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04/11/2022 | LUXEMBOURG | N°44237

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 04 novembre 2022, 44237


Tribunal administratif N° 44237 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2022:44237 4e chambre Inscrit le 4 mars 2020 Audience publique du 4 novembre 2022 Recours formé par Monsieur …, …, contre deux décisions du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 35 (1), L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 44237 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 4 mars 2020 par Maître Ibtiha

l El Bouyousfi, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembour...

Tribunal administratif N° 44237 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2022:44237 4e chambre Inscrit le 4 mars 2020 Audience publique du 4 novembre 2022 Recours formé par Monsieur …, …, contre deux décisions du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 35 (1), L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 44237 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 4 mars 2020 par Maître Ibtihal El Bouyousfi, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, déclarant être né le … à … (Libye) et être de nationalité libyenne, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation de la décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 30 janvier 2020 portant refus de faire droit à sa demande en obtention d’une protection internationale et de l’ordre de quitter le territoire contenu dans le même acte ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 4 mai 2020 ;

Vu l’article 1er de la loi modifiée du 19 décembre 2020 portant adaptation temporaire de certaines modalités procédurales en matière civile et commerciale1 ;

Vu les communications respectives de Maître Ibtihal El Bouyousfi et de Monsieur le délégué du gouvernement Tom Hansen du 20 juin 2021 suivant lesquelles ils marquent leur accord à ce que l’affaire soit prise en délibéré sans leur présence ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions entreprises ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport à l’audience publique du 29 juin 2021, les parties étant excusées.

Le 30 novembre 2018, Monsieur … introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, ci-après dénommé « le ministère », une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par « la loi du 18 décembre 2015 ».

1 « Les affaires pendantes devant les juridictions administratives, soumises aux règles de la procédure écrite et en état d’être jugées, pourront être prises en délibéré sans comparution des mandataires avec l’accord de ces derniers. » Le même jour, il fut entendu par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Toujours le même jour, Monsieur … passa encore un entretien auprès du ministère en vue de déterminer l’Etat responsable de l’examen de sa demande de protection internationale en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, dénommé ci-après « le règlement Dublin III ».

En date des 9 avril 2019, 6 mai 2019 et 19 novembre 2019, Monsieur … fut entendu par un agent du ministère sur sa situation et sur les motifs se trouvant à la base de sa demande de protection internationale.

Par ordonnance du 19 juillet 2019, le juge des tutelles près le tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg rejeta la demande de Monsieur … en nomination d’un administrateur ad hoc.

Par décision du 30 janvier 2020, notifiée à l’intéressé par lettre recommandée envoyée le 31 janvier 2020, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après dénommé « le ministre », rejeta la demande de protection internationale de Monsieur … et lui ordonna de quitter le territoire luxembourgeois dans un délai de trente jours. Cette décision est motivée comme suit :

« (…) J'ai l'honneur de me référer à votre demande en obtention d'une protection internationale que vous avez introduite le 30 novembre 2018 sur base de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire (ci-après dénommée la « Loi de 2015 »).

Je suis malheureusement dans l'obligation de porter à votre connaissance que je ne suis pas en mesure de réserver une suite favorable à votre demande pour les raisons énoncées ci-après.

1. Quant à vos déclarations En mains le rapport du Service de Police Judiciaire du 30 novembre 2018 (ci-après dénommé le « Rapport de police judiciaire »), le rapport d'entretien « Dublin III » du 30 novembre 2018, le rapport d'entretien de l'agent du Ministère des Affaires étrangères et européennes des 9 avril et 6 mai 2019 (ci-après dénommé le « Rapport d'entretien »), ainsi que le rapport d'entretien complémentaire du 19 novembre 2019 sur les motifs sous-tendant votre demande de protection internationale (ci-après dénommé le « Rapport d'entretien complémentaire »).

Relevons tout d'abord qu'il ressort de votre dossier administratif que vous auriez donné lors de vos séjours en Italie et en France, des identités différentes de celle donnée au Luxembourg. Quant aux différentes dates de naissance renseignées, vous expliquez notamment que vous seriez venu à deux reprises au Ministère des Affaires étrangères et européennes pour introduire votre demande, à savoir le 28 novembre 2018, puis le 30 novembre 2018. Vous expliquez que la première fois : « j'avais donné d'abord la date de naissance de 2002, mais comme on ne m'a pas cru j'ai dû revenir le lendemain et j'ai dit que je suis né en … » (p.2 du 2 rapport d'entretien). Vous ajoutez que vous auriez été obligé de passer la nuit dans la rue et que face à cette situation précaire, vous seriez revenu au bureau de l'immigration en date du 30 novembre 2019 et vous auriez déclaré que vous seriez majeur dans l'unique but de voir votre demande enregistrée.

Notons, pourtant que vous aviez reconnu auparavant qu': « ich habe lediglich in Italien einen anderen Geburtsdatum angegeben, um in ein besseres Heim zu kommen, das habe ich auch anfangs hier in Luxembourg versucht » (cf. rapport de police judiciaire). Pourtant, lors de votre entretien complémentaire du 19 novembre 2019, vous avez encore une fois insisté sur le fait que la date de naissance renseignée par l'agent, à savoir le …, ne serait pas correcte.

Quoi qu'il en soit, force est de constater que votre demande en nomination d'un administrateur ad hoc a été rejetée en date du 19 juillet 2019 par une ordonnance du juge des tutelles de et à Luxembourg, car il a été retenu que tous éléments en cause indiquaient que vous n'êtes pas mineur.

Monsieur, vous indiquez que vous auriez vécu avec votre famille dans le village de « … », à l'est de la ville de … en Libye, et ce depuis 2014, respectivement depuis 2015. Vous précisez qu'avant cela, vous auriez vécu dans le quartier « … » (marché de poissons), cependant vous auriez été contraint de quitter cet endroit à cause « d'accrochages ». Soulevons que vous avez dans un premier temps indiqué que votre famille vivrait encore à « … », puis lors de votre entretien complémentaire du 19 novembre 2019, vous avez déclaré que votre famille aurait déménagé dans la ville de « … », « ça fait peut-être un an » (p.4 du rapport d'entretien complémentaire). A ce titre, vous expliquez que votre père vous aurait contacté au mois d'octobre 2019 et qu'il vous aurait fait part de leur déménagement occasionné par des dérangements de la part de milices, tout en prétendant que « je n'ai plus de contact avec ma famille » (p.2 du rapport d'entretien complémentaire).

Vous déclarez que vous auriez quitté la Libye au courant du mois d'octobre 2018. Vous expliquez que vous seriez parvenu à vous rendre à Naples en Italie en vous cachant dans un bateau marchand italien. Vous indiquez que vous auriez été découvert sur ce bateau et amené à un poste de police en date du 21 octobre 2018. Vous déclarez que vous seriez resté à Naples pendant trois semaines, respectivement un mois. Ensuite, vous auriez fait appel à un passeur pour franchir la frontière française, cependant vous auriez été interpellé et amené à un poste de police en France. Vous auriez dit aux autorités françaises que vous auriez 17 ans. Partant, vous auriez été placé dans un foyer pour mineurs près de Nice où vous auriez passé deux nuits.

Puis, vous auriez quitté ce foyer pour vous rendre à Paris où vous seriez resté trois, respectivement quatre jours, avant de prendre un bus en direction du Luxembourg en date du 27 novembre 2018.

Monsieur, vous indiquez sur votre fiche de motifs manuscrite du 30 novembre 2018 que vous auriez quitté la Libye à cause de la guerre, de l'instabilité, du fait que votre maison aurait été détruite par des bandes armées, des pillages et des menaces de mort. Selon le ressort du rapport de police judiciaire du 30 novembre 2018, vous auriez quitté votre pays d'origine parce vous n'auriez pas pu survivre en Libye sans devenir membre d'une milice. Finalement, il ressort du rapport d'entretien de l'agent du Ministère des Affaires étrangères et européennes des 9 avril, 6 mai 2019 et du rapport d'entretien complémentaire du 19 novembre 2019, que vous auriez quitté la Libye, premièrement à cause de la guerre, puis à cause de miliciens non autrement identifiés qui seraient à votre recherche. A ce titre, vous expliquez que vous auriez 3 été arrêté à trois reprises, questionné et même torturé par des milices différentes, et ce à trois points de contrôle différents.

Votre première arrestation aurait eu lieu en 2016, au 4ième, respectivement 5ième mois à un point de contrôle entre « … » et le quartier « … ». Vous déclarez que vous auriez été retenu par des miliciens non autrement identifiés pendant deux jours, puis relâché. Vous expliquez que « c'est uniquement parce que j'ai dit que j'habitais dans le quartier du marché de poissons.

Cela a suffi pour m'arrêter et pour me retenir. Ils m'ont accusé de collaborer avec la milice qui contrôle notre quartier » (p.8 du rapport d'entretien). Vous prétendez que la milice de votre quartier s'appellerait « Durua ».

Deux, voire trois mois plus tard, vous auriez fait l'objet d'une deuxième arrestation à … dans le quartier de « … », mais cette fois-ci vous auriez été accompagné de votre père et vos frères. Vous affirmez que vous auriez tous été retenus pendant treize jours, torturés puis relâchés. Vous expliquez que : « j'ai été frappé afin que j'avoue de travailler avec eux au quartier du marché de poissons. Ils m'ont demandé de leur fournir les noms de ceux avec qui je travaille. J'ai dit que je savais rien et que je ne connaissais pas ces gens » (p.8 du rapport d'entretien). Vous prétendez également que : « les milices font cela pour faire peur aux gens afin qu'ils travaillent et collaborent avec elles » (p.11 du rapport d'entretien). Vous indiquez que vous ne sauriez pas pourquoi votre père et vos frères auraient également été arrêtés et emprisonnés, ceci dit vous prétendez qu'« ils ont subi le même traitement que moi. La même chose. On a cassé le genou de mon grand-frère » (p.13 du rapport d'entretien). Vous indiquez que votre père ne voudrait pas quitter Libye et que vos frères seraient restés en Libye, car ils ne seraient pas recherchés.

Votre troisième arrestation aurait eu lieu au 3ième mois en 2017 à « … » et cette fois-ci des individus non autrement identifiés se seraient rendus à votre domicile à une heure du matin pour vous appréhender. Soulignons que vous prétendez ignorer comment ces miliciens auraient su où vous habitiez, alors que vous auriez uniquement dit que vous seriez du quartier du marché de poissons. Vous indiquez dans un premier temps que vous auriez été emprisonné pendant dix, puis pendant 27 jours, respectivement pendant un mois, que vous auriez été questionné à propos de la prétendue milice « Durua » et torturé par des individus non autrement identifiés. Puis, un officier, respectivement un enquêteur, les aurait interrompus et il vous aurait assuré que vous n'alliez plus subir ce genre de traitements. Ceci dit, les actes de torture auraient tout de même repris le lendemain. Finalement, un enquêteur vous aurait informé que vous seriez relâché grâce au témoignage d'une personne non autrement identifiée qui aurait déclaré que vous ne travailleriez pas avec la milice « Durua ». Cependant, vous ne deviez pas quitter la ville afin de rester à disposition pour les besoins d'une prétendue enquête.

Après quelques mois, « ils » seraient revenus à votre domicile et étant donné que votre père leur aurait indiqué que vous vous trouviez à l'étranger, « ils » l'auraient emmené, retenu pendant une nuit, puis relâché. Vous indiquez que ce jour-là, vous vous seriez trouvé chez un ami dans le village de « … » et votre mère vous aurait conseillé de ne pas rentrer. Vous indiquez que vous vous seriez par la suite rendu chez votre oncle maternel dans le village de « … » non loin de « … ». Vous y seriez resté pendant un mois avant de rentrer à la maison. Vous auriez dit à votre père que vous devriez quitter le pays et aller par exemple en Tunisie ou encore en Egypte, votre père aurait cependant refusé. Finalement, il aurait changé d'avis et se serait concerté avec votre oncle maternel pour trouver un moyen pour vous faire partir.

4 Vous expliquez que vous auriez échoué la première fois que vous auriez tenté de quitter la Libye en embarquant sur une barque. Vous précisez que votre père auriez payé 4.000 dinars libyens (2572.76 €) à un passeur, mais que vous auriez été arrêté près de la ville « d' … » par des personnes non autrement identifiées, puis relâché. Votre oncle vous aurait ensuite ramené à …, cependant vous prétendez que : « mon oncle ne voulait plus que je reste chez lui car j'étais chez lui depuis plus de 5 mois et il avait peur que je sois découvert chez lui » (p.10 du rapport d'entretien). Plus tard, vous déclarez que : « je suis resté chez lui de janvier à octobre 2018 mais je me déplaçais entre chez moi et mon oncle, mais très souvent j'étais chez mon oncle » (p.12 du rapport d'entretien). Vous précisez qu'il n'y aurait eu qu'un seul point de contrôle entre la maison de vos parents et celle de votre oncle maternel, ce qui vous aurait permis de circuler librement entre ces deux endroits lorsqu'il n'y aurait pas eu de contrôles. Vous déclarez que pendant ces neuf mois, vous seriez resté à la maison et que vous auriez joué à la « Playstation ». De plus, vous indiquez qu'il n'y aurait eu aucun incident durant cette période.

Finalement, un ami vous aurait informé qu'il comptait embarquer sur un bateau en direction de l'Italie et vous l'auriez accompagné.

Vous soutenez qu'en Libye, « les miliciens contrôlent tout. Il n'y a pas d'autorité de l'État chez qui j'aurais pu porter plainte » (p.13 du rapport d'entretien). Ceci dit, vous indiquez que votre père se serait déjà rendu auprès d'une autorité dont vous ignorez le nom, mais qui se trouverait près de « … » pour porter plainte suite au vol de sa voiture, mais rien n'aurait été fait. En outre, vous prétendez que vous ne vous seriez pas installé dans une autre ville ou autre région de votre pays d'origine, car dans toutes les villes il y aurait « ce problème » et l'insécurité s'y serait installée depuis la chute de Kadhafi. Vous affirmez que vous risqueriez d'être de nouveau arrêté ou même tué en cas de retour en Libye. Vous affirmez par ailleurs que votre oncle maternel aurait été arrêté par des personnes non autrement identifiées et que ces personnes le libéreraient à condition que vous vous rendiez. Vous pensez qu'il aurait été arrêté parce que vous vous trouviez à son domicile.

Vous ne présentez aucun document à l'appui de votre demande. A cet égard, il échet de constater que vous avez dans un premier temps déclaré que votre passeport se trouverait en Libye et que : « si vous voulez, je peux faire parvenir mes documents de Libye » (p.2 du rapport d'entretien « Dublin III » du 30 novembre 2018). Puis, vous avez affirmé que vous n'auriez pas de passeport, mais qu'un ami de votre frère vous aurait envoyé une photo d'un document qui aurait dû vous servir de passeport. Vous indiquez notamment que vous auriez perdu cette photo depuis longtemps et que le téléphone sur lequel se trouverait cette photo serait cassé, mais que « c'est possible que mon frère m'envoie cette photo » (p.4 du rapport d'entretien). Finalement, lors de votre entretien complémentaire du 19 novembre 2019, vous avez affirmé que : « c'était une photo trafiquée. J'étais contraint à présenter une photo trafiquée parce que je dormais dans la rue parce qu'au ministère on a refusé de m'accueillir » (p.2 du rapport d'entretien complémentaire). Vous indiquez cependant que votre frère ne pourrait pas vous envoyer cette photo, car vous n'auriez soit-disant plus de contact avec votre famille.

2. Quant à la motivation du refus de votre demande de protection internationale  Quant à la crédibilité de votre récit Rappelons, avant tout autre progrès en cause, que la détermination de l'éligibilité à la protection internationale est menée en appliquant une approche en deux étapes. La première étape consiste à collecter les informations pertinentes, identifier les faits pertinents de la demande, et déterminer, le cas échéant, quelles déclarations du demandeur et quels autres 5 éléments peuvent être acceptés. L'évaluation de la crédibilité fait donc partie intégrante de cette première étape. Les faits pertinents acceptés viennent appuyer l'examen qui sera effectué à la deuxième étape, qui consiste à déterminer le caractère fondé de la crainte de persécution de la part du demandeur, ou du risque de subir des atteintes graves.

Monsieur, il y a lieu de constater que la crédibilité de votre récit est remise en cause pour les raisons suivantes.

En effet, il convient de noter que vous avez manifestement induit en erreur les autorités en ce qui concerne votre identité. Vous avez non seulement utilisé plusieurs alias lors de votre séjour en Europe (…., né le … en Libye ; …, né le … en Palestine et …, né le … en Libye) mais, lors de votre arrivée au Luxembourg, vous avez indiqué aux autorités « ich habe lediglich in Italien einen anderen Geburtsdatum angegeben, um in ein besseres Heim zu kommen, das habe ich auch anfangs hier in Luxembourg versucht » (cf. rapport du Service de Police Judiciaire).

Confronté à cette déclaration, vous indiquez que vous n'auriez pas d'explications.

Force est de constater que vous continuez à soutenir que vous seriez mineur, malgré le fait que tous les éléments en l'espèce prouvent le contraire. Ainsi, c'est à juste titre que le juge des tutelles près le tribunal d'arrondissement de et à Luxembourg a retenu que : « si certaines de ces contradictions peuvent le cas échant s'expliquer par des malentendus, l'immaturité intellectuelle du requérant ayant déclaré n'avoir jamais fréquenté d'école, des erreurs de calcul, des mauvaises transcriptions de nom de l'écriture arabe vers l'écriture latine, ou encore des imprécisions de l'interprétation des propos tenu de part et d'autre, la somme impressionnante de ces contradictions est telle qu'elle discrédite totalement la parole du requérant. (…) Il résulte de l'ensemble de ces considérations que …, alias …, alias …, n'est pas mineur et que la demande est partant à rejeter ».

Quant à votre prétendu passeport, il y a lieu de souligner que vous avez finalement avoué que : « c'était une photo trafiquée. J'étais contraint à présenter une photo trafiquée parce que je dormais dans la rue parce qu'au ministère on a refusé de m'accueillir » (p. 2 du rapport d'entretien complémentaire) Pour éviter tout amalgame, il y a lieu de remettre certaines choses dans leur contexte.

Vous prétendez que vous auriez été contraint de présenter une photo trafiqué suite au refus de l'agent ministériel de vous enregistrer comme mineur et que suite à ce refus vous auriez dû passer une nuit dans la rue en hiver. Or, cette déclaration ne correspond aucunement à la réalité, et ce d'autant plus que vous vous contredisez vous-même. En effet, vous indiquez être arrivé au Luxembourg en date du 27 novembre 2018, avoir passé deux nuits à la Logopédie, soit du 27 au 29 novembre 2018, et avoir passé le troisième jour dans la rue. Ceci dit, il ressort de votre fiche de données personnelles que vous vous êtes déclaré comme étant majeur lorsque vous vous êtes présenté le matin du 30 novembre 2018, à 8.30 heures au Ministère et que lors de l'entretien Dublin III qui a eu lieu le même jour à 14.15 heures, vous avez déclarez que « si vous voulez, je peux faire parvenir mes documents de Libye » (p.2 du rapport d'entretien « Dublin III » du 30 novembre 2018). Partant, vous ne saurez légitimement prétendre que la précarité vous aurait poussé à faire toutes ces fausses déclarations, alors vous avez dormi dans la rue que le soir du 30 novembre 2018 au 1er décembre 2018.

Ainsi, aucun crédit ne peut être accordé à vos dires quant à votre identité. En effet, une personne réellement persécutée collabore en principe avec les autorités et ne tente pas ostentatoirement de dissimuler son identité et de faire de fausses déclarations. De tout ce qui 6 précède, il convient de conclure que votre identité est sujette à caution, tout comme l'est la sincérité de l'entièreté de vos dires.

* En outre, le Ministre se doit de constater que si vous entendez dégager le bien-fondé de votre demande de protection internationale, tant principale que subsidiaire, des persécutions vécues respectivement des risques de persécutions ou d'atteintes graves pesant contre vous, en cas de retour en Libye, du fait que de prétendues milices non autrement identifiées seraient à votre recherche, la réalité, sinon la crédibilité de votre récit reste incertaine. A cela s'ajoute que vous n'êtes pas en mesure d'en corroborer le moindre détail avec une preuve quelconque.

En effet, l'exposé de ce qui vous serait arrivé se révèle essentiellement imprécis et confus, d'une part, et vos tentatives d'explications pour combler les lacunes et incohérences pointées par l'agent ministériel lors de vos entretiens, au sujet de votre crédibilité et de la réalité même de vos dires, ne sont pas convaincantes pour ébranler les constatations et conclusions dégagées y relativement par le Ministre sur base des éléments d'appréciation soumis en cause, d'autre part.

Ainsi, il appert curieux que vous n'ayez pas initialement fait état de vos prétendues arrestations et des actes de torture subis de la part de ces miliciens inconnus comme motif à la base de votre demande de protection internationale, puisque sur votre fiche manuscrite que vous avez remplie le 30 novembre 2018, vous avez indiqué avoir quitté votre pays d'origine pour les raisons suivantes : la guerre, l'instabilité, le fait que votre maison aurait été détruite par des bandes armées, le pillages et les menaces de mort, sans faire allusion d'une quelconque manière à des violences subies par des miliciens. Confronté à cette contradiction, vous répondez à l'agent ministériel que : « personne ne m'a posé de questions là-dessus, donc je n'ai l'ai pas écrit » (p. 4 du rapport d'entretien complémentaire). Or, force est de constater que vous avez tout de même indiqué à l'agent de la police judiciaire en date du 30 novembre 2018, soit le même jour que vous avez rempli votre fiche manuscrite de motifs que vous auriez quitté votre pays d'origine parce qu': « Ich habe Libyen verlassen wegen den Milizen, ich hätte nicht lange dort überlebt ohne mich einer Miliz anzugliedern » (cf. Rapport de police judiciaire), sans que personne ne vous pose de questions sur les milices.

A cela s'ajoute que vous prétendez que vous auriez été arrêté, emprisonné et torturé par trois milices différentes et à trois points de contrôle différents, tout en indiquant que :

« c'est très difficile de savoir si c'est une autre milice ou pas » (p. 3 du rapport d'entretien complémentaire). Vous affirmez que vous auriez à chaque fois été questionné sur votre prétendue appartenance à la milice « Durua », puis relâché.

Lors de votre troisième arrestation, vous déclarez que des individus non autrement identifiés seraient venus à votre domicile à une heure du matin pour vous appréhender, alors que vous aviez prétendument indiqué aux miliciens lors de vos précédentes arrestations que vous veniez du quartier du marché de poissons. Confronté à cette contradiction, vous affirmez que vous ne sauriez pas comment les miliciens auraient su que vous habitiez à « … ». A cela s'ajoute qu'une personne non autrement identifiée vous aurait permis lors de cette même arrestation d'être innocenté quant aux soupçons qui auraient pesé sur votre éventuelle appartenance à cette dite milice. Un enquêteur, voire un officier, vous aurait informé que vous seriez relâché grâce à ce témoignage, mais que vous ne deviez pas quitter la ville afin de rester 7 à disposition pour les besoins d'une prétendue enquête. Ainsi, il est pour le moins curieux, alors que vous n'auriez rien eu à vous reprocher que vous vous seriez tout de même senti en danger après votre mise en liberté, jusqu'à vouloir quitter votre pays d'origine.

De plus, vous indiquez que : « mes parents m'ont dit que pendant 20 jours, ils ne savaient pas où j'avais disparu » (p. 11 du rapport d'entretien), alors que vous auriez été retenu pendant 27 jours, respectivement pendant un mois. Vous déclarez qu'ils vous auraient cherché mais que vous ne savez pas quelles démarches ils auraient effectué. Pourtant, vous auriez su quelles démarches votre père aurait effectué après le prétendu vol de sa voiture.

Par ailleurs, vous indiquez avoir été torturé lors de vos arrestations, pourtant il ne ressort aucunement de vos déclarations que vous seriez allé chez un médecin. Or, vous expliquez que votre frère, à qui des miliciens auraient cassé le genou serait allé voir un médecin.

De surcroît, vous prétendez dans un premier temps que vous ne seriez plus en contact avec votre famille, puis vous indiquez que votre père vous aurait contacté en octobre 2019.

En plus, il n'est manifestement pas crédible que vous tentiez de justifier le maintien de votre frère et votre père en Libye par le fait que contrairement à vous, ils ne seraient pas recherchés. En effet, étant donné que le prétendu « souci » principal de ces miliciens aurait été votre provenance du quartier du « marché des poissons », le même « souci » aurait dû s'appliquer à votre père et à votre frère qui auraient été arrêtés en même temps que vous. Il ne ressort par ailleurs aucun autre élément de votre dossier qui permettrait de déduire que vous risqueriez d'être, contrairement à votre frère et père, spécialement visé ou menacé par des miliciens en Libye.

A titre additionnel, vous soutenez que vous ne connaitriez pas l'armée nationale libyenne (ANL) et que vous n'auriez aucun avis à donner sur le maréchal Haftar qui commande pourtant l'armée nationale libyenne. Il est pour le moins surprenant que vous ne connaissiez pas l'armée national libyenne, alors que la ville de … est passée entièrement sous le contrôle de I'ANL en 2017. Il n'est pareillement pas crédible qu'une personne qui aurait été forcée à quitter, d'abord sa maison et son quartier et puis son pays d'origine pour se réfugier en tant que demandeur de protection internationale à l'étranger se moque totalement du destin futur de son pays et n'aurait « aucun avis là-dessus ». Ce constat vaut d'autant plus que votre famille serait donc originaire du quartier « …» de …, « dernier rempart » des miliciens de l'Etat islamique à …, avant que ces derniers n'en perdent le contrôle lors de la bataille de … lancée par le général Haftar. Il n'est dans ce même contexte pas non plus compréhensible pourquoi une fois la paix rétablie à … grâce au général Haftar et suite à la chute finale de l'état islamique, votre famille n'ait pas décidé de retourner vivre dans votre quartier ou du moins dans votre ville.

Indiquons à titre d'information que : « le commandant en chef de l'Armée nationale libyenne, le maréchal Khalifa Haftar, a annoncé mercredi que la ville de … avait été libérée des terroristes. « Les forces armées vous annoncent une bonne nouvelle, la ville de … est libérée du terrorisme. … est complètement libérée », a déclaré M. Haftar dans une allocution vidéo diffusée par le centre de presse de l'Armée nationale libyenne. L'Armée nationale libyenne, dirigée par le maréchal Khalifa Haftar, menait depuis deux ans une opération à … contre les groupes terroristes Daech et Al-Qaida ».

8 « L’ANL a réussi à reconquérir une grande partie de …, deuxième ville de Libye et berceau de la révolution de 2011, qui était tombée aux mains de milices jihadistes en 2014.

"Maintenant, nos forces encerclent totalement la zone de Qanfouda", le dernier bastion des groupes jihadistes à l'ouest de …, a ajouté la même source ».

Au vu de tout ce qui précède et partant au vu du manque de crédibilité manifeste de vos déclarations, aucune protection internationale ne vous est accordée.

Quand bien même votre récit serait crédible, ce qui reste contesté, il s'avère que vous ne rempliriez tout de même pas les conditions pour l'octroi du statut de réfugié, respectivement pour l'octroi du statut conféré par la protection subsidiaire.

 Quant au refus du statut de réfugié Les conditions d'octroi du statut de réfugié sont définies par la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (ci-après dénommée la « Convention de Genève ») et par la Loi de 2015.

Aux termes de l'article 2 point f de la Loi de 2015, qui reprend l'article 1A paragraphe 2 de la Convention de Genève, pourra être qualifiée de réfugié : « tout ressortissant d'un pays tiers ou apatride qui, parce qu'il craint avec raison d'être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner et qui n'entre pas dans le champ d'application de l'article 45 ».

L'octroi du statut de réfugié est soumis à la triple condition que les actes invoqués soient motivés par un des critères de fond définis à l'article 2 point f de la Loi de 2015, que ces actes soient d'une gravité suffisante au sens de l'article 42 paragraphe 1 de la prédite loi, et qu'ils émanent de personnes qualifiées comme acteurs aux termes de l'article 39 de la loi susmentionnée. Notons que ces trois conditions prévues par la Loi de 2015 doivent être remplies cumulativement, ce qui n'est manifestement pas le cas en l'espèce.

Avant tout progrès en cause, il y a lieu de souligner que le comportement que vous avez adopté depuis votre départ de votre pays d'origine paraît incompatible avec celui d'une personne réellement persécutée, respectivement qui risque de subir des atteintes graves et réellement à la recherche d'une protection internationale. Force est en effet de constater que vous déclarez avoir séjourné en Italie et en France et même d'avoir été placé dans des foyers pour mineurs, sans y introduire une demande de protection internationale.

Or, on peut légitimement s'attendre à ce qu'une personne ayant été persécutée ou qui craint d'être persécutée dans son pays d'origine, respectivement qui risque de subir des atteintes graves, aurait immédiatement entamé les démarches en vue de l'obtention d'une protection internationale dès son arrivée sur le territoire européen ou du moins dans les plus brefs délais; d'autant plus que vous auriez donc réussi votre « plan » en France d'être enregistré comme mineur et ainsi profiter de meilleures conditions d'accueil. Or, tel n'a manifestement pas été votre cas.

9 A cela s'ajoute qu'un demandeur de protection internationale ne saurait choisir le pays où il introduit une demande de protection internationale pour des seules considérations de convenance personnelle. Vous indiquez que notamment que : « J'ai entendu dire que le Luxembourg est un beau pays où il n'y a pas beaucoup de migrants. J'aurais pu partir aux Pays-Bas ou en Suède, mais j'avais en tête le Luxembourg » (p. 13 du rapport d'entretien).

Il y a en outre lieu de relever que la reconnaissance du statut de réfugié n'est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d'origine, mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur qui doit établir, concrètement, que sa situation individuelle est telle qu'elle laisse supposer une crainte fondée de persécution au sens de ta Convention de Genève.

Or, les faits que vous alléguez ne sauraient constituer un motif justifiant la reconnaissance du statut de réfugié, puisqu'ils ne peuvent établir dans votre chef une crainte fondée d'être persécuté dans votre pays d'origine du fait de votre race, de votre religion, de votre nationalité, de votre appartenance à un groupe social ou de vos convictions politiques.

En effet, vous indiquez que vous auriez été arrêté à trois reprises par des milices différentes non autrement identifiées, questionné et même torturé, et ce à trois points de contrôle différents. Vous expliquez que : « c'est uniquement parce que j'ai dit que j'habitais dans le quartier du marché de poissons. Cela a suffi pour m'arrêter et pour me retenir. Ils m'ont accusé de collaborer avec la milice qui contrôle notre quartier » (p.8 du rapport d'entretien). Vous prétendez également que : « les milices font cela pour faire peur aux gens afin qu'ils travaillent et collaborent avec elles » (p.11 du rapport d'entretien). Vous indiquez que vous pourriez être de nouveau arrêté en cas de retour en Libye et « qu'ils » pourraient vous tuer parce que vous vous seriez enfui, « je ne me suis pas rendu » (p.13 du rapport d'entretien).

Quand bien même les évènements que vous auriez vécus seraient liés à un des critères de fonds prévus par la Convention de Genève ou par la Loi de 2015, ce qui reste contesté, il s'avère que ces actes auraient été commis par des personnes privées qui restent notamment inconnues. Or, s'agissant d'actes émanant de personnes privées, une persécution commise par des tiers peut être considérée comme fondant une crainte légitime au sens de la Convention de Genève uniquement en cas de défaut de protection de la part des autorités. Or, tel n'est pas le cas en l'espèce. En effet, vous déclarez ne pas avoir porté plainte auprès d'une autorité sous prétexte que : « les miliciens contrôlent tout. Il n'y a pas d'autorité de l'Etat chez qui j'aurais pu porter plainte » (p.13 du rapport d'entretien). Ceci dit, vous indiquez que votre père se serait déjà rendu auprès d'une autorité dont vous ignorez le nom mais qui se trouverait près de « … » pour porter plainte suite au vol de sa voiture, même si selon vos affirmations rien n'aurait été fait.

Eu égard à tout ce qui précède, il échet de relever que vous n'apportez aucun élément de nature à établir qu'il existerait de sérieuses raisons de croire que vous auriez été persécuté, que vous auriez pu craindre d'être persécuté respectivement que vous risquez d'être persécuté en cas de retour dans votre pays d'origine, de sorte que le statut de réfugié ne vous est pas accordé.

 Quant au refus du statut conféré par la protection subsidiaire 10 Aux termes de l'article 2 point g de la Loi de 2015 « tout ressortissant d'un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d'origine ou, dans le cas d'un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l'article 48, l'article 50, paragraphes 1 et 2, n'étant pas applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n'étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays » pourra obtenir le statut conféré par la protection subsidiaire.

L'octroi du statut conféré par la protection subsidiaire est soumis à la double condition que les actes invoqués soient qualifiés d'atteintes graves au sens de l'article 48 de la Loi de 2015 et que les auteurs de ces actes puissent être qualifiés comme acteurs au sens de l'article 39 de cette même loi.

L'article 48 définit en tant qu'atteinte grave « la peine de mort ou l'exécution », « la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d'origine » et « des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d'un civil en raison d'une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international ».

Monsieur, vous indiquez que vous auriez quitté la Libye premièrement à cause de la guerre. A ce titre, une analyse plus approfondie de l'article 48 c) de la Loi de 2015 mérite d'être faite.

Rappelons que le demandeur de protection internationale doit établir qu'il existe dans son pays d'origine « des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d'un civil en raison d'une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international ».

La Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE) a précisé dans ce contexte, dans le considérant 43 de l'arrêt du 17 février 2009, « Meki Elgafaji, Noor Elgafaji contre Staatssecretaris van Justitie (Pays-Bas) », numéro C-465/07, que « […] l'article 15, sous c), de la directive, lu en combinaison avec l'article 2, sous e), de la même directive, doit être interprété en ce sens que:

- l'existence de menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne du demandeur de la protection subsidiaire n'est pas subordonnée à la condition que ce dernier rapporte la preuve qu'il est visé spécifiquement en raison d'éléments propres à sa situation personnelle ;

- l'existence de telles menaces peut exceptionnellement être considérée comme établie lorsque le degré de violence aveugle caractérisant le conflit armé en cours, apprécié par les autorités nationales compétentes saisies d'une demande de protection subsidiaire ou par les juridictions d'un État membre auxquelles une décision de rejet d'une telle demande est déférée, atteint un niveau si élevé qu'il existe des motifs sérieux et avérés de croire qu'un civil renvoyé dans le pays concerné ou, le cas échéant, dans la région concernée courrait, du seul fait de sa présence sur le territoire de ceux-ci, un risque réel de subir lesdites menaces. ».

Elle a également retenu, dans le considérant 39 du prédit arrêt, que « […] plus le demandeur est éventuellement apte à démontrer qu'il est affecté spécifiquement en raison d'éléments propres à sa situation personnelle, moins sera élevé le degré de violence aveugle requis pour qu'il puisse bénéficier de la protection subsidiaire ».

11 Le conflit armé interne a été défini par la CJUE dans son arrêt du 30 janvier 2014, « Diakité c. Belgique », numéro C-285/12, et plus particulièrement en son considérant 35, de la manière suivante : « […] lorsque les forces régulières d'un État affrontent un ou plusieurs groupes armés ou lorsque deux ou plusieurs groupes armés s'affrontent, sans qu'il soit nécessaire que ce conflit puisse être qualifié de conflit armé ne présentant pas un caractère international au sens du droit international humanitaire et sans que l'intensité des affrontements armés, le niveau d'organisation des forces armées en présence ou la durée du conflit fasse l'objet d'une appréciation distincte de celle du degré de violence régnant sur le territoire concerné. ».

Quant aux violences aveugles, elles ont été définies par la CJUE dans le prédit arrêt « … c. Belgique », notamment dans les considérants 34 et 35, comme étant des violences qui s'étendent à des civils sans considération de leur situation personnelle ou de leur identité.

Dans ce même arrêt, la CJUE a relevé qu'il appartient aux autorités nationales ou au juge saisi d'un recours contre une décision refusant la protection subsidiaire d'apprécier le degré de violence aveugle dans le cadre d'un conflit armé.

En d'autres termes, une protection subsidiaire sera accordée en vertu de l'article 48 c) précité, (i) si le demandeur de protection internationale démontre l'existence d'un conflit armé interne, à savoir de graves affrontements entre l'Etat et un ou des groupes armés ou entre différents groupes armés sur le territoire de son pays d'origine, sa région d'origine ou celle ou il s'est établi avant sa fuite, et (ii), si le demandeur reste en défaut d'apporter des éléments propres à sa situation personnelle qui aggraveraient dans son chef le risque de subir des atteintes graves. Il doit alors soumettre la preuve que les violences découlant du prédit conflit touchent les civils sans aucune considération personnelle et ont un niveau si élevé que le simple fait d'être sur l'ensemble dudit territoire, ou dans la région dont il est originaire ou qu'il a fui, l'exposerait à un risque réel de subir les prédites atteintes graves, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

En effet, la Cour administrative a retenu dans un arrêt du 4 octobre 2018 qu': « au regard de l'ensemble des éléments d'appréciation lui soumis, la Cour est amenée à reconnaître que la situation sécuritaire existant en Lybie était et reste dangereuse et précaire, avec des incidents violents qui continuent de s'y produire régulièrement.

Ceci dit, il se dégage des chiffres communiqués par la partie étatique et non contestés en tant que tels, que 4 civils ont été tués dans des attentats en Lybie au mois d'avril 2018, 5 au courant du mois de mars 2018 et 13 au courant du mois de février 2018.

Le nombre des victimes d'incidents violents devant être mis en relation avec le nombre total de la population vivant en Lybie, à savoir environ 6,5 millions d'habitants, il n'appert pas que la simple présence d'un individu en Lybie, l'expose ipso facto, avec un certain degré de probabilité, à des menaces individuelles graves.

Ainsi, le seul fait d'être originaire de Lybie et, plus particulièrement, de la ville de … ou de …, n'est pas un élément justifiant à lui seul et automatiquement l'octroi du statut conféré par la protection subsidiaire ».

Ce constat est corroboré par le fait que vous indiquez que votre famille se trouverait depuis au moins un an à « … », ville située à 926.92 km de …. Vous précisez qu': « ils ont loué 12 un domicile. Ils sont là-bas et ils restent là-bas » (p.4 du rapport d'entretien complémentaire).

Vous auriez par ailleurs passé les neuf derniers mois précédant votre départ de la Libye en jouant à la « Playstation », tout en circulant entre la maison de votre oncle et celle de votre père sans jamais faire part du moindre incident ou problème.

A titre d'information : « After years of assassinations, bombings and militia firefights, Libya's eastern city of … finally feels safe again - but security has come at a heavy cost.

Uniformed police are out at major intersections, cafes and restaurants stay open late into the night, and local groups hold art exhibitions and festivals. But the city center lies in ruins, thousands remain displaced, and forces loyal to commander Khalifa Hifter, who now controls eastern Libya, have cracked down on dissent. (…) Today his forces are firmly in control of the country's east, and the near-daily assassinations, abductions and shootings that once terrified …'s residents are a thing of the past. Billboards and posters showing Hifter in full military regalia line the streets with so many placed along the airport road that many jokingly refer to the display as Hifter's Instagram page. (…) Streets are cleaner, garbage is being collected and the electricity cuts out far less often than it did at the height of the fighting. Outside the devastated city center, modern shopping malls have sprung up, as well as upscale seafood and Turkish restaurants. Local ride-booking services are modeled on Uber and Careem. (…) A human rights activist in …, who spoke on condition of anonymity for fear of reprisal, said the security forces are more aggressive than at any point since Gadhafi's time, restricting the movement of activists and NGO workers, and regularly bringing them in for interrogation ».

« … was the first Libyan city to rise up, in February 2011, because Gaddafi had punished the east for disloyalty by essentially neglecting it during his 42 years in power.

While Tripoli saw two years of relative stability once Gaddafi was killed, things went downhill within months in … as rival camps began to fight.

By 2012, much of the city had poor security with al Qaeda flags at some checkpoints.

The U.S ambassador was killed by Islamist militants.

Haftar assembled his old army comrades and declared war on the Islamists, a conflict he won only in November 2017.

Since then, life in … has improved. Critics say Haftar has resurrected the old police state and his supporters have seized the property of opponents who fled to western Libya, charges denied by officials. But residents enjoy late-night shopping, theaters have reopened, and fuel shortages are a thing of the past. » Eu égard à tout ce qui précède, il échet de relever que vous n'apportez aucun élément de nature à établir qu'il existerait de sérieuses raisons de croire que vous encouriez, en cas de retour dans votre pays d'origine, un risque réel et avéré de subir des atteintes graves au sens de l'article 48 précité, de sorte que le statut conféré par la protection subsidiaire ne vous est pas accordé.

13 Votre demande de protection internationale est dès lors refusée comme non fondée au sens des articles 26 et 34 de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire.

Votre séjour étant illégal, vous êtes dans l'obligation de quitter le territoire endéans un délai de 30 jours à compter du jour où la présente décision sera devenue définitive, à destination de la Libye, ou de tout autre pays dans lequel vous êtes autorisé à séjourner. (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 4 mars 2020, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 30 janvier 2020 refusant de faire droit à sa demande de protection internationale et à la réformation sinon à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire inscrit dans la même décision.

1) Quant au recours tendant à la réformation sinon à l’annulation de la décision du ministre du 30 janvier 2020 portant refus d’une protection internationale Etant donné que l’article 35, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 prévoit un recours en réformation contre les décisions de refus d’une demande de protection internationale, le tribunal est compétent pour connaître du recours principal en réformation dirigé contre la décision du ministre du 30 janvier 2020, telle que déférée.

Le recours principal en réformation est encore à déclarer recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

A l’appui de son recours, le demandeur, en exposant les faits et rétroactes à la base du présent litige, insiste, tout d’abord, sur les circonstances dans lesquelles il aurait dû présenter sa demande de protection internationale, en expliquant qu’en date du 28 novembre 2018, l’agent du ministère aurait refusé, dans un premier temps, d’enregistrer ladite demande au motif que Monsieur … aurait indiqué être mineur, ce qui l’aurait contraint de passer une nuit dans la rue. Ce n’aurait été que le 30 novembre 2018, après avoir déclaré être né le …, qu’il aurait officiellement été enregistré comme demandeur de protection internationale. Dans ce cadre, il précise encore les diligences accomplies par les autorités ministérielles quant à son identification, quant à son audition et quant à la tentative de transfert vers l’Italie, tout en relevant que l’examen médical initialement prévu pour déterminer s’il était mineur aurait été annulé, sans aucune justification, par le ministère. Ainsi, il critique le fait d’avoir été traité par les autorités ministérielles luxembourgeoises, tout au long de l’instruction de sa demande de protection internationale, comme ayant été majeur.

Quant aux motifs à la base de sa demande de protection internationale, le demandeur, qui n’aurait pas été scolarisé et aurait travaillé en tant que laveur de véhicules au bord de la route, fait valoir avoir quitté la Lybie en raison de la guerre y sévissant et en raison de groupes de milices lesquels l’auraient personnellement arrêté, emprisonné et torturé à trois reprises entre 2016 et 2017 afin de lui soutirer des informations sur le groupe de miliciens du « quartier des poissons » à …, quartier où il aurait résidé avec ses parents, alors qu’il aurait été soupçonné de collaborer avec ledit groupe. Suite à la libération de son dernier emprisonnement d’un mois, les miliciens seraient régulièrement venus à son domicile pour qu’il leur fournisse davantaged’informations, ce qui l’aurait contraint d’aller vivre chez son oncle pendant un mois, avant de quitter la Lybie. Dans ce contexte, il fait encore valoir ne pas avoir pu bénéficier d’une quelconque protection de la part des autorités étatiques libyennes, ni d’une possibilité de fuite interne, Monsieur … affirmant encore risquer d’être tué en cas de retour en Lybie en raison de l’omniprésence des milices et de l’insécurité générale y régnant.

En droit, le demandeur conclut, tout d’abord, à la réformation de la décision déférée pour violation d’une garantie procédurale en ce que le ministre aurait violé le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant consacré par les textes internationaux, Monsieur … insistant sur la circonstance qu’il aurait été mineur au moment de l’analyse de sa demande de protection internationale et de la prise de décision y relative. Dans ce contexte, il soutient que l’ordonnance du juge des tutelles du 19 juillet 2019 ayant rejeté sa demande en nomination d’un administrateur ad hoc ne serait pas de nature à écarter le doute quant à son âge, doute que le ministre aurait pu éliminer en ordonnant des examens médicaux sur le fondement de l’article 20, paragraphe (4) de la loi du 18 décembre 2015, ce qu’il aurait cependant refusé de faire, et ce malgré le fait que Monsieur … aurait insisté sur sa minorité et qu’il n’aurait indiqué être majeur que sous la contrainte des circonstances de présentation et d’enregistrement de sa demande. Le demandeur se prévaut encore, dans ce cadre, des indications des autorités italiennes, fournies dans le cadre de la demande de prise, respectivement de reprise en charge leurs adressée par leurs homologues luxembourgeois, selon lesquelles lesdites autorités l’auraient enregistré en tant que mineur. Au regard de l’ensemble de ces circonstances, il aurait appartenu au ministre, conformément à l’article 3, paragraphe (1) de la Convention internationale relative aux droits des enfants du 26 janvier 1990, de le faire bénéficier du doute quant à son âge et de le considérer comme étant un mineur non accompagné au sens de l’article 2, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015, ainsi que de l’article 25, paragraphe (6) de la directive 2013/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale, ci-après désignée par « la directive 2013/23/UE », le demandeur invoquant, dans ce contexte, encore l’article 3 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, ci-après désigné par « le règlement grand-

ducal du 8 juin 1979 », en vertu duquel une administration devrait d’office appliquer aux administrés le droit dans son sens le plus favorable. Ainsi, il aurait dû bénéficier de garanties procédurales spéciales, en raison de sa minorité, conformément au considérant 29 de la directive 2013/23/UE, garanties que le ministre aurait cependant refusé de lui accorder, de sorte que les décisions déférées devraient encourir la réformation.

Le demandeur fait ensuite valoir que le ministre aurait, à tort, retenu que son récit présenté à l’appui de sa demande de protection internationale ne serait pas crédible, Monsieur … reprochant plus particulièrement au ministre de ne pas avoir procédé à un examen individuel, objectif, impartial, rigoureux et approprié de la globalité de ses déclarations, alors qu’il n’aurait pas tenu compte de sa situation personnelle et générale, en violation de l’article 10, paragraphe (3) a) de la loi du 18 décembre 2015. Il s’appuie, à cet égard, sur trois publications du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, ci-après désigné par « l’UNHCR », intitulées « Guide et principes directeurs sur les procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut des réfugiés au regard de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés » de décembre 2011 et « Au-delà de la preuve. Évaluation de la crédibilité dans les systèmes d’asile européens » de mai 2013, respectivement de l’EASO intitulé « Evaluation des éléments de preuve et de la crédibilité dans le contexte du régime d’asile européen commun » de 2018, ainsi que sur la jurisprudence du tribunal administratif et de la Cour européenne des droits de l’Homme, ci-après dénommée « la CourEDH », ayant retenuque l’évaluation de la crédibilité d’un demandeur de protection internationale devrait se concentrer sur ses déclarations, ainsi que les autres éléments présentés à l’appui de ladite demande et non pas sur son comportement, notamment lors de son arrivée dans le pays d’asile, respectivement ne pas se focaliser sur les contradictions existant entre ses déclarations effectuées aux différents moments de sa demande. Le ministre aurait pareillement dû prendre en compte les circonstances individuelles et contextuelles dans l’appréciation de son récit, telles que notamment son jeune âge, son niveau d’éducation, ainsi que les événements traumatisants vécus en Lybie et retenir que son récit serait plausible, même s’il existait certaines contradictions mineures par rapport auquel le demandeur estime avoir fourni des explications plausibles, de sorte à devoir bénéficier du doute.

En ce qui concerne le refus ministériel de lui octroyer le statut de réfugié, le demandeur fait d’abord plaider que ce serait à tort et en commettant une erreur manifeste d'appréciation que le ministre aurait conclu que les actes invoqués ne seraient pas motivés par un des critères de fond au sens de l'article 2, point f) de la loi du 18 décembre 2015, alors que ses craintes de persécution dans son pays d’origine seraient liées à son appartenance à un certain groupe social, en l’occurrence celui des « jeunes hommes », le demandeur relevant que les différents groupes de milices l’ayant arrêté, détenus et lui ayant infligés des traitements inhumains et dégradants en raison du fait qu’il aurait eu le profil parfait « (…) des milices de groupes rivaux (…) ». Les faits qu’il aurait subis seraient en plus d’une gravité suffisante au sens de l’article 42, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015, contre lesquelles les autorités publiques libyennes seraient dans l’impossibilité de lui offrir une protection adéquate, conformément aux articles 39 et 40 de la loi du 18 décembre 2015, Monsieur … invoquant, dans ce contexte, encore un arrêt C-175/08, C-176/08, C-178/08 et C-179/08 de la Cour de justice de l’Union européenne, ci-après désignée par la « CJUE », du 2 mars 2010 insistant sur l’importance d’apprécier la capacité du pays d’origine à protéger ses ressortissants contre des actes de persécution.

Ainsi le ministre lui aurait, à tort, refusé l’octroi du statut de réfugié.

Quant au volet de la décision litigieuse portant refus de lui accorder le bénéficie du statut conféré par la protection subsidiaire, le demandeur reproche au ministre d’avoir commis une erreur d’appréciation au regard de sa situation individuelle, dans un contexte de violation des droits humains prévalant toujours en Lybie. Il invoque, dans ce contexte, des extraits d’une publication de l’UNHCR de septembre 2018, intitulé « Position du HCR sur les retours en Libye (Mise à jour II) », d’un rapport du secrétaire général présenté au Conseil de sécurité des Nations Unies du 24 août 2018, d’un rapport publié par le « US Department of State » intitulé « Country Reports on Human Rights Practices 2017: Libya », du rapport annuel de 2018 sur la Libye publié par l’organisation « Human Rights Watch », du rapport annuel de l’année 2019 sur la Libye publié par l’organisation Amnesty International, d’un rapport de l’organisation « Freedom House » intitulé « Freedom in the World 2018 – Lybia », ainsi que d’un rapport de l’organisation« UK Home Office » de janvier 2018, intitulé « Country Policy and Information Note Libya: Security and humanitarian situation », faisant tous état de la situation régnant en Lybie au moment de la rédaction desdits rapports et publications, pour en conclure qu’il existerait des motifs sérieux et avérés d’admettre qu’il serait exposé, en cas de retour en Lybie, au risque de subir des atteintes graves au sens de l’article 48 b) de la loi du 18 décembre 2015.

Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet de ce volet du recours pour ne pas être fondé.

Aux termes de l’article 2 point h) de la loi du 18 décembre 2015, la notion de « protection internationale » se définit comme correspondant au statut de réfugié et au statut conféré par la protection subsidiaire.

La notion de « réfugié » est définie par l’article 2, point f) de ladite loi comme étant « tout ressortissant d’un pays tiers ou apatride qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner (…) ».

Par ailleurs, aux termes de l’article 42, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 :

« Les actes considérés comme une persécution au sens de l’article 1A de la Convention de Genève doivent :

a) être suffisamment graves du fait de leur nature ou de leur caractère répété pour constituer une violation grave des droits fondamentaux de l’homme, en particulier des droits auxquels aucune dérogation n’est possible en vertu de l’article 15, paragraphe 2, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; ou b) être une accumulation de diverses mesures, y compris des violations des droits de l’homme, qui soit suffisamment grave pour affecter un individu d’une manière comparable à ce qui est indiqué au point a). (…) ».

S’agissant du statut conféré par la protection subsidiaire, aux termes de l’article 2 point g) de la loi du 18 décembre 2015, est une « personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire », « tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 48, l’article 50, paragraphes (1) et (2), n’étant pas applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays », l’article 48 de la même loi énumérant, en tant qu’atteintes graves, sous ses points a), b) et c), « la peine de mort ou l’exécution ; la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine ; des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international ».

En outre, aux termes de l’article 39 de la loi du 18 décembre 2015 : « Les acteurs des persécutions ou atteintes graves peuvent être :

a) l’Etat ;

b) des partis ou organisations qui contrôlent l’Etat ou une partie importante du territoire de celui-ci ;

c) des acteurs non étatiques, s’il peut être démontré que les acteurs visés aux points a) et b), y compris les organisations internationales, ne peuvent ou ne veulent pas accorder une 17 protection contre les persécutions ou atteintes graves. », et l’article 40 de la même loi dispose que : « (1) La protection contre les persécutions ou les atteintes graves ne peut être accordée que par :

a) l’Etat, ou b) des partis ou organisations y compris des organisations internationales, qui contrôlent l’Etat ou une partie importante du territoire de celui-ci, pour autant qu’ils soient disposés à offrir une protection au sens du paragraphe (2) et en mesure de le faire.

(2) La protection contre les persécutions ou les atteintes graves doit être effective et non temporaire. Une telle protection est généralement accordée lorsque les acteurs visés au paragraphe (1) points a) et b) prennent des mesures raisonnables pour empêcher la persécution ou des atteintes graves, entre autres lorsqu’ils disposent d’un système judiciaire effectif permettant de déceler, de poursuivre et de sanctionner les actes constituant une persécution ou une atteinte grave, et lorsque le demandeur a accès à cette protection.

(3) Lorsqu’il détermine si une organisation internationale contrôle un Etat ou une partie importante de son territoire et si elle fournit une protection au sens du paragraphe (2), le ministre tient compte des orientations éventuellement données par les actes du Conseil de l’Union européenne en la matière ».

Il se dégage de ces dispositions légales que tant l’octroi du statut de réfugié que celui du statut conféré par la protection subsidiaire supposent, entre autres, d’une part, que les faits invoqués par le demandeur à l’appui de sa demande de protection internationale atteignent un certain degré de gravité – lequel est déterminé, s’agissant du statut de réfugié, par l’article 42, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 relatif à la notion de « persécution » et, s’agissant de la protection subsidiaire, par l’article 48 de la même loi, qui précise la notion d’ « atteinte grave » – et, d’autre part, que l’intéressé ne puisse se prévaloir d’une protection étatique appropriée.

Les conditions d’octroi du statut de réfugié, respectivement de celui conféré par la protection subsidiaire devant être réunies cumulativement, le fait que l’une d’elles ne soit pas valablement remplie est suffisant pour conclure que le demandeur ne saurait bénéficier du statut de réfugié, respectivement de la protection subsidiaire.

Le tribunal, statuant en tant que juge du fond en matière de demandes de protection internationale, doit procéder à l’évaluation de la situation personnelle du demandeur de protection internationale, tout en prenant en considération la situation générale, telle qu’elle se présente à l’heure actuelle dans le pays de provenance. Cet examen ne se limite pas à la pertinence des faits allégués, mais il s’agit également d’apprécier la valeur des éléments de preuve et la crédibilité des déclarations du demandeur, cette dernière pouvant notamment être retenue lorsque le demandeur s’est réellement efforcé d’étayer sa demande, lorsque tous les éléments pertinents à la disposition du demandeur ont été présentés et une explication satisfaisante a été fournie quant à l’absence d’autres éléments probants ou encore lorsque les déclarations du demandeur sont jugées cohérentes et plausibles et qu’elles ne sont pas contredites par les informations générales et particulières connues et pertinentes pour sa demande2,3.

2 Voir art. 37, paragraphe (5) de la loi du 18 décembre 2015.

3 trib. adm. 16 avril 2008, n° 23855, Pas. adm. 2021, V° Etrangers, n° 138 et les autres références y citées.

En ce qui concerne l’analyse au fond, il se dégage du libellé de la décision que le ministre a globalement retenu un manque de crédibilité du récit du demandeur affectant ce dernier dans son ensemble. Il appartient dès lors au tribunal d’examiner cette question à titre liminaire, question qui impacte également le moyen du demandeur fondé sur un vice procédural du fait que son intérêt supérieur, en tant que mineur, n’aurait pas été pris en considération par le ministre dans le cadre de l’examen de sa demande de protection internationale.

En l’occurrence, force est au tribunal de constater que le ministre a, à juste titre, pu retenir un défaut de crédibilité des déclarations du demandeur. Il échet en effet en premier lieu de constater que le demandeur est resté en défaut d’établir sa véritable identité, dans la mesure où il a fait usage, lors de son séjour dans l’Union européenne de plusieurs alias, de plusieurs dates de naissance, ainsi que de plusieurs nationalités, tout en ayant formellement admis avoir menti, respectivement tenté de mentir au sujet de sa véritable date de naissance. Ainsi, il ressort sans équivoque de ses déclarations auprès du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale du 30 novembre 2018 que Monsieur … a essayé, tant en Italie qu’au Luxembourg, de se faire passer pour un mineur afin d’être placé dans un meilleur logement4, ses explications selon lesquelles il aurait été contraint par le ministère d’affirmer être majeur au risque sinon de ne pas être logé et de devoir passer une nuit à dormir dans la rue en novembre 2018 restant à l’état de pures allégations pour ne pas être corroborées par un quelconque élément concret soumis à l’analyse du tribunal. Dans ce contexte, il y a encore lieu de réfuter l’argumentation du demandeur selon laquelle les autorités italiennes l’auraient d’office inscrit comme mineur suite à la réalisation d’un rapport médical, alors que, d’une part, il ressort du courrier des autorités italiennes du 12 février 2019 que ces dernières ont enregistré Monsieur … sous trois alias avec trois dates de naissance différentes, dont une correspondait à celle d’un mineur, et que même si elles l’avaient qualifié dans le cadre du rejet de la demande de prise en charge leur adressée par leurs homologues luxembourgeois comme étant un mineur non accompagné qui n’avait pas déposé de demande de protection internationale en Italie, une telle conclusion n’est cependant pas, à elle seule, de nature à établir la réalité de la minorité de Monsieur … et, d’autre part, le demandeur est resté en défaut de verser le rapport médical qui aurait été établi en Italie et qui documenterait sa minorité. De plus, dans son rapport d’audition des 9 avril et 6 mai 2019, Monsieur … reconnaît, par ailleurs, avoir indiqué un faux âge aux autorités françaises. Il est encore en aveu d’avoir fait état de plusieurs nationalités en Italie, prétendument afin de ne pas s’exposer à des actes de vengeance de la part des autres demandeurs de protection internationale ayant été victime de mauvais traitements en Libye. Ensuite Monsieur … a encore admis, dans le cadre de son audition complémentaire du 19 novembre 2019, avoir utilisé, lors de l’enregistrement de sa demande de protection internationale auprès du ministère, une photo « trafiquée » montrant prétendument son passeport. Face à l’ensemble de ses éléments établissant que Monsieur … a objectivement fait usage de fausses informations concernant son identité, tant en ce qui concerne ses nom et prénom que sa date de naissance et sa nationalité, il doit être constaté que le demandeur, mis à part de fournir des explications non autrement vérifiables, reste manifestement en défaut de faire état d’un quelconque élément concret permettant d’établir avec certitude sa véritable identité, le demandeur esquivant toute proposition visant à clarifier son identité, sous prétexte de ne plus avoir de contact avec sa famille. De plus, il ressort des éléments soumis à l’analyse du tribunal que l’ordonnance du 19 juillet 2019 du juge de la jeunesse des tutelles a rejeté sa demande de nommer un administrateur ad-hoc sur base du constat que ce dernier « n’est pas 4 Rapport du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale du 30 novembre 2018.un mineur » tout en relevant que « (…) la somme impressionnante des contradictions [affectant le récit de Monsieur …] est telle qu’elle discrédite totalement la parole du requérant (…) ».

Sur base des considérations qui précèdent, il y a lieu de retenir que le moyen du demandeur fondé sur la violation de l’article 20, paragraphe (4) de la loi du 18 décembre 2015, en ce que son intérêt supérieur, tel que prévu à l’article 3, paragraphe (1) de la Convention internationale relative aux droits des enfants du 26 janvier 1990, ainsi que sur l’article 25, paragraphe (6) de la directive 2013/23/UE en tant que mineur non accompagné au sens de l’article 2, points l) et m) de la loi du 18 décembre 2015, n’aurait pas été pris en considération dans le cadre de l’examen de sa demande de protection internationale et qu’aucune garantie procédurale spécifique ne lui aurait été accordée, laisse d’être fondé pour manquer en fait. Dans ce contexte, le tribunal doit encore relever que le demandeur, au regard de sa reconnaissance formelle d’avoir fait usage de fausses indications quant à ses nom et prénom, nationalité et date de naissance, ne peut pas non plus invoquer le bénéfice du doute au sens de l’article 37, paragraphe (5) de la loi du 18 décembre 2015, ni de l’article 3 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 en vertu duquel une administration devrait d’office appliquer aux administrés le droit dans son sens le plus favorable.

Le tribunal doit encore constater, en ce qui concerne les faits invoqués par Monsieur … à la base de sa demande de protection internationale, que ceux-ci ne sont pas crédibles, tel que retenu à juste titre par le ministre. Il n’est en effet pas crédible que le demandeur soit le seul membre de sa famille visé à tel point par les différentes milices opérant en Libye qu’il aurait dû quitter son pays d’origine au risque sinon de faire l’objet de persécutions, respectivement d’atteintes graves, alors qu’il ne présente aucune caractéristique particulière l’exposant davantage aux agissements desdites milices que son père et ses frères. Il ressort en effet des déclarations du demandeur qu’il aurait été arrêté à trois reprises par une milice en Lybie, deux fois en 2016 et une fois en 2017, en raison de la seule considération qu’il serait originaire d’un quartier déterminé de … qu’il aurait pourtant déjà quitté en 2015, respectivement en 2014 et qu’il serait soupçonné de faire partie de la milice dudit quartier, circonstances qui pourraient également être imputées à son père et à ses deux frères, d’autant plus qu’il déclare avoir été mineur à l’époque des faits. Dans ce cadre, il échet de constater que s’il ressort des déclarations du demandeur que le deuxième incident en 2016 aurait également concerné son père et ses deux frères qui auraient, ensemble avec lui, été détenus et torturés par une milice5, force est de retenir que ces derniers n’auraient, par après, plus été recherchés par des milices6, lesquelles se seraient même présentées, en 2017, à leur maison pour n’y arrêter que le demandeur7. Par ailleurs son père et ses deux frères seraient, malgré leur arrestation en 2016, tous restés en Libye sans avoir, par après, fait l’objet de nouveaux incidents de la part de milices les visant personnellement, si ce n’est que l’arrestation du père de Monsieur … pendant quelques heures8, voire des visites à leur domicile familial9 prétendument qu’afin de découvrir le lieu de séjour du demandeur, sans que ce dernier ne fournisse un quelconque élément permettant d’expliquer cet acharnement des milices à son encontre.

De plus, il y a lieu de relever que le demandeur déclare être originaire de la ville libyenne de … et avoir vécu dans le quartier de … jusqu’en avril 2015 avant de déménager avec sa famille dans un des villages périphériques de …, en l’occurrence …10 jusqu’en 2018, 5 Page 8 du rapport d’audtion de Monsieur … des 9 avril et 6 mai 2019.

6 Page 4 du rapport d’audition complémentaire de Monsieur … du 19 novembre 2019.

7 Page 8 du rapport d’audtion de Monsieur … des 9 avril et 6 mai 2019.

8 Page 9 du rapport d’audtion de Monsieur … des 9 avril et 6 mai 2019.

9 Page 4 du rapport d’audition complémentaire de Monsieur … du 19 novembre 2019.

10 Page 3 du rapport d’audtion de Monsieur … des 9 avril et 6 mai 2019.Monsieur … affirmant encore avoir vécu quelques mois précédant son départ chez son oncle à …11, un autre village périphérique de …. Or, dans le cadre de son audition complémentaire en date du 19 novembre 2019, Monsieur … a déclaré ne pas connaître l’armée nationale libyenne et n’avoir « aucun avis » au sujet du maréchal Haftar, ce qui met sérieusement en doute les déclarations du demandeur quant à ses origines, dans la mesure où il ressort des explications circonstanciées de la partie étatique que ladite armée, dirigée par le général Haftar, aurait repris le contrôle de la ville de … en 2017 en chassant les milices du groupe terroriste se nommant « l’Etat islamique », une telle méconnaissance du demandeur ne pouvant pas s’expliquer par son faible niveau de scolarisation, sinon d’un état prétendument traumatisé, seules explications apportées par le demandeur dans son recours face au reproche d’absence de crédibilité formulé par le ministre.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent aux regards des incohérences et contradictions des déclarations de Monsieur … que c’est à bon droit que le ministre a retenu que le récit du demandeur ne serait pas crédible dans son intégralité et d’avoir, en conséquence rejeté comme étant non fondée sa demande tendant à l’obtention du statut de réfugié, respectivement de celui conféré par la protection subsidiaire, de sorte que le recours encourt le rejet pour manquer de fondement.

2) Quant au recours dirigé contre l’ordre de quitter le territoire Etant donné que l’article 35, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 prévoit un recours en réformation contre l’ordre de quitter le territoire, un recours sollicitant la réformation de pareil ordre contenu dans la décision déférée a valablement pu être dirigé contre la décision ministérielle litigieuse. Le recours principal en réformation, ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai prévus par la loi, est recevable.

Il n’y a dès lors pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

Le demandeur fait valoir que même s’il n’était pas éligible pour le statut de réfugié ni pour le statut conféré par la protection subsidiaire, il devrait pouvoir bénéficier en tout état de cause de la protection contre l'expulsion vers la Lybie où il encourrait un risque réel et suffisamment grave d'atteintes pour sa vie et son intégrité physique et morale sous forme de torture, d'assassinat ou d'autres formes de traitements inhumains et dégradants. Ainsi son renvoi vers la Libye emporterait inévitablement violation de l’article 33, paragraphe (1) de la Convention de Genève du 28 juillet 1951relative au statut des réfugiés, ci-après désignée par « la Convention de Genève », et de l’article 19 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, ci-après désignée par la « Charte », interdisant le refoulement des demandeurs de protection internationale déboutés de leur demande, respectivement des articles 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ci-après désignée par la « CEDH », et 4 de la Charte prohibant la torture et les traitements et sanctions inhumains et dégradants. Dans ce contexte, le demandeur se réfère encore à une note de l’UNHCR sur la protection internationale du 13 novembre 2001 portant la référence A/AC.96/951, §16, à une publication de septembre 2018 intitulé « Position du HCR sur les retours en Libye (Mise à jour II) », ainsi qu’à des arrêts de la CJUE « Abdida » du 18 décembre 2014, considérant 46, respectivement de la CourEDH du 7 juillet 1989, « Soering c/ Royaume-

Uni ». Il en conclut que l’ordre de quitter prononcé à son encontre devrait être réformé pour 11 Page 9 du rapport d’audtion de Monsieur … des 9 avril et 6 mai 2019.

violation des articles 3 de la CEDH, 4 de la Charte, respectivement du principe de non-

refoulement.

Aux termes de l’article 34, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015, « une décision du ministre vaut décision de retour. (…)». En vertu de l’article 2, point q) de la loi du 18 décembre 2015, la notion de « décision de retour » se définit comme « la décision négative du ministre déclarant illégal le séjour et imposant l’ordre de quitter le territoire ». Si le législateur n’a pas expressément précisé que la décision du ministre visée à l’article 34, paragraphe (2), précité, de la loi du 18 décembre 2015 est une décision négative, il y a lieu d’admettre, sous peine de vider la disposition légale afférente de tout sens, que sont visées les décisions négatives du ministre. Il suit dès lors des dispositions qui précèdent que l’ordre de quitter le territoire est la conséquence automatique du refus de protection internationale.

Il convient encore de rappeler que les articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte proscrivent, tous deux, la torture et les peines ou traitements inhumains ou dégradants.

Or, en ce qui concerne précisément les risques prétendument encourus en cas de retour en Libye, le tribunal a conclu ci-avant à l’absence, dans le chef du demandeur, de tout risque réel et actuel de subir des persécutions ou des atteintes graves au sens de la loi du 18 décembre 2015 dans son pays d’origine, en raison de l’absence de crédibilité de son récit, le tribunal n’ayant pas non plus retenu une situation de conflit armé, faute pour le demandeur de l’avoir invoqué, de sorte que le tribunal ne saurait se départir, à ce niveau-ci, de son analyse de cette conclusion. Pour les mêmes motifs, il y a encore lieu de retenir, en ce qui concerne la violation du principe de non-refoulement, ainsi que de l’article 19 de la Charte invoquée par le demandeur, qu’il n’existe pas un risque suffisamment réel pour que le renvoi du demandeur vers la Lybie soit dans ces circonstances incompatible avec le principe de non-refoulement.

Il s’ensuit que le recours dirigé contre l’ordre de quitter le territoire est également à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit en la forme le recours en réformation introduit contre la décision ministérielle du 30 janvier 2020 portant rejet d’un statut de protection internationale dans le chef de Monsieur … ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

reçoit en la forme le recours en réformation introduit contre la décision ministérielle du 30 janvier 2020 ordonnant à Monsieur … de quitter le territoire ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

condamne le demandeur aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 4 novembre 2022 par :

Paul Nourissier, vice-président, Olivier Poos, premier juge, Laura Urbany, juge, en présence du greffier en chef Xavier Drebenstedt.

s. Xavier Drebenstedt s. Paul Nourissier Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 4 novembre 2022 Le greffier du tribunal administratif 23


Synthèse
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 44237
Date de la décision : 04/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2022-11-04;44237 ?

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