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05/07/2022 | LUXEMBOURG | N°44820

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 05 juillet 2022, 44820


Tribunal administratif N° 44820 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 août 2020 3e chambre Audience publique du 5 juillet 2022 Recours formé par Monsieur …, … (Allemagne), contre des actes de l’Agence pour le Développement de l’Emploi en matière d’indemnité compensatoire

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 44820 du rôle et déposée le 10 août 2020 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tabl

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Tribunal administratif N° 44820 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 août 2020 3e chambre Audience publique du 5 juillet 2022 Recours formé par Monsieur …, … (Allemagne), contre des actes de l’Agence pour le Développement de l’Emploi en matière d’indemnité compensatoire

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 44820 du rôle et déposée le 10 août 2020 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à D-… (Allemagne), …, et ayant élu domicile en l’étude de son mandataire sise à L-2227 Luxembourg, 15, avenue de la Porte-Neuve, tendant principalement à la réformation, sinon subsidiairement à l’annulation :

1) « de la décision implicite de refus de l’Agence pour le Développement de l’Emploi, suite au recours gracieux contre une décision de celle-ci de déduire la gratification, perçue en avril 2019, de l’indemnité compensatoire versée pour le même mois » ; et 2) « de la décision de l’Agence pour le Développement de l’Emploi de déduire la gratification, perçue en avril 2019, de l’indemnité compensatoire intitulée « Décompte de l’indemnité compensatoire Abrëll 2019 » » ;

Vu l’acte de l’huissier de justice suppléant Kelly FERREIRA SIMOES, en remplacement de l’huissier de justice Carlos CALVO, du 2 septembre 2020, ayant signifié le recours à l’Agence pour le Développement de l’Emploi (ADEM), représentée par sa directrice, sinon par son comité directeur, sinon par tout autre organe de représentation actuellement en fonctions, ayant ses bureaux à L-1229 Luxembourg, 10, rue Bender ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 15 décembre 2020 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 15 janvier 2021 par Maître Jean-Marie BAULER au nom de Monsieur …, préqualifié ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 15 février 2021 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les actes attaqués ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Jonathan HOLLER, en remplacement de Maître Jean-Marie BAULER, et Monsieur le délégué du gouvernement Yves HUBERTY en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 14 décembre 2021.

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1Par décision du 2 août 2010, la Commission mixte de reclassement des travailleurs incapables à exercer leur dernier poste de travail, ci-après désignée par « la Commission mixte », décida, dans sa séance du 16 juillet 2010, le reclassement interne de Monsieur … dans le cadre de son contrat de travail conclu avec la société …, … AG, ci-après désignée par « la société … ».

Par avenant du 18 novembre 2010, le temps de travail de Monsieur … fut réduit de 40 heures à 20 heures par semaine à partir du 3 août 2010.

Par formulaire du 20 septembre 2010, réceptionné le 21 octobre 2010, Monsieur … introduisit auprès de l’administration de l’Emploi, service des travailleurs à capacité de travail réduite, une demande d’octroi de l’indemnité compensatoire en application des articles L.551-1 à L.552-3 du Code du travail.

Il ressort d’une « Gehaltsabrechnung » établie par la société …, ainsi que d’une déclaration mensuelle relative à l’indemnité compensatoire du 16 avril 2019, réceptionnée par l’Agence pour le Développement de l’Emploi, ci-après désignée par « l’ADEM », le 18 avril 2019, que Monsieur … avait perçu pour le mois d’avril 2019 une rémunération brute d’un montant de ….- euros, ainsi qu’un treizième mois/une gratification d’un montant brut de ….-

euros, soit un total de ….- euros.

Suivant un « décompte de l’indemnité compensatoire Abrëll 2019 » établie par l’ADEM, l’indemnité compensatoire accordée à Monsieur … pour le mois d’avril 2019 fut fixée à ….-

euros brut, soit ….- euros net.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 9 avril 2020, le mandataire de Monsieur … s’adressa au service des travailleurs à capacité de travail réduite de l’administration de l’Emploi dans les termes suivants :

« […] Par la présente, j’ai l’honneur de vous écrire au nom de Monsieur …, demeurant à D-…, qui m’a chargé de la sauvegarde de ses intérêts et plus particulièrement d’introduire un recours gracieux contre votre décision de déduire la gratification, perçue en avril 2019, de l’indemnité compensatoire versée pour le même mois.

Mon mandant a fait l’objet d’un reclassement interne comportant une réduction du temps de travail en application de l’article L.551-1 du Code du travail, de sorte qu’il occupait jusqu’à sa retraite un poste à temps partiel de 50% et qu’il a bénéficié en conséquence d’une indemnité compensatoire payée mensuellement par l’ADEM.

Au mois d’avril 2019, l’employeur de Monsieur … (la …) lui a versé une gratification unique et exceptionnelle (Jubiläum 40 Jahre …) pour récompenser les 40 années de service au sein de l’entreprise […].

Mon mandant, conformément à ses obligations légales envers l’ADEM, a indiqué dans sa déclaration de rémunération mensuelle ladite gratification […].

Or, lors du décompte de l’indemnité compensatoire du mois d’avril 2019, vos services, pour des raisons que nous ignorons, ont pris en compte la gratification en question et l’ont déduite du montant de l’indemnité compensatoire due pour ce mois […].

2En premier lieu, force est de constater que la décision litigieuse a été prise en violation de l’obligation d’information prescrite par l’article 9 de la PANC ainsi que de celle de motivation, de façon qu’elle est nulle.

Dans ce contexte M. … est surpris et profondément désolé de devoir constater que malgré ses itératives interventions/demandes d’explications écrites vos services n’ont pas cru utile de répondre.

En second lieu, l’article L.551-2 § 3 alinéa 1er du Code du travail énonce notamment qu’ « Au cas où le reclassement professionnel comporte une diminution de la rémunération, le salarié sous contrat de travail a droit à une indemnité compensatoire représentant la différence entre le revenu mensuel moyen cotisable au titre de l’assurance pension réalisé au cours des douze mois de calendrier précédant la décision de reclassement professionnel et le nouveau revenu mensuel cotisable au titre de l’assurance pension ».

Incontestablement ledit article ne fait aucune référence expresse à une quelconque gratification, à une prime et/ou à un revenu non périodique.

Au contraire, le recours à la notion de « revenu mensuel » entend exclure tout revenu non périodique (non mensuel), tel que la gratification « unique et exceptionnelle » perçue au mois d’avril 2019 par Monsieur …, ce d’autant plus qu’en principe la gratification est à considérer comme une libéralité.

Même la notion de « revenu mensuel cotisable », utilisée par le législateur pour le calcul de l’indemnité compensatoire, confirme qu’une gratification unique et exceptionnelle ne saurait être déduite de l’indemnité compensatoire.

Il résulte de l’article 241 du CSS que les revenus non périodiques, et en particulier les gratifications, sont expressément exclus de l’assiette cotisable et donc de la notion de « revenu mensuel cotisable » au sens de l’article L.551-2 § 3 alinéa 1er du CT.

Au vu des développements qui précèdent je vous saurais gré de bien vouloir revenir sur votre décision de prendre en compte, et de déduire, la gratification unique et exceptionnelle (Jubiläum 40 Jahre …) dans le calcul de l’indemnité compensatoire de Monsieur … pour le mois d’avril 2019 et de bien vouloir la lui rembourser.

Dans la négative, je vous saurais gré de bien vouloir prendre une décision susceptible de faire l’objet d’un recours devant les juridictions compétentes. […] ».

Par courrier recommandé du 2 juillet 2020, le mandataire de Monsieur … s’adressa au directeur de l’administration de l’Emploi comme suit : « […] J’ai l’honneur de vous écrire au nom de Monsieur …, alors que sauf erreur de ma part vous n’avez pas réservé des suites à mon recours gracieux du 9 avril 2020 […].

Je n’ai pas à vous rappeler que le défaut de réponse endéans les 3 mois est à considérer commune une réponse négative non-motivée et partant illégale.

Il me serait agréable si vous pouviez m’indiquer les motifs de votre refus que mon mandant considère comme non fondés. […] ».

3Par requête déposé au greffe du tribunal administratif le 10 août 2020, Monsieur … a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation, sinon subsidiairement à l’annulation :

1) « de la décision implicite de refus de l’Agence pour le Développement de l’Emploi, suite au recours gracieux contre une décision de celle-ci de déduire la gratification, perçue en avril 2019, de l’indemnité compensatoire versée pour le même mois » ; et 2) « de la décision de l’Agence pour le Développement de l’Emploi de déduire la gratification, perçue en avril 2019, de l’indemnité compensatoire intitulée « Décompte de l’indemnité compensatoire Abrëll 2019 » » ;

A titre liminaire, et en ce qui concerne la demande en communication du dossier administratif formulée exclusivement dans le dispositif de la requête introductive, le tribunal constate que la partie étatique a déposé ensemble avec son mémoire en réponse, une farde de pièce correspondant a priori au dossier administratif. A défaut pour le demandeur de remettre en question le caractère complet du dossier mis à disposition à travers le mémoire en réponse, la demande en communication du dossier administratif est à rejeter comme étant devenue sans objet.

Quant à la compétence du tribunal de céans pour statuer sur le présent recours, force est de constater que dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement soulève l’irrecevabilité du recours pour avoir été introduit auprès d’une juridiction matériellement incompétente. Il se prévaut, à cet égard, d’un jugement du tribunal administratif du 18 septembre 2019, inscrit sous le numéro 41352a du rôle, et soutient que Monsieur … aurait dû s’adresser à la Commission mixte, seule compétente pour prendre une décision en matière d’indemnité compensatoire, et non pas à l’ADEM, et que le recours contentieux subséquent serait, quant à lui, à introduire auprès du Conseil arbitral de la sécurité sociale, et non pas auprès du tribunal administratif.

Dans son mémoire en réplique, Monsieur … entend résister au moyen d’irrecevabilité soulevé en se référant à un jugement du tribunal administratif du 7 mai 2019, inscrit sous le numéro 41352 du rôle, ainsi qu’aux dispositions de l’article 2, paragraphe (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », tout en faisant valoir que la question pertinente en l’espèce ne serait pas celle de savoir qui est l’autorité compétente pour prendre la décision en question, mais celle de connaître la juridiction compétente pour statuer sur la légalité ou le bien-fondé d’une décision faisant grief prise par une autorité administrative.

Dans son mémoire en duplique, le délégué du gouvernement, après avoir rappelé que la décision fixant le montant de l’indemnité compensatoire pour le mois d’avril 2019, contestée en l’espèce, serait, en vertu de l’article L. 552-1 du Code du travail, une décision qui relèverait du champ de compétence de la Commission mixte, soutient que si, en l’espèce, cette décision n’avait certes pas été formalisée, il n’en demeurerait pas moins qu’il s’agirait d’une décision de la Commission mixte et non pas de l’ADEM. Il s’ensuivrait que tout recours à l’encontre de cette même décision serait à introduire devant les juridictions sociales, et que le recours sous analyse serait à déclarer irrecevable pour avoir été introduit auprès d’une juridiction incompétente.

Force est d’abord de constater que le présent litige porte sur le montant de l’indemnité compensatoire tel que retenu dans le « Décompte de l’indemnité compensatoire Abrëll 2019 », 4le demandeur reprochant, en effet, à l’ADEM d’avoir, à tort, déduit de l’indemnité compensatoire en question sa gratification perçue en avril 2019. Se pose dès lors la question de savoir si le prédit décompte est à qualifier de décision administrative relevant du champ de compétence du tribunal de céans.

Il échet de rappeler, tel que soutenu à bon droit par le demandeur, que la compétence ratione materiae des juridictions administratives est définie par rapport au contrôle des actes administratifs et non des autorités dont ils émanent. Il a ainsi été jugé qu’« au Luxembourg, la loi qui confère au juge administratif le pouvoir d’annuler les actes administratifs ne vise pas les autorités administratives en tant que telles, mais les actes administratifs, ce qui appelle l’application de critères matériel ou fonctionnel plutôt qu’organique pour la détermination de l’existence d’un acte administratif1».

Force est, par ailleurs, de relever que l’article 2 de la loi du 7 novembre 1996 limite l’ouverture d’un recours devant les juridictions administratives notamment aux conditions cumulatives que l’acte litigieux doit constituer une décision administrative, c’est-à-dire émaner d’une autorité administrative légalement habilitée à prendre des décisions unilatérales obligatoires pour les administrés et que cet acte doit affecter les droits et intérêts de la personne qui le conteste2 . En d’autres termes, l’acte administratif susceptible de faire l’objet d’un recours contentieux doit constituer, dans l’intention de l’autorité qui l’émet, une véritable décision de nature à faire grief, c’est-à-dire, un acte final dans la procédure susceptible de produire par lui-même des effets juridiques affectant la situation personnelle et patrimoniale de l’intéressé. Si le caractère décisoire de l’acte attaqué est une condition nécessaire à la recevabilité du recours contentieux, il n’est pas pour autant une condition suffisante. Pour être susceptible de faire l’objet d’un recours la décision critiquée doit encore être de nature à faire grief3.

N’ont pas la qualité de décision faisant grief, comme n’étant pas destinées à produire, par elles-mêmes, des effets juridiques, les simples mesures d’exécution d’une décision administrative puisqu’elles ne sont pas susceptibles de produire un effet de droit indépendamment de la décision dont elles constituent l’exécution, la modification apportée à l’ordonnancement juridique étant l’œuvre de la décision exécutée4.

A cet égard, il échet de relever qu’en vertu de l’article L. 552-1. (1) du Code du travail, dans sa version applicable au présent litige, : « Il est institué une Commission mixte auprès du ministre ayant le Travail et l’Emploi dans ses attributions. Elle prend les décisions relatives au reclassement professionnel interne ou externe des salariés, relatives au statut de personne en reclassement professionnel, relatives à l’indemnité professionnelle d’attente, relatives à la taxe de compensation et relatives à l’indemnité compensatoire et aux mesures de réhabilitation ou de reconversion. ».

La disposition légale susmentionnée a été introduite dans le Code du travail par le biais de l’article 1er, paragraphe (26), de la loi du 23 juillet 2015 portant modification du Code du travail et du Code de la sécurité sociale concernant le dispositif du reclassement interne et externe, ci-après désignée par « la loi du 23 juillet 2015 », entrée en vigueur, conformément à 1 Cour adm., 13 janvier 2009, n° 24616C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Acte administratif n° 5.

2 Trib. adm., 26 août 2010, n° 23551 du rôle, Pas. adm. 2021, V° Acte administratif n° 4.

3 Trib. adm., 18 juin 1998, nos 10617 et 10618 du rôle, Pas. adm. 2021, V° Acte administratif n°70.

4 Trib. adm., 29 février 2016, n° 35543, Pas. adm. 2021, V° Acte administratif, n° 70 et les autres références y citées.

5l’article 6 de ladite loi, le premier jour du sixième mois suivant sa publication au Mémorial, publication intervenue le 27 juillet 2015.

Conformément à l’article L. 552-1. (1) du Code du travail, dans sa version applicable au présent litige, la Commission mixte est dès lors compétente pour prendre les décisions relatives à l’indemnité compensatoire, ce qui signifie, à défaut de distinction opérée par le législateur, tant dans le texte légal lui-même que dans les travaux préparatoires, que cette compétence porte aussi bien sur le principe d’octroi de l’indemnité compensatoire que sur le quantum de celle-ci. Une telle interprétation est conforme à la volonté du législateur qui a clairement expliqué, dans le cadre de l’exposé des motifs du projet de loi numéro 6555 portant modification du Code du travail et du Code de la sécurité sociale concernant le dispositif du reclassement interne et externe, que l’objectif de la loi du 23 juillet 2015 était notamment « […] de procéder à une coordination plus efficace des différents intervenants et de rendre plus transparents et rapides les procédures et processus décisionnels à parcourir par l’assuré [et] de coordonner les voies de recours […] », objectifs qui ne seraient pas atteints en cas d’interprétation contraire5.

En effet, en dissociant la question du calcul des indemnités compensatoires de la question du principe d’octroi d’une telle indemnité, la première relevant de la compétence de l’ADEM, respectivement de son directeur, tandis que la seconde reviendrait à la Commission mixte, les différentes décisions relèveraient de deux ordres de juridictions distincts et présenteraient des voies de recours, ainsi que des régimes procéduraux distincts, alors que le justiciable devrait avoir recours soit aux juridictions administratives soit aux juridictions sociales, en fonction de l’objet du litige6.

Or, le législateur a conféré à la Commission mixte, à travers l’article L. 552-1. (1) du Code du travail, la compétence décisionnelle exclusive relative aux indemnités compensatoires à octroyer aux personnes en reclassement professionnel, dont les décisions, conformément à l’article L. 552-3.7 du Code du travail, relèvent du champ de compétence matérielle des juridictions sociales, et plus particulièrement du Conseil arbitral de la Sécurité sociale en première instance et du Conseil supérieur de la Sécurité sociale en instance d’appel8.

Au vu de ce qui précède, force est de constater que le décompte de l’indemnité compensatoire pour le mois d’avril 2019 visé en l’espèce n’a pas la qualité de décision faisant grief, susceptible de recours, alors qu’il ne produit pas par lui-même un effet juridique, mais constitue au contraire une simple mesure d’exécution par l’ADEM de la décision administrative prise en amont par la Commission mixte et fixant le montant de l’indemnité compensatoire, décision dont la compétence matérielle relève d’ailleurs des juridictions sociales.

Cette conclusion n’est pas ébranlée par le jugement, prémentionné, du tribunal administratif du 7 mai 2019, dont se prévaut le demandeur, alors que les faits d’espèce ne sont pas comparables à ceux à la base dudit jugement dans la mesure où dans cette affaire, l’ADEM, respectivement son directeur avaient effectivement fixé le quantum de l’indemnité 5 Trib. adm., 18 septembre 2019, n° 41352a du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu.

6 Idem.

7 Article L.552-3. du Code du Travail : « Les décisions de la Commission mixte sont susceptibles d’un recours devant le Conseil arbitral de la sécurité sociale dans un délai de quarante jours à partir de la notification de la décision. Les articles 454 et 455 du Code de la sécurité sociale sont applicables. ».

8 Trib. adm., 18 septembre 2019, n° 41352a du rôle, précité.

6compensatoire de reclassement professionnel, respectivement avaient refusé une rectification du calcul de ladite indemnité, ce qui avait amené le tribunal à se déclarer compétent ratione materiae pour avoir été saisi d’un recours contre des décisions administratives faisant grief.

Force est, par ailleurs, de constater que dans cette même affaire, le tribunal avait également déclaré irrecevable le volet du recours dirigé contre les décomptes de l’ADEM reprenant le montant à payer à l’intéressé en tant qu’indemnité compensatoire pour ne pas porter sur des décisions administratives de nature à faire grief par elles-mêmes. Le moyen afférent du demandeur est dès lors rejeté.

Il s’ensuit que le volet du recours en ce qu’il est dirigé contre le « Décompte de l’indemnité compensatoire Abrëll 2019 » établi par l’ADEM est irrecevable.

En ce qui concerne ensuite le volet du recours dirigé contre la « décision implicite de refus de l’Agence pour le Développement de l’Emploi, suite au recours gracieux contre une décision de celle-ci de déduire la gratification, perçue en avril 2019, de l’indemnité compensatoire versée pour le même mois », il échet de relever que dans la mesure où il a été retenu ci-avant que le décompte de l’indemnité compensatoire pour le mois d’avril 2019 établi par l’ADEM n’est pas une décision administrative susceptible de recours, mais une simple mesure d’exécution d’une décision prise en amont par la Commission mixte, le courrier du 9 avril 2020 introduit contre ledit décompte ne saurait a fortiori être qualifié de recours gracieux adressé à l’autorité compétente au sens de l’article 13, paragraphe (2) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.

Il s’ensuit également qu’il n’existe en l’espèce pas de « décision implicite de refus » telle que qualifiée par le demandeur, qui serait intervenue suite au silence gardé par l’ADEM pendant plus de trois mois suite au « recours gracieux » qualifié en tant que tel et introduit le 9 avril 2020 contre une prétendue décision de l’ADEM « de déduire la gratification, perçue en avril 2019, de l’indemnité compensatoire versée pour le même mois ».

Par conséquent, le volet du recours en ce qu’il dirigé contre la « décision implicite de refus de l’Agence pour le Développement de l’Emploi, suite au recours gracieux contre une décision de celle-ci de déduire la gratification, perçue en avril 2019, de l’indemnité compensatoire versée pour le même mois » est à son tour à déclarer irrecevable.

Au vu de l’issu du litige, la demande non autrement sous-tendue par une disposition légale en condamnation de l’ADEM à une indemnité de procédure d’un montant de 2.000.-

euros est rejetée.

Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours principal en réformation, sinon subsidiaire en annulation irrecevable dans ses deux volets ;

rejette la demande en condamnation d’une indemnité de procédure telle que formulée par le demandeur ;

rejette la demande en communication du dossier administratif ;

7condamne le demandeur aux frais et dépens.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 5 juillet 2022 par :

Thessy Kuborn, vice-président, Géraldine Anelli, premier juge, Alexandra Bochet, juge, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 5 juillet 2022 Le greffier du tribunal administratif 8


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 44820
Date de la décision : 05/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2022-07-05;44820 ?

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