipements de service public ;

• Des crèches accueillant au maximum 100 enfants par immeuble ;

• Des établissements d’hébergement* ;

• Des restaurants ;

• Des débits de boissons ;

• Des activités culturelles ;

• Des activités de loisirs et de récréation et • Les espaces libres correspondant à l’ensemble de ces fonctions.

L’implantation de stations-service (Tankstellen) est interdite.

Pour tout plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » exécutant la zone mixte urbaine « Bruyères et Joncs », la part minimale de la surface construite brute à réserver à l’habitation ne pourra être inférieure à 25 % être inférieure à 25 %. ».

5 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Recours en annulation, n° 10 et les autres références y citées.

L’article 9, paragraphe (2) du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 dispose que :

« La zone mixte urbaine couvre les localités ou parties de localités à caractère urbain. Elle est destinée à accueillir des habitations, des activités de commerce dont la surface de vente est limitée à 10.000 m2 par immeuble bâti, des activités de loisirs, des services administratifs ou professionnels, des hôtels, des restaurants et des débits de boissons, des équipements de service public, des établissements de petite et moyenne envergure, ainsi que des activités de récréation.

Pour tout plan d’aménagement particulier « nouveau quartier », la part minimale de la surface construite brute à réserver à l’habitation ne pourra être inférieure à 25 pour cent.

La commune peut déroger au principe des 25 pour cent si les caractéristiques ou les particularités du site l’exigent. ».

A la lecture de l’article 4 de la partie écrite du PAG et de l’article 9, paragraphe (2) du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, il échet d’abord au tribunal de constater, à l’instar de la partie demanderesse, que l’article 4 de la partie écrite du PAG diffère de l’article 9, paragraphe (2) du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 en ce que ledit article 4 comporte notamment une interdiction d’implantation des stations-service dans la zone [MIX-u-BJ].

Force est ensuite de constater que c’est toutefois à juste titre que les parties défenderesses invoquent l’article 7 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, inscrit sous la section 3 dudit règlement grand-ducal, intitulée « Indications complémentaires », aux termes duquel : « Pour chaque zone ou partie de zone, les modes d’utilisation du sol peuvent être précisés en fonction des particularités et des caractéristiques propres du site.

Exceptionnellement, si les caractéristiques ou les particularités du site l’exigent, la création de nouvelles zones dénommées « zones spéciales » est admise. ».

Il ressort de cette disposition qu’en dehors des hypothèses exceptionnelles dans lesquelles la création de nouvelles zones est permise, les autorités communales disposent d’une certaine marge d’appréciation dans la détermination du mode d’utilisation du sol des différentes zones, par rapport aux dispositions du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, sous condition que les éventuelles divergences soient dictées par les particularités et les caractéristiques propres du site en question.

Concrètement, en l’espèce, le tribunal constate que si l’article 4 de la partie écrite du PAG n’a, en effet, pas repris à la lettre le libellé de l’article 9, paragraphe (2) du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, il n’en demeure pas moins que ledit article 4 traduit fidèlement les instructions de l’article 9, paragraphe (2) du règlement grand-ducal dans la législation communale, en maintenant les caractéristiques essentielles de la zone mixte urbaine, telles qu’imposées par le règlement grand-ducal.

Plus particulièrement quant à l’interdiction d’implantation en zone [MIX-u-BJ] de stations-service, imposée par l’article 4 de la partie écrite du PAG et critiquée par la partie demanderesse, force est de constater que cette interdiction s’analyse en une précision par rapport aux dispositions de l’article 9, paragraphe (2) du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 dont le tribunal vient de relever qu’elles sont expressément prévues par l’article 8 du même règlement grand-ducal, sous condition, certes, qu’elles soient dictées par les particularités et caractéristiques propres du site.

A cet égard, la commune de Hesperange explique à juste titre que la particularité du site réside précisément dans le fait qu’il est, en tant que « Siedlungsschwerpunkt », prochainement desservi par le tram et que la vision urbanistique de la commune étant de mettre l’accent sur les transports publics en ce qui concerne la mobilité à cet endroit, la commune de Hesperange renvoyant encore à son argumentation tendant à interdire une station-service à cet endroit, déclarée fondée par la Cour administrative dans un arrêt du 22 juin 2017, n° 39166C du rôle.

Or, à cet égard, le tribunal se rallie aux conclusions de la Cour dans son arrêt précité, dans lequel celle-ci a retenu, concernant la problématique d’une implantation d’une station-service sur les parcelles litigieuses, que : « La Cour peut retracer les motifs déterminants ayant guidé la société […] à vouloir implanter une station-service au niveau de la rue des Scillas, étant donné que compte tenu de la mise en place de la future route nationale 3 à proximité, devant déboucher dans la rue des Scillas, l’essentiel du trafic passera là où jusque lors la route de Thionville l’a en grande majorité accueilli. […] Seulement, il est patent que la mise en place d’une station-service, particulièrement celle appelée à jouir d’une fréquentation élevée, va de pair avec un nombre accru d’allers et de venues de véhicules participant à la circulation routière d’autant accrue. Si une rame de tram passe à proximité directe du terrain adjacent devant accueillir une station-service, la conséquence directe en est que pour tous ces flux d’allers et de venues des véhicules participant à la circulation routière et dont la fréquentation de la station-service est souhaitée, un passage par la ligne des rails du futur tram devient doublement nécessaire, une fois pour la venue et une fois pour le départ de la station-service directement adjacente. Il en résulte potentiellement une incompatibilité flagrante des deux installations en question, si tant est que la ligne de tram est elle aussi appelée, tel que le mettent en exergue les études versées au dossier, à connaître une fréquence soutenue se déclinant en un passage de tram au moins dans un intervalle variant entre 3 à 6 minutes.

Aux yeux de la Cour, l’ensemble des éléments versés au dossier fait ressortir avec suffisamment d’acuité dès le 5 février 2016 le problème de l’incompatibilité à l’endroit d’une station-service par rapport à la ligne de tram projetée, compte tenu des fréquentations et fréquences, toutes les deux prévues comme allant être soutenues, mises en avant. […]6 ».

Il ressort, par ailleurs, des explications de la partie étatique, non contestées par la société demanderesse, qu’une autre particularité du site réside encore dans le fait que la localité de Howald dispose d’ores et déjà de trois stations-service, de sorte qu’une nouvelle station n’apporte aucune plus-value au quartier, ainsi que dans le fait que la zone d’activité Howald-Gare est transformée d’une zone commerciale dite « monostructurelle » en un quartier résidentiel et commercial, de sorte que l’implantation d’une station-service est susceptible de créer des nuisances et des conflits entre différentes fonctions urbaines.

Cette constatation n’est pas énervée par l’affirmation de la société demanderesse qu’en l’espèce, il serait question d’une interdiction et non pas d’une précision, voire d’une zone spéciale, tel que prévu par l’article 7 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, alors qu’une interdiction peut bel et bien être considérée comme une « précision ».

6 Cour adm., 22 juin 2017, n° 39166C du rôle, disponible sur www.ja.etat.lu.

Elle n’est pas non plus énervée par le jugement du tribunal administratif du 17 décembre 2019, n° 42185 du rôle, cité par la société demanderesse, suivant lequel le refus d’une autorisation d’une station-service à l’endroit en question aurait été annulé sous l’ancien PAG, alors qu’outre le fait que ce jugement a été rendu dans un tout autre contexte factuel, il échet de souligner que le tribunal a annulé le refus de l’autorisation dont question au seul motif que la servitude non aedificandi dont il était question dans ledit jugement, et unique motif de refus invoqué par la commune, n’était pas encore en vigueur au moment de la décision de refus de l’autorisation de construire.

Il suit de l’ensemble des développements qui précèdent, et compte des différents éléments mis en avant par les parties défenderesses tendant à établir que l’interdiction de stations-service dans la zone [MIX-u-BJ] est dictée par les particularités et caractéristiques propres du site, que l’article 4 de la partie écrite du PAG ne contrevient pas à l’article 9, paragraphe (2) du règlement grand-ducal du 8 mars 2017, mais que les autorités communales n’ont recouru qu’à leur pouvoir d’appréciation, leur conféré par l’article 7 dudit règlement grand-ducal en précisant les dispositions du même règlement grand-ducal en fonction desdites particularités et caractéristiques propres du site.

Le moyen tiré d’une illégalité de l’article 4 de la partie écrite du PAG est partant à rejeter pour ne pas être fondé.

2. Quant au moyen ayant trait au degré d’utilisation du sol, au nombre d’étages, et au nombre de logements La société … critique le degré d’utilisation du sol, le nombre d’étages, et le nombre de logements retenu sur son Lot pour être contraire au principe d’égalité et pour erreur manifeste d’appréciation.

Or, à cet égard, c’est à juste titre que les parties communal et étatique font valoir que les critiques de la société demanderesse sont dirigées contre le PAP QE et non pas contre le PAG, tel que déféré.

En effet, il ressort de l’article 1er du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 concernant le contenu du plan d’aménagement particulier « quartier existant » et du plan d’aménagement particulier « nouveau quartier », que le PAP QE réglemente notamment le degré d’utilisation du sol, le nombre de niveaux et le nombre d’unités de logement.

Etant donné qu’en l’espèce, le recours litigieux est exclusivement dirigé contre le PAG de la commune de Hesperange, et que le degré d’utilisation du sol, le nombre de niveaux et le nombre d’unités de logement pour les parcelles litigieuses sont précisés dans le PAP QE de la même commune, la légalité de son contenu peut faire l’objet d’un contrôle judiciaire uniquement dans le cadre d’un recours introduit contre ce PAP QE.

Il s’ensuit que le contenu du PAP QE échappe actuellement à l’office du tribunal administratif saisi7, de sorte que c’est à juste titre que la réclamation de la société demanderesse a été déclarée irrecevable par le ministre sur ce point.

7 En ce sens : Cour adm., 6 mai 2021, n° 44458C du rôle, disponible sur www.ja.etat.lu. Les considérations y relatives de la société demanderesse sont dès lors à rejeter pour ne pas être fondées.

3. Quant au moyen ayant trait au classement des parcelles litigieuses en PAP QE A la lecture de la requête introductive d’instance, il se dégage que la société demanderesse semble encore contester le classement de ses parcelles en PAP QE en sollicitant un classement en zone soumise à un PAP NQ, la société demanderesse ayant indiqué à cet égard dans sa requête introductive d’instance qu’: « Il s’agit d’une zone classée en nouveau quartier, donc susceptible d’être l’objet de PAP à l’initiative privée. Cette possibilité n’existe pas du côté opposé de la rue des Scillas qui se trouve classée quartier existant. C’est parfaitement arbitraire et inégalitaire. Il y a erreur d’appréciation manifeste et violation du principe d’égalité ».

Or, à cet égard, il échet de constater que si la société demanderesse a certes formulé cette demande auprès du ministre dans le cadre de sa réclamation du 9 décembre 2019, elle ne l’a toutefois pas formulée auprès de la commune dans ses objections du 9 avril 2019, où celle-ci s’est limitée à des considérations relatives au degré d’utilisation du sol et à invoquer la violation de l’article 4 de la partie écrite du PAG.

En ce qui concerne le contenu de la réclamation à adresser au collège des bourgmestre et échevins, respectivement au ministre, il convient d’abord de rappeler que la loi du 19 juillet 2004 a prévu à travers ses articles 13 et suivants une procédure non contentieuse d’adoption et d’approbation des PAG tendant à voir disparaître, au cours de l’élaboration desdits plans d’aménagement, les objections et réclamations solutionnées, tout en ne laissant subsister que celles maintenues et réitérées, lesquelles sont partant seules susceptibles d’être portées devant le ministre, respectivement les juridictions de l’ordre administratif. Le fait que l’intention du législateur est de faire disparaître au fur et à mesure des procédures d’aplanissement des difficultés les différentes demandes et réclamations des administrés implique que seules les réclamations d’ores et déjà formulées au cours de la procédure précontentieuse devant les autorités communales sont susceptibles d’être portées devant le ministre et ensuite devant le juge administratif. Il convient toutefois de préciser que la motivation à l’appui de ces réclamations peut être complétée et développée durant la phase précontentieuse devant le ministre, respectivement durant la phase contentieuse, pour autant que la réclamation en elle-même ait d’ores et déjà été présentée en phase précontentieuse devant les autorités communales, respectivement étatiques. Il y a partant lieu de distinguer entre le moyen nouveau avancé à l’appui d’une réclamation et la demande nouvelle invoquée une toute première fois devant le ministre, respectivement les juridictions administratives. Ainsi, le moyen nouveau qui se définit comme la raison de droit ou de fait invoquée à l’appui de la réclamation est susceptible d’être invoqué devant le ministre, respectivement le tribunal administratif même s’il y est invoqué pour la première fois, pour autant que la réclamation ait d’ores et déjà traversée la procédure précontentieuse sans aboutir. En revanche, les demandes nouvelles, se définissant comme demandes qui diffèrent de la demande initiale contenue dans l’observation ou la réclamation par son objet, par sa cause ou par les personnes entre qui elle est engagée n’ayant pas été valablement présentées au cours de la procédure d’élaboration du PAG devant les autorités communales, respectivement étatiques mais qui sont invoquées pour la première fois devant le ministre, respectivement devant le tribunal sont irrecevables8, sous réserve de la possibilité, expressément prévue par l’article 16 de la loi du 19 juillet 2004, d’introduire une 8 Voir, p. ex. : trib. adm., 17 septembre 2019, n° 41506 du rôle, disponible sur www.ja.etat.lu. réclamation devant le ministre à l’encontre d’une modification apportée au projet lors de l’adoption de ce dernier par le conseil communal, une telle modification ne pouvant, de par sa nature, faire l’objet d’une objection préalable à présenter auprès du collège échevinal.

En l’espèce, l’objection de la société … du 9 avril 2019 adressée à la commune avait pour objet de supprimer l’interdiction d’implantation d’une station-service de l’article 4 de la partie graphique du PAG, ainsi que d’augmenter le coefficient d’utilisation du sol à 1,95 pour ses parcelles.

Or, par sa réclamation du 9 décembre 2019 adressée au ministre, la société demanderesse, outre de réitérer son argumentation relative à l’article 4 de la partie graphique du PAG et de développer davantage son moyen relatif au degré d’utilisation du sol, critique pour la première fois le classement de ses parcelles en PAP QE et réclame un classement en PAP NQ, cette dernière demande constituant, en effet, une demande nouvelle non présentée à la commune pour porter sur un objet nettement distinct à son objection.

Il suit de ce qui précède que l’omission de formulation de la demande devant le collège échevinal entraîne l’irrecevabilité omisso medio de la demande nouvelle afférente, à travers la réclamation devant le ministre.

Il s’ensuit encore que la société demanderesse n’est pas non plus fondée à présenter cette même demande auprès du tribunal de céans, de sorte qu’elle est à rejeter.

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, et à défaut d’autres moyens, il y a lieu de rejeter le recours en annulation sous analyse pour n’être fondé en aucun de ses moyens.

V. Quant à la demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure La société demanderesse sollicite la condamnation de la partie étatique, ainsi que de la commune, à lui payer une indemnité de procédure de 3.000,-€ sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 10 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, demande qui est à rejeter compte tenu de l’issue du litige.

VI. Quant à la demande en distraction des frais Quant à la demande de distraction des frais au profit du mandataire de la partie étatique qui la sollicite, affirmant en avoir fait l’avance, il convient de rappeler qu’il ne saurait être donné suite à la demande en distraction des frais posée par le mandataire d’une partie, pareille façon de procéder n’étant point prévue en matière de procédure contentieuse administrative9.

Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant contradictoirement ;

9 Trib. adm., 14 février 2001, n° 11607 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 1289 et les autres références y citées.se déclare incompétent pour statuer sur le recours en réformation introduit à titre principal ;

déclare le recours en annulation irrecevable, dans la mesure où il vise la délibération du conseil communal de Hesperange du 25 février 2019 portant mise sur orbite de la procédure de refonte du plan d’aménagement général de la commune de Hesperange ;

pour le surplus reçoit le recours en annulation introduit à titre subsidiaire en la forme ;

au fond, le déclare non justifié partant en déboute ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure telle que formulée par la société demanderesse ;

rejette la demande de distraction des frais au profit du mandataire de la partie étatique ;

condamne la société demanderesse aux frais et dépens.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique extraordinaire du 10 février 2023 par :

Thessy Kuborn, vice-président, Géraldine Anelli, premier juge, Alexandra Bochet, juge, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 10 février 2023 Le greffier du tribunal administratif 18


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 45499
Date de la décision : 10/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-02-10;45499 ?

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