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05/07/2022 | LUXEMBOURG | N°45200

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 05 juillet 2022, 45200


Tribunal administratif N° 45200 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 novembre 2020 4e chambre Audience publique du 5 juillet 2022 Recours formé par la société à responsabilité limitée … SARL, …, contre une décision du directeur de l’Inspection du Travail et des Mines en matière d’amende administrative

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 45200 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 9 novembre 2020 par Maître Marta Dobek, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom

de la société à responsabilité limitée … SARL, établie et ayant son siège social à L-…, ...

Tribunal administratif N° 45200 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 novembre 2020 4e chambre Audience publique du 5 juillet 2022 Recours formé par la société à responsabilité limitée … SARL, …, contre une décision du directeur de l’Inspection du Travail et des Mines en matière d’amende administrative

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 45200 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 9 novembre 2020 par Maître Marta Dobek, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée … SARL, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son gérant actuellement en fonctions, tendant à la réformation d’une décision du directeur de l’Inspection du Travail et des Mines du 7 août 2020 réduisant, sur opposition, l’amende administrative prononcée à son encontre en date du 22 juillet 2020 à un montant de 2.000 euros ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 1er février 2021 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 1er mars 2021 par Maître Marta Dobek pour le compte de sa mandante ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 26 mars 2021 ;

Vu le courrier de Maître Jean-François Steichen, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, déposé au greffe du tribunal administratif en date 12 avril 2022 et par laquelle il se constitue au nom et pour le compte de la société à responsabilité limitée … SARL, préqualifiée, en remplacement de Maître Marta Dobek ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Vu l’article 1er de la loi modifiée du 19 décembre 2020 portant adaptation temporaire de certaines modalités procédurales en matière civile et commerciale1 ;

Vu l’information de Maître Jean-François Steichen du 25 avril 2022 suivant laquelle il marque son accord à ce que l’affaire soit prise en délibéré sans sa présence ;

1 « Les affaires pendantes devant les juridictions administratives, soumises aux règles de la procédure écrite et en état d’être jugées, pourront être prises en délibéré sans comparution des mandataires avec l’accord de ces derniers. »Entendu le juge-rapporteur en son rapport ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Yves Huberty en sa plaidoirie à l’audience publique du 26 avril 2022, Maître Jean-François Steichen étant excusé.

___________________________________________________________________________

En date du 8 mai 2020, l’Inspection du Travail et des Mines, dénommée ci-après « l’ITM », s’adressa à la société à responsabilité limitée … SARL, ci-après désignée par « la société … », sur base des articles L.614-4, paragraphe (l), point a) et L.614-5 du Code du travail, afin d’enjoindre à cette dernière de lui communiquer, dans un délai de 8 jours, pour tous ses salariés, le contrat de travail initial et les avenants éventuels, les fiches de salaire, ainsi que la preuve du paiement des salaires de janvier 2020 à avril 2020, le livre concernant le congé légal de janvier 2020 à avril 2020, le registre spécial ou le fichier reprenant le début, la fin et la durée du travail journalier ainsi que toutes les prolongations de la durée normale du travail, les heures prestées les dimanches, les jours fériés légaux et le travail de nuit de janvier 2020 à avril 2020 et le titre de séjour ou l’autorisation de travail pour les ressortissants de pays tiers, tout en avertissant la société … que « (…) Tout manquement de votre part de vous y conformer risque de vous exposer aux mesures et sanctions administratives prévues à l'article L.614-13 du même Code qui dispose que : « En cas de non-respect endéans le délai imparti, des injonctions du directeur ou des membres de l'inspectorat du travail, dument notifiées par écrit, conformément aux articles L.614-4 à L.614-6 et L.614-8 à L.614-11, le directeur de l'Inspection du travail et des mines est en droit d'infliger à l'employeur, à son délégué ou au salarié une amende administrative dont le montant est fixé entre 25 euros et 25.000 euros. (…) ».

Faute d’avoir fait suite à l’injonction précitée, le directeur de l’ITM, dénommé ci-après « le directeur », infligea, en date du 22 juin 2020, par lettre recommandée avec accusé de réception, une amende à la société … à hauteur de 8.000 euros en sa qualité d’employeur, pour avoir omis de donner suite et de prendre les mesures requises endéans le délai imparti par l’injonction précitée du 8 mai 2020.

Par courrier du 10 juillet 2020, entré à l’ITM le 13 juillet 2020, la société …, forma opposition contre la décision directoriale précitée du 22 juin 2020.

En date du 14 juillet 2020, la société … déposa encore un certain nombre de documents à l’ITM, à l’appui de son opposition.

Par décision du 22 juillet 2020, le directeur déclara l’opposition de la société … partiellement fondée en réduisant l’amende à un montant de 4.000 euros, tout en énumérant un certain nombre de documents sollicités par l’ITM et faisant toujours défaut, la décision étant libellée dans les termes suivants :

« (…) Vu l'article L.614-13 du Code du travail ;

Vu l'injonction du 8 mai 2020 qui a été établie conformément aux articles L.614-4 paragraphe 1er, point a) et L.614-5 du Code du travail par …, Inspecteur en chef du travail, de l'Inspection du travail et des mines ;

Vu la décision du 22 juin 2020 du Directeur de l'Inspection du travail et des mines d'infliger l'amende administrative « 20-209-ICE-2020-26386 » de 8.000 euros à la société … S.A R.L. sise à L-… (matricule : …), en sa qualité d'employeur, pour avoir omis de donner des suites et de prendre les mesures requises endéans le délai imparti par l'injonction du 8 mai 2 2020 qui lui a été notifiée par …, Inspecteur en chef du travail, de l'Inspection du travail et des mines ;

Vu l'opposition du 10 juillet 2020 contre ladite décision du Directeur de l'Inspection du travail et des mines, qui a été notifiée par la société … S.A R.L., préqualifiée, et qui a été reçue par l'Inspection du travail et des mines en date du 13 juillet 2020 ;

Que l'opposition du 10 juillet 2020 contre la décision du Directeur de l'Inspection du travail et des mines a été régulièrement notifiée endéans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'amende administrative ;

Qu'à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020, Madame …, gérant technique de la société … S.A R.L., préqualifiée, pour le compte de la société … S.A R.L., préqualifiée, a versé en date du 14 juillet 2020, un classeur de pièces ;

Que Madame …, gérant technique de la société … S.A R.L., préqualifiée, a informé l'Inspection du travail et des mines dans son opposition du 10 juillet 2020, qu'à l'avenir, la société … SA R.L., préqualifiée, ferait de son mieux, pour répondre à temps aux courriers de l'Inspection du travail et des mines;

Que les contrats de travail initiaux et avenants éventuels pour les salariés … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule :…) et … (matricule : …), ont été notifiés par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020 ;

Que les fiches de salaire des mois de janvier 2020 à avril 2020 des salariés … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …) et … (matricule : …), ont été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020;

Que les fiches de salaire du mois de janvier 2020 des salariés … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …) et … (matricule : …), ont été notifiées par la société … SA R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020;

Que cependant, la fiche de salaire du mois de janvier 2020 du salarié … (matricule :

…), n'a pas été notifiée par la société … S.A R.L., préqualifiée, endéans le délai imparti par l'injonction du 8 mai 2020 et que celle-ci fait toujours défaut ;

Que les fiches de salaire des mois de janvier 2020 et février 2020 des salariés … (matricule : …), … (matricule : …) et … (matricule : …), ont été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020 ;

Que les fiches de salaire des mois de février 2020 à avril 2020 des salariés … (matricule : …) et … (matricule : …), ont été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020 ;

3 Que les fiches de salaire des mois de février 2020 et mars 2020 du salarié … (matricule : …), ont été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020 ;

Que les fiches de salaire du mois de février 2020 des salariés … (matricule : …) et … (matricule : …), ont été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020 ;

Que les fiches de salaire des mois de mars 2020 et avril 2020 de la salariée … (matricule : …), ont été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020 ;

Que les preuves de paiement des salaires des mois de janvier 2020 à avril 2020 des salariés … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …) et … (matricule : …), ont été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020;

Que les preuves de paiement du salaire du mois de janvier 2020 des salariés … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …) et … (matricule : …), ont été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020 ;

Que les preuves de paiement des salaires des mois de janvier 2020 et février 2020 des salariés … (matricule : …), et … (matricule : …), ont été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020 ;

Que les preuves de paiement des salaires des mois de février 2020 à avril 2020 des salariés … (matricule : …) et … (matricule :…), ont été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020 ;

Que les preuves de paiement des salaires des mois de février 2020 et mars 2020 du salarié … (matricule : …), ont été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020 ;

Que les preuves de paiement du salaire du mois de février 2020 des salariés … (matricule : …) et … (matricule : …), ont été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020 ;

Que les preuves de paiement des salaires des mois de mars 2020 et avril 2020 de la salariée … (matricule : …), ont été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020 ;

Que les preuves de paiement des salaires des mois de janvier 2020 et février 2020 de la salariée … (matricule : …), ont été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020 ;

Que les preuves de paiement des salaires des mois de mars 2020 et avril 2020 de la salariée … (matricule : …), n'ont cependant pas été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, endéans le délai imparti par l'injonction du 8 mai 2020 et que celles-ci font toujours défaut ;

4 Que la preuve de paiement du salaire du mois de février 2020 du salarié … (matricule : …), a été notifiée par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020 ;

Que les preuves de paiement des salaires des mois de janvier 2020, mars 2020 et avril 2020 du salarié … (matricule : …), n'ont cependant pas été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, endéans le délai imparti par l'injonction du 8 mai 2020 et que celles-ci font toujours défaut ;

Que la preuve de paiement du salaire du mois de janvier 2020 de la salariée … (matricule : …) a été notifiée par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui de l'opposition du 10 juillet 2020 ;

Que cependant, la preuve de paiement du salaire du mois de février 2020 de la salariée … (matricule : …) n'a pas été notifiée par la société … S.A R.L., préqualifiée, endéans le délai imparti par l'injonction du 8 mai 2020 et que celle-ci fait toujours défaut ;

Que le livre concernant le congé légal ou les fiches de salaire reprenant le décompte du congé légal des mois de janvier 2020 à avril 2020 des salariés … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule :…) et … (matricule : …), n'a pas été notifié par la société … S.A R.L., préqualifiée, endéans le délai imparti par l'injonction du 8 mai 2020 et que celui-ci fait toujours défaut ;

Que le livre concernant le congé légal ou la fiche de salaire reprenant le décompte du congé légal du mois de janvier 2020 des salariés … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …) et … (matricule : …), n'a pas été notifié par la société … S.A R.L., préqualifiée, endéans le délai imparti par l'injonction du 8 mai 2020 et que celui-ci fait toujours défaut ;

Que le livre concernant le congé légal ou fiches de salaire reprenant le décompte du congé légal des mois de janvier 2020 et février 2020 des salariés … (matricule : …) et … (matricule : …), n'a pas été notifié par la société … S.A R.L., préqualifiée, endéans le délai imparti par l'injonction du 8 mai 2020 et que celui-ci fait toujours défaut ;

Que le livre concernant le congé légal ou fiches de salaire reprenant le décompte du congé légal des mois de février 2020 à avril 2020 des salariés … (matricule : …) et … (matricule : …), n'a pas été notifié par la société … S.A R.L., préqualifiée, endéans le délai imparti par l'injonction du 8 mai 2020 et que celui-ci fait toujours défaut ;

Que le livre concernant le congé légal ou fiches de salaire reprenant le décompte du congé légal des mois de février 2020 et mars 2020 du salarié … (matricule : …), n'a pas été notifié par la société … S.A R.L., préqualifiée, endéans le délai imparti par l'injonction du 8 mai 2020 et que celui-ci fait toujours défaut ;

Que le livre concernant le congé légal ou fiches de salaire reprenant le décompte du congé légal des mois de mars 2020 et avril 2020 de la salariée … (matricule : …), n'a pas été notifié par la société … S.A R.L., préqualifiée, endéans le délai imparti par l'injonction du 8 mai 2020 et que celui-ci fait toujours défaut ;

5 Que les documents reçus par la société … S.A R.L, préqualifiée, à l'appui de son opposition du 10 juillet 2020 sont de nature à justifier une décharge partielle de l'amende administrative ;

Par ces motifs le Directeur de l'inspection du travail et des mines se déclare compétent pour connaître de l'opposition introduite par la société … S.A R.L.

sise à L-… (matricule : …), en sa qualité d'employeur;

la dit recevable et partiellement fondée ;

réduit le montant de l'amende administrative imposée par décision du 22 juin 2020 du Directeur de l'Inspection du travail et des mines à la somme de 4.000 euros (…) ».

Par courrier du 24 juillet 2020, déposé le même jour à l’ITM, la société … introduisit un recours gracieux, en y joignant de nouvelles pièces.

Par décision du 7 août 2020, le directeur accueilla partiellement le recours gracieux introduit par la société … en réduisant l’amende infligée à son encontre à 2.000 euros, cette décision étant libellée dans les termes suivants :

« (…) Vu l'article L.614-13 du Code du travail ;

Vu l'injonction du 8 mai 2020 qui a été établie conformément aux articles L.614-4 paragraphe 1er, point a) et L.614-5 du Code du travail par …, Inspecteur en chef du travail, de l'Inspection du travail et des mines ;

Vu la décision du 22 juin 2020 du Directeur de l'Inspection du travail et des mines d'infliger l'amende administrative « 20-209-ICE-2020-26386 » de 8.000 euros à la société … S.A R.L. sise à L-… (matricule : …), en sa qualité d'employeur, pour avoir omis de donner des suites et de prendre les mesures requises endéans le délai imparti par l'injonction du 8 mai 2020 qui lui a été notifiée par …, Inspecteur en chef du travail, de l'Inspection du travail et des mines ;

Vu l'opposition du 10 juillet 2020 contre ladite décision du Directeur de l'Inspection du travail et des mines, qui a été notifiée par la société … S.A R.L., préqualifiée, et qui a été reçue par l'Inspection du travail et des mines en date du 13 juillet 2020 ;

Que l'opposition du 10 juillet 2020 contre la décision du Directeur de l'Inspection du travail et des mines a été régulièrement notifiée endéans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'amende administrative ;

Vu le recours gracieux du 24 juillet 2020 ayant pour objet l'infirmation de l'amende administrative « ITM Amende 20-209-ICE-2020-26386 » qui a été notifié par Madame …, gérant technique de la société … S.A R.L., préqualifiée, pour le compte de la société … S.A R.L., préqualifiée, en date du 24 juillet 2020 et qui a été reçu par l'Inspection du travail et des mines en date du 24 juillet 2020 ;

6 Que le recours gracieux du 24 juillet 2020, contre ladite décision du Directeur de l'Inspection du travail et des mines a été régulièrement notifié ;

Que Madame …, gérant technique de la société … S.A R.L., préqualifiée, déclare dans son recours gracieux du 24 juillet 2020, qu'à l'avenir, la société … S.A R.L., préqualifiée, ferait de son mieux, pour répondre à temps aux courriers de l'Inspection du travail et des mines ;

Que la fiche de salaire du mois de janvier 2020 du salarié … (matricule : …), a seulement été notifiée par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui du recours gracieux du 24 juillet 2020 ;

Que la preuve de paiement du salaire du mois de février 2020 de la salariée … (matricule : …), a seulement été notifiée par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui du recours gracieux du 24 juillet 2020 ;

Que le livre concernant le congé légal ou les fiches de salaire reprenant le décompte du congé légal des mois de janvier 2020 à avril 2020 des salariés … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule :…), … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …) et … (matricule : …), a seulement été notifié par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui du recours gracieux du 24 juillet 2020 ;

Que le livre concernant le congé légal ou la fiche de salaire reprenant le décompte du congé légal du mois de janvier 2020 des salariés … (matricule : …), … (matricule : …), … (matricule : …) et … (matricule : …), a seulement été notifié par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui du recours gracieux du 24 juillet 2020 ;

Que le livre concernant le congé légal ou fiches de salaire reprenant le décompte du congé légal des mois de janvier 2020 et février 2020 des salariés … (matricule : …) et … (matricule : …), a seulement été notifié par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui du recours gracieux du 24 juillet 2020 ;

Que le livre concernant le congé légal ou fiches de salaire reprenant le décompte du congé légal des mois de février 2020 à avril 2020 des salariés … (matricule : …) et … (matricule : …), a seulement été notifié par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui du recours gracieux du 24 juillet 2020 ;

Que les preuves de paiement des salaires des mois de mars 2020 et avril 2020 de la salariée … (matricule : …), n'ont pas été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, endéans le délai imparti par l'injonction du 8 mai 2020 et que celles-ci font toujours défaut ;

Que les preuves de paiement des salaires des mois de janvier 2020, mars 2020 et avril 2020 du salarié … (matricule : …), n'ont pas été notifiées par la société … S.A R.L., préqualifiée, endéans le délai imparti par l'injonction du 8 mai 2020 et que celles-ci font toujours défaut ;

Que le livre concernant le congé légal ou la fiche de salaire reprenant le décompte du congé légal du mois de janvier 2020 des salariés … (matricule : …) et … (matricule : …), n'a pas été notifié par la société … S.A R.L., préqualifiée, endéans le délai imparti par l'injonction du 8 mai 2020 et que celui-ci fait toujours défaut ;

7 Que le livre concernant le congé légal ou fiches de salaire reprenant le décompte du congé légal des mois de février 2020 et mars 2020 du salarié … (matricule : …), a été notifié par la société … S.A R.L., préqualifiée, à l'appui du recours gracieux du 24 juillet 2020 ;

Que le livre concernant le congé légal ou fiches de salaire reprenant le décompte du congé légal des mois de mars 2020 et avril 2020 de la salariée … (matricule : …), n'a pas été notifié par la société … S.A R.L., préqualifiée, endéans le délai imparti par l'injonction du 8 mai 2020 et que celui-ci fait toujours défaut ;

Que les documents reçus par la société … S.A R.L., préqualifiée, dans le cadre de son recours gracieux sont de nature à justifier une décharge partielle de l'amende administrative ;

Par ces motifs le Directeur de l'Inspection du travail et des mines se déclare compétent pour connaître du recours gracieux introduit par la société … S.A R.L. sise à L-… (matricule : …), en sa qualité d'employeur;

le dit recevable et partiellement fondé ;

réduit le montant de l'amende administrative imposée par décision du 22 juin 2020 du Directeur de l'Inspection du travail et des mines à la somme de 2.000 euros (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 9 novembre 2020, la société … a fait introduire un recours tendant à la réformation de la décision directoriale précitée du 7 août 2020.

En application de l’article L.614-14 du Code du travail, « toutes les décisions administratives prises sur base des dispositions de la présente loi sont soumises au recours en réformation visé à l’article 3 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif ».

En l’espèce, la décision déférée a été prise sur base de l’article L.614-13 du Code du travail et elle porte sur la fixation d’une amende administrative décidée à l’encontre de la société … en sa qualité d’employeur. Il s’ensuit que le tribunal administratif est compétent pour connaître du recours en réformation introduit contre la décision litigieuse.

Dans son mémoire en réponse et à titre liminaire, le délégué du gouvernement se rapporte à prudence de justice quant à la recevabilité du recours quant à l’intérêt à agir de la société …, quant au respect du délai d’action et quant à la forme, sans pour autant fournir la moindre argumentation à ce sujet.

Force est au tribunal de préciser que s’il est exact que le fait, pour une partie, de se rapporter à prudence de justice équivaut à une contestation, il n’en reste pas moins qu’une contestation non autrement étayée est à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au juge administratif de suppléer à la carence des parties au litige et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions.

Dès lors, étant donné que la partie gouvernementale est restée en défaut de préciser dans quelle mesure l’intérêt à agir, la forme, respectivement le délai d’introduction du recours n’auraient pas été respectés, les moyens d’irrecevabilité afférents encourent le rejet, étant relevé que le tribunal n’entrevoit pas non plus de cause d’irrecevabilité d’ordre public qui serait à soulever d’office.

Il s’ensuit que le recours en réformation est encore à déclarer recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours et en fait, la demanderesse, passe en revue les rétroactes à la base du présent litige.

En droit, la demanderesse soutient qu’au courant de l’année 2019, elle aurait dû faire face à de nombreux congés de maladie, de sorte à manquer de personnel, raison pour laquelle elle aurait eu du mal à donner suite aux nombreuses demandes et injonctions de l’ITM endéans les délais impartis. Il ne faudrait pas négliger qu’il s’agirait d’une entreprise familiale à taille humaine, de sorte que les problèmes liés au manque de personnel auraient eu comme conséquence qu’elle n’aurait pas pu honorer les nombreuses demandes de l’ITM, ceci ayant encore été accentué par la crise sanitaire ayant perturbé son organisation.

De même elle explique s’être toutefois efforcée à communiquer l’ensemble des documents demandés par l’ITM endéans les meilleurs délais.

La demanderesse estime qu’au vu des circonstances, il serait manifestement inéquitable de maintenir l’amende prononcé à son égard pour non-respect d’une injonction intervenue pendant l’état de crise, de sorte qu’elle conclut à la réformation de l’amende prononcée le 7 août 2020 afin d’être déchargée du paiement de l’amende imposée au vu du fait qu’elle aurait communiqué l’ensemble des documents en sa possession les 14 et 24 juillet 2020, sinon de voir réduire celle-ci à de plus justes proportions, alors qu’elle serait manifestement excessive et disproportionnée par rapport aux faits lui reprochés. La demanderesse rajoute qu’il y aurait lieu de prendre en considération qu’elle serait particulièrement atteinte par l’impact de la crise sanitaire d’un point de vue financier, étant donné qu’elle exercerait principalement dans le domaine de la restauration et l’hôtellerie, secteur ayant dû limiter ses activités durant plusieurs mois.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours pour ne pas être fondé.

Aux termes de l’article L.614-4, paragraphe (1), point a) du Code du Travail :

« (1) Les membres de l’inspectorat du travail, sont autorisés en outre :

a) à procéder à tous les examens, contrôles ou enquêtes jugés nécessaires pour s’assurer que les dispositions légales, réglementaires, administratives et conventionnelles sont effectivement observées et notamment: (…) - à demander communication dans les meilleurs délais de tous livres, registres, fichiers, documents et informations relatifs aux conditions de travail, en vue d’en vérifier la conformité avec les dispositions légales, réglementaires, administratives et conventionnelles, de les reproduire ou d’en établir des extraits; (…) ».

Il résulte de la prédite disposition légale que les membres de l’ITM peuvent procéder aux contrôles et examens qu’ils estiment nécessaires en vue de garantir l’observation des dispositions légales et réglementaires, respectivement conventionnelles applicables, et, qu’ilspeuvent à cette fin notamment demander communication de tous les documents et informations relatifs aux conditions de travail des salariés d’une entreprise endéans un certain délai.

Le tribunal est amené à examiner si la demanderesse a fait parvenir à l’ITM, tel qu’elle le prétend, tous les documents sollicités, preuve dont elle a la charge, afin de vérifier si l’amende confirmée par la décision déférée est toujours justifiée au jour où il statue. En effet, dans le cadre d’un recours en réformation, le tribunal est amené à apprécier les faits commis par le demandeur en vue de déterminer si la sanction prononcée par l’autorité compétente a un caractère proportionné et juste, en prenant en considération la situation dans son ensemble, étant précisé que dans le cadre d’un recours en réformation, le juge est amené à apprécier la décision déférée quant à son bien-fondé et à son opportunité, avec le pouvoir d’y substituer sa propre décision, impliquant que cette analyse s’opère au moment où il est appelé à statuer2, de sorte qu’il y a lieu de statuer suivant les éléments de fait et de droit présentement acquis3.

Force est de relever que l’injonction de l’ITM du 8 mai 2020 se fonde sur les articles L.614-4 et L.614-5 du Code du travail, tout en rappelant les dispositions de l’article L.614-13 du même Code aux termes duquel « (1) En cas de non-respect endéans le délai imparti, des injonctions du directeur ou des membres de l’inspectorat du travail, dûment notifiées par écrit, conformément aux articles L.614-4 à L.614-6 et L.614-8 à L.614-11, le directeur de l’Inspection du travail et des mines est en droit d’infliger à l’employeur, à son délégué ou au salarié une amende administrative.

(…) (5) Le montant de l’amende administrative est fixé selon le degré de gravité de l’infraction par le directeur de l’Inspection du travail et des mines à :

a) entre 25 euros et 25.000 euros pour les injonctions qui ont été notifiées en application de l’article L.614-4;

(…) Pour fixer le montant de l’amende, le directeur de l’Inspection du travail et des mines prend en compte les circonstances et la gravité du manquement ainsi que le comportement de son auteur. (…) ».

Il s’ensuit que l’ITM était fondée, sur base de l’article L.614-4, paragraphe (1), point a) du Code du travail à demander à la partie demanderesse la communication pour tous ses salariés, endéans un certain délai, des contrats de travail initial et les avenants éventuels, les fiches de salaire, ainsi que la preuve du paiement des salaires de janvier 2020 à avril 2020, le livre concernant le congé légal de janvier 2020 à avril 2020, le registre spécial ou le fichier reprenant le début, la fin et la durée du travail journalier ainsi que toutes les prolongations de la durée normale du travail, les heures prestées les dimanches, les jours fériés légaux et le travail de nuit de janvier 2020 à avril 2020 et le titre de séjour ou l’autorisation de travail pour les ressortissants de pays tiers.

2 Trib. adm., 1er octobre 1997, n° 9699 du rôle, Pas adm. 2021, V° Recours en réformation, n° 16 et les autres références y citées.

3 Trib. adm., 8 juillet 2002, n° 13600 du rôle, Pas adm. 2021, V° Recours en réformation, n° 17 et les autres références y citées.Dans ce cadre, le tribunal doit constater qu’en tout état de cause, les documents sollicités par l’ITM, à travers l’injonction du 8 mai 2020 sont des documents a priori standard que l’employeur devrait avoir à sa disposition dès l’écoulement du mois afférent, de sorte que le délai de 8 jours calendrier imposé par l’injonction du 8 mai 2020 pour communiquer lesdits documents n’appelle aucune critique.

Force est en effet de constater que bien que la partie demanderesse ait été enjointe, le 8 mai 2020, de communiquer à l’ITM, les documents précités pour tous ses salariés, et s’il n’est pas contesté par la partie étatique que la demanderesse a versé certains des documents sollicités par l’ITM au fil de l’instruction précontentieuse du présent dossier, cette communication incomplète des documents réclamés par l’ITM n’est pas intervenue dans le délai imparti par l’injonction, de sorte que c’est a priori à bon droit que le directeur de l’ITM a infligé une amende administrative à la demanderesse.

En effet, il y a lieu de préciser qu’aux vœux de l’article L.614-13 précité du Code du travail, non seulement le défaut de transmission des documents sollicités, mais également le simple retard dans les suites données à une injonction sont passibles d’une amende.

La demanderesse fait toutefois valoir que le montant de l’amende de 2.000 euros, n’aurait pas raison d’être, respectivement devrait être revu à la baisse, alors qu’elle aurait remis tous les documents en sa possession les 14 et 24 juillet 2020, de sorte que l’amende ne se justifierait plus. En tout état de cause, elle demande au tribunal de réduire le montant réclamé par le biais de l’amende administrative du 7 août 2020.

En ce qui concerne l’affirmation de la demanderesse selon laquelle l’amende en question serait disproportionnée et que le montant réclamé devrait être revu à la baisse, il convient de rappeler que l’article L.614-13 du Code du travail, précité, laisse une large marge d’appréciation en ce qui concerne le montant à prononcer à titre d’amende administrative.

Suivant les termes de la décision déférée du 7 août 2020, les seuls documents non encore valablement communiqués à ce moment sont la preuve de paiement du salaire du mois de mars et avril 2020 de la salariée …, la preuve de paiement du salaire du mois de janvier, mars et avril 2020 du salarié …, le livre concernant le congé légal ou la fiche de salaire reprenant le décompte du congé légal du mois de janvier 2020 des salariés … et …, ainsi que le livre concernant le congé légal ou la fiche de salaire reprenant le décompte du congé légal du mois de mars et avril 2020 de la salariée ….

Au vu des pièces versées par la partie demanderesse, ensemble avec son recours, force est au tribunal de constater que tous les documents manquants énumérés dans la décision directoriale déférée du 7 août 2020 font actuellement toujours défaut.

Il y a partant lieu de retenir que la demanderesse est restée en défaut d’avoir donné toutes les suites nécessaires à l’injonction lui adressée en date du 8 mai 2020 dans les délais lui impartis, sans que cette conclusion ne puisse être énervée par un prétendu problème de fonctionnement de la société en raison de l’état d’urgence lié à la pandémie sanitaire, tel que mis en avant par la demanderesse, alors qu’elle est en aveu que son activité de restauration et d’hôtellerie était limitée à cette époque, ce qui lui aurait permis de concentrer ses efforts sur les obligations administratives lui incombant.

Etant rappelé qu’aux vœux de l’article L.614-13 précité du Code du travail, le simple retard dans les suites données à une injonction est déjà passible d’une amende, et au vu du constat fait ci-avant que tous les documents énumérés dans la décision directoriale font toujours défaut, force est au tribunal de retenir qu’à l’heure actuelle, tant le principe que le montant de l’amende prononcée par la décision déférée doivent être considérés comme étant justifiés et proportionnés par rapport aux circonstances de l’espèce, par rapport à la gravité du manquement ainsi que par rapport au comportement de son auteur, étant à préciser qu’en l’espèce, le directeur a pris en compte les documents transmis par la demanderesse et a accepté, à chaque fois, de réduire le montant des amendes lui infligées précédemment jusqu’à retenir, dans le cadre de la décision déférée du 7 août 2020, une amende d’un montant de 2.000 euros.

Il s’ensuit qu’à défaut de tout autre moyen, le recours est à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit en la forme le recours en réformation ;

au fond, le déclare non justifié, partant le rejette ;

condamne la demanderesse aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 5 juillet 2022 par :

Paul Nourissier, vice-président, Olivier Poos, premier juge, Emilie Da Cruz De Sousa, juge, en présence du greffier Marc Warken.

s.Marc Warken s.Paul Nourissier Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 5 juillet 2022 Le greffier du tribunal administratif 12


Synthèse
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 45200
Date de la décision : 05/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2022-07-05;45200 ?

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