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27/09/2022 | LUXEMBOURG | N°44646,45936

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 27 septembre 2022, 44646,45936


Tribunal administratif Nos 44646 et 45936 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2022:44646.45936 3e chambre Inscrits les 10 juillet 2020 respectivement 23 avril 2021 Audience publique du 27 septembre 2022 Recours formé par Madame … et consorts, … et …, contre une décision du ministre de l’Intérieur et une décision du conseil communal de Käerjeng en matière de plan d’aménagement général

JUGEMENT

I) Vu la requête inscrite sous le numéro 44646 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 10 juillet 2020 par Maître Monique WATGEN, a

vocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom  de ...

Tribunal administratif Nos 44646 et 45936 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2022:44646.45936 3e chambre Inscrits les 10 juillet 2020 respectivement 23 avril 2021 Audience publique du 27 septembre 2022 Recours formé par Madame … et consorts, … et …, contre une décision du ministre de l’Intérieur et une décision du conseil communal de Käerjeng en matière de plan d’aménagement général

JUGEMENT

I) Vu la requête inscrite sous le numéro 44646 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 10 juillet 2020 par Maître Monique WATGEN, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom  de Madame …, demeurant à L-…,  de Monsieur …, demeurant à L-… et  de Madame …, demeurant à L-…, 1) tendant d’après le dispositif de la requête introductive d’instance à l’annulation a) de la décision du ministre de l’Intérieur du 8 octobre 2019 portant approbation de la délibération du conseil communal de Käerjeng du 29 mars 2019 intervenue suite à trois arrêts de la Cour administrative du 3 mai 2018, inscrits sous les numéros 40379C, 40.480C, et 40403C du rôle et portant adoption de modifications ponctuelles du plan d’aménagement général de Käerjeng visant des fonds sis à Clemency, aux lieux-dits « Enneschtgaas », « Weierchen », « Lannekapp » et « rue de la Gare-

Burewiss » ;

b) de ladite délibération du conseil communal de Käerjeng du 29 mars 2019 ;

et 2) tendant à la nomination d’un commissaire spécial à la suite d’un jugement du tribunal administratif du 9 octobre 2017, inscrit sous le n° 37695 du rôle ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Pierre BIEL, demeurant à Luxembourg, du 16 1juillet 2020, portant signification de ce recours à l’administration communale de Käerjeng, établie à L-4920 Bascharage, 24, rue de l’Eau, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions ;

Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 20 juillet 2020 par Maître Georges PIERRET, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Käerjeng, préqualifiée ;

Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 28 juillet 2020 par Maître Paul SCHINTGEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse de Maître Paul SCHINTGEN déposé au greffe du tribunal administratif le 10 décembre 2020 au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 11 décembre 2020 par Maître Georges PIERRET, au nom l’administration communale de Käerjeng, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 8 janvier 2021 par Maître Monique WATGEN, au nom de Madame …, de Monsieur … et de Madame …, préqualifiés ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 15 janvier 2021 par Maître Georges PIERRET, au nom l’administration communale de Käerjeng, préqualifiée ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 5 février 2021 par Maître Paul SCHINTGEN, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu la constitution de nouvel avocat à la Cour de Maître Albert RODESCHJ, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, déposée au greffe du tribunal administratif le 23 mars 2021, en remplacement de Maître Paul SCHINTGEN ;

II) Vu la requête inscrite sous le numéro 45936 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 23 avril 2021 par Maître Monique WATGEN, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom  de Madame …, demeurant à L-…,  de Monsieur …, demeurant à L-… et  de Madame …, demeurant à L-…, tendant à l’annulation 2 a) de la décision du ministre de l’Intérieur du 15 janvier 2021 intervenue en prosécution de cause d’un jugement du tribunal administratif du 9 octobre 2017, inscrit sous n°37695 du rôle, approuvant la délibération du conseil communal de la commune de Kärjeng du 27 avril 2015 portant adoption de la refonte du plan d’aménagement général de la commune de Kärjeng, et ayant déclaré recevable, mais non fondée leur réclamation ;

b) de ladite délibération du conseil communal de Käerjeng du 27 avril 2015 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Pierre BIEL, demeurant à Luxembourg, du 29 avril 2021, portant signification de ce recours à l’administration communale de Käerjeng, établie à L-4920 Bascharage, 24, rue de l’Eau, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions ;

Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 26 mai 2021 par Maître Albert RODESCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 7 juin 2021 par Maître Georges PIERRET, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Käerjeng, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 17 septembre 2021 par Maître Georges PIERRET, au nom l’administration communale de Käerjeng, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réponse de Maître Albert RODESCH déposé au greffe du tribunal administratif le 22 septembre 2021 au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 22 octobre 2021 par Maître Monique WATGEN, au nom de Madame …, de Monsieur … et de Madame …, préqualifiés ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 17 novembre 2021 par Maître Georges PIERRET, au nom l’administration communale de Käerjeng, préqualifiée ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 19 novembre 2021 par Maître Albert RODESCH, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu la constitution de nouvel avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif en date du 1er mars 2022 par la société à responsabilité limitée Etude d’avocats PIERRET & associés SARL, inscrite au tableau V du barreau de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-1730 Luxembourg, 8, rue de l’Hippodrome, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B263981, représentée par Maître Georges PIERRET, préqualifié, au nom de l’administration communale de Käerjeng, préqualifiée ;

I) et II) 3 Vu l’article 1er de la loi modifiée du 19 décembre 2020 portant adaptation temporaire de certaines modalités procédurales en matière civile et commerciale1 ;

Vu les communications respectives de Maître Monique WATGEN, de Maître Georges PIERRET et de Maître Albert RODESCH du 24 mars 2022 informant le tribunal que les affaires pouvaient être prises en délibéré en dehors de leur présence ;

Vu les pièces versées en cause ainsi que les décisions attaquées et le jugement dont l’exécution fait notamment l’objet de la requête introductive introduite sous le numéro 44646 du rôle ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport à l’audience publique du 29 mars 2022.

___________________________________________________________________________

Lors de sa séance publique du 24 septembre 2014, le conseil communal de Käerjeng, ci-après désigné par le « conseil communal », fut saisi par le collège des bourgmestre et échevins de Käerjeng, ci-après désigné par « le collège échevinal », en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, désignée ci-après par « la loi du 19 juillet 2004 », d’un projet d’aménagement général pour la commune de Käerjeng, à l’égard duquel il décida d’« […] émet[tre] un vote positif […] de sorte que le collège des bourgmestre et échevins peut procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi […] du 19 juillet 2004 […] ».

Par courriers des 30 octobre, 4 novembre et 14 novembre 2014, Monsieur …, déclarant agir « […] pour les consorts … […] », soumit au collège des bourgmestre et échevins des objections à l’encontre dudit projet d’aménagement général.

Lors de sa séance publique du 27 avril 2015, le conseil communal décida d’approuver :

« ● la partie graphique du projet d’aménagement général, modifiée suivant l’avis de la commission d’aménagement, les avis du Ministre délégué du Développement durable et des infrastructures, matérialisée par 16 pages, numérotés de 1 à 16, document annexé à la présente ainsi que sur base des réclamations, matérialisée par 38 pages, numérotées de 1 à 38, document annexé à la présente matérialisée ;

● la partie écrite du projet d’aménagement général, modifiée suivant l’avis de la commission d’aménagement, les avis du Ministre délégué du Développement durable et des infrastructures, matérialisée par 16 pages, numérotés de 1 à 16, document annexé à la présente ainsi que sur base des réclamations, matérialisée par 38 pages, numérotées de 1 à 38, document annexé à la présente ;

● l’étude préparatoire, subdivisée en 4 sections, à savoir :

- Section 1 : analyse globale de la situation existante — non modifiée 1 « Les affaires pendantes devant les juridictions administratives, soumises aux règles de la procédure écrite et en état d’être jugées, pourront être prises en délibéré sans comparution des mandataires avec l’accord de ces derniers. » 4- Section 2 : stratégie et développement — non modifiée - Section 3 : mise en œuvre de la stratégie de développement — non modifiée - Section 4 : schéma directeur, modifiée suivant l’avis de la commission d’aménagement, les avis du Ministre délégué du Développement durable et des infrastructures, matérialisée par 16 pages, numérotés de 1 à 16, document annexé à la présente ainsi que sur base des réclamations, matérialisée par 38 pages, numérotées de 1 à 38, document annexé à la présente ;

● le rapport de présentation du projet d’aménagement général non modifié ;

● le rapport sur les incidences environnementales (SUP) non modifié. ».

Par courrier du 9 mai 2015, complété par un courrier du 6 octobre 2015, Monsieur …, déclarant agir « […] pour les consorts … […] », introduisit auprès du ministre de l’Intérieur, ci-après désigné par « le ministre », des réclamations à l’encontre de la susdite délibération du conseil communal du 27 avril 2015.

Par décision du 7 décembre 2015, notifiée à Monsieur … par courrier daté au 15 décembre 2015 et expédiée le 21 décembre 2015, le ministre approuva ladite délibération du conseil communal du 27 avril 2015 portant adoption du projet d’aménagement général et déclara recevables mais non fondées une partie des réclamations introduites à l’encontre de ladite délibération, tandis que les autres réclamations, dont celles formulées par « les consorts … », furent déclarées recevables et partiellement fondées. Ladite décision ministérielle est libellée comme suit :

« […] Vu la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain ;

Vu la délibération du 27 avril 2015 du conseil communal de Käerjeng portant adoption du projet d’aménagement général, parties écrite et graphique ;

Vu l’article 18 de la loi précitée, en vertu duquel le Ministre ayant l’aménagement communal et le développement urbain dans ses attributions statue sur les réclamations lui soumises, en même temps qu’il décide de l’approbation du projet d’aménagement général ;

Vu les réclamations introduites par […] les consorts …, […] ;

Vu l’avis de la Commission d’aménagement des 8 juillet et 7 août 2015 au sujet des réclamations parvenues au ministre de l’Intérieur ;

Vu l’avis du conseil communal de Käerjeng du 8 septembre 2015 au sujet des mêmes réclamations ;

Considérant qu’aucun réclamant ne s’est prévalu du fait qu’il n’a pas été en mesure de présenter ses observations et objections endéans les délais légaux prévus par la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement 5urbain. Que dès lors aucun grief n’a été porté à la connaissance du Ministre de l’Intérieur, et que par conséquent rien ne s’oppose à l’approbation du projet d’aménagement général, conformément à la jurisprudence des juridictions administratives en la matière (voir à cet égard notamment l’affaire n° 32463C du rôle portée devant la Cour Administrative) ;

Considérant qu’avant de statuer, le Ministre vérifie la conformité du projet d’aménagement général avec les dispositions de la loi précitée et notamment les objectifs énoncés à l’article 2, ainsi qu’avec les plans et programmes déclarés obligatoires en vertu de la loi du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire ou se trouvant à l’état de projet soumis aux communes ;

[…] Considérant que la réclamation émanant des consorts … et contestant le classement de parcelles, sises au lieu-dit « Burewiss », en zone d’aménagement différé superposée d’une zone de servitude "urbanisation" type 7a, est non fondée ; que force est de constater qu’auparavant les fonds litigieux étaient classés zone verte, donc en zone non destinée à être urbanisée; que les réclamants disposent dorénavant de fonds potentiellement urbanisables;

qu’il s’avère être dans la stratégie urbanistique des autorités communales de renforcer à l’heure actuelle plutôt le bi pôle urbain Bascharage/Hautcharage, au lieu d’aménager davantage de terrains dans les autres localités du territoire communal; que, de plus, le fait que les terrains en question ont été identifiés dans les études connexes en tant qu’habitats d’espèces protégées au titre des directives européennes « Habitats » et « Oiseaux » présuppose une analyse de terrains détaillée avant toute mise en œuvre d’un projet d’aménagement particulier; que vue la situation spécifique du site, un couloir d’air frais est justifié, mais que, de toute façon, les terrains en question ne sont nullement hypothéqués, alors qu’ils restent entièrement aménageables; que partant les mesures contestées n’apportent pas de nuisances pour les propriétaires ;

qu’en deuxième lieu, les réclamants invoquent qu’il ait été omis d’indiquer le collecteur de canalisation à Clemency, au lieu-dit « Rue de la Gare» et qu’ils contestent le classement de fonds environnant en zone de servitude "urbanisation" type 5 ; que ce volet de la réclamation est fondé ; que les fonds litigieux comportent effectivement un cours d’eau canalisé à ciel ouvert ; qu’il y a partant lieu de couvrir les terrains en question d’une zone de servitude "urbanisation" type 1 ;

qu’en troisième lieu, les réclamants prétendent que les schémas directeurs n’auraient pas été modifiés suite aux modifications entreprises lors du deuxième vote, en l’occurrence l’augmentation de la profondeur des terrains aménageables ; que ceci n’est d’ailleurs pas le cas, alors qu’ils ont bel et bien été modifiés en conséquence ;

qu’en ce qui concerne l’évacuation des eaux usées, au lieu-dit « Burewiss », faisant l’objet de remarques de la part des réclamants, force est de constater qu’au moment où le conseil communal décidera d’enlever le classement en zone d’aménagement différé des terrains en question le schéma directeur concerné sera à adapter; qu’au plus tard lors de l’élaboration du projet d’aménagement particulier les détails techniques devront être réglés ;

que finalement, les réclamants contestent la représentation erronée de leur parcelle cadastrale n° … (dorénavant divisée en parcelles cadastrales nos … et …), sise à …, au lieu-

dit « … », qu’il s’agit effectivement d’une fausse représentation sur le projet d’aménagement 6général, dans la mesure où la partie de voirie constituant la parcelle cadastrale n° … a été omise d’y être indiquée; que par ailleurs la profondeur de construction reste largement suffisante afin de pouvoir ériger une maison d’habitation sur le fonds litigieux; que partant cette partie de la réclamation n’est pas fondée ;

[…] arrête :

Art. 1er: La délibération du 27 avril 2015 du conseil communal de Käerjeng portant adoption du projet d’aménagement général, parties graphiques et écrite, est approuvée.

Art. 2 : Les réclamations émanant de […] sont recevables en la forme et non fondées.

Art. 3 : Les réclamations émanant de […], ainsi que des consorts …, sont déclarées recevables en la forme et partiellement fondées.

[…] Art. 7: La zone de servitude "urbanisation" type 5, frappant des fonds sis à Clemency, au lieu-dit « Rue de la Gare» est remplacée par une zone de servitude "urbanisation" type 1.

[…] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 18 mars 2016, inscrite sous le numéro 37695 du rôle, Madame …, Monsieur … et Madame …, ci-après désignés par « les consorts … », firent introduire un recours tendant à l’annulation, sinon à la réformation (i) de la décision du ministre du 7 décembre 2015 portant approbation de la délibération du conseil communal du 27 avril 2015 portant adoption du projet d’aménagement général, parties graphique et écrite, et ayant déclaré recevables et partiellement fondées leurs réclamations introduites à l’encontre de cette délibération, (ii) de ladite délibération du conseil communal du 27 avril 2015, ainsi que (iii) de la délibération du conseil communal du 24 septembre 2014 « portant adoption provisoire » dudit projet d’aménagement général.

Ledit recours a été déclaré partiellement fondé par jugement du tribunal administratif du 9 octobre 2017, et ce uniquement pour autant qu’il avait visé la décision du ministre du 7 décembre 2015, le tribunal de céans ayant annulé en effet ladite décision ministérielle dans l’unique mesure où elle a rejeté la réclamation des consorts … visant le classement de leurs parcelles sises au lieu-dit « Weierchen » et portant les numéros cadastraux … et …, de même que le volet de l’approbation ministérielle y relatif, tout en rejetant le recours pour le surplus.

Parallèlement au recours contentieux des demandeurs d’autres recours avaient été introduits par des tiers, dont trois, qui avaient trait au classement de fonds sis à Clemency, aux lieux-dit « Enneschtgaas », « Weierchen », « Lannekapp » et « rue de la Gare-

Burewiss », recours qui furent déclarés partiellement fondés par arrêts de la Cour administrative du 3 mai 20182.

2 Cour adm., 3 mai 2018, numéros 40379C, 40380C et 40403C du rôle, disponibles sur www.ja.etat.lu.

7Le 22 janvier 2019, le ministre prit une « décision en prosécution de cause », « conformément au jugement du Tribunal administratif du 9 octobre 2017, n° du rôle 37695 », décision libellée comme suit :

« […] Par la présente, et conformément au jugement du Tribunal administratif du 9 octobre 2017 n° de rôle 37695, qui a partiellement annulé la décision du ministre de l’Intérieur du 7 décembre 2015 portant approbation du projet de refonte du plan d’aménagement général de la commune de Kaerjeng, j’ai l’honneur de vous faire tenir une décision en prosécution de cause.

J’approuve la délibération du conseil communal du 27 avril 2015 portant adoption du projet de refonte du plan d’aménagement général de la commune de Kaerjeng, présenté par les autorités communales, pour autant qu’elle concerne le schéma directeur régissant des fonds sis au lieu-dit « Weierchen » [C-NQ 051] à Clemency et faisant l’objet d’une réclamation introduite par les consorts ….

La réclamation émanant des consorts … est déclarée recevable en la forme et quant au fond non fondée, pour autant qu’elle concerne le schéma directeur invoqué ci-avant.

En effet, en ce qui concerne l’évacuation des eaux usées, au lieu-dit « Weierchen », faisant l’objet d’observations de la part des réclamants, force est de constater qu’au moment où le conseil communal décidera de lever le classement en zone d’aménagement différé des terrains en question le schéma directeur concerné sera à adapter, et, au plus tard lors de l’élaboration du projet d’aménagement particulier les détails techniques devront être réglés.

Cette décision est basée sur l’article 18 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain. […] ».

Ladite décision ministérielle fut notifiée aux consorts … par courrier du collège échevinal du 7 mars 2019.

Suite aux arrêts prémentionnés de la Cour administrative du 3 mai 2018, le conseil communal prit, en date du 29 mars 2019, une décision portant adoption de modifications ponctuelles du plan d’aménagement général de Käerjeng, ci-après désigné par « le PAG », lesdites modifications ponctuelles ayant concerné des fonds sis à Clemency, aux lieux-dits « Enneschtgaas », « Weierchen », « Lannekapp » et « rue de la Gare-Burewiss » et plus particulièrement les parcelles portant les numéros cadastraux …, …, …, …, et … de la section CA Clemency, ainsi que les parcelles portant les numéros cadastraux …, …, …, …, …, … et … de la section CB Moulins, parcelles pour lesquelles la « zone de servitude urbanisation type 7 a », ci-après désignée par « ZSU-7a », fut abrogée. Dans cette même décision, le conseil communal décida encore « d’enlever les immeubles … et … à Clemency de l’inventaire des bâtiments et des gabarits protégés au niveau communal afin de se conformer à la décision de la Cour administrative. ».

Par courrier du 22 avril 2019, les consorts … s’adressèrent au ministre dans les termes suivants :

« […] Suite au jugement du Tribunal administratif du 9 octobre 2017 (No 37695), la décision de M. le Ministre de l’Intérieur, M. Dan Kersch, prise le 7 décembre 2015 concernant les réclamations introduites par les consorts … contre le nouveau PAG (de fin 82014) de Käerjeng, fut partiellement annulée, en particulier pour nos parcelles « Weierchen », numéros cadastraux. … et ….

Pour réagir à ce jugement vous, Madame la Ministre, avez pris en date du 22 janvier 2019 une nouvelle décision pour les parcelles « Weierchen » nous appartenant à nous, les consorts …, et ainsi il nous fut ouvert à nouveau un délai de trois mois pour présenter un recours en annulation devant le Tribunal administratif. Nous avons été invités à partir du 7 mars 2019 à consulter les parties graphique et écrite du PAG de Käerjeng.

Au nom des consorts …, je me suis présenté le 20 mars 2019 à la Mairie où je fus accueilli par Mme …, architecte de la Commune et responsable des affaires de PAG, qui m’a montré tous les documents et où j’ai pu constater qu’aucune modification n’y avait été apportée depuis le jugement! D’ailleurs Mme … m’a bien confirmé qu’aucune modification n’était intervenue. Elle m’a même affirmé que les fautes auxquelles nous avions rendu attentif tout au long des procédures, notamment la non-représentation d’une importante canalisation des eaux usées traversant depuis une soixantaine d’années les parcelles « Weierchen », n’avaient pas été redressées.

Par conséquent je trouve inadmissible que durant le délai de 3 mois qui nous fut accordé pour présenter un recours en annulation de la nouvelle décision ministérielle, recours devant se baser sur des documents qui évidemment ne sont pas censés être modifiés durant ce délai, le conseil communal dans sa séance du 29 mars 2019 prenne des décisions et suite à ces décisions apporte allégrement des modifications ponctuelles concernant précisément les documents « Weierchen » et « Burewiss ».

En effet, le communiqué affiché annonce que le conseil communal de Käerjeng dans sa séance du 29 mars 2019, sur base des jugements du 3 mai 2018 de la Cour administrative, a porté des modifications au PAG.

Nous nous opposons catégoriquement à ces modifications dans la mesure où elles ont pour objet de lever la servitude « urbanisation » type 7a d’une façon discriminatoire, exclusivement sur diverses parcelles appartenant à des propriétaires ayant fait appel aux jugements pris par le Tribunal administratif et pour lesquelles la Cour administrative dans 3 jugements du 3 mai 2018 a estimé que la superposition d’une servitude « urbanisation » 7a n’était pas justifiée.

Or les parcelles d’autres propriétaires ont connu exactement le même sort au cours de la procédure du PAG, elles se trouvent les unes au « Weierchen » et les autres dans la « Burewiss » et sont tout autant grevées de cette servitude « urbanisation » 7a injustifiée que les parcelles pour lesquelles cette servitude fut enlevée. Par souci d’équité il aurait appartenu au conseil communal d’enlever systématiquement et d’une façon conséquente cette servitude d’urbanisation sur toutes les parcelles comprises dans les deux zones nouveau quartier « Weierchen » et « Burewiss » ! D’ailleurs toutes les parcelles de « Weierchen » d’une part et toutes les parcelles de « Burewiss » d’autre part, sont soumises à leur même schéma directeur spécifique pour les PAP ultérieurs. Ces schémas directeurs n’ont pas été modifiés, eux et continuent donc à prescrire pour toutes (!) les parcelles, sous 1.2 : Lignes directrices, de « Protéger la vallée du Falterbach dans sa fonction d’espaces de rétention et de submersion, de couloir de ventilation et de réserve d’air froid » (citation).

9Il me semble que lors de cet empressement pour favoriser exclusivement les parcelles des propriétaires ayant fait appel aux jugements du tribunal administratif, on a même omis d’enlever la servitude 7a sur diverses parcelles de Burewiss et appartenant à Mme …! Par ailleurs, comme il fut procédé e.a. à la modification du plan du PAG au lieu-dit « Weierchen », je ne comprends pas pourquoi on n’en a pas profité pour y représenter à cette occasion le collecteur des eaux usées cité plus haut et qui manquait sur la partie graphique du nouveau PAG, alors que sur l’ancien PAG il était bel et bien représenté. Le 27 mars 2019, donc 2 jours avant ladite séance du conseil communal, lors d’une entrevue chez moi, j’ai demandé à Monsieur l’échevin … de m’expliquer pourquoi la commune s’obstinait à ne pas faire représenter ce collecteur sur la partie graphique du PAG, alors que tout au long de la procédure nous n’avions pas cessé de rendre attentif à cette faute grave. M … m’a expliqué que retoucher un plan coûtait trop cher, que la Commune était bien consciente de cet oubli et que lors d’une prochaine retouche elle ne manquerait pas de redresser cette situation. Je lui ai fait la remarque que les fautes commises par un bureau d’études étaient censées être redressées aux frais du bureau d’études et non pas aux frais de la Commune. Soit, le plan a fait l’objet d’une modification, mais le collecteur n’est toujours pas représenté ! Comptant sur votre compréhension, je vous prie, Madame la Ministre, d’agréer l’expression de mes sentiments distingués. […] ».

Le 8 octobre 2019, le ministre approuva la décision prémentionnée du conseil communal du 29 mars 2019 et rejeta la réclamation des consorts … dans les termes suivants :

« […] Par la présente, j’ai l’honneur de vous informer que j’approuve la délibération du conseil communal du 29 mars 2019 portant adoption du projet de modification du plan d’aménagement général de la commune de Käerjeng, concerant des fonds sis à Clemency aux lieux-dits « Weierchen », « enneschtgaas », « Lannerkapp » et « Rue de la Gare Burewiss » ainsi que « … et … » présenté par les autorités communales.

Cette décision est basée sur l’article 18 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain.

Les réclamations émanant de […], de Monsieur … au nom et pour le compte des consorts … ainsi que de […], sont recevables en la forme mais quant au fond non fondées.

En effet, les autorités communales se sont contentées d’exécuter le dispositif de l’arrêt 40403C du rôle, qui précise qu’uniquement les fonds de l’appelante, plus précisément les parcelles cadastrales nos …, …, …, …, …, …, …, …, …, …, … et …, sont concernées par l’annulation coulée en force de chose jugée et elles m’ont saisi uniquement en ce qui concerne les terrains de l’appelante.

Je ne saurais des lors faire droit aux réclamations, alors qu’elles dépassent le cadre de l’assiette de ma saisine. En effet, les parcelles visées par les réclamants connaissent d’ores et déjà une couverture réglementaire opérée par le plan d’aménagement général de la commune de Käerjeng, approuvé par le ministre de l’Intérieur en date du 7 décembre 2015.

Opérer le contraire, en faisant droit aux réclamants, reviendrait à statuer ultra petita, ce qui est constitutif d’un excès de pouvoir.

10La présente sort ses effets sans préjudice des charges qui grèvent ou pourront grever les fonds en question en vertu d’autres dispositions légales ou réglementaires […] ».

Par requête inscrite sous le numéro 44646 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 10 juillet 2020, les consorts … ont fait introduire un recours, tendant d’après le dispositif de la requête introductive d’instance auquel le tribunal seul est tenu, à l’annulation de la prédite décision du conseil communal du 29 mars 2019, ainsi que de la décision d’approbation tutélaire du 8 octobre 2019, tout en sollicitant dans le même recours la nomination d’un commissaire spécial à la suite du jugement du tribunal administratif du 9 octobre 2017, inscrit sous le numéro 37695 du rôle, afin de prendre la décision en lieu et place de l’autorité compétente.

Le 15 janvier 2021, le ministre prit une « décision en prosécution de cause » suite au prédit jugement du tribunal administratif du 9 octobre 2017, inscrit sous le numéro 37695 du rôle, décision, notifiée aux consorts … par courrier du 21 janvier 2021, libellée comme suit :

« […] Par la présente, et conformément au jugement du Tribunal administratif du 9 octobre 2017, n° de rôle 37695, qui a partiellement annulé la décision du ministre de l’Intérieur du 7 décembre 2015 portant approbation du projet de refonte du plan d’aménagement général de la commune de Käerjeng, j’ai l’honneur de vous faire tenir une décision en prosécution de cause, en complément de ma décision du 22 janvier 2019 qui vous a d’ores et déjà été communiquée.

J’approuve la délibération du conseil communal du 27 avril 2015 portant-adoption du projet de refonte du plan d’aménagement général de la commune de Käerjeng, présenté par les autorités communales, pour autant qu’elle concerne les parcelles cadastrales n° …, …, …, …, …, …, … (résultant du morcellement de l’ancienne parcelle cadastrale n° …), ainsi que …, sises à Clemency et faisant l’objet d’une réclamation introduite par les consorts ….

La réclamation émanant des consorts … est déclarée recevable en la forme et quant au fond non fondée, pour autant qu’elle concerne le classement des parcelles cadastrales invoquées ci-avant.

Premièrement, pour ce qui concerne les doléances des réclamants quant au classement des fonds litigieux en « zone d’aménagement différé », il y a lieu de relever que le potentiel de développement de la localité de Clemency est à l’heure actuelle suffisamment élevé, d’autant plus qu’elle ne constitue pas un pôle de développement prioritaire, et que le phasage, tel qu’il a été prévu par les autorités communales est parfaitement cohérent.

Qui plus est, en application d’une jurisprudence constante (CA 5 mars 2019, 41889C notamment), il faut retenir qu’« en matière d’approbation le ministre de l’intérieur dispose certes d’un pouvoir de tutelle spéciale qui lui confère un pouvoir de réformation de la délibération communale portée devant lui, et ce dans les limites des réclamations afférentes (conformément à l’arrêt n° 111/14 du 20 juin 2014 de la Cour constitutionnelle). Or, la jurisprudence administrative (N° de rôle : 33257CA) a pris soin de préciser que l’étendue de ce pouvoir de réformation ministériel doit toujours rester dans le cadre de l’autonomie communale consacrée par l’article 107 de la Constitution, ainsi que par le droit international en retenant notamment que : « le système ainsi instauré (NDLA : pouvoir de réformation) comporte nécessairement que le ministre, en statuant sur la réclamation, prenne sa décision en tenant compte de la logique intrinsèque du plan, de la différenciation des options 11urbanistiques épousées par la commune, de la systématique des options opérées et de la cohérence surtout du système global instauré. » Deuxièmement, pour ce qui concerne les doléances des réclamants quant à la servitude urbanisation frappant partiellement les fonds litigieux, force est de constater que la servitude écologique litigieuse est d’une importance certaine, due à des contraintes environnementales significatives sur le site, tel qu’il a en fait déjà été relevé dans les documents faisant partie intégrante de l’étude environnementale dite SUP.

Par ailleurs, l’argumentaire développé ci-avant a déjà été confirmé par le jugement du Tribunal administratif n° du rôle 37695 du 9 octobre 2017 comme suit « Le tribunal constate ensuite que le classement des susdites parcelles ZAD et en ZSU … est motivé, notamment d’une part par la volonté de résoudre les problèmes environnementaux identifiés dans le cadre de la SUP, préalablement à une urbanisation des fonds concernés et, d’autre part, par la stratégie urbanistique globale de l’administration communale de Käerjeng consistant à renforcer, à l’heure actuelle, le bi-pôle urbain Bascharage/Hautcharage, au lieu d’aménager davantage de terrains dans les autres localités du territoire communal, en ce compris celle de Clemency. En subordonnant ainsi l’urbanisation des parcelles en question à la résolution préalable desdits problèmes environnementaux, respectivement à l’apparition d’un besoin de terrains constructibles supplémentaires, en cas de saturation de ce bi-pôle urbain Bascharage/Hautcharage, l’administration communale, confirmée par le ministre, a agi conformément aux objectifs d’intérêt général d’un développement harmonieux des structures urbaines et rurales et d’un niveau élevé de protection de l’environnement naturel et du paysage devant, aux termes de l’article 2 (b) et (e) de la loi du 19 juillet 2004, guider les autorités communales lorsqu’elles initient des modifications de leur plan d’aménagement.

Dans la mesure où le reclassement litigieux répond ainsi à un but d’intérêt général, le moyen tiré d’une violation du droit de propriété, tel que garanti l’article 16 de la Constitution et par l’article 1er du premier protocole, encourt le rejet. … ».

Cette décision est basée sur l’article 18 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain.

La présente décision sort ses effets sans préjudice des charges qui grèvent ou pourront grever les fonds en question en vertu d’autres dispositions légales ou réglementaires. […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 23 avril 2021, inscrite sous le numéro 45936 du rôle, les consorts … ont fait introduire un recours en annulation contre la décision précitée du ministre du 15 janvier 2021, ainsi que contre la délibération du conseil communal de Käerjeng du 27 avril 2015 portant adoption du projet de refonte du PAG de la commune de Käerjeng.

Dans le cadre du recours inscrit sous le numéro 45936 du rôle, les consorts … sollicitent, dans un souci d’une bonne administration de la justice, la jonction avec le recours inscrit sous le numéro 44646.

La partie étatique, ainsi que la commune se rapportent à prudence de justice en ce qui concerne cette demande de jonction.

12Etant donné que les deux affaires sont effectivement connexes dans la mesure où elles ont toutes les deux trait au PAG de Käerjeng, tel qu’approuvé après avoir été partiellement annulé par divers arrêts et jugement des juridictions administratives et qu’il y a en outre identité des parties, il y a lieu de faire droit à la demande des consorts … et partant de procéder à la jonction, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, des rôles 44646 et 45936 pour y statuer par un seul et même jugement.

1. Quant au recours inscrit sous le numéro 44646 du rôle Il convient tout d’abord de préciser que le recours sous analyse comporte deux volets, à savoir, d’un côté, le volet tendant à l’annulation de la décision du conseil communal du 29 mars 2019 intervenue suite aux arrêts prémentionnés de la Cour administrative du 3 mai 2018, inscrits sous les numéros 40379C, 40380C et 40403C du rôle et portant adoption de modifications ponctuelles du PAG visant des fonds sis à Clemency, aux lieux-dits « Enneschtgaas », « Weierchen », « Lannekapp » et « rue de la Gare-Burewiss », ainsi que de la décision ministérielle d’approbation tutélaire du 8 octobre 2019, et, de l’autre côté, une demande en nomination d’un commissaire spécial au motif que le ministre n’aurait pas donné suite au jugement du tribunal administratif du 9 octobre 2017, inscrit sous le numéro 37695 du rôle.

a) Quant à la compétence et à la recevabilité pour autant que le recours sous analyse vise la décision du ministre de l’Intérieur du 8 octobre 2019 portant approbation de la délibération du conseil communal de Käerjeng du 29 mars 2019 intervenue suite aux arrêts de la Cour administrative du 3 mai 2018, inscrits sous les numéros 40379C, 40380C et 40403C du rôle, et portant adoption de modifications ponctuelles du PAG visant des fonds sis à Clemency, aux lieux-dits « Enneschtgaas », « Weierchen », « Lannekapp » et « rue de la Gare-Burewiss », ainsi que ladite délibération du conseil communal de Käerjeng du 29 mars 2019 En ce qui concerne la compétence du tribunal de céans pour statuer sur ce volet du recours sous analyse, il convient de rappeler que les décisions sur les projets d’aménagement, lesquelles ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’ils concernent et le régime des constructions à y ériger, ont un caractère réglementaire. La décision d’approbation du ministre, intervenue après réclamation de particuliers, participe au caractère réglementaire de l’acte approuvé3, étant entendu que le caractère réglementaire ainsi retenu s’étend également au volet de la décision litigieuse ayant statué sur les réclamations introduites par les demandeurs, intervenue dans le processus général de l’élaboration de l’acte approuvé.

Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », seul un recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère réglementaire, de sorte que le tribunal est compétent pour statuer sur le recours en annulation tel qu’introduit par les consorts ….

Dans leur mémoire en réponse, tant la commune que la partie étatique soulèvent l’irrecevabilité du recours sous analyse pour défaut d’intérêt à agir dans le chef des 3 Cour adm., 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Actes réglementaires, n° 54 et les autres références y citées.

13demandeurs. A l’appui de leurs conclusions, elles soutiennent en substance que les consorts … ne seraient pas propriétaires des parcelles concernées par les décisions litigieuses, de sorte qu’ils ne disposeraient d’aucun intérêt né et actuel à voir en contrôler la légalité.

Les demandeurs entendent résister au moyen d’irrecevabilité leur ainsi opposé en affirmant que leur intérêt à agir devrait s’apprécier par rapport à leurs prétentions et non pas par rapport au caractère justifié de ces mêmes prétentions. Ils expliquent plus particulièrement qu’un administré aurait un intérêt à agir dès lors que ses droits, voire même ses simples intérêts seraient affectés par les effets de l’acte administratif visé par son recours, intérêt qui ne saurait être tributaire du bien-fondé des moyens de nullité invoqués.

En donnant encore à considérer qu’ils ne sauraient se voir reprocher de ne pas avoir introduit de réclamation auprès du conseil communal en ce qui concerne les modifications litigieuses du PAG alors que la possibilité d’introduire une telle réclamation serait exclue par la loi et plus particulièrement par l’article 14, paragraphe (3) de la loi du 19 juillet 2004, lequel ne permettrait, en effet, pas de former une nouvelle réclamation auprès du conseil communal. Ils ajoutent que l’adoption de modifications ponctuelles du PAG serait indissociable de l’adoption du PAG initial en son ensemble.

Les demandeurs font encore valoir qu’en l’espèce ils remettraient en cause l’omission du ministre de prendre une nouvelle décision suite au jugement du tribunal administratif du 9 octobre 2017, inscrit sous le numéro 37695 du rôle, omission qui aurait entraîné un vice de procédure dans l’approbation du nouveau PAG avec les modifications ponctuelles sous analyse, de sorte qu’ils disposeraient d’un intérêt à agir contre les décisions d’approbation litigieuses.

Finalement, ils affirment que le rejet par le ministre de leur réclamation présentée en date du 22 avril 2019, suffirait à lui-seul pour justifier leur intérêt à agir, de sorte que ce serait à tort que la commune et la partie étatique concluraient à l’irrecevabilité du recours sous analyse.

Dans son mémoire en duplique, la commune réfute la conclusion des demandeurs selon laquelle le fait que le ministre n’aurait pas pris de décision suite au jugement intervenu en date du 9 octobre 2017 entraînerait ipso facto un intérêt à agir dans le chef de ceux-ci, tout en donnant à considérer que les décisions d’approbation litigieuses seraient sans effet sur le classement des parcelles des demandeurs tel que retenu lors de la décision d’approbation initiale du PAG en date du 27 avril 2015.

La partie étatique, de son côté, insiste sur le fait que les décisions litigieuses n’affecteraient pas les parcelles des demandeurs, tout en mettant en exergue que ces derniers n’auraient pas agi contre la décision ministérielle du 22 janvier 2019, laquelle aurait, quant à elle, eu trait aux parcelles de ces derniers.

En ce qui concerne l’intérêt à agir des demandeurs, il convient en premier lieu de relever qu’il est constant en cause pour résulter tant des libellés des décisions litigieuses, que des explications de la commune ainsi que de la partie étatique au cours d’instance, que ces mêmes décisions sont intervenues suite aux prédits arrêts de la Cour administrative du 3 mai 2018 et concernent exclusivement les parcelles sises à Clemency, aux lieux-dits « Enneschtgaas », « Weierchen », « Lannekapp » et « rue de la Gare-Burewiss », inscrits au cadastre de Käerjeng sous les numéros …, …, …, …, et … de la section CA Clemency, 14respectivement sous les numéros cadastraux …, …, …, …, …, … et … de la section CB Moulins. Il s’ensuit que ces mêmes décisions n’ont pas trait aux parcelles des demandeurs inscrites, suite à une procédure de morcellement, au cadastre de la commune de Käerjeng sous les numéros cadastraux …, …, …, …, …, … et ….

S’il est dès lors établi, et d’ailleurs non autrement contesté par les demandeurs, que les modifications ponctuelles du PAG telles qu’opérées à travers les décisions litigieuses n’affectent pas directement leurs parcelles, les concernés estiment toutefois disposer néanmoins d’un intérêt à agir, alors que d’une part, le ministre n’aurait pas donné suite au prédit jugement du tribunal administratif du 9 octobre 2017, numéro 37695 du rôle, ce qui aurait comme conséquence que l’approbation du PAG dans son ensemble serait viciée, et d’autre part leur intérêt à agir serait à apprécier en fonction de leur prétentions et serait donné à suffisance par le seul fait qu’ils auraient introduit une réclamation auprès du ministre.

En ce qui concerne cette dernière affirmation, il convient d’abord de souligner que s’il est certes de jurisprudence constante4 qu’en contrepartie du fait que le recours introduit devant le juge administratif contre un projet d’aménagement général communal n’est recevable qu’à condition de l’épuisement de la procédure non contentieuse de réclamation, le réclamant en question dispose d’un intérêt à agit au niveau contentieux et ainsi à voir vérifier la légalité de la décision ministérielle prise à son encontre et, plus loin, de la délibération communale, et ce peu importe que sa réclamation précontentieuse auprès du ministre ait été déclarée irrecevable ou non fondée par ce dernier, cette jurisprudence n’est toutefois pas transposable en l’espèce.

En effet, la jurisprudence prémentionnée se trouve justifiée par la finalité de la procédure précontentieuse de réclamation telle que mise en place par le législateur dans le cadre de l’adoption d’un PAG, consistant à voir disparaître, au cours de l’élaboration de ce dernier, les objections et réclamations solutionnées, tout en ne laissant subsister que celles maintenues et réitérées, lesquelles justifient par elles seules un intérêt à agir des administrés.

Or, en l’espèce, les décisions d’approbation litigeuses n’ont pas été prises directement en amont de la procédure d’élaboration du projet d’aménagement général, seule procédure visée par la jurisprudence en question, mais elles ont été prises dans un contexte particulier, à savoir en prosécution de cause des trois arrêts prévisés de Cour administrative du 3 mai 2018, lesquels concernent exclusivement des parcelles appartenant à des tiers. Ces mêmes décisions d’approbation ne concernent dès lors que des modifications ponctuelles du PAG, de sorte que contrairement aux affirmations des demandeurs, elles sont bien dissociables des décisions d’approbation du conseil communal et du ministre des 27 avril et 7 décembre 2015, lesquelles visent, quant à elles, le PAG dans son ensemble.

Ainsi, et contrairement à ce que semblent affirmer les demandeurs, le seul fait qu’ils ont introduit une réclamation auprès du ministre contre la décision du conseil communal du 29 mars 2019 prise en prosécution de cause de trois arrêts de la Cour administrative, ne saurait justifier à lui seul un intérêt à agir dans leur chef.

A cela s’ajoute que les décisions litigieuses ne visent pas les parcelles des demandeurs, mais uniquement des parcelles appartenant à des tiers, étant rappelé à cet égard qu’il ne s’agit que de décisions d’approbation de modifications ponctuelles du PAG, 4 Cour adm., 17 avril 2008, n° 23846C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Urbanisme, n° 319 et les autres références y citées.

15intervenues dans le cadre des annulations partielles dont celui-ci a fait l’objet à travers les trois arrêts prévisés de la Cour administrative.

Or, et si les demandeurs pouvaient, le cas échéant, néanmoins se prévaloir d’un intérêt à agir à ce stade de la procédure, cet intérêt est toutefois conditionné par le fait que les décisions litigieuses leur portent préjudice. En effet, aux termes de l’article 1er de la loi du 7 novembre 1996, un recours est ouvert « contre toutes les décisions administratives à l’égard desquelles aucun autre recours n’est admissible ». Cet article limite ainsi l’ouverture d’un recours devant les juridictions administratives notamment aux conditions cumulatives que l’acte litigieux doit constituer une décision administrative, c’est-à-dire émaner d’une autorité administrative légalement habilitée à prendre des décisions unilatérales obligatoires pour les administrés et qu’il doit s’agir d’une véritable décision, affectant les droits et intérêts de la personne qui la conteste5.

Si, en l’espèce, la nature de décision administrative n’est pas remise en cause en ce qui concerne les actes attaqués, tant la commune que la partie étatique contestent toutefois le fait que ces mêmes décisions portent atteinte aux droits et intérêts des demandeurs.

A cet égard, il échet de constater, tel que relevé ci-avant, que les décisions litigieuses sont totalement étrangères aux parcelles des demandeurs mais concernent exclusivement des parcelles appartenant à d’autres administrés. Il convient, par ailleurs, de souligner que les demandeurs restent en défaut de préciser dans quelle mesure les modifications litigieuses adoptées pour des parcelles appartenant à tiers seraient susceptibles d’affecter leur propre situation, de sorte que le tribunal n’entrevoit pas dans quelle mesure les décisions d’approbation sous analyse seraient susceptibles de porter préjudice aux demandeurs et justifier un intérêt à agir dans leur chef.

Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’affirmation des consorts … selon laquelle ils disposeraient d’un intérêt à agir compte tenu du fait que le ministre n’aurait pas donné suite au jugement prémentionné du tribunal administratif du 9 octobre 2017, numéro 37695 du rôle.

En effet, si cette circonstance est certes susceptible de justifier leur intérêt à agir dans le cadre de leur demande de nomination d’un commissaire spécial, demande qui sera examinée ci-après, elle ne saurait toutefois leur conférer un quelconque intérêt à agir contre des décisions d’approbation concernant exclusivement des parcelles étrangères aux leurs, faute pour les demandeurs de justifier un quelconque lien qui existerait entre le prédit jugement et les parcelles visées par les décisions de modifications ponctuelles.

Quant à l’affirmation non autrement circonstanciée des demandeurs selon laquelle l’approbation du PAG serait viciée dans son ensemble, alors que le ministre aurait omis de donner suite au jugement prémentionné du tribunal administratif, il convient de souligner qu’un tel moyen non autrement développé et non soutenu effectivement n’est pas à prendre en considération par le tribunal, étant donné qu’il ne lui appartient pas de suppléer à la carence du demandeur en prenant position par rapport à un tel moyen simplement suggéré et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de ses conclusions.

5 F. Schockweiler, Le contentieux administratif et la procédure administrative non contentieuse en droit luxembourgeois, n° 46, p. 28 16 Au vu de ces considérations le recours sous analyse, pour autant qu’il vise l’annulation des décisions d’approbation de modification ponctuelles du PAG du conseil communal du 29 mars 2019 et du ministre du 8 octobre 2019 est à déclarer irrecevable pour défaut d’intérêt à agir dans le chef des demandeurs.

b) Quant à la demande en nomination d’un commissaire spécial A l’appui de leur demande en nomination d’un commissaire spécial, les demandeurs font valoir que le ministre n’aurait pas donné suite au jugement du tribunal administratif du 9 octobre 2017, numéro 37695 du rôle, endéans le délai visé à l’article 84 de la loi 7 novembre 1996, tout en affirmant encore que la décision ministérielle intervenue le 22 janvier 2019 ne saurait être considérée comme décision en prosécution de cause dudit jugement dans la mesure où elle porterait exclusivement sur l’approbation du schéma directeur régissant des fonds sis au lieu-dit « Weierchen ». A cet égard, ils donnent plus particulièrement à considérer que l’annulation partielle prononcée par le tribunal administratif dans son jugement prémentionné du 9 octobre 2017, n’aurait pas visé le schéma directeur en question, mais aurait concerné la superposition de leurs parcelles sises au lieu-dit « am Weierchen » d’une ZSU-7a.

Faute de réaction de la part du ministre, la nomination d’un commissaire spécial serait dès lors nécessaire pour veiller à l’exécution du prédit jugement du tribunal administratif du 9 octobre 2017.

L’article 84 de la loi du 7 novembre 1996 prévoit ce qui suit :

« Lorsqu’en cas d’annulation ou de réformation, coulée en force de chose jugée, d’une décision administrative qui n’est pas réservée par la Constitution à un organe déterminé, la juridiction ayant annulé ou réformé la décision a renvoyé l’affaire devant l’autorité compétente et que celle-ci omet de prendre une décision en se conformant au jugement ou à l’arrêt, la partie intéressée peut, à l’expiration d’un délai de trois mois à partir du prononcé de l’arrêt ou du jugement, saisir la juridiction qui a renvoyé l’affaire en vue de charger un commissaire spécial de prendre la décision aux lieu et place de l’autorité compétente et aux frais de celle-ci. La juridiction fixe au commissaire spécial un délai dans lequel il doit accomplir sa mission. La désignation du commissaire spécial dessaisit l’autorité compétente. ».

Si la commune se rapporte à prudence de justice en ce qui concerne la demande en nomination d’un commissaire spécial, la parie étatique, quant à elle, précise que le ministre aurait entretemps pris une décision en prosécution de cause suite au jugement du tribunal administratif du 9 octobre 2017, de sorte que cette demande serait devenue sans objet.

Force est de constater qu’il résulte tant des explications circonstanciées de la partie étatique que des pièces versées en cause, que le ministre a effectivement donné suite au jugement prémentionné du tribunal de céans du 9 octobre 2017 en prenant, en date du 15 janvier 2021, une décision en exécution dudit jugement, cette même décision faisant d’ailleurs l’objet du recours inscrit sous le numéro 45936 du rôle.

Or, dans la mesure où, au moment où le juge administratif est appelé à statuer sur la demande en désignation d’un commissaire spécial, l’autorité administrative a pris une 17décision en prosécution de cause, la demande en désignation d’un commissaire est à considérer comme étant devenue sans objet, de sorte que le volet afférent de la requête introductive d’instance est à rejeter.

c) Quant aux demandes en allocation d’une indemnité de procédure Dans leur requête introductive d’instance, les demandeurs sollicitent l’allocation d’une indemnité de procédure de 3.000,- euros sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », demande qui est à rejeter au vu de l’issue du présent litige.

S’agissant de la demande en obtention d’une indemnité de procédure de 3.000,- euros, telle que formulée par la commune sur base du même article, celle-ci est à rejeter, alors que la concernée n’établit pas en quoi il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

2. Quant au recours inscrit sous les numéro 45936 du rôle a) Quant à la compétence Les décisions sur les projets d’aménagement, lesquelles ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’ils concernent et le régime des constructions à y ériger, ont un caractère réglementaire. La décision d’approbation du ministre participe au caractère réglementaire de l’acte approuvé6, étant entendu que le caractère réglementaire ainsi retenu s’étend également au volet de la décision litigieuse ayant statué sur les réclamations introduites par les demandeurs, intervenue dans le processus général de l’élaboration de l’acte approuvé.

Conformément à l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996, seul un recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère réglementaire, de sorte que le tribunal est compétent pour statuer sur le recours en annulation sous analyse.

b) Quant à la loi applicable Le tribunal précise que la procédure d’adoption d’un PAG, est prévue par la loi du 19 juillet 2004. Or, celle-ci a été modifiée à plusieurs reprises et dernièrement (i) par une loi du 28 juillet 2011 entrée en vigueur, en application de son article 45, en date du 1er août 2011, (ii) par la loi du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire, publiée au Mémorial A, n° 160 du 6 septembre 2013, (iii) par la loi du 14 juin 2015 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, publiée au Mémorial A, n° 113 du 17 juin 2015, (iv) par loi du 3 mars 2017 dite « Omnibus », entrée en vigueur, en application de son article 76, le 1er avril 2017, (v) par la loi du 17 avril 2018 concernant l’aménagement du territoire, (vi) par la loi du 18 juillet 2018 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 6 Cour adm., 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Actes réglementaires, n° 75 et les autres références y citées.

18concernant l’aménagement communal et le développement urbain et dernièrement (vii) par la loi du 30 juillet 2021 relative au Pacte logement 2.0.

Etant donné, d’une part, que le tribunal vient de retenir que seul un recours en annulation a pu être introduit à l’encontre des décisions déférées et, d’autre part, que dans le cadre d’un tel recours, le juge administratif est amené à apprécier la légalité de la décision déférée en considération de la situation de droit et de fait ayant prévalu au jour où elle a été prise7, les modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par les lois précitées des 17 juin 2015, 3 mars 2017, 17 avril 2018, 18 juillet 2018 et 30 juillet 2021, entrées en vigueur postérieurement à la prise des actes litigieux, ne sont pas à prendre en considération en l’espèce, étant plus particulièrement précisé à cet égard que les actes de tutelle administrative, tels que la décision ministérielle litigieuse, rétroagissent à la date de la décision approuvée et tombent dès lors sous le champ d’application des lois en vigueur à la date de la prise de décision de l’acte initial.

c) Quant à la recevabilité Dans son mémoire en réponse, la commune soulève l’irrecevabilité du recours pour autant qu’il est dirigé contre la décision du conseil communal du 27 avril 2015 portant approbation définitive du projet d’aménagement général, en donnant à considérer que les demandeurs auraient d’ores et déjà introduit un recours contre cette même décision en date du 18 mars 2016, lequel aurait été déclaré non fondé, pour autant qu’il visait cette même décision, par jugement du tribunal administratif du 9 octobre 2017, numéro 37695 du rôle.

Dans la mesure où ce même jugement, non frappé d’appel, serait entretemps coulé en force de chose jugée, la commune conclut, en se basant encore sur le principe de l’autorité communale tel qu’ancré à l’article 107 de la Constitution, que le recours en annulation sous analyse devrait être déclaré irrecevable pour autant qu’il vise la prédite décision du conseil communal du 27 avril 2015.

Les demandeurs entendent résister au moyen d’irrecevabilité leur ainsi opposé en arguant que la décision litigieuse du conseil communal n’aurait, à partir de l’annulation partielle du PAG, tel que prononcée par le tribunal dans son jugement prémentionné du 9 octobre 2017, plus bénéficié de l’approbation ministérielle de sorte que le PAG aurait pu être « réformé » par la décision ministérielle litigieuse et ce dans un souci de se conformer notamment aux arrêts de la Cour administrative du 3 mai 2018.

Ils ajoutent qu’on ne saurait leur reprocher à cet égard de ne pas avoir interjeté appel contre le prédit jugement du 9 octobre 2017, alors qu’ils n’auraient pas eu intérêt de ce faire dans la mesure où il aurait appartenu au ministre, dont la décision aurait été partiellement annulée, de se conformer aux conclusions de la Cour administrative telles que retenues dans les arrêts du 3 mai 2018.

Ils ajoutent que la décision litigieuse du conseil communal serait « loin d’être définitive », de sorte que le recours sous analyse devrait être déclaré recevable dans son ensemble.

7 Trib. adm., 27 janvier 1997, n° 9724 du rôle, Pas. adm. 2021, V° Recours en annulation, n° 21 et les autres références y citées.

19Il y a, tout d’abord, lieu de rappeler que l’autorité de la chose jugée est attachée au jugement pour éviter toute remise en cause de la vérification juridictionnelle opérée par la première juridiction. Pour que l’autorité de la chose jugée puisse être invoquée, il ne suffit pas que les mêmes parties agissent en la même qualité dans les deux instances, encore faut-il que la « chose demandée » soit identique. Finalement, l’article 1351 du Code civil exige, outre l’identité de parties et d’objet, que les demandes soient fondées sur la même cause.

En l’espèce, force est de constater que les demandeurs ont attaqué la décision du conseil communal du 27 avril 2015 portant approbation définitive du projet d’aménagement général tant dans le cadre de leur recours introduit en date du 18 mars 2016 sous le numéro 37695 du rôle, que dans le cadre du recours sous analyse. Il s’ensuit qu’il y a, en l’espèce, non seulement identité des parties, mais également d’objet.

Force est, par ailleurs, de constater, que les demandeurs n’ont pas interjeté appel contre ce même jugement du 9 octobre 2017, lequel est, dès lors, coulé en force de chose jugée, étant encore précisé à cet égard que les raisons ayant amené les demandeurs à renoncer à saisir la Cour administrative sont sans pertinence pour ne pas affecter l’autorité de la chose jugée.

Il convient ensuite de relever que dans le cadre de son jugement du 9 octobre 2017, le tribunal était venu à la conclusion que « le recours tendant à l’annulation de la délibération du conseil communal du 27 avril 2015 est à rejeter pour n’être fondé en aucun de ses moyens », le tribunal s’étant en effet limité à prononcer l’annulation partielle de la décision ministérielle d’approbation du 7 décembre 2015 « dans l’unique mesure où elle rejette la réclamation des demandeurs visant le classement de leurs parcelles sites au lieu-dit « Weierchen » et portant les numéros cadastraux … et …, de même que le volet de l’approbation ministérielle y relatif », tout en ayant débouté les demandeurs pour le surplus.

Dans la mesure où le recours des demandeurs contre la décision du conseil communal du 27 avril 2015 a dès lors été définitivement déclaré non fondé par le jugement prémentionné du 9 octobre 2017, ces derniers ne sont plus habilités à déférer cette même décision une nouvelle fois au tribunal de céans, de sorte que le recours sous analyse, pour autant qu’il vise l’annulation de la délibération du conseil communal du 27 avril 2015 est à déclarer irrecevable.

Cette conclusion n’est pas énervée par les affirmations des demandeurs selon lesquelles ladite décision du conseil communal du 27 avril 2015 n’aurait pas été définitive compte tenu de l’annulation partielle de la décision d’approbation tutélaire y relative, étant donné qu’un acte soumis à tutelle d’approbation est juridiquement valable et que seule son exécution est soumise à la condition suspensive de l’approbation, étant rappelé à cet égard qu’en matière de tutelle administrative, la décision d’approbation de l’autorité tutélaire et l’acte approuvé constituent à la base deux actes juridiques distincts8.

Cette conclusion n’est pas non plus énervée par les affirmations des demandeurs selon lesquelles la Cour administrative aurait, dans les trois arrêts prémentionnés du 3 mai 2018, annulé tant la décision du conseil communal du 27 avril 2015 que la décision d’approbation ministérielle du 7 décembre 2015, alors que contrairement à ce que semblent suggérer ces 8 Voir en ce sens trib. adm. 27 mars 2017 n°37537 du rôle, Pas. adm. 2021 V° Tutelle administrative, n° 29 et les autres références y citées.

20derniers, la Cour administrative a, dans lesdits arrêts, procédé qu’à une seule annulation partielle desdites décisions et ce pour autant qu’elles avaient trait au classement des parcelles sises à Clemency, aux lieux-dits « Enneschtgaas », « Weierchen », « Lannekapp » et « rue de la Gare-Burewiss » et inscrits au cadastre de Käerjeng sous les numéros …, …, …, …, et … de la section CA Clemency, respectivement sous les numéros cadastraux …, …, …, …, …, … et … de la section CB Moulins, les décisions en question étant restées valables pour le surplus.

Si le recours sous analyse est dès lors irrecevable pour autant qu’il vise l’annulation de la décision du conseil communal du 27 avril 2015, il est, en revanche, recevable pour autant qu’il vise la décision du ministre du 15 janvier 2021, pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

d) Quant au fond A l’appui de leur recours, et après avoir rappelé les faits et rétroactes à la base de la décision ministérielle litigieuse, tels qu’ils ont été retracés ci-avant, les demandeurs se prévalent en premier lieu d’une violation de la loi et plus particulièrement d’une violation des articles 10 à 18 de la loi du 19 juillet 2004.

A l’appui de leurs affirmations, les consorts … expliquent que lesdits articles retraceraient la procédure d’approbation d’un PAG, procédure dont la décision de l’autorité tutélaire serait le dernier maillon. Ils ajoutent que si ce dernier maillon faisait défaut toute la procédure d’adoption du PAG serait viciée.

Ils précisent qu’en l’espèce, le ministre, avant de prendre la décision litigieuse, aurait pris une autre décision en date du 8 octobre 2019, décision dans le cadre de laquelle il aurait approuvé le PAG avec les modifications ponctuelles votées par le conseil communal en date du 29 mars 2019. Dans la mesure où, à cette date, aucune décision n’aurait toutefois été prise en ce qui concerne leurs propres parcelles sises au lieu-dit « Weierchen », les demandeurs estiment que le PAG tel qu’adopté par la décision du conseil communal du 27 avril 2015 « n’était plus », de sorte que la décision du 8 octobre 2019 aurait été basée sur de fausses prémisses et que la procédure d’adoption du PAG aurait été viciée depuis cette même date.

Les demandeurs estiment, par ailleurs, que la décision d’approbation ministérielle litigieuse n’aurait « pas réellement d’objet » alors que le PAG initial aurait été ponctuellement modifié et approuvé par la décision ministérielle du 8 octobre 2019.

Dans leur mémoire en réplique, les demandeurs complètent leurs développements en soutenant qu’en prenant la décision d’approbation du 8 octobre 2019, le ministre aurait « implicitement ré-approuvé » le PAG « initial » et partant également le classement de leurs propres parcelles et ce en omettant de suivre la procédure d’adoption telle que prescrite par les articles 10 et 18 de la loi du 19 juillet 2004. Or, et même si une annulation partielle d’un PAG était possible au niveau contentieux, les demandeurs estiment que le PAG ne pourrait toutefois pas faire l’objet, à tout moment de modifications ponctuelles à adopter séparément, mais devrait être approuvé dans son ensemble, de sorte que la décision ministérielle litigieuse aurait été prise en violation de l’article 18, paragraphes (1) et (2) de la loi du 19 juillet 2004 et devrait encourir l’annulation.

Dans un deuxième temps, les demandeurs se prévalent, d’une violation de leur droit de propriété tel que consacré par l’article 16 de la Constitution et par l’article 1er du Protocole 21additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, ci-après désignée par « la CEDH ».

A l’appui de leurs conclusions, ils affirment que dans sa décision du 7 décembre 2015, le ministre aurait retenu que suite à la décision de mise sur orbite du PAG litigieux, leurs parcelles auraient toutes été classées en zone verte, de sorte que leur reclassement final en ZAD superposée d’une ZSU-7a n’engendrait pas d’effet négatif dans leur chef. Une telle argumentation serait pourtant erronée, alors qu’il aurait appartenu au ministre de comparer le classement de leurs parcelles tel que retenu dans le nouveau PAG à leur classement sous l’ancienne règlementation urbanistique en vigueur, à savoir le classement en « zone soumise à un plan d’aménagement particulier de faible densité ».

Dans la mesure où leurs parcelles auraient dès lors été directement constructibles sous l’égide de l’ancien PAG, les demandeurs estiment que ce serait « par violation de son obligation de motiver sa décision par les motifs légaux que le Ministre avait approuvé le 7 décembre 2015 le vote définitif du 27 avril 2015 du plan d’aménagement général », de sorte que « la décision afférente » devrait encourir l’annulation.

Dans leur mémoire en réplique, les demandeurs précisent que leur moyen relatif à une violation du droit de propriété viserait également la décision ministérielle sous analyse alors que le ministre n’aurait plus analysé leurs réclamations dans leur ensemble mais continuerait à se « cacher» derrière le jugement du tribunal administratif du 9 octobre 2017. Ils sont ainsi d’avis qu’en prenant la décision litigieuse, le ministre aurait également dû prendre en considération les conclusions de la Cour administrative telles que retenues dans le cadre des arrêts du 3 mai 2018, conclusions d’après lesquelles le classement en ZSU-7a serait vicié.

Dans la mesure où la décision ministérielle litigieuse serait dès lors contraire aux arrêts de la Cour administrative du 3 mai 2018 et affecterait, en outre, leur droit de propriété, elle devrait encourir l’annulation.

En troisième lieu, les demandeurs concluent à une violation de l’article 18 de la loi du 19 juillet 2004, à une violation du principe d’égalité devant la loi, ainsi qu’à violation des articles 31 et 32 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 concernant le contenu du plan d’aménagement général d’une commune, ci-après désigné par « le règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 ».

A l’appui de leurs affirmations, les demandeurs rappellent que dans la décision sous analyse, le ministre aurait retenu, d’une part, que le potentiel de développement de la localité de Clemency serait suffisamment élevé à l’heure actuelle, de sorte que le phasage retenu par les autorités communales serait cohérent, et, d’autre part, que la servitude écologique serait d’une importance certaine, due aux contraintes environnementales significatives sur le site telles que mises en évidence dans le cadre de la SUP. Ce faisant, le ministre aurait uniquement pris en considération la logique intrinsèque du PAG, mais non pas sa conformité et sa compatibilité aux dispositions de la loi et à ses règlements d’exécution et aurait ainsi contrevenu à l’article 18 de la loi du 19 juillet 2004.

En ce qui concerne la conformité du PAG à la loi et à ses règlements, les demandeurs, en se référant aux trois arrêts de la Cour administrative du 3 mai 2018, soulignent que pour des parcelles voisines à leurs propres parcelles et dont le classement aurait été identique, la juridiction suprême aurait retenu que leur superposition par une ZSU-7a aurait été opérée 22sans que les parties du territoire communal précisément délimitées par cette zone auraient été délimitées dès le stade du PAG adopté et approuvé sur base des critères objectifs de la règlementation applicable et aurait ainsi retenu une violation des articles 31 et 32 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011.

Ils ajoutent que même s’il avait appartenu aux autorités communales de fixer le cadrage normatif au niveau du PAG, cette circonstance ne dispenserait pas le ministre de vérifier la conformité de cet instrument de planification urbanistique avec les dispositions de la loi et aux règlements d’exécution de celle-ci.

Les demandeurs concluent en outre à une violation de l’article 10bis de la Constitution en donnant à considérer que le ministre aurait pris une décision contraire à « une jurisprudence constante établie par les arrêts du 3 mai 2018 qui correspondent en toute certitude au cas d’espèce ».

Dans leur mémoire en réplique, les demandeurs mettent en exergue qu’ils auraient toujours contesté l’instauration « arbitraire » de la servitude ZSU-7a sur leurs parcelles et partant la conformité du PAG aux articles 31 et 32 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011, tout en précisant que dans le cadre de leurs réclamations au cours de la phase précontentieuse, ils n’auraient pas eu de conseil juridique à leurs côtés. En soutenant encore qu’une acceptation de la situation de leur part ne se présumerait pas et en réitérant leurs développements figurant dans la requête introductive d’instance, les demandeurs concluent à l’annulation de la décision ministérielle litigieuse.

En dernier lieu, les consorts … concluent à un détournement, respectivement un excès de pouvoir dans le chef du ministre en reprochant en substance à celui-ci de ne pas avoir pris de décision en prosécution de cause du jugement du 19 octobre 2017 endéans le délai visé à l’article 84 de la loi du 7 novembre 1996, d’une part, et de ne pas avoir pris en considération les conclusions de la Cour administrative retenues dans les trois arrêts prémentionnés du 3 mai 2018, d’autre part, les demandeurs insistant encore dans leur mémoire en réplique sur le fait que le ministre aurait la mission de contrôler la légalité du PAG.

Tant la partie étatique, que la commune concluent au rejet du recours sous analyse. Si à la base de ses conclusions, la commune se limite en substance à affirmer que la légalité de la décision du conseil communal du 27 avril 2015 n’aurait pas été remise en cause par le jugement du tribunal du 9 octobre 2017, de sorte que le moyen relatif à une violation de l’article 10bis de la Constitution serait inopérant, tout en faisant encore valoir que les arrêts de la Cour administrative dont se prévalent les demandeurs n’auraient pas de valeur erga omnes, et qu’il aurait appartenu aux concernés de faire appel contre le prédit jugement, la partie étatique, quant à elle, reproche en premier lieu aux demandeurs de ne pas avoir précisé à suffisance le moyen relatif à un vice de procédure, tout en insistant sur le fait que la délibération du conseil communal du 27 avril 2015 n’aurait pas été annulée par le jugement du tribunal de céans et en réfutant, par ailleurs, l’affirmation des demandeurs selon laquelle la décision ministérielle sous analyse n’aurait pas réellement d’objet. Elle donne, en outre, à considérer que la décision ministérielle du 8 octobre 2019 aurait concerné d’autres parcelles que celles des demandeurs, de sorte qu’il ne saurait être admis qu’à travers cette même décision, le ministre ait implicitement approuvé le classement des parcelles litigieuses. En affirmant encore que tout PAG pourrait être complété, modifié ou révisé, la partie étatique conclut au rejet du moyen relatif à un vice de procédure.

23En ce qui concerne la violation du droit de propriété tel qu’alléguée par les demandeurs, la partie étatique donne d’abord à considérer qu’à travers leurs développements les consorts … auraient non pas visé la décision ministérielle sous analyse, mais la décision ministérielle du 7 décembre 2015, tout en se référant encore à la jurisprudence en la matière pour affirmer que ce même moyen serait en tout état de cause non fondé.

La partie étatique donne ensuite à considérer que « les réclamants » n’auraient jamais soulevé une irrégularité du PAG par rapport aux articles 31 et 32 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 et qu’ils auraient, par ailleurs, omis d’interjeter appel contre le jugement du tribunal administratif du 9 octobre 2017 et auraient ainsi accepté « la situation ».

Quant à la violation alléguée de l’article 10bis de la Constitution, la partie étatique est d’avis que ce moyen devrait être rejeté dans la mesure où les demandeurs ne se trouveraient pas dans la même situation que les personnes dont les parcelles furent visées par les trois arrêts de la Cour administrative, étant donné qu’ils auraient, contrairement à ces mêmes personnes, renoncé à interjeter appel contre le jugement de première instance, le délégué du gouvernement ajoutant que les annulations prononcées dans le cadre de ces mêmes arrêts n’auraient été que partielles.

En se référant encore à un arrêt de la Cour administrative quant aux compétences déférées au ministre à travers l’article 18 de la loi du 19 juillet 2004, la partie étatique conclut au rejet de ce moyen.

Finalement, et en ce qui concerne le détournement de pouvoirs invoqué par les demandeurs, la partie étatique, en réitérant ses développements ci-avant, donne encore à considérer que le ministre aurait entretemps pris une décision en prosécution de cause, de sorte que ledit moyen serait également à rejeter.

En ce qui concerne le premier moyen invoqué par les demandeurs, force est de constater que celui-ci vise, de l’entendement du tribunal, l’annulation de la décision ministérielle litigieuse pour vice de procédure dans la mesure où suite aux arrêts de la Cour administrative du 3 mai 2018 et au jugement du tribunal administratif du 19 octobre 2017, le PAG aurait dû être réapprouvé suivant la procédure telle que visée par les articles 10 à 18 de la loi du 19 juillet 2004 et aurait ainsi dû faire l’objet d’une décision d’approbation tutélaire unique, et non pas de deux décisions d’approbation séparées, tel que cela aurait été le cas en l’espèce, les demandeurs affirmant en outre que la décision ministérielle sous analyse n’aurait pas de raison d’être, alors que le ministre aurait d’ores et déjà implicitement reclassé leurs propres parcelles à travers sa décision du 8 octobre 2019.

A cet égard, il y a lieu de souligner que s’il est vrai que la loi 19 juillet 2004 prévoit, en ses articles 10 et suivants les différentes étapes à suivre dans la procédure d’adoption d’un PAG, et qu’en son article 18, elle prévoit que le ministre statue sur les réclamations, ainsi que sur l’approbation définitive du projet d’aménagement général en une seule décision, le fait que la procédure d’adoption du PAG litigieux n’a pas été recommencée ab initio après les annulations partielles prononcées par les juridictions administratives ne saurait toutefois laisser conclure à une quelconque irrégularité procédurale.

En effet, en l’espèce, et tel que précisé ci-avant, tant la décision ministérielle sous analyse, que la décision ministérielle du 8 octobre 2019, ne portent pas approbation du PAG 24dans son ensemble, mais portent approbation partielle de celui-ci et ce en prosécution de cause de divers arrêts et jugement des juridictions administratives.

A cet égard, il convient de rappeler qu’aux termes de l’article 2, paragraphe 4 de la loi du 7 novembre 1996 :

« Lorsque le jugement ou l’arrêt annule la décision attaquée, l’affaire est renvoyée en cas d’annulation pour incompétence devant l’autorité compétente et, dans les autres cas, devant l’autorité dont la décision a été annulée, laquelle, en décidant du fond, doit se conformer audit jugement ou arrêt. ».

Il a été jugé que cette disposition implique que l’autorité dont émanait une décision annulée par le tribunal administratif doit se conformer à la décision juridictionnelle bénéficiant de l’autorité de la chose jugée en prenant une nouvelle décision conforme aux conclusions auxquelles a abouti la juridiction en question, à moins qu’il y ait des éléments de droit ou de fait nouveaux par rapport à ceux dont était saisie la juridiction ayant renvoyé une décision, suite à son annulation9.

Or, c’est précisément dans ce cadre que se situent la décision ministérielle litigieuse, de même que la décision ministérielle du 8 octobre 2019.

C’est en effet suite aux trois arrêts de la Cour administrative du 3 mai 2018, arrêts dans lesquels la juridiction suprême a prononcé l’annulation partielle du PAG ainsi que le renvoi devant le conseil communal, que ce dernier a, en date du 29 mars 2019 pris les décisions qui s’imposaient en prosécution de cause desdits arrêts, à savoir des décisions nouvelles conformes aux conclusions auxquelles a abouti la Cour administrative, ces mêmes décisions, ayant, par la suite, fait l’objet de l’approbation tutélaire du 8 octobre 2019.

A cet égard, il convient encore de préciser, que la prédite décision ministérielle du 8 octobre 2019 n’est pas soumise au tribunal, de sorte que le bien-fondé et la légalité de celle-ci ne seront pas analysés dans le cadre du présent recours, lequel ne vise que la seule décision ministérielle du 15 janvier 2021. Il s’ensuit que les affirmations non autrement circonstanciées des demandeurs selon lesquelles, cette même décision ministérielle serait basée sur de fausses prémisses sont à écarter.

Il convient, par ailleurs, de souligner que cette décision d’approbation tutélaire du 8 octobre 2019, se limite, compte tenu du cadre dans lequel elle se situe, et conformément à son libellé, aux seules parcelles visées par les annulations partielles prononcées par la Cour administrative à travers les prédits arrêts du 3 mai 2018 et est ainsi sans effet sur le classement des parcelles demandeurs. Il s’ensuit que c’est à tort que les concernés affirment qu’à travers cette même décision, le ministre aurait pris une décision implicite de classement en ce qui concerne leurs propres parcelles.

C’est en effet dans le seul cadre de la décision ministérielle sous analyse que le ministre a approuvé le classement des parcelles des demandeurs situées au lieu-dit « Weierchen », et ce en prosécution de cause du jugement du tribunal administratif du 9 octobre 2017, lequel a annulé partiellement la décision ministérielle du 7 décembre 2015 au 9 Trib. adm., 20 avril 2016, n° 35969 du rôle, Pas. adm. 2021, V° Procédure contentieuse, n° 1232.

25motif que cette même décision ne contenait aucune motivation justifiant le rejet de la réclamation initiale des demandeurs pour autant que celle-ci visait ces mêmes parcelles.

Ainsi, et si la décision du 8 octobre 2019, de même que la décision ministérielle sous analyse ont dès lors effectivement trait à l’approbation définitive du PAG, elles sont toutefois intervenues dans un cadre légal spécifique, à savoir en prosécution de cause de divers arrêts de la Cour administrative, laquelle a ordonné le renvoi devant le conseil communal, et en prosécution de cause d’un jugement du tribunal de céans, lequel a, quant à lui, ordonné le renvoi devant le ministre. Il n’y avait dès lors pas lieu de recommencer la procédure d’adoption du PAG ab initio, de sorte que c’est à tort que les demandeurs concluent à un vice de procédure, respectivement à une violation de la loi.

En ce qui concerne la violation du droit de propriété telle qu’invoquée par les consorts …, il convient, avant tout progrès en cause, de souligner que ces développements sont à rejeter pour autant qu’ils visent la décision ministérielle du 7 décembre 2015, cette décision n’étant en effet pas objet du présent recours, lequel ne vise que la seule décision du 15 janvier 2021, tel que le tribunal vient de le retenir plus en avant. Il y a, par ailleurs, lieu de relever que ce n’est que dans le cadre de ce moyen que les demandeurs remettent en cause la superposition de leurs parcelles d’une ZAD.

Ensuite, il échet de constater qu’il n’est pas contesté en cause que les parcelles des demandeurs situées au lieu-dit « Weierchen » ont été classées sous l’égide de l’ancien PAG en « zone soumise à un plan d’aménagement particulier de faible densité » et étaient, de ce fait, directement constructibles, tandis qu’elles ont été classées en ZAD superposée d’une ZSU-7a dans le cadre du nouveau PAG. A cet égard, il échet de rappeler qu’aux termes de l’article 18 de la partie écrite du PAG les ZAD constituent « […] des zones superposées, frappées d’une interdiction temporaire de construction et d’aménagement. Elles constituent en principe des réserves foncières, destinées à être urbanisées à long terme. La décision de lever le statut de la zone d’aménagement différé fait l’objet d’une procédure de modification du plan d’aménagement général. […] », tandis qu’aux termes de l’article 19, point 7a) de la même partie écrite, « […] Les zones de servitude « urbanisation » type 7- a sont destinées à protéger les terrains situés dans les vallées le long des cours d’eau, dans leur fonction d’espaces de rétention et de submersion et de couloir de ventilation ou de réserve d’eau froid. Les zones marécageuses, les biotopes humides et, le cas échéant, les sources qui s’y trouvent, doivent être conservés. ».

Il s’ensuit que c’est à juste titre que les demandeurs soutiennent que leur droit de propriété est affecté par le classement litigieux, alors que leurs parcelles ne sont plus directement constructibles mais ne seront urbanisables qu’à long terme.

A cet égard, il convient de se référer à l’arrêt rendu par la Cour constitutionnelle le 4 octobre 2013, portant le numéro 00101 du registre, dans lequel la Cour, saisie d’une question de constitutionnalité dans le cadre d’un recours contentieux dirigé contre l’adoption d’un nouveau PAG ayant notamment classé des parcelles en zone non constructible qui étaient auparavant classées en zone constructible, a retenu ce qui suit :

« […] Considérant que l’article 16 de la Constitution garantit la protection du droit de propriété et prohibe l’expropriation, autrement que pour cause d’utilité publique et moyennant juste indemnité;

26Considérant qu’un changement dans les attributs de la propriété qui est à tel point substantiel qu’il prive celle-ci d’un de ses aspects essentiels, peut constituer une expropriation;

Considérant qu’en posant en principe que les servitudes résultant d’un plan d’aménagement général n’ouvrent droit à aucune indemnité et qu’en prévoyant des exceptions à ce principe qui ne couvrent pas toutes les hypothèses dans lesquelles la privation de la jouissance du terrain frappé par une telle servitude est hors de proportion avec l’utilité publique à la base de la servitude, l’article 22, en combinaison avec les articles 5, 6, 2 et 8 de la loi modifiée du 19 juillet 2004, est contraire à l’article 16 de la Constitution;

Considérant que la contrariété de ladite disposition à la Constitution n’entrave en rien le droit des pouvoirs publics d’instaurer des servitudes d’urbanisme dans un but d’utilité publique, laissant intact le principe de la mutabilité des plans d’aménagement général et n’autorisant pas le juge administratif à sanctionner un reclassement d’un terrain précédemment classé en zone constructible en zone non constructible;

Que les propriétaires touchés peuvent en revanche, conformément au droit commun, suivant la situation concrète du cas d’espèce, le cas échéant faire valoir devant le juge judiciaire un droit à indemnisation dépendant, notamment, de la situation du terrain, du caractère contraignant de la servitude et des projets concrets de viabilisation du terrain;

[…] ».

Dès lors, la Cour constitutionnelle, bien qu’ayant retenu que l’article 22 de la loi du 19 juillet 2004, en combinaison avec les articles 5, 6, 2 et 8 de la même loi, était contraire à l’article 16 de la Constitution, a consacré le droit des pouvoirs publics d’instaurer des servitudes d’urbanisme dans un but d’utilité publique et le principe de la mutabilité des PAG, tout en soulignant que le juge administratif n’était pas autorisé à sanctionner un reclassement d’un terrain précédemment classé en zone constructible en zone non constructible, mais que les propriétaires concernés pouvaient se pourvoir, le cas échéant, devant le juge judiciaire en vue de l’allocation d’une indemnité éventuelle.

Etant donné qu’il ressort de cet arrêt de la Cour constitutionnelle qu’il n’appartient pas au juge administratif de sanctionner le reclassement d’un terrain d’une zone constructible en une zone non constructible et ainsi forcément non plus le reclassement d’un terrain d’une zone immédiatement constructible en une zone constructible à long terme, sous condition, toutefois, que la modification du classement a été effectuée dans un but d’intérêt général, il appartient au tribunal de vérifier si cette dernière condition est remplie en l’espèce.

A cet égard, il y lieu de rappeler que la modification d’un PAG est, dans son essence même, prise dans l’intérêt général et que cette caractéristique est présumée jusqu’à preuve du contraire10.

Le tribunal constate ensuite que la superposition des parcelles litigieuses par une ZAD ainsi que par une ZSU-7a - lequel a pour effet leur affectation à une réserve foncière et leur soumission à des servitudes urbanistiques tendant à protéger leurs fonctions écologiques – est motivé, notamment, d’une part, par la volonté de résoudre les problèmes environnementaux 10 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, Pas. adm., 2021, V° Recours en annulation, n° 10 et les autres références y citées.

27identifiés dans le cadre de la SUP, préalablement à une urbanisation des fonds concernés et, d’autre part, par la stratégie urbanistique globale de l’administration communale de Käerjeng consistant à renforcer, dans un premier temps, le bi-pôle urbain Bascharage/Hautcharage, au lieu d’aménager davantage de terrains dans les autres localités du territoire communal, en ce compris celle de Clemency, motivation qui est conforme aux objectifs d’intérêt général, de sorte que le moyen tiré d’une violation du droit de propriété, tel que garanti par l’article 16 de la Constitution et par l’article 1er du premier Protocole, encourt le rejet.

Cette conclusion n’est pas ébranlée par les développements des demandeurs relatifs au fait que le ministre aurait dû prendre en considération les conclusions de la Cour administrative telle que retenues dans les arrêts prémentionnés du 3 mai 2018, alors que les constats de la Cour seront à analyser non pas par rapport au droit de propriété des demandeurs, mais par rapport à la légalité du classement opéré, analyse qui sera faite ci-après.

En ce qui concerne ensuite concrètement la superposition des parcelles des demandeurs par une ZAD et une ZSU-7a, il convient d’abord de rappeler que saisi d’un recours en annulation, la mission du juge de la légalité exclut le contrôle des considérations d’opportunité et notamment d’ordre politique, à la base de l’acte administratif attaqué et inclut la vérification, d’après les pièces et éléments du dossier administratif, de ce que les faits et considérations sur lesquels s’est fondée l’administration sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute. Dans cette démarche de vérification des faits et des motifs à la base de l’acte déféré, le tribunal est encore amené à analyser si la mesure prise est proportionnelle par rapport aux faits dont l’existence est vérifiée, le tribunal étant ainsi appelé à opérer une balance valable et équilibrée des éléments en cause et à vérifier plus particulièrement si l’acte posé est proportionné à son but11.

Force est ensuite de constater que les parcelles des demandeurs sont situées à proximité immédiate de certaines parcelles visées par les trois arrêts de la Cour administrative dont se prévalent les demandeurs, à savoir au lieu-dit « Weierchen », dans des zones marécageuses et biotopes humides.

Il est par ailleurs constant en cause que lors de l’approbation définitive du PAG, tant les parcelles des demandeurs que celles visées par les trois arrêts de la Cour administrative étaient superposées d’une ZAD, ainsi que d’une ZSU-7a, cette dernière superposition ayant été annulée à travers les trois arrêts en question, tandis que la juridiction suprême est arrivée à la conclusion que la superposition des parcelles en question d’une ZAD ne souffre d’aucune critique.

Il y a ensuite lieu de préciser que si dans le cadre des arrêts prémentionnés la Cour administrative a certes retenu que les ZAD et ZSU-7a - ont pu être a priori mises en place par le conseil communal en raison de critères objectifs vérifiables d’après l’ensemble des éléments fournis au dossier, elle est néanmoins arrivée à la conclusion qu’il y a lieu d’annuler le classement des terrains visés par les trois affaires dans une ZSU-7a alors que les parties du territoire communal précisément soumises à cette ZSU-7a n’avaient pas été délimitées dès le stade du PAG adopté et approuvé sur base des critères objectifs de la réglementation applicable, ensemble les éléments de fait découlant à suffisance des études préparatoires confectionnées.

11 Cour adm., 12 janvier 2021, n° 44684C du rôle, disponible sur www.ja.etat.lu.

28 La Cour administrative a, en effet, retenu que trois séries d’éléments peuvent être pris en considération au niveau de la ZSU-7a telle que définie par l’article 19 point 7a précité de la partie écrite du PAG à savoir, « à partir de son intitulé, les espaces de submersion auxquels s’ajoutent parallèlement les fonctions de rétention prévues au niveau du texte pertinent et les couloirs de ventilation, encore désignés comme étant des réserves d’air froid à voir dans le sens du cours d’eau présent à l’endroit, auxquels s’ajoutent les zones marécageuses, les biotopes humides et les sources précisément énumérés également par ledit article.

Or, d’évidence, ces différentes parties, pourtant pour le moins déterminables à partir des éléments préparatoires au PAG, n’ont point été déterminées au niveau de la partie graphique de ce PAG. ».

Elle est ensuite arrivée au constat, en se fondant sur l’article 107, paragraphe 1er, de la Constitution, ainsi que sur un arrêt de la Cour Constitutionnelle12, qu’il aurait appartenu aux instances communales de « fixer, après avoir maintenu dans le périmètre d’agglomération, lors du vote prévu à l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004, notamment les terrains de l’appelante, de fixer les parties de ces terrains précisément soumises à la ZSU-7a, à partir des trois séries d’éléments caractérisant cette zone – zones de submersion et de rétention ;

couloir de ventilation et réserve d’air froid ; zones marécageuses, biotopes humides et sources – ce qui précisément n’a pas été fait » pour arriver finalement à la conclusion que « Cette détermination doit avoir lieu lors du vote du conseil communal prévu au niveau de l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004 sous peine de laisser illisible et partant non déterminée la partie graphique afférente du PAG, contrairement aux exigences y relatives portées plus particulièrement par les dispositions du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 (contenu PAG), dont notamment celles de l’article 31, intitulé « zones de servitude « urbanisation » » qui prévoit que « des prescriptions spécifiques sont définies pour ces zones dans le plan d’aménagement général aux fins d’assurer la sauvegarde de la qualité urbanistique, ainsi que d’environnement naturel et du paysage d’une certaine partie du territoire communal ».

Les prescriptions spécifiques d’une certaine partie du territoire communal ainsi visées indiquent clairement l’obligation de détermination des parties en question, de même que celle de la spécification des prescriptions afférentes en application de la mise en place de pareille zone de servitude « urbanisation ».

Il en est de même des exigences de l’article 32 du même texte réglementaire, intitulé « les servitudes, couloirs et espaces réservés », qui prévoit quant à lui « les servitudes couloirs et espaces réservés, définies dans le plan d’aménagement général, se rapportant à des fonds réservés soit aux projets d’infrastructures de circulation ou de canalisation, soit à l’écoulement et à la rétention des eaux pluviales.

L’emprise définitive des infrastructures est définie dans le cadre du plan d’aménagement particulier ».

12 Cour Constitutionnelle 8 décembre 2017, N° 131/17 du registre-Journal officiel du Grand-Duché de Luxembourg Mémorial A-n°1042 du 12 décembre 2017.

29L’article 19, point 7a de la partie écrite du PAG de la commune de Käerjeng épouse, de manière patente, des éléments puisés aux deux articles sous référence 31 et 32.

Si effectivement l’article 32 in fine prévoit que l’emprise définitive des infrastructures y visées est définie dans le cadre du plan d’aménagement particulier, le fait est que, dans le cas précis de l’espèce, aucune infrastructure n’est en principe envisagée et que même si tel était le cas, l’emprise prévisible de celle-ci devrait d’ores et déjà résulter du PAG, dont plus particulièrement de sa partie graphique.

Une conséquence de ce constat s’impose parallèlement : dans la mesure où le conseil communal a omis de prévoir les précisions ci-avant exigées à partir des articles 31 et 32 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 (contenu PAG), il y a lieu à annulation de la délibération communale du 27 avril 2015 de même que de la décision d’approbation ministérielle afférente du 7 décembre 2015 dans la mesure de la mise en place, de manière globale pour le quadrilatère visé, de la ZSU-7a non autrement délimitée au niveau du PAG, ni plus particulièrement à sa partie graphique. ».

S’il est vrai que les conclusions ainsi retenues par la Cour administrative n’ont pas de valeur erga omnes, il n’en reste pas moins qu’il ne saurait en être fait abstraction en l’espèce dans la mesure où le classement des parcelles litigieuses est identique à celui des parcelles visées par lesdits arrêts du 3 mai 2018 et que plusieurs de ces mêmes parcelles sont situées à proximité immédiate de celles demandeurs, au même lieu-dit.

Il aurait ainsi appartenu au ministre, auquel il revient d’après l’article 18 de la loi du 19 juillet 2004, et tel que relevé à juste titre par les demandeurs, de vérifier « la conformité et la compatibilité du plan d’aménagement général avec les dispositions de la loi, et notamment les objectifs énoncés à l’article 2, avec ses règlements d’exécution », de tenir compte des conclusions de la Cour administrative en ce qui concerne la légalité de la ZSU-7a sous analyse et partant de refuser son approbation tutélaire et ce indépendamment de la question de savoir si les demandeurs ont fait appel contre le jugement du tribunal de céans du 15 octobre 2017, cette question étant en effet sans pertinence et ce d’autant plus que le tribunal n’a pas statué sur la légalité par rapport aux articles 31 et 32 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 du classement litigieux pour les parcelles sises au lieu-dit « Weierchen », mais a annulé la décision ministérielle d’approbation pour défaut de motivation en ce qui concerne ce même classement.

Au vu des considérations qui précèdent et sans qu’il ne soit besoin de statuer plus en avant, il y a lieu d’annuler la décision ministérielle litigeuse pour autant qu’elle a approuvé la superposition des parcelles litigieuses situées au lieu-dit « Weierchen » par une ZSU-7a.

A toute fins utiles, il convient toutefois encore de préciser en ce qui concerne le détournement de pouvoir invoqué par les demandeurs dans la mesure où le ministre n’aurait pas pris de décision dans les temps requis par l’article 84 de la loi du 7 novembre 1996, que cette inaction du ministre ne saurait entraîner à elle seule l’annulation de la décision litigieuse, mais aurait uniquement pu aboutir à la nomination d’un commissaire spécial. Or, une telle nomination n’a entretemps plus de raison d’être alors que le ministre a finalement pris une décision en prosécution de cause du jugement du tribunal administratif du 9 octobre 2017.

e) Quant aux demandes en allocation d’une indemnité de procédure.

30 Dans leur requête introductive d’instance, les demandeurs sollicitent l’allocation d’une indemnité de procédure de 10.000,- euros sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », demande qui est à rejeter alors que ceux-ci n’établissent pas en quoi il serait inéquitable de laisser à leur charge les frais exposés par elle et non compris dans les dépens, étant plus particulièrement précisé que le seul fait que le ministre a tardé à prendre une décision en prosécution de cause du jugement du 9 octobre 2017 ne saurait laisser conclure à une mauvaise foi de celui-ci, et ne saurait justifier l’allocation d’une indemnité de procédure.

S’agissant de la demande en obtention d’une indemnité de procédure de 3.000 euros, telle que formulée par la commune sur base du même article, celle-ci est à rejeter, alors qu’elle n’établit pas en quoi il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

Le recours ayant été déclaré partiellement fondé en ce qu’il vise la décision ministérielle du 7 décembre 2015, tandis qu’il a été déclaré irrecevable en ce qu’il vise la décision du conseil communal du 27 avril 2015, il y a lieu de faire masse des frais et de les imputer pour trois quarts à l’Etat et pour un quart aux demandeurs.

Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant contradictoirement ;

prononce la jonction des affaires inscrites sous les numéros 44646 et 45936 du rôle ;

déclare le recours introduit sous le numéro 44646 du rôle irrecevable pour autant qu’ils vise l’annulation de la décision du conseil communal de Käerjeng du 29 mars 2019, ainsi que la décision du ministre du 8 octobre 2019 ;

reçoit la demande en nomination d’un commissaire spécial en la forme ;

constate qu’elle est devenue sans objet, partant la rejette ;

rejette les demandes en obtention d’une indemnité de procédure formulées par les consorts … et la commune de Käerjeng dans le recours inscrit sous le numéro 44646 du rôle ;

laisse les frais et dépens à charge des consorts … pour ce qui est du même recours ;

déclare le recours introduit sous le numéro 45936 du rôle irrecevable pour autant qu’il vise l’annulation de la délibération du conseil communal du 27 avril 2015 ;

le déclare recevable pour le surplus ;

au fond le dit partiellement justifié ;

partant, annule la décision du ministre du 15 janvier 2021 dans la mesure du classement des terrains des demandeurs sis au lieu-dit « Weierchen » dans une ZSU-7a sans que les parties du territoire communal précisément soumises à cette ZSU n’aient été 31délimitées dès le stade du PAG adopté et approuvé sur base des critères objectifs de la réglementation applicable, ensemble les éléments de fait découlant à suffisance des études préparatoires confectionnées ;

rejette les demandes en obtention d’une indemnité de procédure formulées par les consorts … et la commune de Käerjeng dans le recours inscrit sous le numéro 45936 du rôle ;

fait masse des frais et dépens pour ce qui est de ce même recours et les impute pour trois quarts à l’Etat et pour un quart aux demandeurs.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 27 septembre 2022 par :

Thessy Kuborn, vice-président, Géraldine Anelli, premier juge, Alexandra Bochet, juge, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 27 septembre 2022 Le greffier du tribunal administratif 32


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 44646,45936
Date de la décision : 27/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2022-09-27;44646.45936 ?

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