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27/09/2022 | LUXEMBOURG | N°44816

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 27 septembre 2022, 44816


Tribunal administratif N° 44816 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2022:44816 4e chambre Inscrit le 7 août 2020 Audience publique du 27 septembre 2022 Recours formé par Monsieur …, … (France), contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 44816 du rôle et déposée en date du 7 août 2020 au greffe du tribunal administratif par Maître Véronique D

e Meester, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom ...

Tribunal administratif N° 44816 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2022:44816 4e chambre Inscrit le 7 août 2020 Audience publique du 27 septembre 2022 Recours formé par Monsieur …, … (France), contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 44816 du rôle et déposée en date du 7 août 2020 au greffe du tribunal administratif par Maître Véronique De Meester, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à F-…, ayant élu domicile en l’étude de son litismandataire, demeurant à L-1212 Luxembourg, 3, rue des Bains, tendant à la réformation, sinon à l’annulation une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 5 mai 2020 ayant déclaré irrecevable sa réclamation introduite le 3 mars 2020 à l’encontre des bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2014, 2015 et 2016, tous émis le 27 novembre 2019, et ayant annulé le bulletin rectificatif de l’impôt sur le revenu de l’année 2015, émis le 11 mars 2020 ;

Vu le mémoire en réponse déposé le 14 décembre 2020 au greffe du tribunal administratif par le délégué du gouvernement ;

Vu le mémoire en réplique déposé le 14 janvier 2021 au greffe du tribunal administratif par Maître Véronique De Meester, préqualifiée, au nom et pour le compte de Monsieur … ;

Vu l’article 1er de la loi modifiée du 19 décembre 2020 portant adaptation temporaire de certaines modalités procédurales en matière civile et commerciale1 ;

Vu la communication de Maître Véronique De Meester du 4 novembre 2021 suivant laquelle elle marque son accord à ce que l’affaire soit prise en délibéré sans sa présence ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Steve Collart en sa plaidoirie à l’audience publique du 9 novembre 2021, Maître Véronique De Meester étant excusée.

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Suite au dépôt de sa déclaration pour l’impôt sur le revenu de l’année 2016, Monsieur … se vit adresser le 14 novembre 2018 un courrier de la part du bureau d’imposition 1 « Les affaires pendantes devant les juridictions administratives, soumises aux règles de la procédure écrite et en état d’être jugées, pourront être prises en délibéré sans comparution des mandataires avec l’accord de ces derniers. ».

1Luxembourg Y, Section des personnes physiques, de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le bureau d’imposition », sur le fondement du paragraphe 205 alinéa 3 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », ci-après désigné par « AO », l’informant que ce dernier avait l’intention de s’écarter de ses déclarations fiscales pour les années 2014 à 2016 sur base de la considération que les factures établies par … auraient porté sur des prestations de service non fondées, de sorte à ne pas être acceptées comme dépenses d’exploitation, tout en invitant Monsieur … à prendre position sur ce point avant le 28 novembre 2018, ce que celui-ci fit par courrier électronique du 27 novembre 2018.

Par courrier du 23 septembre 2019, le bureau d’imposition, sur base du paragraphe 205 alinéa 3 AO, informa Monsieur … de s’écarter de ses déclarations fiscales pour les années 2014 à 2016 concernant les acquisitions de divers objets considérées comme des dépenses privées, concernant les dépenses pour travaux exécutés par des tiers pour les années 2015 et 2016, concernant les frais de voiture pour les années 2014 à 2016 et concernant les cotisations sociales pour les mêmes années, Monsieur … s’étant vu accorder un délai jusqu’au 11 octobre 2019 afin de présenter ses observations, ce que ce dernier fit par courrier du 10 octobre 2019.

Le 27 novembre 2019, le bureau d’imposition Luxembourg Y, Section des personnes physiques, de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le bureau d’imposition », émit à l’encontre de Monsieur … les bulletins de l’impôt sur le revenu pour les années 2014, 2015 et 2016.

Par courrier du 3 mars 2020, Monsieur … introduisit auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le directeur », une réclamation à l’encontre des bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2014, 2015 et 2016.

Par décision du 5 mai 2020, inscrite sous le numéro C 27709, le directeur déclara cette réclamation irrecevable pour être tardive, tout en annulant le bulletin rectificatif de l’impôt sur le revenu de l’année 2015, émis le 11 mars 2020, décision libellée comme suit :

« (…) Vu la requête introduite en date du 3 mars 2020 par le sieur …, demeurant professionnellement à L-…, pour réclamer contre les bulletins de l'impôt sur le revenu des années 2014, 2015 et 2016, émis en date du 27 novembre 2019 ;

Vu le dossier fiscal ;

Vu les §§ 228 et 301 de la loi générale des impôts (AO) ;

Considérant qu'aux termes des §§ 228 et 246 AO, dont la règle a été reprise dans l'instruction sur les voies de recours figurant aux bulletins entrepris, le délai de réclamation est de trois mois et court à partir de la notification ;

Considérant que les bulletins de l'impôt sur le revenu des années 2014, 2015 et 2016 ont été émis le 27 novembre 2019 et notifiés le 2 décembre 2019, de sorte que le délai a expiré le 2 mars 2019 ; que les réclamations sont donc tardives ;

Considérant qu'aux termes du § 83 AO ce délai est un délai de forclusion ;

2Considérant que l'instruction n'a pas révélé de circonstances susceptibles de justifier un relevé du délai de forclusion suivant les §§ 86 et 87 AO ;

Considérant qu'aux termes du § 252 AO les réclamations tardives sont irrecevables ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction au Contentieux que le bureau d'imposition a encore émis, par application des dispositions du § 94, alinéa 1er AO, un bulletin rectificatif de l'impôt sur le revenu de l'année 2015 en date du 11 mars 2020, malgré l'introduction, en date du 3 mars 2020, d'une réclamation contre le bulletin de l'impôt sur le revenu émis à l'origine ;

Considérant que le § 94, alinéa 1er AO (principe appelé « demande en redressement »), dispose néanmoins que les bulletins d'impôt (§§ 211, 212, 212a, alinéa 1er, 214, 215 et 215a AO) ainsi que les décisions administratives à caractère individuel (§ 235 AO) ne peuvent être retirés ou modifiés qu'à la double condition que le contribuable y consente expressément et qu'il ne se trouve pas forclos dans le cadre d'un recours contentieux ;

Considérant qu'ayant introduit une réclamation contre, entre autres, le bulletin de l'impôt sur le revenu de l'année 2015 en date du 3 mars 2020, le réclamant s'est trouvé forclos dans le cadre d'un recours contentieux ; qu'étant donné qu'à partir du moment où le contribuable interjette réclamation, le bureau d'imposition est, pour des raisons de procédure impérieuses, dessaisi du cas d'imposition, et ne peut partant plus remplacer la décision entreprise par une autre, même s'il avait été compétent de la prendre à défaut de réclamation, de sorte que le bulletin rectificatif de l'impôt sur le revenu de l'année 2015, émis le 11 mars 2020, est à annuler ;

Considérant que s'y ajoute, dans le même ordre d'idées, que pareille modification suivant le § 94, alinéa 1er AO n'est possible qu'endéans un délai de 3 mois à partir de la notification du bulletin ou de la décision administrative en cause ; qu'une fois ce délai de trois mois dépassé, le bulletin ou la décision administrative est coulé en force de la chose décidée (rechtskräftig), contrairement à la période en amont, où le bulletin ou la décision administrative en cause peut encore donner lieu à modification ou à rectification, nonobstant le fait d'avoir créé une nouvelle situation de droit (rechtswirksam) ;

Considérant qu'il en découle qu'aucune modification ou rectification d'un bulletin en vertu du § 94, alinéa 1er AO, fût-ce sur initiative du bureau d'imposition ou sur initiative du contribuable, n'est possible si le délai de trois mois après la notification est dépassé ; que lorsqu'il s'avère qu'un bulletin rectificatif a été émis par application des dispositions du § 94, alinéa 1er AO après le délai de trois mois, la sanction en est, à nouveau et tel qu'en l'espèce, l'annulation pure et simple du bulletin entrepris ;

PAR CES MOTIFS dit irrecevable les réclamations contre les bulletins de l'impôt sur le revenu des années 2014, 2015 et 2016, émis le 27 novembre 2019, annule le bulletin rectificatif de l'impôt sur le revenu de l'année 2015, émis en date du 11 mars 2020 sur base du § 94, alinéa 1er AO. (…) ».

3Par requête déposée le 7 août 2020 au greffe du tribunal administratif, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision précitée du directeur du 5 mai 2020.

Conformément aux dispositions combinées du paragraphe 228 AO, et de l’article 8, paragraphe (3), 3. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, le tribunal administratif est appelé à statuer comme juge du fond en la présente matière.

Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours principal en réformation introduit par Monsieur …, lequel est par ailleurs recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

A l’appui de son recours, le demandeur, après avoir retracé les faits et rétroactes à la base du litige sous examen, critique, tout d’abord, la décision directoriale pour avoir retenu que la notification des bulletins de l'impôt sur le revenu des années 2014 à 2016 serait présumée être intervenue le 2 décembre 2019 soit trois jours ouvrables après la date inscrite sur lesdits bulletins, de sorte à retenir la forclusion de ses réclamations introduites le 3 mars 2020. Dans ce cadre, le demandeur affirme n’avoir reçu lesdits bulletins que vers le 15 décembre 2019 à son domicile en France, ce qui serait prouvé par l’attestation testimoniale de son voisin ayant reçu par erreur lesdits bulletins, tout en insistant sur l’élection de domicile, par le biais de ses déclarations d'impôt sur le revenu déposées via le site internet guichet.lu, à son adresse professionnelle au Luxembourg. Il explique, dans ce contexte, avoir, en raison des problèmes récurrents d'acheminement de son courrier à son adresse privée en France, à de nombreuses reprises et à nouveau dans son courrier de prise de position du 27 novembre 2018, expressément indiqué au bureau d’imposition d’envoyer les bulletins à émettre à son adresse professionnelle à Luxembourg, demande qu’il aurait également adressée aux autres administrations luxembourgeoises, qui y auraient donné suite, y compris le directeur, à la seule exception du bureau d'imposition Luxembourg Y.

Sur base de ces considérations, Monsieur … estime avoir rapporté la preuve, conformément à l'article 2 du règlement grand-ducal modifié du 24 octobre 1978 concernant la notification des bulletins en matière d’impôts directs, ci-après désigné par « le règlement grand-ducal du 24 octobre 1978 », de l'existence de circonstances particulières l’ayant empêché de réceptionner les bulletins litigieux dans le délai présumé des trois jours ouvrables suivant leur envoi. En conséquence, la décision directoriale déférée du 5 mai 2020, en ce qu’elle aurait retenu la tardiveté de sa réclamation du 3 mars 2020, devrait être réformée. A titre subsidiaire, Monsieur … demande à être relevé du délai de forclusion, conformément aux paragraphes 86 et 87 AO.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement conclut au rejet du moyen contestant la conclusion directoriale de la tardiveté de la réclamation, en relevant, tout d’abord, qu’il serait étonnant que le demandeur, en sa qualité d’expert-comptable n’aurait, dans ladite réclamation, fait aucune allusion à l’erreur postale, mais ne se serait limité, sur ce point, qu’à rappeler au directeur son élection de domicile à son adresse professionnelle. Tout en concédant qu’à travers ses déclarations fiscales des années 2014, 2015 et 2016, le demandeur aurait fait le choix d’une élection de domicile à son adresse professionnelle, la partie étatique fait valoir que la correspondance adressée au demandeur dans le cadre de la 4vérification desdites déclarations aurait toujours été envoyée à l’adresse privée de ce dernier, le dernier courrier datant du 23 septembre 2019, auquel Monsieur … aurait répondu le 10 octobre 2019, de sorte que le bureau d’imposition aurait légitimement pu adresser le 27 novembre 2019 les bulletins d’impôt des années 2014 à 2016 à la même adresse. Le délégué du gouvernement conteste encore la valeur probante de l’attestation testimoniale établie par le voisin du demandeur, en ce que celle-ci ne prouverait pas la remise effective des bulletins litigieux au demandeur. Il conclut finalement au rejet de la demande de Monsieur … d’être relevé de la forclusion, alors que celle-ci n’aurait été présentée qu’après la décision directoriale litigieuse, le délégué du gouvernement faisant encore valoir, dans ce contexte, que le demandeur serait resté en défaut de prouver un empêchement dans son chef d’agir endéans le délai légal de réclamation.

Le demandeur, dans son mémoire en réplique, quant à la critique du délégué du gouvernement qu’il n’aurait pas fait mention, dans sa réclamation, de la réception tardive des bulletins d’impôt des années 2014 à 2016, fait valoir qu’il aurait introduit sa réclamation dès qu’il aurait été informé par le bureau d’imposition du rejet de sa demande basée sur le paragraphe 94 AO, sans se préoccuper du délai de forclusion lequel n’aurait, selon lui, commencé à courir qu’à partir du 15 décembre 2019, retard dont le bureau d’imposition aurait été informé dès janvier 2020 dans le cadre de la demande de rectification. Le demandeur affirme avoir pu estimer de bonne foi qu'avec l'élection de domicile réitérée avec constance à son adresse professionnelle luxembourgeoise et ses rappels y relatifs effectués tant par courriels que par courrier recommandé à de très nombreuses reprises, la dernière fois dans le cadre de sa réclamation du 3 mars 2020, il ne devrait subir les conséquences d'une mauvaise distribution de courrier à l'étranger alors qu'il aurait tout fait pour l'éviter. Le demandeur se prévaut encore, dans ce contexte, de la réponse du bureau d’imposition du 3 mars 2020 à sa demande basée sur le paragraphe 94 AO, ainsi que de l’émission du bulletin rectificatif du 11 mars 2020, constituant deux éléments prouvant que ledit bureau aurait eu connaissance de la réception des bulletins litigieux au-delà du 2 décembre 2019, au risque sinon de devoir conclure à un piège de la part des autorités fiscales. Ce serait bien légitimement, s’estimant avoir agi dans les délais, qu’il aurait attendu d'obtenir le résultat de sa première « réclamation » sur pied du paragraphe 94 AO, pour pouvoir juger du bien fondé et de l'opportunité ou non d'introduire une réclamation sur base du paragraphe 222 AO auprès du directeur, ce qui aurait été fait le jour même de la réponse du bureau d'imposition.

Monsieur … conteste encore toute acceptation tacite de sa part quant à la notification des bulletins litigieux à son adresse privée en France, dans la mesure où il aurait, tant dans ses déclarations fiscales, qu’à travers ses courriers des 24 septembre 2015 et 27 novembre 2018, sollicité l’envoi des bulletins à son adresse professionnelle au Luxembourg, tout en précisant que le dernier courrier lui envoyé à son adresse en France par le bureau d’imposition le 23 septembre 2019 avant l’émission des bulletins litigieux ne pourrait pas non plus être considéré comme une acceptation tacite quant à l’adresse de notification desdits bulletins, alors qu’il aurait ignoré, à ce moment, que ledit courrier serait immédiatement suivi de l’envoi des bulletins.

Le demandeur réfute finalement l’affirmation du délégué du gouvernement que les courriers mentionnés dans l’attestation testimoniale de son voisin auraient pu provenir, non pas des autorités fiscales, mais d’autres administrations luxembourgeoises, en relevant que tous ses courriers administratifs seraient envoyés à son adresse professionnelle au Luxembourg.

5Force est, tout d’abord, au tribunal de rappeler, en ce qui concerne la problématique du délai endéans lequel une réclamation doit être introduite, qu’aux termes du paragraphe 83 (2) AO « […] Fristen zur Einreichung eines Rechtsmittels sind Ausschlussfristen […] » et selon le paragraphe 252 AO « Die Rechtsmittelbehörde hat zu prüfen, ob das Rechtsmittel zulässig und in der vorgeschriebenen Form und Frist eingelegt ist. Mangelt es an einem dieser Erfordernisse, so ist das Rechtsmittel als unzulässig zu verwerfen ». Il ressort des dispositions précitées que le directeur est appelé à analyser avant tout autre progrès si le recours introduit par le contribuable a été introduit dans le délai de la loi, et à défaut, le déclarer irrecevable pour tardivité.

En ce qui concerne les délais légaux, il y a lieu de souligner qu’aux termes du paragraphe 228 AO : « Les décisions visées aux §§ …, 166 alinéa 3, 211, 212, 212a alinéa 1er, 214, 215, 215a, 235, 396 alinéa 1 et 402 peuvent être attaquées dans un délai de trois mois par voie de réclamation devant le directeur de l’Administration des contributions directes ou son délégué. […] », et qu’aux termes du paragraphe 245 AO, « le délai de recours est de trois mois pour les réclamations (§ 228 AO) […] », tandis qu’aux termes du paragraphe 246 AO « Die Frist zur Einlegung eines Rechtsmittels beginnt mit Ablauf des Tages, an dem der Bescheid dem Berechtigten zugestellt oder, wenn keine Zustellung erfolgt, bekannt geworden ist oder bekannt gemacht gilt. […] ». Il s’ensuit qu’un bulletin de l’impôt doit être contesté obligatoirement dans un délai de trois mois à partir de la notification valable du bulletin.

En l’espèce, il se dégage des éléments soumis à l’appréciation du tribunal que les bulletins de l’impôt sur le revenu litigieux des années d’imposition 2014, 2015 et 2016 ont tous été émis le 27 novembre 2019 à l’adresse privée du demandeur.

Il y a lieu de relever qu’il est constant en cause pour ressortir du dossier administratif, ainsi que des explications concordantes des parties, que le demandeur, résident français, a, en l’espèce, opté pour une élection de domicile à son adresse professionnelle au Luxembourg à travers ses déclarations fiscales pour les années 2014, 2015 et 2016, élection de domicile qu’il a, par ailleurs, rappelé, dans son courrier électronique du 27 novembre 2018 adressé au bureau d’imposition, suite au courrier du 14 novembre 2018 de cette dernière lui envoyé à son adresse privée. A cela s’ajoute que le demandeur, suite au dernier courrier lui envoyé par le bureau d’imposition le 23 septembre 2019 avant l’émission des bulletins litigieux, courrier également expédié à son adresse privée, a, dans sa prise de position du 10 octobre 2019, utilisé son papier entête d’expert-comptable, reprenant uniquement son adresse professionnelle et ne mentionnant nulle part son adresse privée.

Bien qu’en application de l’article 2 du règlement grand-ducal du 24 octobre 1978, la notification desdits bulletins est a priori présumée avoir eu lieu le troisième jour ouvrable qui suit la remise de l’envoi à la poste, ce qui correspondrait en l’espèce au 2 décembre 2019, force est au tribunal de constater que cette présomption n’est applicable qu’en présence d’une notification régulière, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, au regard d’une notification des bulletins litigieux à l’adresse privée du demandeur, malgré le comportement constant de ce dernier quant à son choix exprimé, dans ses déclarations d’impôt des années 2014, 2015 et 2016, de se voir notifier les bulletins litigieux à son adresse professionnelle.

En conséquence, la notification des bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2014, 2015 et 2016 doit être considérée comme n’ayant pas été valablement effectuée, de sorte à ne pas avoir pu prendre effet à l’égard du demandeur au sens du paragraphe 91 AO et 6à ne pas avoir pu faire courir le délai, en application des paragraphes 228, 245 et 246 AO précités, et de l’article 2 du règlement grand-ducal du 24 octobre 1978, pour pouvoir introduire une réclamation.

Etant donné que la réclamation de Monsieur … date du 3 mars 2020 n’est pas à considérer comme ayant été introduite postérieurement au délai indiqué ci-avant, et afin de maintenir dans son chef la possibilité de voir toiser sa réclamation à un niveau non contentieux, il y a lieu, dans le cadre du recours en réformation sous examen, de prononcer l’annulation de la décision du directeur du 5 mai 2020 et de lui renvoyer le litige sous examen, sans qu’il n’y ait lieu de statuer sur les autres moyens du demandeur, dont l’analyse est devenue surabondante.

Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours principal en réformation en la forme ;

au fond, le déclare justifié ;

partant, dans le cadre du recours en réformation, annule la décision du directeur de l’administration des Contributions Directes du 5 mai 2020 ayant eu à statuer sur les mérites d’une réclamation contre les bulletins de l’impôt sur le revenu pour les années 2014, 2015 et 2016 et renvoie le dossier en prosécution de cause devant ledit directeur ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours en annulation ;

condamne l’Etat aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 27 septembre 2022 par :

Paul Nourissier, vice-président, Olivier Poos, premier juge, Emilie Da Cruz De Sousa, juge, en présence du greffier Marc Warken.

s.Marc Warken s.Paul Nourissier Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 27 septembre 2022 Le greffier du tribunal administratif 7


Synthèse
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 44816
Date de la décision : 27/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2022-09-27;44816 ?

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