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06/07/2022 | LUXEMBOURG | N°45181,45701

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 06 juillet 2022, 45181,45701


Tribunal administratif N° 45181 et 45701 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrits les 5 novembre 2020 1re chambre e t 25 février 2021 Audience publique du 6 juillet 2022 Recours formés par la société anonyme A, …, et par la société anonyme B, … contre deux décisions du directeur de l’administration des Contributions directes, en matière d’impôts

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JUGEMENT

I.

Vu la requête inscrite sous le numéro 45181 du rôle et déposée le 5 novembre 2020 au greffe du tribunal

administratif par la société anonyme Wildgen SA, établie et ayant son siège social à L-2320 Luxemb...

Tribunal administratif N° 45181 et 45701 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrits les 5 novembre 2020 1re chambre e t 25 février 2021 Audience publique du 6 juillet 2022 Recours formés par la société anonyme A, …, et par la société anonyme B, … contre deux décisions du directeur de l’administration des Contributions directes, en matière d’impôts

_________________________________________________________________________

JUGEMENT

I.

Vu la requête inscrite sous le numéro 45181 du rôle et déposée le 5 novembre 2020 au greffe du tribunal administratif par la société anonyme Wildgen SA, établie et ayant son siège social à L-2320 Luxembourg, 69, Boulevard de la Pétrusse, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B 212946, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Lionel Bonifazzi, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme A, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, tendant, d’après son dispositif, principalement à la réformation, subsidiairement à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 7 août 2020 et des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal pour l’année 2015, tous les deux émis le 10 juillet 2019 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 3 février 2021 ;

Vu le mémoire en réplique déposé le 3 mars 2021 au greffe du tribunal administratif par la société anonyme Wildgen SA pour le compte de la société anonyme A, préqualifiée ;

II.

Vu la requête inscrite sous le numéro 45701 du rôle et déposée le 25 février 2021 au greffe du tribunal administratif par la société anonyme Wildgen SA, établie et ayant son siège social à L-2320, Luxembourg, 69, Boulevard de la Pétrusse, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B 212946, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Lionel Bonifazzi, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme B, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite 1 au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, tendant, d’après son dispositif, principalement à la réformation, subsidiairement à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 30 novembre 2020, « respectivement » d’un bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux pour l’année 2015 émis le 26 août 2020 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 25 mai 2021 ;

Vu le mémoire en réplique déposé le 22 juin 2021 au greffe du tribunal administratif par la société anonyme Wildgen SA pour le compte de la société anonyme B, préqualifiée;

I. et II.

Vu l’avis du tribunal administratif du 9 février 2022 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les deux décisions et les bulletins critiqués ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Daniel Ruppert et Maître Vincent Michel, en remplacement de Maître Lionel Bonifazzi, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 23 février 2022.

Il ressort du dossier soumis à l’appréciation du tribunal que la société anonyme A, ci-

après désignée par la « société A », est la société mère de la société anonyme B, ci-après désignée par la « société B », et de la société anonyme C, ces trois sociétés étant en intégration fiscale au sens de l’article 164bis de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, ci-après désignée par la « LIR », la société A étant la société mère intégrante.

Le 31 octobre 2016, le bureau d’imposition Sociétés Diekirch de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par le « bureau d’imposition Diekirch », réceptionna la déclaration fiscale individuelle pour l’impôt sur le revenu, l’impôt commercial communal et l’impôt sur la fortune pour l’année d’imposition 2015 déposée par la société B, indiquant un bénéfice suivant bilan commercial de … euros, un bénéfice à reporter pour le calcul de l’impôt commercial communal de … euros et un résultat fiscal transféré vers la société mère intégrante du même montant.

Le 1er décembre 2016, le bureau d’imposition Sociétés 6 de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par le « bureau d’imposition », réceptionna la déclaration pour l’impôt sur le revenu, l’impôt commercial communal et l’impôt sur la fortune pour l’année d’imposition 2015 déposée par la société A en tant que société mère intégrante, qui fut continuée et réceptionnée le lendemain par le bureau d’imposition Diekirch, ladite déclaration indiquant un bénéfice suivant bilan commercial de … euros et une perte de … euros en tant que « bénéfice à reporter pour le calcul de l’impôt commercial ».

2 Par courrier du 13 novembre 2018, le bureau d’imposition Diekirch demanda à la société B de lui fournir, concernant les déclarations pour l’impôt sur le revenu des collectivités et pour l’impôt commercial communal des années 2015 et 2016, les renseignements suivants « °… Dot.corr.val. sur autres créances : détail du compte avec copies des pièces justificatives.

[…] », au plus tard pour le 14 décembre 2018.

Par courriel du 13 décembre 2018, le litismandataire de la société B fournit un « tableau récapitulatif des créances ayant fait l’objet de correction de valeur en lien avec le compte de charge … », tout en apportant des précisions, d’une part, au sujet d’une « Créance D », à savoir « les commentaires repris dans le rapport de gestion au 31 décembre 2016 de la société [B] justifiant la correction de valeur actée » avec en annexe un tableau de calcul y relatif, et, d’autre part, au sujet d’une « Créance E », en joignant une seconde annexe contenant une copie des comptes annuels des années 2015 à 2017 de la société E, ci-après désignée par la « société E », après avoir précisé que « La créance de [la société B] sur [la société E] a son origine dans la relation commerciale entre les 2 sociétés. A cet égard, [la société E] est un client de [la société B] et en raison des difficultés financières rencontrées par [la société E] notamment du fait que le marché s’est retourné, [la société E] n’a pas su honorer certaines de ses factures.

En 2013, [la société E] a intenté une action en Allemagne à l’encontre d’un de ses fournisseurs suite à un important préjudice subi. [La société B] a donc converti sa créance commerciale court terme au titre de services de transport en créance long terme.

La raison est qu[e] [la société E] ne disposait pas de liquidités suffisantes pour solder la créance et plutôt que d’engager des poursuites judiciaires à l’encontre d[e] [la société E], [la société B] a opté, en se basant sur une solution de ce litige en faveur d[e] [la société E], pour le maintien de la relation d’affaires et un report du paiement et ce, afin de permettre à [la société E] de traverser les difficultés financières et payer la créance. Dans cette démarche à des fins commerciales puisque son objectif est d’augmenter les chances de [la société B] de toucher tout ou partie de sa créance et de conserver un client important, [la société B] a considéré, compte tenu des éléments nouveaux et du contexte, que le délai raisonnable pour le report du paiement était de 4 ans. Dès lors, par application du principe comptable de prudence, [la société B] a corrigé la créance par tranche de 25% sur ladite période d’observation afin d’être aligné sur la réalité économique et les chances effectives d’un paiement.

Comme la situation capitaux propres, trésorerie etc. [la société E] ne s’est pas améliorée avec le temps, la créance a été corrigée par tranche de 25% car au fur et à mesure des années, les chances pour [la société B] de récupérer de 75, 50 respectivement 25% de la créance sont devenues très faibles et donc, la perte de valeur partielle puis totale sur la créance nécessaire et justifiée. […]. ».

Par courrier du 28 janvier 2019, le bureau d’imposition Diekirch demanda encore à la société B de lui fournir, concernant les années d’imposition 2015 et 2016, des renseignements concernant les « Créances D et E : détails des comptes dès le début et copies des contrats.

[…] », au plus tard pour le 28 février 2019.

Par courrier du 21 février 2019, la société B transmit, par l’intermédiaire de sa fiduciaire, au bureau d’imposition Diekirch un tableau récapitulatif des mouvements historiques « entre sociétés » duquel il ressortirait que « ces deux créances proviennent principalement de factures de transport entre [la société B] et les deux entités ainsi que de la 3 facturation d’intérêt sur créance. Il n’existe, par conséquence, aucun contrat ou convention de créances. Nous vous annexons également la confirmation des soldes ouverts dans les comptes de [la société] IBV et [la société E] envers [la société B] au 31/12/2016. […] ».

Par courrier du 27 février 2019, le préposé du bureau d’imposition Diekirch informa la société B qu’il envisagea de s’écarter des déclarations fiscales sur le fondement du paragraphe 205, alinéa 3 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, telle que modifiée, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », sur le point suivant : « °… Dot.corr val sur autres créances non admises […]1, …€/2015 et …€/2016) : Un gestionnaire même moyennement diligent et consciencieux tendant à assurer la rentabilité d’une exploitation commerciale, n’aurait pas mis/laissé à disposition de tiers des millions d’euros durant des années. La procédure choisie ne correspond pas du tout à la pratique du marché libre. Le bureau d’imposition considère les dépréciations économiquement non justifiables et seulement motivées par les relations particulières entre les entités. […]. », tout en l’invitant à formuler ses objections pour le 27 mars 2019 au plus tard.

Par courrier du 26 mars 2019, réceptionné par le bureau d’imposition Diekirch le 27 mars 2019, la société B contesta, par l’intermédiaire de sa fiduciaire, le redressement envisagé et apporta des éléments complémentaires justifiant, selon elle, le traitement comptable et fiscal accordé aux « créances D et E, en respectant la pratique du marché », dans les termes suivants :

« Contexte général La relation commerciale entre la société de transport B […] et les scieries susmentionnées date depuis longtemps. En effet, la société B […] s’est entre autres spécialisée sur le transport « bois ». A cet effet, elle a réalisé des investissements importants dans du matériel approprié pour le transport « bois » durant les années 2007-2009 (investissements pour plusieurs millions d’EUR (voir déclarations fiscales 2007-2009)), ceci afin de répondre aux besoins spécifiques de la clientèle du secteur « bois ».

Afin de rentabiliser l’investissement dans ce matériel spécifique, la société B […] s’inscrivait inévitablement dans une relation long-terme avec les scieries en question.

Néanmoins, comme déjà évoqué dans notre courrier précédent, le marché du bois s’est retourné durant ces années où la société B avait décidé d’investir considérablement dans l’activité « bois » […].

A ce moment, dans un contexte économique très difficile (crise mondiale) la société B a décidé de maintenir la relation d’affaires avec les clients de l’activité « bois » car un arrêt pur et simple aurait eu des implications négatives :

1) la vente (à perte) du matériel spécifiquement acquis pour servir le secteur « bois », les camions/remorques de la société B n’entrant pas en compte pour livrer des scieries concurrentes 2) la perte d’emplois liés à l’activité « bois » 3) la constatation de pertes définitives sur créances commerciales.

1 …euros / 2014 étant biffés avec une mention manuscrite « 2014 est déjà imposé définitivement ».

4 Evolution de la relation commerciale et de l’encours depuis la crise :

D Les investissements dans l’activité « bois » effectués par la société B et le développement des relations d’affaires ont débouché sur le long-terme sur un accroissement considérable du chiffre d’affaires, induisant donc une augmentation de la base taxable dans son chef. En effet, le client D est devenu un des clients les plus importants de la société, et sa part dans le chiffre d’affaires & considérablement augmenté, comme en attestent les chiffres des dernières années : […].

Par ailleurs, l’encours de [la société] D est en diminution par rapport aux années antérieures, alors que le chiffre d’affaires pour ce même client a considérablement augmenté.

[…].

Par ailleurs, un incendie a détruit une partie des installations du client en 2014, aggravant momentanément sa situation financière.

De plus, nous souhaitons attirer votre attention remboursée en 2016 pour un montant de … mio.

Les faits susmentionnés démontrent que la société B a bien fait de croire dans l’activité « bois », étant donné que ces dernières années démontrent une croissance du chiffre d’affaires « bois », tout comme une diminution de l’encours [de la société] D.

E Suite à la crise, [la société E] n’a pas su honorer certaines de ses factures. La société B a dans le passé converti sa créance commerciale court terme au titre de services de transport en créance long terme. En 2013, [la société E] a de plus intenté une action en Allemagne à l’encontre d’un de ses fournisseurs suite à un important préjudice subi (portant sur plusieurs millions d’EUR).

La société B […] a opté, en se basant sur une solution de ce litige en faveur de [la société E], pour le maintien de la relation d’affaires et un report du paiement et ce, afin de permettre à [la société E] de traverser les difficultés financières et rembourser sa dette.

En analysant la relation sur les dernières années, les investissements dans l’activité «bois » effectués par la société B et le développement des relations d’affaires ont débouché sur le long-terme sur un accroissement du chiffre d’affaires, comme indiqué dans le tableau ci-

dessous : […].

Par ailleurs, depuis plusieurs années, l’encours est maintenu à un niveau stable, ce qui démontre sa capacité à rembourser les dettes contractées. […].

Le fait que [la société E] puisse honorer l’encours généré par les relations actuelles, tout comme la perspective de toucher tout ou partie de sa créance ancienne suite à l’issue 5 favorable du litige, ont amené la société B à garder cette relation commerciale, sécurisant par ailleurs les emplois du personnel affecté à l’activité « bois ».

Il est par ailleurs à signaler que ces dettes long-terme ont été maintenues à leur valeur nominale au bilan des deux scieries, démontrant la volonté d’honorer celles-ci dans la mesure du possible.

Suite aux éléments susmentionnés, il apparaît clairement que la [société B] a correctement appliqué le principe de prudence en comptabilisant des corrections de valeur sur les créances en cause qui sont des dépenses déductibles fiscalement car il s’agit de dépenses provoquées pour les besoins de l’entreprise, justifiées par les raisons commerciales ci-avant décrites qui trouvent leur origine dans le contexte économique.

En conclusion, nous sommes d’avis que la société B […] a, sans le moindre doute, agi en bon père de famille en ne réclamant pas le remboursement des fonds dans le contexte difficile rencontré par ses clients D et E (et aucunement au titre d’une prétendue relation particulière qui prévaudrait entre les sociétés concernées). En outre, les résultats obtenus depuis lors par la société B […] parlent eux-mêmes puisque les relations d’affaires ont été maintenues et ce, tout en diminuant les encours de ces deux sociétés et également, tout en augmentant le chiffre d’affaires ces dernières années.

Dès lors, nous sollicitions votre bienveillance et vous prions de revoir votre position afin de considérer que le redressement proposé n’est pas approprié en l’espèce et donc, ne doit pas être appliqué. […]. ».

En date du 10 avril 2019, le bureau d’imposition émit à l’égard de la société B, pour l’année d’imposition 2015, un bulletin de l’impôt sur le revenu des collectivités et un bulletin pour l’impôt commercial communal indiquant un bénéfice commercial suivant bilan commercial de … euros, l’ajout d’une « correction créance » de … euros et un « report sur bulletin impôt commercial » de … euros, le revenu imposable arrondi étant quant à lui fixé à zéro suite à l’ajustement d’un montant identique de … euros, effectués dans le cadre du régime d’intégration fiscale, avec la précision que « L’imposition diffère de la déclaration sur les points suivants » : « Redressement suivant notre lettre du 27.02.2019 (la réponse du 26.03.2019 de votre fiduciaire bien reçu) ».

En date du 10 juillet 2019, le bureau d’imposition émit à l’égard de la société A, pour l’année d’imposition 2015, un bulletin de l’impôt sur le revenu des collectivités et un bulletin pour l’impôt commercial communal indiquant un bénéfice commercial suivant bilan commercial de … euros, un ajustement effectué dans le cadre du régime de l’intégration fiscale s’élevant à … euros et un revenu imposable arrondi de … euros, avec la précision que « L’imposition diffère de la déclaration sur les points suivants » et « Application de l’article 164bis LIR : Réintégration des résultats fiscaux des filiales suivantes : - B pour un montant de … euros [;] - C pour un montant de … euros ».

Par un courrier recommandé du 9 octobre 2019, la société A introduisit une réclamation contre le bulletin de l’impôt sur le revenu des collectivités pour l’année 2015 et le bulletin pour l’impôt commercial communal pour l’année 2015 auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le directeur ».

6 Par décision du 7 août 2020, n° C 27113 du rôle, le directeur déclara la prédite réclamation recevable mais non fondée, dans les termes suivants :

« […] Vu la requête introduite le 10 octobre 2019 par le sieur F agissant au nom de la société anonyme A, avec siège social à L-…, pour réclamer contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2015, tous les deux émis en date du 10 juillet 2019;

Vu le dossier fiscal ;

Vu les §§ 102, 107, 228, 238, 254, alinéa 2 et 301 de la loi générale des impôts (A0) ;

Considérant qu’en application du § 5 de la 2e GewStVV du 16 novembre 1943 et de la GewStR 13 (cf. § 7 GewStG), le bulletin de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2015 se trouve affecté d’office pour le cas où il résulterait du recours sous analyse une variation du bénéfice d’exploitation soumis à l’impôt commercial communal ;

Considérant que si l’introduction de plusieurs instances par une seule et même requête n’est incompatible, en l’espèce, ni avec le secret fiscal, ni avec les règles de compétence et de procédure, elle ne dispense pas d’examiner chaque acte attaqué en lui-même et selon ses propres mérites et ne saurait imposer une jonction qu’il est loisible au directeur des contributions de prononcer lorsque les instances lui paraissent suffisamment connexes ; qu’il n’y a pas lieu de la refuser en la forme ;

Considérant que la réclamante a fait partie d’un groupe de sociétés ayant opté pour le régime d’intégration fiscale tel qu’instauré par l’article 164bis de la loi concernant l’impôt sur le revenu (L.I.R.) ; que la réclamante a constitué la société intégrante, alors que les sociétés anonymes B et C ont constitué les sociétés intégrées ; que les résultats des sociétés intégrées sont à intégrer dans celui de la société intégrante pour une période couvrant au moins 5 exercices d’exploitation ;

Considérant que le bureau d’imposition Sociétés Diekirch est compétent pour l’imposition des sociétés intégrées, alors que le bureau d’imposition Sociétés 6 est compétent pour l’imposition de la réclamante ;

Considérant que les réclamations ont été introduites par qui de droit (§ 238 AO), dans les forme (§ 249 AO) et délai (§ 245 AO) de la loi, qu’elles sont partant recevables ;

Considérant que la réclamante fait grief au bureau d’imposition de ne pas avoir admis une réduction de valeur sur une créance envers la société de droit allemand E (ci-après : la société E) ;

Considérant qu’en vertu du § 243 AO, une réclamation régulièrement introduite déclenche d’office un réexamen intégral de la cause, sans égard aux conclusions et moyens du réclamant, la loi d’impôt étant d’ordre public ; qu’à cet égard, le contrôle de la légalité externe de l’acte doit précéder celui du bien-fondé ;

7 Considérant qu’aux termes de l’article 164bis L.I.R., les sociétés de capitaux résidentes pleinement imposables, dont 95 pour cent au moins du capital est détenu directement ou indirectement par une autre société de capitaux résidente pleinement imposable ou par un établissement stable indigène d’une société de capitaux non résidente pleinement imposable à un impôt correspondant à l’impôt sur le revenu des collectivités, peuvent, sur demande, être intégrées fiscalement dans la société mère ou dans l’établissement stable indigène, de façon à faire masse de leurs résultats fiscaux respectifs avec celui de la société mère ou de l’établissement stable indigène ;

Considérant que la circulaire L.I.R. n° 164bis/1 du 27 septembre 2004 retient que le régime d’intégration fiscale ne vise pas à instaurer une base légale pour l’imposition du résultat consolidé au sens propre d’un groupe de sociétés, mais se limite à permettre aux sociétés intéressées de regrouper ou de compenser leurs résultats fiscaux pendant la période d’application du régime d’intégration fiscale ; que les résultats fiscaux des sociétés filiales admises au régime d’intégration fiscale sont ajoutés à celui de la société intégrante, en l’occurrence de la réclamante ;

Considérant qu’aux termes de l’alinéa 4 de l’article 1er du règlement grand-ducal du 18 décembre 20152 portant exécution de l’article 164bis L.I.R., la société intégrante est passible de l’impôt sur le revenu des collectivités correspondant au revenu imposable du groupe établi, les revenus imposables des sociétés intégrées se chiffrant dorénavant et en toute logique à 0 (zéro) euro ;

Considérant que dans son placet, la réclamante invoque qu’ « Une motivation détaillée expliquant les raisons pour lesquelles nous estimons que le redressement effectué par le bureau d’imposition Sociétés Nord [Diekirch] ne tient pas compte de tous les faits et est injustifié suivra sous peu. » ; qu’au lieu d’entreprendre le nécessaire dans les meilleurs délais afin d’obtenir gain de cause en ce qui concerne ses souhaits, la réclamante n’a, à ce jour, toujours pas fait parvenir une telle motivation ni au bureau d’imposition ni à la présente instance ;

En ce qui concerne le résultat fiscal de la société anonyme B Considérant d’abord qu’en exécution du § 205, alinéa 3 AO, le bureau d’imposition a informé la société anonyme B le 27 février 2019, que la réduction de valeur en relation avec une créance pour un montant de … euros ne serait pas prise en compte pour la détermination du résultat à transférer à la réclamante ;

Considérant qu’aux termes du § 205, alinéa 3 AO des divergences notables par rapport à la déclaration du contribuable doivent, pour autant qu’elles soient en sa défaveur, lui être communiquées pour observation préalablement à l’émission du bulletin ; que le but du § 205, alinéa 3 AO, en tant que principe de bonne administration, consiste à vérifier les conclusions auxquelles tend une instruction en défaveur du contribuable et partant à éviter d’éventuels malentendus ;

Considérant que suite au prédit courrier, la réclamante s’est montrée insatisfaite quant aux divergences en sa défaveur à travers un courrier daté au 26 mars 2019, tandis qu’elle n’a 2 Applicable à partir de l’année d’imposition 2015 (article 3).

8 pas apporté des éléments nouveaux et révélateurs au bureau d’imposition ; qu’il s’ensuit que le bureau d’imposition a procédé à l’imposition de l’année 2015 en se référant aux redressements communiqués dans son courrier du 27 février 2019 ; qu’il découle de ce qui précède, qu’en l’espèce la forme suivie par le bureau d’imposition ne prête pas à critique ;

Considérant qu’en vertu des dispositions de l’article 23, alinéa 3 L.I.R., les biens autres que ceux visés à l’alinéa qui précède (le sol, les participations, les biens du réalisable et disponible) sont à évaluer au prix d’acquisition ou de revient ; que lorsque la valeur d’exploitation y est inférieure, l’évaluation peut se faire à cette valeur inférieure ;

Considérant qu’en vertu des dispositions de l’article 22, alinéa 2 L.I.R, la situation à la date de clôture de l’exercice d’exploitation est déterminante pour l’évaluation en fin d’exercice ; que l’exploitant pourra tenir compte des faits et circonstances qui ont existé à cette date et dont l’existence ne s’est révélée qu’ultérieurement, mais avant la date d’établissement du bilan;

Considérant qu’en l’occurrence, la date de clôture de l’exercice social au 31 décembre 2015 est déterminante pour l’évaluation de la créance ;

Considérant que le principe comptable communément appelé « principe de prudence», destiné à permettre aux tiers de se faire une idée du patrimoine et de la situation réelle de l’entreprise en en reflétant une image fidèle, prévoit que tout événement qui risque de diminuer la valeur du patrimoine de l’entreprise doit formellement être pris en compte ; qu’en outre, tout événement pouvant augmenter la valeur du patrimoine de l’entreprise ne peut faire l’objet d’un enregistrement comptable, de sorte qu’une entreprise doit imputer immédiatement sur son résultat les charges dès lors que leur probabilité de réalisation est importante, et, qu’inversement, elle n’enregistre ses produits que lorsqu’ils sont certains ;

Considérant ainsi que d’après le principe de prudence inscrit à l’article 51 (1) c de la loi du 19 décembre 2002 concernant le registre de commerce et des sociétés ainsi que la comptabilité et les comptes annuels des entreprises et modifiant certaines autres dispositions légales en vigueur depuis le 1er janvier 2005, il doit être tenu compte lors de l’évaluation des postes figurant dans les comptes annuels de tous les risques prévisibles et pertes éventuelles qui ont pris naissance au cours de l’exercice ou d’un exercice antérieur, même si ces risques ou pertes ne sont connus qu’entre la date de clôture du bilan et la date à laquelle il est établi, ainsi que des dépréciations ;

Considérant que les livres de la société anonyme B renseignent des « Autres créances dont la durée résiduelle est supérieure à un an » ; que parmi ces créances figure une créance envers la société E pour un montant de … euros ; qu’une correction de valeur en relation avec cette créance a été comptabilisée pour un montant de … euros au titre de l’année d’imposition 2015 ; qu’il s’impose de noter qu’une correction de valeur pour le même montant a déjà été actée en 2014, alors que pour les années 2016 et 2017 des corrections de valeur pour des montants respectifs de … euros et de … euros ont été comptabilisées ; qu’il s’ensuit que dans les comptes annuels au 31 décembre 2017, la créance envers la société E figure avec un montant de (… - … - … - … - … i.e.) 0 (zéro) euro ; que force est de constater que la réclamante a préféré amortir la créance en question sur une durée de 4 ans au lieu de déterminer la valeur d’exploitation tel que le prescrit l’article 23, alinéa 3 L.I.R. ;

9 Considérant qu’en date du 13 novembre 2018, le bureau d’imposition a fait parvenir à la société anonyme B un courrier par lequel il a sollicité des explications supplémentaires en relation avec les corrections de valeur de … euros concernant les années 2015 et 2016 ; que le 13 décembre 2018, la société anonyme B a répliqué que la créance en question trouverait son origine dans la relation commerciale entre les deux sociétés ; qu’à défaut de la société E de pouvoir « honorer certaines de ses factures » la société anonyme B aurait « converti sa créance commerciale court terme au titre de services de transport en créance long terme » ; que cette dernière a été d’accord de reporter le paiement de la créance sur une durée de 4 ans « afin de permettre à E de traverser les difficultés financières et payer la créance » ; que la société anonyme B justifie les dotations de corrections de valeur par des liquidités insuffisantes de la société E afin de rembourser la créance en question ;

Considérant que le bureau d’imposition a encore demandé les « copies des contrats [de prêt] » en date du 28 janvier 2019 ; que la société anonyme B a répondu le 21 février 2019, qu’il n’existerait « aucun contrat ou convention de créances » étant donné que les « créances commerciales proviennent principalement de factures de transport » ; qu’elle a joint à sa réponse un relevé détaillant les paiements et les factures de 2007 à 2013 dont le « Total général» s’élève à … euros ; qu’il s’ensuit que la société E n’a remboursé que … euros au cours des années 2009, 2010 et 2011, alors qu’au 31 décembre 2011 celle-ci avait déjà des dettes envers la société anonyme B pour un montant de (… + … + … + … + … i.e.) … euros ;

que ce remboursement ne représente que (… / … x 100 i.e.) 5,5 pour cent de la somme des factures au 31 décembre 2011 ; qu’au lieu d’engager des poursuites judiciaires à l’encontre de la société E, la réclamante a préféré continuer les activités avec cette dernière et ainsi augmenter davantage les dettes de celle-ci ;

Considérant que le bureau d’imposition a majoré le résultat à transférer à la réclamante d’une correction de valeur d’un montant de … euros au motif que celle-ci serait motivée par des relations particulières entre la société anonyme B et la société E;

Considérant que le sieur F représente la société anonyme B en tant qu’administrateur délégué unique3; qu’il s’impose de mentionner que ce dernier est le dirigeant du groupe belge de transport routier B ; qu’il ressort d’une recherche sur internet que le sieur F est également le directeur général (« Geschäftsführer4 », « Managing Director5 ») de la société E ; que, d’emblée, force est de constater qu’il existe des relations particulières entre la société anonyme B et la société E, le sieur F se trouvant aux commandes des deux sociétés en question ;

Considérant qu’au cours des années 2007 et 2013, la société E a accumulé des dettes pour un montant de … euros ; que pendant toutes ces années, la société anonyme B n’a même pas levé le petit doigt afin de récupérer ces créances commerciales ; qu’elle se contente de justifier son comportement en exposant que le marché du bois se serait « retourné»; que dans sa missive du 26 mars 2019, elle a inclus un tableau censé retracer les prix du bois ; que, toutefois, ce tableau fait référence au « Global Sawlog Price Index », donc, un index regroupant les marchés de l’Amérique du Nord et du Sud, de l’Asie, de l’Océanie et de quelques 3 Renouvellement du mandat lors de l’assemblée générale ordinaire en date du 8 septembre 2015 4 … 5… 10 pays de l’Europe ; que, par contre, l’index représentant exclusivement le marché européen, donc, celui sur lequel est active la société E, se nomme « European Sawlog Price Index » ;

qu’il se dégage du site internet https://woodprices.com/sawlogs-price-indices/ que le prix du bois en Europe a atteint un niveau record (« Record high ») dans le premier quart de l’année 2014 ; que l’affirmation selon laquelle « le marché du bois s’est retourné durant ces années [2007 à 2009] » est donc dénuée de pertinence, voire même fallacieuse ;

Considérant encore que la société anonyme B justifie l’absence de poursuites judiciaires à l’encontre de la société E afin d’éviter « la perte d’emplois liés à l’activité «bois» » ; qu’à cet endroit précis, il échoit de rappeler en mémoire une opération internationale menée par les autorités belges et ayant abouti à des inculpations telles que « appartenance à une organisation criminelle », « traite d’êtres humains », « blanchiment », « faux et usage de faux social », ainsi que « escroquerie en droit pénal social » à l’encontre des responsables du groupe A6; qu’il est pour le moins étonnant que le groupe A, sur lequel pèsent les reproches d’avoir employé un millier de chauffeurs de l’Europe de l’Est dans des conditions sordides, renonce à des créances à hauteur de … euros afin de « sécuris[er] par ailleurs les emplois du personnel affecté à l’activité « bois »» ;

Considérant, accessoirement, qu’il convient de relever que la société anonyme B a pratiqué le même modus operandi en ce qui concerne une créance envers la société de droit belge D (ci-après : la société D) ; que le sieur F est également l’administrateur délégué de cette dernière7, qu’à partir de l’année d’imposition 2016, la société anonyme B a commencé à comptabiliser des corrections de valeur8 avec comme conséquence, encore une fois, la réduction du résultat à transférer à la réclamante ;

Considérant que l’affirmation suivant laquelle la société anonyme B aurait « agi en bon père de famille » voire que son comportement ne serait « aucunement [dû] au titre d’une prétendue relation particulière qui prévaudrait entre les sociétés concernées » laisse d’être fondée, dans la mesure où elle est contredite par les faits énoncés ci-haut ;

Considérant qu’un gestionnaire même moyennement diligent et consciencieux, tendant à assurer la rentabilité d’une exploitation commerciale, n’aurait pas renoncé au recouvrement de créances envers des tiers, surtout lorsqu’il s’agit de créances d’une telle envergure ;

Considérant que l’ « administration peut supposer une diminution indue des bénéfices de l’entreprise si les circonstances la rendent probable, sans avoir à la justifier exactement. Il y a alors renversement de la charge de la preuve, le contribuable devant prouver qu’il n’y a pas diminution de bénéfice ou que celle-ci est économiquement justifiée, et non seulement motivée par des relations particulières entre deux entités liées9 » ; que la renonciation à la créance en question tire son origine de la relation particulière entre la société anonyme B et la société E ;

6 Perquisition de certains locaux du groupe A en date du 8 mai 2017 suivie de l’inculpation et de la mise en détention provisoire du sieur F et de ses managers (entretemps libérés sous certaines conditions).

7… 8 31 décembre 2016: 2.190.681,33 euros ; 31 décembre 2017: 1.448.955,19 euros 9 Trib adm. 9 juin 2008, n° 23324 du rôle ; Cour adm. 11 février 2009, n° 24642C du rôle 11 Considérant qu’aux termes de l’alinéa 3 de l’article 164 L.I.R., il y a distribution cachée de bénéfices notamment si un associé, sociétaire ou intéressé reçoit directement ou indirectement des avantages d’une société ou d’une association dont normalement il n’aurait pas bénéficié s’il n’avait pas eu cette qualité ;

Considérant que la disposition de l’article 164 alinéa 3 L.I.R. est l’application du principe suivant lequel il y a lieu, pour les besoins du fisc, de restituer aux actes leur véritable caractère et doit partant s’interpréter en fonction de cette finalité10 ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la correction de valeur de … euros est à qualifier en tant que distribution cachée de bénéfice ;

Considérant, finalement, que la société anonyme B a indiqué dans sa lettre de réponse du 26 mars 2019 « que ces dettes long-terme ont été maintenues à leur valeur nominale au bilan des deux scieries [les sociétés E et D], démontrant la volonté d’honorer celles-ci dans la mesure du possible » ; que cette ligne en apparence anodine corrobore le fait que la société E est effectivement en mesure d’honorer ses engagements, en l’occurrence de rembourser ses dettes envers la société anonyme B, fût-ce à long terme, de sorte qu’aucune correction de valeur n’a lieu d’être ;

En ce qui concerne le résultat fiscal de la société anonyme C […] PAR CES MOTIFS reçoit les réclamations en la forme, les rejette comme non fondées. […] ».

Par courrier minute du 4 août 202011, le directeur transmit ladite décision du 7 août 2020 au bureau d’imposition Diekirch et lui enjoignit « […] 1) de fixer la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux en vertu des articles 146 et 148 L.I.R. dans le chef de la société anonyme B12 (1996 2222 237) au motif que la correction de valeur en relation avec la créance envers la société de droit allemand E, i.e. … euros, est à qualifier en tant que distribution cachée de bénéfice.

Aux termes de l’alinéa 3 de l’article 164 L.I.R., il y a distribution cachée de bénéfices notamment si un associé, sociétaire ou intéressé reçoit directement ou indirectement des avantages d’une société ou d’une association dont normalement il n’aurait pas bénéficié s’il n’avait pas eu cette qualité. La disposition de l’article 164, alinéa 3 L.I.R. est l’application du principe suivant lequel il y a lieu, pour les besoins du fisc, de restituer aux actes leur véritable caractère et doit partant s’interpréter en fonction de cette finalité.

10 Conseil d’État 13 janvier 1987, no 6690 du rôle ; décision C 9679 11 Le courrier initial indique une date du 23 juillet 2020 comportant une annotation manuscrite « Date a changé ».

12 Souligné par le directeur.

12 L’ « administration peut supposer une diminution indue des bénéfices de l’entreprise si les circonstances la rendent probable, sans avoir à la justifier exactement. Il y a alors renversement de la charge de la preuve, le contribuable devant prouver qu’il n’y a pas diminution de bénéfice ou que celle-ci est économiquement justifiée, et non seulement motivée par des relations particulières entre deux entités liées13 ».

En l’espèce, la renonciation de la part de la société anonyme B à la créance en question, i.e. … euros, tire son origine de la relation particulière entre la société anonyme B et la société de droit allemand E 2) de classer la décision directoriale au dossier fiscal de la société anonyme B. […] ».

En date du 26 août 2020, le bureau d’imposition Diekirch émit à l’égard de la société B un le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux pour l’année 2015 fixant, sur le fondement de la section III (articles 146 à 161) de la LIR, une retenue d’impôt de 15% de … euros sur un montant de … euros avec pour « motif et remarques » y indiqués « Correction de créance E[;] Suivant décision directoriale n° … du 04.08.2020 [;] Voies de recours : voir au resto ».

Par un courrier recommandé du 17 novembre 2020, la société B fit introduire par l’intermédiaire de son litismandataire une réclamation contre le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux pour l’année 2015, précité, auprès du directeur.

Par décision du 30 novembre 2020, n° C 28694 du rôle, le directeur déclara la prédite réclamation recevable mais non fondée, dans les termes suivants : « […] Vu la requête introduite le 17 novembre 2020 par Me David Maria, de la société anonyme Wildgen, au nom de la société anonyme B, avec siège social à L-…, pour réclamer contre le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2015, émis le 26 août 2020 ;

Vu le dossier fiscal ;

Vu les §§ 102, 107, 228, 238, 254, alinéa 2 et 301 de la loi générale des impôts (A0) ;

Considérant que la réclamation a été introduite par qui de droit (§ 238 AO), dans les forme (§ 249 AO) et délai (§ 228 AO) de la loi, qu’elle est partant recevable ;

Considérant que la réclamante fait grief au bureau d’imposition d’avoir fixé dans son chef une retenue d’impôt sur les revenus de capitaux en relation avec une distribution cachée de bénéfices ;

Considérant qu’en vertu du § 243 AO, une réclamation régulièrement introduite déclenche d’office un réexamen intégral de la cause, la loi d’impôt étant d’ordre public ; qu’à cet égard le contrôle de la légalité externe de l’acte doit précéder celui du bien-fondé ; qu’en l’espèce la forme suivie par le bureau d’imposition ne prête pas à critique ;

13 Trib. adm. 9 juin 2008, n° 23324 du rôle ; Cour adm. 11 février 2009, n° 24642C du rôle.

13 Considérant qu’il s’impose de noter que la réclamante a fait partie d’un groupe de sociétés ayant opté pour le régime d’intégration fiscale tel qu’instauré par l’article 164bis de la loi concernant l’impôt sur le revenu (L.I.R.); que la société anonyme A a constitué la société intégrante, alors que la réclamante et la société anonyme C ont constitué les sociétés intégrées ; que les résultats des sociétés intégrées sont à intégrer dans celui de la société intégrante pour une période couvrant au moins 5 exercices d’exploitation ;

Considérant qu’aux termes de l’alinéa 4 de l’article 1er du règlement grand-ducal du 18 décembre 201514 portant exécution de l’article 164bis L.I.R., la société intégrante est passible de l’impôt sur le revenu des collectivités correspondant au revenu imposable du groupe établi, les revenus imposables des sociétés intégrées se chiffrant dorénavant et en toute logique à 0 (zéro) euro ;

Considérant qu’en date du 10 octobre 2019, le sieur F a introduit au nom de la société anonyme A des réclamations contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2015, enrôlées sous le n° … du contentieux de l’impôt ; que les réclamations susmentionnées avaient également comme objet les résultats des sociétés intégrés, notamment, celui de la réclamante ;

Considérant que la société anonyme A a fait grief au bureau d’imposition de ne pas avoir admis une réduction de valeur sur une créance que la réclamante détenait envers la société de droit allemand E (ci-après : la société E) ; que le recours contentieux a été toisé par décision directoriale en date du 7 août 2020 suivant laquelle l’imposition pour l’année 2015 telle qu’effectuée par le bureau d’imposition a été confirmée ; que le directeur y a retenu que la correction de valeur de … euros est à qualifier en tant que distribution cachée de bénéfices ; que dans le cadre du présent recours il n’y a pas lieu de statuer sur la qualification en distribution cachée de bénéfices de ladite correction de valeur étant donné que cette question a déjà fait l’objet de la décision directoriale sus-énoncée15 ;

Considérant qu’en vertu de l’article 146 L.I.R., les distributions de bénéfices tant ouvertes que cachées doivent faire l’objet d’une retenue d’impôt sur les revenus de capitaux ;

Considérant qu’en vertu de l’article 148 L.I.R., le taux de la retenue d’impôt applicable pour l’année 2015 est de 15 pour cent, à moins que le débiteur des revenus ne prenne à sa charge l’impôt à retenir, ce qui, même en matière de distribution cachée de bénéfices n’est jamais présumé ;

Considérant qu’à l’époque, lors de l’émission des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2015 de la réclamante, le bureau d’imposition a omis de fixer la retenue d’impôt en relation avec la distribution cachée de bénéfices ; qu’il a remédié à cette inadvertance en fixant la retenue d’impôt précitée, en l’occurrence (15% x … i.e.) … euros ; que le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2015, émis le 26 août 2020, fait l’objet de la présente réclamation ;

14 Applicable à partir de l’année d’imposition 2015 (article 3) 15 Cf. pages 2 à 6 de la décision C 27113 14 Considérant que dans son placet, la réclamante invoque l’application de l’article 147 L.I.R. au vœu duquel la fixation d’une retenue d’impôt sur les revenus de capitaux ne serait pas à opérer dans son chef ;

Considérant que l’article 147 L.I.R. prévoit l’exemption de la retenue d’impôt prévue à l’article 146 L.I.R. des revenus alloués par un organisme à caractère collectif résident pleinement imposable et revêtant une des formes énumérées à l’annexe de l’article 166, alinéa 10, ou par une société de capitaux résidente pleinement imposable non énumérée à l’annexe de l’article 166, alinéa 10, aux organismes à caractère collectif énumérés à l’article 147, n° 2, lettres a) à h) L.I.R. ;

Considérant que les dispositions de l’article 147, n° 2 L.I.R., dans la teneur de l’année 2015, visent notamment les revenus alloués à :

a) un autre organisme à caractère collectif visé par l’article 2 de la directive modifiée du Conseil des CEE du 23 juillet 1990 concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d’Etats membres différents (90/435/CEE), b) une autre société de capitaux résidente pleinement imposable non énumérée à l’annexe de l’article 166, alinéa 10, c) l’Etat, aux communes, aux syndicats de communes ou aux exploitations de collectivités de droit public indigènes, d) un établissement stable d’un organisme à caractère collectif visé aux lettres a, b ou c, e) un organisme à caractère collectif pleinement imposable à un impôt correspondant à l’impôt sur le revenu des collectivités qui est un résident d’un Etat avec lequel le Grand-

Duché de Luxembourg a conclu une convention tendant à éviter les doubles impositions, ainsi qu’à son établissement stable indigène, f) une société de capitaux qui est un résident de la Confédération suisse assujettie à l’impôt sur les sociétés en Suisse sans bénéficier d’une exonération, g) une société de capitaux ou une société coopérative qui est un résident d’un Etat, partie à l’Accord sur l’Espace économique européen (EEE) autre qu’un Etat membre de l’Union Européenne et qui est pleinement imposable à un impôt correspondant à l’impôt sur le revenu des collectivités, h) un établissement stable d’une société de capitaux ou d’une société coopérative qui est un résident d’un Etat, partie à l’Accord sur l’Espace économique européen (EEE) autre qu’un Etat membre de l’Union européenne et que, à la date de la mise à disposition des revenus, le bénéficiaire détient ou s’engage à détenir, sous les conditions prévues à l’article 149, alinéa 4, directement pendant une période ininterrompue d’au moins douze mois, une participation d’au moins 10 pour cent ou d’un prix d’acquisition d’au moins 1.200.000 euros dans le capital social du débiteur des revenus ;

15 Considérant que la réclamante expose que « l’Actionnaire », i.e. la société anonyme A, représente la « société mère », alors que « la Société », i.e. la réclamante, constitue la « filiale » ; que force est toutefois de constater que la distribution cachée de bénéfices en question tire son origine de la relation particulière que la réclamante entretient avec la société E et non avec la société anonyme A ;

Considérant que la réclamante s’exprime comme suit dans la présente requête : « Les pièces à l’appui de ce qui précède ne sont pas jointes à la présente réclamation étant donné que la Société et l’Actionnaire sont 2 contribuables luxembourgeois, l’administration des contributions dispose dans ses dossiers tous les documents et informations nécessaires ou utiles aux fins de vérification. » ; que la réclamante estime ne pas être dans l’obligation de verser des pièces justificatives au motif que, de toute façon, l’administration des contributions directes disposerait de toutes les pièces justificatives pertinentes en question ; qu’il convient de relever qu’elle se soustrait à son obligation de collaboration (§§ 170 et 171 AO) en ne remettant pas des pièces probantes afin que le directeur puisse examiner si toutes les conditions telles que prescrites par l’article 147 L.I.R. sont remplies en l’espèce ;

Considérant que nonobstant ce fait et tel que cela a été retenu supra, la distribution cachée de bénéfices a été constatée au niveau de la réclamante et la société E, cette dernière étant qualifiable d’intéressée au sens de l’article 164, alinéa 3 L.I.R., étant donné la relation particulière qui existe entre elle et la réclamante ; qu’une exonération de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux en vertu de l’article 147 L.I.R. aurait été applicable dans l’hypothèse où la réclamante aurait distribué des bénéfices à la société anonyme A étant donné que cette dernière a été l’actionnaire unique pendant toute l’année d’imposition 2015, donc, pendant une période ininterrompue d’au moins 12 mois ;

Considérant qu’il s’ensuit que les dispositions de l’article 147 L.I.R. ne sont pas applicables en l’espèce ; qu’il y a dès lors lieu de confirmer la fixation de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux en vertu des articles 146 et 148 L.I.R. dans le chef de la réclamante;

PAR CES MOTIFS reçoit la réclamation en la forme, la rejette comme non fondée. […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 5 novembre 2020, inscrite sous le numéro 45181 du rôle, la société A a fait introduire, suivant son dispositif d’instance auquel le tribunal est en principe seul tenu, un recours tendant principalement à la réformation, subsidiairement à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 7 août 2020 et des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal pour l’année 2015, tous les deux émis le 10 juillet 2019.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 25 février 2021, inscrite sous le numéro 45701 du rôle, la société B a fait introduire, suivant son dispositif auquel le tribunal est en principe seul tenu, un recours tendant principalement à la réformation, subsidiairement à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 30 novembre 2020, « respectivement » d’un bulletin de la retenue 16 d’impôt sur les revenus de capitaux pour l’année 2015 émis le 26 août 2020, et subsidiairement à l’annulation de ladite décision « respectivement » du bulletin précité.

1) Quant à la jonction des deux recours Dans le cadre du recours inscrit sous le numéro 45701 du rôle, la société B a demandé, dans un souci d’une bonne administration de la justice, la jonction avec le recours inscrit sous le numéro 45181 en dépit de l’absence d’identité de parties.

La société B appuie sa demande de jonction en affirmant que les deux recours porteraient sur le même objet, à savoir que l’administration des Contributions directes, ci-après désignée par l’ « administration », considérerait la correction de valeur dans son chef comme un prétendu acte anormal de gestion et comme la cause d’une prétendue distribution cachée de bénéfices.

Elle avance encore le fait que si le recours inscrit sous le numéro 45181 du rôle et introduit par la société A contre la décision directoriale du 7 août 2020, était reçu en la forme et sur le fond, le bulletin d’impôt sur les revenus de capitaux pour l’année 2015, qu’elle conteste dans le cadre du recours inscrit sous le numéro 45701 du rôle, serait dépourvue de base légale, puisque selon elle, la distribution cachée de bénéfices tirerait son fondement de ladite décision directoriale.

Dans son mémoire en réponse déposé dans le cadre de la procédure inscrite sous le numéro 45701 du rôle, le délégué du gouvernement ne s’oppose pas à la demande de jonction.

Une jonction entre différentes affaires est susceptible d’être prononcée, dans le souci d’une bonne administration de la justice, dans l’hypothèse où ces affaires concernent les mêmes parties et où elles ont trait au même objet16. Exceptionnellement, la jonction peut être ordonnée entre parties différentes17, hypothèse non donnée lorsque les requérants poursuivent des intérêts contradictoires18.

Force est de constater qu’en l’espèce, les deux recours ne concernent ni le même acte, ni les mêmes parties. Il n’est en effet constant en cause que le recours inscrit sous le numéro 45181 du rôle a été introduit par la société A, société mère et intégrante de la société B au sens de l’article 164bis LIR, contre la décision directoriale du 7 août 2020, tandis que le recours inscrit sous le numéro 45701 du rôle a été introduit par la société B, filiale de la société A dont elle est également une des sociétés intégrées au sens de l’article 164bis LIR, précité.

Toutefois, le tribunal relève que la société A et la société B ont un intérêt commun à la solution du litige. Il se dégage, en effet, de l’article 1er, paragraphe (1) du règlement grand-

ducal du 18 décembre 2015 portant exécution de l’article 164bis, alinéa 10 LIR, tel qu’applicable à l’année d’imposition 2015 litigieuse que « […] Chaque membre du groupe 16 Trib. adm., 12 juin 2003, n° 15385 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Procédure contentieuse, n° 939 et les autres références y citées.

17 « Le contentieux administratif luxembourgeois » de Rusen Ergec, mis à jour par Francis Delaporte, Pas. adm.

2021, n°214.

18 Voir en ce sens C.E. belge, 22 avril 2010, n° 203.219, cité par « Le contentieux administratif luxembourgeois » de Rusen Ergec, mis à jour par Francis Delaporte, Pas. adm. 2021, n°214.

17 intégré doit déterminer son propre résultat fiscal et déposer une déclaration comme s’il ne faisait pas partie du groupe intégré », la « société mère intégrante […] est en plus tenue d’établir et de déposer une déclaration d’impôt tenant compte du revenu imposable du groupe intégré qui s’obtient en regroupant ou en compensant les résultats fiscaux des membres du groupe intégré et en déduisant de ce montant les dépenses spéciales à charge de ces membres.

[…]. », tandis que son paragraphe (4) précise que « La société mère intégrante […] est passible de l’impôt sur le revenu des collectivités correspondant au revenu imposable du groupe intégré établi conformément aux dispositions qui précèdent. […]. », de sorte que l’imposition de la société mère intégrante et celle de ses sociétés intégrées, en l’occurrence celle de la société B, sont liées, le régime de l’intégration fiscale s’analysant en effet en une exception au principe de l’imposition individuelle des collectivités soumises à l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’interdiction de compenser ou de transférer des résultats entre sociétés19.

En l’espèce, l’issue du recours introduit par la société A et inscrit sous le numéro 45181 du rôle, dont l’objet porte sur l’admission sur le plan fiscal d’une correction de valeur espérée dans le chef de sa société intégrée, la société B, et la qualification de celle-ci de distribution cachée de bénéfices par l’administration, aura nécessairement un impact sur l’objet du recours introduit par la société B et inscrit sous le numéro 45701 du rôle, lequel porte sur l’application d’une retenue à la source de 15% sur ladite distribution cachée de bénéfices.

Il y a partant lieu de faire droit à la demande de jonction et de statuer sur le mérite des affaires inscrites sous les numéros 45181 et 45701 du rôle par un seul et même jugement.

2) Quant à la recevabilité des deux recours 2.1 Quant à la recevabilité du recours inscrit sous le numéro 45181 du rôle Le délégué du gouvernement a conclu à l’irrecevabilité du recours du 5 novembre 2020 inscrit sous le numéro 45181 du rôle en ce qu’il est dirigé contre une « décision du bureau d’imposition du 14 février 2020 » au motif que le directeur aurait statué sur son recours.

La société A n’a pas pris position quant à ce moyen.

Encore que le délégué du gouvernement s’est référé à une « décision du bureau d’imposition du 14 février 2020 », de l’entendement du tribunal, il a entendu soulever la question de la recevabilité du recours pour autant qu’il est dirigé contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal pour l’année 2015.

A ce titre, le tribunal relève qu’en vertu du § 228 AO et de l’article 8, paragraphe (3), point 1. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par la « loi du 7 novembre 1996 », le tribunal est compétent pour statuer comme juge du fond sur le recours dirigé par un contribuable contre une décision du directeur ayant statué sur les mérites d’une réclamation de sa part contre un bulletin de l’impôt d’imposition et qu’un recours contre un bulletin n’est prévu à l’article 8, paragraphe 19 Trib. adm., 24 juin 2015, n° 34530 du rôle, confirmé par Cour adm. 24 mars 2016, n° 36656C du rôle, Pas. adm.

2021, V° Impôts, n° 654.

18 (3), point 3. de la même loi que dans l’hypothèse où une réclamation a été introduite par le contribuable et qu’aucune réponse n’est intervenue dans un délai de six mois.

Comme le directeur a pris une décision à la suite de la réclamation introduite par la société A, il y a lieu de déclarer irrecevable le recours principal en réformation pour autant qu’il est dirigé contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal pour l’année 2015, tous les deux émis le 10 juillet 2019.

Le recours principal en réformation introduit par la société A à l’encontre de la décision directoriale du 7 août 2020, précitée, intervenue sur réclamation dirigée contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal pour l’année 2015 est quant à lui recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi.

Il n’y a partant pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

2.2 Quant à la recevabilité du recours inscrit sous le numéro 45701 du rôle Le délégué du gouvernement s’est rapporté à prudence quant à la recevabilité du recours du recours.

Par application des dispositions du § 228 AO et de l’article 8, paragraphe (3), point 1.

de la loi du 7 novembre 1996, précités, il y a cependant lieu de déclarer irrecevable le recours principal en réformation introduit par la société B dirigé contre le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux pour l’année 2015 émis le 26 août 2020, le recours principal en réformation dirigé contre la décision directoriale du 30 novembre 2020, précitée, intervenue sur réclamation étant, quant à lui, recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi.

Il n’y a partant pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

3) Quant au fond 3.1 Quant au recours en réformation inscrit sous le numéro 45181 du rôle Arguments des parties A l’appui de son recours, la société A expose en substance les faits et rétroactes repris ci-avant.

Elle relève que le résultat fiscal de la déclaration fiscale de la société B pour l’année 2015 tiendrait compte d’une correction de valeur qui s’élèverait à … euros et qui aurait été constatée par la société B sur une créance à l’encontre de la société E d’un montant, au 31 décembre 2015, de … euros.

Elle explique ensuite que le redressement opéré par le bureau d’imposition Diekirch dans le chef de la société B et confirmé par le directeur, qui consisterait à refuser la déductibilité de ladite correction de valeur, aurait pour conséquence que son propre résultat imposable 19 divergerait du résultat imposable qu’elle aurait déclaré dans sa déclaration fiscale pour l’année 2015, à savoir une perte de … euros, en ce sens qu’il consisterait désormais en un revenu positif de … euros, de sorte à être redevable, d’une part, d’un montant d’impôt commercial communal « indû » de … euros, et, d’autre part, d’une cote d’impôt sur le revenu des collectivités « indue » de … euros ayant pu être ramenée au montant minimum de 21.400 euros par une imputation de ses bonifications d’impôt pour investissements disponibles, soit un total d’impôts de … euros avant imputation desdites bonifications.

En droit, la société A fait valoir que sur base de l’analyse des reproches et arguments du directeur, il y aurait trois niveaux d’analyse à faire, à savoir premièrement, déterminer si la société B a commis un acte anormal de gestion, deuxièmement, en cas de réponse négative à cette question, déterminer si la correction de valeur devrait être enregistrée et à quelle hauteur, et troisièmement, déterminer si la correction de valeur correspondrait à une distribution cachée.

En ce qui concerne le premier d’analyse, la société A prend position par rapport au contenu du courrier du bureau d’imposition Diekirch daté du 27 février 2019 et souhaite démontrer que la société B n’a ni « mis », ni « laissé » à disposition de la société E, la créance litigieuse, tout en soulignant que ni le directeur, ni le bureau d’imposition Diekirch n’aurait explicité ce qu’il entendait par ces termes.

Précisant d’abord que l’activité commerciale de la société B aurait trait au transport de marchandises, tandis que celui de la société E porterait sur le sciage de bois, la société A explique que la créance en question tirerait son origine, non pas, comme l’aurait soutenu le directeur, dans un transfert d’argent sous forme de prêt ou d’avances, mais dans le chiffre d’affaires réalisé par la société B avec la société E au titre de prestations de transport.

Concrètement, la société B aurait utilisé ses camions pour effectuer des commandes de la société E, de sorte que la créance litigieuse serait composée de factures de livraisons de bois brut, de planches de bois ou de sciures et copeaux de bois impayées. Les prestations fournies par la société B à la société E auraient, par ailleurs, été facturées sur base de prix comparables à ceux appliqués par la société B à ses autres clients. En conclusion, la créance serait « en quasi-totalité » une créance commerciale ce qui signifierait que la société B n’aurait pas « mis » la créance à disposition de la société E. Par conséquent, l’argument de l’administration selon lequel la société B aurait commis un acte anormal de gestion en mettant à disposition des millions d’euros à la société E devrait être écarté.

La société A réfute également le reproche de l’administration consistant à opposer à la société B le fait qu’elle aurait « laissé » la créance à disposition de la société E, alors que celle-

ci aurait dû, selon l’administration, réaliser des bénéfices lui permettant de payer sa dette au motif que le marché du bois en Europe aurait atteint un niveau record.

A ce titre, la société A explique qu’il ressortirait non seulement des comptes annuels de la société E pour les années 2006 à 2018, lesquels seraient publics et consultables en ligne, mais également d’un tableau reprenant les résultats réalisés par la société E au cours de cette même période, que celle-ci aurait réalisé, « pour chaque année ou presque », des pertes commerciales importantes qui s’expliqueraient, de même que son manque de trésorerie, pour trois raisons.

20 La première raison résiderait dans la crise financière mondiale de 2008 qui aurait frappé le marché du bois. Les principaux scieurs scandinaves et allemands qui auraient jusqu ’alors exporté essentiellement leurs productions à l’international, auraient alors changé de modèle économique et écoulé leurs produits quasi exclusivement sur le marché européen. En raison de l’offre et de la demande et du positionnement de la société E sur le marché européen, celle-ci aurait été contrainte de maintenir ses prix de vente malgré l’évolution constante des prix à la consommation et à la production, ce qui aurait entraîné une réduction de ses marges bénéficiaires. A cet égard, la société A joint un tableau qui reprendrait l’évolution des prix de ventes de la société E pour les années 2007 et suivantes.

La deuxième raison serait liée à la situation de monopole quant aux tarifs qu’auraient appliqué les Länder de Rhénanie du Nord-Westphalie, Baden-Wurtemberg, Rhénanie-Palatinat et Thuringe sur leur propre territoire au début des années 2000, qui aurait fait l’objet d’investigations de l’Office Général des Cartels pour les années 2001 à 2009 lequel aurait demandé en 2009 aux Länders précités de prendre des engagements fermes pour revenir à un marché de pleine concurrence. Malgré cela, aucun changement tarifaire n’aurait eu lieu, ce qui aurait conduit en 2015 à une décision dudit Office concluant à « une organisation de distribution de « bois » centralisée (antitrust) », qui aurait été confirmé par la Cour d’appel de Düsseldorf en date du 15 mars 2017. Le fait pour la société E d’acheter sa matière brute à un prix supérieur au prix de marché, aurait également entrainé une réduction « subie » de ses marges bénéficiaires. Au regard de la complexité de la procédure et eu égard au nombre de Länder et de victimes impliqués, la société E serait, à l’instar des autres parties, encore à ce jour en train de déterminer la manière la plus appropriée pour réagir et faire valoir ses droits.

La troisième et dernière raison qui expliquerait les pertes commerciales et le manque de trésorerie de la société E, serait liée à un litige opposant la société E aux sociétés G et H, ainsi qu’au Land de Rhénanie du Nord-Westphalie. En effet, sur base d’un contrat cadre qui aurait été conclu entre la société E et les trois parties précitées, celles-ci se seraient engagées à mettre à disposition de la société E des quantités prédéfinies de bois pour la période de 2007 à 2012. Par la suite, la société E aurait effectué d’importants investissements nécessaires pour lui permettre de traiter les quantités supplémentaires de bois qui étaient censées lui être livrées.

La société A invoque à cet égard un tableau comparatif reprenant les quantités qui seraient dues conformément au contrat cadre par rapport aux livraisons effectivement reçues pour la période 2007 à 2012 pour soutenir que ces engagements de livraisons n’auraient toutefois pas été respectés. La société E aurait de ce fait intenté une action contre les parties précitées afin d’obtenir un dédommagement de l’ordre de … millions d’euros, mais un jugement du Landgericht Münster du 16 avril 2015 aurait déclaré irrecevable la requête de la société E sur base du droit procédural allemand, la société A précisant que ce serait précisément cette décision de justice qui serait l’élément objectif qui aurait causé la première correction de valeur décidée par le conseil d’administration de la société B sur sa créance contre la société E dans ses comptes annuels pour l’année 2014.

La société A conclut que la situation spécifique sur une période de temps donnée, en l’occurrence les années 2006 à 2018, concernant un acteur, soit la société E, devrait prévaloir sur l’évolution générale, sur la même période, du secteur d’activités concerné, en l’espèce, le marché européen du bois, pour apprécier la capacité effective de cet acteur, la société E, à réaliser des bénéfices et payer ses dettes, y compris la créance, de sorte que l’argument de 21 l’administration consistant à reprocher à la société B d’avoir « laissé » la créance à la disposition de la société E ne serait pas pertinent.

Par rapport au reproche du directeur d’une absence de conclusion d’un contrat de prêt en vue de matérialiser la créance litigieuse, la société A admet que la créance ne serait pas documentée par un contrat de prêt, mais estime néanmoins que la pratique de marché entre clients et fournisseurs, en l’espèce entre la société E et la société B, ne serait pas de conclure un contrat de prêt pour une créance commerciale, telle que celle en l’espèce, « même si par la force des choses », cette créance serait amenée à devenir une créance long-terme, la société A argumentant encore qu’aucune base légale ne prévoirait expressément l’obligation de documenter une créance.

Elle met cependant en avant le fait qu’au moment où la société I, qui serait la banque de la société E, aurait « imposé » aux créanciers de cette dernière, dont ferait partie la société B, une subordination de leurs créances commerciales à la sienne, la société B aurait bien conclu un contrat de subordination avec la société E, faute de quoi la société I aurait stoppé sa relation d’affaires avec la société E ce qui aurait conduit à une situation d’ébranlement de de crédit, voire la faillite de celle-ci.

L’approche de la société B consisterait dès lors, selon la société A, à conclure des contrats uniquement lorsque cela serait nécessaire, ce qui n’aurait pas été le cas pour la créance litigieuse, d’autant plus que la société E n’aurait jamais contesté son existence et son montant.

La société A conteste ensuite le reproche du directeur suivant lequel la société B n’aurait perçu que 5,5% des montants qui lui seraient dus par la société E au 31 décembre 2011, alors que selon elle, il n’y aurait pas lieu de se placer au 31 décembre 2011 dans la mesure où l’année d’imposition litigieuse serait l’année 2015.

Elle se base d’abord sur un tableau d’évolution du chiffre d’affaires réalisé par la société B et la société E au cours des années susmentionnées pour soutenir que la relation commerciale de la société B avec la société E aurait généré un chiffre d’affaires cumulé total de … euros au titre des années 2006 à 2019, et sur un extrait de compte indiquant une date de comptabilisation du 15 novembre 2018 pour soutenir que le montant effectif de l’encaissement par la société B aurait été de … euros, soit un taux d’encaissement approximatif de 50%.

La société A fait ensuite valoir que la relation d’affaires entre la société B et la société E aurait également conduit à rentabiliser au mieux les investissements en matériel roulant de la société B. Précisant qu’une livraison se composerait d’un aller et d’un retour, elle explique que dans le secteur du transport, une optimisation du matériel roulant nécessiterait de maximiser le taux de remplissage et que pour ce faire, il serait d’usage que les transporteurs organisent les trajets « aller » pour un client de telle façon à pouvoir, dans la mesure du possible, prendre en charge des livraisons pour d’autres clients sur le trajet du «retour ». La société E, qui serait située à proximité de plusieurs autres clients de la société B, aurait permis d’optimiser son activité de transport auprès de ses clients « locaux » en servant le cas échéant également la société E lors des trajets « aller » et/ou « retour ». Fort d’une relation d’affaires existant depuis 2006 et grâce à des prestations de transport réalisées pour la société E, la société B aurait ainsi pu réaliser, sur la période de 2006 à 2019, un chiffre d’affaires avec ses clients « locaux », comparable à celui réalisé avec la société E, soit approximativement … 22 millions euros, encaissé à hauteur d’approximativement 50%. Cette relation d’affaires existant entre la société E et la société B aurait également eu pour effet d’augmenter la rentabilité du chiffre d’affaires de cette dernière avec ses clients « locaux», chiffre d’affaire qui se situerait dans le même ordre de grandeur. La société A poursuit en expliquant qu’il y aurait donc eu un intérêt commercial non-discutable pour la société B de travailler avec la société E. Pour le surplus, la société A indique que la société B aurait eu une créance commerciale née de prestations de transport de plusieurs millions d’euros à l’encontre de la société anonyme D, ci-après désignée par la « société D », un client belge de la société B, qui serait elle aussi active dans le secteur du bois et de la cogénération. A un moment donné, cette créance aurait également fait l’objet d’une correction de valeur correspondant à 100% de son montant, en raison de la situation financière difficile traversée par la société D. Toutefois, lorsque lesdites difficultés se seraient résorbées, la société D aurait honoré en totalité sa dette vis-à-vis de la société B. Les attentes de la société B seraient bien entendues les mêmes en ce qui concerne la créance à l’égard de la société E.

La société A expose ensuite les trois raisons pour lesquelles la société B n’aurait pas diligenté des poursuites judiciaires à l’encontre de la société E, tel que l’administration le lui reproche. Cette absence de poursuites s’expliquerait en premier lieu par la perte d’emplois que ces poursuites auraient pu générer au niveau de la société E, étant précisé qu’elle serait un des leaders du bois dans la commune de … en Allemagne et emploierait en moyenne plus de 50 salariés. La société A reproche au directeur d’avoir rejeté cet argument par un jugement de valeur, sans se positionner sur le fond, en amalgamant la volonté de la société B de préserver les emplois de la société E avec la procédure judiciaire visant le « groupe A » en Belgique, partant d’avoir violé de façon flagrante le principe de la présomption d’innocence. La société A précise que ce serait dans un souci de transparence et de manière spontanée qu’elle joindrait au présent recours une opinion émise par ses conseils belges sur l’état de cette procédure judiciaire belge en avril 2020. L’absence de poursuites judiciaires diligentées contre la société E s’expliquerait en deuxième lieu par la prise de risques commerciaux qui serait de l’essence même de l’entreprenariat. La société A indique que ce serait justement ce que la société B aurait fait et ferait toujours « en servant pour la société E », car l’avenir du bois et de la cogénération serait vu comme une activité à fort potentiel de développement correspondant aux aspirations de la société moderne, partant, devant permettre à cette dernière de réaliser des bénéfices et d’honorer ses dettes à moyen terme. Elle poursuit en indiquant que le procès en situation monopolistique intenté par la société E et les autres sociétés concernées contre les Länder précités aurait lui-aussi son importance puisque les montants en jeu, en cas d’issue favorable pour la société E, lui permettraient d’honorer ses dettes en totalité ou du moins pour une partie non-négligeable, tout en précisant qu’une action en justice contre la société E avant d’avoir le résultat de ce procès ne serait et n’aurait pas été avisé. En troisième et dernier lieu, la société A fait valoir que si la société B avait agi judiciairement contre la société E, elle se serait elle-même exposée judiciairement en raison de la subordination contractuelle de sa créance à celle de la société I.

En ce qui concerne enfin le reproche du directeur tenant au fait que la société B aurait renoncé au recouvrement de sa créance, la société A souligne la différence juridique, comptable et fiscale qu’il y aurait entre, d’une part, « renoncer au recouvrement » d’une créance, ce que la société B n’aurait pas fait, et, d’autre part, tel que cela aurait été fait en l’espèce, « corriger » une créance dans ses comptes annuels pour les années 2014, 2015, 2016, et 2017 par application du principe comptable de prudence, puisque la société E aurait été exposée à des difficultés 23 financières pour les raisons pré-mentionnées impactant ainsi sa capacité de remboursement et entraînant ainsi une dépense déductible par application du principe fiscal d’imparité. La société A réitère son affirmation selon laquelle la société B avait mis en œuvre un recouvrement, elle se serait confrontée à la contrainte juridique provenant de la subordination de ladite créance envers la créance bancaire de la société I sur la société E.

En conclusion, la société A soutient que la société B n’aurait pas « laissé » la créance litigieuse à disposition de la société E durant des années, « mais [aurait], en tenant compte de l’ensemble des tenants et aboutissant décrits ci-avant », agi comme un gestionnaire diligent et consciencieux tendant à assurer la rentabilité de son exploitation commerciale. Etant donné que la société B aurait commis un acte normal de gestion, la seconde question qui se poserait sera celle de savoir si la correction de valeur opérée sur la créance aurait dû être enregistrée au titre de l’année 2015 et si le quantum retenu serait correct.

A ce titre, la société A réitère que le directeur aurait mélangé des concepts et mécanismes juridiques différents ayant des effets différents et pour lesquels une application cumulative ne serait pas possible, par le fait de reprocher à la société B d’avoir « corrigé » la créance, puis d’avoir « renoncé au recouvrement » et ensuite d’avoir « renoncé » à la créance elle-même. Le seul mécanisme qui aurait été appliqué dans le cas d’espèce serait une correction de valeur sur la créance à l’égard de la société E sur base des principes comptable de prudence et fiscal d’imparité, de sorte qu’il conviendrait de déterminer si ces deux principes imposaient de procéder à ladite correction de valeur.

A cet égard, la société A rappelle d’abord que la situation financière de la société E aurait été difficile en 2015 et même antérieurement à cette année. Elle poursuit en indiquant que son réviseur d’entreprises agréé luxembourgeois en charge de l’audit de ses comptes consolidés financiers se serait prononcé, dans des rapports relatifs aux années 2013, 2014 et 2015, qui seraient tous les trois publics et consultables en ligne20 et dont elle cite des extraits, sur les difficultés de trésorerie frappant la société E. La société A relève, en particulier, que le réviseur aurait, d’une part, constaté que seul 50% de la créance litigieuse aurait été corrigé au 31 décembre 2015, et, d’autre part, réservé sa certification des comptes consolidés, alors que si ladite correction avait été plus importante, il se serait contenté, d’après la société A, d’une observation, qualifiée ou non, ou n’aurait pas fait d’observation du tout. Elle ajoute qu’au fil des années de 2013 à 2015, son réviseur, qui serait soumis aux principes et règles de l’Institut des Réviseurs d’Entreprises luxembourgeois et serait un professionnel en la matière, aurait commencé par inviter puis à « pousser » le conseil d’administration de la société B à acter une correction de valeur sur la créance litigieuse. L’avis de son réviseur laisserait à cet égard sous-

entendre que pour les années 2014 et 2015, les corrections appliquées n’auraient pas été suffisamment importantes. La société A rappelle également que ce serait suite à la décision judiciaire rendue au détriment de la société E dans le litige l’opposant aux sociétés G et H, précitées et au Land de Rhénanie du Nord-Westphalie, que le conseil d’administration de la société B aurait décidé de procéder à la première correction de valeur dans ses comptes annuels pour l’année 2014 établis et approuvés au courant de l’année 2015. La société A fait encore valoir qu’eu égard à la similarité des principes comptable de prudence et fiscal d’imparité, lequel ne contiendrait pas de règle dérogatoire à celles applicables comptablement pour les corrections de valeur sur créances, la charge au titre de la correction de valeur litigieuse devrait être actée 20 « www.lbriu » (sic) 24 dans les comptes annuels de la société B pour l’année 2015 et qu’en conséquence, une dépense d’exploitation y relative devrait être déduite dans la déclaration fiscale de cette dernière pour l’année 2015.

Face au reproche du directeur que la créance de la société B serait toujours maintenue à sa valeur nominale au bilan de la société E, la société A rappelle qu’une « créance/dette » porterait sur une relation entre le créancier et le débiteur. Or, si le principe comptable de prudence chez le créancier consisterait, lorsqu’il ferait face à une insolvabilité de son débiteur, à corriger à due concurrence sa créance à l’actif du bilan, ce qui aurait été le cas de la créance litigieuse, le même principe de prudence lui imposerait, même en état d’insolvabilité totale, de maintenir sa dette envers le créancier à la valeur nominale au passif de son bilan, car l’obligation légale du débiteur serait de payer le créancier jusqu’au dernier centime, indépendamment de sa capacité financière. La conclusion du directeur serait dès lors dépourvue de fondement.

Par rapport au reproche du directeur suivant lequel la société B aurait préféré amortir la créance litigieuse sur une durée de quatre ans au lieu de déterminer la valeur d’exploitation tel que le prescrirait l’article 23 LIR, la société A fait valoir que la décision du conseil d’administration de la société B visant à corriger la créance litigieuse à concurrence de 25% par année entre 2014 à 2017, serait une décision de gestion qui aurait été prise en bon père de famille. Elle admet qu’ « [é]ventuellement, il aurait peut-être fallu passer une ou des corrections annuelles plus importantes par référence aux diverses remarques du [r]éviseur », mais considère que « la seule erreur manifeste d’appréciation » qui aurait pu être faite par le conseil d’administration de la société B « aurait été de ne pas avoir passé la moindre correction de valeur ». La société A rappelle que la créance litigieuse correspondrait à des créances commerciales, c’est-à-dire du chiffre d’affaires enregistré au compte de pertes et profits de la société B et qui serait pris en compte comme revenu pleinement imposable dans le revenu fiscal de celle-ci pour les années d’exploitation concernées. D’après la société A, dans la mesure où la créance litigieuse serait devenue douteuse par application des principes comptables et fiscaux précités, la société B devrait pouvoir « neutraliser » ses revenus antérieurs, lesquels n’auraient pas effectivement conduit à un enrichissement, en raison et à hauteur de l’absence d’encaissement.

Finalement, la société A invoque le principe de confiance légitime qui protègerait l’administré contre les changements brusques et imprévisibles de l’administration en lui reconnaissant le droit de se fier à un comportement habituellement adopté par cette dernière ou à des engagements pris par elle, telle que cela ressortirait en particulier d ’un arrêt de la Cour administrative21. Tout en indiquant avoir conscience que l’administration pourrait accepter un traitement fiscal une année donnée et le refuser une autre année, elle fait valoir qu’une correction de valeur d’un montant identique à la correction de valeur litigieuse, enregistrée dans le chef de la société B sur la créance en question pour l’année 2014, aurait été acceptée par l’administration par l’émission à son égard des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal pour l’année 2014 en conformité avec sa déclaration fiscale. Dès lors, elle aurait pu légitimement se baser sur cette acceptation du bureau d’imposition relative au traitement fiscal de la 21 « Cour adm. 28 av[r]il 2015, n° 35430C du rôle, Pas. adm. 2017, V° Lois et Règlements, n° 34 et les autres références y citées. » 25 correction de valeur pour l’année 2014, qui correspondrait à 25% du montant de la créance litigieuse, pour adopter le même modus operandi en ce qui concerne l’année 2015.

La société A conclut que la correction de valeur serait nécessaire conformément aux principes comptables de prudence et fiscal d’imparité et qu’en conséquence, elle serait déductible du résultat fiscal de la société B respectivement du résultat fiscal du « Groupe » dans son chef.

En ce qui concerne la troisième question, à savoir celle de l’existence d’une distribution cachée de bénéfices, la société A fait valoir qu’elle n’aurait tiré aucun avantage, en tant qu’actionnaire de la société B, d’un abandon de créance par celle-ci de sa créance contre la société E.

Elle ajoute que si une distribution cachée de bénéfices devait être retenue, une telle distribution devrait suivre la chaîne des participations de la société B vers elle et l’administration pourrait aisément constater la satisfaction des conditions de l’exemption de la retenue d’impôt à la source sur base du régime d’imposition dit des sociétés mère-filiales prévu à l’article 147 LIR.

Pour le surplus, la société A s’étonne que sur base de ces éléments, le bureau d’imposition aurait émis un bulletin de retenue d’impôt sur le revenu de capitaux pour l’année 2015 en date du 26 août 2020, alors que pour l’année 2016 au cours de laquelle une nouvelle correction de valeur aurait été enregistrée chez la société B de la même façon, un tel bulletin n’aurait pas été émis, démontrant un manque de cohérence de l’administration.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement fait d’abord valoir que les livres de la société A renseigneraient des créances dont la durée résiduelle serait supérieure à un an qui comprendraient la créance envers la société E d’un montant de … euros.

Il explique qu’au lieu de déterminer la valeur d’exploitation, tel que le prescrirait l’article 23, alinéa 3 L.I.R, la société A aurait préféré amortir la créance en question sur une durée de quatre ans en procédant à une première correction de valeur de … euros au cours de l’année 2014, suivies de trois autres corrections de valeurs au cours de années 2015, 2016 et 2017, chacune d’un montant de … euros, de sorte à ce que la créance envers la société E aurait été ramenée à zéro dans les comptes annuels au 31 décembre 2017, avec comme conséquence, une réduction du résultat à transférer à la société A.

Quant aux affirmations de la société A selon lesquelles elle n’aurait pas mis ou laissé à disposition de la société E des millions d’euros et affirmerait que la créance litigieuse trouverait son origine dans des prestations de transport effectuées par la société A au profit de la société E, le délégué du gouvernement rappelle d’abord que l’Etat reprocherait à la société A d’avoir presté pour … euros sans insister autrement sur des paiements et/ou garanties.

Il considère que le fait pour la société A de se prévaloir de la situation financière difficile de la société E à partir de 2006 en soulignant qu’elle n’aurait subi que des pertes conformément à des chiffres publiés officiellement, ne militerait pas en sa faveur, mais plutôt en sa défaveur dans la mesure où elle n’expliquerait pas pourquoi elle aurait presté pour … euros en faveur d’un tiers notoirement insolvable sans exiger des paiements au comptant ou 26 garanties, le délégué du gouvernement précisant que tout autre représentant tiers se serait bien gardé d’agir ainsi et aurait évité que sa responsabilité ne puisse être mise en cause.

La tentative d’expliquer pour quelle raison la société E ne serait depuis quasiment 15 ans que déficitaire ne serait pas pertinente selon le délégué du gouvernement. A titre superfétatoire, il fait sienne l’argumentation du directeur selon laquelle il se dégagerait, d’après les informations disponibles en ligne22, que le prix du bois en Europe aurait atteint un niveau record dans le premier quart de l’année 2014, de sorte que l’affirmation selon laquelle le marché du bois se serait retourné durant les années 2007 à 2009 serait dénuée de pertinence, voire même fallacieuse.

Quant au fait que la société A n’aurait encaissé que 5,5% du montant de la créance litigieuse et n’aurait absolument rien fait pour encaisser le solde, le délégué du gouvernement rejette les explications de la société A tenant à des considérations humanitaires, et ce eu égard aux procédures pénales dont Monsieur F ferait l’objet. A en croire les articles de presse, celui-ci n’aurait, selon le délégué du gouvernement, aucun scrupule à exploiter les gens et serait peu respectueux de la réglementation sociale, de sorte qu’il ne serait pas plausible qu’il ait voulu préserver des emplois, le délégué du gouvernement soulignant qu’une condamnation pécuniaire n’aurait aucune conséquence au niveau des licenciements. Le délégué du gouvernement estime que si une condamnation avait pu être obtenue après avoir diligenté des poursuites contre la société E, la société A aurait au moins pu tenter de l’exécuter et, en cas d’échec, décider de sa faillite ou non.

Le délégué du gouvernement considère, par ailleurs, que les termes employés dans le rapport du réviseur d’entreprise pour l’année 2013 seraient restés lettre morte et seraient en contradiction avec l’inaction judicaire.

Il rejette également le moyen tiré de la violation de la confiance légitime en se fondant sur deux jugements du tribunal administratif et en affirmant qu’une acceptation de la correction de valeur en 2014 ne serait pas de nature à créer un droit acquis dans le chef de la société A, alors qu’un droit acquis ne se concevrait qu’en présence d’un droit subjectif et que le principe de l’annualité de l’impôt justifierait que les bases d’imposition du chef d’une année d’imposition seraient à déterminer indépendamment de celles retenues pour une année d’imposition antérieure.

Dans son mémoire en réplique, la société A reproche au délégué de ne pas avoir tenu compte de ses explications par rapport (i) au mode opératoire choisie par la société B concernant l’application de la correction de valeur. (ii) au fait que la société B aurait presté pour … euros en faveur d’un tiers notoirement insolvable sans exiger des paiements au comptant ou garanties, (iii) à l’évolution du marché du bois pendant les années litigieuses et (iv) au taux d’encaissement de 5,5% du montant total de la créance, de sorte à réitérer sa position à cet égard. Par ailleurs, elle considère que le délégué du gouvernement aurait accepté sa contre-argumentation en ne reprenant pas la position du directeur concernant (v) la « mise à disposition » de la créance litigieuse par la société B à la société E, (vi) l’absence de contrat de prêt matérialisant la créance litigieuse et (vii) le fait que la créance serait toujours maintenue à sa valeur nominale dans le bilan de la société E. Pour le surplus, la société A prend position 22 https://woodprices.com/sawlogs-price-indices/ 27 par rapport aux arguments développés par le délégué du gouvernement dans son mémoire en réponse.

Par rapport aux développements du délégué du gouvernement selon lesquels la société E aurait accumulé des dettes pour un montant de … euros au cours des années 2007 à 2013, la société A renvoie à son recours et notamment à ses pièces qui démontreraient que le chiffre d’affaires que la société B aurait généré avec la société E au titre des années 2006 à 2019 serait de … euros, au lieu des prétendus … euros de « dettes/chiffre d’affaires sur la période tronquée de 2007 à 2013 » qu’évoquerait le directeur et qui seraient repris par le délégué du gouvernement. Pour éviter tout doute, la société A ajoute que la période de référence serait l’année 2006, qui correspondrait au commencement de la relation d’affaires entre la société B et la société E, à l’année 2019, soit la dernière année sociale clôturée lors du commencement du présent litige.

La société A reproche au délégué du gouvernement de méconnaître le principe de présomption d’innocence dans la mesure où il aurait admis avoir fondé son opinion sur la procédure pénale en cours en Belgique concernant le « Groupe A » sur base de ce qu’il aurait pu lire dans des articles de presse. Elle estime que ceux-ci auraient dû être joints à son mémoire en réponse pour lui permettre de se défendre. Or, sans la copie desdits articles, il ne serait pas clair s’il s’agirait du journal télévisé ou d’une autre source d’informations médiatiques. Pour couper court aux rumeurs, la société A produit une opinion des avocats belges du « Groupe A » intervenant dans la procédure pénale en cause et fait valoir qu’une opinion de professionnels soumis à une réglementation interne devrait a minima être vue comme une source d’informations plus sérieuse qu’un ou plusieurs articles de presse.

En réplique à l’affirmation du délégué selon laquelle une condamnation pécuniaire de la société E n’aurait eu aucune conséquence au niveau des licenciements, la société A affirme que son « management » et celui de la société B ne partageraient pas ce point de vue théorique, lequel aurait au contraire estimé qu’une telle condamnation pécuniaire aurait eu un impact significatif au niveau des licenciements chez la société E, alors qu’il serait évident qu’une société en difficulté financière devrait débourser de l’argent dans une telle hypothèse, augmentant ainsi la probabilité d’une faillite et partant de licenciements économiques. La société A rappelle que la société B aurait fait face à une contrainte juridique provenant de la subordination de la créance litigieuse envers la créance bancaire de la société I sur la société E et ajoute que si la société B avait agi et obtenu la condamnation de la société E, comme le suggèrerait le délégué du gouvernement, la société B aurait non seulement perçu aucun paiement, sinon provoqué une probable faillite de la société E, mais se serait en plus exposée à une condamnation en raison d’une violation de ses obligations contractuelles.

La société A rejette, par ailleurs, les développements du délégué tendant à dire que les termes employés dans le rapport du réviseur d’entreprise pour l’année 2013 seraient restés lettre morte et en contradiction avec l’inaction judiciaire. Tout en renvoyant à ses observations contenues dans sa requête, elle indique qu’elle n’aurait rien fait d’autre que de corriger la créance litigieuse conformément à (i) l’observation faite par le réviseur dans son rapport, (ii) son observation qualifiée et (iii) son opinion avec réserve.

Finalement, la société A précise que le principe de confiance légitime auquel elle aurait fait référence permettrait d’éviter des inconsistances dans les impositions d’un contribuable, 28 reprochant par la même au délégué du gouvernement de se contenter de « copier-coller » des décisions des juridictions administratives au lieu de prendre position sur son argumentation.

Analyse du tribunal Force est de constater de prime abord que par sa décision du 7 août 2020 déférée dans le cadre du recours inscrit sous le numéro 45181, le directeur a confirmé la qualification de distributions cachées retenue par le bureau d’imposition Diekirch dans le chef de la société B, au titre de l’année d’imposition 2015, au sujet d’une correction de valeur comptabilisée par elle sur une partie du montant d’une créance commerciale qu’elle détient à l’égard de la société E.

Bien que ladite correction de valeur ait été rejetée – et la distribution cachée de bénéfice retenue – dans le chef de la société B, le bien-fondé de la décision directoriale précitée sera analysé ci-

après dans le chef de la société A ayant introduit le présent recours, dans la mesure où cette dernière est la société mère intégrante de la société B intégrée au sens des articles 164bis LIR.

Il échet ensuite de relever que si la société A reproche au directeur et au délégué du gouvernement d’avoir adopté des positions contradictoires et usé de part et d’autre d’une terminologie inadéquate au sujet de la correction de valeur qui l’aurait mise dans l’impossibilité de cerner concrètement leurs reproches, il n’en reste pas moins que suivant le dernier état de ses conclusions, le délégué du gouvernement argumente en substance que la société B aurait renoncé à obtenir le paiement d’une partie de sa créance à hauteur de … euros litigieux en l’espèce, de sorte qu’elle aurait, de l’entendement du tribunal, consenti pour l’année d’imposition 2015 litigieuse un abandon partiel de créance à la société E, situation qu’il qualifie de distribution cachée de bénéfices.

Face à cette argumentation du délégué du gouvernement, la société A soutient, quant à elle, en substance que la société B aurait légitimement procédé à la comptabilisation d’une correction de valeur, sans pour autant renoncer à sa créance, en tout ou partie, et qu’il n’y aurait par conséquent pas de distribution cachée de bénéfices.

Il s’ensuit que la question qui se pose en l’espèce est celle de savoir si le directeur a valablement pu retenir, en confirmant en cela le bureau d’imposition Diekirch, l’existence d’une distribution cachée de bénéfices dans le chef de la société B au titre de l’année d’imposition 2015 au seul motif que cette dernière a consenti un abandon partiel de créance, respectivement opéré une correction de valeur d’un montant de … euros sur le montant total de la créance détenue à l’égard de la société E.

Dans le cadre du recours ainsi tracé, le tribunal est d’abord amené à préciser les principes régissant la déduction d’une correction de valeur, étant donné qu’il est constant en cause que le directeur a justifié l’existence d’une distribution cachée de bénéfices en rejetant la déduction d’une correction de valeur opérée par la société B sur une partie de la créance qu’elle détient contre la société E.

Les corrections de valeur regroupent deux notions comptables distinctes à savoir, d’un côté, l’amortissement lequel est censé refléter la dépréciation économique irréversible d’un élément d’actif résultant notamment de son usage, du temps ou de changements techniques, et, de l’autre côté, les corrections pour dépréciation, qui ont pour vocation de constater une diminution de la valeur d’un poste d’actif dont les effets ne sont pas jugés irréversibles. Le 29 régime des corrections pour dépréciation, seul pertinent en l’espèce, vise les immobilisations non amortissables, ainsi que les éléments de l’actif circulant23, telles que les créances.

Il y a dès lors lieu d’écarter d’emblée l’argumentation de la partie étatique consistant à reprocher à la société B d’avoir « amorti » la créance détenue contre la société E en opérant quatre corrections de valeur successives sur la créance au cours des années 2014, 2015, 2016 et 2017, alors qu’un amortissement ne se conçoit pas en matière de créances, étant encore précisé que le tribunal ne se trouve saisi que de la seule année d’imposition 2015.

Les corrections de valeur de l’actif circulant sont visées par l’article 61, paragraphe (1) de la loi modifiée du 19 décembre 2002 concernant le registre de commerce et des sociétés ainsi que la comptabilité et les comptes annuels des entreprises et modifiant certaines autres dispositions légales, ci-après désignée par la « loi du 19 décembre 2002 », aux termes duquel :

« a) Les éléments de l’actif circulant doivent être évalués au prix d’acquisition ou au coût de revient, sans préjudice des points b) et c).

b) Les éléments de l’actif circulant font l’objet de corrections de valeur afin de donner à ces éléments la valeur inférieure du marché ou, dans des circonstances particulières, une autre valeur inférieure qui est à leur attribuer à la date de clôture du bilan.

c) L’évaluation à la valeur inférieure visée sous b) et c) ne peut pas être maintenue si les raisons qui ont motivé les corrections de valeur ont cessé d’exister.

d) Si les éléments de l’actif circulant font l’objet de corrections de valeur exceptionnelles pour la seule application de la législation fiscale, il y a lieu d’en indiquer dans l’annexe le montant dûment motivé. ».

C’est en vertu du principe de prudence, se retrouvant à l’article 51, paragraphe (1), point c) de la prédite loi du 19 décembre 2002, d’après lequel « seuls les bénéfices réalisés à la date de clôture du bilan peuvent y être inscrits », et qui impose qu’il soit « tenu compte de tous les passifs qui ont pris naissance au cours de l’exercice ou d’un exercice antérieur, même si ces passifs sont connus qu’entre la date de clôture du bilan et la date à laquelle il est établi » ainsi que « des dépréciations, que l’exercice se solde par une perte ou par un bénéfice », qu’il y a lieu de constater une correction pour la dépréciation des créances dont le recouvrement paraît compromis24.

En ce qui concerne la prise en compte d’un point de vue fiscal d’une telle correction de valeur effectuée sur le plan comptable, il convient de prime abord de se référer à l’article 23, alinéa (1) LIR lequel pose la règle générale que « l’évaluation des biens de l’actif net investi doit répondre aux règles prévues aux alinéas suivants et, en ce qui concerne les exploitants obligés à la tenue d’une comptabilité régulière, aux principes d’une comptabilité pareille ».

L’article 23, alinéa (3) LIR, quant à lui, pose à l’égard de tous les biens de l’actif autres que les immobilisations amortissables, et partant tant aux immobilisations financières, non amortissables, et aux créances de l’actif circulant, la règle qu’ils « sont à évaluer au prix d’acquisition ou de revient. Lorsque la valeur d’exploitation y est inférieure, l’évaluation peut se faire à cette valeur inférieure. Lorsque la valeur d’exploitation de biens ayant fait partie de l’actif net investi à la fin de l’exercice précédent est supérieure à la valeur retenue lors de la 23 Denis Colin, Précis de droit comptable, édition 2020, Legitech, page 39.

24 Ibidem, page 61.

30 clôture de cet exercice, l’évaluation peut se faire à la valeur d’exploitation, sans que toutefois le prix d’acquisition ou de revient puisse être dépassé ».

L’article précité s’inspire du principe de prudence en autorisant l’exploitant à évaluer une créance déterminée à une valeur d’exploitation inférieure à la date de clôture de l’exercice, valeur qui est donc inférieure à celle du jour de la conclusion de l’opération.

Une telle correction de valeur de l’actif circulant constitue une diminution de la valeur attribuée à une créance par rapport à sa valeur nominale pour tenir compte d’un risque concret de non-recouvrement et qui anticipe ainsi partiellement ou intégralement sur un exercice d’exploitation antérieur la perte définitive de cet élément de l’actif en cas de constat d’une impossibilité définitive de recouvrement au cours d’un exercice d’exploitation postérieur25.

La comptabilisation d’une correction de valeur pour risque de non-recouvrement d’une créance sur base du principe de prudence se trouve partant soumise à la condition de l’existence d’une certaine probabilité d’une irrécouvrabilité qui doit avoir existé à la date de clôture de l’exercice social en question. La cause de la constitution d’une telle provision consiste nécessairement dans un élément factuel qui fonde une certaine probabilité d’irrécouvrabilité de la créance et non pas dans la naissance de la créance-même, de manière que l’ouverture du droit à la constitution d’une correction de valeur doit être rattachée ratione temporis à cet événement factuel et non pas à la naissance de la créance26.

En l’absence de dispositions légales contraires, il convient de retenir que conformément au principe du raccrochement du bilan fiscal au bilan commercial posé par l’article 40, alinéa (1) LIR, aux termes duquel « Lorsque les prescriptions régissant l’évaluation au point de vue fiscal n’exigent pas une évaluation à un montant déterminé, les valeurs à retenir au bilan fiscal doivent être celles du bilan commercial ou s’en rapprocher le plus possible dans le cadre des prescriptions prévisées, suivant que les valeurs du bilan commercial répondent ou ne répondent pas aux mêmes prescriptions. […] », les règles du droit comptable sont en principe à respecter en l’espèce27.

Il convient enfin de préciser qu’aux termes de l’article 22, alinéa (2) LIR « la situation à la date de la clôture de l’exercice d’exploitation est déterminante pour l’évaluation en fin d’exercice ; l’exploitant pourra tenir compte des faits et circonstances qui ont existé à cette date et dont l’existence ne s’est révélée qu’ultérieurement, mais avant la date d’établissement du bilan ».

Force est ensuite au tribunal de tracer le régime applicable aux distributions cachées de bénéfices prévu à l’article 164 LIR qui dispose que : « 1) Pour déterminer le revenu imposable, il est indifférent que le revenu soit distribué ou non aux ayants droit.

2) Sont à considérer comme distribution dans le sens de l’alinéa qui précède, les distributions de quelque nature qu’elles soient, faites à des porteurs d’actions, de parts 25 Voir en ce sens Cour adm., 10 novembre 2015, n° 35818C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Impôts, n°181.

26 Ibidem. voir également Cour adm., 12 octobre 2021, n°45260C du rôle, disponible sur le site jurad.etat.lu 27 Voir notamment Cour adm., 10 novembre 2015, n° 35818C du rôle ; Trib. adm., 13 janvier 2021, n° 43436 du rôle ; Trib. adm., 13 octobre 2020, n° 42653 du rôle non réformé sur ce point par Cour adm., 12 octobre 2021, n° 45260C 31 bénéficiaires ou de fondateurs, de parts de jouissance ou de tous autres titres, y compris les obligations à revenu variable donnant droit à une participation au bénéfice annuel ou au bénéfice de liquidation.

3) Les distributions cachées de bénéfices sont à comprendre dans le revenu imposable.

Il y a distribution cachée de bénéfices notamment si un associé, sociétaire ou intéressé reçoit directement ou indirectement des avantages d’une société ou d’une association dont normalement il n’aurait pas bénéficié s’il n’avait pas eu cette qualité ».

L’essence de la notion de distribution cachée doit être dégagée à partir du principe posé par l’article 164, alinéa (1) LIR suivant lequel les distributions ne peuvent pas réduire le revenu imposable. Ainsi, le revenu à soumettre à l’impôt doit correspondre à celui réalisé par la collectivité soumise à l’impôt sur le revenu des collectivités agissant en tant qu’acteur indépendant dans une logique économique impliquant qu’elle entre en relation avec d’autres acteurs économiques sur une base synallagmatique en recherchant un équilibre entre ses engagements et la contre-prestation de l’autre partie. Toute forme de répartition de revenus aux actionnaires ou associés de la collectivité ne peut être opérée qu’à partir du revenu déjà préalablement soumis à l’impôt sur le revenu des collectivités. L’article 164 LIR opère à cette fin une distinction entre la sphère de réalisation des revenus, qui détermine le revenu devant être soumis à imposition, et celle d’utilisation ou de distribution des revenus qui ne doit pas influer sur le revenu imposable.

Une distribution cachée de bénéfices s’analyse en une opération ayant l’apparence d’être intervenue dans le cadre de la réalisation de revenus, mais dont l’examen de la substance permet de dégager sa qualification réelle sous la forme d’une opération de distribution trouvant son fondement dans l’allocation d’un avantage direct ou indirect à un associé, sociétaire ou intéressé. L’avantage accordé par la société doit non seulement entraîner soit une diminution de l’actif (“Vermögensminderung”) soit un défaut d’accroissement de l’actif (“verhinderte Vermögensmehrung”) dans son chef, mais également, tout comme les distributions de revenus dans les formes prévues par le droit des sociétés, avoir la nature d’une recette pouvant être qualifiée de revenu de capitaux mobiliers28.

Ces principes n’empêchent évidemment pas des relations économiques entre la collectivité et ses propres actionnaires ou associés, mais ils soumettent ces relations au respect des mêmes exigences de relations synallagmatiques respectant un certain équilibre entre la prestation et la contre-prestation entre les deux parties telles celles qui seraient convenues sur le marché entre deux parties indépendantes sans lien participatif. L’article 164, alinéa (3) LIR, dans la mesure où il requalifie en distribution cachée l’allocation d’un avantage sans contrepartie effective, qui pourrait être obtenue sur le marché, et motivée seulement par le lien participatif, s’analyse dans cette mesure et dans les relations entre une société et ses associés, actionnaires ou intéressés en une concrétisation du principe plus général de pleine concurrence29.

28 Cour adm., 31 juillet 2019, n° 42326C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Impôts, n° 633.

29 Cour adm., 26 mars 2015, n° 34024C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Impôts, n° 627 et les autres références y citées.

32 Les distributions cachées de bénéfices visées par l’article 164, alinéa (3) LIR existent dès lors à partir du moment où un associé, actionnaire ou intéressé, reçoit directement ou indirectement d’une société des avantages qui s’analysent, pour cette dernière, en un emploi de revenus sans contrepartie effective et que l’associé, actionnaire ou intéressé, n’aurait pas pu obtenir pareil avantage en l’absence de ce lien sociétaire. La situation concernée est celle où un gestionnaire prudent et avisé n’aurait pas accordé un avantage similaire à un tiers30.

En ce qui concerne la personne recevant l’avantage, le terme « notamment » utilisé par la seconde phrase de l’article 164, alinéa (3) LIR indique, - tel que cela est confirmé par les travaux parlementaires - , que, conformément à un choix délibéré du législateur, cette formulation est générale afin de permettre « à l’administration et aux instances de recours de prendre leur décision dans chaque cas d’espèce » et ce au vu de la difficulté de prévoir une énumération exhaustive31.

Le cercle de personnes bénéficiaires d’avantages dont l’article 164, alinéa (3) LIR autorise la requalification en distributions cachées est ainsi délimité par cette disposition aux associés, sociétaires et intéressés de l’entité sociale visée.

Conformément à l’article 59 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par la « loi du 21 juin 1999 », « La preuve des faits déclenchant l’obligation fiscale appartient à l’administration, la preuve des faits libérant de l’obligation fiscale ou réduisant la cote d’impôt appartient au contribuable […] ».

La charge de la preuve de l’existence d’une distribution cachée de bénéfices repose en premier lieu sur le bureau d’imposition qui doit en effet procéder à un examen impartial et objectif des déclarations du contribuable et relever des éléments qui lui paraissent douteux et qui pourraient indiquer l’existence de distributions cachées de bénéfices. Il en ressort que la charge de la preuve de l’existence d’une distribution cachée de bénéfices repose en premier lieu sur la partie étatique. C’est essentiellement lorsque la partie étatique peut faire état d’un faisceau de circonstances qui rendent une telle distribution probable et qui n’ont pas été éclairées ou documentées par le contribuable qu’elle peut mettre en cause la réalité économique des opérations et supposer une diminution indue des bénéfices de l’entreprise sans avoir à la justifier exactement. Il y a alors renversement de la charge de la preuve, le contribuable devant prouver qu’il n’y a pas diminution de bénéfice ou que celle-ci est économiquement justifiée, et non seulement motivée par des relations particulières entre deux entités32.

En l’espèce, force est de constater qu’il est constant en cause que la société B dispose d’une créance à l’égard de la société E en raison de prestations de transport d’un montant de … euros diminuée d’une première correction de valeur opérée en 2014 pour un montant de … euros, d’une deuxième et troisième correction de valeur opérée en 2015 et en 2016 toujours pour un montant identique, et finalement une quatrième et dernière correction de valeur opérée 30 Cour adm., 1er février 2000, n° 11318C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Impôts, n° 629 et les autres références y citées.

31 Projet de loi n° 571, Commentaire des articles, Titre II Impôt sur le revenu des collectivités, page 3.

32 Cour adm., 12 février 2009, n° 24642C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Impôts, n° 629 (2e volet) et les autres références y citées, rappelé dans Cour adm., 23 décembre 2021, n° 45696C du rôle, disponible sur le site jurad.etat.lu.

33 en 2017 pour un montant … euros, soit le même montant que pour les trois premières corrections de valeur, à 2 centimes près, de sorte que la valeur de la créance litigieuse a été réduite à zéro au 31 décembre 2017.

A cet égard, le tribunal relève que le litige sous examen porte exclusivement sur la correction de valeur opérée de manière non contestée pour un montant de … euros au titre de l’année 2015, seule année d’imposition litigieuse en l’espèce, les parties étant en désaccord quant à la qualification de l’opération, l’Etat la requalifiant de distribution cachée de bénéfices.

En ce qui concerne la première condition posée à l’article 164, alinéa (3) LIR tenant à l’existence d’une relation particulière entre la société B et un associé, sociétaire ou intéressé, il échet de relever que l’existence de la distribution cachée de bénéfices est avancée par le directeur dans le contexte de la relation existant entre la société B et la société E.

Il est en l’espèce constant que la société E n’a pas détenu des parts de capital de la société B pendant l’année 2015 litigieuse, de sorte que la société E n’est pas à qualifier d’associé de la société B au sens de l’article 164, alinéa (3) LIR, la qualification de sociétaire étant également à exclure.

D’après les éléments avancés par la partie étatique, non contestés par la société A, Monsieur F était, au courant de l’année 2015 litigieuse, tant administrateur-délégué de la société B que « Geschäftsführer » de la société E, cette affirmation étant encore corroborée par le fait que Monsieur F a signé les comptes annuels de la société E concernant l’exercice 2015.

Il en résulte que la société E est à qualifier d’« intéressé » au sens de l’alinéa (3) de l’article 164 LIR.

En ce qui concerne la seconde condition posée par l’article 164, alinéa (3) LIR, il convient de vérifier, sur base des règles et principes relatifs à la charge de la preuve et aux distributions cachées de bénéfices dégagés ci-avant, si la société E a bénéficié d’un avantage de la part de la société B qui s’analyse pour cette dernière en un emploi de revenus sans contrepartie effective ayant entraîné une diminution de son actif, avantage que la société E, en sa qualité d’intéressée, n’aurait pas pu obtenir en l’absence de la relation particulière existant entre elles.

Il appartient en premier lieu à la partie étatique de faire état d’un faisceau de circonstances rendant probable l’allocation d’un tel avantage sans contrepartie effective à la société E, la partie étatique soutenant que l’avantage consisterait en l’espèce en un abandon partiel de créance d’un montant de … euros, avantage qui serait matérialisé par la comptabilisation d’une correction de valeur d’un montant identique.

Le tribunal relève dans ce contexte, conformément aux règles et principes relatifs aux corrections de valeurs dégagés ci-avant, que la seule comptabilisation d’une correction de valeur, par nature réversible dans la mesure où elle anticipe partiellement ou intégralement la perte définitive d’une créance dont le non-recouvrement n’est qu’au stade du risque, ne saurait donner lieu à un appauvrissement réel de la société B en faveur de la société E au sens de l’article 164, alinéa (3) LIR.

34 Force est de constater que la partie étatique a mis en avant le fait que la correction de valeur a été comptabilisée par la société B, alors que, de manière non contestée, cette dernière est restée en défaut de diligenter des poursuites contre la société E pour réclamer le paiement de la partie de la créance litigieuse en l’espèce, à savoir du montant … euros, tout en continuant à fournir des prestations à la société E en dépit du non-paiement du montant précité et en connaissant la situation financière déficitaire de la société E.

Eu égard à ce faisceau de circonstances mis en avant par la partie étatique, le tribunal est amené à retenir que la partie étatique a fait état d’éléments suffisants laissant supposer qu’un abandon partiel de créance a été consenti à la société E, lesdits éléments étant de nature à corroborer une absence d’intention de la société B d’obtenir le remboursement de la somme de … euros litigieuse en l’espèce.

Il appartient dès lors en second lieu, par application de l’article 59 de la loi du 21 juin 1999 et de l’article 164, alinéa (3) LIR, précités, à la société A de démontrer l’absence d’avantage consenti par sa filiale, la société B, partant qu’il n’y a pas eu de diminution de bénéfice dans le chef de celle-ci ou que la diminution est économiquement justifiée et non motivée par sa relation particulière avec la société E. En l’espèce, cela implique pour la société A de démontrer que sa filiale, la société B, a, contrairement au faisceau de circonstances mis en avant par la partie étatique, été fondée à comptabiliser une correction de créance pour pallier à un risque de non-recouvrement du montant de … euros litigieux ayant existé, conformément aux principes dégagés ci-avant, à la date de clôture de son exercice d’exploitation 2015, tout en étant autorisée, conformément à l’article 22, alinéa (2) LIR, précité, à prendre en compte les faits ayant existé à la date de clôture d’un exercice déterminé, mais révélés ultérieurement jusqu’à l’établissement du bilan33. En d’autres termes, il appartient à la société A de justifier qu’en l’espèce, sa filiale n’a pas de facto renoncé au recouvrement de la partie de la créance litigieuse, comme le soutient l’Etat, mais qu’elle s’est trouvée dans une situation où une correction de valeur d’une partie de la créance s’imposait.

Pour justifier la comptabilisation de la correction de valeur d’un montant de … euros par la société B et la probabilité d’irrécouvrabilité de ce montant, la société A se prévaut d’abord de plusieurs circonstances ayant conduit à une impossibilité d’entamer des poursuites pour obtenir le recouvrement de sa créance.

Parmi ces circonstances figure en premier lieu la conclusion d’une « Rangrücktrittsvereinbarung » à laquelle serait partie la société B. Le tribunal relève de prime abord que le document intitulé « Rangrücktrittsvereinbarung » conclu entre la société B et la société E à la date du 31 décembre 2015 - complétant (« In Ergänzung ») une « Rangrücktrittsvereinbarung » datée du 31 décembre 2014 - constitue une stipulation pour autrui en faveur de la collectivité des créanciers de la société E34 par laquelle la société B a consenti à ce que (i) sa créance soit subordonnée à plusieurs créances d’autres créanciers existants et même futurs à hauteur de … euros, de sorte que le remboursement tant du principal 33 Voir notamment Cour adm., 10 novembre 2015, n° 35818C du rôle ; Trib. adm., 13 janvier 2021, n° 43436 du rôle ; Trib. adm., 13 octobre 2020, n° 42653 du rôle non réformé sur ce point par Cour adm., 12 octobre 2021, n° 45260C.

34 §3: « Die Vertragsparteien stellen klar, dass es sich bei der vorliegenden Vereinbarung um einen Vertrag zugunsten der Gläubigergesamtheit der Gesellschaft iSd. § 328 Abs. 2 BGB handelt. […] ».

35 que des intérêts ne peut être exigé qu’après le désintéressement de tous les autres créanciers35, (ii) le remboursement tant du principal que des intérêts de la créance peut être prélevé sur les bénéfices annuels futurs, sur l’excédent de liquidation ou sur d’autres actifs disponibles36, (iii) le paiement de ses créances ne peut pas être demandé si une telle demande aboutissait ou menaçait d’aboutir au surendettement ou à la faillite de la société E au sens du droit sur les insolvabilités37 et (iv) les stipulations précitées s’appliquent aussi bien avant, qu’après l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité38.

Il en ressort que la société B s’est contractuellement engagée, au bénéfice de tiers à la « Rangrücktrittsvereinbarung », à savoir tout créancier actuel et même futur de la société E, à ne pas réclamer le paiement de sa créance de … euros à la société E, aussi longtemps qu’un tel créancier tiers dispose ou disposera dans le futur d’une créance contre celle-ci (« sämtliche Forderungen anderer bestehender und künftiger Gläubiger »).

Dans ce contexte, il échet d’écarter l’affirmation de la société A selon laquelle la société B se serait vue « imposée » la conclusion de ce contrat par la société I ou que son refus de signer cet engagement aurait mis un terme à sa relation d’affaires avec la société E, voir aurait conduit à l’ébranlement de crédit ou à la faillite de celle-ci, à défaut de pièces de nature à la corroborer, d’autant plus que le rapport de gestion annexé aux comptes annuels de la société E pour l’exercice 2015 indique que la société I, en tant qu’établissement bancaire habituel de la société E, continuait à lui accorder sa confiance, tout en précisant que les banques sont au courant de la situation actuelle du marché du bois et de celle de la société E, de sorte à ne voir aucune raison de remettre en question la relation commerciale existante39.

Si la « Rangrücktrittsvereinbarung » prévoit certes qu’elle ne constitue pas une renonciation à la créance40 et que pour le surplus, la société B n’a pas renoncé à faire valoir ses droits découlant de sa créance et à en exiger l’exécution41, le tribunal est amené à retenir, eu égard aux autres stipulations relevées ci-avant et à l’absence d’autre élément justifiant sa conclusion, que cette stipulation pour autrui est loin de justifier le comportement de la société B et d’invalider la qualification opérée par l’Etat, mais est au contraire de nature à corroborer le constat qu’en réalité, la société B a de facto renoncé au recouvrement de sa créance de … euros. En effet, les conditions de remboursement sont stipulées de façon telle que le 35 §2, point 1 : « Der Darlehensgeber tritt hiermit mit Ansprüchen in Höhe von … Euros aus dem Darlehen im Rang hinter sämtliche Forderungen anderer bestehender und künftiger Gläubiger in der Weiser zurück, dass Tilgung und Verzinsung des Darlehens nur nachrangig nach allen anderen Gläubigern im Rang […], verlangt werden können. […] ».

36 §2, point 2 : « Tilgung und Verzinsung des Darlehens können aus künftigen Jahresüberschüssen, aus einem Liquidationsüberschuss oder aus sonstigem freien Vermögen verlangt werden. ».

37 §2, point 3 : « Die Darlehensgeberin kann keine Befriedigung ihrer Forderungen verlangen, wenn dadurch Überschuldung oder Zahlungsfähigkeit der Gesellschaft im insolvenzrechtlichen Sinne entsteht oder zu entstehen droht. ».

38 §2, point 4: « […] Die Abs.1 bis 3 gelten sowohl vor als auch nach Eröffnung eines Insolvenzverfahren. ».

39 « […] Zu der Entwicklung der Vermögensverhältnisse kann festgestellt werden, dass sich die bilanzielle Überschuldung der Gesellschaft wieder erhöht hat. Sie beträgt nun … € (Vorjahr: … €). Unsere Hausbank KBC spricht uns weiterhin das Vertrauen aus. Den Banken ist die momentane Lage des Holzmarktes und unseres Unternehmens bekannt, und sie sehen keinen Grund, das bestehende Geschäftsverhältnis in Frage zu stellen. […].

» 40 §2, point 1: « […] Ein Verzicht auf die Forderung wird nicht vereinbart. ».

41 §2, point 5: « Im Übrigen ist der Darlehensgeber uneingeschränkt befugt, seine Rechte aus dem Darlehen geltend zu machen und Erfüllung zu verlangen. ».

36 recouvrement de la créance est illusoire, ce surtout au regard du fait que la « Rangrücktrittsvereinbarung » s’applique non seulement à des créanciers existants, mais même à des créanciers futurs de la société E.

En l’espèce, la « Rangrücktrittsvereinbarung » s’analyse en un abandon partiel de créance et plus particulièrement du montant de … euros litigieux pour l’année d’imposition 2015 dans la mesure où il fait partie de façon non contestée de la créance totale de … euros.

Il s’ensuit que l’argumentation avancée par la société A pour justifier la comptabilisation d’une correction de créance par la société B, fondée sur l’impossibilité de diligenter des poursuites contre la société E en raison de la conclusion la « Rangrücktrittsvereinbarung », est en réalité de nature à confirmer l’affirmation de la partie étatique selon laquelle la société B a de facto consenti un abandon partiel de créance.

A titre superfétatoire et pour être complet, en ce qui concerne les autres motifs avancés par la société A pour justifier un défaut de poursuites diligentées contre la société E, partant la comptabilisation de la correction de valeur litigieuse, force est au tribunal de constater que (i) celui fondé sur une volonté de la société B de préserver les emplois de la société E et d’éviter un ébranlement de crédit ou une faillite de celle-ci, reste à l’état de pure allégation, aucune pièce à la disposition du tribunal ne venant appuyer cette affirmation, (ii) celui justifié par l’essence de l’entreprenariat qui comprendrait une prise de risque procède d’une confusion entre la prise de risque inhérente à l’activité d’entrepreneur dans l’optique de générer des profits, d’une part, et la décision de l’entrepreneur de ne pas réclamer le paiement de sommes constituant le contrepartie de sa prestation, d’autre part, et (iii) celui lié à l’attente d’une issue favorable de la procédure judiciaire engagée par la société E contre une situation monopolistique des Länder précités pour lui permettre d’honorer sa dette est peu convaincante, car elle est en contradiction avec les déclarations de la société B selon lesquelles la société E serait « encore à ce jour en train de déterminer la manière la plus appropriée pour réagir et faire valoir ses droits », affirmation dont il est permis de déduire qu’aucune décision d’engager une procédure judiciaire n’a été prise à ce jour.

Force est ensuite au tribunal de constater que la société A n’a apporté aucun élément de nature à démontrer que l’avantage consenti par la société B à la société E, à savoir l’abandon partiel de créance matérialisée par la conclusion de la « Rangrücktrittsvereinbarung », était économiquement justifié et non motivée par la relation particulière entre la société B et la société E.

En ce qui concerne tout d’abord la situation financière de la société E mis enavant par la société A, il échet de relever qu’il se dégage des comptes annuels de la société E que celle-

ci a réalisé un profit de … euros pour l’année 2014 et une perte de … euros au cours de l’année 2015, litigieuse en l’espèce. D’après le rapport de gestion annexé aux comptes annuels de l’année 2015, cette perte s’explique par des frais de justice et de conseil d’un montant d’environ … euros déboursés dans le cadre d’un procès intenté contre le Land de Rhénanie-du-Nord-

Westphalie pour la mise à disposition incorrecte de quantités de bois, qui ont conduit à ce déficit annuel, alors que l’entreprise avait clôturé l’exercice 2015 avec un « petit » bénéfice 37 d’exploitation malgré la reprise de la conjoncture42. D’après ce même rapport, la situation de surendettement de la société E s’élevait à … euros pour l’année 2015 contre … euros pour l’année 2014.

Or, il ressort des comptes annuels de la société E que la société B est créancière de la société E depuis au moins l’année 2012 et qu’entre 2012 et 2018, le montant du surendettement de la société E, certes élevé, est cependant resté stable pour se situer au plus bas à … en 2012 et au plus haut à … en 2018, de sorte qu’il n’appert pas que la situation financière de la société E ait fondamentalement changé au cours de l’année 2015, seule litigieuse en l’espèce, partant qu’elle ait eu une influence sur le caractère irrécouvrable du montant de … euros.

Cette conclusion n’est pas remise en cause par la situation de monopole de trois Länder qui aurait concerné les années 2001 à 2009 et qui aurait abouti à une décision de l’Office Général des Cartels confirmée par un arrêt de la Cour d’appel de Düsseldorf en date du 15 mars 2017, alors que la société A n’explique pas concrètement en quoi cette situation aurait directement impacté la situation financière de la société E, le seul fait d’invoquer, sans autres explications ou pièces, autres qu’un lien internet vers ces décisions, que la marge bénéficiaire de la société E aurait été réduite en raison de l’achat de matières premières à un prix supérieur au prix du marché, étant insuffisant. Cette conclusion n’est pas non plus infirmée par le litige ayant opposé la société E au Land de Rhénanie du Nord-Westphalie et deux sociétés privées avec lesquels elle aurait conclu un contrat cadre, le tribunal relevant également que la société A reste en défaut d’expliquer en quoi la violation de ce contrat cadre aurait concrètement négativement impacté la situation financière de la société E.

Il ne ressort, par ailleurs, pas des pièces versées en cause que la situation financière de la société E se soit détériorée en raison d’un changement de modèle économique forcé par la crise financière de 2008, la société A se limitant à relever, pour les années 2006 à 2018, une augmentation du prix moyen de vente, ainsi qu’une diminution corrélative de vente de bois de refend.

A titre superfétatoire et uniquement pour être complet, force est encore au tribunal de constater qu’il ne se dégage pas des rapports de gestion de la société B, contrairement à ce que soutient la société A, que la comptabilisation de la correction de valeur de … euros s’imposait en l’espèce en raison des observations du réviseur d’entreprise.

Il échet tout d’abord de relever que dans le rapport de gestion de la société B concernant l’exercice 2013, le réviseur d’entreprise agréé mentionne que le conseil d’administration de la société B restait « confiant dans la récupération du solde » de la créance à l’égard de la société E « malgré les difficultés de trésorerie » de cette dernière, de sorte à ne pas nécessiter une correction de valeur à ce stade d’après l’observation faite par le réviseur.

Dans le rapport de gestion concernant l’année 2014, le réviseur a émis l’observation selon laquelle le conseil d’administration de la société B restait également confiant dans la 42 « […] Trotz anziehender Konjunktur hat unser Betrieb mit der bestehenden Schnittholzproduktion in den Standardsortimenten das Geschäftsjahr 2015 nur mit einem kleinen operativen Gewinn abgeschlossen. Aufgrund des gegen das Land Nordrhein-Westfalen geführten Prozesses wegen nicht korrekter Bereitstellung von Holzmengen sind im laufenden Wirtschaftsjahr Rechts- und Beratungskosten in Höhe von rd. Euro … angefallen.

Diese hohen Aufwendungen führten schließlich zu einem Jahresfehlbetrag […]. » 38 récupération dudit solde, tout en relevant qu’il avait acté une première réduction de valeur d’un montant de … euros sur la partie long terme de la créance détenue à l’égard de la société E. Il échet également de relever que ce même rapport de gestion ne contient aucune référence ou information relative au jugement du Landgericht Münster du 16 avril 2015 ayant déclaré irrecevable la requête de la société E sur base du droit procédural allemand, alors que la société A affirme que c’est l’issue de cette décision qui aurait été à la base de la première correction de valeur.

Concernant l’année 2015 qui est litigieuse en l’espèce, le tribunal constate que le réviseur d’entreprise agréé a émis une « opinion assortie d’une réserve »43 au sujet des comptes annuels de la société B. Ledit rapport de gestion contient en effet une section « Fondement de l’opinion avec réserve » indiquant, d’une part, qu’une correction de valeur supplémentaire de … euros avait été actée, portant la correction de valeur totale à 50% du montant nominal de la créance, soit … euros au 31 décembre 2015, et, d’autre part, que « La recouvrabilité de [la] créance est frappée d’une incertitude que nous n’avons pas pu lever par la collecte d’éléments probants suffisants et appropriés ». Dans une seconde étape, le réviseur a indiqué qu’ « à l’exception des incidences éventuelles de l’élément décrit dans la section « Fondement de l’opinion avec réserve », les comptes annuels de la société B donnent dans tous leurs aspects significatif, une image fidèle du patrimoine, de la situation financière de [la société B] au 31 décembre 2015. […] ».

Le tribunal constate de prime abord, contrairement aux affirmations de la société A, qu’il ne ressort pas des rapports de gestion susmentionnés concernant les années 2013, 2014 et 2015, que le réviseur d’entreprise ait « poussée » la société B à acter une correction de valeur, ni que son avis laisserait sous-entendre que la correction de valeur actée jusqu’alors serait insuffisante, le réviseur se limitant en effet à constater les corrections de valeurs décidées par le conseil d’administration de la société B.

Ensuite, s’il est vrai que le réviseur d’entreprise agréé mentionne le caractère incertain du recouvrement de la créance de la société B à l’égard de la société E pour l’année 2015, il n’en reste pas moins que la correction de valeur décidée par le conseil d’administration de la société B pour ladite année n’a pas reçu l’aval du réviseur d’entreprise agréé étant donné que son opinion est assortie d’une réserve expresse en ce qui concerne les éléments relatifs à la correction de valeur opérée.

Enfin, le tribunal relève que les rapports de gestion ne contiennent aucune explication au sujet de la raison pour laquelle suite à la première correction de valeur opérée au cours de l’année 2014 pour un montant de … euros, seul un nouveau montant de … euros, qui en plus est identique à celui de l’année 2014, serait irrécouvrable pour l’année 2015 et justifierait cette nouvelle correction de valeur identique, et non le solde restant de la créance.

Sur base de l’ensemble des considérations qui précèdent et à défaut d’autres moyens, le tribunal est dès lors amené à retenir qu’en s’engageant contractuellement, par la « Rangrücktrittsvereinbarung », à ne plus réclamer le paiement de … euros, la société B a octroyé un avantage sans contrepartie à la société E, avantage (i) matérialisé par une réduction du montant de la dette de cette dernière à son égard, (ii) ayant entraîné une diminution de sa 43 Souligné par le tribunal.

39 propre base imposable et (iii) qui ne se trouve justifiée qu’en raison de l’existence de relations particulières existant avec la société E, en ce sens qu’un créancier moyennement prudent et diligent n’aurait, en l’espèce, pas consenti un abandon partiel de créance.

Il s’ensuit que la seconde condition de l’article 164, alinéa (3) LIR est remplie en l’espèce.

C’est partant à juste titre que le directeur a confirmé le bureau d’imposition Diekirch ayant conclu à l’existence d’une distribution cachée de bénéfices au sens de l’article 164, alinéa (3) LIR à travers les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités pour l’année 2015 et de l’impôt commercial communal pour l’année 2015 émis à l’égard de la société A.

Cette conclusion n’est pas énervée par le moyen de la société A fondé sur le principe de confiance légitime pour expliquer qu’il y aurait, en substance, une incohérence entre l’acceptation par le bureau d’imposition de la première correction de valeur pour l’année 2014 et la contestation d’une correction de valeur identique pour l’année 2015, alors que, d’une part, en vertu du principe de l’annualité de l’impôt, consacré notamment à l’article 1er LIR, ainsi qu’à l’article 100 de la Constitution, le contribuable ne saurait tirer profit, pour une année fiscale, du fait que le bureau d’imposition a accepté une correction de valeur au titre de l’année fiscale antérieure, la situation du contribuable devant être considérée pour chaque année d’imposition suivant des données et caractéristiques propres, établies du moment, de manière que les bases d’imposition du chef d’une année d’imposition sont à déterminer indépendamment de celles retenues pour une année d’imposition antérieure et que l’autorité compétente n’est ainsi pas liée par ses appréciations antérieures, sauf l’hypothèse d’une décision expresse en faveur du contribuable44, et, d’autre part, c’est au moment de l’instruction de l’année d’imposition 2015 que le bureau d’imposition Diekirch, en cela suivi par le directeur, a pu se fonder sur de nouveaux éléments d’appréciation, à savoir la comptabilisation d’une deuxième correction de valeur identique à celle opérée pour l’année 2014, pour décider de la remettre en cause.

Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le présent recours inscrit sous le numéro 45181 du rôle est à rejeter pour n’être fondé dans aucun de ses moyens.

La demande de la société A sollicitant encore l’allocation d’une indemnité de procédure de 5.000 euros sur base de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999 est à rejeter, alors qu’elle ne justifie en quoi il serait inéquitable de laisser à sa charge les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens.

Le tribunal est maintenant amené à trancher la question des conséquences dans le chef de la société B de la reconnaissance de la distribution cachée de bénéfices au profit de la société E.

3.2 Quant au recours en réformation inscrit sous le numéro 45701 du rôle Arguments des parties 44 Cour adm., 3 août 2018, n° 37117C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Impôts, n°21 et les autres références y citées.

40 La société B se fonde sur l’article 146 LIR pour expliquer que seraient passibles de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux, entre autres, les distributions de bénéfices indigènes tant ouvertes que cachées. Par exception, l’article 147 LIR prévoirait une exemption de ladite retenue d’impôt sur base du régime d’imposition dit des sociétés mère-filiales, appelé « participation exemption » et qui nécessiterait de remplir cinq conditions cumulatives relatives à la qualification de la société mère, la filiale, le revenu, la durée de détention et le taux de participation. Lorsqu’une distribution ouverte de bénéfices serait effectuée, elle serait nécessairement à destination du ou des associés. En revanche, lorsque celle-ci serait cachée, elle pourrait également l’être, en bout de chaîne, au bénéfice d’un intéressé comme le prévoirait l’article 164 LIR.

Elle explique ensuite que dans le cas particulier d’un avantage de la société à un intéressé, le concept de distribution cachée de bénéfices aurait en substance pour finalité de remplacer les conséquences fiscales attachées au montage juridique à l’origine d’une telle distribution cachée de bénéfices, par les conséquences fiscales applicables au montage tel qu’il aurait dû être mis en œuvre à l’origine si ladite distribution cachée de bénéfices n’avait pas eu lieu. Il s’agirait ainsi de corriger une imposition tirant son origine d’un montage « non authentique », parce que fondée sur une distribution cachée de bénéfices, et de la remplacer par une imposition fondée sur un montage « authentique » ne tenant pas compte d’une telle distribution.

Afin de redonner aux faits leur caractère véritable et d’aboutir à une imposition fondée sur un montage « authentique », il conviendrait d’appliquer le principe général de droit fiscal luxembourgeois dit de « la chaîne participative » selon lequel une distribution cachée de bénéfices devrait suivre la chaîne juridique des participations de la société jusqu’à l’intéressé, tel que ce serait le cas en présence d’un avantage octroyé par une société fille à une société grand-

mère en ce sens qu’il faudrait dans une telle hypothèse reconnaître une première distribution cachée de bénéfices de la société petite-fille à la société mère et une seconde distribution cachée de bénéfices de la société mère à la société grand-mère, la raison étant que dans une telle hypothèse, la société mère aurait transféré l’avantage à la société grand-mère. La société B ajoute que ne pas appliquer le principe de la « chaîne participative », mais considérer que l’avantage serait octroyé de la société fille à l’intéressé directement serait contraire au droit des sociétés qui ne permettrait pas de distribuer des dividendes à un associé indirect.

Dans le cas d’espèce, ne pas appliquer le principe de la « chaîne participative » reviendrait à procéder à une imposition de l’intéressé au titre des revenus de capitaux mobiliers, alors que ledit intéressé ne détiendrait pas de titres représentatifs du capital social de la société fille.

La société B en conclut que si une distribution cachée de bénéfices devait être retenue, elle serait forcément intervenue de la société B vers son actionnaire, à savoir la société A et devrait partant être exemptée d’une retenue d’impôts sur base du régime mère-fille, la société B faisant valoir que les conditions prévues à l’article 147 LIR seraient forcément remplies dans la mesure où elle se trouverait en intégration fiscale avec la société A.

Elle reproche au directeur d’avoir méconnu le principe de la chaîne participative dans sa décision du 30 novembre 2020, en traitant la distribution cachée de bénéfices comme étant directement réalisée de la société B vers la société E en tant qu’intéressée, et, en remplaçant ainsi une « « imposition non-authentique […] par une autre « imposition non-authentique », puisqu’il 41 [serait] formellement interdit à la [société B] de distribuer des dividendes à [la société] E qui [ne serait] pas un de ses associés ». Cette « imposition non-authentique » serait source de rupture de l’égalité des contribuables devant l’impôt, dans la mesure où pour le directeur, la « participation exemption » au titre de l’article 147 LIR ne trouverait jamais application en cas de distribution cachée de bénéfices à un intéressé, puisque celui-ci, par hypothèse, ne détiendrait pas une participation directe dans la société débitrice.

La société B explique également qu’il serait indiqué dans sa réclamation du 17 novembre 2020 que les pièces justificatives à l’application de la « participation exemption » au titre de l’article 147 LIR ne seraient pas jointes car l’administration disposerait déjà dans ses dossiers de tous les documents et informations nécessaires ou utiles aux fins de vérification.

Par rapport au reproche du directeur inclus dans sa décision directoriale du 30 novembre 2020 visant un manquement à son obligation de collaboration au sens des paragraphes 170 et 171 AO, la société B affirme que son intention n’aurait jamais été de ne pas collaborer ou d’empêcher le directeur d’opérer son contrôle, mais plutôt de souligner qu’en présence d’une distribution cachée (ou ouverte) de bénéfices entre sociétés intégrées fiscalement, il irait de soi que les conditions de la « participation exemption » au titre de l’article 147 LIR seraient remplies et qu’il serait dès lors étonnant que le bulletin d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2015 ait été émis, alors que le revenu visé par une distribution cachée de bénéfices serait un des revenus éligibles à la « participation exemption » au titre de l’article 147 LIR.

La société B précise encore que, contrairement à ce qui aurait été le cas échéant maladroitement écrit dans sa réclamation du 17 novembre 2020, elle aurait bien versé au directeur les pièces justificatives en annexe à la réclamation, qui seraient les modèles 506A des années 2014 et 2015 de la société A relative à sa participation.

En définitive, la société B fait état d’une mauvaise application par le directeur des principes fiscaux de droit luxembourgeois relatifs aux distributions cachées de bénéfices, à la chaîne participative et la « participation exemption » au titre de l’article 147 LIR, de sorte que si la distribution cachée de bénéfices devait être retenue, la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux ne serait pas à prélever, suivant la « participation exemption » au titre de l’article 147 LIR.

En conséquence, la société B demande la réformation de la décision directoriale du 30 novembre 2020 en ce sens que le tribunal retienne une absence de distribution cachée de bénéfices dont elle conteste l’existence, sinon qu’il applique le régime d’exonération prévu à l’article 147 LIR à la distribution cachée de bénéfices entre elle et la société A, son actionnaire, et fixe la retenue d’impôt litigieuse à zéro euro pour l’année d’imposition 2015.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet de ces moyens.

Il fait valoir que la distribution cachée de bénéfices aurait été constatée au niveau de la société B et de la société E laquelle serait qualifiable d’intéressée au sens de l’article 164, alinéa 3 LIR, étant donné la relation particulière qui existerait entre elle et la société B.

Le délégué du gouvernement estime que l’article 147 LIR serait inapplicable en l’espèce, alors que l’exonération de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux y visée 42 n’aurait été applicable que dans l’hypothèse où la société B aurait distribué des bénéfices à la société A, étant donné que cette dernière aurait été l’actionnaire unique pendant toute l’année d’imposition 2015, partant pendant une période ininterrompue d’au moins douze mois.

Le délégué du gouvernement estime que le directeur n’aurait pas méconnu, dans sa décision du 30 novembre 2020, précitée, le principe de la « chaîne participative » en considérant la distribution cachée de bénéfices comme directement réalisée de la société B vers la société E.

Il conteste formellement toute rupture d’égalité des contribuables devant l’impôt.

Dans sa réplique, la société B estime que le délégué du gouvernement n’aurait ni développé un argument juridique permettant d’arriver à la conclusion que la retenue d’impôt litigieuse devrait être confirmée, ni répondu à ses arguments. Elle reproche au délégué en particulier de ne pas avoir qualifié le fait générateur de la distribution cachée de bénéfices, ni l’avantage perçu par l’intéressé, sans doute, selon la société B, en raison de l’absence de fait générateur respectivement d’avantage, étant donné que la créance figurerait toujours à l’actif de son bilan.

Analyse du tribunal Force est de constater que dans sa décision du 30 novembre 2020, le directeur a confirmé le bureau d’imposition Diekirch en ce qu’il a fixé, au titre de l’année d’imposition 2015, une retenue d’impôt sur les revenus de capitaux dans le chef de la société B suite à la reconnaissance d’une distribution cachée de bénéfices dans sa décision du 7 août 2020 dans le cadre de l’imposition de la société A, décision ayant été confirmée ci-avant par le tribunal dans le cadre du recours inscrit sous le numéro 45181 du rôle.

Il s’ensuit que les contestations de la société B tendant à remettre en cause dans le cadre du présent recours inscrit sous le numéro 45701 du rôle le principe même de la distribution cachée de bénéfices sont à écarter dans la mesure où elles ont non seulement déjà été rejetées comme non fondées, mais qu’elles sont encore étrangères à l’objet du présent litige.

La seule question litigieuse qui se pose en l’espèce est celle de savoir si le directeur était fondé à confirmer, d’une part, la fixation d’une retenue à la source sur les revenus de capitaux de 15% dans le chef de la société B sur base du constat préalablement fait que cette dernière a procédé à une distribution cachée de bénéfices, et, d’autre part, qu’elle n’était pas en droit de bénéficier d’une exonération de ladite retenue à la source.

A ce titre, il échet de prime abord de relever que l’article 146, alinéa (1) LIR dispose que « Sont passibles de la retenue à la source au titre de l’impôt sur le revenu, les revenus indigènes ci-après:

1. les dividendes, parts de bénéfice et autres produits visés sub 1 de l’article 97 ;

2. […] ;

3. […].

L’article 97, alinéa (1), numéro 1 LIR dispose que « Sont considérés comme revenus provenant de capitaux mobiliers:

43 1. les dividendes, parts de bénéfice et autres produits alloués, sous quelque forme que ce soit, en raison des actions, parts de capital, parts bénéficiaires ou autres participations de toute nature dans les collectivités visées aux articles 159 et 160 ;

[…].

Aux termes de l’article 147 LIR, « La retenue d’impôt faisant l’objet de l’article 146 n’est pas à opérer :

1. […] ;

2. lorsque les revenus visés par l’article 97, alinéa 1er, numéro 1 sont alloués par un organisme à caractère collectif résident pleinement imposable et revêtant une des formes énumérées à l’annexe de l’article 166, alinéa 10, ou par une société de capitaux résidente pleinement imposable non énumérée à l’annexe de l’article 166, alinéa 10, à:

a) un autre organisme à caractère collectif visé par l’article 2 de la directive 2011/96/UE du Conseil du 30 novembre 2011 concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d’Etats membres différents, […], et que, à la date de la mise à la disposition des revenus, le bénéficiaire détient ou s’engage à détenir, sous les conditions prévues à l’article 149, alinéa 4, directement pendant une période ininterrompue d’au moins douze mois, une participation d’au moins 10 pour cent ou d’un prix d’acquisition d’au moins 1.200.000 euros dans le capital social du débiteur des revenus. La détention d’une participation à travers un des organismes visés à l’alinéa 1er de l’article 175 est à considérer comme détention directe proportionnellement à la fraction détenue dans l’actif net investi de cet organisme ;

3. […].

L’article 148, alinéa (1) LIR dispose quant à lui que « Le taux de retenue est fixé à 15%.

[…] ».

Il résulte d’une lecture combinée des dispositions précitées qu’une distribution cachée de bénéfices suit le traitement fiscal d’une distribution ouverte en ce qu’elle est soumise à une retenue à la source de 15% et bénéficie, le cas échéant, d’une exonération, étant précisé que les « « autres produits » [visées à l’article 146 et 97 LIR] comprennent aussi les distributions occultes, c'est-à-dire les avantages alloués sous une forme telle qu'ils n'apparaissent pas ouvertement comme distributions »45.

Force est au tribunal de constater que dans le cadre du recours inscrit sous le numéro 45181 du rôle, le tribunal vient de retenir que le directeur a à juste titre retenu une distribution cachée de bénéfices en ce sens que la société B a consenti un avantage sans contrepartie au profit de la société E dont la cause trouve son origine dans les liens particuliers existant entre elles, de sorte que c’est a priori à bon droit que le directeur a confirmé le bureau d’imposition Diekirch pour avoir soumis cette distribution cachée de bénéfices, par application des dispositions précitées, à une retenue à la source de 15%.

Au sujet de la question de savoir si cette retenue à la source de 15% est susceptible de bénéficier d’une exonération, la société B considère, de l’entendement du tribunal, que bien 45 Doc. parl. n° 571, Commentaire des articles, ad. art. 114 [actuel article 97 LIR], p.293.

44 qu’en l’espèce, l’avantage ait été reconnu comme octroyé par elle dans le chef de la société E, il y aurait lieu de considérer, pour les besoins du traitement fiscal consécutif à la reconnaissance de cette distribution cachée de bénéfices, que l’avantage a été octroyé à la société A.

La société B justifie cette argumentation, d’une part, en se fondant sur le principe de « la chaîne participative », en vertu duquel lorsqu’une société serait reconnue comme avoir octroyé un avantage à son actionnaire indirect, il y aurait lieu de reconnaître une première distribution cachée de bénéfices entre la société et sa société mère directe, ainsi qu’une seconde distribution cachée de bénéfices entre la société mère et son propre actionnaire direct, au motif que le droit des sociétés ne permettrait pas à une société de procéder à une distribution au profit de son actionnaire indirect, de sorte que le régime des distributions cachées de bénéfices ne pourrait y contrevenir.

D’autre part, la société B soutient que retenir en l’espèce l’existence d’une seule distribution cachée de bénéfices, à savoir entre la société B et la société E, reviendrait à créer une rupture d’égalité devant l’impôt en ce sens qu’une distribution cachée de bénéfices qui interviendrait entre deux sociétés liées par un lien participatif seraient susceptibles de bénéficier d’une exonération au titre de l’article 147 LIR, mais qu’une telle possibilité serait d’office exclu lorsqu’une distribution cachée de bénéfices serait reconnue entre une société et un tiers intéressé, par principe non liés par un lien d’actionnariat.

Dans la mesure où le principe de la « chaîne participative » imposerait de considérer la société A comme étant le bénéficiaire de la distribution cachée de bénéfices, il y aurait lieu d’exonérer ladite distribution cachée de bénéfices sur le fondement de l’article 147 LIR, la société B argumentant qu’étant donné qu’elle se trouverait en intégration fiscale avec la société A et respecterait de ce fait les conditions de l’article 164bis LIR, elle respecterait nécessairement aussi les conditions de l’article 147 LIR pour bénéficier d’une exonération.

Aux termes de l’article 59 de la loi du 21 juin 1999, « La preuve des faits déclenchant l’obligation fiscale appartient à l’administration, la preuve des faits libérant de l’obligation fiscale ou réduisant la cote d’impôt appartient au contribuable », de sorte qu’il appartient en l’espèce à la société B de rapporter la preuve de l’application de l’exonération de la retenue à la source de 15% dont elle se prévaut.

Force est de constater qu’il a été retenu dans le cadre du rôle inscrit sous le numéro 45181 du rôle, d’une part, que la société E n’a pas détenu de parts de capital de la société B pendant l’année 2015 litigieuse, de sorte à la qualifier d’« intéressé » au sens de l’article 164, alinéa (3) LIR, et, d’autre part, qu’en cette qualité d’« intéressé » la société E a été reconnue comme bénéficiaire d’un avantage octroyé par la société B.

Il échet encore de constater qu’il est constant en cause que la société E n’est pas l’actionnaire de la société A par rapport à laquelle elle est également une société tierce, sans lien participatif.

Il s’ensuit que la situation décrite par la société B en rapport avec le principe de la « chaîne participative » diverge manifestement des circonstances de l’espèce. Si, en suivant la logique de la société B fondée sur le principe de la « chaîne participative » qui consisterait à remonter successivement toutes les chaînes de participation, une première distribution cachée 45 de bénéfices était certes susceptible d’être reconnue au profit de la société A dans la mesure où cette dernière est son actionnaire direct, force est cependant de constater qu’aucune distribution cachée de bénéfices ne saurait être reconnue de la société A à la société E, alors qu’il n’existe aucun lien participatif entre ces deux sociétés.

L’argumentation de la société B fondée sur le principe de la « chaîne participative » est également en contradiction avec une des justifications qu’elle avance pour en réclamer son application en l’espèce, à savoir que d’un côté, il ne serait pas permis de conclure à une distribution cachée de bénéfices directement dans le chef de la société E au motif que le droit des sociétés ne permettrait pas à une société de procéder à une distribution à un actionnaire indirect, et, d’un autre côté, le droit des sociétés ne s’opposerait cependant pas à la distribution cachée de bénéfices de la société A à la société E, précisément en raison de l’absence de lien participatif entre ces deux sociétés.

Il en résulte que la seule distribution cachée de bénéfices intervenue en l’espèce se situe dans le chef de la société B et dont la société E est le bénéficiaire direct, la circonstance que la société B et la société E ne sont pas liées par un lien participatif étant indifférente, alors que, tel que rappelé ci-avant dans le cadre du recours inscrit sous le numéro 45181 du rôle, l’article 164, alinéa (3) LIR prévoit justement la possibilité de conclure à l’existence d’une distribution cachée de bénéfices au profit d’un « intéressé », qui n’est, par nature, pas un associé ou un actionnaire au sens du droit des sociétés. L’affirmation de la société B selon laquelle il y aurait lieu d’appliquer le principe de la « chaîne participative » au motif que dans le cas contraire, le destinataire de la distribution cachée de bénéfices serait une personne non détentrice de titres représentatifs du capital social, encourt dès lors le rejet.

Cette conclusion n’est pas remise en cause par le moyen fondé sur une rupture d’égalité devant l’impôt, fondée, de l’endentement du tribunal, sur l’article 10bis de la Constitution. Si le principe d’égalité des citoyens devant l’impôt exige que tous ceux qui se trouvent dans la même situation de droit et de fait soient traités de façon identiques46, force est de constater que devant la toile de fond de l’article 147 LIR, une société octroyant un avantage à son associé et une société octroyant un avantage à un tiers, tel que c’est le cas de la société B, ne se trouvent manifestement ni dans la même situation de fait – en ce que le bénéficiaire de l’avantage n’est pas le même – ni dans la même situation de droit – précisément due à l’absence de lien participatif – de sorte que la société B n’est pas fondée à conclure à une rupture d’égalité au motif que les conditions de l’article 147 LIR sont telles que selon le cas, une exonération de la distribution cachée de bénéfices à la retenue à la source de 15% est d’office exclue.

Il s’ensuit que la distribution cachée de bénéfices de la société B au profit de la société E n’est pas susceptible de bénéficier de l’article 147 LIR, faute de lien participatif entre ces deux sociétés.

C’est dès lors à bon droit que le directeur a rejeté l’application de l’article 147 LIR pour conclure à la fixation de la retenue à la source de 15% conformément aux dispositions de l’article 97, 146 et 148 LIR précités.

46 Trib. adm., 1er juillet 1999, n° 10868 du rôle, Pas. adm. 2021, V° Impôts, n° 12.

46 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le présent recours inscrit sous le numéro 45701 du rôle est à rejeter pour n’être fondé dans aucun de ses moyens.

La société B sollicite encore l’allocation d’une indemnité de procédure de 5.000 euros sur base de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999. Cette demande est à rejeter, alors qu’elle ne justifie pas en quoi il serait inéquitable de laisser à sa charge les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

joint les rôles inscrits sous les numéros de rôle 45181 et 45701 ;

en ce qui concerne le recours inscrit sous le numéro 45181 du rôle ;

déclare irrecevable le recours principal en réformation pour autant qu’il est dirigé contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal pour l’année 2015, tous les deux émis le 10 juillet 2019 ;

déclare recevable le recours principal en réformation pour autant qu’il est dirigé contre la décision directoriale du 7 août 2020 ;

au fond le déclare non fondé, partant en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur les recours subsidiaires en annulation ;

rejette la demande en paiement d’une indemnité de procédure de 5.000 euros formulée par la société A ;

condamne la société A aux frais et dépens de l’instance ;

en ce qui concerne le recours inscrit sous le numéro 45181 du rôle ;

déclare irrecevable le recours principal en réformation pour autant qu’il est dirigé contre le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux pour l’année 2015 émis le 26 août 2020 ;

déclare recevable le recours principal en réformation pour autant qu’il est dirigé contre la décision du 30 novembre 2020 ;

au fond le déclare non fondé, partant en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur les recours subsidiaires en annulation ;

rejette la demande en paiement d’une indemnité de procédure de 5.000 euros formulée par la société B ;

47 condamne la société B aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 6 juillet 2022 par :

Annick Braun, vice-président, Michèle Stoffel, premier juge, Benoît Hupperich, attaché de justice délégué, en présence du greffier Luana Poiani.

s. Luana Poiani s. Annick Braun Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 6 juillet 2022 Le greffier du tribunal administratif 48


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 45181,45701
Date de la décision : 06/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/05/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2022-07-06;45181.45701 ?

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